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ANNEE - 4651 15 MARS 1969 IRIBIJnlJI HEBDOMADAIRE JUDICIAIRE Edmond Picard 1882 - 1899 Léon Bennebleq 1900 - 1940 Charles Van Reepingben lJ.W • 1966 ' a Le droit l'épreuve administratif de la doctrine Le professeur Maurice-André Flamme avait accepté de consacrer une notice bibliographique au dernier ouvrage de Me Cyr Cambier. Cette notice s'est -muée, et on le conçoit, en une étude à ce point substantielle et originale qu'il nous a paru convenable publier en bonne place. 1. - L'organisation !'Administration (étatique, locale ou « spécialisée "), ses modes et ses moyens d'action (actes unilatéraux et contrats; agents, patrimoine et pouvoirs de police) puis les contrôles que cette action appelle, tel est le plan, simple et lucide, qu'adopte pour ainsi dire naturellement Cyr Cambier dans les quelque 600 pages d'un Précis (*) qui, s'ajoutant aux manuels de Vau- thier, Wigny, Buttgenbach, Mast et Dembour, complète heureusement une équipe de publi- cistes belges déjà prestigieuse. On ne présente pas Cyr Cambier... Depuis plus de vingt ans il réussit la gageure d'assu- mer atJ bàrreau des tâches professionnelles écrasantes et simultanément de consacrer à l'enseignement et à la recherche scientifique un temps a priori... introuvable mais dont les fruits sont bien là, - en chair et en os, qui découragent maints épigones. Qu'il s'agisse de la « Responsabilité de la puissance publique et de ses agents » (1947) (1) - qui valut à son auteur le titre envié d'agrégé de l'enseignement supérieur - des innombrables études consacrées au contrôle juridictionnel de l'Administration (2) dans les années qui · suivirent la création du Conseil d'Etat, et enfin du magistral ouvrage consacré aux « Principes du contentieux administratif » (1961-1964), combien de témoignages irréfu- tables d'une pensée créatrice inlassable au service du droit ou, mieux encore, de la Justice! Ayant suivi personnellement et souvent orienté, voire déterminé l'évolution de la (*) «Droit administratif-» (Précis de la Faculté de droit de l'Université catholique de Louvain), 624 pa- ges, 850 FB; Maison Larcier, Bruxelles. (1) Ouvrage complété, en 1958, mais en langue néerlandaise cette fois « Aansprakelijkheid van de openbare besturen », Adm. Lex. (2) Notamment: - « L'annulation pour excès de pouvoir devant le Conseil d'Etat » (1951); - ·« Le pouvoir discrétionnaire et le contrôle de la légalité» (J. T., 1952, pp. 633 et s.); - « Le Conseil d'Etat et le ·contrôle de l'observation des formes légales>> (J. T., 1953, pp. 369 et s., et 391 et S.); - « Le contrôle de la légalité . interne des actes de !'Administration» (J. T., 1955, pp. 49 et s:, et 69 et s.). jurisprudence, Cyr Cambier était mieux placé que quiconque pour en restituer l'esprit et les tendances, sans jamais négliger de la con- fronter avec les réalités du droit positif. * '* * 2. - Qu'est-ce que le droit administratif ? Peut-on à son sujet parler d'autonomie? telles sont les questions, quasi obligatoires, que se pose d'emblée l'auteur. Carrefour et non enclos, le droit admini- stratif offre un domaine aux limites imprécises et fuyantes : d'une part l'organisation admini- strative - qui, loin de se rencontrer exclusi- vement dans l'orbite « du pouvoir exécutif et des administrations et services publics . qui en dépendent» (3), empiète sur les sphères du législatif et du judiciaire (pp. 9 et s., 22, 37, 3 79), - d'autre part la fonction administra- tive, c'est-à-dire l'édiction non seulement de mesùres particulières et concrètes destinées à satisfaire des besoins , commandés par l'intérêt général mais aussi de dispositions générales et abstraites, de caractère réglementaire, l'une et l'autre tâche ayant en commun de demeurer « subordonnées », instruments au service du pouvoir (4) (pp. 8 et 73). Mais peut-on parler d' « autonomie » du droit administratif belge ? Tout en soulignant - non sans raison - les différences d'éclairage avec la solution française, l'auteur nous paraît plus enclin que naguère (5) à admettre l'originalité du droit applicable à l'administration, cette originalité découlant de la nécessité d'adapter le droit commun - c'est-à-dire le droit privé - aux exigences de la chose publique, la prévalence du judiciaire et celle d'un droit commun de- meurant impuissantes à nier l'existence de besoins spécifiques qui appellent des solutions nuancées (pp. 11, 15 et 231). * ** (3) A. Buttgenbach, Manuel de droit administratif, 3 8 éd., 1. (4) Comp. Jean Petot, «Quelques remarques sur les notions fondamentales du droit administratif fran- çais» (R. D. P., 1966, pp. 391 et s.). (5) Voy. le compte rendu, par Paul Visscher, (R. J. D. A., 1961, pp. 156 et s.), du premier tome des « Principes du contentieux administratif>>. EDITEURS : MAISON FERD. LARCIER. S. A. 39. rue des Minime1 BRUXELLES l 3. - A tout seigneur tout honneur, c'est par !'Administration générale, dont l'organi- sation revient au Roi (Const., art. 65 et 66), que s'ouvre la partie proprement descriptive du Précis et, d'emblée, voici en 3 pages (24 à 27) un raccourci saisissant sur la formation et les caractéristiques de ces ministères qui, cinq au départ, plus de vingt aujourd'hui, « se font, se défont et se scindent » au gré des coalitions et des dosages régionaux ou linguistiques. Dès ces premières pages,. une remarque s'im- pose de toute évidence : l'étudiant qui négli- gerait de lire les notes risquerait de sérieux mécomptes tant elles sont riches de « substan- tifique moëlle » qui eût souvent mérité de trouver place dans le corps même de l'exposé. Ainsi, par exemple, de l'observation (p. 26) que la personnification - administrative et budgétaire - des ministères «n'est qu'un simple procédé technique », dès lors conci- liable avec l'unicité de la personnalité juridi- que de l'Etat (6). En revanche, dire qu'il n'y a « point de compensation entre créances et dettes à l'égard de départements distincts » (7) nous paraît un peu court. On sait que, né en matière fiscale (8), le - principe selon lequel la compensation ne peut être opposée à !'Administration (9) a été con- sacré en termes catégoriques - « ..• cette matière, étrangère au droit privé (10), appar- tient en principe au droit public » - par un arrêt de la Cour de cassation du 28 novem- bre 1923 (Pas., 1924, I, 52) qui se fonde essen- tiellement sur l'individualité budgétaire de chaque département. Or, la matière nous paraît dominée par un autr· principe, exclut la compensation du moins quand elle est opposée par le parti- culier - mêm.e" lorsqu'un seul département est en cause, à· savoir le « caractère discré- tionnaire de l'acte d'ordonna:qcement "• carac- tère absolument inconciliable avec la procé- dure indirecte d'exécution forcée à laquelle aboutit nécessairement toute compensation (11). (6) Voy. à ce sujet, Brux., 16 déc. 1922, R. A., 1924, p. 83. (7) P. 27, note 1. (8) Et ce, semble-t-il, déjà en droit romain (De Brouckère et Tielemans, Répertoire, Compensation, p. 177). (9) L'arrêt commune de Tamines (C.E., janv. 1957, R. J. D. A., 256) ne contredit nullement ce prin- cipe en décidant que « les articles 1290 et suivants du Code cviil s'appliquent aux _personnes publiques », puis- qu'en l'espèce les parties en présence - une commune et une province - étaient toutes deux des personnes publiques et que, dès lors, aucune considération de distinction ou de préférence entre les personnes qui sont réciproquement débiteur et créancier (voy. De Brouckère et Tielemans; op. cit., p. 175) n'interdisait le jeu de la compensation. (10) Cf. concl. Ganshof van der Meersch avant Cass., 12 déc. 1954, Rev. comm., 1956, p. 80. (11) Voy. Cass. fr., 16 janv. 1956, G. P. I, 258; - C.E. fr., 24 févr. 1961, A. J. D. A., II, 90; - Cass. b., 21 avr. 1966, R. A., 125; - dans le même sens : A. Vanwelkenhuyzen, «La maxime «Nul ne peut se faire justice à soi-même», ses limites et ses ·sanctions en droit belge», R. A., 1967, p. 235.

IRIBIJnlJI - KU Leuven · (8) Et ce, semble-t-il, déjà en droit romain (De Brouckère et Tielemans, Répertoire, v° Compensation, p. 177). (9) L'arrêt commune de Tamines (C.E.,

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Page 1: IRIBIJnlJI - KU Leuven · (8) Et ce, semble-t-il, déjà en droit romain (De Brouckère et Tielemans, Répertoire, v° Compensation, p. 177). (9) L'arrêt commune de Tamines (C.E.,

84~ ANNEE - N° 4651 15 MARS 1969

IRIBIJnlJI HEBDOMADAIRE JUDICIAIRE

Edmond Picard

1882 - 1899

Léon Bennebleq

1900 - 1940

Charles Van Reepingben

lJ.W • 1966

' a Le droit l'épreuve

administratif de la doctrine

Le professeur Maurice-André Flamme avait accepté de consacrer une notice bibliographique au dernier ouvrage de Me Cyr Cambier.

Cette notice s'est -muée, et on le conçoit, en une étude à ce point substantielle et originale qu'il nous a paru convenable ~la publier en bonne place.

1. - L'organisation de~ !'Administration (étatique, locale ou « spécialisée "), ses modes et ses moyens d'action (actes unilatéraux et contrats; agents, patrimoine et pouvoirs de police) puis les contrôles que cette action appelle, tel est le plan, simple et lucide, qu'adopte pour ainsi dire naturellement Cyr Cambier dans les quelque 600 pages d'un Précis (*) qui, s'ajoutant aux manuels de Vau­thier, Wigny, Buttgenbach, Mast et Dembour, complète heureusement une équipe de publi­cistes belges déjà prestigieuse.

On ne présente pas Cyr Cambier ... Depuis plus de vingt ans il réussit la gageure d'assu­mer atJ bàrreau des tâches professionnelles écrasantes et simultanément de consacrer à l'enseignement et à la recherche scientifique un temps a priori... introuvable mais dont les fruits sont bien là, - en chair et en os, qui découragent maints épigones.

Qu'il s'agisse de la « Responsabilité de la puissance publique et de ses agents » (1947) (1) - qui valut à son auteur le titre envié d'agrégé de l'enseignement supérieur - des innombrables études consacrées au contrôle juridictionnel de l' Administration (2) dans les années qui · suivirent la création du Conseil d'Etat, et enfin du magistral ouvrage consacré aux « Principes du contentieux administratif » (1961-1964), combien de témoignages irréfu­tables d'une pensée créatrice inlassable au service du droit ou, mieux encore, de la Justice!

Ayant suivi personnellement et souvent orienté, voire déterminé l'évolution de la

(*) «Droit administratif-» (Précis de la Faculté de droit de l'Université catholique de Louvain), 624 pa­ges, 850 FB; Maison Larcier, Bruxelles.

(1) Ouvrage complété, en 1958, mais en langue néerlandaise cette fois « Aansprakelijkheid van de openbare besturen », Adm. Lex.

(2) Notamment: - « L'annulation pour excès de pouvoir devant le

Conseil d'Etat » (1951); - · « Le pouvoir discrétionnaire et le contrôle de la

légalité» (J. T., 1952, pp. 633 et s.); - « Le Conseil d'Etat et le ·contrôle de l'observation

des formes légales>> (J. T., 1953, pp. 369 et s., et 391 et S.);

- « Le contrôle de la légalité . interne des actes de !'Administration» (J. T., 1955, pp. 49 et s:, et 69 et s.).

jurisprudence, Cyr Cambier était mieux placé que quiconque pour en restituer l'esprit et les tendances, sans jamais négliger de la con­fronter avec les réalités du droit positif.

* '* * 2. - Qu'est-ce que le droit administratif ?

Peut-on à son sujet parler d'autonomie? telles sont les questions, quasi obligatoires, que se pose d'emblée l'auteur.

Carrefour et non enclos, le droit admini­stratif offre un domaine aux limites imprécises et fuyantes : d'une part l'organisation admini­strative - qui, loin de se rencontrer exclusi­vement dans l'orbite « du pouvoir exécutif et des administrations et services publics . qui en dépendent» (3), empiète sur les sphères du législatif et du judiciaire (pp. 9 et s., 22, 37, 3 79), - d'autre part la fonction administra­tive, c'est-à-dire l'édiction non seulement de mesùres particulières et concrètes destinées à satisfaire des besoins , commandés par l'intérêt général mais aussi de dispositions générales et abstraites, de caractère réglementaire, l'une et l'autre tâche ayant en commun de demeurer « subordonnées », instruments au service du pouvoir (4) (pp. 8 et 73).

Mais peut-on parler d' « autonomie » du droit administratif belge ?

Tout en soulignant - non sans raison -les différences d'éclairage avec la solution française, l'auteur nous paraît plus enclin que naguère (5) à admettre l'originalité du droit applicable à l'administration, cette originalité découlant de la nécessité d'adapter le droit commun - c'est-à-dire le droit privé - aux exigences de la chose publique, la prévalence du judiciaire et celle d'un droit commun de­meurant impuissantes à nier l'existence de besoins spécifiques qui appellent des solutions nuancées (pp. 11, 15 et 231).

* **

(3) A. Buttgenbach, Manuel de droit administratif, 38 éd., n° 1.

(4) Comp. Jean Petot, «Quelques remarques sur les notions fondamentales du droit administratif fran­çais» (R. D. P., 1966, pp. 391 et s.).

(5) Voy. le compte rendu, par Paul Visscher, (R. J. D. A., 1961, pp. 156 et s.), du premier tome des « Principes du contentieux administratif>>.

EDITEURS :

MAISON FERD. LARCIER. S. A.

39. rue des Minime1

BRUXELLES l

3. - A tout seigneur tout honneur, c'est par !'Administration générale, dont l'organi­sation revient au Roi (Const., art. 65 et 66), que s'ouvre la partie proprement descriptive du Précis et, d'emblée, voici en 3 pages (24 à 27) un raccourci saisissant sur la formation et les caractéristiques de ces ministères qui, cinq au départ, plus de vingt aujourd'hui, « se font, se défont et se scindent » au gré des coalitions et des dosages régionaux ou linguistiques.

Dès ces premières pages,. une remarque s'im­pose de toute évidence : l'étudiant qui négli­gerait de lire les notes risquerait de sérieux mécomptes tant elles sont riches de « substan­tifique moëlle » qui eût souvent mérité de trouver place dans le corps même de l'exposé.

Ainsi, par exemple, de l'observation (p. 26) que la personnification - administrative et budgétaire - des ministères «n'est qu'un simple procédé technique », dès lors conci­liable avec l'unicité de la personnalité juridi­que de l'Etat (6).

En revanche, dire qu'il n'y a « point de compensation entre créances et dettes à l'égard de départements distincts » (7) nous paraît un peu court.

On sait que, né en matière fiscale (8), le -principe selon lequel la compensation ne peut être opposée à !'Administration (9) a été con­sacré en termes catégoriques - « ..• cette matière, étrangère au droit privé (10), appar­tient en principe au droit public » - par un arrêt de la Cour de cassation du 28 novem­bre 1923 (Pas., 1924, I, 52) qui se fonde essen­tiellement sur l'individualité budgétaire de chaque département.

Or, la matière nous paraît dominée par un autr· principe, q~·:i exclut la compensation du moins quand elle est opposée par le parti­culier - mêm.e" lorsqu'un seul département est en cause, à· savoir le « caractère discré­tionnaire de l'acte d'ordonna:qcement "• carac­tère absolument inconciliable avec la procé­dure indirecte d'exécution forcée à laquelle aboutit nécessairement toute compensation (11).

(6) Voy. à ce sujet, Brux., 16 déc. 1922, R. A., 1924, p. 83.

(7) P. 27, note 1. (8) Et ce, semble-t-il, déjà en droit romain (De

Brouckère et Tielemans, Répertoire, v° Compensation, p. 177).

(9) L'arrêt commune de Tamines (C.E., janv. 1957, R. J. D. A., 256) ne contredit nullement ce prin­cipe en décidant que « les articles 1290 et suivants du Code cviil s'appliquent aux _personnes publiques », puis­qu'en l'espèce les parties en présence - une commune et une province - étaient toutes deux des personnes publiques et que, dès lors, aucune considération de distinction ou de préférence entre les personnes qui sont réciproquement débiteur et créancier (voy. De Brouckère et Tielemans; op. cit., p. 175) n'interdisait le jeu de la compensation.

(10) Cf. concl. Ganshof van der Meersch avant Cass., 12 déc. 1954, Rev. comm., 1956, p. 80.

(11) Voy. Cass. fr., 16 janv. 1956, G. P. I, 258; -C.E. fr., 24 févr. 1961, A. J. D. A., II, 90; - Cass. b., 21 avr. 1966, R. A., 125; - dans le même sens : A. Vanwelkenhuyzen, «La maxime «Nul ne peut se faire justice à soi-même», ses limites et ses ·sanctions en droit belge», R. A., 1967, p. 235.

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4. - Mais les « services généraux > sont loin d'être toute 1' Administration de l'Etat.

Celle-ci comporte également :

a) des services spéciaux qui ont en commun de tenir de la loi - et non plus du Roi -les principes de leur aménagement, c'est­à-dire les services administratifs détachés auprès du judiciaire (ministère public, greffes, parquets), les ,_services de l'ensei­gnement et de la force publique, et même - bien que relevant de l' Administration par un procédé de pure localisation - les ... _juridictions administratives, dont c'est l'occasion pour l'auteur de brosser l'his­toire (12) (pp. 46 à 51) dans l'un de ces tableaux ramassés qui émaillent tout l'ou­vrage avec un rare bonheur dans l'ex­pression.

b) des conseils collatéraux, adjoints à l'en­treprise étatique dont· ils « informent et pondèrent, par la voie de consultations et d'avis, le pouvoir d'action » (p. 52).

Qu'il s'agisse du Conseil d'Etat ou du Comité supérieur de contrôle, l'auteur n'hésite pas à plaider ·pour des réfomes là où elles lui parais­sent s'imposer : c'est ainsi d'une part qu'il conviendrait évidemment de transférer à la section de législatio:q. du Conseil d'Etat la compétence d'émettre un avis sur les questions d'ordre admini~tratif et non litigieuses (?) sou­mises par les ministres, d'autre part que le fonctionnement de la section du contentieux du Comité de contrôle devrait être rendu plus efficace par la communication des avis émis à toutes les parties - et pas seulement, comme c'est le cas, à !'Administration! - voire par la reconnaissance audit Comité d'une compé­tence arbitrale, réforme à laquelle les articles 1004 et 83 du Code de procédure civile ne font plus obstacle depuis l'adoption de la loi du 10 octobre 1967 contenant le Code judi­ciaire (pp. 58 et 277).

Trouvent également leur place dans cette section, la Commission des prix, la Cour des comptes, la Commission permanente de con­trôle linguistique et enfin nombre d'organis­mes - le Conseil du contentieux économique, le Conseil central de l'économie, le Conseil national du travail, le Conseil supérieur des Classes moyennes, etc. - dont la création répond principalement au souci de promouvoir, au niveau de l'administration étatique, la repré­sentation et la défense d'intérêts économiques et sociaux, ainsi associés par la consultation aux responsabilités de la gestion gouverne­mentale (13).

5. - Les institutions communales et pro­vinciales font évidemment l'objet du chapitre suivant, l'un des plus classiques de tout ou­vrage de droit administratif. L'auteur y réussit en quelque cinquante pages à répartir avec clarté les multiples attributions des divers organes des collectivités locales et, chose pré­cieuse, à dégager les grands traits du statut du personnel (pp. 107 et 131).

C'est cependant la section consacrée aux caractéristiques de l'administration locale, par­ticulièrement bien venue, qui retiendra l'at­tention des spécialistes.

Loin d'être réduites au triste sort de simples circonscriptions administratives, les provinces

- et les communes méritent la qualification de quatrième pouvoir, dont l'initiative s'exerce librement - quoique sous certaines allégeances et dans un cadre territorialement restreint -

(12' Leur organisation et leur fonctionnement font l'objet d'un long et important chapitre dans la der­nière partie de l'ouvrage.

(13) On ne saurait assez conseiller, à ce sujet, l'étude pénétrante de Jean Rivero : « Syndicalisme et pouvoir démocratique» in Droit social, 1965, pp. 166 et s.

pour maintenir l'ordre et satiaj:aire les besoins des habitants (p. 72), et ce, sans que la moin­dre séparation des pouvoirs vienne empêcher les autorités locales de cumuler les fonctions normative, exécutive et juridictionnelle.

Certes cet · état d'indépendance est-il seule­ment relatif, subordonné qu'il est à une hié­rarchie des valeurs, des c intérêts » en pré­sence - le législateur appréciant souveraine­ment l'opportunité de soustraire au champ d'action local telle activité que son importance soudain ressentie au plan national commande de promouvoir à la dignité d'intérêt général (14) - et certes le pouvoir de tutelle échu au Roi constitue-t-il un frein efficace, capable de rappeler les collectivités locales au respect de la légalité, voire de faire triompher certains jugements d'opportunité, mais on sènt que l'auteur n'est pas disposé à grossir les rangs des contempteurs de l'autonomie communale et qu'il applaudit avec sympathie (p. 74) -voire avec soulagement - à la véritable réha­bilitation de la réalité socio-juridique que le terme recouvre et à laquelle a donné lieu cèrtain colloque récent (15).

6. - Comment d'ailleurs ce sentiment ne serait-il pas confirmé par l'organisation même des pouvoirs locaux, entités territoriales régies par des organes politiques pour la plupart issus de l'élection directe? (pp. 82 et s.).

, Seuls font exception le gouverneur de pro­vince et le commissaire d'arrondissement, ces mandataires politiques du Roi, véritables « missi dominici » délégués par le pouvoir central.

Le bourgmestre en revanche, quoique nom­mé par le Roi, jouit d'un statut mixte et cumule incontestablement le rôle de représentant du pouvoir central et celui d'organe du pouvoir communal (p. 85). ·

Nous croyons même qu'en l'espèce c'est cette deuxième qualité qui prédomine. L'auteur cite avec raison l'article 56 de la loi commu­nale qui subordonne le pouvoir du Roi de révoquer ou de suspendre les bourgmestres - pour une durée d'au maximum 3 mois -au respect d'une procédure disciplinaire réglée. Or, voici qu'à l'occasion d'une décision royale suspendant un bourgmestre par mesure d'ordre « jusqu'au moment où il aura été statué disci­plinairement sur son cas », le Conseil d'Etat (19 oct. 1967, Derwael, R.J.D.A., 1968, p. 125) a censuré l'exécutif en des termes dépourvus de toute équivoque :

« ••• La loi communale a confié au collège des bourgmestre et échevins et au bourgmestre sèul des attributions très importantes; ils tien­nent leurs pouvoirs de l'élection (16); la situa­tion des bourgmestre et échevins est essentiel­lement différente de celle des agents hiérar­chisés des services publics; la suspension ou la révocation du bourgmestre et des échevin~ a une incidence directe sur la gestion de la commune; ... la lecture des débats à la Cham­bre des représentants en 1834, 1835 et 1836 démontre que la législature attachait le plus grand prix à l'indépendance de nos magistrats communaux ... ; les pouvoirs conférés au Roi par l'article 56 de la loi communale ne peu­vent être étendus en vertu du ·principe c qui peut le plus peut le moins >.

{14) Voy. la loi du 31 déc. 1963 qui confie au R~i l'organisation et l'inspection des services d'incendie, naguère enc~re purement communaux.

(15) Colloque de Huy et Spa (8-11 sept. 1966) sur «L'autonomie communale en droit belge».

(16) Puisque les échevins sont élus par le conseil communal en son sein et que, sauf dans le cas excep­tionnel prévu par l'art. 2, al. 2, de la lof communale - où le choix du Roi est subordonnt à l'avis confor­me de la députation permanente - le bourgmestre est choisi parmi les conseillers communaux.

7. - Mais voici que la multiplication in­cessante - voire la complexité et la technicité croissantes - des tâches assumées exclut la solution, à vrai dire assez simpliste, qui eût consisté à assurer la satisfaction des besoins sociaux exclusivement par l'administration étatique, provinciale ou communale.

Apparaît ainsi et se développe de manière irréversible une nouvelle « Administration en marge des pouvoirs » établis, administration qui se veut plus dynamique et plus efficace et qui est faite tantôt d'organismes détachés des services étatiques par · le procédé de la décentralisation, tantôt de groupements dé­gagés du milieu social par le 'procédé de la fédération.

Abordant le processus de décentralisation par services, sans guère s'embarrasser des discussions doctrinales relatives notamment à la « déconcentration », l'auteur démontre sans peine l'appartenance <lesdits services au droit public (p. 13 6) et adopte pour leur classement - rapproché concrètement de la loi du 16 mars 1954 (17) - le critère traditionnel tiré de la technique de leur constitution : acte unilatéral de c fondation ,. ou procédé de l' « associa­tion».

Nous ne pouvons cependant le suivre quand, négligeant (18) la possession d'une personna­lité juridique distincte comme élément essentiel de la décentralisation (19), il compte parmi les services publics décentralisés ce qu'il appelle les « administrations autonomes » · (20), jouis­sant d'une certaine indépendance de gestion administrative et budgétaire, telles la Régie du travail pénitentiaire et les ... régies commu­nales '--de distribution du gaz, de l'électricité, etc., mais participant incontestablement de !'-administration... centrale du pouvoir public créateur ! En outre, la Régie du travail péni­tentiaire est loin de constituer « la seule admi­nistration autonome au niveau de l'Etat ,. (p. 144) : l'exposé des motifs (21) de la loi du 28 juin 1963 - portant réforme de la comptabilité de l'Etat - cite encore !'Office central des fournitures, la ligne de paquebots Ostende-Douvres; l'administration des Postes, !'Office des chèques postaux, le Moniteur belge, sans compter d'innombrables « services à gestion séparée » tels que certaines exploi­tations agricoles annexées aux établissements d'éducation de l'Etat (à Marneffe, Tournai, etc.) ou encore le domaine d'Hofstade ...

En revanche, nous pouvons admettre l'in­clusion parmi les services c décentralisés » des Régies d'Etat (R.T.T., R.V.A., Fonds des routes) personnalisées, malgré leur soumission au pouvoir hiérarchique du ministre - et donc la totale absence d'autonomie organique (22) - parce qu'en l'espèce, observe finement Jacques Dembour (23), leur gestion est assu­mée par ledit ministre agissant « non pas en qualité d'organe de l'Etat ou du pouvoir exé-

(17) Relative au contrôle de « certains organismès d'intérêt public»; à noter que l' A. R. n° 88 du 11 nov. 1967 a substitué un classement en 3 catégories au précédent qui en comptait 4. La catégorie D citée par l'auteur (pp. 142 et 457) n'existe plus et la répar­tition de l'ensemble des organismes entre les catégories A, B et C a été sensiblement modifiée.

(18) A l'instar de feu André Buttgenbach (Manuel de droit administratif, 3e éd., 1966, n° 99).

(19)En ce sens, avec raison selon nous, J. Dembour «Les personnes de droit public», Presses universitai­res de Liège, 1968, n° 31.

(20) La loi du 28 juin 1963 les qualüie d'« Entreprises d'Etat».

(21) Doc. pari., Sénat, 1958-1959, n° 160 et rapport de la commission des Finances (Doc. pari., Sénat, n° 90 du 5 juillet 1961).

(22) En laquelle nous inclinons à voir le critère du service décentralisé, pourvu que s'y allie la personnifi­cation juridique.

(23) Ibidem, n° 41.

Page 3: IRIBIJnlJI - KU Leuven · (8) Et ce, semble-t-il, déjà en droit romain (De Brouckère et Tielemans, Répertoire, v° Compensation, p. 177). (9) L'arrêt commune de Tamines (C.E.,

cutif, mais en qualité d'organe du service per­sonnalisé ».

8. - Passons les pages consacrées aux « établissements publics » en général et, plus particulièrement, aux commissions d'assistance publique et aux fabriques d'église, - non sans hésiter devant l'affirmation (p. 149) qùe la formation des établissements publics procède d'un acte unilatéral de fondation, excluant toute entreprise en association, toute mise en commun de pouvoirs et de biens de plusieurs, car il y a le cas du ... port autonome de Liège ! (24) - pour recommander le chapitre traitant des « associaitons de droit public».

Une fois de plus, l'analyse s'ouvre par un exposé ramassé, construit comme en se jouant, grâce à quelques formules percutantes dont l'auteur a le secret :

« L'établissement public demeure dans le domaine du pouvoir organisateur. Il en pro­longe l'action. Mais ce n'est que dans un sec­teur de ses responsabilités. Celles-Ci restent cantonnées dans la circonscription territoriale que le pouvoir informe. Il y va, à -cet égard, d'un simple aménagement de l'autorité établie; de la mise en place d'une institution marginale.

» Voici que le besoin se fait sentir d'ouvrir le cercle de l'entreprise publique. Il s'agit d'en

\ étendre, en les élargissant et en les assouplis­sant, les ressorts ...

> Le mouvement opère sur deux .»lans qui souvent se croisent et se complètent : celui de l'association des pouvoirs entre eux, pour les nécessités d'une entreprise qui leur devient commune; celui de l'association des pouvoirs avec les particuliers, non plus dans la forme d'une simple collaboration, mais d'une fusion de leurs intérêts dans une même affaire > .(p. 154).

Suit la description des pures « coopéra­tives de pouvoirs publics » et des associations d'économie mixte et de leur régime juridique, incontestablement de droit public (25) - mal­gré certains emprunts au droit privé - sans que cette constatation oblige à reconnaître à tous ces organismes la qualité d' « autorités administratives> (p. 156).

9. - Quant au processus de «fédération>, il recouvre des « rassemblements fondés sur une communauté d'intérêts particuliers ». Il s'agit:

d'une part des « ordres professionnels »

consacrés à l'organisation des professions libérales, s'apparentant directement aux corporations de l'Ancien régime et revê­tant un caractère mi-public, mi-privé (p. 16), mais sans assimilation possible ni aux établissements publics ni aux associa­tions de droit public (26);

(24) Certes c'est le législateur (loi du 21 juin 1937) qui a institué ledit établissement public, mais en ap­prouvant la . . . convention intervenue le 8 décembre 1936 et aux termes de laquelle l'Etat et la ville ~e Liège créent ledit établissement public, chargé d'exploiter le port de l'île de Monsin que l'Etat lui concède ainsi que tous les autres ports de l'agglomération liégeoise que l'Etat, les communes ou des particuliers lui concé­deraient dans l'avenir, cependant que «d'autres com­munes pourront, par arrêté royal (voy. C. E., 6 _déc. 1967, commune de Chokier, R. A. A., 668), être ad­mises ultérieurement à prendre part » audit « établis­sement public» ! S'agit-il là d'un établissement pu­blic ?

(25) Voy. dans le même sens, notre étude du « Régi­me des activités commerciales et industrielles des pouvoirs publics en Belgique» (Revue Institut sociolo­gie, 1966, surtout pp. 169 à 213).

(26) Dans le même sens, J. Dembour op. cit., n° 5) ·qui, contrairement à Cyr Cambier, se range cependant à l'avis de Buttgenbach quant à la nature de « ser­vices publics organiques » des ordres professionnels.

d'autre part des « groupements profession­nels économiques et sociaux » se distin­guant des « ordres » par une moindre inté­gration dans les structures étatiques, par des préoccupations moins désintéressées, des modes d'action plus revendicatifs et surtout par leur origine due à l'initiative privée.

L'auteur rassemble ici à la fois des groupe­ments de pur fait comme les syndicats ou­vriers, les commissions paritaires - en les­quelles il conviendrait de reconnaître des « au­torités administratives » (p. 182) - et les organismes consultatifs de l'économie tels le Conseil central de l'économie et le Conseil national du travail.

Comme ces derniers ont été érigés par la loi en organismes publics dotés de la person­nalité juridique, l'auteur est bien obligé d'ex­pliquer son classement en soulignant qu'en l'espèce « l'intervention du législateur est en quelque sorte provoquée par ces formations » (p. 176), lesquelles demeurent « en fait> issues de l'initiative privée. Telle est la rançon -inévitable - du souci pédagogique d'opérer des classifications et de ne rien laisser y échapper ! Nous aurions mauvaise grâce à chicaner notre collègue sur ce point.

10. - La consécration juridique de com­munautés linguistiques est la source d'un amé­nagement - particulier à la Belgique - de l'organisation administrative, réglant l'emploi des langues (p. 185) dans la gestion des ser­vices publics et dans leurs rapports avec les particuliers.

Il faut savoir gré à Cyr Cambier de s'~tre attaché à dégager, à l'intention des publicistes vite découragés par ce maquis ténébreux, les principes régissant la matière. Qu'il s'agisse de l'enseignement ou des administrations, des af­faires «localisées» ou « localisables », de la nullité absolue (27) des actes méconnaissant la loi (p. 208), de la distinction entre la situa­tion de l'adjoint bilingue et celle de l'agent nommé en surnombre par « entraînement lin­guistique » (p. 243), l'auteur apporte ordre et clarté là où les textes défient souvent le bon sens (28).

Il souligne d'ailleurs - certes avec la ré­serve qui s'impose, mais fermem~nt - l'appa­reil de contrainte mis en place, parfois incon­stitutionnellement (29), tantôt pour faire échec aux conséquences du recensement (p. 198), tantôt pour « clicher » les frontières linguisti­ques (p. 199), tantôt encore pour supprimer le libre choix dans l'enseignement à Bruxelles (p. 203).

Un regret cependant. L'auteur s'attarde assez longuement (pp. 186 à 204) à retracer les cir-

(27) On lira avec intérêt la toute récente étude de G. Van Bunnen : «Nature et effets de la nullité des actes contraires quant à la forme aux dispositions des lois sur l'emploi des langues en matière administrative» (R. J. D. A., 1968, pp. 81 et s.).

(28) Voy. l'arrêt Coens (n° 11976, du 28 sept. 1966) selon lequel « même la certitude » que les propositions faites par le conseil de direction au ministre et rédigées en français, alors qu'elles auraient dü l'être en néerlan­dais, « ont effectivement pu remplir la fonction qui leur est dévolue par le statut des agents de l'Etat -­à savoir l'information du ministre - ne peut empê­cher que la nullité de ces actse, puisqu'elle résulte de la violation d'une règle relative à l'emploi des langues, doive néanmoins être constatée dans l'intérêt supérieur de l'ordre public» (cf. l'arrêt Jassogne, n° 12952, du 10 mai 1968).

(29) L'extension de l'emploi réglementé des langues à des entreprises qui sont et demeurent privées (art. 41 de la loi du 2 aoil.t 1963) est évidemment contraire à l'article 23 de la Constitution.

Qu'importe ! On adaptera la Constitution - plus tard... - à la loi à l'instar de la pratique adoptée en... U. R. S. S. !

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constances historiques expliquant les reven­dications flamandes et la préoccupation -a priori légitime - de protéger (30) la langue flamande contre la « force attractive » du français. En fait, au-delà de l'égalité préten­dument visée c'est d'un véritable «handicap» que la loi entend frapper la langue considérée a priori co~me avantagée par sa plus grande diffusion internationale et par son plus grand rayonnement.

Or, en observant en conclusion que pareil régime a été adopté « tant à la Chambre qu'au Sénat par une imposante majorité» (p. 204), l'auteur paraît lui donner la caution d'une large adhésion populaire alors que, l'expé­rience l'a révélé, la plupart de ces mesures de contrainte vont à l'encontre des aspirations des principaux intéressés et que nombre d'hom­mes politiques qui en furent partisans ont aujourd'hui publiquement reconnu leur erreur ...

11. - L'action administrative est «pro­posée à et est orientée vers ce que le bien public requiert. Elle est armée à cette fin de prérogatives : des actes les expriment; des agents les exercent », à l'aide de biens et de polices. Tel est le schéma, d'une logique im­peccable, sur lequel s'ouvre la deuxième partie de l'ouvrage.

Après avoir rejeté la distinction entre actes de puissance publique et actes de gestion pri­vée, l'auteur retient avec raison de la notion de service public qu'elle met utilement l'accent sur la « finalité » de toute action administra­tive et, par là-même, justifie les prérogatives dont jouit la puissance publique ainsi qu'un droit relativement originàl puisque nécessaire­ment adapté à leur exercice (p. 230). Il nous paraît ainsi rejoindre l'enseignement de Georges Vedel (31), selon qui loin d'être contradictoires les concepts de service public et de puissance publique sont plutôt complémentaires parce que se situant sur deux plans différents.

Le « service public » rejoint l'utilité publi­que sur le plan des fins, l' Administration ne pouvant · se dispenser de veiller à l'intérêt général. La « puissance publique », elle, se situe au plan des moyens.

Comment d'ailleurs nier l'importance con­crète de la notion de «service public> ?

Ne serait-ce que comme critère de la com­pétence du Conseil d'Etat, elle constitue au minimum un indice permettant de recon­naître la qualité d'autorité administrative (32).

Cette acception « organique » de la notion est pratiquée depuis toujours. Ainsi, aux termes mêmes de la Constitution (art. 16), le culte ne peut être l'objet d'un service public (33). Quant aux « sociétés régionales d'investisse­ment agréées » prévues par la loi du 2 avril 1962, elles revêtent - malgré leur forme de sociétés ànonymes - un «caractère de ser­vice public > (34).

L'acception « matérielle » - la mission, l'activité de service public - est elle aussi illustrée par d'innombrables exemples :

(30) Selon l'arrêt Coens précité, la législation linguis­tique « tend, dans une égale mesure, au-delà des inté­rêts particuliers des individus, à protéger chaque _ lan­gue nationale comme une valeur en soi ... ».

(31) Pourtant partisan· convaincu de la notion de puissance publique (voy, son compte rendu - R. D. P., 1957, p. 1166 - de la 2e édition du traité d'André de Laubadère, défenseur tout aussi décidé du... « service public»).

(32) A. Mast, Précis de droit administratif, 1966, n° 56.

(33) Voy. encore l'A. R. du 17 aoilt 1927 réglant la position des aumôniers militaires et Cass., 23 nov. 1957, J. T., 1958, p. 383.

(34) Projet de loi, Doc. parl., Sénat, S.E., 1961, n° 161, p. 7.

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- c'est .l'activité de service public que vise l'article 2 du décret du 20 juillet 1831, obligeant tout citoyen chargé d'un mini­stère ou d'un service public à prêter ser­ment (35);

- il en va de même de la construction de logements sociaux (36), de la mission des secrétariats sociaux d'employeurs (37), de l'assurance maladie-invalidité (38), de l'ex­ploitation des tramways (39), des centres de recherche scientifique appliquée ( 40).

Parfois même les deux acceptions voisinent et se cumulent dans la même matière. Ainsi, observe le Conseil d'Etat (41), la caisse auxi­liaire de paiement des allocations de chômage, organisme officiel, est un service public - au sens organique évidemment - cependant que les « organismes payeurs » créés par les syn­dicats, doués de la personnalité juridique et agréés pour ce faire, participent au fonction­nement du service public. Même situation dans le cas des «offices d'orientation scolaire et professionnelle » et des « centres psycho-so­ciaux » dont la loi du 1er avril 1960 (Rev. comm., 1962, p. 228) permet la création soit par les pouvoirs publics, soit par les particu­liers.

12. - Enfin, la notion matérielle de « ser­vice public » paraît on ne peut plus familière aux tribunaux (42) ainsi que le prouve un jugement du tribunal de commerce d'Anvers du 25 mars 1935 (Rev. comm., p. 236) définis­sant déjà le service public comme « une entre­prise destinée à la satisfaction de besoins col­lectifs du public, d'intérêt primordial, et de laquelle le fonctionnement défectueux ou irré­gulier serait susceptible de provoquer un dés­ordre social ».

Ceci pose le problème comment (par la loi ? par la technique de l'autorisation condi­tionnée ou de l'agréation ?) et quand ou pour­quoi une activité déterminée est érigée à la dignité de « service public ».

Il nous semble qu'il s'agit là en définitive, sous la pression consciente ou diffuse de l'opi­nion publique, toujours d'une option ·politique dans le chef des gouvernants. Lès travaux pré­paratoires de la loi du 11 juin 1883 sur l'ex­ploitation de réseaux téléphoniques sont signi­ficatifs : « La question... est celle de savoir si l'établissement et l'exploitation de réseaux téléphoniques sont bien matière à concession et si l'un et l'autre ne rentrent pas plutôt dans la généralité des branches de l'activité humaine laissées à l'initiative des citoyens, dégagées de toute entrave. C'est là en somme ·Une sorte de question préalable opposée au projet de loi ...

(35) On comparera avec l'arrêt rendu le 17 janvier 1966 par la Cour suprême des U.S.A. en cause Evans c. Newton (Rev. comm. -intern. Juristes, 1966, p. 307); « lorsque des personnes ou des groupes privés exercent des pouvoirs ou s'acquittent de fonctions qui, par leur nature, sont des pouvoirs ou des fonctions de service public - il s'agissait là de la gestion d'un parc -ils deviennent agents ou instruments de l'Etat et doi­vent respecter le 14" amendement (relatif à l'égalité)».

(36) A propos des sociétés locales agréées par la Société nationale du logement, voy. C.E., 9 mars 1956, R. J. D. A., 286 et 18 juin 1957, R. J. D. A., 1958, p. 19; - à propos de la S. A. Le Logis militaire, voy. l'avis du Conseil d'Etat sous l'A. R. du 18 déc. 1957 modifiant la loi du 16 mars 1954 relative au contrôle de certains organismes publics.

(37) Marche-en-Famenne, 26 sept. 1964, inédit.

(38) C.E., 20 juin 1958, R. A. A., 519 et 5 févr. 1960!; Tijdschr. v. Best., p. 264.

(39) Cass., 1er oct. 1934, Pas., 397. (40) Tels le Centre de. recherches routières, le Centre

scientifique et technique · du bâtiment « reconnus » en application de l' A.-L. du 30 janv. 1947; voy. en effet C.E. fr., 28 juin 1963, Narcy, R. D. P., 1186.

(41) 17 avril 1957, De Vroede, R. A. A., 255. (42) Voy. Cass., 24 juill. 1882, Pas., 330 et 26 avr.

1894, Pas., 188.

Le gouvernement fit à ces questions la réponse qtie voici : le projet de loi a considéré le télé­phone comme constituant un service public »

(43).

Même processus lors de la création, d'abord par simple circulaire, puis par arrêté royal puis

, par la loi, au sein du ministère de !'Instruction · publique, d'un service d'enseignement par cor­

respondance (44), ou encore lors de l'érection en service public, par la loi du 12 avril 1965, du transport de gaz par canalisations, lorsque ledit transport est destiné à alimenter un ser­vice de distribution. '

Inutile de dire que la qualité de « service public » revêtue par un organisme ou une activité déclenche ipso facto l'application des « lois » de continuité, de mutabilité. et d'éga­lité dont la jurisprudence ( 45) fournit maints exemples, mais que l'auteur se borne à citer (pp. 149 et 287) estimant sans doute que la matière a été suffisamment traitée par André Buttgenbach.

13. - Suit alors, très normalement, une théorie générale des actes administratifs uni­latéraux, réglementaires ou individuels - la distinction fait l'objet d'un exposé particulière­ment poussé (pp. 239 à 249) - dont les con­ditions de validité (compétence, formes, cause, objet, but) sont avec raison longuement ana­lysées, avec d'autant plus de raison qu'il s'agit en l'espèce, d'un pouvoir exorbitant du droit privé, aboutissant à créer des effets de droit de par la seule volonté de l'autorité légalement qualifiée ( 46).

C'est l'occasion ·pour l'auteur de préciser avec bonheur d'une part le « privilège du préa­lable », dont la véritable portée est moins la recherche d'un renversement de la preuve que le renforcement et l'accélération (47) du pou­voir d'action, habilité à se créer à lui-même un titre exécutoire (p. 250), d'autre part « le privilège de l'exécution d'office», dissocié (48) et dissociable du premier, plus exorbitant encore.

14. - Les «contrats de !'Administration» ont aujourd'hui conquis leurs galons et Cyr Cambier ne manque pas d'y consacrer une section (pp. 265 à 280), où son esprit de syn­thèse se donne libre cours.

Nous venons nous-mêmes, au terme d'une longue étude {49), de renoncer à conclure net­tement en ~aveur de l'appartenance des con-

(43) Pasinomie, 1883, p. 123. (44) Loi du 5 mars 1965; - C. E., 6 oct. 1960 et

30 mai 1963, R. J. D. A., 177. (45) Voy. notamment : C. E., 26 mars 1954, Ver­

braken, n<> 3263; - ter juill. 1955, Laloyàux, n° 4452; - 31 mars 1950, Buttgen, R. J. D. A. 144; - Liège, 31 mars 1949, Pas., 1950-11, 5; - Cass., 27 mai 1852, Pas., 370; - C.E., 25 nov. 1959, R. A. A., 748; -14 oct. 1960, Evraerts, n-0 8126; - 9 janv. 1964, R. A. A., 15; délibération du Conseil des ministres· du 22 nov. 1963 (Bull. doc. Cour des comptes, n° 1 de 1964, p. 23); - Cass., 21 avr. 1966, R. A., 125.

(46) F. Vincent («Le pouvoir de décision unilatérale des autorités administratives», L. G. D. J., -1966) note cependant (p; 40) que ce pouvoir étant légalement conditionné apparaît moins comme un privilège con­féré en. dehors de tout texte que comme une charge à exercer dans une direction déterminée. (dans le même sens, obs: sous C.E. fr., 15 juill. 1964, A.J.D.A., p. 575).

(47) Comp. C. E., 27 févr. 1962, Koenigs, R. A. A., 179; - Brux., 2 nov. 1962 et Comm. Brux., 12 août 1961, R. J. D. A., 1963, p. 279.

(48) Comme l'ont souligné les travaux de l'Associa­tion Capitant consacrés en 1.966, à Aix-en-Provence, à la règle « Nul nè peut se faire justice à soi-même » et à ses limites en droit public (R. 1. D. C., 1967, p. 941 » et R. A., 1967, p. 233, le rapport belge d'A. Vanwelkenhuyzen).

(49) Traité théorique et pratique des marchés publics (Bruylant, 1969), t. 1, n° 85 et s.

trats de !'Administration en Belgique soit totalement au droit privé, soit totalement au droit ·public. Nous avons cependant franche­ment opiné en faveur de l'originalité desdits contrats et ce évidemment au stade de leur conclusion, mais - aussi, et surtout, au stade de leur exécution, où les pouvoirs originaires et inaliénables de la puissance publique -direction et contrôle, résiliation unilatérale (50), mutabilffé-(51), mesures ou sanctions d'office - ou bien ne trouvent pas leur cor­respondant en droit privé· ou bien généralisent ou accusent avec une rare intensité certaines facultés reconnues aux particuliers par le Code civil.

Aussi souscrivons-nous à l'opinion selon laquelle « l'intérêt général » - qui est la fin des opérations contractuelles projetées - « ne se répercute point également et de la même manière sur la nature juridique des rapports ainsi noués entre les parties » (p. 268). Autre­ment dit, si certains contrats de !'Administra­tion (la concession de service public certaine­ment) méritent la qualification d' « administra­tif » et d'autres pas (notamment les contrats portant sur des «fournitures » traditionnelles), c'est essentiellement en fonction du point de savoir dans quelle mesure ils associent ou non le cocontractant à l'exéc.ution même du service public, le degré d'intensité de la « participa­tion » étant décisif pour déterminer et justifier l'application du droit public.

En gros, le Code civil demeurera le droit commun mais il conviendra, avec la nuance précisée ci-dessus, de faire la part des exigences du bien public sous la forme de dérogations tantôt sensibles, tantôt limitées à ce droit commun (p. 275).

15. - Dans ce qu'il appelle trop modeste­ment une « Ebauche d'un régime de la fonction publique » (p. 286), l'auteur sort à nouveau à son avantage d'une épreuve particulière­ment périlleuse : dégager les traits généraux au départ d'une multitude de textes engendrant une telle confusion que même les spécialistes - nous avouait récemment un éminent col­lègue, ancien doyen de faculté - ne s'y re­trouvent plus et renoncent (!) à enseigner la matière. Grâces soient donc rendues à Cyr Cambier !

Après avoir brièvement exposé les systèmes en présence quant à la nature juridique des rapports unissant les agents publics au pouvoir, l'auteur admet la faculté pour l' Administration - même sans texte - de s'assurer le service ·de son personnel par contrat (52), mais con-state avec raison (p. 290) la tendance mani­feste qui conduit à préférer le régime régle­mentaire (53).

Analysant ensuite le statut «Camu» de 1937 (54) - lequel statut est l'œuvre du Roi en sa

(50) Liège, 31 mars 1949, Pas., 1950, Il, 5. (51) Brux. 3 janv. 1877, Pass., II, 136; - 27 JUID

1962, S. A. Denys, c .. SNDE, inédit. - C. E., 28 mai 1965, Widdershoven, R. A. A., 534 et 31 mars 1950, Buttgen, R. J. D. A., 144.

(52) Un arrêt du Conseil d'Etat (7 nov. 1963, R. J. D. A., 264) décide même que pour les institu­tions paraétatiques (en l'espèce la Banque nationale) le régime de droit privé· du contrat demeure le droit commun, présumé applicable à défaut de décision contraire de l'autorité compétente.

(53) Voy., dans le même sens, notre étude sur·« Le régime des activités commerciales et industrielles des pouvoirs publics en Belgique», Revue Institut sociolo­gie, 1966, pp. 177 et s.

(54) Profondément remanié par les arrêtés Gilson du 16 mars 1964 dans le souci - proclamé urbi et orbi - de notamment « dépolitiser » la fonction publi­que, mais leur application est curieusement suspen­due «provisoirement» par l'A. R. du 2 aoOt 1966 !

On sera fixé sur le degré d'efficacité de maintes réglementations promulguées « à coups de clairon »

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qualité de chef de 1' Administration générale (Const., 66, 2°) et non en sa qualité de chef de l'exécutif (55) - l'auteur passe successivement en revue les conditions d'accès à la fonction publique, les procédures de recrutement, les droits - civils - au traitement et à la pen­sion, les obligations de service et les diverses « positions » que comporte la « carrière », les organes collégiaux (conseils de direction, cham­bre de recours, etc.) chargés de la sauvegarde des intérêts légitimes des agents, pour ter­miner par un remarquable exposé d'ensemble de ce droit professionnel de groupe qu'est le droit disciplinaire (56).

Relevons, pour l'approuver sans réserve, cette observation judicieuse (p. 313 en note) qu'une garantie essentielle du droit d'être jugé devrait résider dans celui d'être. -entendu par ceux qui vont juger. « Celui qui décide doit entendre>, jugeait déjà la Cour suprême des Etats-Unis en 1936 (57).

Quant à la grève des agents publics, Cyr Cambier remarque avec bon sens que si les principes la condamnent (p. 302), ils ne sont pas appliqués. S'agissant d'un fait social et politique; mieux vaudrait le normaliser que l'ignorer!

De plus en plus nombreux sont d'ailleurs les auteurs qui refusent de conclure du droit positif à l'interdiction de principe. Outre L.-P. Suetens (58), c'est le premier président du Conseil d'Etat lui-même qui juge la grève légitime lorsqu'elle répond à une mesure uni­latérale compromettant gravement les avan­tages de carrière antérieurement accürdés ou que l'autè>rité tarde de manière excessive à rajuster les traitements dévalués par des mani­pulations monétaires ou par la hausse des prix (59).

16. - L'étude des biens, soit qu'ils appar­tiennent au pouvoir soit que, propriété privée, ils soient l'objet de prérogatives exorbitantes de l' Administration, est l'occasion pour l'auteur d'examiner successivement la domanialité pu­blique, les régimes particuliers de la voirie et des cours d'eau, les polices de l'urbanisme ainsi que de l'aménagement industriel du territoire, les réquisitions et les servitudes d'utilité publique.

Squlignons le soin particulier apporté par l'auteur ·à clarifier la· notion de domanialité, après un rappel historique des plus précieux.

Font partie du domaine public les biens d'un usage pour tous - par les services publics ou pour l'utilité générale - à condition d'ajou­ter un correctif à cette définition trop laxiste : cette appartenance au domaine public est en

si l'on songe que l'arrêté du 14 février 1961 portant statut du personnel de certains organismes d'intérêt public - mentionné à l'envi par nombre d'auteurs (A. Buttgenbach, t. I, pp. 211 et 322) -:-:- n'existe que... sur papier car sa mise en vigueur était subor­donnée à l'intervention de mesures d'exécution qui n'ont toujours pas été prises !

(55) Const., 29 et 67; en ce dernier sens A. Mast, P. Wigny ~t le Conseil d'Etat.

(56) Signalons à ce sujet que sort à l'instant de presse - préfacée par Marcel Waline - la thèse de Francis Delpérée, assistant de Cyr Cambier, sur « L'éla­boration du droit disciplinaire de la fonction publi­que », qui a valu à son auteur le titre de docteur de l'Université de Paris (L. G. D. J., 1969). L'ouvrage -que nous venions précisément de lire en l'état de stencil - en tous points remarquable, annonce une brillante carrière scientifique.

(57) Morgan c. U.S.A. (voy. Bernard ·Schwartz, Le droit administratif américain, p. 127).

(58) De werkstaking in het publiekrecht van de lan­den der Europese Gemeenschappen (1963), pp. 152-153.

(59) M. Somerhausen, «Droit administratif» 1964 (P. U. B.), p. 82 et «Le droit de grève dans le ser­vice public» (Travaux et confhences, 1964, fi, pp. 7 et s.).

outre à dégager de l'impérieuse nécessité ·d'as­surer, par une protection spéciale,· l'usage de tel bien, et ce en raison d'une part de l'impor­tance toute particulière que sa destination con­servée revêt pour l'intérêt commun, d'autre part de ce que par sa valeur propre ou par les caractéristiques qu'il a ou qu'on lui a données, ledit bien est soit irremplaçable dans l'utili­sation qui lui est procurée pour tous, soit rem­plaçable peut-être mais non sans de très graves perturbations, ou sans charge exceptionnelle (p. 336).

Telle est bien la solution recue en France (60) où tant la doctrine et la~ jurisprudence que la Commission de réforme du Code civil affirment l'appartenance au domaine public des biens affectés :

soit directement à l'usage du public; soit à un service public, pourvu cependant que dans cette seconde hypothèse les biens soient, par nature ou par des aménage­ments particuliers, adaptés exclusivement ou essentiellement au but particulier du service considéré.

Comme l'auteur (p. 334), nous ne voyons pas pourquoi le régime de la domanialité se­rait l'apanage des biens des seules collectivités territoriales (Etat, provinces, communes) et donc étranger aux biens des services publics à caractère commercial ou industriel, quelle que soit d'ailleurs la forme juridique (fondation ou association) adoptée par ceux-ci (61).

En revanche - et contrairement à l'auteur, pour qui la domanialité n'implique le recours à aucun attribut (62) du propriétaire sur sa chose (p. 341) - nous persistons à penser que les biens du domaine public sont la propriété de !'Administration mais sont caractérisés par une affectation particulière qui les frappe d'in­disponibilité, venant en quelque sorte se « sur­ajouter » (63) à la propriété sans la faire dis­paraître.

17. - Bien qu'ayant, à propos de nombre de matières traitées précédemment, déjà ana­lysé telle ou telle «police», l'auteur s'est attaché - dans l'un des chapitres les plus vivants et les plus riches de son Précis - à présenter un aperçu d'ensemble de cette police administrative qui, par opposition à la notion de « service ,. doit se comprendre comme « le pouvoir d'imposer, en 1 vue de l'ordre public, des limites aux droits et aux libertés ,. (p. 377).

L'analyse de ce domaine particulièrement typique de l'action administrative s'ouvre par des considérations générales des plus précieuses sur :

la démarcation de notre notion avec celle de la police judiciaire : à la différence de celle-ci, la police administrative tend à prévenir et aussi à réprimer - mais dans cette deuxième hypothèse occasionnellement seulement et toujours par des actes maté­riels, donc sans intervention du juge _:_ les perturbations à l'ordre établi (p, 380); les divers organes de cette police : non seulement le Roi et les autorités locales mais aussi les groupements professionnels (p. 383);

- les ressorts de la police administrative, ce qui amène l'auteur à distinguer (64) la police générale et les polices spéciales;

(60) Voy. notre étude précitée in Revue Institut so­ciologie, 1966, p. 181 et notre cours «Le domaine et les contrats administratifs» (P. U. B., p. 3).

(61) Pour la démonstration de cette idée, voy. égale­ment notre étude in Revue Institut sociologie, 1966, pp. 182 à 193.

(62) Cf. notre cours précité à l'U. L. B., p. 7. (63) Cf. Georges Vedel, Droit administratif, 1958,

p. 516. (64) Mais la distinction n'est pas toujours aisée ni

claire : aitisi la réglementation des établissemnets dan-

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la nécessité, pour concilier le bien public et les droits de l'individu, de contenir le pouvoir de police : non seulement la Constitution réserve, moyennant certains aménagements (65), au législatif tout ce qui touche aux droits et aux libertés indi­viduels mais les principes généraux du droit et, depuis peu, les conventions inter­nationales sont autant de freins à l'action du pouvoir, cependant que les protections du judiciaire et du Conseil d'Etat se cumu­lent, poussant le contrôle - mâlgré le pouvoir largement discrétionnaire dont dis­pose l'autorité - jusqu'aux raisons d'agir de la manière dont ladite autorité a cru pouvoir le fai~~ et à l'adéquation des· me­sures prises à l'objectif admissible (66).

En revanche, Cyr Cambier regrette l'ineffi­cacité des contrôles juridictionnels au répres­sif : l'exigence d'un dol spécial dans la défi­nition de l'infraction consistant pour un agent public à porter atteinte aux « droits garantis par la Constitution » (C. pén., art. 147 et s.), et la recherche trop systématique d'une justi­fication dans l'ordre des supérieurs hiérarchi­ques aboutissent en fait à faire bénéficier la puissance publique elle-même d'une protection prétendument destinée à ses agents. Contraire­ment à ce qu'écrit l'auteur (p. 396), c'est bien un jugement de valeur qu'il porte là et nous ne pouvons que nous y associer.

18. - Après une section traitant de la police administrative générale - où sont envi­sagés sa répartition entre les pouvoirs établis (étatique, provincial, communal), ses rapports (effacement ou coexistence) avec les polices spéciales, ses principales. manifestations (recen­sement et enregistrement de la population; loi sanitaire de 1945; lutte contre la pollution de l'eau et de l'air; maintien de l'ordre dans les lieux publics; polices des étrangers) - l'auteur consacre vingt pages des plus utiles (pp. 411 et s.). à quelques polices spéciales de l'économie (réglementation des prix; police du commerce; assurances; institutions bancaires et d'épargne; transports; industrie charbonnière) d'un intérêt pratique évident à notre époque et qui toutes se distinguent par une finalité particulière : la sauvegarde des conditions· essentielles d'un ordre public d'un nouveau genre, cet « ordre public économique » dont une récente et re­marquable thèse (67) a souligné les traits originaux.

Nous avons particulièrement al,'précié les deux plans sur lesquels s'organise la réflexion de l'auteur :

d'une part, les polices envisagées compor­tent d'inévitables restrictions au principe de la liberté du commerce et de l'industrie, principe non expressément inscrit dans notre Constitution mais participant de sa philo­sophie et d'ailleurs consacré dans le droit communautaire (p. 411);

- d'autre part, les pouvoirs publics prennent de plus en plus fréquemment en charge des activités industrielles et commerciales traditionnellement assumées par l'initiative privée, et ceci concerne un grave problème, celui de la concurrence entre les deux sec­teurs, qui devra bien un jour ou l'autre recevoir une solution législative.

gereux est comptée parmi Ise polices spéciales pp. 385 et 402 (dans le même sens: J. Dembour, Les pouvoirs de police. administrative générale des autorités locales, 1956, p. 15) mais semble participer de la police géné­rale (pp. 408 à 411).

(65) Notamment le pouvoir réglementaire autonome du Roi (pp. 389 et 398).

(66) P. 392; voy. l'arrêt Pittacos (ter avr. 195S, n<> 4204).

(67) Gérard Parjat, « L'ordre public économique », L. G. D. J., 1963.

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Page 6: IRIBIJnlJI - KU Leuven · (8) Et ce, semble-t-il, déjà en droit romain (De Brouckère et Tielemans, Répertoire, v° Compensation, p. 177). (9) L'arrêt commune de Tamines (C.E.,

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Si l'auteur conclut avec raison (p. 425) que dans l'état actuel des textes l'intervention éta­tique dans l'économique ne peut être subor­donnée à la constatation préalable de la ca­rence de l'initiative privée (68), il souligne en revanche, et à bon droit, combien le maintien injustifié de multiples privilèges (notamment fiscaux) en faveur des « entreprises publiques »

risque de fausser la concurrence (69) (p. 428).

19. --....'.. Le contrôle de l' Administration clôt normalement l'ouvrage.

Avant de démontrer le mécanisme des con­trôles proprement juridiques, apanage des juri­dictions, Cyr Cambier a eu l'heureuse idée de rassembler dans un important chapitre les contrôles s'exprimant soit sur recours admini­stratifs internes, soit par · l'action du pouvoir de tutelle soit encore par l'intervention de corps politiques.

Pareil plan nous paraît des plus fructueux sur le plan pédagogique d'abord, sur celui de la réalité politique ensuite. C'est en effet don­ner une fausse image de la vie administrative que de tout axer sur le contentieux et l'inter­vention des juridictions alors que la grande majorité des différends avec les pouvoirs pu­blics se résolvent à l'amiable, par transaction, après intervention de parlementaires ou des groupes d'intérêts, ou encore par saisine (offi­cieuse ou officielle) des autorités de tuteIIe ...

A propos du contrôle politique (Parlement; Cour des comptes, Commission de contrôle linguistique), nous soulignerons les développe­ments consacrés par l'auteur aux perspectives de l'institution dans notre pays - à l'instar des pays nordiques et, tout récemment, de pays de common law (Nouvelle-Zélande, puis la Grande-Bretagne elle-même) - d'un commis­saire parlementaire, redresseur de griefs, in­spiré de !'Ombudsman suédois (p.' 463).

L'analyse des contrôles de tutelle séduit par sa concision et sa clarté. L'auteur y met l'accent notamment :

.....,_ sur tout ce qui sépare la tutelle du contrôle hiérarchique et qui explique par exemple que le pouvoir de réformation lui est étranger (p. 455);

- sur l'obligation pour· l'autorité de tutelle de ne se laisser déterminer que par le res­pect dû à la loi ou par ce que requiert une conception « justifiée » de l'intérêt général, cette dernière notion ne pouvant - si souple soit-elle - couvrir une appréciation de pure opportunité (p. 451 ).

20. - · C'est toutefois la section consacrée aux contrôles administratifs internes (pp. 434 et s.) - préventifs ou a posteriori - qui a le plus retenu notre attention.

Le pouvoir y fait en effet sa propre police, souvent avec l'assistance des citoyens eux­mêmes et c'est l'occasion pour l'auteur d'es­quisser une ébauche de cette « procédure administrative non contentieuse » (70) que des pays comme la France et la Belgique - si fiers de leur dévefoppement juridique - seront bientôt les seuls à ne pas avoir codifiée (71).

(68) Sur la jurisprudence française à cet égard, voy. notre étude précitée in Revue Institut sociologie, 1966, pp. 227 et s.

(69) Ibidem., pp. 228, 256 et s., 264 et s.

(70) L'expression semble déjà consacrée mais l'em­ploi de la négation « non contentieuse » est-il justi­fié? Nous en doutons.

(71) On consultera à cet égard la toute récente thèse - très remarquée en France - de Guy Isaac « La procédure administrative non contentieuse», L. G. D. J., 1968.

Un avocat belge, Me Carle, chercheur au Centre interuniversitaire de droit public, met la dernière main à un travail similaire.

Regroupant des textes épars, utilisant quel­ques exemples concrets (la police des établis­sements dangereux, celle des autorisations de bâtir), l'auteur souligne les avantages consi­dérables (efficience de l'administration, pro­tection accrue des citoyens) qu'il y aurait à soumettre l'action administrative à des en­sembles coordonnés de normes et, notamment, à associer les intéressés à l'élaboration de déci-

-sfons qui les concernent.

Qu'il s'agisse de la publicité assurée. aux demandes ou aux projets de décision, des di­verses techniques d'enquête ou de consultation, du droit à l'audition, à la procédure contra­dictoire, à la communication du dossier, de l'inertie et du silence de l'autorité, de la moti­vation et de la publication des décisions, des recours gracieux ou hiérarchiques, autant de questions qui ne sont certes qu'effleurées mais toujours à bon escient : autant d'orientations pour le chercheur, ou le praticien ...

21. - Si l'étude des contrôles essentielle­ment juridiques s'ouvre par celle des « juri­dictions administratives » - malgré la fonction réduite que la nature mêine du régime belge leur assigne - c'est parce que historiquement, la séparation des pouvoirs régnant, c'est elles qui apparaissent au départ de l'évolution qui aboutit à consacrer l'état de droit en don­nant enfin un juge à l'autorité administrative (p. 465).

C'est le lieu pour l'auteur de dégager les constantes (72) d'un contrôle juridictionnel efficace de l' Administration mais aussi ses servitudes (73 ), de préciser la démarcation des attributions entre le pouvoir judiciaire et les juridictions administratives, et enfin de passer nombre de celles-ci rapidement· en revue, en distinguant ,cependant selon qu'elles sont im­plantées dans le ressort des pouvoirs locaux (74) ou qu'elles relèvent de l'Etat (75).

22. - Le Conseil d'Etat fait l'objet de l'avant-dernier chapitre et pour l'avoir affronté depuis sa création, le praticien averti qu'est l'auteur s'y sent particulièrement at hQme.

Huit pages lui suffisent à narrer la longue gestation de notre Haute Cour de justice admi­nistrative, apparue comme indispensable pour compléter l'insuffisante protection assurée par les tribunaux civils aux citoyens contre l'action de la puissance publique (p. 496).

Suit l'examen des compétences.

Le pouvoir d'annulation tout d'abord, dans le cadre d'un contentieux purement objectif -il s'agit d'un procès fait exclusivement à un acte, pour revenger la loi méconnue -, mais de caractère supplétif, le Conseil d'Etat devant renoncer à connaître des contestations dont l' « objet véritable ,. serait un droit civiL L'au­teur observe cependant, dans une page (511) promise à la citation, qu'il faut se garder d'étendre l'enseignement de la Cour de cassa­tion en cette matière : ainsi, démontre-t-il, exemples à l'appui (76), la circonstance que l'acte illégal pourrait donner lieu à recours en dommages-intérêts devant les tribunaux ou

(72) Indépendance du juge; exigences d'ordre fonc­tionnel (débat contradictoire, motivation, etc.); auto­rité de chose décidée s'attachant à la sentence.

(73) Tout jugement d'opportunité lui échappe; il intervient après coup, une fois le mal fait; une timidité excessive fait obstacle à toute censure active du juge par la voie d'injonctions.

(74) Essentiellement la députation permanente (p. 478) dans les contentieux fiscal et électoral et dans celui de l'assistance publique.

(75) L'auteur examine ici les contentieux nés de la responsabilité des comptables publics, de la milice, des dommages, de guerre, 1 des pensions de réparation, etc.

(76) Statut pécuniaire des agents publics; adjudication irrégulière.

condui_re à obtenir de ceux-ci qu'ils refusent de l'appliquer, n'entraîne pas cette conséquence de la rendre inattaquable devant le Conseil d'Etat (77).

Quant à la compétence consultative au con­tentieux de l'indemnité pour préjudice excep­tionnel, Cyr Cambier regrette son caractère limité - souligné par un nouvel et récent arrêt (78) - et rompt une lance (p. 520) en faveur d'une interprétation large permettant notamment au ConsP.il de connaître des de­.mandes de réparation tendant à indemniser un dommage procédant de la loi.

L'étude de la procédure analyse évidemment le déroulement de l'instance mais s'ouvre par un examen approfondi, des plus précieux pour les justiciables et leurs conseils, du droit d'action. Nous recommandons particulièrement au lecteur la fine analyse de la notion d'intérêt personnel et des aspects particuliers (intérêt fonctionnel, collectif et corporatif) qu'il revêt de plus en ·plus souvent dans la vie concrète (pp. 531 et s.). L'auteur en profite pour cri­tiquer au passage, non sans beaucoup d'esprit, l'arrêt « Het verbond van het vlaams overheids­personeel » (12 juill. 1967, R.J.D.A., 1968, p. 71) qui viole incontestablement le principe que « nul ne plaide par procureur .>.

23. - Les contrôles judiciaires achèvent l'ouvrage et, en tous points, en constituent· le sommet.

Avant de retracer les étapes - de l'exces­sive réserve du juge, obnubilé par un véritable fétichisme de la puissance publique, à l'arrêt Flandria du 5 novembre · 1920, décevant à bien des égards - de l'évolution du contrôle judiciaire, et ce avec une maëstria qui ne sau­rait étonner de la part de l'auteur de la Res­ponsabilité de la puissance publique et de ses agents et des Principes de contentieux admi­n{stratif, Cyr Cambier circonscrit le domaine assigné à ce contrôle : rapports contractuels et statutaires entre le pouvoir et ses agents, rapports contractuels avec les prestataires de services, de fournitures et de travaux ou encore avec la clientèle des services publics à carac­tère commercial et industriel (distribution de gaz, électricité, etc. (79), rapports avec les expropriés et les requis, responsabilité aqui­lienne).

L'exercice par les tribunaux civils d'une censure directe, consistant dans le règlement d'indemnités, ne retient guère notre propos. L'auteur s'y attache, on le devine, essentielle­ment à tout ce qui relève-. de la responsabilité civile extracontractuelle de la . puissance pu­blique et utilise pour ce faire ses remarquabl~s travaux antérieurs. Notons cependant qu'il ne néglige pas, une fois de plus, de compléter l'exposé théorique par quelques cas concrets : ainsi en matière d'urbanisme, d'adjudications

(77) Nous avons toujours défendu la même thèse (voy. « La, nouvelle réglementation .des marchés de l'Etat » extrait du Journal des Tribunaux, déc. 1964, n°s 46 et s.; - Traité théorique et pratique des mar­chés publics, 1969, t. 1, n° 365); - dans le même sens : conclusions Ganshrif van der Meersch avant Cass., 16 déc.1965, J. T., 1966, p. 318.

(78) Selon l'arrêt Thirionet (15 sept. 1967, R. J. D. A., 1968, p. 103) le préjudice subi n'a pas· un caractère exceptionnel car tous les agents du grade de conduc­teur du ministère de la Défense nationale nommés adjoints techniques ont été victimes, cependant que le nombre_ restreint- d'agents se trouvant encore actuelle­ment dans la même situation que le requérant ne con­fère pas au préjudice le caractère exceptionnel requis par la loi.

(79) Encore qu'à cet égard un partage de compéten­ces assez délicat s'impose en raison de la jurisprudence du Conseil d'Etat qui qualifie de réglementaires les rapports entre les abonnés et une régie de l'électricité (voy. les arrêts Buttgen du 31 mars 1950, R. J. D. A.,

1 145, et Widdershoven du 28 mai 1965, R. A. A., · S34).

Page 7: IRIBIJnlJI - KU Leuven · (8) Et ce, semble-t-il, déjà en droit romain (De Brouckère et Tielemans, Répertoire, v° Compensation, p. 177). (9) L'arrêt commune de Tamines (C.E.,

publiques - où l'auteur regrette comme nous la pusillanimité du législateur de 1963 -, d'accidents causés par la voirie défectueuse, voire de dommage de travaux publics et d':it­teintes portées aux droits des riverains (p. 590).

24. - Avec la dernière section du chapitre, consacrée à la censure judiciaire indirecte, fondée sur l'article 107 de la Constitution, l'auteur reprend (80), · de manière extrême­ment persuasive, son plaidoyer - son combat - en faveur d'un contrôle positif de la légalité dans l'ordre interne et... extranational (81).

s'agisse là d'une loi naturelle : ce serait les hommes les plus occupés qui, à force d'entraî­nement, parviendraient à faire le travail de plusieurs. Voyez les Jean Van Ryn et Walter Ganshof van der Meersch ...

Relevons encore, au crédit de l'auteur, en qui l'historien revient toujours à la surface, que chaque chapitre marque son souci d'une part d'insérer le régime administratif belge dans son cadre historique, constitutionnel et politique, d'autre part de maintenir présents à l'esprit du lecteur et le fil directeur du rai­sonnement et le plan de la question abo:çdée, grâce aux schémas de synthèse qui chapeau­tent chaque chapitre, section ou subdivision de raccourcis qui sont autant de modèles du genre.

191

Et au terme de cette recension, qui fut pour nous une découverte et une leçon, nous n'avqns encore rien dit ni des nombreux emprunts que fait l'auteur aux ressources du droit comparé ni des considérations de pure science admi­nistrative dont il a émaillé son ouvrage ...

Au lecteur de vérifier à présent - un contrôle de plus ! - la pertinence dè notre jugement : la collection des Précis de la Faculté de droit de l'Université de Louvain s'ouvre par une totale réussite.

De la fructueuse émulation que celle-ci provoquera à coup sûr et · du rare enrichis­sement que nous a procuré votre ouvrage, merci, cher Cyr Cambier.

Maurice-André FLAMME.

L'article 107 invitait bel et bien le pouvoir judiciaire à exercer le contrôle de la légalité tant interne qu'externe des actes administra­tifs. Sans doute l'esprit de la séparation des pouvoirs commande-t-il d'admettre que cet article s'oppose à ce que les tribunaux judi­ciaires annulent les actes réglementaires de l'exécutif, mais pourquoi ne pourraient-ils an­nuler les actes administratifs individuels qui touchent aux droits subjectifs des administrés? Pourquoi le juge ne pourrait-il « réformer, em­pêcher ou annuler, non point il est vrai, toutes les déCisions administratives mais bien celles qui, illicites, entraîneraient, si ces sanctions ne leur étaient point appliquées, la disparition d'un droit > ? (82).

JURISPRUDENCE

25. - Ce vibrant plaidoyer clôt les quelque 600 pages de l'œuvre, dont seul l'exceptionnel apport à la science juridique justifie la lon­gueur du présent compte rendu.

Nous ne prétendrons pas que ces 600 pages d'un texte serré, aux notes plus serrées encore et souvent aussi importantes que le texte même, soient d'une lecture facile. Le style notamment, pourtant impeccable sur le plan de la langue, épouse fidèlement le chemine­ment de la pensée et celle-ci est d'un juriste qui sait beaucoup - trop diront peut-être les étudiants - et qui de plus se double d'un philosophe.

L'œuvre scientifique est à ce point parfaite qu'on en est réduit à chicaner sur des. détails .. La classification des problèmes n'est-elle pas poussée à l'excès dans la division en sections, en paragraphes, en numéros? Mais n'est-ce pas là le devoir du professeur ? Certaines ques­tions importantes paraissent négligées - ainsi il eût été utile de consacrer quelques pages à une « sociologie > du contentieux d'annulation et, donc, à l'efficacité réelle dù contrôle juri­dietiorinel (83) - ou bien eussent gagné à faire l'objet d'une étude d'ensemble (84), niais alors où s'arrêter ? L'index enfin, .si précieux pour le spécialiste, gagnerait à être étoffé, car de nombreux mots-clefs essentiels n'y figurent paradoxalement point (85).

26. - Mais, en revanche, quelle richesse dans l'inventaire des difficultés essentielles, quelle somme invraisemblable de travail . ce Précis n'a-t-il pas exigée et comment expliquer que ce soit précisément l'œuvre d'un homme surchargé, développant au Palais et à l'Uni­versité une activité débordante ? A moins qu'il

(80) Voy. les Principes du Contentieux administratif, t. I' (1961). passim, notamment pp. 99, 107, 217.

(81) Voy. pp. 599-601, l'incidence des traités et de la réglementation communautaires.

(82) Principes du contentieux administratif, t. I, p. 217; la même idée est reprise, mais avec moins de force dans le Précis, p. 594.

(83) Voy. Jean Petot «Quelques remarques sur les notions fondamentales du droit administratif français», in R. D. P., 1966, pp. 383 et s.

(84) Nous songeons notamment à la distinction en­tre les notions de « pouvoir discrétionnaire » et de « compétence liée » plusieurs fois abordée, mais inci: demment seulement .(pp. 247, 260, 364, 392).

(85) Par exemple : arbitrage; circulaire, compétence liée; fonctionnairé de fait, subsides; la règle patere legem.

Cass. (Ire ch.), 9 janvier 1969. Prés. : M. BAYOT, pr. prés. Rapp. : M. PoLET', cons. Min. publ.: M. DELANGE, av. gén. Plaid. : .MMes J. FALLY et P. ANSIAUX.

(Defourny c. Guillaume.)

EXECUTION. - Jugement. - ACQUIES­CEMENT. - Validité. - Condition. - Li­berté du consentement. - Exécution volon­taire. - Equivaut à l'acquiescement.

Même lorsqu'elle est faite sans réser­ve, l'exécution d'une décision judiciaire n'implique pas nécessairement un ac­quiescement; pour être valable, l'assen­timent que suppose tout acquiescement doit être libre.

Il résulte de l'article 1338 du Code civil que l'exécution d'une obligation n' équilJaut à une confirmation ou une ratification que s{ elle est volontaire; cette règle est applicable par analogie à l'acquiescement.

Ouï M. le conseiller Polet en son rap­port et sur les conclusions de 1M. De­lange,. avocat général;_

Vu l'arrêt attaqué, rendu le 21 novem­bre 1967 par la cour d'appel de Liège;

Sur le moyen· pris de la violation des articles 1134, 1135, 1138, spécialement alinéa 2, 1315, 1349 1353 du Code civil, 159 (A.R. n° 300 du 30 mars 1936, art. 8), 443, spécialement alinéa ter (A.R. n° 300 du 30 mars 1936, art. 22) du Code de procédure civile et 97 de la Constitution,

en ce que le jugement dont appel, qui rejette la demande en séparation de corps formée par la demanderesse, lui ayant été signifié le 14 janvier 1967 avec commandement de payer les dépens, sous menace de saisie-exécution et sans préjudice de tous autres moyens d'exé­cution, et la demanderesse ayant payé le même jour les dépens à l'huissier qui les lui avait réclamés, l'arrêt attaqué dé­clare non recevable l'appel interjeté, le 8 février 1967, par la demanderesse, aux motifs «que, selon l'article 159 du Code de procédure civile, un jugement est ré­puté exécuté lorsque les frais ont été payés et que l'exécution sans réserve d'une décision judiciaire implique l'ac­quiescement à celle-ci; ... que vainement cette partie (la demanderesse) objecte que, le 14 février 1967, elle avait mani­festé son intention d'interjeter appel à l'huissier qui lui faisait sommation de réintégrer le domicile conjugal, puisque

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à cette date elle avait exécuté le juge­ment et même interjeté appel; qu'elle :rie prouve pas que ce n'est pas en pleine connaissance de cause qu'elle a exécuté le jugement entrepris»,

alors que : 1° un acq~iescement tacite à une décision judiciaire; rendue en ma­tière civile, ne peut se déduire que d'actes ou de faits révélant une adhé­sion certaine et non équivoque à la dé­cision rendue; que le règlement des dé­pens, même non accompagné de réser­ves, fait sous menace d'exécution, à l'huissier qui les réclame, ne ·saurait, dès lors, être considéré comme un ac­quiescement ni priver la . partie con­damnée du délai d'appel que lui accorde l'article 443 du Code de procédure civile (violation des dispositions ci-dessus vi­sées, à l'exception de l'article 1315 du Code civil); 2° au surplus, c'est à la partie qui ·se prévaut d'un acquiesce­ment qu'il incombe de le prouver et notamment d'établir l'existence d'une adhésion donnée sciemment et sans équivoque à fa décision rendue (viola­tion de l'art. 1315 du Code civil) :

Attendu que, parmi les dispositions légales qui auraient été violées, le moyen mentionne « l'article 1138 » du Code ci­vil; que cette mention procède d'une erreur matérielle évidente; qu'il faut lire : «article 1338 »;

Sur la première branche: Attendu que le jugement dont appel a

débouté la demanderesse de son action et l'a condamnée aux dépens;

Que l'arrêt attaqué relève que la de­manderesse « a, sans réserve, payé ces dépens à l'huissier de justice Boëhmer qui les lui réclamait en même temps qu'il lui signifiait le jugement»;

Que, dans l'exploit qu'il a dressé le 14 janvier 1967, l'huissier de justice re­late qu'il a signifié le jugement à la de­manderesse, qu'il lui a fait commande­ment de payer le montant des dépens et qu'il lui a déclaré « qu'à défaut de paiement, elle y serait contrainte par toutes les voies de droit, notamment après le délai d'un jour, par hi saisie­exécution de ses meubles et objets mo­biliers»;

Attendu que, bien que la demanderesse ait prétendu devant la cour d'appel qu'en payant les dépens, réclamés par l'huissier de justice, elle n'avait pas eu la volonté de se soumettre au jugement,

Page 8: IRIBIJnlJI - KU Leuven · (8) Et ce, semble-t-il, déjà en droit romain (De Brouckère et Tielemans, Répertoire, v° Compensation, p. 177). (9) L'arrêt commune de Tamines (C.E.,

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l'arrêt n'examine pas si, dans l'espèce, l'exécution de cette décision a été vo­lontaire; qu'il se borne à constater que le jugement a été exécuté et à affirmer, d'une manière absolue, «que l'exécution sans réserve d'une décision ,judiciaire implique l'acquiescement à celle-ci»;

Attendu que, même lorsqu'elle est faite sans réserve, l'exécution d'une dé­cision judiciaire n'implique pas néces­sairement un acquiescement; que, pour être valable, l'assentiment que suppose tout acquiescement doit être libre;

Attendu qu'il résulte de l'article 1338 du Code civil que l'exécution d'une obli­gation n'équivaut à une confirmation ou une ratification que si elle est volontaire;

Que· cette règle est applicable par ana­logie à l'acquiescement;

Attendu qu'il s'ensuit qu'en se fondant sur les motifs qu'il énonce pour décider que la demanderesse avait acquiescé au jugement dont appel, l'arrêt a méconnu les règles qui régissent l'acquiescement judiciaire et violé l'article 1338 du Code civil;

Que le moyen est fondé;

Par ces motifs :

LA CouR, Casse l'arrêt attaqué.

Cass. (Ire eh.), 7 novembre 1968. Prés. : M. BAYOT, pr. prés. Min. publ.: M. GANSHOF VAN DER MEERSCH, proc.

gén. Plaid.: MMes H. VAN LEYNSEELE, J. FALLY et

P. ANSIAUX.

(Les Assurances fédérales c. Masoin et cons.)

ACCIDENT SUR LE CHEMIN DU TRA­VAIL. :_ Notion. ____,. Interruption. - N'em­porte pas par elle-même la suspension du contrat.

Ayant relevé que le patron de la victime de l'accident litigieux les avait prises en charge dans sa voiture auto­mobile pour aller voir le « Tour de France » et qu'ensuite, ayant entrepris une randonnée, il s'était engagé à les ramener au chantier soit pour reprendre le travail, soit pour y retrouver les moyens de. locomotion destinés à leur retour chez eux, c'est à bon droit que les juges du fond déclarent que lors de l'accident, les ouvriers étaient restés sous l'autorité de leur employeur, dès lors qu'ils constatent qu'ils n'ont cessé de se trouver sous l'autorité, la direction et la surveillance de leur patron au cours' de la randonnée et qu'ils n'avaient plus la liberté de se soustraire à cette autorité.

L'accident qui s'est produit dans de telles circonstances est survenu dans le cours de l'exécution du contrat de tra­vail.

Une interruption de travail n'emporte pas par elle-même la suspension du con­trat de travail, même si les ouvriers n'effectuent pas, au moment ou l'acci­dent s'est produit, le travail pour lequel ils ,avaient été engagés.

Ouï M. le conseiller Valentin en son rapport et sur les conclusions de M. Ganshof van der Meersch, procureur général;

Vu le jugement attaqué, rendu en degré d'appel le 28 juin 1967 par le tribunal de première instance de Dinant;

Sur le premier moyen, pris de la violation des articles 1, 7, 11 de la loi du 10 mars 1900 sur le contrat de tra­vail, 1, 2, 3, 4 des lois sur la réparation des dommages résultant des accidents du travail coordonnées par arrêté royal du 28 septembre 1931 et 97 de la Consti­tution,

en ce que le jugement entrepris décide que l'accident de roulage au cours dù­quel le mari de la première défenderesse a perdu la vie et le deuxième défendeur a été blessé, constitue un accident du travail au motif -que l'entrepreneur Georges Roger, assuré contre les acci­dents de travail auprès de la demande­resse, avait pris les victimes en charge dans sa voiture automobile pour aller voir le tour de France et qu'ensuite, ayant entrepris la randonnée qu'il décrit, il s'était engagé à les ramener au chan­tier soit pour reprendre le travail, soit pour y retrouver les moyens de loco­motion destinés à leur retour chez eux, et que les victimes de l'accident se seraient pendant cette randonnée trou­vées sous l'autorité, la direction ou la surveillance de leur employeur et·· parce qu'une fois qu'elles étaient, après le passage du Tour, restées dans le véhi­cule de ce dernier elles n'avaient plus la liberté de se soustraire à cette auto­rité étant privées de tout moyen de locomotion autre que l'auto de leur patron, alors qu'il constate que les vic­times avaient volontairement quitté leur travail et que celui-ci était interrompu et alors que les dispositions des lois coordonnées sur les accidents du travail exigent pour être applicables que l'acci­dent soit survenu dans le cours et par le fait de l'exécution du contrat de tra­vail, ce qui n'est pas le cas en l'espèce eu égard aux constatations du jugement entrepris ,et que l'autorité la direction et la surveillance dont parle l'article 1er de la loi du 10 mars 1900 est unique­ment celle que l'employeur exerce durant l'exécution du travail et que c'est partant à tort, par confirmation du juge­ment dont appel, qu'il condamne la demanderesse au paiement des indem­nités légales et à rembourser à la troi­sième défenderesse les sommes qu'elle avait décaissées

Attendu que le jugement attaqué relè­ve que les ouvriers, victimes de l'acci­dent, « depuis l'interruption du travail au chantier de Bure où leur patron devait nécessairement les ramener à l'heure qui lui convenait... n'ont cessé de se trouver sous l'autorité, la direction et la surveillance de leur patron au cours de la randonnée qu'il leur imposa » et qu'au cours celle-ci, ils «n'eurent plus la li­berté de se soustraire à cette autorité »; qu'il ressort de ces constatations que, lors de l'accident, les ouvriers étaient restés sous l'autorité de leur employeur;

Que, sans doute, à ce moment, ils n'effectuaient pas, et ce du plein gré de celui-ci, le travail pour lequel ils avaient été engagés mais qu'une interruption de travàil n'enporte pas, par elle-même, la suspension du contrat de travail;

Que le juge du fond pouvait, dès lors, légalement déduire des faits qu'il relève que l'accident . était . survenu dans le cours de l'exécution du contrat de tra­vail;

Que le moyen ne peut être accueilli; Sur le second moyen, pris de la vio­

lation des articles 2, 3, 4 des lois sur la réparation des dommages résultant des accidents du travail coordonnées par

arrêté royal du 28 septembre 1931, 1er de l'arrêté-loi du 13 décembre 1945 relatif à la réparation des dommages résultant des accidents survenus sur le chemin du travail, arrêté-loi dont l'application a été prorogée pour une durée indéter­minée par l'article 12 de la loi du 10 juillet 1951,

en ce que, s'il fallait considérer que le jugement entrepris a décidé que l'ac­cident litigieux est survenu sur le che­min du travail, les conditions pour ce requises ne se trouvent pas réunies puis­qu'il n'est pas survenu durant le trajet normal que le travailleur doit parcou­rir pour se rendre du lieu de sa rési­dence ou du lieu où il prend· son repas au lieu d'exécution du travail et inver­sement:

Attendu qu'il ressort de la réponse donnée au premier moyen, que le se­cond est dénué d'intérêt et, partant, non recevable;

Par ces motifs :

LA CouR, Rejette le pourvoi.

Liège (Ire ch.), 7 janvier 1969. Siég. : MM. RENARD, prés.; COLLIN et LAMBINET,

cons. Plaid. : MM"s DELFOSSE, DEMET et LEw ALLE.

(L. .. c. procureur du Roi et cons.)

PATERNITE ET FILIATION. - DROIT DE GARDE'. - Assi:gnation. - Antérieure à la mise en vigueur de la loi du 8 avril 1965. - COMPETENCE. - Tribunal de premlère instance. - Article 302 du Code civil. -Portée. - Dérogation. - Ministère public. -Pouvoi,rs. - Demande d'attribution du droit de garde.

L'assignation étant antérieure à la mise en vigueur de la loi du 8 avril 1965, le tribunal de première instance était seul compétent pour trancher les litiges rela­tifs à la garde des enf anis et le procureur du Roi avait qualité pour agir.

Refuser compétence au juge réguliè­rement saisi sous l'ancien régime au motif que le nouvel article 302 donne compétence au tribunal de la jeunesse serait violer l'article 92 de la loi du 8 avril 1965 qui dispose que les juridic­tions régulièrement saisies avant la date de sa mise en vigueur restent compé.,. tentes.

L'article 302 règle la garde des enfants après dissolution du mariage; si les cir­constances prévues à l'alinéa 1er ne sont pas réunies, l'alinéa 2 dispose que la garde revient à l'époux qui a obtenu le divorce. Toute{ ois en soifi alinéa 3, il confie à chacune des parties et au mini­stère public le droit de demander une dérogation à ces règles générales.

Il ne peut dès lors être question de dire que la garde doit être confiée au père qui a obtenu le divorce puisque la présente action, recevable, a pour seul but précisément de demander une déro­gation à cette règle.

Attendu que la présente action, inten­tée par le procureur du Roi, a pour but de faire confier la garde des trois en­fants de l'intim~ à l'appelante, leur grand-mère paternelle;

1Attendu que par jugement en date du 30 mars 19'65, l'intimé a obtenu le di­vorce aux torts de son épouse; que ce jugement a été transcrit et que l'intimé est, depuis lors, remarié;

Page 9: IRIBIJnlJI - KU Leuven · (8) Et ce, semble-t-il, déjà en droit romain (De Brouckère et Tielemans, Répertoire, v° Compensation, p. 177). (9) L'arrêt commune de Tamines (C.E.,

Attendu que l'action au fond a été lancée le 18 mai 19'616 par assignation du procureur du Roi et suivie d'une citation par l'appelante devant le juge des référés qui, par ordonnance du 26 mai 1966, lui confiait provisoirement. la garde; que le tribunal, par le jugement entrepris, a confié cette garde à l'intimé;

Attendu que le jugement, après avoir constaté que N ... paraît à l'heure actuelle capable de remplir ses obligations de père et d'éducateur, décide que, par ap­plication de l'article 302 nouveau du Code civil, le tribunal doit confier la garde. des enfants au père qui a obtenu le divorce aux torts de son épouse;

Attendu que l'intimé reprend cet ar­gument et ajoute en ses conclusions que l'action ne serait pas recevable et serait contraire aux dispositions de l'article 302 nouveau;

Quant à la recevabilité de l'action : Attendu que l'assignation du 18 mai

1916'6 est antérieure à la mise en vigueur de la loi du 8 avril 196,5. Qu'à cette épo­que, elle était recevable, le tribunal de première instance étant seul compétent pour trancher les litiges relatifs à la garde des enfants et Je procureur du Roi ayant qualité pour agir.

Attendu que l'article 302. nouveau con­fie désormais compétence au tribunal de la jeunesse po~r statuer après divorce sur une demande de modification aux règles établies par ledit article 3012;

Attendu que refuser compétence au · juge régulièrement saisi sous l'ancien

régime au motif que le nouvel article 302 donne compétence au tribunal de· la jeu­nesse serait violer l'article 92 de la loi du 8 avril t9-65 qui dispose que les juri­dictions régulièrement saisies avant la date de sa mise en vigueur restent com­pétentes;

- Quant à la mesure à appliquer : Attendu que l'article 302 règle la garde

des enfants après dissolution du ma­riage; que si les circonstances prévues à l'alinéa 1°r (ordonnance ou accord) ne sont pas réunies, l'alinéa 2 dispose que la. garde revient à l'époux qui a obtenu le divorce. Que toutefois, en son alinéa 3, il confie à chacune des parties et au ministère public le droit de demander une dérogation à ces règles générales;

Qu'il ne peut dès lors être question de di:r:-e, comme l'a fait le Tribunal, que la garde doit être confiée au père qui a- ob­te.rtu le divorce puisque la· présente ac­tion, recevable, a pour seul but précisé­ment de demander une dérogation à cette règle;

Au fond : Attendu qu'il ressort des divers pro­

cès-verbaux figurant au dossier réguliè­rement versé aux débats par le ministère public, que les renseignements actuels concernant l'intimé, remarié depuis peu, lui sont favorables; qu'il n'en reste pas moins vrai qu'au point de vue moralité, son passé est de nature à inspirer de sé­rieuses craintes quant à son aptitude à bien élever ses enfants;

Que d'autre part le dernier procès verbal, dressé par la police de la jeunesse le 31 octobre 1968, constate que l'intimé et son épouse travaillent tous deux et ne pourraient s'occuper activement de la surveillance des enfants qu'ils devraient confier au ménage d'un demi-frère de N ... ;

Attendu que les renseignements don­nés sur. l'appelante sont extrêmement

élogieux; que depuis 19·63 tous les procès­verbaux relatifs à la garde des enfants vantent son courage, son dévouement et la façon parfaite dont, malgré son âge, elle s'acquitte des devoirs d'entretien -et d'éducation.

Qu'il s'impose également de tenir compte du fait que l'appelante assume la garde des enfants depuis plus de huit ans et que ceux-ci, âgés actuellement de 16., 15 et 11 ans, risqueraient d'autant plus de pâtir d'un changement dans la garde qu'ils déclarent préférer rester près de leur grand-mère;

Qu'il paraît donc de leur plus grand intérêt de confier leur garde à l'appe­lante.

Par ces -motifs :

LA CouR, Réformant la décision entreprise, con­

fie à l'appelante la garde des enfants.

Civ. Charleroi ( l re ch.), 16 janvier 1969.

Siég. : MM. VAN DROOGHENBROECK, vice-prés.; Du­

PONT et G1LLAIN, juges.

Plaid. : MM"5 BoDEUX et R. LoRENT. -

(Orbant c. S.P.R.L. «L'indépendance)), en liquida­tion, Demal et Breda.)

1. SOCIETE COMMERCIALE EN LIQUI­DATION. - PROCEDURE. - Assignation. - Siège social. - N'existe phls. - Assigna­tion au liquidateur. - II. SAISIE-ARRET. -- Base. - Titre. - Jugement non exécutoire par provision et non coulé en force de chose jugée. - Saisie régulière. - Jugement frappé d'appel. - Action en validation de la saisie. - Surséance jusqu'après l'appel. - Juge­ment susceptible d'appel. -·Saisie régulière.

I. - Les sociétés en liquidation sont, en vertu de l'article 69, 6°, du Code de procédure civile, assignées « à leur siège social», les exploits d'huissier ne pou­vant être signifiés au liquidateur que si, en fait, il n'y a plus de siège social.

Il. - Un jugement, non déclaré exé­cutoire par provision, n'en est pas moins, même s'il est frappé d'appel, un titre légal pouvant servir de base à la mesure conservatoire de la saisie-arrêt.

La saisie-arrêt fondée sur ce titre est recevable, sauf à différer la validation jusqu'au moment où l'appel aura été vidé._

Un jugement qui est simplement sus­ceptible d'appel en même temps qu'une sentence définitive à intervenir, peut, a fortiori, servir de fondement à l'acte conservatoire que constitue une saisie­arrêt. Il en est ainsi même si le jugement n'a pas été déclaré exécutoire par pro­vision.

Attendu que l'action tend à entendre déclarer bonne et valable la saisie-arrêt pratiquée à la requête du demandeur, à charge des défendeurs, entre les mains de la société anonyme « Presse démo­crate socialiste de Charleroi», par exploit susdit du 191 décembre 19'67;

Attendu que la demande, à l'égard de laquelle les défendeurs ne font valoir aucun moyen d'irrecevabilité, est rece­vable;

Attendu que les défendeurs sous 2'0

soutiennent que c'est à tort qu'ils auraient été assignés, « la société dont ils sont les liquidateurs étant ,seule habile· à répondre à la demande »;

Que les trois parties défenderesses objectent qu'au surplus, la demande

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n'est pas fondée, la saisie-arrêt ayant été pratiquée et poursuivie « de mauvaise foi», «en vertu d'un jugement qui ne porte pas exécution provisoire, et dont le demandeur en validation sait qu'il sera frappé d'apipel en même temps que la sentence définitive à intervenir»;

Que les défendeurs postulent, recon­ventionnellement, l'allocation, à chacun d'entre eux, d'une somme de dix mille francs, pour procès téméraire et vexa­toire;

Sur le premier moyen pris par les 2• et 3" défendeurs : Attendu, certes, que la liquidation met

fin de plein droit aux fonctions et aux pouvoirs tant des gérants et administra­teurs que des commissaires » et que « la qualité d'organe d'exécution appartient exclusivement aux liquidateurs qui, seuls, représentent la société à l'égard des tiers» (Van Ryn, Droit commercial, t. II, n ° 1050), et que les liquidateurs ont, en leur qualité de représentants de la société en liquidation, le droit de pro­céder au recouvrement des créances de la société et d'intenter, en son nom, tou­tes actions judiciaires (cf. Fredericq, t. V, n° 736; ___:_ Van Ryn, op. cit., n° 1083);

Attendu, toutefois, que la société en liquidation conserve son droit exclusif sur sa dénomination sociale (Wauwer­mans, n ° 925) ainsi que son siège social, et que « la mise en liquidation d'une so­ciété commerciale n'entraîne pas la dis­parition de l'être juridique », la per­sonnalité de la société dissoute survi­vant d'une manière limitée, en vertu de la fiction légale (avis de M. l'avocat gé­néral Hayoit de Termicourt, dans Cass., 7 juill. 1941, Pas., I, p. 29i0);

Que les sociétés en liquidation sont, en vertu de l'article 69, 6°, du Code de procédure civile, assignées « à leur siège social», les exploits d'huissier ne pou­vant être signifiés au liquidateur que si, en fait, il n'y a plus de siège social ( Cass,. 8 janv. 1948, Pas., I, 19; - Nasius, Belg. Jud., 1891, col. 712; - Fredericq, Droit commercial belge, t. V, n° 720, p. 1011; - Van Ryn, op. cit., n° 1047, 1°, p. 102);

Attendu, dès lors, que le 1er moyen est fondé;

Sur le second moyen :

En fait : Attendu qu'il importe de relever les

circonstances de fait relatives au titre qui a servi de base à la saisie-arrêt liti­gieuse; 1) que, 'par sentence du 28 juin 1963,

le conseil de prud'hommes de la Lou­vière a condamné la première défen­deresse à payer au demandeur la somme de 15'6.33,6 francs pour diff é­rents chefs de demande · (appointe­ments; retenues faites indûment sur salaires; frais de voiture; paiement de « week-ends » prestés; congés payés) et qu'elle a, avant dfre droit, pour le surplus de la demande, dési­gné un expert avec mission de déter­miner les autres sommes qui seraient éventuellement dues au demandeur;

2) que cette sentence fut signifiée à la première défenderesse, par exploit de l'huissier de justice Canon, de rési­dence à Charleroi, du 16 juillet 19i>3;

3) que le demandeur fait valoir, en ter­mes de conclusions - et sans être contredit sur ces points par ·1a pre­mière défenderesse

Page 10: IRIBIJnlJI - KU Leuven · (8) Et ce, semble-t-il, déjà en droit romain (De Brouckère et Tielemans, Répertoire, v° Compensation, p. 177). (9) L'arrêt commune de Tamines (C.E.,

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a) qu'appel fut interjeté par la pre­mière défenderesse, le 29 juillet 1916,3, et que cet appel fut déclaré non recevable par arrêt dll conseil de prud'hommes d'appel de Mons, du 15 février l964;

b) que l'expert commis évalue à 183.736 francs la somme qui serait encore due au demandeur;

c) que le demandeur a, le 2'4 juin 1968, donné avenir pour ramener la cause devant le conseil de prud'­hommes de La Louvière et que les débats sont fixés à l'audience de cette juridiction du 10 janvier 1969;

En droit : Attendu que la question litigieuse est

de savoir si la sentence du conseH de prud'hommes de La Louvière du 28 juin 196.3 - sentence qui n'a pas été et qui ne pouvait pas être déclarée exécutoire par provision et qui n'est pas coulée en force de chose jugèe puisqu'elle sera susceptible d'être frappée d'appel en même temps que la sentence à inter­venir sur le surplus de la demande ori­ginaire - peut constituer le titre néces­saire à la saisie-arrêt litigieuse;

Attendu, certes, qu'est controversée la question de savoir si l'on peut admettre la validité d'une saisie-arrêt pratiquée en vertu d'un jugement non déclaré exé­cutoire par provision et qui est frappé d'appel soit avant la saisie, soit posté­rieurement à c1elle-ci;

Qu'une certaine opinion s'est pronon­cée pour la négative (cf. doctrine et jurisprudence citées par Rép. prat. dr. belge, v 0 Saisie-arrêt, n° 185);

Que, l'opinion qui opte pour l'affirma­tive et qui doit, _semble-"".til, être préfé­rée, fait valoir notamment « que si un créancier peut saisir-arrêter en vertu . d'une ordonnance du juge, rendue sur simple requête, a fortiori doit-il pouvoir le faire ert vertu d'un jugement précédé d'un débat contradictoire (Rép. prat. dr. belge, eod., v 0

, n° 186) ;, que la doctrine et la jurisprudence belges les plus récen­tes partagent cette dernière opinion et considèrent que, même frappé d'appel, le jugement n'en est pas moins un titre légal pouvant servir de base à la mesure con­servatoi:J::e de la s,aisie-arrêt; que la saisie­arrêt fondée sur ce titre est recevable, sauf à différer la validation jusqu'au moment où l'appel aura été v1dé (cf. Braas, Procédure d'ouverture des suc­cessions, Voies d'exécution, 2° éd., p. 255; - Zwendelaar, Formulaire annoté - de proc. civ., par Van Reepinghen et Reyn.:.. tens, t. III, n° 28; - jug. ~Gv. Bruxelles, 2:2 mars 1960, J.T., p. 760 et note con­forme Guy Horsmans; - Civ. Anvers, 3° ch., 27 févr. 1951, Rechts. Weekbl., 1950-51, col. 1184; - Liège, 7 mai 1934, Jur. Liège, 21; - cf. aussi Glasson, Morel et Tissier, t. IV, pp. 19.8-199);

Attendu qu'il importe de rappeler, en effet, que la saisie-arrêt est, d'abord, un acte conservatoire et qu'elle ne devient un · acfe d'exécution que par l'effet du jugement de validité (1Cass. fr., 10 août 1881, Dall. pér., 1882, p. 307);

Que, d'autre part, pour qu'un jugement puisse servir de base à une saisie-arrêt, il faut qu'il constitue créancier le saisis­sant, en constatant à son profit l'exis­tence d'une obligation ou - comme en l'espèce· - en portant condamnation (cf. Rép. prat. dr. belge, v 0 cit., n° 169);

Attendu qu'il importe peu que l'exé­cution provisoire ait été, oµ non, ordon-

née, le problème ne se posant pas sur le plan de l'exécution forcée, mais sur le plan des qualités de la créance, et l'appel n'ayant pas d'effiet suspensif en ce ·qui concerne les effets du jugement a quo autres que la force exécutoire (cf. note d'observation Guy Horsmans sous Civ. Brux., 22 mars 1960, déjà cité);

Attendu qu'en l'espèce, il n'est d'ail­leurs pas question d'une saisie-arrêt dans laquelle le jugement servant de titre au­rait été frappé d'appel avant, même que la saisie ne fût pratiquée, ou qui serait frappé d'appel postérieurement à la sai­sie;

Qu'en l'espèce, en effet, le jugement servant de titre est seule~ent suscep­tible d'être frappé d'ap·pel en même temps que la sentence à intervenir sur le surplus de la demande sur lequel le Conseil de prud'hommes de La Louvière a sursis à statuer; que rien n'établit, d'ailleurs, que ce jugement sera, néces­sairement, frappé d'appel;

Attendu que ce jugement, encore qu'il n'ait pas été déclaré exécutoire par pro­vision et qu'il soit susce•ptible d'un re­cours, constitue un titre authentique et régulier pouvant servir de base à l'acte conservatoire que constitue la saisie­arrêt; que la possibilité d'appel ne con­stitue assurément pas un obstacle à la formation d'une saisie-arrêt (cf. Rép. part. dr. belge, v 0 cit., nos 181, 18·2 et réf. citées);

Qu'il ·y échet - ainsi que le postule, d'ailleurs, le demandeur en conclusions - de surseoir à statuer sur la validation de la saisie-arrêt jusqu'après décision dé­finitive à intervenir devant les juridic­tions prud'homales;

Sur la demande reconventionnelle formée par les défendeurs et tendant à l'allo­cation, à chacun d'entre eux, d'une somme de 10.000 francs pour procès téméraire e~ vexatoire : Attendu, et sous le couvert des motifs

relevés plus haut, que les défendeurs n'apportent, en aucun façon, la preuve que la saisie-arrêt aurait été « pratiquée et poursuivie de mauvaise foi »;

Par ces motifs :

LE TRIBUNAL,

Statuant contradictoirement,

Sur la demande principale ·: Dit l'action non recevable en tant

qu'elle est formée contre les défendeurs Dem.al et Breda;

Reçoit la demande en tant qu'elle est formée contre la première défenderesse, la société de personnes à responsabilité limitée « Editions L'Indépendance »;

Sursoit à statuer, quant au fond, jus­qu'après décision définitive devant les juridictions prud'homales;

Sur la demande reconventionnelle La dit non fondée.

Comm. Liège ( 2e ·ch.), 29 octobre 1968.

Plaid. : MMes Jean MATERNE et Paul BERTRAND

loco MELOTTE.

1. DOMMAGES-INTERETS. - Intérêts moratoires. - Article 1153 1 du Code civil. -Disposition non d~ordre public. - II. CLAU -SE PENALE. - Délai de grâce. - Applica­tion.

I. - Si les dérogations conventionnel­les au droit commun sont présumées lici­tes, le débiteur doit toutefois être reçu à renverser cette présomption et à en dé­montrer le caractère illicite.

L'article 1153 n'est pas d'ordre public et les parties peuvent, dans leur conven­tion, stipuler que les dommages-intérêts moratoires sont supérieurs à l'intérêt légal. -----

II. - Seule la cause étrangère ou force majeure peut exonérer le débiteur de ses obligations et l'article 1244 du Code ci­vil n'étant pas fondé sur cette disposi­tion, mais bien sur la situation malheu­reuse du débiteur de bonne foi, la clause pénale doit être appliquée comme toute autre convention sur dommages-intérêts, sous la seule réserve que le délai de grâce vaudra pour l'exécution de Ja clause pénale comme pour celle de. l' obli­gation principale dont elle est l'acces­soire.

Dans le droit : Attendu que l'action tendait à l'ori­

gine au paiement des sommes suivantes : Facture 596·5 du 11 juillet 1967 34.399 F Frais de protêt Remises retirées Intérêts conventionnels au

,iour de l'assignation Indemnité forfaitaire de 10 %

prévue aux conditions gé­nérales de vente

431 3.572

489

3.840 42.731 F

Attendu que la défenderesse a payé, de­puis le début de la procédure la somme de 34.399 francs et celle de 431 francs; qu'elle s'en réfère à justice pour le sur­plus de l'exception de l'indemnité for­faitaire dont elle conteste la débition;

Attendu que les conditions générales de vente de la demanderesse que la dé­fenderesse a acceptées par un silence prolongé, contiennent la cl~use suivante : «Le non-paiement d'une facture à son échéance entraîne d'office l'application des intérêts moratoires au taux de 8 % sans mise en demeure préalable... et la débition à titre de clause pénale d'une indemnité forfaitaire égale à 10 % du montant impayé ·sans que ladite indem­nité puisse être inférieure à 300 francs » ;

Attendu que la défenderesse soutient que cette clause serait illicite;_

Attendu que les parties sont libres, en droit privé, de déroger conventionnelle­ment au droit commun, nofamment en déterminant les cas où les dommages-in­térêts seront dus et en fixant d'avance et forfaitairement le montant (Cass., 7 sept. 1901, Pas., 1902, I, 2'012; - Cass.,. 6 juin 1912, Pas., 1, 3321 ; - Cass., 2.5 mars 1932, Pas., 1, 169; - Comm. Liège, 14 déc. 1962, Jur. Liège, 1963, 156);

Qu' «alors qu'en droit commun, les dommages-intérêts sont subordonnés à la réalité d'un préjudice, lequel doit être prouvé par le créancier, la débition de la somme stipulée dans la clause pénale est indépendante de l'existence d'un dommage, il y a forfait.

»De par la volonté des partiès, l'exis­tence même du préjudice est présumée et le débiteur ne serait pas admis à prouvér que l'inexécution n'a causé au­cun dommage au créancier » -(cass., 6 juin 1912, Pas., I, 332; - Graulich, Théorie générale des obligations, p. 54);

Attendu que si les dérogations conven­tionnelles au droit commun sont présu­mées licites, le· débiteur doit toutefois être reçu à renverser cette présomption

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et à en démontrer le ·caractère illicite (Comm. Liège, ·14 déc. 1962; - Jur. Liège, 1962-63, 156);

Attendu que, pour certains, la clause pénale litigieuse serait illicite parce qu'elle établirait une peine civile indé­pendante de tout dommage;

Qu'une jurisprudence a ainsi décidé qu'est illicite la clause pénale conven­tionnelle dès le moment où le créancier n'établit pas l'existence d'un dommage (Comm. Brux., 9 janv. 1948; - Jur. comm. Brux., 23; - Comm. Brux., 10 janv. 19'59, 106; - Rép. prat., Compl. t. 2, v0 Devis et marchés, 132);

Qu'une autre jurisprudence a décidé, en cas de stipulation parallèle d'intérêts conventionnels et de forfait, que l'inté­rêt conventionnel répare le dommage occasionné par le défaut de ponctualité du débiteur et que l'indemnité forfaitaire reste dès lors « sans objet et ne peut être interprétée que comme un_e peine civile, une amende privée, indépendamment de tout préjudice subi par la demanderesse; qu'on ne répare pac ce qui est déjà ré­paré» (Comm. Brux., 24 mars 1961, Jur. comm. Brux., 274 et note; - Comm. Ver­viers, 5 déc. 1963, Jur. Liège, 19-63-64, 183; - Comm. ·Liège, 16 févr. 1963, Jur. Liège 1964-65, 239; - Comm. Brux., 24 mars 1966, Jur. comm. Brux., 1968, 7; - Comm. Brux., 4 juill. 19·67, Jur. comm. Brux., 1968, 12; - Comm. Brux., 24 nov. 1967, Jur. comm. Brux., 1968, 18; -Comm. Brux., 1er déc. 1967, Jur. comm. Brux., 1968, 14; - Y. Hannequart, Rev. crit. jur. belge, 1960, 48 et s.);

Attendu que ces jurisprudences per­dent manifestement de vue qu'en cas de clause pénale : 1° l'existence même de préjudice est présumée et le débiteur ne peut être. reçu à prouver l'absence de dommage; 2° les parties sont libres de fixer à leur gré . la réparation de ce dommage présumé et lon ne voit pas que l'ordre public s'opposerait à ce que cette réparation comporte une partie fixe et une partie proportionnelle à la durée du retard;

Que l'article 1153 n'est pas d'ordre . public et les parties peuvent, dans leur convention, stipuler que les dommages­intérêts moratoires sont supérieurs à l'intérêt légal - · clause pénale (Grau­lich, op. cil., p. 57) ;

Attendu que, pour d'autres, et parmi eux la défenderesse, la clause pénale li­tigieuse, serait, en outre illicite parce qu'elle restreindrait le droit du débiteur de se défendre en justice;

Attendu qu'il convient tout d'abord de souligner que l'arrêt rendu par la Cour de cassation du 29 septembre 19·67, (Jur. comm. Brux.) a déclaré nulle, non pas toute clause pénale, comme le vou­drait la défenderesse, mais uniquement la èlause « générale et illimitée, par la­quelle toute contestation par le débiteur, de son obligation de payer, entraîne dès qu'elle donne lieu à une action judi­ciaire, l'obligation de payer la majora­tion, sans distinction aucune quant au caractère raisonnable et admissible ou non de la défense du débiteur »

Qu'ensuite, la majoration litigieuse est indépendante de toute action en justice et est due en raison du défaut de paie­ment à l'échéance;

Que l'on peut toutefois se demander si, comme le soutient la défenderesse, ladite claus_e n'a pas pour objet de tenir en échec le « droit» du débiteur de s'adresser au juge pour obtenir des dé­lais de paiement;

Attendu que seule la clause étrangêre ou force majeure peut exonérer le dé­biteur de ses obligations et que l'article 12:44 du Code civil n'étant pas fondé sur cette disposition, mais bien sur la situa­tion malheureuse du débiteur de bonne foi, la clause pénale doit être appliquée comme toute autre convention sur dom­mages-intérêts, sous la seule réserve que le délai de grâce vaudra pour l'exécu­tion de la clause pénale comme pour celle de l'obligation principale dont elle est l'accessoire;

Attendu qu'il a sans doute été décidé que la clause majorant forfaitairement la facture non payée à son échéance était illicite comme «tendant directement à empêcher le débiteur de solliciter un délai de grâce», (Comm. Brux., 27 oct. 19·48, J.T., 594; Debacker Jur. comm. Brux., 1968, 53);

Qu'outre que cette théorie manque de logique - car elle devrait également dé­clarer illicites les intérêts moratoires -elle procède d'une confusion; que l'ob­.iet de la clause n'est pas d'empêcher

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le débiteur de s'adresser à la justice pour obtenir des délais, mais bien d'in­demniser le créancier du dommage que lui cause le retard de paiement, dom­mage dont les parties ont reconnu l'exi­stence et fixé librement et forfaitaire­ment la hauteur, que la clause pénale a peut-être pour effet d'encourager les dé­biteurs à exécuter fidèlement leurs en­gagements, mais que l'un ne découvre pas que le législateur ait jamais eu l'inten­tion contraire (voir Moreau-Margrève, Rev. crit. jur. belge, 1966, pp. 435 et 443 notamment)°;

Attendu qu'il résulte de ces considé­rations que la clause litigieuse est par­faitement licite;

Par ces motifs : LE TRIBUNAL,

Condamne la·· défenderesse à payer à la demanderesse la somme de 3.572 francs représentant la remise rapportée, celle de 489 francs représentant les in­térêts conventionnels échus au jour de l'assignation et celle de 3.840 francs re­présentant l'indemnité forfaitaire;

SOCIÉTÉ GÉNÉRALE DE BELGIQUE

Résumé du rapport annuel sur /'exercice 1968 <1>

- SUCCES DE L'AUGMENTATION DE CAPITAL, D'UN MONTANT DE 1.267 MILLIONS DE FRANCS, PLACEE EN MARS 1968.

.:_REPARTITION AUX ACTIONNAIRES, A TITRE DE DIVIDENDE POUR L'EXERCICE 1968, D'UN MONTANT TOTAL DE 522 MILLIONS DE FRANCS, CONTRE 432 MILLIONS EN 1967.

- DI.VIDENDE UNITAIRE PORTE DE 540 FRANCS A 560 FRANCS PAR PART DE RESERVE.

Le Rapport. de la Direction sur l'exercice 1968 expose qu'à La faveur de l'augmentation de c·apital réalisée en mars, un meilleur équi­libre a pu être rétabli entre les fonds propres de la Société et ses investissements d•e por­tefeÙille. 'Grâce à cet état de choses, la So­ciété Générale de Belgique a pu poursuivre sa politique d'expansion et d.e rationalisation.

Ainsi, elle a participé à l'augmentation de capital effectuée par la Métallurgie Hobo­ken, en vue d·e consolider son.leadership dans le d.omaine des métaux non ferreux tradi­tionnels et d:ans plusieurs secteurs d,e pointe; à celle de Sid.mar à Gand, qui après un dé­marrage réussi tant sur le plan technique que financier, construit un second train à froidi; à celle d'Eurolease, spécialisée d1ans la location-financ·ement; à la création de la Société européenne de factoring, dont l'objet est l'escompte sans recours d·e factures ... Elle a, par ailleurs, pris divers. intérêts dans le Groupe Martin dans le cadre d.'un accord de coopération industrielle et d'appui flnan".' cier.

La plupart des entreprises d.ans lesquelles la Société Générale possêd·e une participation financière ont poursuivi leur d,éveloppement sous d.ivers·es formes. Le Rapport signale no­tamment à EBES, filiale de Traction. et Electricité, l'installation d·e nouveaux groupes dans les centrales -existantes, le début des travaux à la centrale de Kallo, les études re'latives aux centrales nucléaires de Tihange et Doel; la participation d.'ACEC au consor­tium international qui a reçu d'Intelsat la commande de 4 satellites; le d.éveloppement à Overpelt, dans le cadre d'une nouvelle société Overpelt-Plascobel à laquelle la So­nna s'est associée, d.es activités dans le domaine des plastiques; la mise au point, par Gl:averbel d'un nouveau verre de sécurité à haute résistance mécanique, appe;ié à un grand avenir, notamment dans le domaine

de l'automobile; le projet d.e Cockerill­Ougrée-Providence d'install:er à Tilleur une nouvelle ligne d'étamage électrolytique et un train pour la production de tôles à froid « minces » et à Marchienne., la construction d'un nouveau trai·n à pro.filés ... Dans le sec­teur des services, ·le Rapport relève entre autres. à la Société Générale dè Banque, lé d.éveloppèment de l'effort financier à l'ex­portation, la collaboration accrue, à l'étran­ger, avec des sociétés amies, l'extension de l'équipement électronique et- des services à la cUen tèle (Compte G); à la Compagnie Maritime .Belge, l'ut1Usation intensive des containers pour le transport dés marchan­d.tses et, par voie de conséquence, la com­mande passée à Cockerill-Y:ards-Hobokèn d'un navire ultra moderne pouvant contenir plus de 1.500 containers, etc ... En ce qui con­cerne la contribution des entreprises du Groupe à l'infrastructure du pays, le Rapport cite le rôle de la Compagnie d'Entreprises C.F.E. dans la construction de l'écluse de Terneuzen et, avec Foraky, dans celle du tunnel sous l'Escaut, etc ...

Le Rapport annuel traite également de divers problèmes d'intérêt général, qui revê­tent en ce moment une grande importance pour l'industrie belge : - le financement d·es nouveaux investisse­

ments nécessaires à la poursuite de l'ex­pansion et à la réalisation du plein emploi;

- la poursuite de l'intégration européenne; - certains aspects de l'action des Pouvoirs

publics, à savoir la politique régionale et la politique scientifique.

(1) Ce d.ocument peut être obtenu, sur simple demande, au Servive des Relatl.ons extérieures de la Société Générale de Bel­gique, 51, rue des Petits-Car·mes, Bruxelles 1. • Tél. (02) 13.88.55.

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LA CHRONIQUE JUDICIAIRE

V i E DU

/\LA i S JEUNE BARREAU DE BRUXELLES.

Cours de technique juridique.

Leçon du 17 février 1969.

LA plupart des stagiaires de première année sont très concernés par le droit pénal;

dès les premières semaines du stage, ils en­trent brutalement en contact avec un monde nouveau : la prison; rares sont ceux que cela laisse indifférents.

En outre, la découverte progressive du droit et de la procédure pénale ne se fait pas sans un profond malaise; de nombreuses questions, reconnues préoccupantes par tout le monde ou presque, sembl.ent souvent trop bien « inté­grées» à la routine répressive : interrogatoires de police un peu trop intimidants, détentions préventives insuffisamment. justifiées, dossiers de personnalité très superficiels, racisme fla­grant de certains membres (une minorité, je pense) du personnel pénitentiaire, sont quel­ques exemples - il y en a probablement beau­coup d'autres - que ma très courte expérience m'a permis de rencontrer à plusieurs reprises.

C'est dire que l'exposé de Mre Vanderveeren était attendu avec intérêt; il n'a pas déÇu.

Dans une première partie, nous eumes droit à de nombreux conseils pratiques pour que s'établissent de bons rapports tant avec les ma­gistrats qu'avec les clients.

« Allez voir le détenu tous les jours, dans les premiers temps de sa détention » nous con­seilla M10 Vanderveeren, qui d'ailleurs insista particulièrement sur l'importance des rapports humains· qui doivent· s'établir avec le prévenu; généreux conseil, mais pour la réalisation du­quel ·on prend rapidement conscience de la pauvreté de sa formation, humaine en général et psychologique en particulier.

« Pour bien connaître vos dossiers, deman­dez-en une copie qui vous permettra de tra­vailler beaucoup plus efficacement dans le cal­me de votre bureau que dans l'atmosphère peu studieuse du greffe», nous dit en substance notre conférencier; ce serait avec plaisir, mais qui paiera les frais de copie des dossiers << pro Deo >>?

Dans une deuxième partie, M1e Vanderveeren, « dans le. sillage du Concile, qui le premier a pris le chemin de la contestation», entreprit d'attirer notre attention sur certaines faiblesses de notre procédure pénale : une analyse cri­tique de la loi sur le sursis et la probation fut notamment suivie d'un brillant résumé des principaux griefs formulés en matière de dé­tention préventive; la conclusion de M10 Van­derveeren n'est, hélas, que trop connue : si le texte même de la loi de 1874 n'est pas en cause, l'esprit qui gouverne son application est trop souvent contraire à de nombreux principes con­tenus dans la Convention européenne de sau­vegarde des droits de l'homme.

Mie V anderveeren a su éveiller ou confirmer une prise de conscience si nécessaire touchant ce brûlant problème.

Serge LEVY.

L~ colloque sur la saisie immobilière.

Journée du 18 février 1969 organisée par l' Association belge

des entreprises hypothécaires.

L 'AssocIATION belge des entreprises hypothé-caires a organisé le 18 février 1969 à

Rhode-Saint-Genèse dans le cadre - évoquant celui des << classes de neige » - ·du Club Bouse de la S.A. Royale Belge, une journée d'étude destinée à familiariser les participants avec les dispositions du Code judiciaire sur la saisie immobilière.

La mise en vigueur d'une partie de ces dis­positions (celles qui concernent la saisie-exé­cution immobilière) pourrait, on le sait, être prochainement décidée.

Le colloque auquel nous avaient conviés le bureau de la Fédération et son président M. P. Evrard était centré sur l'étude d'un cer­tain nombre de problèmes pratiques suscités par l'interprétation ou l'application des textes nouveaux.

L'intérêt de la discussion fut grand autant que fut parfaite l'organisation de cette réunion.

D'entrée de jeu, M. H. della Faille de Lever­ghem fait en néerlandais un exposé des lignes générales de la législation qui remplacera bien-

. tôt la loi du 18 août 1854. · Le secrétaire général, M. Favers, convie en­

suite les participants à examiner un certain nombre de questions que déjà se posent les praticiens, et auxquelles des solutions - su­jettes à réflexion - ont été proposées.

Nul n'ignore qu'en matière de procédure, toute législation nouvelle présumée - de fa­çon irréfragable - améliorer le statut exis­tant, a pour effet premier de . substituer aux problèmes anciens souvent résolus par la pra­tique des problèmes nouveaux propres à ra­nimer les controverses.

Que penser notamment du fait qtte le Code judiciaire soucieux d'efficacité autant que d'é­conomie de frais (?), n'a imposé aucun délai au créancier poursuivant pour déposer la requête aux fins de faire désigner le notaire chargé de procéder à l'adjudication (art. 1580), sans que le retard ou l'abstention de ce,créancier consti­tue un motif permettant la subrogation d'un autre créancier dans les poursuites ?

Que penser du fait que l'ordonnance dési­gnant le notaire reste susceptible d'appel (art. 1624) ?

Que penser du fait que l'on a rendu oppo­sable au tiers la convention d'indivision pour autant qu'elle soit transcrite conformément à l'article 815 nouveau (à ce propos, !'Exécutif devra se garder d'oublier lorsqu'il mettra en vigueur l'art. 1561, de mettre également en- vi­gueur l'art. 815 nouveau du moins << en ce qu'il subordonne à la transcription l'opposabilité au tiers de la convention d'indivision ») ?

Que penser de la rédaction de l'actuel ar­ticle 1596 que les travaux parlementaires, dans le souci de condenser l'article 50 de la loi de 1854•, ont rendu inintelligible ?

Que penser ? ... Mais je vais paraître hargneux. On attribuera

cette mauvaise humeur (peut-être non sans rai­son) à l'impatience que ressent un « ancien » obligé de recommencer son stage.

Qu'à cela ne tienne ! Rendons pourtant à César ce qui lui revient

et aux commissaires royaux ainsi qu'à ceux qui les ont aidés le juste hommage qu'appelle le travail qu'ils ont accomplis.

Concédons que nombre de modüications étaient attendues et souhaitées et admettons qu'après l'effort nécessaire d'assimilation qu'elles requièrent et, moyennant certains amé­nagements, la réforme engagée portera ses fruits.

C'est d'ailleurs évidemment dans la con­science de cette perspective encourageante que M. le commissaire royal Krings, avec MM. Fet­tweis et Storme, respectivement professeurs à l'Université de Liège et de Gand, sont venus l'après-midi pleins de belle assurance répondre aux questions que leur posèrent les participants, réconfortés et détend~ par lagréable déjeuner qui leur avait été offert.

C'est ainsi qu'entre beaucoup d'autres choses, on apprit : - que lorsque l'adjudication doit avoir lieu

en deux séances, seule la première doit se tenir dans les six mois de lordonnance dé­signant le notaire (art. 1587) et ce, nonob­stant le texte de rarticle 1622 dont le ca­ractère trop général est imputable à une << distraction >) du législateur. A fortiori - question qui préoccupe déjà actuellement beaucoup de notaires - l'ad­judication sur surenchère ne doit-elle pas

· avoir lieu dans ce délai ? - que le paiement par l'adjudicataire du prix

de son acquisition ne serait libératoire à l'égard des créanciers que si le cahier des charges le prévoit;

- que lon envisage de remédier à une lacune en permettant au créancier saisissant dont l'exploit de saisie porte la mention du re­fus de transcription (parce qu'il existe une saisie déjà transcrite) de présenter requête aux fins de désignation du notaire en cas d'abstention ou de retard du créancier dont la saisie a été transcrite;

- que l'on envisage d'assouplir la procédure de la Caisse des dépôts et consignations dont le rôle est accru. Etc.

La Fédération toyale des notaires de Belgi­que, était représentée à ce colloque notamment par son président, M. le notaire Van Hùve, et le notfl.ire de Ville de Goyet, dont les inter­ventions animèrent fréquemment le colloque.

F. LAINÉ.

r im-

.TJ-lbMJ S 1~~s,MUSbS

Les vaches jalouses.

Vaches noires des prairies noires, Dont seuls on voit ces trayons d'astres Et ce lait fraîchement tiré·· Dans une jatte à lune, au ciel.

Mais sur terre les vaches vertes Font mieux, se glorifient d'avoir D'une écuelle fait surgir Etoiles en mouches à miel.

Marcel LA HAYE.

* *

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LES DEUILS JUDICIAIRES

René PEYRALBE.

I L nous a quittés voici quelque temps déjà, un matin de ce rude hiver.

Pendant plus de quarante-cinq ans, il vint dans ce palais par l'accomplissement de son devoir pro­fessionnel mais aussi et tout autant par l'amour du barreau et de la vie judiciaire dont son père, M. Amédée Peyralbe, président du tribunal de com­merce lui avait donné le goût.

Il traitait ses dossiers avec un soin, entraînant la fidélité et la confiance de ses clients et plaidait avec une fougue que seul un certain dépérissement de santé allait, en sa fin de vie, atténuer.

Son enthousiasme se transposait aussi dans nos activités de culture et de confraternité, spécialement à la Conférence du Jeune barreau et sans s'arrêter seulement à l~ commission mais - pendant très longtemps - dans le cadre de nos revues, joignant l'art des couplets aisés à celui de l'humour parfois féroce.

L'honnête et excellent avocat se doublait d'un patriote, qui avait franchi en 1914-18, après plusieurs tentatives, les fils électrifiés; en 1940-45 il appartint aux groupes d'otages réguliers des trains allemands et nous avons très vite oublié les risques de cet odieux système pour le fonctionnement duquel les avocats ont - si l'on ose dire - bénéficié d'un trai­tement préférentiel.

Au printemps 1944, inscrit sur d'autres listes, me­nacé, puis traqué, René Peyralbe dut chercher asile.­A nos premières élections au conseil après la libé­ration, il reçut l'hommage que méritaient et la haute valeur de sa carrière professionnelle et son civisme.

Ce caractère, puissamment original et attachant, se ressentait de son ascendance auvergnate : intran­sigeance compensée de bonté, goût de la culture exi­geant un décor raffiné, que n'altérait pas le sérieux de son métier, et, par-dessus tout, le culte de l'ami­tié, manifesté plus particulièrement par le dévoue­ment et l'aide morale ou matérielle la plus désinté­ressée et la plus délicate.

Il savait aussi souffrir et les épreuves ne l'ont pas seulement frôlé. Elles s'atténuaient à la constatation, empreinte de fierté, d'une relève assurée à bien des titres par ses trois enfants, dont par Me Andrée Pey­ralbe-Hayoit de Termicourt et par M. le juge con­sulaire Jacques Peyralbe, au sein même de notre pa­lais.

En écrivant ceci, mes pensées allaient vers eux, vers Mme René Peyralbe ·dont les ombres accablantes du chagrin s'estomperont aussi par la lumière irra­diée par tant de petits-enfants.

Et moi, je sais, qu'avec ce voyage sans retour, s'est brisée une amitié entamée avant l'école pri­maire et par laquelle cette âme d'élite me combla des richesses les plus durables.

Jean TttÉVENE~.

ASSOCIATION BELGE DES EXPERTS -ABEX - (groupant les experts de toutes les disciplines). ·La liste des experts avec le détail de leurs spécialités est envoyée gracieusement aux magistrats et aux avocats. Toute coITes· pondance est à adresser au secrétaire général, M. Jean-G. BASTIN, 40, quai du Commerce, Bruxelles ·1. Tél. 18.78.10.

Techniques probatoires ... , force proban­te ... , possibilités probatoires ... , valeur pro­bante ...

Sommes-nous en matière de preuve, comme l'indique le titre de l'étude à la­quelle ces mots sont empruntés : le droit de la preuve? Ou en matière d'épreuves examinatoires? Ou encore de probation, cette institution récente de notre droit pénal?

Distinguons.

Probant, probatoire, probation dérivent tous trois de probare : prouver, tout comme probable et probabilité, ·d'ailleurs. Mais non probe et probité qui sont issus, eux, de probus. Ni probatique, terme d'antiquité judaïque, dérivé de probaton : menu bétail, et qui désignait une piscine, près du temple de Salomon, où étaient purifiés les animaux destinés aux sacrifices.

Probant ne s'est pas éloigné de son sens primitif. Est probant, ce qui prouve.

Probatoire s'en est en revanche écarté et ne se dit plus que des actes qui constatent la capacité d'un étudiant. Les examens uni­versitaires sont des actes probatoires.

Terme d'église, puis de droit, la proba­tion est, dans certains ordres religieux, ce qu'est, dans c:l'autres, le postulat : un temps d'épreuve qui précède le noviciat.

C'est, en droit, anglais d'abord, français ensuite, belge enfin, une forme édulcorée de répression.

Epreuve et éprouver émanent, eux aussi, de probare. D'où l'épreuve judiciaire, du feu, de l'eau, de la croix ...

0 mystères de l'étymologie! Ne la négli­geons cependant point et rappelons-nous ce propos de Jean Paulhan qui consacra son œuvre à « préciser le rapport du sens et des mots» (Claude Mauriac) : s'il m'était donné, quelque jour, de connaître à fond le langage, tout le reste me serait donné de surcroît.

ThRTIUS.

BÏBLÏO&RAPHIE

Louis V AN BUNNEN : « Aspects actuels du droit des marques dans le Marché com­mun•· - Centre interuniversitaire de droit comparé, Bruxelles, 1967, 690 pages.

Ce serait faire injure aux lecteurs de ce journal que de leur présenter Louis Van Bunnen. L'esprit critique de l'auteur de tant d'études et notes parues ici s'est affirmé au fil des ans, ne craignant pas de remettre en question des solutions généralement acceptées et de déterminer des changements de juris­prudence, si pas dè législation (voyez la compétence du juge de l'action en cessation· en matière d'actes de concurrence interdite).

Si .Louis Van Bunnen avait eu 20 ans de moins, on l'aurait sans doute trouvé sur les marches de la Sorbonne, en mai· dernier, au moment où sortait son

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bouquin (portant erronément la date de 1967). C'est ce même esprit de contestation qu'on retrouve avec plaisir dans l'ouvrage sous revue.

Le propos de l'auteur nous est clairement expliqué dès le début. Entre le traité général, qui aurait exposé à de nombreuses redites et la thèse exhaustive mais trop spécialisée, Louis Van Bunnen choisit une voie médiane dont l'axe est l'évolution du droit des marques depuis 3/ 4 de siècle. Cette voie sera suivie en quelque sorte le long de la ligne de faîte euro­péenne d'où l'on découvre, grâce au recours à la méthode comparative, les aspects actuels du droit des marques, qui font aujourd'hui question.

Tout en centrant son étude sur ces grands pro­blèmes, l'auteur ne dédaigne cependant pas d'entrer dans le détail des sujets qu'il aborde; la doctrine et la jurisprudence de cinq des six pays de la C.E.E. sont passées au peigne fin et aucune décision quel­que peu importante n'a échappé aux minutieuses recherches de Louis Van Bunnen. On lui saura cer­tainement gré de nous offrir un si complet tableau de chasse.

* * * Ce qui s6duit tout d'abord le lecteur, c'est le plan

de l'ouvrage.

Conçue suivant une double perspective spatio­temporelle, l'œuvre - si différente des ouvrages classiques offrant une analyse statique de la ma­tière - manifeste un dynamisme qui retient l'atten­tion et, si celle-ci vient à faiblir, elle est réveillée par les changements de plan, les « flash back ", les incursions dans les affaires célèbres, selon une mé­thode qui n'est pas sans analogie avec le langage du cinéma et qui est mise en relief par les change­ments de typographie.

L'ouvrage, qui tend à décrire l'évolution du droit des marques suivant les manifestations qu'en donne l'état des divers droits nationaux au sein du Marché commun, est construit au départ de deux hypothèses de travail, la première étant l'évolution des fonctions économiques de la marque et, la seconde, l'évolu~ tion du droit de la concurrence.

Ces deux fils conduoteurs du développement de la pensée de l'auteur se retrouveront dans tous les chapitres de l'œuvre, dans des proportions diverses évidemment, commandés par les besoins de la de­scription, sinon de la démonstration.

On suivra aisément l'auteur dans le rappel de l'évolution des fonctions économiques de la marque, mises pour la première fois en valeur par la doc­trine allemande durant l'entre-deux guerre, et tout récemment encore, par l'ouvrage de M. Claude­Henri Giraud, sur "L'importance économique de la marque». Inçlicatrice d'origine il y a un siècle, au temps où elle était en quelque sorte la signature du fabricant, ralliant la clientèle autour de son éta­blissement industriel ou commercial, la marque a aujourd'hui une valeur propre, elle est signe de la qualité du produit lui-même et c'est vers celui-ci que les amateurs sont attirés.

Cette évolution de la fonction économique de la marque entraîne comme corollaire une mutation de sa fonction juridique, mutation qui est d'ailleurs en pleine élaboration, et n'a pas encore atteint le même développement dans tous les pays.

Louis Van Bunnen indique clairement les consé­quences qui en résultent sur le plan de la liaison de la marque à son titulaire, des conditions de son appropriation, des conflits soiit horizontaux, soit ver­ticaux que peut engendrer son usage par des tiers. Les descriptions sont sûres, illustrées par des exem­ples concrets bien choisis; . les comparaisons et rap­prochements sont instructifs, assaisonnés toujours de cet esprit critique, qui n_e peut, certes, être taxé de trop respectueux envers les Anciens. · On félicitera l'auteur d'avoir ainsi rassemblé les éléments d'une vaste synthèse, qui n'attend, pour son achèvement, que le temps que soient opérées partout les transfor­maitions législatives.

On sera plus réservé en ce qui concerne la seconde hypothèse de travail, à savoir la subordination du droit des marques au droit de la concurrence, entendu dans sa conception contemporaine de régle­mMtation du jeu de la concurrence.

Certes, et personne ne le contestera, surtout depuis la magistrale analyse qu'en a faite le doyen Roubier, le droit des marques, comme les autres diroits intel­lectuels, est né et ne se développe que dans un

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milieu ·qui reconnaît la liberté du commerce et de l'industrie. Dans ce sens, il est bien vrai que le droit des marques se rattache, comme le souligne l'au­teur, au droit plus vaste de la concurrence comprise dans son sens classique, mais je ne suivrai pas Louis Van Bunnen lorsqu'il tente de démontirer que l'évo­lution de ce droit de la concurrence vers un droit de l'organisation de la concurrence ou, plus techni­quement encore, vers un droit des ententes, entraînera sur le droit des marques une influence non négli­geable. Il y a là, à mon avis, une pente de l'esprit dangeretJ.se parce que trop facilement, il est acquiescé à l'évolution des phénomènes économiques pour en déduire la fin de systèmes juridiques qui, oertes, ne sont pas des institutions immuables mais conservent cependant leur autonomie en dépit des transforma­tions du milieu concurrentiel.

* * * L'ouvrage est divisé en quatre parties.

La première décrit l'évolution des idées relatives aux éléments structmels du droit et examine succes­sivement l'objet du droit, à savoir le signe distinc­tif susceptible de constituer une ·marque, le support du droit étant le prodùit et les services et, enfin, le sujet du droit qui offre à l'examen. les problèmes de liaison de la marque avec l'établissement, l'oc­troi de licence, le régime de la co-propriété.

Dans une seconde partie, sont tJrès longuement étudiées les limites du droit de marque, dans deux chapitres, traitant, le premier, des relations entre la marque et le secteur économique (est examiné no­tamment le dépassement de la règle de la spécialité de la marque en faveur des marques célèbres) et le second, des relations entre la marque et le terri­toire. On connaît l'actualité de cette question, née de la réalisation de l'Union économique Benelux et du Marché commun. D'une façon extrêmement com­plète, Louis Van Bunnen analyse la jurisprudence déjà abondante sur la question mais, ainsi qu'il a été dit plus haut, je crois que ses conclusions dépassent, à l'heure actuelle en tout ca:s, les ensei­gnements qui pourraient être tirés de ces divers courants jurisprudentiels. Personnellement en tout cas, je ne suis nullement convaincu par la démons­tration et je crois que si l'on se trouve en présence d'une mutation dans les dimensions des territoires nationaux, le principe de la territorialité du droit des marques n'est pas près de s'affaiblir, même si son application doÎlt faire l'objet de plus de nuances qu'auparavant ..

La troisième partie de l'ouvrage est plus technique et vise les questions actuelles d'acquisition, de main­tien et de transmission du d.roit à la marque.

Une fois encore, les problèmes sont ici envisagés d'un point de vue dynamique, reposant sur des options qui me paraissent entièrement justifiées par l'évolution des faits, et celle que suivra nécessaire­ment le droit. Il est bien vrai que l'enregistrement supplantera bientôt l'usage comme fait générateur du droit à la marque et que, d'autre part, les liens déjà extrêmement lâches qui relient la marque à l'établissement finiront bien par se défaire pour faire place à la vérité économique.

Enfin, dans une quatrième partie, est tentée une synthèse intéressante portant sur le contentieux de la marque. L'auteur se sépare avec raison de la vision classique qui ne considérait que la_ contrefaçon comme seule atteinte aux droits du titulaire et opte pour une présentation du sujet extrêmement sédui­sante, examinant tout d'abord les confüts horizon­taux, qui se déroulent peut-on dire sur le terrain juridique, entre le titulaire d'une marque et ses concurrents, par opposition aux conflits verticaux, qui naissent entre ce même titulaire et les intermé­diaires devenus propriétaires après lui des produits de sa marque et dont les solutions peuvent davan­tage être trouvées dans l'arsenal du droit économique que dans celui de la propriété industrielle.

* ** L'ouvrage se termine par le texte des cinq lois

nationales présentes et de la loi à venir du Benelux ainsi que pair d'excellentes tables analytique et alpha­bétique et un i:ndex des décisions citées, qui en rendent la consultation aisée (ainsi que son exploi­tation par le Credoc ... ).

En fermant les pages de ee gros bouquin, plein de vie et de vues originales, on ne peut cependant

se soustraire à un certain désarroi. Oe n'est pas une critique mais une mise en garde à l'adresse du praticien. L'usage de la méthode comparative, s'il enrichit la connaissance, entraîne aussi la fin de§ cortitudes en ce qu'elle démontre la relativité des solutioµs admises jusqu'ores. De grands pans de doctrine classique sont lézardés, s'ils ne s'écroulent pas déjà. Mais le praticien attentif veillera cepen­dant à Île pas confondre les solutions de demain et le d.roit positif en vigueur, la jurisprudence étran­gère et celle suivie par nos tribunaux interprètes de la le:ic lata. Si le droit a besoin de prophètes, il doit aussi assurer la sécurité aux justiciables et ceux-ci ne pourraient sans imprudence confondre les vues prospectives de Louis Van Bunnen et la règle qui doit trancher leurs conflits.

L'ouvrage n'est donc pas à mettre dans les mains d'un lecteur pressé ou distrait. Il exige, pour sa lectUlre, la même qualité que celle qui a présidé à son élaboration, l'esprit critique.

Antoine BRAUN.

ll\lECHOS, Une pilule, anti-alcool.

On en parlait déjà depuis quelque temps. Mais sur un ton badin et sans croire beaucoup à ses effets bénéfiques.

La grande presse est revenue récemment sur le sujet. Pour nous apprendre notamment, que c'était un médecin de Bâle. le docteur Wol­fram Quehnau, qui avait cette fois bel et bien découvert et expérimenté cette nouvelle et mi­raculeuse pilule.

Son pouvoir? Faire baisser d'un tiers en l'espace d'une demi-heure le taux d'alcool du sang. Résultat appréciable ou inquiétant, c'est selon.

L'inventeur, apparemment, n'entend pas avoir fait ses recherches dans un but simple­ment scientifique. C'est un homme d·'affaires, certes, mais aussi de cœur.

C'est pour des raisons morales, a-t-il déclaré, . qu'il a mis au point cette formule.

N'était-ce pas déprimant de voir les gens qui conduisent injustement privés d' amuse­ments le soir ? De ce petit adjuvant qui chez certains sujets germaniques est peut-être plus nécessaire que chez d'autres tempéraments plus expansifs.

Quoi qu'il en soit, avec la médication de ce savant docteur, plus de problèmes : on peut être soumis à l' alcotest sans risquer une amende.

Un peu de patience tout de même ~ux futurs consommateurs de la pilule : celle-ci ne sera sans doute mise en vente en Suisse que vers lia fin de cette année.

Un dernier conseil probablement superflu : les personnes souffrant du foie seront mieux inspirées en ne l'utilisant point.

A l'audience. C'était avant le Code judiciaire. A l'au­

dience d'une chambre de divorce. Quel plai­deur y a jamais eu l'assurance que son dos­sier serait considéré comme complet ? Il fal­lait - il faut encore - tant de pièces. Une jeune avocate n'avait pas songé à joindre un certificat dé nationalité. La demanderesse est­elle belge? - Mais certainement, M. le pré­sident. ·- Comment !'.établissez-vous? Un mo­ment interloquée, l'entreprenante plaideuse re­trouva rapidement ses esprits. Et de dire sans sourciller : j'affirme que ma cliente est belge, et tant que le tribunal n'aura pas démontré le contraire j'estime que ce point reste acquis.

]udici incumbit probatio. Voilà une simplüication qui aurait dû figu­

rer parmi les règles nouvelles ..

1 PETIT COURRIER DU CODE ]

* Postulation - Littré : « action d.' occuper pour une partie, de faire toutes les procédures dans une affaire. » Le petit Robert : postu­ler : v. intr., «représenter en justice et faire les actes de la procédure. Les avoués postulent et concluent. Postuler pour un client. »

L'article 729 du Code judiciaire est donc correctement rédigé.

* On nous demande pourquoi le tribunal de commerce de Bruxelles ne respecte pas l'article 728 alinéa 2 du Code judiciaire et admet des porteurs de procuration qui ne sont ni conjoint, ni parent ou allié de la partie.

Nous ne sommes point dans le secret des dieux et ne pouvons donc fournir de ré­ponse.

La loi ne serait-elle pas la même pour tous?

Rappelons que les personnes morales com­paraissent en personne par leurs organes légaux.

* Pourquoi certains avocats n'appliquent-ils pas l'article 742 du Code judiciaire (dépôt des conclusions et de leur copie conforme) ? Parce que, avancent-ils en fanfaronnant,. la formalité n'est pas prescrite à peine de nul­lité - Sans doute ! Mais la déontologie professionnelle et par conséquent la disci­pline exige que les avocats les premiers res­pectent le Code judiciaire.

Tout comme tombe sous l'application de La discipline prof essionneU.e, le fait de dé­passer le temps prévu et annoncé pour la plaidoirie. Qu'un stagiaire se trompe : il a droit à l'indulgence. C'est une erreur qu'on ne commet plus après quelques an­nées de pratique.

Quant aux magistrats interrupteurs, indi­quez leur gentiment que vous ne pouvez pré­voir la durée de leurs interventions. ns· ne sauraient vous en tenir rigueur.

* Les jugements par défaut.

Nous avons reçu de Me W. Verougstraete les commentaires judicieux que voici :

L'article 805 du Code judiciaire porte : « La prononciation du jugement par dé­faut ne peut avoir lieu avant la fin de l'audience où le défaut a été constaté, et pour autant que celui-ci n'ait point été auparavant rabattu». De nombreux juristes interprètent ce

texte en ce sens qu'il ne peut être ac­cordé défaut qu'à la fin de l'audience.

C'est oublier que Falinéa 2 du même arti-cle porte :

« Le défaut sera rabattu et l'instance poursuivie contradictoirement si les par­ties le sollicitent conjointement au cours de l'audience où le défaut a été requis». Si les parties reviennent ensemble et de-

mandent que le défaut requis (et constaté) soit rabattu, le défaut est rabattu. Sinon il subsiste, et le Code judiciaire n'empêche pas un plaideur de requérir défaut dès le début de l~audiènce, encore que le juge puisse lui suggérer d'attendre quelques instants ... comme il a toujours pu le faire.

Ce n'est que si les deux parties le solli­citent -que le défaut pourra être rabattu, et nul ne peut obliger le demandeur à revenir pour le solliciter.

Cette question a déjà soulevée à de nom­breux colloques, et il y a été répondu par M. le commissaire royal comme dit ci-des­sus, mais la fable de l'avocat qui doit at­tendre midi pour prendre défaut a la vie dure ...

Page 15: IRIBIJnlJI - KU Leuven · (8) Et ce, semble-t-il, déjà en droit romain (De Brouckère et Tielemans, Répertoire, v° Compensation, p. 177). (9) L'arrêt commune de Tamines (C.E.,

DATES RETENUES * Association belge de droit rural. - L'assem­blée générale statutaire aura" lieu le samedi 15 mars 1969 à 10 h au siège social de l'Association, 72, ave­nue .de la Toison d'Or, à Bruxelles 6.

Après l'assemblée générale, à 11 h, le lieutenant général e. r. A. E. Crahay, commissaire royal au problème de l'eau, y donnera· une conférence, en langue française, sur le sujet : « Le problème de l'eau et son incidence agricole».

De plus amples renseignements peuvent· être ob­tenus au secrétariat de l'Association, 72, avenue de la Toison d'Or, Bruxelles 6 (tél. 02/37.30.98).

MOUVEMENT JUDICIAIRE Par arrêtés royaux publiés au Moniteur du 21 fé­

vrier 1969:

- sont nommés substituts du procureur du Roi :

près le tribunal de première instance de Bruges : MM. G. Bailyu, substitut de l'auditeur militaire en

campagne; Ph. Goeminne, substitut de l'auditeur militaire en campagne; M. D'hont, substitut de l'auditeur militaire en campagne; L. Declercq, substitut de l'auditeur militaire en campagne; M. Van Wijmeersch, substitut de l'auditeur mi­litaire en campagne.

près le tribunal de première instance de Courtrai:

MM. P. Decuypere, substitut de l'auditeur militaire en campagne; G. Libert, substitut de l'auditeur militaire en campagne; E. Geurden, substitut de l'auditeur militaire en campagne (cadre temporaire);

J. Delbeke, avocat à Roulers.

près le tribunal de première instance de Furnes: M. M. Dobbelaere, substitut de l'auditeur militaire

en campagne.

près le tribunal de première instance d'Ypres : M. A. Lecleir, avocat à Geluwe; M11 .. J. Peene, avocat à Ypres.

près le tribunal de première instance d'Aude­narde:

MM. A. De Koekelaere, substitut de l'auditeur mi­litaire en campagne; M. Van Hautegem, substitut de l'auditeur mili­taire en campagne; G. Dossche, substitut de l'auditeur militaire en campagne.

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près le tribunal de première instance de Gand : MM. A. De Smet, su~stitut de l'auditeur militaire

près le conseil de guerre permanent de Gand;

M. Van Hove, substitut de l'auditeur militaire en campagne; E. Van de Casteele, substitut de l'auditeur mi­litaire en campagne; J. Dooms, substitut de l'auditeur militaire en campagne; J. De -Vriese, substitut de l'auditeur militaire en campagne (cadre temporaire); Ph. Dobbelaere, substitut de l'auditeur mili­taire en campagne;

Mme N. Van Isterdael, épouse Pede, avocat à la cour d'appel de Gand;

MM. R. De Visscher, docteur en droit à Melden; J. Soenen, avocat ·à Bruges.

près le tribunal de première instance de Ter­monde:

MM. M. ·walrave, substitut de l'auditeur militaire en campagne; H. Wullus, substitut de l'auditeur militaire en campagne; J. Brasseur, substitut de l'auditeur militaire près le conseil de guerre permanent de Gand; U. D'hondt, substitut de l'auditeur militaire en campagne; F. Van den Berghe, substitut de l'auditeur militaire en campagne; W. Van de Sijpe, avocat à Erpe.

près le tribunal de première instance de Huy : M. J. Libert, substitut de l'auditeur militaire en cam­

pagne.

près le tribunal de première instance de Liège : l\1M. A. Le Maire, substitut de l'auditeur militaire

en campagne; R. Fontaine, substitut de l'auditeur militaire en campagne; P. Geens, substitut de l'auditeur militaii:e en campagne;

C. Jammaer, substitut de l'auditeur militaire en campagne; -B. Le Boulengé, substitut de l'auditeur militaire en campagne; R. Raduciner, substitut de l'auditeur militaire

en campagne.

près le tribunal de première instance de Ver­viers:

MM. A. t' Serstevens, substitut de l'auditeur mili­taire en campagne; chevalier J. de Limbourg, substitut de l'audi­teur militaire en campagne; J. Longrée, substitut de l'auditeur militaire en campagne (cadre temporaire).

près le tribunal de première instance de Hasselt : MM. Th. Lenders, substitut de l'auditeur militaire

en campagne; K. Cleeren, substitut de l'auditeur militaire en campagne; J. Van Herck, substitut de l'auditeur militaire en campagne (cadre temporaire); F. Vanderbeek, avocat, juge suppléant à ce tri­bunal; J. Kuyl, docteur en droit à Hasselt.

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199

près le tribunal de première instance de Ton­gres:

MM. D. Boyen, substitut de l'auditeur militaire en campagne; J. Dessers, substitut de l'auditeur militaire en campagne;

près le tribunal de première instance d'Arlon : M. J. Mergeai, substitut de l'auditeur militaire en

campagne; près le tribunal de première instance de N eu/­château:

M. R. Buren, substitut de l'auditeur militaire en campagne;

près le tribunal de première instance de Dinant : M. J. Bartelous, substitut de l'auditeur militaire en

campagne;

près le tribunal de première instance de Namur: MM. P. Frapier, substitut de l'auditeur militaire en

campagne; M. Helvetius, substitut. de l'auditeur militaire en campagne (cadre temporaire).

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Page 16: IRIBIJnlJI - KU Leuven · (8) Et ce, semble-t-il, déjà en droit romain (De Brouckère et Tielemans, Répertoire, v° Compensation, p. 177). (9) L'arrêt commune de Tamines (C.E.,

200

- sont nommés substituts de l'auditeur général près la cour militaire :

MM. P. Cassiers, substitut de l'auditeur militailre près le conseil de guerre permanent de Liège, délégué aux fonctions de substitut de l'audi­teur. gtnéral (cadre temporaire); il est auto­risé à porter le titre d'avocat général près la cour militaire; A. De Ripainsel, substitut de l'auditeur mili­taire près le conseil de guerre permanent de Bruxelles, auditeur militaire en campagne, dé­lé~u,é aux fonctions de substitut de l'auditeur general; J. Vanhalewijn, substitut de l'auditeur militaire près le conseil de guerre permanent de Bruxelles, premier substitut de l'auditeur mi­litaire en campagne, délégué aux fonctions de substitut de l'auditeur général; P. Fremault, substitut de l'auditeur militaire près le conseil de guerre permanent de Bruxelles, premier substitut de l'auditeur mi-litaire en campagne; ·

- sont nommés auditeurs militaires : MM. E. Van Cutsem, substitut de l'auditeur mili­

taire près le conseil de guerre permanent de Bruxelles, auditeur militaire en campagne; H. de Brauwere, substitut de l'auditeur mili­taire près le conseil de guerre permanent de Gand, auditeur militaire en campagne (cadre temporaire); P. Hardy, premier substitut de l'auditeur mi­litaire prèS le conseil de guerre permanent de Liège, auditeur militaire en campagne (cadre temporaire); W. Paternostre, substitut de l'auditeur mili­taire près le conseil de guerre permanent de Bruxelles, auditeur militaire en campagne; A. Acke, substitut de l'auditeur militaire près le conseil de guerre permanent de Liège, audi­teur militaire en campagne;

SOMMAIRE du 15 mars 1969.

DOCTRINE: Maurice André Flamme. - Le droit admini­

stratif à l'épreuve de la doctrine.

JURISPRUDENCE : EXECUTION; - Jugement. - ACQUIESCE­

MENT. - Validité. - Condition. - Liberté du consentement. - Exécution volontaire. - Equi­vaut à l'acquiescement (Cass., 1 re ch., 9 janvier 1969).

ACCIDENT SUR LE CHEMIN DU TRAVAIL. - Notion. - Interruption. - N'emporte pas par elle-même la suspension du contrat ( Cass., 1 re

ch., 7 novembre 1968).

PATERNITE ET FILIATION. - DROIT DE GARDE. - Assignation. - Antérieure à la mise en vigueur de la loi du 8 avril 1965. - COMPE­TENCE. - Tribunal de première instance. -Article 302 du Code civil. - Portée. - Déroga­tion. - Ministère public. - Pouvoirs. - De­mande d'attribution du droit de garde (Liège, ire ch., 7 janvier 1969).

1. SOCIETE COMMERCIALE EN LIQUIDA­TION. - PROCEDURE. - Assignation. - Siège social. - N'existe plus. - Assignation au liqui­dateur. - II. SAISIE-ARRET. - Base. - Titre. - Jugement non exécutoire par provision et non coulé )en force de chose jugée. - Saisie régulière. - Jugement frappé d'appel. - Action en vali­dation de la saisie. - Surséance jusqu'après l'ap­pel. - Jugement susceptible d'appel. - Saisie ré­gulière (Civ. Charleroi, Ire ch., 16 janvier 1969).

I. DOMMAGES-INTERETS. - Intérêts mora­toires. - Article 1153 du Code civil. - Dispo­sition non d'ordre public. - II. CLAUSE PENALE. - Délai de grâce. - Application (Comm. Liège, 2·e ch., 29 octobre 1968).

Etude de Maitre R. KEY AERTS, Huissier de Justice résidant à Bruxelles 5

VENTE PUBLIQUE les 26 et 27 mars 1969 à 14 h 15 dans les salles du

PA LA 1 S D E S B E A U X -A R T S k0·R ~u~ l~~~L~ ~ TABLEAUX ANCIENS: Allais - Biset, Ch-E. - Francken, Frans - Key, Willem - Maître de Frankfort (1ra moitié du XVIe siècle) - Ryckaert, David - Van Coninxloo, Gilles Ill - Van der Straeten, Jan-B. -

Yan Uden, Lucas, etc ... TABLEAUX MODERNES: Carte, A. - Delmotte, M. - Navez, F-J. - Paulus, P. - Ramah, H. - Saverys, A. -

Smits, J. - Verboeckhoven, E. - Zack, L - etc ... Gravures et revues - Sculptures - Bois sculptés et Sculptures anciennes - Pendules - Objets de Décora­tion - Lustres - Tapis - Cristaux - Porcelaines européennes - Faïence de Delft - Porcelaine de Chine et

du Japon - Bijoux - Objets de vitrine - Argenterie - Métal argenté - etc ... TAPISSERIES: Aubusson - Audenaerde - Bruxelles - etc ...

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Exposition publique: samedi 22 mars, dimanche 23 mars et lundi 24 mars 1969 de 9 h à 12 h 15 et de 14 h à 17 h 30 et mardi 25 mars 1969 de 8 h 30 à 12 h.

Renseignements : SERVICE DES VENTES PUBLIQUES de la Société des Expositions du Palais des Beaux-Arts, a.s.b.I., 10, rue Royale, Bruxelles 1. Tel.: 12.18.94-12.85.78. Direction: C. Thierron-de Mul.

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La Vie du Palais: Cours de technique juridi­que, par Serge Levy. - Cours et conférences: Le colloque sur la saisie immobilière, par F. Lainé. - Thémis et les Muses : Les vaches jalouses, par Marcel La Haye. - · Les deuils judiciaires : René Peyralbe, par Jean Thévenet. - Coups de règle, par Tertius. - Bibliographie: Louis Van Bun­nen : « Aspects actuels du droit des marques dans le Marché commun >>, par Antoine Br;iun. - -Echos. - Petit courrier du Code. - Dates retenues. - Mouvement judiciaire.

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Le JOURNAL DES TBmUNA1JX

DIRECTION Jean DAL, rédacteur en chef. Secrétaire général de la rédaction : Roger-0. DALÇQ. Secrétaires de la rédaction : Wivine BoURGAUX et Ma-

rie-Thérèse CUVELLŒZ. Chronique judiciaire: Bernard VAN REEPINGHEN. Comité de direction: Cyr CAMBIER,' Robert PmsON, Ro­

bert HENRION.

ADMINISTRATION: Maison Perd. LARCIER, s.a., 39; rue des Minimes.

Bruxelles 1 - Tél. 12.47.12 - C.C.P. 423.75 Administrateur-délégué :

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Les manuscrits ne sont pas rendus.

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