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Insulinothérapie dans le diabète type 2

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Page 1: Insulinothérapie dans le diabète type 2

Pour la pratique

Médecine des maladies Métaboliques - Septembre 2007 - Vol. 1 - N°3

59

Correspondance :

Agnès Hartemann-HeurtierService de diabétologie-métabolismeGroupe Hospitalier Pitié-Salpêtrière47-83, bd de l’Hôpital75651 Paris cedex [email protected]

S elon les dernières recommanda-

tions pour le traitement du dia-

bétique de type 2, l’insuline doit

être introduite lorsque le taux d’HbA1c

dépasse 7 %, après six mois de traite-

ment par metformine et insulino-sécré-

teurs à la dose optimale. Mais à cette

étape de la décision thérapeutique, s’of-

fre aussi la possibilité d’introduire une tri-

thérapie en associant une glitazone à la

place de l’insuline. Comment choisir ?

Insuline ou trithérapie ?

Une étude chez des patients de type 2

mal équilibrés sous bithérapie (sulfami-

des hypoglycémiants + metformine) a

comparé le rajout d’une glitazone (rosi-

glitazone) à l’introduction de l’analogue

lent de l’insuline, glargine, au coucher.

Cette étude a montré que l’efficacité

de ces deux modalités thérapeutiques

était comparable : l’HbA1c moyenne

est identique dans les deux groupes

et 50 % des patients sont parvenus à

obtenir une HbA1c inférieure à 7 % [1].

Alors comment choisir entre trithérapie

ou insuline ?

Lorsque le patient présente des contre-

indications à un traitement par glitazone

ou bien lorsqu’il refuse catégorique-

ment l’insuline, le choix est relativement

simple. Sinon, il faut envisager avec le

patient les avantages et les inconvénients

de chacun de ces traitements. L’insuline

au coucher a des effets secondaires pré-

visibles et peu délétères (hypoglycémies,

prise de poids prévisible et atteignant

un plateau). Si elle est insuffisamment

efficace, on pourra passer à un schéma

à multi-injections. Son seul inconvé-

nient, finalement, est l’obligation pour

le patient de « se piquer ». Par contre,

pour les glitazones, les choses sont

moins simples. Les avantages sont leur

simplicité d’administration (un comprimé

à la place d’une injection) et une réponse

hypoglycémiante parfois spectaculaire et

durable. Mais les inconvénients sont une

réponse imprévisible (jusqu’à 30 % de

« non-répondeurs »), une prise de poids

parfois massive et ininterrompue dans

le temps, le risque de rétention hydro-

sodée (chez 5 à 30 % des patients), et

en cas de réponse insuffisante en terme

d’HbA1c, la nécessité d’introduire une

insulinothérapie, aggravant le risque

d’œdème des membres inférieurs et de

prise de poids.

On peut donc essayer une glitazone

en l’absence de contre-indication à la

trithérapie, mais il faut revoir le patient

rapidement pour en évaluer l’efficacité

et la tolérance, et renforcer la prise en

charge diététique.

L’insuline dans le diabète de type 2 : ce qu’il ne faut pas faire !

L’insulinothérapie dans le diabète de

type 2 ne vise pas à reproduire, comme

dans le diabète de type 1, l’insulinosécré-

tion physiologique. Elle a un objectif très

différent : freiner la production hépatique

de glucose en fin de nuit et, si nécessaire,

en période postprandiale. Pour cela, il

est souvent nécessaire d’avoir recours à

des doses massives d’insuline. En effet,

le tissu adipeux est beaucoup plus sen-

sible à l’insuline que le tissu hépatique.

En utilisant des doses trop faibles d’in-

suline, on favorise donc le stockage des

graisses et la prise de poids, sans freiner

efficacement la néoglucogenèse hépati-

que. Dans ce cas, le patient revient au

Insulinothérapie dans le diabète de type 2

A. Hartemann-HeurtierService de diabétologie-métabolisme, Groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, AP-HP, Paris.

© 2007 - Elsevier Masson SAS - Tous droits réservés.

L’insulinothérapie chez le patient diabétique de type 2 a fait l’objet de nombreuses études, mais bien peu cherchent à répondre à la question posée par le clinicien : « quel est le schéma insulinique qui conci-lie au mieux efficacité glycémique (obtenir un taux d’HbA1c < 7 %) et qualité de vie (le moins possible d’injections) ? ». L’intensification progressive de l’insulinothérapie, imposée par l’histoire naturelle du diabète de type 2, devrait être gérée en collant à la physiopathologie : une insuline, un horaire, un objectif !

Page 2: Insulinothérapie dans le diabète type 2

Médecine des maladies Métaboliques - Septembre 2007 - Vol. 1 - N°3

60 Pour la pratiquePour la pratique

bout de quelques mois avec une HbA1c

à peine améliorée, la prise de quelques

kilos et le message suivant : « L’insuline

ça ne marche pas et en plus ça fait gros-

sir ! ». Comment, dans ces conditions, le

convaincre d’augmenter la dose !

Cette pratique inefficace de l’insulino-

thérapie vient du fait que les prescrip-

teurs, pour diminuer l’image négative et

les inconvénients de l’insuline, ont ten-

dance à minimiser les doses, à limiter le

nombre d’injections (« un peu de NPH ou

de Premix 30 matin et soir »…), et à ne

pas aider le patient à obtenir un objectif

glycémique bas (« 12 unités matin et soir

de Premix 30 »…). Or, si l’on veut que

l’insuline soit efficace, il faut faire exac-

tement le contraire : fixer au patient, pour

chaque injection d’insuline, un objectif

glycémique précis, bas, et monter rapi-

dement les doses jusqu’à ce que cet

objectif soit atteint. C’est ce que l’on

appelle la titration de l’insuline.

La mise en place de l’insuline dans le

diabète de type 2 nécessite aussi une

collaboration serrée entre le patient et les

soignants jusqu’à ce que l’objectif gly-

cémique soit atteint. En effet, le patient

laissé seul avec son objectif glycémique

ne va pas facilement titrer seul son insu-

line. Le fait de monter les doses peut lui

paraître « risqué », et une dose d’insu-

line élevée est souvent vécue comme

un diabète plus grave. Ainsi, une étude

récente [2] cumule tous ces défauts de

la mise à l’insuline dans le diabète de

type 2. Elle veut comparer un schéma

avec 2 mélanges par jour à un schéma

avec 3 mélanges par jour, ne fixe pas

d’objectif précis pour chaque insuline,

et on « autorise » simplement le patient

à ajuster ses doses pour obtenir entre

1,00 et 1,40 g/l de glycémie. Le résultat

est un échec dans les deux groupes, le

taux d’HbA1c à la fin de l’étude est à

8,35 % et 8,67 %.

L’insuline au coucher ou insuline « bedtime »

La première étape de l’insulinothérapie

du diabète de type 2 consiste en une

injection d’insuline intermédiaire ou lente

au moment du coucher. L’objectif est de

ramener la glycémie à jeun aux alentours

de 1,1 g/l. L’idée est de permettre au

patient de retrouver le profil glycémique

qu’il avait lorsque son HbA1c était encore

inférieure à 7 % (figure 1). Mais nous

allons voir que si cela marche pour la

moitié des patients environ, pour l’autre

moitié, une seule injection au coucher

s’avère insuffisante pour retrouver ce

« profil glycémique idéal ».

Quelle insuline utiliser ?Une étude a comparé l’insuline NPH et

l’analogue de l’insuline glargine chez

756 diabétiques de type 2, traités pen-

dant 6 mois, et ayant au départ un taux

d’HbA1c moyen de 8,6 % [3]. Cette étude

a montré que l’insuline NPH était aussi

efficace que l’insuline glargine : l’HbA1c

moyenne obtenue à 6 mois est de 7 %

dans les deux groupes. Environ la moitié

des patients de chaque groupe parvien-

nent à obtenir une HbA1c inférieure à

7 %. Le nombre de malaises hypoglycé-

miques sévères a été le même dans les

deux groupes (2 %). Le nombre de malai-

ses hypoglycémiques non sévères a été

un peu plus élevé chez les patients sous

NPH (18 malaises par patient par an ver-

sus 14 malaises par patient par an pour

l’insuline glargine). Mais il était interdit

dans cette étude de diminuer les doses

de sulfamides hypoglycémiants en cas

d’hypoglycémie. Dans une autre étude où

les patients étaient traités uniquement par

metformine, l’insuline NPH ou l’insuline

glargine ont obtenu la même efficacité en

terme d’HbA1c, et après quelques semai-

nes de traitement, le nombre de malaises

hypoglycémiques était comparable dans

les deux groupes [4].

L’analogue de l’insuline détémir a été

comparé à l’insuline NPH dans deux

études. Dans la première étude [5], on a

préconisé une injection d’insuline matin

et soir, ce qui ne correspond pas à l’uti-

lisation habituelle d’une insuline « bed-

time ». Quoi qu’il en soit, le résultat en

terme d’HbA1c est exactement compa-

rable, mais la dose de détémir nécessaire

est une fois et demie plus importante que

la dose de NPH (66 UI/j versus 45 UI/j

en moyenne). En revanche, les patients

sous NPH prennent plus de poids que

ceux sous détémir (2,8 kg versus 1,2 kg

en moyenne). Mais l’augmentation extrê-

mement importante et rapide des doses

a favorisé la survenue de nombreux

malaises hypoglycémiques sous NPH en

début d’étude, expliquant possiblement

la prise de poids plus importante. Dans

la deuxième étude [6], l’insuline NPH

au coucher a été comparée à l’insuline

détémir au coucher et à la détémir au

lever. Le résultat en terme d’HbA1c est

comparable entre les trois schémas. La

dose d’insuline détémir nécessaire le soir

est cette fois-ci identique à celle de la

NPH (0,4 UI/kg/j). De nouveau, on note

une prise de poids moindre sous détémir

que sous NPH lorsque ces insulines sont

administrées au coucher (0,7 kg versus

1,2 kg en moyenne). L’insuline NPH est

cette fois-ci titrée plus progressivement,

mais son profil d’action explique qu’elle

entraîne plus de malaises hypoglycé-

miques (chez 32 % des patients) que

la détémir (chez 16 % des patients). En

revanche, le schéma où l’insuline dété-

mir est administrée le matin implique une

dose plus élevée (0,5 UI/kg/j) et une prise

de poids plus importante (1,2 kg) que le

schéma où la détémir est injectée le soir.

Enfin, la propriété de l’analogue de l’insu-

line détémir observée dans le diabète de

type 1, la reproductibilité inter-journalière

du résultat glycémique, n’est pas retrou-

vée dans cette étude.

Une autre étude, communiquée, mais

non encore publiée [7], a comparé l’ana-

logue de l’insuline glargine au coucher

à une ou deux injections de l’analogue

détémir. Le résultat en terme d’HbA1c

est comparable, mais la prise de poids

Figure 1 : On espère avec l’insuline au cou-cher passer du profil glycémique du diabète déséquilibré (HbA1c > 9 %) au profil glycé-mique du temps où le diabète était bien équilibré (HbA1c < 7 %). (Les courbes ont été tracées à partir des résultats publiés par L. Monnier et al., Diabetes Care 2007 [8]).

Page 3: Insulinothérapie dans le diabète type 2

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Médecine des maladies Métaboliques - Septembre 2007 - Vol. 1 - N°3

Insulinothérapie dans le diabète de type 2

sous détémir est moindre (différence de

900 gr en moyenne). Cependant, 55 %

des patients ont besoin de deux injec-

tions de détémir (0,85 UI/kg/jour) pour

obtenir un résultat comparable à une

seule injection de glargine (0,4 UI/kg/j),

mais on observe toujours une différence

de poids en faveur de la détémir (qui

n’est plus alors que de 200 gr…).

On peut donc conclure de ces études

que :

1°) l’insuline NPH administrée au

moment du coucher est aussi efficace

que les analogues de l’insuline glargine

ou détémir ;

2°) le risque de malaise hypoglycémique

est moindre sous insuline glargine ou

sous insuline détémir, mais il est de toute

façon inévitable avec les trois insulines

dès lors qu’on les titre correctement ;

3°) la prise de poids est moindre sous

détémir, mais cette différence n’est pas

spectaculaire (entre 300 et 900 gr en

moins) ;

4°) la dose nécessaire de détémir peut

être plus importante que celle de glargine

ou de NPH.

Dans la mesure où le coût de la NPH est

deux fois moindre que celui de la détémir

ou de la glargine, on peut proposer de

manière pragmatique de commencer par

l’insuline NPH, et de diminuer la dose

de sulfamides hypoglycémiants en cas

d’hypoglycémie. En cas d’impossibilité

d’obtenir une glycémie à jeun autour de

1,10 g/l en raison d’un risque persis-

tant d’hypoglycémie nocturne, on peut

essayer de réduire ce risque en utilisant

les analogues de l’insuline glargine ou

détémir.

Comment gérer l’insuline au coucher ?Quelle que soit l’insuline choisie, il faut

fixer un objectif glycémique strict au

patient et lui donner les moyens de l’at-

teindre.

L’objectif glycémique raisonnable est

d’obtenir une glycémie à jeun aux alen-

tours de 1,10 g/l. On peut débuter l’insu-

linothérapie avec une dose de 0,2 UI/kg,

mais il faudra surtout l’augmenter très

rapidement. On peut proposer une aug-

mentation de 2 à 6 unités tous les 3 jours

en fonction de la glycémie au réveil. Il

faut remettre un schéma au patient et

surtout l’encadrer pendant cette titra-

tion, en le revoyant fréquemment ou en

le contactant par téléphone ou fax. Il faut

aussi prévenir à l’avance le patient que la

dose d’insuline efficace sera beaucoup

plus élevée que celle du départ (de 0,4

à 0,8 UI/kg, voire plus).

Et en cas d’inefficacité de l’insuline au coucher ?

La plupart des études publiées visant

à évaluer l’intérêt de tel ou tel schéma

insulinique sont financées par l’industrie

pharmaceutique. Ces études font appel

à un « design » qui, dans la plupart des

cas, désavantage délibérément l’insuline

du concurrent commercial (en arrêtant

par exemple les antidiabétiques oraux,

alors qu’il s’agit d’une insuline bedtime),

ou elles évaluent une alternative qui ne

se pose pas en clinique (comparer trois

injections d’une insuline rapide sans

insuline lente, à une injection de lente

sans rapide…). En conséquence de quoi,

presque toutes ces études sont inutilisa-

bles pour répondre à la question que se

posent les cliniciens : quel est le schéma

insulinique qui concilie au mieux effica-

cité glycémique (obtenir un taux d’HbA1c

< 7 %) et qualité de vie (le moins possible

d’injections) ? Ne figureront donc dans la

bibliographie de cette revue que les rares

études permettant de répondre à tout ou

partie de cette question.

La moitié des patients avec une insuline

au coucher bien gérée (titrée rapide-

ment et efficacement) n’atteignent pas

une HbA1c à moins de 7 %. Cela est

lié au fait que, malgré une glycémie à

jeun nettement améliorée, le profil gly-

cémique de ces patients n’est pas celui

du début du diabète. La glycémie post-

prandiale de chacun des trois repas n’est

plus suffisamment contrôlée par l’insu-

line endogène et le patient se retrouve

avec une glycémie croissante jusqu’au

soir (figure 2) [8]. Il est alors nécessaire

d’associer à l’insuline au coucher, une

ou plusieurs injections d’insuline rapide

pour contrôler l’hyperglycémie diurne.

Le schéma dit « basal-bolus »Ce schéma doit être adapté au cas par

cas de manière pragmatique. On choi-

sit en fonction du profil glycémique du

patient, de rajouter une insuline rapide

au moment du petit déjeuner ou du dîner,

voire des deux, puis du repas de midi.

L’objectif glycémique est d’obtenir une

glycémie inférieure à 1,20 g/l, 4 heures

après le repas (par exemple, c’est la

glycémie que doit avoir le patient à midi

lorsqu’il s’est injecté une insuline rapide

au petit déjeuner) ou bien d’obtenir une

glycémie inférieure à 1,40 g/l deux heu-

res après le repas (ce peut être l’objectif

à obtenir au moment du coucher si le

patient a dîné vers 20 heures).

Quelle insuline choisir ? Très peu d’étu-

des ont évalué l’intérêt des analogues

rapides de l’insuline par rapport à l’in-

suline rapide humaine dans le diabète

de type 2. Une étude a comparé l’insu-

line Actrapid® à l’analogue de l’insuline

asparte, et montré une différence de

0,2 % du taux d’HbA1c en faveur de l’as-

parte [9]. Une autre étude a comparé la

glulisine à l’insuline rapide humaine [10] :

on observe alors une différence significa-

tive de 0,16 % de l’HbA1c entre les deux

groupes. Il semble donc bien que les

analogues rapides de l’insuline puissent

avoir un avantage sur l’insuline rapide

humaine classique, mais le bénéfice

en terme d’HbA1c reste extrêmement

modeste. Cela est sans doute lié au fait

Figure 2 : Même avec une insuline bedtime bien titrée, le profil glycémique « idéal » n’est pas atteint (d’après H. Yki-Jarvinen et al., Diabetologia 2006 [4]).

Page 4: Insulinothérapie dans le diabète type 2

Médecine des maladies Métaboliques - Septembre 2007 - Vol. 1 - N°3

62 Pour la pratiquePour la pratique

que l’hyperglycémie postprandiale dans

le diabète de type 2, peut être prolongée

jusqu’à 6 à 8 heures après le repas. On

peut dans ces conditions imaginer qu’il

puisse y avoir un échappement à l’action

des analogues rapides.

En conclusion, il ne semble pas que la

nature de l’insuline rapide utilisée ait une

grande importance. En revanche, à nou-

veau, il faut fixer un objectif glycémique

précis au patient et l’aider à l’atteindre en

titrant correctement son insuline rapide

avant le repas. Cette titration pour être

efficace devrait tenir compte de son taux

de glycémie pré-prandiale.

Et pourquoi pas des « mélanges » ?Lorsque l’on passe à un schéma insu-

linique comportant une injection d’in-

suline lente au coucher et une injection

d’insuline rapide avant le dîner, on est

tenté, pour limiter le nombre d’injections,

de passer à un mélange avant le dîner.

Aucune étude n’a comparé l’efficacité de

ces deux stratégies thérapeutiques. Mais

en s’appuyant sur une étude utilisant

l’insuline biphasique asparte 70/30 au

moment du dîner [11], on peut voir que,

dans ces conditions, seulement 41 %

des patients obtiennent une HbA1c infé-

rieure à 7 %, soit un résultat moins bon

qu’avec une insuline bedtime seule (où

53 à 70 % des patients obtiennent une

HbA1c < 7 %) ! Cela peut se comprendre

en raison de l’absence de souplesse du

« mélange tout fait » qui entraîne, lorsque

l’on veut contrôler correctement la glycé-

mie du réveil, une augmentation exces-

sive de l’insuline rapide du dîner, même

si le patient n’en a pas besoin. Et inverse-

ment, si le patient a besoin de beaucoup

d’insuline rapide au dîner, le « mélange

tout fait » entraîne une augmentation

parallèle de son insuline intermédiaire,

augmentant le risque d’hypoglycémies

nocturnes. On peut donc penser que si le

mélange au dîner est moins efficace que

la seule insuline intermédiaire au coucher

bien titrée, l’association d’une insuline

rapide au dîner et d’une insuline lente

au coucher devrait permettre d’obtenir

un bien meilleur résultat qu’un mélange

au moment du dîner.

L’étude dont nous venons de parler, dite

« 1-2-3 » (The 1-2-3 study) [11], avait pour

but d’évaluer l’efficacité d’une stratégie

consistant en l’utilisation progressive du

même mélange matin, midi et soir (bipha-

sique asparte 70/30). Cette étude com-

porte peu de patients (100 patients, dont

26 vont interrompre l’étude en cours de

route) et pas de groupe contrôle. Parmi

les 75 patients poursuivant l’étude, 77 %

parviennent à obtenir un taux d’HbA1c

inférieur à 7 % en fin d’étude, ce résul-

tat étant obtenu en augmentant le nom-

bre d’injections journalières (41 % avec

une seule injection au dîner, 70 % avec

deux injections journalières et 77 % avec

trois injections journalières). Lorsque les

objectifs glycémiques sont atteints, le

patient injecte son mélange à dose fixe,

comme pour une insuline bedtime. On ne

demande pas au patient de moduler sa

dose d’insuline en fonction de sa glycé-

mie avant de manger, ni en fonction de

la composition des repas, mais de viser

une glycémie basse en fin d’après midi

ou en fin de nuit. Il s’ensuit un nombre

important de malaises hypoglycémiques

(jusqu’à 22 par patient par an) et un nom-

bre d’hypoglycémies sévères extrême-

ment élevé (un patient sur 10 concerné).

Cela est sans doute lié à l’impossibilité

pour le patient de moduler sa dose en

fonction d’un algorithme.

Une étude non encore publiée, l’étude

PREFER [12], a comparé l’analogue de

l’insuline biphasique asparte 70/30 matin

et soir à un schéma basal-bolus com-

portant de l’insuline détémir au coucher

associée à de l’asparte, sur un, deux

ou trois repas. Le schéma basal-bolus

permet d’obtenir une HbA1c inférieure

à 7 % chez 60 % des patients, tandis

que les deux mélanges ne permettent

d’obtenir ce résultat que chez 50 % des

patients. Il serait intéressant de connaître

le nombre de malaises hypoglycémiques

dans cette étude.

Finalement, une seule étude publiée [13]

a comparé un schéma avec un mélange à

chaque repas (avec 50 à 70 % d’asparte

avant le petit-déjeuner et le repas de midi

et 30 % au dîner) à un schéma basal-

bolus associant de la NPH au coucher et

un analogue de l’insuline, asparte, avant

chaque repas. Le résultat est compara-

ble en termes d’HbA1c (7,8 % dans cha-

que groupe) et de fréquence des hypo-

glycémies. Les conclusions de l’étude

sont donc qu’un schéma à 3 mélanges

est aussi efficace qu’un schéma basal-

bolus à 4 injections. Mais cette étude

qui, pour une fois, cherchait à répondre

à une question pertinente nous laisse

sur notre faim. En effet, le seul intérêt

d’imposer au patient deux injections le

soir (rapide au dîner + NPH au coucher),

plutôt qu’un seul mélange au dîner, est

de pouvoir optimiser l’action des deux

insulines. Or dans cette étude, la dose

de NPH n’a pas été correctement titrée

et la glycémie moyenne est à 1,40 g/l au

réveil. Si l’on avait obtenu 1,10 g/l de gly-

cémie au réveil, comme dans la plupart

des études utilisant la NPH au coucher,

une différence en terme d’HbA1c serait

peut-être apparue… Par ailleurs, sur la

période diurne, on voit dans cette étude,

que les glycémies de fin de matinée et de

fin d’après-midi sont strictement identi-

ques, que l’on utilise pour les repas un

• L’insulinothérapie dans le diabète de type 2 doit être débutée lorsque l’HbA1c dépasse

7 % malgré une utilisation optimale des antidiabétiques oraux.

• Son schéma initial comporte une insuline intermédiaire ou lente au moment du cou-

cher (elles ont toutes la même efficacité), qui doit être titrée rapidement pour obtenir

une glycémie à jeun inférieure à 1,10 g/l.

• Le patient doit être accompagné dans cette titration, et prévenu que la dose néces-

saire finale peut être élevée (0,8 à 1 unités/kg de poids/j).

• Aucune étude indépendante n’a validé correctement un schéma intensifié d’insuli-

nothérapie.

• Lorsque l’HbA1c dépasse 8 % malgré une insuline au coucher optimisée, la phy-

siopathologie du diabète de type 2 suggère d’ajouter une insuline rapide lors d’un ou

plusieurs des trois repas afin de contrôler l’hyperglycémie postprandiale.

• Le patient doit apprendre à titrer chaque insuline, pour chaque horaire, avec un

objectif glycémique précis.

Les points essentiels

Page 5: Insulinothérapie dans le diabète type 2

63

Médecine des maladies Métaboliques - Septembre 2007 - Vol. 1 - N°3

Insulinothérapie dans le diabète de type 2

mélange d’insuline ou une insuline d’ac-

tion rapide seule. L’intérêt d’utiliser un

mélange plutôt qu’une insuline rapide

seules au moment du petit déjeuner et

du repas de midi n’a donc pas de raison

théorique, mais ne fait pas non plus sa

preuve en pratique.

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aspart 70/30 (The 1-2-3 study). Diabetes Obes

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study: both biphasic insulin aspart 30 twice-daily

and basal-bolus using insulin detemir and insu-

lin aspart enabled patients with type 2 diabetes

to achieve HbA1c target < 7.0%. Diabetologia

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[13] Ligthelm RJ, Mouritzen U, Lynggaard H, et al.

Biphasic insulin aspart given thrice daily is as effi-

cacious as a basal-bolus insulin regimen with four

daily injections: a randomised open-label parallel

group four months comparison in patients with

type 2 diabetes. Exp Clin Endocrinol Diabetes

2006;114:511-9.

L’insulinothérapie dans le diabète de

type 2, lorsqu’elle vise à obtenir un

équilibre glycémique optimal, doit

comporter des insulines adaptées,

ayant chacune un objectif glycémi-

que indépendant et clairement défini.

Cette stratégie (« une insuline pour une

cible ») peut être efficace si les insuli-

nes sont correctement titrées, et si le

patient est accompagné dans cette

titration.

Conclusion