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Mémoire présenté en vue de l'obtention du grade de Master en Sciences psychologiques (obtenu en 2009).Les deux expériences menées se sont inspirées des théories de la cognition incarnée (embodied cognition) appliquées au système sémantique. Pour ce faire, le paradigme du clignement attentionnel (attentional blink) fut employé.
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Université catholique de LouvainFaculté de psychologie et des sciences de l'éducation
JE PENSE, DONC JE PERÇOIS:
L'activation sensorielle comme modérateur de l'accès conceptuel
Promoteur: Professeur N. Vermeulen
Mémoire présenté en vue de l'obtention du grade de Master en Sciences psychologiques
par Mathieu Bernimont
Louvain-la-Neuve, 2009
Qu'il me soit permis d'exprimer ici mes remerciements à Monsieur le Professeur N.
VERMEULEN, qui m'a non seulement encouragé dans ce travail, mais aussi aidé par ses conseils
éclairés et ses précieuses suggestions.
Merci aussi à Chantal et à Vincent pour leurs n o m b re u s e s re m a rq u e s s c i e n t i f i q u e s e t
philosophiques qui ont alimenté mes réflexions tout au long de la rédaction de ce mémoire.
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION
I. PARTIE THEORIQUE
1. Introduction
2. La cognition incarnée
2.1. Systèmes aux symboles perceptuels (Barsalou, 1999)
2.2 Observations expérimentales en faveur d'une "connaissance incarnée"
2.2.1. Etudes comportementales
2.2.2. L'apport des lésions cérébrales
2.2.3. Etudes en neuroimagerie
2.3. Critiques de la cognition incarnée
3. Le clignement attentionnel
3.1. Les modèles
3.1.1. Définitions
3.1.2. Modèles aux ressources à capacités limitées
3.1.2.1. Le modèle de compétition à deux étapes de l'attention.
3.1.2.2. Le modèle du locus coeruleus - norépinéphrine.
3.1.3. Modèle "activation/inhibition"
3.2. Intra versus crossmodalité du CA
3.3 Clignement attentionnel et stimuli émotionnels
4. Clignement attentionnel et cognition incarnée: des services mutuels
II. OBJECTIFS DES PRESENTES RECHERCHES
III. EXPERIENCE 1
1. Participants et design
2. Stimuli et matériel
3. Procédure
4. Résultats
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5. Discussion
5.1 L'effet général de la modalité conceptuelle
5.2 Interférence intramodale sur le rappel de C2
5.3 L'impact des conditions sur le rappel de C1
5.3.1. Des arguments en faveur du modèle de Chun et al. (1995) ?
5.3.2. Un argument pour l'effet intramodal des C2 auditifs ?
5.4. Effet de la modalité de la décision sur les TR
IV. EXPERIENCE 2
1. Participants et design
2. Matériel et stimuli
3. Procédure
4. Résultats
4.1. Taux de rappel de C1
4.2. Taux de rappel de C2
4.3. Corrélations aux questionnaires
5. Discussion
V. CONCLUSIONS
VI. BIBLIOGRAPHIE
VII. ANNEXES
Annexe 1: Expérience 1- construction du bloc 1
Annexe 2: Expérience 1 - construction du bloc 2
Annexe 3: Expérience 2 - construction du bloc 1
Annexe 4: Expérience 2 - construction du bloc 2
Annexe 5: Expérience 2 - construction du bloc 3
Annexe 6: Questionnaire TAS-20
Annexe 7: Questionnaire PANAS
Annexe 8: Questionnaire IRI
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91
INTRODUCTION
Alors que vous commencez à lire les premières lignes de ce mémoire, votre
cerveau a déjà effectué un nombre incalculable de traitements cognitifs des informations
qui lui sont présentées. Résumons, par exemple, les analyses que vous avez effectuées
pour le mot "lignes" sans que vous en soyez conscients. Votre système cognitif a opéré
une première analyse des traits visuels de ce mot; ensuite, à l'aide de ce que vous aviez
déjà enregistré en mémoire à long terme, votre cerveau vous a indiqué qu'il s'agissait
d'un objet de la catégorie visuelle des mots. Mais plus encore, ce mot présente une
caractéristique fondamentale: il signifie quelque chose. Le concept de "ligne", c'est sa
signification. D'après les modèles cognitifs, les concepts sont logés dans une forme de
mémoire à long terme: la mémoire sémantique. Toutefois, tous les chercheurs ne
s'accordent pas sur la nature de la représentation du concept. En d'autres termes,
pendant de nombreuses années, les modèles classiques de la sémantique ont affirmé que
les concepts étaient représentés sous une forme abstraite (Pylyshyn, 1973), tandis que,
plus récemment, les auteurs ont plutôt soutenu l'idée que les concepts présentent les
mêmes particularités sensorielles et motrices que les objets ou expériences qu'ils
représentent (Barsalou, 2008). Ainsi, les représentants des modèles classiques auraient
sans doute expliqué le concept de "ligne" par une activation conjointe de
caractéristiques sous forme propositionnelle (e.g. "forme" + "dessin" + "droite" + "deux
dimensions" + ...). Par contre, les nouveaux modèles auraient plutôt affirmé que le
concept de "ligne" correspondait à une activation des aires visuelles lors de la vision
d'une ligne. Afin de mieux cerner le débat, nous proposons un bref historique des
théories de la connaissance.
Pendant des siècles, les philosophes furent pratiquement les seuls chercheurs
dans ce domaine. Dès l'Antiquité, ils se sont interrogés sur le miracle de la pensée. Par
exemple, Platon envisageait l'homme comme étant constitué d'une âme et d'un corps. Il
expliquait alors que l'homme était capable de percevoir ce qu'il y avait d'éternel dans le
monde grâce à son âme (Couloubaritsis, 1995). A l'opposé, le courant atomiste antique
expliquait notre capacité à comprendre le monde par le fait que nous possédions en nous
des atomes sphériques identiques à ceux qui donnent son mouvement à l'univers
5
(Couloubaritsis, 1995). Mais ce n'est qu'à l'époque de la Renaissance que le problème de
la connaissance en tant que telle a été philosophiquement investigué. Les données du
problème étaient les suivantes: l'objet, le sujet et ses représentations. Comment l'homme
(le sujet) pouvait-il se faire une représentation adéquate du monde (l'objet) ? Il y avait, à
cette époque, deux grands courants de pensées: les rationalistes et les empiristes
(Hottois, 2002). Les premiers pensaient que les idées (nos représentations du monde)
étaient innées. Les seconds pensaient à l'inverse que tout nous venait de nos sens et que
notre esprit n'était, à la base, qu'une page blanche. Dans les deux cas, la métaphore
visuelle prévalait sur toutes les autres quant à la représentation du concept. Pour
appréhender le monde, l'homme s'en fait une image. Par exemple, le concept d'un chien
est l'image d'un chien. De manière générale et simplifiée, l'homme utilise différentes
stratégies d'imagerie mentale pour se représenter les objets du monde. Kant représente
un grand tournant dans ce débat dans la mesure où il envisage les concepts non plus
comme des images mais comme des règles de construction d'images (Rivelaygue,
1992). Par exemple, on a le concept de triangle quand on est capable d'en construire par
imagination ou d'en dessiner une infinité. Kant a dès lors ouvert tout un nouveau champ
de réflexions sur la représentation des concepts.
Plus tard, avec le développement des sciences psychologiques, de nombreux
chercheurs ont tenté à leur tour de comprendre les mécanismes sous-tendant la
connaissance. Toutefois, il semble que l'arrivée du courant behavioriste et surtout les
critiques de Watson (1913, cité dans Barsalou, 2008) concernant l'imagerie mentale
aient rejeté l'idée de représentations basées sur l'expérience perceptive du monde (i.e.
traitée par différentes modalités perceptives: visuelle, auditive, gustative, ...). D'après le
courant behavioriste, les explications des mécanismes cognitifs n'étaient pas assez
scientifiques. Par la suite, les courants cognitivistes ont néanmoins tenté de comprendre
ce qui se passait dans la "boîte noire" décrite par les behavioristes. Afin de comprendre
la manière dont l'homme se forme et accède aux concepts, les cognitivistes se sont
plutôt inspirés des modèles computationnels, statistiques, logiques et linguistiques
(Barsalou, 2008). Ils ont ainsi proposé des modèles de la connaissance aux
représentations amodales (Fodor, 1976; Pylyshyn, 1985, cités dans Pecher, Zeelenberg
& Barslou, 2003) discréditant d'autres études portant sur l'imagerie (Paivio, 1971, cité
6
dans Barsalou, 2008). En d'autres termes, selon eux, les concepts seraient représentés
sous des formes abstraites et non pas sous des formes d'images mentales.
Dans le domaine des sciences cognitives, c'est donc le terme de "concept" qui
est employé pour définir "les représentations symboliques de l'ensemble des
connaissances que nous avons à propos du monde […] utilisées pour communiquer,
réfléchir et agir sur le monde extérieur" (Samson, 2003, pp. 169-170). Ceux-ci seraient
stockés dans la mémoire sémantique, un système fonctionnellement indépendant
(Samson, 2003). Alors que, jusqu'à présent, les théories cognitives classiques de la
sémantique postulaient que les objets, les événements et les états étaient stockés sous
une forme abstraite, le développement des techniques en neuroimagerie ainsi que le
nombre croissant des études cognitives et comportementales ont provoqué un
revirement radical. Il est effectivement devenu de plus en plus difficile de nier la
possible existence de représentations localisées dans les systèmes sensori-moteurs du
cerveau (Barsalou 1999, 2008; Prinz, 2002). Ainsi, selon ces théories appelées "théories
de la cognition incarnée", l'ensemble de la cognition partage les mêmes systèmes de
traitements que ceux qui traitent les informations perceptives (visuelles, auditives,
tactiles, gustatives, olfactives, proprioceptives et affectives - Barsalou, 2008). Les
concepts ne sont donc plus des représentations abstraites mais sont devenus des
représentations analogiques de l'expérience perceptive.
Ce mémoire a pour objectif d'argumenter en faveur d'une représentation des
concepts dans les systèmes sensori-moteurs, comme le définit le modèle des "systèmes
aux symboles perceptuels" (SSP) de Barsalou (1999), lui aussi inspiré des théories de la
cognition incarnée.
Pour ce faire, nous avons entamé notre travail par une partie théorique
comprenant une revue de la littérature divisée en trois sections. La première développe
le modèle des systèmes aux symboles perceptuels (Barsalou, 1999) ainsi que les
recherches qui appuient l'idée d'une représentation sensori-motrice des concepts. La
deuxième présente un paradigme expérimental particulier, le clignement attentionnel,
qui permet de tester, entre autres, l'accès conceptuel. Enfin, la troisième section présente
les services mutuels que s'apportent les théories de la cognition incarnée et le paradigme
du clignement attentionnel. A la suite de ces considérations théoriques, un chapitre
intermédiaire critique brièvement certains résultats théoriques et propose de nouvelles
7
hypothèses en présentant nos deux recherches empiriques. Selon nous, la majorité des
études qui ont tenté de démontrer les modèles de la cognition incarnée ont plutôt induit
des stratégies d'imagerie mentale pour les concepts (ils ont accès à la conscience). Or,
l'accès conceptuel est supposé se produire de façon implicite (hors de la conscience).
Nous expliquons dès lors en quoi nos expériences tentent d'éliminer ce biais. Pour cela,
nous avons mis en place deux études dont nous développons, dans un premier temps, les
constructions, les procédures de passation, puis analysons statistiquement les résultats.
Ensuite, nous les discutons de façon détaillée au regard de la littérature scientifique
existante. Enfin, nous terminons par un ensemble de conclusions qui reprennent les
éléments principaux des discussions intermédiaires permettant d'aboutir à des
questionnements généraux sur les intérêts et limites d'une cognition incarnée.
8
I. PARTIE THEORIQUE
1. Introduction
Malgré l'abondante littérature scientifique concernant la mémoire sémantique,
de nombreuses questions concernant son organisation restent en suspens. Certains
auteurs pensent que les objets perçus sont d'abord traités par les différents systèmes
perceptifs avant d'être traduits en un concept abstrait dénué de toutes les modalités
sensorielles (auditives, visuelles, gustatives, tactiles, …) et motrices qui le constituaient
lors de sa perception (Pylyshyn, 1981, cité dans Solomon & Barsalou, 2004). Par
contre, d'autres affirment que les objets et expériences du monde partagent des réseaux
neuronaux communs avec les systèmes perceptifs (Barsalou, 1999, 2008; Prinz, 2002).
Ce chapitre vise à évaluer le modèle de la cognition incarnée de Barsalou (1999,
2008) et son intérêt parmi les théories de la sémantique. Ensuite, il développera un
paradigme expérimental, le clignement attentionnel (Raymond, Shapiro, & Arnell,
1992), qui présente certains avantages pour tester l'accès conceptuel. Nous discuterons
enfin des intérêts communs que s'apportent le clignement attentionnel et la théorie de la
cognition incarnée.
2. La cognition incarnée
L'objectif de cette section est de présenter principalement la "théorie des
symboles perceptuels" de Barsalou (1999) qui repose sur l'idée d'une cognition incarnée
(Barsalou, 2008). Cette théorie postule que les concepts de la mémoire sémantique sont
ancrés dans les mêmes systèmes que ceux qui traitent les informations perceptuelles (les
systèmes visuels, auditifs, ...) et motrices. Enfin, ce modèle est comparé à d'autres qui
postulent une sémantique amodale (les concepts y sont représentés sous forme abstraite)
afin de se former un avis critique quant à sa pertinence.
9
Selon Barsalou (2008), le système conceptuel (la mémoire sémantique) est "un
système étendu, distribué à travers le cerveau, qui représente la connaissance sur tous
les aspects de l'expérience – comprenant les configurations, les événements, les objets,
les agents, les actions, les états affectifs et les états mentaux" (Barsalou, 2008, p. 91).
De même, cette connaissance est organisée en catégories. Cela signifie que notre
système conceptuel n'est pas un simple système d'enregistrement qui traite chaque
information de manière indifférenciée mais qu'il classe celles-ci en fonction de
l'expérience individuelle que l'on en fait. C'est pourquoi la représentation des objets qui
nous entourent continuera à se perfectionner et à se réorganiser au fur et à mesure que
nous en rencontrerons. Ainsi, ce système présente plusieurs fonctions. Il permettrait
toute une série de traitements cognitifs online tels que la perception, la catégorisation et
la planification motrice, ainsi que des opérations offline, comme le rappel de souvenirs,
le raisonnement, la planification d'activités ainsi que la production et la compréhension
du langage (Barsalou, 2008; van Dantzig, Pecher & Zeelenberg, 2008).
2.1. Systèmes aux symboles perceptuels (Barsalou, 1999)
Parmi les nombreux modèles de la cognition incarnée (voir infra), la théorie des
systèmes aux symboles perceptuels (SSP) de Barsalou (1999) semble être la plus
influente. Lors de la première perception d'un objet dans l'environnement (par exemple,
un "verre de coca"1), les aires associatives perçoivent les informations bottom-up du
stimulus à traiter dans les aires sensori-motrices. En parallèle, un processus top-down,
via l'attention sélective, va filtrer les informations qui lui semblent pertinentes en
fonction du contexte de perception. Ainsi, le système perceptif décèlera les propriétés de
type couleur, forme, position, ..., du "verre de coca" (bottom-up) tout en extrayant peut-
être des informations de type fraîcheur si le contexte d'un été particulièrement chaud
implique d'y accorder de l'importance (top-down). Ces aspects de la perception sont
alors encodés en mémoire à long terme sous la forme de symboles perceptuels. Ceux-ci
sont les unités minimales qui composent le système conceptuel. Ils sont "analogiques,
10
1Tout au long de cet ouvrage, les mots, phrases et objets perçus dans l'environnement seront écrits par
des caractères minuscules entre guillemets, les concepts par des caractères italiques majuscules et les propriétés par des caractères italiques.
multimodaux (i.e. plusieurs modalités sensorielles sont impliquées) et directement
ancrés dans les systèmes à modalité spécifique du cerveau" (van Dantzig et al., 2008, p.
580). Cela signifie que chaque symbole est encodé dans son aire cérébrale respective
(les symboles visuels seront établis dans les aires visuelles, les symboles auditifs dans
les aires auditives, ...). Plus tard, lors de la perception d'un nouveau "verre de coca", le
système conceptuel va simuler les informations qu'il avait déjà encodées face à ce type
d'objet afin de reconnaître ce qu'il représente. Cela signifie que pour représenter le
concept VERRE DE COCA, le sujet va simuler la vision de ce verre, sa préhension, le
goût du coca, etc. et cela, selon toutes les modalités qui le constituent. De même, toutes
les informations contextuelles qui sont généralement associées au "verre de coca"
seront, elles aussi, simulées comme par exemple, la soif, les émotions, les objectifs de la
boisson, ... Ces simulations représentent le concept clef de la théorie SSP. La littérature
définit aussi la simulation comme un phénomène "comme si". Par exemple, si le sujet
active le concept VERRE DE COCA, le système conceptuel va activer les aires visuelles
comme s'il voyait vraiment le "verre de coca". De la sorte, Barsalou (1999) considère
que les concepts sont des simulateurs. Cette proposition offre aux concepts l'avantage
d'être dynamiques (ils porteront des informations de plus en plus variées au fil des
perceptions et contextes de rencontres) et de construire des simulations spécifiques. Par
exemple, le concept VERRE DE COCA simulera plutôt ses propriétés rafraîchissantes
dans un contexte de vacances, tandis qu'il simulera plutôt des propriétés énergisantes
chez un étudiant en condition d'examens. Il convient de préciser que la simulation n'est
pas forcément consciente. Son activation peut s'exprimer de manière implicite et diffère
donc de l'imagerie mentale ! Enfin, la simulation d'entités permet de les catégoriser.
Ainsi, afin de catégoriser le monde, le système conceptuel va appréhender deux
simulations similaires et les comparer. Par exemple, lors de la perception d'un "verre de
coca", le système conceptuel va activer les aires visuelles en fonction du souvenir en
mémoire à long terme qu'il s'était fait du VERRE DE COCA (phénomène "comme si" ou
simulation) et va comparer l'information qu'il avait en mémoire avec l'objet qu'il a face
à lui. Plus une simulation sera proche de l'entité qu'elle cherche à reproduire, plus la
catégorisation sera satisfaisante.
Le modèle SSP fonde ses hypothèses sur de nombreuses découvertes lors
d'expériences comportementales, lors de l'analyse de déficits langagiers après des
11
lésions cérébrales et grâce à de nombreuses observations en neuroimagerie que nous
développerons au point 2.2.3 de cette section.
2.2. Observations expérimentales en faveur d'une "connaissance incarnée"
2.2.1. Etudes comportementales
Comme l'a proposé le modèle SSP, les concepts présentent une caractéristique
fondamentale: la flexibilité. Cela signifie que, selon le contexte de simulation, certaines
modalités seront plus simulées que d'autres (exemple du VERRE DE COCA perçu soit
en vacances, soit en blocus). Dès lors, il apparaît que la simulation d'un concept peut
être dominée par une certaine modalité sensorielle tandis que les autres modalités sont
activées en arrière-plan (van Dantzig et al., 2008). Certains auteurs ont donc mis en
place des expériences visant à étudier le coût d'un changement de modalité (modality-
switch cost). Si les concepts et systèmes sensori-moteurs partagent des aires neurales
communes, le changement attentionnel d'une modalité d'un concept vers une autre
entraînera un coût de déplacement. Spence, Nicholls et Driver (2001) ont observé, par
exemple, un coût de déplacement sensoriel en présentant une simple tâche de décision
avec des stimuli soit visuels, soit auditifs, soit tactiles. Les sujets devaient signaler le
plus rapidement possible si les stimuli étaient apparus à gauche ou à droite. Les résultats
ont indiqué que les sujets répondaient moins vite et commettaient plus d'erreurs lorsque
les stimuli étaient présentés dans une autre modalité que le stimulus précédent. Par
contre, ils obtenaient de meilleurs résultats et répondaient plus rapidement lorsque le
stimulus était présenté dans la même modalité que celui qui le précédait.
Afin d'observer un éventuel coût du changement de modalité lors de la
simulation conceptuelle, Pecher, Zeelenberg et Barsalou (2003, 2004) ont créé une tâche
de vérification de propriétés. Les sujets devaient vérifier si les propriétés provenant de
six modalités différentes (vision, audition, goût, odorat, toucher, action) correspondaient
au mot présenté ("pomme - verte" ⇒ modalité visuelle). Ici aussi, les sujets répondaient
plus rapidement et commettaient moins de fautes lorsque les propriétés à vérifier étaient
dans la même modalité que l'essai précédent. Afin d'établir un lien plus clair entre
l'activation sensorielle et la représentation modale des concepts, van Dantzig et al.
12
(2008) ont combiné les expériences de Spence et al. (2001) et Pecher et al. (2003) en
demandant d'abord aux sujets de réaliser en alternance une tâche de décision droite ou
gauche de stimuli visuels, auditifs ou tactiles, puis une tâche de vérifications de
propriétés visuelles, auditives ou tactiles pour des concepts. Ici aussi, les participants
étaient plus lents et commettaient davantage de fautes lorsque les propriétés à vérifier
étaient dans une autre modalité que celle de la tâche décisionnelle qui précédait.
En résumé, les études de Spence et al. (2001), Pecher et al. (2003) et van
Dantzig et al. (2008) ont démontré que les traitements sensoriels et conceptuels étaient
facilités tant que la tâche restait dans la même modalité. A l'inverse, Vermeulen,
Corneille et Niedenthal (2008) ont surchargé des systèmes visuels et auditifs en
mémoire de travail et ont observé que cela entravait la simulation conceptuelle dans ces
mêmes modalités. Dans leur étude, lorsque les sujets devaient mémoriser des stimuli
visuels (des formes) ou auditifs (des "bips") puis réaliser une tâche de vérification de
propriétés de concepts, ils répondaient plus rapidement lorsque la modalité de rétention
et de vérification de propriétés différait. Marques (2006) a aussi obtenu des résultats
similaires. Le fait de recruter les aires sensorielles de manière significative, pendant une
tâche d'accès conceptuel, peut donc entraver le traitement des concepts.
Il a également été observé que les concepts émotionnels semblent faire l'objet
d'une localisation dans les systèmes moteurs. Par exemple, Chen et Bargh (1999) ont
observé que lorsque des sujets devaient dire si un concept émotionnel était positif ou
négatif en poussant ou rapprochant un levier de leur corps, ils répondaient plus vite
lorsqu'ils devaient rapprocher le levier avec les mots positifs et inversement. Cela
indique que certains concepts émotionnels sont au moins partiellement ancrés dans des
systèmes moteurs d'approche et de fuite. De même, dans une tâche de vérification de
propriétés, Vermeulen, Niedenthal et Luminet (2007) ont, eux aussi, observé un coût de
changement de modalité entre les systèmes auditifs, visuels et affectifs. Enfin, dans une
étude récente, Niedenthal, Winkielman, Mondillon et Vermeulen (2009) ont remarqué
que le traitement conceptuel d'émotions entraînait de subtiles expressions faciales
émotionnelles congruentes avec l'émotion. Dans cette même étude, il a été perçu que le
traitement conceptuel se voyait entravé si les participants ne pouvaient pas activer
subtilement certains muscles faciaux impliqués dans les expressions faciales
13
émotionnelles (en tenant un bic dans la bouche de manière à figer certains muscles
faciaux).
Au final, l'ensemble de ces résultats comportementaux démontre bien le lien
étroit qu'entretiennent les systèmes sensori-moteurs2 avec le système conceptuel.
Toutefois, il convient de signaler que la simulation n'est pas automatiquement requise
dès la moindre confrontation avec un concept. En effet, il se peut que le système
nerveux utilise des "raccourcis" dans des tâches de détection d'association entre des
concepts qui partagent des liens contextuels (Solomon & Barsalou, 2004; Wu &
Barsalou, 2004, cité dans Niedenthal et al., 2009).
2.2.2. L'apport des lésions cérébrales
De nombreuses études en neuropsychologie ont mis en évidence le fait que des
lésions cérébrales dans des aires à modalité spécifique entraînaient des déficits dans le
traitement de catégories liées à cette modalité. A travers des analyses intégratives sur les
déficits de traitements conceptuels suite à des lésions cérébrales (Barsalou, 2008;
Damasio, Tranel, Grabowski, Adolphs & Damasio, 2004; Mahon & Caramazza, 2009),
il apparaît que des lésions dans les aires visuelles réduisent notamment la catégorie des
animaux (Damasio, Grabowski, Tranel & Hichwa, 1996). Les lésions motrices réduisent
celles des outils (Damasio et al., 2004). Des lésions des aires traitant les couleurs
réduisent les connaissances sur les couleurs (cité dans Barsalou, 2008). Enfin, des
lésions dans les aires de traitements spatiaux produisent des déficits dans les
connaissances sur la localisation (Levine, Warach & Farah, 1985, cité dans Barsalou,
2008). Il s'agit dès lors d'arguments supplémentaires en faveur d'un système conceptuel
qui partagerait des bases neurales communes avec les systèmes à modalité spécifique.
2.2.3. Etudes en neuroimagerie
Si certaines catégories disparaissent lors de lésions cérébrales, les études en
neuroimagerie soulignent une activation de ces mêmes zones lors de traitements
conceptuels. Par exemple, Martin (2007) signale que les aires visuelles s'activent
lorsque les sujets exécutent des tâches conceptuelles sur les animaux, de même que les
14
2Cecicomprendladimensionaffective.
aires motrices s'activent lors du traitement conceptuel des outils. Hauk, Johnsrude et
Pulvermüller (2004) soulignent également une activation des aires prémotrices et
motrices lors de la lecture passive de mouvements du visage, des bras ou des jambes.
Les aires gustatives s'activent lors du traitement conceptuel d'aliments (Simmons,
Martin & Barsalou, 2005), tout comme les aires olfactives lorsque les sujets pensent à
des odeurs (Gonzalez, Barros-Loscertales, Pulvermüller, Meseguer, Sanjuan, Belloch &
Avila, 2006). L'ensemble de ces résultats semble indiquer une fois encore que les
concepts prennent, au moins en partie, leur source dans les aires de traitements sensori-
moteurs. Il apparaît bien que l'hypothèse d'une simulation sensori-motrice des concepts
telle que le propose le modèle de Barsalou (1999) s'appuie sur des arguments
empiriques variés et solides.
2.3. Critiques de la cognition incarnée
Depuis plusieurs décennies, les modèles de la sémantique prétendaient que les
concepts étaient stockés sous une forme abstraite dans la mémoire sémantique, un
système modulaire (distinct de la mémoire épisodique et des systèmes sensori-affectivo-
moteurs) et amodal (Fodor, 1976; Newell, 1980, cités dans Niedenthal, 2007).
Toutefois, il est actuellement devenu impossible de nier que les systèmes sensori-
moteurs participent au support et aux traitements conceptuels. Au vu des diverses
recherches développées précédemment, cette approche semble être évidente.
Néanmoins, certains auteurs (e.g. Dove, 2009; Mahon et al., 2009) soutiennent que la
simulation perceptivo-motrice ne peut expliquer tous les mécanismes conceptuels. En
effet, une question récurrente adressée aux disciples des modèles de la cognition
incarnée concerne la représentation des concepts abstraits. Parmi les différentes études
présentées, la majorité des concepts utilisés peuvent facilement susciter une
représentation mentale sous forme d'image (Paivio, 1971, cité dans Dove, 2009). Il
serait effectivement facile de simuler, via les systèmes sensori-moteurs, des concepts
d'animaux qui activent principalement les aires visuelles, des outils ou des actions qui
activent les aires motrices, des concepts émotionnels qui activent les systèmes affectifs,
etc. Mais il serait d'emblée plus difficile d'expliquer comment les individus simuleraient
15
des concepts tels que DELIVRANCE ou AFFRANCHISSEMENT rien qu'à partir
d'éléments visuels, auditifs, émotionnels, ... De même, à partir de ces systèmes,
comment distinguer deux concepts proches tels que LIBERTE et AUTONOMIE ? A ceci,
Barsalou (1999, 2008) propose que dès que le concept abstrait ait été perçu, les
individus créent une représentation de celui-ci en appliquant trois mécanismes:
l'encadrement (framing), l'introspection et la sélectivité. L'individu va identifier une
séquence d'événements indiquant le cadre dans lequel s'inscrit le concept abstrait.
Ensuite, il va se centrer autant sur les informations physiques de l'événement que sur les
éléments introspectifs et proprioceptifs. Enfin, l'individu va identifier l'élément central
de ce concept parmi le panel d'informations qui le caractérisent. Barsalou (1999)
soutient qu'une fois que le concept a été parfaitement intégré, il pourra ultérieurement
être simulé directement par les systèmes sensori-moteurs. Bien que ce système semble,
a priori, se passer de représentations amodales, Dove (2009) signale que l'introspection
va, à son tour, susciter d'autres concepts abstraits qui devront eux-mêmes faire l'objet
d'un traitement aussi lourd. Puisque l'introspection serait une simulation perceptuelle
associée à une formation de jugements, ceux-ci sont fort susceptibles de contenir eux-
mêmes des concepts abstraits. Dès lors, selon Dove (2009), il serait peut-être plus
adéquat d'émettre l'hypothèse d'une intervention de mécanismes amodaux afin de court-
circuiter ces analyses sans fin. Pourtant, certaines études vont effectivement dans le sens
d'une simulation sensori-motrice de certains concepts abstraits (des concepts
émotionnels abstraits dans l'étude de Niedenthal et al., 2009).
Conscients de cette limite, il ne faudrait pas pour autant rejeter le modèle
de Barsalou (1999). Les théories inspirées par la cognition incarnée se voient
multipliées de plus en plus et confirmées dans la littérature scientifique. Toutes ces
théories sont généralement axées sur le mécanisme de simulation prenant source dans
les systèmes sensori-moteurs. Par exemple, certains auteurs se sont intéressés aux
mécanismes de l'inférence perceptuelle (Stevens, Fonlupt, Shiffrar & Decety, 2000, cité
dans Barsalou, 2008), à la perception de l'espace (Longo & Laurenco, 2007, cité dans
Barsalou), à une relecture de la mémoire implicite (Roediger & McDermott, 1993, cité
dans Barsalou, 2008) et explicite (Rubin, 2006, cité dans Barsalou, 2008), aux
cognitions sociales (via les neurones miroirs qui seraient la base neurale de l'empathie -
16
Rizzolatti & Craighero, 2004), etc3. Au final, bien que de nombreuses observations
aillent dans le sens d'une cognition incarnée, il existe actuellement peu de théories
intégratives (Barsalou, 1999; Garagnani, Wennekers & Pulvermüller, 2007, cité dans
Barsalou, 2008) qui proposent un modèle computationnel de celles-ci.
3. Le clignement attentionnel
La section précédente a présenté plusieurs modèles sur l'organisation cognitive du
système sémantique. La majorité des anciens modèles cognitifs de la sémantique
postule une représentation abstraite des concepts (donc amodale), tandis que le modèle
proposé par Barsalou (1999, 2008) propose une structure sémantique qui prend ses
racines dans les systèmes sensori-moteurs ou autrement dit, modaux. Toutefois, si un
grand nombre d'études va dans le sens de cette dernière hypothèse (Niedenthal et al.,
2008, 2009; Pecher et al., 2003; Solomon et al., 2004; Spence et al., 2001), peu d'entre
elles se sont penchées sur le décours temporel de l'accès conceptuel selon la théorie de
la cognition incarnée (Vermeulen, Mermillod, Godefroid, Corneille, in press).
La présente section s'intéresse à un phénomène particulier, intitulé "clignement
attentionnel" ou attentional blink (Raymond, Shapiro, & Arnell, 1992), qui s'observe
lors d'une tâche de présentation rapide et sérielle de stimuli visuels. Cette manifestation
permettrait de tirer des conclusions quant aux mécanismes cognitifs implicites et
précoces de l'accès conceptuel. Dans un deuxième temps, le modèle de Barsalou (1999,
2008) permettra une relecture de certains modèles du clignement attentionnel.
17
3 Bien qu'illustratifs de la puissance des modèles à cognition incarnée, ces domaines de recherches ne
seront pas développés afin de ne pas s'éloigner de la thématique principale de ce travail, à savoir les traitements conceptuels. Pour une revue complète de ces différents champs de recherches, voir Barsalou
(2008).
3.1. Les modèles
3.1.1. Définitions
Une caractéristique fondamentale de notre organisation cognitive est la capacité
à traiter les informations pertinentes dans notre environnement afin d'adapter notre
comportement de la façon la plus adéquate et la plus efficace possible (Öhman, 2002;
Olivers & Meeter, 2008). Cela signifie que notre cerveau va devoir adopter des
stratégies spécifiques et précoces afin d'isoler et traiter préférentiellement les
informations importantes qui lui parviennent.
Afin d'étudier ces mécanismes, la tâche de présentation rapide et sérielle de
stimuli visuels (Rapid Serial Visual Presentation - RSVP; Lawrence, 1971) permet
l'étude expérimentale de traitements cognitifs des stimuli visuels sur des laps de temps
très courts. La forme classique de cette tâche demande aux participants de rapporter, à la
fin de l'essai, les deux lettres qui sont apparues parmi un flux de chiffres (Chun &
Potter, 1995). Il peut y avoir jusqu'à 19 items présentés par seconde (ce qui équivaut à
une présentation de 53 ms par item). Les lettres à rapporter sont appelées "cibles" (cible
1 = C1; cible 2 = C2) tandis que les chiffres sont intitulés "distracteurs". Ces items sont
présentés séquentiellement sur un écran d'ordinateur, dans une même région spatiale.
Lors de l'analyse des résultats, les nombreuses études ont découvert un
phénomène commun que Raymond et al. (1992) ont nommé "clignement
attentionnel" (CA). La figure 1 illustre un CA classique. Lorsque C1 et C2 sont
présentés à un intervalle de temps variant entre 200 et 500 ms et que des distracteurs
sont insérés entre eux, le taux de rapports de C2 chute de façon significative. Par contre,
lorsque C2 est présenté entre 13 et 53 ms après l'apparition de C1, c'est l'effet inverse
qui est observé: le taux de rapport de C1 diminue tandis que celui de C2 est épargné
(Potter, Staub & O'Connor, 2002). Ce dernier phénomène est intitulé Lag-1 sparing4. Le
CA présente encore d'autres particularités en fonction de ses variations expérimentales.
En effet, s'il a été observé dans une expérience de CA classique où les deux cibles sont
séparées par l'apparition d'un ou plusieurs distracteurs que C2 n'était presque jamais
18
4Laformuleanglophone"Lag‐1sparing"seraemployéetoutaulongdecetravail,dansunbutdeclartéterminologique.
rapporté, cet effet est aboli lorsqu'il n'y a aucun distracteur entre C1 et C2 (Chun &
Potter, 1995; Raymond et al., 1992). Le clignement de C2 est aussi supprimé lorsque
celui-ci est le dernier item de la séquence (Giesbrecht & Di Lollo, 1998). De plus,
lorsque trois cibles (Di Lollo, Kawahara, Ghorashi & Enns, 2005) ou cinq cibles
(Nieuwenstein & Potter, 2006) sont présentées l'une à la suite de l'autre, il a été constaté
que celles-ci pouvaient ne pas faire l'objet d'un clignement. Ce phénomène est nommé
"expansion de l'épargne" (spreading the sparing5). De même, selon Olivers et al.
(2008), le CA peut être postposé lorsque le distracteur présente des propriétés similaires
à celles des cibles.
Les questions principales sont alors de comprendre où, quand et comment le
clignement se produit. Les sujets perçoivent-ils tous les items ou bien y a-t-il déjà un
Quelle était la deuxième lettre ?
Quelle était la première lettre ?
92
7
Environ 100 ms
Temps
C1
C2 K3
F8
9
5
2+
Figure 1: présentation d'un paradigme typique de clignement attentionnel. (adapté de "A boost and bounce theory of temporal attention", C. N. L. Olivers & M. Meeter, 2008, Psychological Review, 115, figure 1A, p. 837)
19
5Laformuleanglophone"Spreading thesparing"seraemployéetoutaulongdecetouvrage,dansunbutdeclartéterminologique.
déficit attentionnel au niveau perceptif ? Le clignement est-il le reflet d'un déficit au
niveau du traitement sémantique des différents items ? S'agit-il plutôt d'un problème
d'encodage, de stockage ou de récupération des cibles en mémoire de travail ? De
même, il serait pertinent de se questionner sur l'influence de la modalité d'entrée des
stimuli.
Il existe actuellement deux courants de pensées majeurs pour expliquer le CA.
Le premier s'articule autour de l'idée que les cibles perçues vont entrer en compétition
dans le recrutement des ressources disponibles de maintien afin d'accéder en mémoire
de travail. Le modèle de Chun et Potter (1995) est celui qui a le plus influencé la
littérature selon cette vision. Par contre, le second courant propose une vision plutôt
temporelle que structurellement fonctionnelle. Olivers et al. (2008) opteront donc pour
un mécanisme illustré par une activation (boost) et une inhibition (bounce).
Ces modèles théoriques étant développés, il conviendra de s'interroger sur
l'impact de la modalité des stimuli présentés dans le paradigme du CA. Observe-t-on un
CA lors de présentations intra et/ou crossmodales ? Enfin, toutes les modalités
(visuelles, auditives, tactiles, affectives) sont-elles touchées avec la même intensité dans
ces tâches de présentation rapide de stimuli ?
3.1.2. Modèles aux ressources à capacités limitées
Depuis une quinzaine d'années, c'est le modèle de Chun et Potter (1995) qui s'est
imposé pour expliquer le phénomène du CA. Ce modèle postule que le système
attentionnel dispose de ressources limitées pour traiter l'ensemble des stimuli perçus.
Dès lors, comme dans le cas du CA, certaines informations s'évanouissent avant d'avoir
pu atteindre la phase d'encodage en mémoire de travail (MdT). Nous proposons dès lors
une description plus détaillée de ce modèle et des auteurs qui ont tenté de le compléter
(e.g. le modèle S2 de Bowman et Wyble, 2007). De même, plus récemment, un autre
modèle postulant des ressources limitées a fait son apparition: le LC-NE de
Nieuwenhuis, Gilzenrat, Holmes et Cohen (2005). Celui-ci présente l'avantage de
pouvoir s'intégrer aussi bien au modèle du S2 (Bowman, Wyble, Chennu & Craston,
2008) qu'au modèle de l'activation/inhibition d'Olivers et al. (2008) qui explique le CA
en évitant d'avoir recours à un mécanisme comme celui du manque de ressources
disponibles.
20
3.1.2.1. Le modèle de compétition à deux étapes de l'attention (1995).
Les travaux de Chun & Potter (1995) ont fortement influencé l'ensemble de la
littérature traitant du CA. Selon leur modèle de compétition à deux étapes, les items
(chacun présenté à un rythme de 100 ms par item) passent par un premier niveau de
traitements qui analysent leurs propriétés sensorielles et sémantiques (Chun et al., 1995;
Potter et al., 1998; Vogel, Luck & Shapiro, 1998). Les items qui sont potentiellement
des cibles recrutent plus de ressources de traitement afin d'augmenter leur probabilité
d'être identifiés (Potter et al., 1998). La caractéristique de ce niveau est qu'il permet un
traitement parallèle de tous les items. Toutefois, cette étape est aussi dite labile (Potter,
Staub & O'Connor, 2002). Cela signifie que les informations risquent l'extinction si
elles ne font pas rapidement l'objet d'un encodage en mémoire de travail. Potter et al.
(2002) parlent de mémoire à court terme conceptuelle (MCTC) (Conceptual Short Term
Memory). En d'autres termes, si C2 apparaît alors que C1 est toujours en cours
d'identification, il va y avoir une compétition pour les ressources disponibles,
généralement en faveur de C1. Par contre, si C2 suit directement l'apparition de C1, il
profitera de l'allocation des ressources de C1, augmentant ainsi sa probabilité d'entrer le
premier dans la seconde étape de traitement (Lag-1 sparing). La figure 2 sert
d'illustration pour la compétition entre C1 et C2. Ainsi, la règle veut que la première
cible identifiée entre dans la deuxième étape du modèle de Chun et al. (1995). Cette
seconde étape est représentée par un goulot d'étranglement (bottleneck) amodal (Potter
et al., 2002). Durant cette étape, les cibles seront encodées en MdT de façon
séquentielle. Pendant ce temps, l'autre cible, toujours en MCTC, risque de s'estomper si
des distracteurs rivalisent avec elle (puisqu'ils s'allouent, eux aussi, des ressources de
traitement pour être maintenus en MCTC). Le terme de masque (mask) est employé
lorsqu'un distracteur suit directement une cible car il réduit sa probabilité d'entrer en
MdT. Si un distracteur suit une cible, il va s'accaparer une part des ressources
attentionnelles disponibles et va réduire la probabilité que la cible puisse parvenir à la
phase d'encodage. C'est pour cela que la cible est dite "masquée".
21
La grande majorité de la littérature s'est inspirée du modèle à deux étapes de
Chun et al. (1995) pour expliquer les résultats expérimentaux obtenus. Bien que peu de
révisions aient été apportées, c'est actuellement le modèle du S2 (Simultaneous Type,
Serial Token Model of Temporal Attention and Working Memory) de Bowman et al.
(2007) qui a intégré au modèle de Chun et al. (1995) un ensemble d'évidences
neurologiques, électrophysiologiques et comportementales en congruence avec l'idée
d'un pool de ressources attentionnelles limitées lors de la première phase de traitements.
De façon très générale, le S2 explique le décours du CA comme le modèle de Chun et al.
(1995). Toutefois, il intègre aussi le modèle de Kanwisher (1987, 1991) qui différencie
deux représentations distinctes et complémentaires: les types et les jetons. Les types
correspondent à toutes les propriétés sensorielles et sémantiques des items. Dans le cas
de la présentation d'une lettre cible, la représentation de son type correspondra à son
analyse visuelle (forme, couleur, taille) et à une analyse sémantique qui la classera dans
0
25
50
75
100
0 200 400 600 800
C1C2
Ecart entre C1 et C2
Performance
Figure 2: probabilité de rappel des cibles (C1 et C2) en fonction de l'espace temporel de présentation qui les sépare. Le taux de rappel de C1 ne change globalement pas, à l'inverse de C2 (adapté de "A boost and bounce theory of temporal attention", C. N. L. Olivers & M. Meeter, 2008, Psychological Review, 115, figure 1B, p. 837)
22
la catégorie des lettres. Les jetons représentent alors les informations épisodiques,
contextuelles. Autrement dit, ils informent la MdT du moment et de l'endroit où l'item
est apparu. Au final, le S2 soutient que la liaison entre un jeton et un type (tokenization)
est sérielle. Ce traitement correspond tout simplement à la phase d'encodage en MdT.
Ainsi les autres types en attente dans la première phase de traitements risquent de
s'estomper avant que le processus de tokenization ne soit terminé. Si les précédentes
considérations n'ont pas grandement changé les modèles de Chun et al. (1995) et de
Kanwisher (1987), le S2 se caractérise surtout par un module supplémentaire qu'il
nomme "boutefeu" (blaster) ou "augmentation transitoire de l'attention" (ATA)
(transient attentional enhancement) (Kristjansson, Mackeben & Nakayama, 2001;
Kristjansson & Nakayama, 2003). Celui-ci ouvre une brève fenêtre attentionnelle lors
de la première étape. En effet, Bowman et al. (2007) attribuent à ce système la capacité
d'augmenter le niveau d'activation des items saillants afin de les faire entrer en MdT.
Toutefois l'ATA ne dure qu'environ 100 ms et ne décharge qu'une fois par tokenization.
3.1.2.2. Le modèle du locus coeruleus - norépinéphrine.
Les modèles présentés précédemment expliquaient le CA selon des mécanismes
cognitifs. Le modèle du Locus Coeruleus – Norépinéphrine (LC-NE) de Nieuwenhuis et
al. (2005) propose, quant à lui, une explication neurophysiologique à ce phénomène. Le
LC est un noyau du tronc cérébral qui décharge un neurotransmetteur, la NE. Ce
neurotransmetteur a une fonction excitatrice, qui se diffuse à travers de nombreuses
régions corticales liées aux traitements attentionnels (Berridge & Waterhouse, 2003:
Nieuwenhuis et al., 2005). A l'inverse, la NE a un effet inhibiteur sur le LC lui-même
(Berridge et al., 2003; Nieuwenhuis et al., 2005). Aston-Jones, Rajkowski, Kubiak, &
Alexinsky (1994) ont ainsi découvert que le LC répondait aux stimuli pertinents ou
saillants qui nécessitaient un traitement approfondi dans des tâches de détection
visuelle. De la sorte, dans une condition de CA classique, à l'apparition de C1, le LC
libère dans un premier temps de la NE qui augmente le traitement de C1 (la décharge
dure environ 50 à 100 ms mais l'effet varie entre 100 et 200 ms (Usher, Cohen, Servan-
Schreiber, Rajkowski, & Aston-Jones, 1999). Mais, dans un second temps, la NE inhibe
rapidement le LC pendant environ 200 à 250 ms (Nieuwenhuis et al. 2005; Usher et al.,
1999), période pendant laquelle C2 apparaît, ce qui empêche son traitement approfondi.
23
Par contre, si C2 suit directement l'apparition de C1, il bénéficiera lui aussi d'un
traitement approfondi grâce à la libération de NE, ce qui expliquerait le Lag-1 sparing.
Ce modèle présente l'avantage de pouvoir s'intégrer relativement facilement
dans d'autres modèles (e.g. le modèle S2 de Bowman et al, 2008, et le modèle
"activation/inhibition" de Olivers et al., 2008). Il diffère néanmoins du modèle
"activation/inhibition" car le modèle LC-NE postule encore une fois un système aux
ressources à capacités limitées en ce sens où le LC ne peut pas décharger indéfiniment
suite à l'apparition de C1 qui profite entièrement du mécanisme et ne laisse rien à C2
(Olivers et al., 2008).
3.1.3. Modèle "activation/inhibition"
Si les modèles présentés précédemment s'articulaient autour d'une théorie des
ressources aux capacités limitées, le modèle "activation/inhibition" (boost and bounce)
d'Olivers et al. (2008) décrit des mécanismes du CA qui ne reposent pas sur ce type
d'interprétation. Leur explication présente l'avantage de la simplicité et de la cohérence
avec un grand nombre d'études. De même, il permet d'expliquer les résultats de bon
nombre de formes différentes de paradigmes à présentation rapide de stimuli visuels
(RSVP).
Selon le modèle "activation/inhibition", le traitement des représentations
sensorielles pertinentes (les cibles) est augmenté (activation) grâce à des boucles
rétroactives positives. Par contre, dès qu'un stimulus non pertinent est détecté, il
bloquera ou freinera le traitement des entrées visuelles en mémoire de travail (Olivers et
al., 2008) via des boucles de rétroaction négatives (inhibition). Il n'est donc plus
question de limitation des ressources disponibles.
Toutefois, tout comme le modèle S2, il se décompose en deux étapes. La
première étape correspond à un traitement des propriétés perceptuelles des stimuli
(telles que la forme, la couleur et l'orientation) ainsi que de leur représentation
sémantique et catégorielles (Olivers et al., 2008). La seconde étape, ici aussi similaire à
celle de Chun et al. 1995) et à Bowman et ses collègues (2007, 2008), correspond à
l'encodage en MdT. Selon Dehaene, Kerszberg, & Changeux (1998), la MdT entretient
des connexions de type feedback avec les représentations sensorielles pertinentes et
avec les représentations des réponses pertinentes (Olivers et al., 2008).
24
Ce qui caractérise particulièrement ce modèle se situe au niveau du système
d'accès (gate) à la MdT (Reeves & Sperling, 1986; Shih & Sperling, 2002). Celui-ci
permet de filtrer les informations pertinentes au détriment des non-pertinentes. C'est
ainsi que les informations qui sont pertinentes pour la tâche sont boostées grâce à un
feedback excitateur, tandis que les stimuli non-pertinents seront inhibés grâce à un
feedback inhibiteur. Il s'agit de mécanismes bien connus dans le domaine de l'attention
sélective (Bundesen, Habekost & Kyllingsbaek, 2005). Ce mécanisme d'accès s'active
d'abord fortement puis diminue naturellement (Connors & Gutnick, 1990; Goldman-
Rakic, 1995; Tomita, Ohbayashi, Nakahara, Hasegawa & Miyashita, 1999) car la mise à
jour de la MdT doit être transitoire (Nakayama & Mackeben, 1989). Ainsi, les cibles
prennent de l'importance en fonction de mécanismes à la fois top-down et bottom-up
qui sont en interaction constante (Olivers et al., 2008).
Si on utilise ce modèle dans un contexte concret de CA, cela signifie que C1
sera boosté dès sa détection. Or, le pic d'activation du boost est à son apogée pendant
l'arrivée de l'item post-C1. Cela signifie que si l'item post-C1 est un distracteur, il
profitera du boost mais déclenchera le mécanisme d'inhibition, ce qui empêchera C2
d'entrer en MdT. Olivers et al. (2008) proposent d'ailleurs que le boost soit aussi lié au
mécanisme de libération de NE, tel que le décrivaient Nieuwenhuis et al. (2005). Ce
mécanisme permet dès lors d'expliquer bon nombre de phénomènes différents. Dans le
cadre d'un Lag-1 sparing, C2 obtient de meilleures performances que C1 parce qu’il est
présenté lors du pic du boost (qui suit C1). De même, le phénomène "spreading the
sparing" (quand trois à cinq cibles successives peuvent être rapportées sans le moindre
clignement) peut être le résultat de l'accès en MdT qui est toujours ouvert. Un résultat
intéressant apparaît dans une étude d'Olivers et Nieuwenhuis (2006) qui ont observé
qu'il n'y avait pas de clignement s'il était demandé aux sujets de ne pas trop se
concentrer lors d'une tâche de CA. De même, Ferlazzo, Lucido, Di Nocera, Fagioli et
Sdoia (2007) ont observé que l'instruction de "rapporter les deux cibles" réduisait plus le
taux de clignements que lorsqu'elle était de "rapporter chacune des cibles". Olivers et al.
(2008) proposent pour ces deux cas de figures que les résultats reflètent une attention
flottante, c'est-à-dire plus distribuée, moins en profondeur, permettant ainsi au système
une détection moins performante des distracteurs et donc un mécanisme de blocage en
MdT moins performant pour des items subséquents. Enfin, dans leur étude, Olivers et
25
al. (2008) ont même observé que le CA pouvait être postposé. Dans cette expérience, les
sujets devaient rappeler les lettres rouges (cibles) parmi des chiffres distracteurs.
Toutefois, les résultats indiquent que si les deux distracteurs post-C1 étaient des chiffres
rouges, sauf le distracteur avant C2, le CA apparaissait aussi. Alors que le modèle de
Chun et al. (1995) aurait prédit que C2 pouvait entrer en phase d'encodage (puisque C1
avait eu le temps de terminer la sienne), les résultats indiquent ici qu'il n'en est rien et
appuient l'argument d'un boost et d'une inhibition selon la pertinence des items perçus.
3.2. Intra versus crossmodalité du CA
La majorité des chercheurs qui se basent sur le modèle de Chun et al. (1995) ont
émis l'hypothèse que le clignement ne dépendait pas de la modalité sensorielle d'entrée
des stimuli. Cela signifie que des stimuli visuels, auditifs ou tactiles présentés dans des
tâches intra ou crossmodales produiraient à chaque fois un CA (Arnell, Helion,
Hurdelbrink & Pasieka, 2004; Arnell & Jolicœur, 1999; Arnell & Larson, 2002;
Hillstrom, Shapiro & Spence, 2002). Les auteurs expliquent ces observations au moyen
d'un goulot d'étranglement amodal (Jolicœur, 1998). Pour rappel, celui-ci représente
l'étape d'encodage en MdT dans la théorie de Chun et Potter (1995). Toutefois, d'autres
études ont permis d'observer que les CA peuvent n'apparaître que lorsque les deux
cibles font partie de la même modalité d'entrée (Arnell, & Jenkins, 2004; Duncan,
Martens & Ward, 1997; Potter et al., 1998; Soto-Faraco & Spence, 2002). Au vu de ces
résultats contradictoires, une partie de la littérature s'est donc questionnée sur la
structure modale ou non du goulot d'étranglement (si l'on se réfère aux modèles des
ressources à capacité limitée). Il convient néanmoins de signaler que la majeure partie
des études qui ont remarqué un CA lors de conditions crossmodales requéraient de
changer de tâche (task switch) après la présentation de C1 ou de changer le lieu de
présentation de C2 (location switch) (voir les études citées précédemment sauf Soto-
Faraco et al., 2002). Par exemple, dans l'expérience d'Arnell et Jolicœur (1999), lors
d'une condition au C1 visuel et C2 auditif, les sujets devaient rapporter un chiffre (C1)
puis dire si un X était apparu ou non. Or, ce changement de tâche peut prendre environ
500 ms pour se mettre en place et donc provoquer un semblant de CA (Arnell &
26
Jenkins, 2008). De même, lorsque C2 apparaît à un autre endroit que C1, cela prend du
temps de déplacer son attention vers un nouvel endroit (Posner, 1980). Toutefois, Arnell
et al. (2004) ont constaté que ces changements de tâches et de localisation des cibles ne
semblent pas responsables des CA lors de conditions crossmodales (auditives et
visuelles).
Quant au modèle activation/inhibition d'Olivers et al. (2008), il ne discute pas la
question de la modalité d'entrée des items. Cette observation nous offre donc la
possibilité de formuler plusieurs hypothèses à ce sujet que nous développerons dans le
point 4 de ce chapitre ainsi que dans le chapitre II (objectifs des présentes recherches).
3.3. Clignement attentionnel et stimuli émotionnels
Le système attentionnel a, entre autres, pour fonction de sélectionner et
d'amplifier le traitement de stimuli considérés comme pertinents pour le comportement
à adopter. Or, parfois, certains stimuli recrutent automatiquement l'attention. C'est le cas
des informations émotionnelles. En effet, de nombreux auteurs ont observé que les mots
émotionnels capturaient particulièrement l'attention dans des tâches, par exemple,
d'indiçage visuel ou "dot probe" (Mogg, Bradley, De Bono & Painter, 1997, cité dans
Mathewson, Arnell, & Mansfield, 2008). Cela a aussi été remarqué dans des paradigmes
de Stroop émotionnel (MacKay, Shafto, Taylor, Marian, Abrams & Dyer, 2004). Pour la
majorité des modèles, il s'agirait d'un mécanisme qui allouerait les ressources
attentionnelles disponibles pour le traitement des informations potentiellement
menaçantes (Öhman, 2002; Vuilleumier, 2005). Ce mécanisme serait donc fortement
adaptatif. En effet, face à des stimuli émotionnels menaçants (un serpent ou une
expression de rage), le système permettrait un traitement plus rapide et donc plus
efficace de cette information afin de choisir une stratégie de coping adéquate (e.g. une
activation physiologique permettant la fuite ou l'attaque).
Or, le paradigme du CA a, lui aussi, permis d'observer un traitement préférentiel
des informations émotionnelles. De nombreux auteurs ont remarqué que le CA est réduit
lorsque C1 est neutre et que C2 est chargé émotionnellement, quelle que soit sa valence
(Anderson, 2005; Anderson & Phelps, 2001; Maratos, Mogg & Bradley, 2008; Trippe,
27
Hewig, Heydel, Hecht, Miltner, 2007). Finalement, d'après Anderson (2005) et Keil et
ses collègues (Keil & Ihssen, 2004; Keil, Ihssen & Heim, 2006), c'est surtout le niveau
d'activation physiologique (arousal) caractérisant le stimulus émotionnel qui va
influencer le CA. Cela signifie que ce n'est pas tellement le caractère négatif de
l'information qui va primer (bien que la menace et le niveau d'activation soient souvent
fortement corrélés – Vuilleumier, 2005). De même, Mathewson et al. (2008) ont
remarqué que lorsque C1 était fort chargé émotionnellement (un mot tabou ou sexuel),
le CA était plus grand que lorsque la première cible était émotionnellement neutre,
négative ou positive. De manière similaire, Silvert, Naveteur, Honoré, Sequeira et
Boucart (2004) ont constaté, dans un paradigme fort similaire au CA intitulé "cécité de
répétition" (C2 est identique à C1), que le clignement était plus fort lors de cibles
émotionnelles. Comment expliquer ces résultats ? Anderson (2005) suppose que les
mots tabous/sexuels ont un seuil d'activation plus petit que les mots neutres, ce qui leur
permet d'échapper aux limitations attentionnelles qui caractérisent le CA. Il l'explique
par le fait qu'un C2 émotionnel ne s'accapare pas toutes les ressources disponibles pour
C1. Par contre, Mathewson et al. (2008) soutiennent que les mots tabous/sexuels
reçoivent plus de traitements attentionnels puisqu'un C1 émotionnel réduit encore plus
la probabilité de rappeler C2. Selon eux, le traitement attentionnel approfondi des
stimuli sexuels/tabous lors de la première étape de traitement du modèle de Chun et
Potter (1995) peut s'expliquer par l'intervention de l'amygdale. Ce noyau situé dans le
lobe temporal médian antérieur est connu pour son rôle dans le traitement et
l'apprentissage de la peur mais aussi pour d'autres fonctions comme la détection
d'informations émotionnelles pertinentes (Vuilleumier, 2005) et pour moduler la
consolidation en mémoire à long terme (Sharot & Phelps, 2004). Ainsi, si l'amygdale
module les traitements sensoriels des stimuli émotionnels pendant que des mécanismes
top-down sont mis à disposition par les circuits attentionnels fronto-pariétaux, le
traitement de ces stimuli émotionnels sera augmenté. Cela signifierait que les stimuli
attentionnels seraient traités plus en profondeur lors de la première étape de traitement
lui permettant ainsi d'entrer plus facilement dans la seconde étape de traitements
(Mathewson et al., 2008).
Toutefois, en s'inspirant du modèle de l'activation/inhibition d'Olivers et al.
(2008), nous pourrions peut-être interpréter ces résultats par la saillance intrinsèque des
28
stimuli. De la sorte, plus une cible est identifiée comme telle (grâce à sa dimension
émotionnelle), plus l'activation sera forte (avec les gates qui permettent une entrée en
mémoire de travail). Le revers de cette stratégie est que le distracteur qui suit C1 va
occasionner une inhibition proportionnelle à la taille de l'activation préalable,
occasionnant ainsi un plus grand CA. Par contre, Olivers et al. (2008) ne se prononcent
pas clairement sur le traitement des cibles émotionnelles. Par exemple, qu'en est-il de
l'expérience d'Anderson et Phelps (2001) où les sujets avec lésions amygdaliennes
rapportaient moins de C2 émotionnels que les sujets normaux ? Sans doute l'amygdale
joue-t-elle effectivement un rôle dans la saillance des stimuli fortement activateurs mais
elle permettrait ainsi de limiter temporellement l'inhibition décrite par Olivers et al.
(2008) et faciliterait l'accessibilité en MdT.
4. Clignement attentionnel et cognition incarnée: des services mutuels
Puisque la procédure pour induire un CA consiste à présenter successivement et
rapidement des stimuli visuels, il est possible de décomposer les différentes étapes de
traitements cognitifs. En effet, le modèle S2 (Bowman et al., 2008), le modèle à deux
étapes de Chun et al. (1995) et le modèle activation/inhibition d'Olivers et al. (2008)
postulent que les stimuli perçus vont d'abord faire l'objet d'une analyse sensorielle.
Celle-ci comprend l'analyse des caractéristiques perceptuelles (couleur, forme et
orientation) ainsi que l'analyse des informations sémantiques et catégorielles. Potter et
al. (2002) ont fait l'hypothèse que tous les stimuli perçus feraient l'objet d'une
représentation conceptuelle dans ce qu'ils appellent la "mémoire à court terme
conceptuelle" (MCTC). L'idée de cette zone de stockage très brève repose entre autres
sur les résultats de Vogel, Luck et Shapiro (1998) qui ont observé que l'amplitude de la
N400 (qui correspond à l'analyse sémantique) restait indifférenciée (même amplitude et
non retardée), quel que soit l'écart entre les deux cibles. Cela indique que C2 a bien été
identifié et traité du point de vue de sa signification (voir aussi Rolke, Heil, Streb &
Hennighausen, 2005). L'étude de Potter, Dell'Acqua, Pesciarelli, Job, Peressotti et
29
O'Connor (2005) conforte ces données en observant un effet de priming sémantique
entre les cibles. Ils ont ainsi observé que C2 avait plus de probabilité d'être rappelé s'il
existait un lien sémantique avec C1. Ils émettent dès lors l'hypothèse que la première
cible identifiée lors de la première étape de traitement va installer un contexte
sémantique permettant à la seconde cible d'être maintenue plus longtemps en MCTC et
d'être ensuite encodée en MdT. Puisque l'ensemble de ces résultats nous indique qu'il est
possible de tester l'accès conceptuel, il est donc possible de tester la représentation de
ces concepts. C'est donc ici qu'interviennent les théories de la cognition incarnée.
Pour rappel, selon la théorie SSP de Barsalou (1999), les concepts sont
représentés dans les systèmes sensori-moteurs et simulent les propriétés modales du
stimulus qu'ils représentent. De même, il a été précédemment question de l'importance
de la modalité sensorielle d'entrée des stimuli dans le paradigme du clignement
attentionnel. En effet, selon les partisans du modèle à deux étapes de Chun et al. (1995),
le CA se produit a durant la seconde étape de traitement car la deuxième cible identifiée,
qui est en attente dans la MCTC, s'évanouit pendant que l'autre cible se fait consolider
en MdT. Certains auteurs soutiennent que le goulot d'étranglement (le stade de
consolidation) est amodal et donc que la modalité d'entrée des cibles ne modifiera en
rien l'importance du CA (Jolicœur, 1998). Pourtant, d'autres chercheurs soutiennent qu'il
existe un goulot d'étranglement par modalité (Arnell & Jenkins, 2004; Soto-Faraco et
al., 2002). En combinant l'apport du modèle SSP de Barsalou (1999) avec les designs
expérimentaux du CA, il est possible de tester d'une manière différente l'intra versus la
crossmodalité du CA (si les modèles à ressources aux capacités limitées s'avèrent
exacts). En effet, créer un CA auditif posait souvent des difficultés d'un point de vue
méthodologique. Mais puisque les théories de la cognition incarnée postulent que la
simulation des concepts auditifs est un phénomène "comme si" le concept était
réellement perçu par la modalité sensorielle auditive, le problème méthodologique
disparaît. Il deviendrait donc possible de tester la nature amodale ou crossmodale du
goulot d'étranglement même si tous les items sont présentés par la modalité d'entrée
visuelle.
De même, dans le point 4 de la partie théorique, il était question de priming
sémantique entre les deux cibles. Si la représentation conceptuelle des cibles est
modale, il y a donc moyen d'amorcer leur représentation via les différentes modalités
30
sensorielles et motrices. C'est ce qu'ont découvert Vermeulen, Mermillod, Godefroid et
Corneille (in press). Dans leur étude, la moitié des mots présentés dans une tâche de
CA étaient des mots qui pouvaient être représentés principalement par la modalité
visuelle (CIEL, GAZON) tandis que l'autre moitié comportait des mots représentés
principalement par la modalité auditive (ALLO, ECHO). Avant chaque essai, un signal
d'avertissement ("prêt") était présenté soit en modalité visuelle (à l'écran) soit en
modalité auditive (dans des haut-parleurs). Les résultats ont indiqué que les sujets
rapportaient plus souvent C2 lorsqu'il était représenté dans la même modalité que celle
du signal avertisseur (la deuxième cible DRING était plus souvent rappelée lorsque le
signal "prêt" avait été diffusé via les haut-parleurs). Vermeulen et al. (in press)
interprètent ces résultats de différentes manières. Premièrement, ces résultats peuvent
être difficilement expliqués par le modèle de Chun et al. (1995) car les mots présentés
dans leur étude n'étaient liés par aucun lien lexical et que la MCTC est supposée
contenir des concepts aux représentations amodales. Deuxièmement, il s'agit ici plutôt
d'un phénomène d'amorce sensorielle. D'après le modèle d'activation/inhibition
d'Olivers et al. (2008), cela signifie que l'activation sensorielle préalable (auditive ou
visuelle) a sûrement boosté le traitement de la cible dont la modalité de la représentation
s'accordait avec l'activation sensorielle initiale. C2 pouvait alors entrer plus facilement
en MdT. Autrement dit, l'activation sensorielle de départ aurait ouvert un canal sensoriel
qui amorce les cibles dont la représentation sensorielle est congruente avec l'activation
préalable. Toutefois, puisque Vermeulen et al. (in press) s'inspirent majoritairement du
modèle d'Olivers et al. (2008), la question de l'intra versus crossmodalité du goulot
d'étranglement du modèle de Chun et al. (1995) reste en suspens. En outre, si le modèle
de la cognition incarnée continue à accumuler des preuves en sa faveur, le paradigme
expérimental proposé par Vermeulen et al. (in press) pourrait ouvrir de nouvelles pistes
innovantes pour tester l'influence de la modalité de traitement des cibles dans le CA. De
même, alors que le CA permet de trouver des preuves en faveur de la cognition
incarnée, celle-ci peut à son tour donner des indices concernant les mécanismes sous-
jacents au CA. Par exemple, les résultats obtenus par Vermeulen et al. (in press),
difficilement explicables par le modèle de Chun et al. (1995), corroborent le modèle
d'Olivers et al. (2008) qui trouve ainsi un nouvel argument en sa faveur. Au final, il
apparaît bien que CA ait permis de fournir une preuve supplémentaire en faveur d'une
31
représentation modale des concepts et ce, sans que les sujets aient un accès conscient à
la simulation (à l'imagerie mentale).
32
II. OBJECTIFS DES PRESENTES RECHERCHES
La majeure partie des études qui tentent de démontrer que les concepts partagent
des bases neurales et des mécanismes communs aux systèmes sensori-moteurs
présentent néanmoins un risque d'interpréter de façon légèrement erronée les résultats.
En effet, le modèle SSP de Barsalou (1999) suppose que la simulation des concepts peut
se faire de façon implicite (il s'agit de processus qui se déroulent sans accès à la
conscience). Or, il nous semble que beaucoup d'études proposent des paradigmes
expérimentaux qui nécessitent au moins partiellement d'avoir recours à des stratégies
d'imagerie mentale qui sont, elles, des simulations plus explicites (i. e, sous un contrôle
conscient). La tâche de vérification de propriétés en est un exemple (Solomon et al.,
2004; Pecher et al., 2003; Marques, 2006; Vermeulen et al., 2007). Le simple fait de
demander explicitement à un individu de vérifier si un objet présente telle ou telle
propriété risque fortement d'occasionner des stratégies d'imagerie mentale. De la sorte,
même si l'expérience de van Dantzig et al. (2008) a tenté de démontrer un lien à travers
des tâches perceptuelles et conceptuelles (et par là, de limiter au maximum la possibilité
d'avoir recours à des stratégies d'imagerie), il reste malgré tout une faible probabilité
pour que ces résultats soient le fruit d'un amorçage entre le stimulus perceptif initial et
une représentation modale du concept par imagerie (et non par simulation implicite). Il
est effectivement difficile de distinguer l'imagerie mentale de la simulation implicite
puisque toutes les deux soutiennent que leurs bases neurales sont communes avec celles
de la perception (Kosslyn, Thompson & Alpert, 1997; Ganis, Thompson, & Kosslyn,
2004). Or, puisque l'imagerie mentale permet de scanner une image, de la réorganiser,
de lui appliquer des rotations, ..., cela demande de grosses ressources cognitives pour
maintenir l'image consciemment. Il serait donc logique qu'une double tâche visuelle ou
auditive interfère avec les mécanismes d'imagerie.
Il convient donc d'établir une autre méthode pour investiguer l'accès conceptuel
tout en évitant la possibilité que le sujet use de stratégies d'imagerie mentale. Pour ce
faire, l'étude de Vermeulen et al. (in press) permet clairement d'éviter un accès explicite
aux propriétés des objets présentés. Grâce au paradigme du CA, il est donc possible de
manipuler l'accès conceptuel à l'insu des participants (Potter et al., 2005) puisqu'il a été
33
prouvé que les traitements sémantiques ne sont pas perturbés quelles que soient les
conditions (Vogel et al., 1998).
Nous présenterons deux expériences distinctes qui reposent néanmoins toutes les
deux sur l'hypothèse que les concepts sont représentés dans les systèmes sensori-
moteurs (y compris le système affectif) et qu'il est possible d'investiguer cette assertion
grâce au paradigme du CA.
La première expérience poursuit les résultats obtenus dans l'étude de Vermeulen
et al. (in press). Dans leur étude, ils ont observé que l'activation d'un canal sensoriel
(auditif ou visuel) servait d'amorce pour les concepts représentés dans la même modalité
que le signal avertisseur (un "bip" auditif et ECHO). Cette amorce augmenterait l'impact
du boost (selon le modèle d'Olivers et al., 2008) permettant aux cibles d'entrer plus
facilement en MdT. Ainsi, dans un paradigme de CA, l'importance de la modalité de
représentation des cibles apparaît tout aussi évidente sans que les sujets n'aient à
accéder explicitement aux représentations du concept. Toutefois, il était question ici
d'une ouverture d'un canal sensoriel facilitant l'accès conceptuel. Il serait aussi possible
de tester l'accès conceptuel d'une autre façon, grâce aux modèles de cognition incarnée.
Qu'en serait-il si les sujets devaient accomplir une tâche interférente dans la même
modalité que les cibles présentées ? Ainsi, notre première expérience consistait en la
présentation d'une série d'essais avec des C2 dont la représentation conceptuelle était
soit visuelle, soit auditive (GAZON, pour les concepts visuels; ECHO, pour les concepts
auditifs). Ensuite, directement après chaque essai, un stimulus visuel ou auditif sans
signification apparaissait soit à gauche ou à droite de l'écran (pour les stimuli visuels),
soit dans le haut-parleur de gauche ou de droite (pour les stimuli auditifs). Les sujets
devaient alors accomplir le plus rapidement possible une tâche de décision gauche/
droite de la localisation d'apparition du stimulus. Si les concepts sont effectivement
représentés dans les systèmes sensori-moteurs et que leur activation nécessite une
simulation des modalités sensorielles représentées, nous prévoyons que les cibles aux
représentations auditives (TOUX) accéderont moins facilement en MdT lors d'une
décision gauche/droite d'un stimulus auditif. Dans la même logique, les cibles aux
représentations visuelles (ARBRE) seront moins souvent rappelées lors de la décision
droite/gauche de stimuli visuels. Ces deux illustrations correspondent aux conditions
intramodales: concept auditif - décision auditive [AA] ou concept visuel - décision
34
visuelle [VV]. A l'inverse, il est probable que les cibles seront mieux rappelées en
condition crossmodale (concept visuel-décision auditive [VA]; concept auditif-décision
visuelle [AV]) puisque l'interférence à l'intérieur de la même modalité sera abolie. De
même, nous nous attendons à un impact de la condition sur les temps de réaction (TR) à
la tâche de décision droite/gauche. Il reste néanmoins difficile de prédire si les TR
seront plus courts ou plus longs en fonction de la condition (intra ou crossmodale). Par
exemple, la simulation d'un concept auditif peut tout aussi bien servir d'amorce pour les
activités auditives subséquentes (de façon similaire à l'expérience de Vermeulen et al, in
press), qu'elle peut recruter de façon significative les ressources auditives disponibles,
ralentissant alors la tâche de décision auditive. Enfin, puisque le sort des TR reste
difficile à prédire, il serait tout aussi délicat de se prononcer sur la qualité des réponses à
la tâche de décision droite/gauche en fonction de la condition (intra ou crossmodale).
Nous nous attendons néanmoins à un nombre de fautes particulièrement réduit malgré la
possible interférence en condition intramodale (AA et VV) car la tâche décisionnelle
laisse la liberté aux sujets de répondre seulement quand ils considèrent connaître la
bonne réponse. Si nos prédictions s'avèrent correctes, c'est-à-dire que les résultats
dévoilent des différences significatives dénotant un lien entre la modalité de
représentation des concepts et la modalité sensorielle de la tâche décisionnelle, il s'agira
d'un argument supplémentaire en faveur des théories de la cognition incarnée et surtout
du modèle de Barsalou (1999).
Notre seconde expérience s'inspire, elle aussi, du paradigme expérimental et des
résultats obtenus par Vermeulen et al. (in press). Serait-il possible d'appliquer la même
expérience aux concepts émotionnels ? Autrement dit, est-ce qu'une amorce présentant
des caractéristiques émotionnelles augmenterait le rappel des C2 émotionnels qui
correspondent à l'amorce ? Dans un récent ouvrage qui récapitule les résultats obtenus
dans de nombreux domaines de recherches sur les émotions, Philippot (2007) décrit les
émotions grâce au modèle bi-mnésique. De manière générale, les émotions y sont
décrites comme le résultat d'un ensemble de processus opérés par différents systèmes en
constante interaction: le système perceptif, le système associatif et le système des
réponses corporelles. Ce qui nous intéresse particulièrement ici, c'est le lien
qu'entretiennent le système perceptif et le système des réponses corporelles. Le système
perceptif peut saisir les stimuli externes (e.g. un visage en colère) et les stimuli internes
35
(les sensations somesthésiques). Le système des réponses corporelles occasionne aussi
bien des réponses comportementales (e.g. la fuite, des expressions faciales
émotionnelles, une posture particulière) que physiologiques (des réponses cardio-
vasculaires, hormonales et un changement de la température interne). Tous ces
changements vont activer des boucles de rétroaction positives. Il semble donc possible
de distinguer et de manipuler les différentes facettes qui constituent les émotions. Ainsi,
selon les théories de la cognition incarnée, les concepts émotionnels vont simuler
certains aspects sensori-moteurs constitutifs de l'émotion représentée. Dès lors, dans la
lignée de l'étude de Vermeulen et al. (in press), nous faisons l'hypothèse qu'un niveau
d'activation physiologique (arousal) préalable modulera l'accès aux concepts
émotionnels. Autrement dit, nous supposons que si les sujets ont déjà un haut niveau
d'activation physiologique, dans un paradigme de CA, ils percevront plus les C2 dont
les concepts ont des représentations hautement activatrices (GUERRE, HAINE). De
même, un état de relaxation est censé augmenter la probabilité que les concepts aux
représentations calmantes entrent en MdT (RELAX, PAIX). A l'inverse, si l'activation
physiologique préalable et la représentation conceptuelle du niveau d'activation ne sont
pas congruentes (haute activation – REPOS), nous nous attendons à une augmentation
de CA. De la sorte, à l'instar de l'expérience de Vermeulen et al. (in press), nous
prédisons que le niveau d'activation agira de la même manière que les signaux
avertisseurs, c'est-à-dire en ouvrant un canal sensori-moteur qui facilitera l'accès et la
simulation conceptuelle. Ainsi, si Niedenthal et al. (2009) ont démontré que la
simulation des concepts émotionnels occasionnait de subtiles activations musculaires
faciales congruentes avec les concepts traités, la présente étude démontrerait que les
individus se basent aussi sur la composante physiologique des émotions pour se
construire implicitement la signification des stimuli émotionnels. Enfin, afin de
contrôler d'une façon supplémentaire le traitement des informations émotionnelles, les
sujets ont dû remplir un premier questionnaire visant à évaluer leur niveau d'alexithymie
via la TAS-20 (Toronto Alexithymia Scale, Bagby, Parker & Taylor 1994a; Bagby,
Taylor & Parker,1994b; voir annexe 6), un deuxième questionnaire qui évalue les
affects positifs et négatifs du moment (PANAS, Watson, Clark & Tellegen, 1988b; voir
annexe 7) et un dernier questionnaire qui analyse le niveau d'empathie des sujets
(Interpersonal Reactivity Index - IRI, Davis, 1983; voir annexe 8).
36
Selon Bydlowsky, Berthoz, Corcos et Consoli (2003), l'alexithymie est un trait
de personnalité caractérisé par une difficulté à identifier et décrire ses émotions, une
pauvreté de la vie imaginaire, une pensée orientée vers les aspects externes, matériels et
concrets de l'existence. Les personnes souffrant d'alexithymie semblent éprouver de
graves difficultés à traiter les informations émotionnelles ainsi qu'à réguler leurs
émotions. Il existe deux types d'alexithymie. L'alexithymie de type I serait caractérisée
par une absence du ressenti émotionnel et des cognitions qui l'accompagnent. Par
contre, une personne souffrant d'alexithymie de type II vit des expériences
émotionnelles mais sans les cognitions correspondantes. Nous faisons donc l'hypothèse
que le score total à la TAS-20 ou qu'une de ses sous-échelles sera corrélé avec un moins
bon traitement des informations émotionnelles et plus particulièrement des concepts aux
représentations stimulantes. De même, la théorie des neurones miroirs s'inscrit dans la
lignée des modèles de la cognition incarnée. Selon les chercheurs dans le domaine des
neurosciences sociales (Iacoboni & Dapretto, 2006; Rizzolatti & Craighero, 2004), les
neurones miroirs seraient les supports neuraux à la base de l'imitation et de l'empathie.
Il est donc possible aussi qu'un déficit au niveau des aptitudes empathiques modère
l'accès conceptuel des mots émotionnels. Enfin, l'état affectif dans lequel les sujets
exécutent des expériences peut modifier les résultats. Par exemple, Olivers et al. (2006)
ont écrit que les affects positifs réduisaient le CA. Il est dès lors probable d'observer un
tel effet dans le cadre de la présente étude.
Si, en fin de parcours, ces deux études se voient validées, elles permettraient
d'argumenter une nouvelle fois en faveur d'une simulation implicite sensorielle, motrice
et affective des concepts perçus ou générés.
37
III. EXPERIENCE 1
L'objectif de cette première expérience est de démontrer qu'une tâche de
décision auditive ou visuelle va interférer avec l'accès conceptuel de mots aux
représentations majoritairement auditives ou visuelles dans une tâche de CA.
1. Participants et design
50 participants (21 garçons et 29 filles, moyenne d'âge = 22,26 ans, SD = 2,939)
de langue maternelle française ont participé volontairement à l'étude et ont été rétribués
de 5€ ainsi que d'un jeu de la Loterie Nationale (un ticket de Subito à 1,25€) pour
environ 45 minutes d'expérience6. L'annonce présentait l'expérience comme une étude
s'intéressant aux processus attentionnels sur des laps de temps très courts. L'étude était
construite selon un design complètement intrasujets de type 2 (modalité de la deuxième
cible: auditive vs. visuelle) x 2 (modalité de la décision: auditive vs. visuelle).
2. Stimuli et matériel
Pour la partie du CA, la première cible (C1) était constituée de 60 mots dont la
modalité de représentation conceptuelle n'était a priori ni auditive, ni visuelle (e.g.
SOIF, JADIS, EXCES). La deuxième cible (C2) était constituée de 30 mots dont le
concept était plutôt représenté par la modalité visuelle (e.g. GAZON, POMME, LARGE)
et de 30 mots dont le concept était représenté par la modalité auditive (e.g. TOUX,
GEMIR, DRING). Les distracteurs étaient par contre une suite de symboles qui ne
représentaient pas des lettres (£, *, @, #). A chaque essai, les cibles et les distracteurs
comportaient le même nombre de lettres. Ainsi, sur l'ensemble des 60 essais, 12
comportaient des stimuli de 4 lettres, tandis que 48 essais présentaient des stimuli de 5
lettres. L'expérience était composée de deux blocs, chacun composé de 30 essais. Les
participants avaient alors droit à une pause de 30 secondes entre ces deux blocs afin de
se détendre face à cette tâche d'attention soutenue. Les stimuli ont été présentés grâce au
38
6 Les participants passaient obligatoirement les deux expériences présentées dans ce travail afin d'obtenir les rétributions indiquées.
logiciel E-Prime 1.1.4.4 sur un PC avec un processeur Intel(R) Pentium(R) 4 de 2.00
GHz/512 Mo de RAM. Le moniteur était un écran de 12,5 pouces de marque Intel(R)
avec une fréquence d'actualisation réglée à 60 Hz. Tous les stimuli ont été présentés
dans une police "courrier new, 18, gras" en noir sur un fond blanc pendant 53 ms
chacun.
Pour la tâche de décision droite/gauche, les stimuli auditifs et visuels étaient à
chaque fois identiques. Le stimulus auditif représentait un bruit sourd sans signification.
Le stimulus visuel était une croix représentée par le symbole "+" dans la même police
que les stimuli de la partie CA. Chacun de ces stimuli était présenté pendant une période
de 250 ms avec la moitié des apparitions à gauche et l'autre moitié à droite de l'écran
(pour les croix) ou dans les deux haut-parleurs situés le long de chaque côté de l'écran
(pour les bruits). Les participants devaient appuyer le plus rapidement sur la touche "s"
si le stimulus apparaissait à gauche et sur la touche "l" s'il apparaissait à droite. Sur
chacune de ces touches, une gommette de couleur rouge était collée afin de les rendre
plus visibles.
Chaque bloc comportait le même nombre de cibles aux représentations auditives
(N = 15) et visuelles (N = 15). De même, le nombre de décisions auditives et visuelles
droite/gauche a été pondéré de manière à ce que 50% de la modalité sensorielle de
décision soit congruente avec la modalité de représentation de la cible (condition
intramodale: concept auditif - décision auditive [AA] ou concept visuel - décision
visuelle [VV]). Les autres 50 % furent composés pour que la modalité sensorielle de
décision soit incongruente avec la modalité de représentation de la cible (condition
intermodale: concept auditif - décision visuelle [AV] ou concept visuel - décision
auditive [VA]). Les annexes 1 et 2 présentent précisément les concepts, distracteurs et
types de décisions utilisés dans la construction de chaque bloc.
Enfin, les blocs ainsi que les essais étaient présentés dans un ordre aléatoire en
fonction des participants.
39
3. Procédure
Chaque participant a été testé individuellement dans un laboratoire de la Faculté
de Psychologie et des Sciences de l'Education à Louvain-la-Neuve. Lors de leur arrivée,
l'expérimentateur les installait devant un ordinateur à une distance approximative de 40
cm de l'écran. Un slide de présentation apparaissait d'abord à l'écran avec les
instructions de l'expérience. Celui-ci indiquait que chaque essai comportait trois étapes.
Dans la première, deux mots allaient être présentés parmi des suites de symboles dans
une tâche RSVP (rapid serial visual presentation). Ces deux mots devaient être
mémorisés. Ensuite, immédiatement après la fin de la série de symboles et de mots, ils
devaient décider le plus rapidement possible si une croix (à l'écran) ou un son (dans les
haut-parleurs) était apparu à droite (touche "l") ou à gauche (touche "s"). Enfin, un
espace était réservé pour retranscrire au clavier les mots qu'ils avaient perçus.
La figure 3 illustre la construction d'un essai. Chaque essai commençait par une
croix de fixation de 500 ms, suivie d'un blanc de 240 ms. Ensuite, apparaissait le
premier distracteur éventuellement suivi d'un deuxième ou d'un troisième avant
l'apparition de la première cible (C1). Ensuite, trois distracteurs suivaient C1. La
seconde cible (C2) apparaissait 213 ms après l'apparition de C1 et était suivie à chaque
fois de deux distracteurs après C2. La séquence de présentation rapide de stimuli était
ensuite suivie d'un blanc de 500 ms, puis de l'apparition du stimulus décisionnel auquel
le sujet devait répondre le plus rapidement possible. Enfin, un espace était prévu pour
laisser la possibilité au sujet de retranscrire la première cible qu'il avait vue puis la
deuxième. L'ensemble de l'essai se clôturait par un blanc de 1500 ms avant de
commencer l'essai suivant.
Les instructions étant lues et comprises, les participants disposaient d'une série
de 10 essais pour s'entraîner à la tâche. L'expérimentateur était présent à côté d'eux afin
de vérifier si les instructions avaient été correctement assimilées. L'entraînement
terminé, les participants commençaient le premier bloc de 30 essais en appuyant sur la
touche "espace". Après une pause de 30 secondes, à la fin du premier bloc, les
participants lançaient le second bloc de 30 essais en appuyant sur la touche "espace".
40
4. Résultats
Les analyses statistiques ont été exécutées à l'aide du programme informatique
SPSS 16.0.
De manière générale, 72.4% des C1 ont été rappelés contre 24.01% pour les C2.
Ces résultats vont dans le sens de ceux de Potter et al. (2002) qui avaient aussi obtenus
un meilleur taux de rappel de C1 que de C2, t(49) = 19.43, p < .001. Les TR moyens à
la tâche de décision sont de 665.56 ms. Enfin, 99.52% des stimuli à la tâche de décision
ont été correctement localisés.
Une analyse de la variance avec mesures répétées (MANOVA) a été exécutée
dans un design 2 (modalité de représentation du concept: auditive vs. visuelle) x 2
(modalité sensorielle de la décision: auditive vs. visuelle) et avec un α = .05. Les mots
C1
C2
250 ms
53 ms
500 ms
Tapez le deuxième mot Tapez le premier
mot
+
&5§£2
%56&§
phare
@§#2£
%1@6§
78%*$
régal
@§#2£
$&@§5
£*4#3
+
53 ms
53 ms53 ms
53 ms
53 ms53 ms
53 ms
53 ms53 ms
53 ms
240 ms
Figure 3: exemple d'un essai de CA dans l'expérience 1
41
non-rappelés ou mal orthographiés ont été considérés comme des erreurs (Vermeulen et
al., in press). La figure 4 permet de mieux visualiser les résultats concernant les taux de
rappels de C1 et de C2 en fonction de la tâche de décision.
0
25
50
75
100
C2 Auditif C2 Visuel
A. Taux de rappel de C1
Décision auditiveDécision visuelle
0
25
50
75
100
C2 Auditif C2 Visuel
B. Taux de rappel de C2
Décision auditiveDécision visuelle
En ce qui concerne la qualité du rappel de C1 (fig. 4A), les résultats montrent un
effet principal de la modalité de C2, F(1,49) = 9.07, p < .01, η2 = .15, avec un meilleur
rappel lorsque C2 est auditif (M = .74, SE = .02) que lorsqu'il est visuel (M = .70, SE = .
02). De même, les résultats indiquent que le lien qu'entretiennent la modalité de C2 et
celle de la décision a un impact significatif sur le rappel de C1, F(1,49) = 1.08, p < .01,
η2 = .18 (voir tableau 1 pour un résumé des données). Lorsque C2 est auditif, C1
présente un meilleur taux de rappel, t(49) = 3.45, p < .01, en condition intramodale
(AA) qu'en condition crossmodale (AV). Par contre, lorsque C2 est visuel, C1 ne
présente pas de meilleur taux de rappel, t(49) = 1.18, ns, que ce soit en condition d'intra
ou de crossmodalité.
Figure 4: pourcentage de rappel des cibles (C1 - fig. 4A - et C2 - fig. 4B) en fonction des conditions intra (AA et VV) et corssmodales (AV et VA)
42
En ce qui concerne le taux de rappel de C2 (voir figure 4B pour une illustration),
les résultats indiquent un effet principal de la modalité de représentation de C2, F(1, 49)
= .09, p < .01, η2 = .55. C2 est mieux rapporté si son concept est représenté en modalité
visuelle (M = .31; SE = .03) que s'il est représenté en modalité auditive (M = .16; SE = .
02). De plus, en accord avec nos hypothèses, les résultats indiquent un effet principal de
l'interaction entre la modalité de représentation de C2 et la modalité sensorielle de la
décision, F(1, 49) = 7.35, p < .01, η2 = .13. Comme nous l'avions prédit, les C2 visuels
semblent être mieux rapportés, t(49) = -3.05, p < .01, en condition crossmodale (VA)
qu'en condition intramodale (VV) (voir tableau 1 pour les moyennes, écarts-types et
erreurs standards selon la condition). Par contre, il ne semble pas y avoir eu d'effet
significatif, t(49) < 1, ns, de la cross ou de l'intramodalité pour les C2 auditifs.
Tableau1:moyennes, écarts-types et erreurs standards du tauxderappeldes ciblesC1etC2enfonctiondesconditionsintra(AAetVV)etcrossmodales(AVetVA).(N=50).
Taux de rappel C1Taux de rappel C1 Taux de rappel C2Taux de rappel C2
Décision auditive
Décision visuelle
Décision auditive
Décision visuelle
C2 Auditif Moyenne aC2 Auditif
Ecart-type b
C2 Auditif
Erreur st. b
C2
Visuel Moyenne a
C2
Visuel
Ecart-type b
C2
Visuel
Erreur st. b
77.33 71.6 16.4 17.47
14.12 16.54 19.98 20.06
1.74 2.33 2.82 2.83
69.07 71.6 34 28.15
18.74 17.75 30.95 24.01
2.65 2.51 4.37 3.39
Notea Les moyennes sont indiquées en pourcentageb Les résultats aux écarts-types et aux erreurs standards sont à échelle des pourcentages de la moyenne.
43
De plus, il apparaît que seule la modalité de la décision a un impact significatif
sur les TR à la tâche décisionnelle7, F(1, 48) = 8.50, p < .01, η2 = .15. Cela signifie que,
si la décision est visuelle, les sujets répondent plus rapidement (M = 623.32,
SE = 32.92) que si la décision est auditive (M = 694.33; SE = 36.12).
Enfin, il semble que ni la modalité de représentation de C2, ni la modalité
sensorielle de la décision, ni même leur interaction n'ait eu d'impact significatif sur la
qualité des réponses décisionnelles, F(1, 48) < 1, ns.
5. Discussion
Jusqu'à présent, de nombreuses études (Arnell et al., 1999, 2002, 2004; Soto-
Faraco et al., 2002) inspirées par le modèle en deux étapes de Chun et al. (1995) avaient
tenté de découvrir si le goulot d'étranglement (la phase d'encodage en MdT) était
amodal ou modal. Pour tester sa structure, ils ont créé différentes formes de CA.
Toutefois, toutes ces études ont présenté les cibles et les distracteurs dans des modalités
d'entrées différentes. Cela signifie que les stimuli étaient présentés en modalité soit
visuelle, soit auditive, soit tactile.
Bien que l'objectif de la présente expérience n'ait pas été de vérifier l'existence
ou non d'un goulot d'étranglement (qu'il soit amodal ou non), la construction de chaque
essai de CA permettait de tester la représentation sensorielle des cibles (auditive ou
visuelle) même si elles étaient toutes présentées dans une modalité d'entrée visuelle.
Chaque essai de la procédure commençait par une tâche classique de CA où les cibles
étaient espacées de 213 ms, ce qui signifie que les C2 avaient moins de chance d'être
rapportés ultérieurement. Selon le modèle SSP de Barsalou (1999), les concepts sont
représentés dans les mêmes systèmes qui traitent les informations sensori-motrices.
L'idée de la présente expérience était donc de présenter des C2 qui correspondaient à
des concepts représentés soit en modalité visuelle, soit en modalité auditive, tandis que
les C1 étaient représentés dans d'autres modalités (affectives, gustatives, ...). Puisque
des études avaient montré que même si C2 n'était pas toujours rapporté, il faisait
44
7 L'intérêt principal de cette étude étant de démontrer que même si C2 n'a pas été rappelé, il peut influencer les réponses décisionnelles, nous avons supprimé tous les TR à la décision et les réponses où C2 avait été rappelé.
néanmoins toujours l'objet d'un traitement sémantique (Potter et al., 2002, 2005; Vogel
et al., 1998). Cela signifie qu'il était donc possible de tester la théorie de Barsalou
(1999) en obligeant les sujets à effectuer une autre tâche qui interférait avec le
traitement conceptuel des C2. Ainsi, dans la condition intramodale (AA et VV), une
tâche de décision visuelle (ou auditive) droite/gauche allait normalement interférer avec
le traitement conceptuel des mots représentés par la modalité visuelle (ou auditive). A
l'inverse, dans la condition crossmodale (AV et VA), une tâche de décision visuelle (ou
auditive) droite/gauche n'allait normalement pas interférer avec les concepts représentés
par la modalité auditive (ou visuelle).
5.1. L'effet général de la modalité conceptuelle
Les résultats sont plutôt en accord avec le modèle de Barsalou (1999) puisque
les C2 ne font pas tous l'objet d'un même taux de rappel en fonction de leur modalité
conceptuelle. Les concepts visuels sont plus souvent rapportés que les concepts auditifs.
Bien que cette observation n'ait pas été prévue a priori, il est possible que les individus
aient un répertoire plus réduit de concepts représentés par la modalité auditive. En effet,
le modèle SSP explique que plus les individus rencontrent et utilisent un même concept
dans des contextes différents, plus ce concept fera l'objet d'une meilleure simulation et
catégorisation. Il est dès lors probable que l'être humain se repose davantage sur les
éléments visuels des stimuli et expériences qu'il rencontre et qu'il ait donc une
représentation plus développée des concepts visuels. Dès lors, les concepts auditifs
pourraient faire l'objet d'une simulation moins performante et risqueraient plus vite
l'extinction, les empêchant ainsi d'accéder à la conscience.
Une explication alternative de ce phénomène serait que les concepts représentés
par la modalité auditive sont moins souvent rapportés à cause d'un changement de
modalité dû à la tâche de CA elle-même. Autrement dit, puisque les sujets
accomplissent la tâche de CA devant des stimuli visuels, le passage de l'activation du
système visuel (pour l'ensemble des stimuli) vers le système auditif (pour les C2
auditifs) occasionnerait un coût lors du changement de la modalité perceptuelle vers une
45
autre modalité, conceptuelle cette fois. Bien que le paradigme expérimental fût
différent, c'est ce qu'ont découvert van Dantzig et al. (2008).
5.2. Interférence intramodale sur le rappel de C2
Conformément à nos hypothèses basées sur le modèle SSP, les C2 représentés
par la modalité visuelle souffrent plus de l'interférence intramodale (VV) que
crossmodale (VA). Encore une fois, si ces concepts n'étaient que des représentations
abstraites, la modalité sensorielle de décision n'aurait pas dû influencer le taux de rappel
de ces mots. Dès lors, il s'agit d'un argument fort en faveur d'une représentation modale
des concepts.
Toutefois, même s'il n'apparaît aucun effet de l'intra ou de la crossmodalité pour
les C2 représentés par la modalité auditive, il est malgré tout probable qu'il y ait eu un
effet d'interférence. En effet, si les concepts auditifs ont une simulation moins
performante (et donc une probabilité de taux de rappel réduite) ou qu'ils souffrent d'un
coût de changement de modalité dû au caractère visuel inhérent à la tâche de CA8,
l'impact de l'interférence sensorielle risque d'être moins flagrante. D'ailleurs, en
observant la figure 4, bien que l'effet soit subtil, les concepts auditifs semblent présenter
un profil inverse aux concepts visuels en termes de condition intra versus crossmodale9.
Il serait donc peut-être judicieux, dans une expérience future, d'améliorer
artificiellement l'accès conceptuel des mots auditifs puis d'introduire ensuite à nouveau
une tâche interférente auditive. Nous proposons donc de mélanger l'expérience de
Vermeulen et al. (in press) qui facilitait d'abord l'accès conceptuel des C2 auditifs via
une amorce perceptuelle auditive, puis d'observer les effets d'une interférence auditive,
comme dans la présente expérience. L'accès conceptuel des C2 ayant donc été amélioré,
il sera peut-être plus facile d'observer une différence significative entre la condition
intra (AA) versus crossmodale (AV), telle que les définissait cette première expérience.
46
8 Voir hypothèses du point 5.1 de cette section
9 Nous sommes néanmoins conscient que ce type d'interprétations doit être pris avec précautions puisque, statistiquement, il n'existe pas de différence significative entre la condition AA et la condition AV. Toutefois, nous proposons malgré tout, l'existence d'un impact, argument statistique à l'appui dans le point 5.3.2. de cette section.
5.3. L'impact des conditions sur le rappel de C1
5.3.1. Des arguments en faveur du modèle de Chun et al. (1995) ?
L'analyse de la variance et les comparaisons de moyennes nous indiquent aussi
des résultats qui n'avaient pas été prédits concernant le taux de rapport de C1. Il a été
observé que le taux de rappel de C1 présente le profil inverse de ce qui a été développé
précédemment pour C2 (voir figure 4). En effet, C1 est plus souvent rappelé lorsque C2
était un concept auditif que quand il était un concept visuel. De plus, ce sont ces mêmes
C1 qui obtiennent de meilleurs résultats en condition intramodale (AA) qu'en condition
crossmodale (AV).
Alors que nous expliquions l'effet principal de la modalité de C2 pour son taux
de rappel tantôt par une moins bonne simulation des concepts auditifs, tantôt par un coût
de changement de modalité conceptuelle, il serait plus difficile d'utiliser ces arguments
pour le taux de rappel de C1. En effet, la modalité de représentation conceptuelle de C1
n'a pas été contrôlée puisqu'il s'agissait de concepts représentés par différentes
modalités (gustatives et olfactives) et de concepts abstraits présentés aléatoirement. Il
serait donc improbable que le taux de rappel de C1 diffère seulement à cause de sa
modalité de représentation. Nous interpréterions donc plutôt ce profil du taux de rappel
de C1 à l'aide du modèle de Potter et al. (1995). Selon celui-ci, les cibles sont
représentées dans la MCTC (premier stade) où elles rivalisent pour les ressources
disponibles afin d'être encodées ultérieurement en MdT. Nous avons proposé
précédemment que dans le cas où C2 est représenté par la modalité auditive, il était
possible qu'il soit moins bien représenté qu'un concept visuel ou encore, qu'il souffre
d'un coût de changement de modalité (la perception était visuelle mais la représentation
conceptuelle était auditive). Cela aurait pour conséquence que l'activation d'un C2
auditif serait moins puissante et rivaliserait moins avec C1 qui pourrait entrer plus
facilement dans la phase de consolidation en MdT.
De même, si le modèle de Chun et al. (1995) reflète de façon fidèle les
mécanismes en jeu d'après ces résultats, il serait possible d'apporter un nouvel argument
en faveur d'un goulot d'étranglement amodal. Certains auteurs ont suggéré que les
goulots d'étranglement étaient intramodaux (e.g. Potter et al., 1998; Soto-Faraco et al.,
2002) mais la majorité des études argumente en faveur d'un goulot d'étranglement
47
amodal (Arnell et al., 2002, 2004; Ptito et al., 2008). Or la théorie de la cognition
incarnée postule que la simulation des concepts fonctionne tel un phénomène "comme
si". Il serait donc normal de supposer que les concepts représentés par la modalité
auditive auraient été interprétés par le système cognitif comme réellement présentés en
modalité auditive. Cela signifie que s'il existe un goulot d'étranglement par modalité, un
C1 représenté par la modalité visuelle et un C2 représenté par la modalité auditive (ou
inversement) ne rivaliseront pas pour entrer en MdT. Pourtant, nos résultats tendent à
indiquer le contraire. Quelle que soit la modalité de représentation de C1 (gustative,
olfactive ou représenté par des concepts plus abstraits), celui-ci est mieux perçu lorsque
le C2 représenté par la modalité auditive est moins bien perçu. Cette interprétation, bien
qu'à prendre avec des précautions, propose donc l'existence d'un goulot d'étranglement
amodal.
L'ensemble de ces résultats serait difficilement explicable par le modèle
d'Olivers et al. (2008) qui ne prédit pas de compétition des ressources entre C1 et C2.
Leur modèle ne prédit pas une baisse ou une augmentation du rappel de C1 en fonction
de C2. C'est le distracteur post-C1 qui réduit la probabilité de C2 d'entrer en MdT. Ce
qui semble être une compétition dans notre étude ne pourrait même pas s'expliquer par
une limite de la MdT puisqu'elle est capable de maintenir jusqu'à 7 items, en fonction de
la stratégie utilisée par les participants (Olivers et al., 2008). Les résultats au taux de
rappel de C1 permettent donc, a posteriori, d'argumenter en faveur du modèle de Chun
et al. (1995). Toutefois, la taille de l'effet de la modalité de C2 sur le rappel de C1 est
faible (.15). Cela signifie que le taux de rappel de C1 n'est pas tellement causé par un
goulot d'étranglement amodal.
5.3.2. Un argument pour l'effet intramodal des C2 auditifs ?
Le point précédent (5.3.1.) expliquait qu'il n'y avait pas eu de différence
significative, pour les C2 auditifs, selon la condition (AA versus AV). Or, les résultats
indiquent que C1 est mieux rappelé lorsque C2 était en condition intramodale (AA)
qu'en condition crossmodale (AV). S'il y a effectivement eu une compétition pour les
ressources attentionnelles entre C1 et C2, cela signifierait que les C2 auditifs ont malgré
tout souffert de la condition intramodale (AA). En effet, notre hypothèse est basée sur le
fait qu'en condition intramodale, les sujets sont moins capables de rapporter C2. Cela
48
signifie que si C2 souffre d'une interférence intramodale, il rivalisera encore moins avec
C1 qui verra sont taux de rappel augmenté. Il existe néanmoins une limite majeure à
cette explication. L'interférence appliquée à C2 est supposée se dérouler après que C1
ou C2 ait eu l'occasion d'entrer en phase d'encodage. Pour être sûr que notre explication
soit valide, il aurait fallu une tâche qui interfère avec la modalité de C2 dès le début de
l'essai de CA. Ainsi, il aurait été possible de démontrer clairement l'interférence
intramodale (AA) dès l'accès conceptuel de C2. Cela aurait aussi permis de vérifier avec
plus de certitude le partage des ressources attentionnelles entre C1 et C2 comme le
proposent Chun et al. (1995).
Puisque l'interférence de la décision n'a pu se dérouler que pendant la période
d'encodage ou de stockage en MdT, le modèle d'Olivers et al. (2008) pourrait peut-être
aussi expliquer ces résultats. Pour rappel, C1 est mieux rappelé en condition
intramodale (AA) qu'en condition crossmodale (AV) pour les concepts auditifs. Il serait
envisageable d'expliquer la différence de rappel de C1 grâce à l'interférence de la
décision qui s'est déroulée pendant que les deux cibles étaient représentées en MdT. En
d'autres termes, si nous nous référons au modèle d'Olivers et al. (2008), lorsque les C2
auditifs parvenaient à accéder en MdT, l'interférence auditive aurait détourné les
systèmes auditifs pour le traitement de cette nouvelle tâche, causant ainsi un oubli des
concepts auditifs. Il serait donc probable qu'il soit légèrement plus facile au système
cognitif de ne maintenir la représentation que d'une seule cible (C1) en MdT, d'où la
faible taille de l'effet observé (.18), avec un meilleur rappel des C1 lorsque C2 était
auditif que lorsqu'il était visuel. Mais cette interprétation reste à prendre avec
précautions, la MdT étant potentiellement capable de maintenir environ 7 items en
même temps.
Finalement, la question de l'impact de la condition intra (AA) ou crossmodale
(AV) sur le taux de rappel de C2 reste ambiguë. D'un côté, il est possible que le taux de
rappel de C1 indique un partage des ressources variant en fonction de la modalité
conceptuelle de C2, ce qui permettrait d'affirmer que les concepts auditifs sont simulés
grâce au système auditif (et donc, une véritable interférence intramodale est
envisageable). D'un autre côté, il est aussi possible que cette interférence n'intervienne
qu'en MdT.
49
5.4. Effet de la modalité de la décision sur les TR
Enfin, l'analyse des résultats indique aussi que les sujets ont tendance à répondre
plus lentement à la tâche décisionnelle lorsque celle-ci est présentée en modalité
auditive. Alors que nous nous attendions à ce que les TR aux décisions soient plus lents
en condition intra qu'en condition crossmodale, les résultats semblent plutôt indiquer
l'effet d'un coût de changement de modalité d'entrée. Cela signifie que, puisque les
sujets accomplissent une tâche visuelle (le CA), le fait de devoir répondre
successivement à une tâche auditive (la décision) va occasionner un coût de
déplacement qui va se répercuter sur les TR. C'est ce qu'avaient démontré Spence et al.
(2001).
50
IV. EXPERIENCE 2
Dans cette expérience, l'objectif principal est de découvrir si une activation
physiologique préalable augmente la probabilité de rappeler des C2 émotionnels dont la
représentation conceptuelle est congruente avec le niveau d'activation préalable.
1. Participants et design
55 participants de langue maternelle française (23 garçons et 32 filles, moyenne
d'âge = 22.29, SE = 2,85) ont participé à l'étude. Il s'agissait des mêmes participants que
pour la première expérience (les 5 nouveaux participants de cette étude avaient été
supprimés des données de la première expérience pour cause de problèmes techniques).
Les sujets ont exécuté la nouvelle expérience immédiatement après avoir terminé la
première. L'étude était construite selon un design intrasujets de type 3 (condition
d'activation physiologique: base vs. relaxation vs. vélo) x 3 (niveau d'arousal conceptuel
de C2: neutre vs. calmant vs. stimulant).
2. Matériel et stimuli
Le matériel informatique fourni était identique à celui de la première expérience.
La procédure de CA était, elle aussi, la même que lors de la première expérience sauf
que la tâche de décision rapide gauche/droite de stimuli visuels ou auditifs a été
supprimée. La procédure générale apparaissait donc simplifiée (voir la figure 5, dans la
section "procédure", pour une illustration d'un essai). La première cible était toujours un
mot dont la représentation conceptuelle était potentiellement neutre en ce qui concerne
l'activation physiologique. En d'autres termes, les mots présentés en C1 (e.g. PLAT,
GANT, HEURE) n'étaient ni relaxants, ni activants. Par contre, les mots présentés en C2
avaient une représentation conceptuelle d'un niveau d'activation physiologique soit
neutre ("concept neutre"), soit calmant (e.g. RELAX, VIDE, PLAGE "concept
calmant"), soit stimulant (e.g. HAINE, GUERRE, PASSION "concept stimulant"). Les
51
annexes 3 à 5 présentent précisément les cibles et distracteurs utilisés à l'intérieur de
chaque bloc.
Le niveau d'activation physiologique de ces mots a fait l'objet d'un prétest par 20
sujets (10 filles et 10 garçons; moyenne d'âge = 23.85, SD = 7,92) qui ont dû évaluer,
selon leur propre perception, si le niveau d'activation des mots présentés était soit
calmant, soit stimulant. Pour cela, 201 items furent évalués sur une échelle de Likert à 7
points où la valeur extrême "1" s'appliquait pour les concepts émotionnels les plus
apaisants, relaxants ou calmants et où les concepts émotionnels les plus activants,
stimulants, excitants obtenaient la valeur de "7". Au final, 36 items furent classés dans
la catégorie des "concepts calmants" (activation physiologique évaluée entre 1.3 et 3.5,
M = 2.53, SD = .64) et 36 autres items furent catégorisés comme des "concepts
stimulants" (activation physiologique évaluée entre 5.2 et 6.4, M = 5.84, SD = .35). De
même, une évaluation de la fréquence d'utilisation subjective de chacun de ces mots a
été analysée sur une échelle de Likert à 10 points (parmi les items émotionnels retenus:
M = 5.98, SD = 1.64). La longueur des mots émotionnels variait de 3 lettres à 7 lettres
(3 lettres, N = 5; 4 lettres, N = 16; 5 lettres, N = 28; 6 lettres, N = 34; 7 lettres, N = 25).
Chaque bloc était pondéré de manière à avoir un nombre de lettres équivalent en
fonction du niveau d'activation et des autres blocs. Enfin, les distracteurs étaient de
nouveau représentés par des suites de symboles (voir expérience 1).
L'expérience était divisée en 3 blocs, chacun étant soumis à une condition
expérimentale. Le premier bloc correspondait à la condition de base où les sujets
accomplissaient directement la tâche de CA. Pour la condition d'induction d'un état de
relaxation, les participants s'installaient dans un fauteuil confortable et écoutaient, via
un casque audio, une piste de relaxation par imagerie mentale pendant 5 minutes 50
secondes. Ils reprenaient ensuite la tâche de CA. Enfin, pour la condition d'activation
physiologique, l'expérimentateur invitait les sujets à rouler sur un vélo d'appartement
pendant 5 minutes 50 secondes. Le vélo (de marque Pro-Form; modèle 748 EKG)
permettait de mesurer la fréquence du rythme cardiaque. Les participants devaient
pédaler de manière à garder un rythme avoisinant les 110 pulsations par minute. Ils
exécutaient ensuite le dernier bloc de CA.
Chaque bloc était composé d'une série de 36 essais où 1/3 des C2 correspondait
à un concept neutre, 1/3 à un concept stimulant et 1/3 à un concept calmant. Les blocs
52
ainsi que les essais qui les composaient étaient présentés dans un ordre aléatoire selon
les participants.
3. Procédure
Après avoir terminé la première expérience, l'expérimentateur lançait le premier
bloc de CA pour la seconde expérience (condition de base). Dans cette expérience, les
sujets devaient uniquement rapporter les deux mots qu'ils avaient perçus parmi les
symboles distracteurs (voir figure 5 pour une illustration d'un essai de CA). Après les 36
essais de ce bloc, les participants allaient s'installer dans un "fauteuil relax" pour y
écouter un extrait audio de relaxation pendant près de 6 minutes (condition de
relaxation). Ensuite, les sujets reprenaient directement la tâche de CA. A la fin du
second bloc, les participants entamaient la "condition vélo" en allant pédaler sur un vélo
d'appartement en gardant un rythme cardiaque aux alentours de 110 pulsations par
minute pendant près de 6 minutes. Cet exercice terminé, ils entamaient directement le
dernier bloc de CA.
Au terme de ces exercices, les sujets ont rempli la version française de la
TAS-20 afin d'évaluer leur niveau d'alexithymie, le questionnaire PANAS pour évaluer
leurs affects positifs ou négatifs ainsi que le questionnaire IRI pour mesurer leur niveau
d'empathie.
Enfin, dès que l'expérience était terminée, les sujets recevaient un débriefing
leur expliquant quels étaient les objectifs des deux expériences auxquelles ils avaient
participé. De même, l'expérimentateur leur assurait l'anonymat aussi bien pour les
données recueillies aux tâches de CA que pour les résultats obtenus aux questionnaires.
53
4. Résultats
Tout comme l'expérience 1, les données aberrantes ont d'abord été retirées avant
de commencer les analyses descriptives et les analyses de la variance à mesures répétées
(MANOVA).
Les résultats10 indiquent que 85.89% des C1 ont été rappelés contre 38.69%
pour les C2, toutes catégories de mots confondues. Ces résultats sont congruents avec
ceux de Potter et al. (2002), t(54) = 13.92, p < .001.
Les MANOVA ont été appliquées selon un design 3 (conditions: base vs.
relaxation vs. vélo) x 3 (niveau d'activation physiologique conceptuel de C2: neutre vs.
calmant vs. stimulant) et avec un niveau α = .05.
C1
C2
500 ms
Tapez le deuxième mot
Tapez le premier mot
§#£1&#@
78%*$+
panique
52%*$%%
9@&2#@?
&5§£25=
ampoule
&$6§%4+
52%*$%%
§#£1&#@
+
53 ms
53 ms53 ms
53 ms
53 ms53 ms
53 ms53 ms
53 ms
53 ms240 ms
Figure 5: exemple d'un essai à la tâche de CA dans l'expérience 2.
54
10 Afin d'observer l'impact des manipulations à travers les conditions, nous avons décidé de supprimer tous les C2 où C1 n'a pas été rappelé puisque ces essais ne correspondent pas à un effet classique de CA.
4.1. Taux de rappel de C1
Ni la condition, F(2, 49) < 1, ns, ni le niveau d'activation physiologique des
concepts, F(2, 49) < 1, ns, ni l'interaction entre les deux, F(2, 49) < 1, ns, n'ont d'impact
significatif sur la qualité du rappel de C1.
4.2. Taux de rappel de C2
De nombreux résultats apparaissent en ce qui concerne la qualité du rappel de
C2 (voir figure 6 pour une illustration des résultats). Il existe un effet principal de la
condition, F(2, 53) = 9.85, p < .01, η2 = .27, où les sujets rappellent davantage C2 en
condition vélo (M = .43; SE = .04), qu'en condition de base (M = .36; SE = .04) et qu'en
condition relaxation (M = .35; SE = .03). Toutes catégories de concepts confondues, la
différence entre la condition de base (M = .36; SD = .31) et la condition vélo (M = .
43; SD = .31) est significative, t(54) = -3.75, p < .01. Il en est de même pour la
différence entre la condition relaxation (M = .35; SD = .28) et la condition vélo (M = .
43; SD = .31), t(54) = -4.19, p < .01. Toutefois, il semble qu'il n'y ait pas de différence
significative entre la condition de base et la condition relaxation, t(54) < 1, ns. De plus,
toutes conditions confondues, il apparaît que les concepts stimulants (M = .39, SD = .
30) ne font pas l'objet d'un meilleur taux de rappel que les concepts calmants (M = .38,
SD = .29; t(54) = 1.3, p < 1, ns) et que les concepts neutres (M = .38, SD = .29; t(54) = .
36, p < 1, ns ).
En outre, les analyses présentent un effet significatif du lien qu'entretiennent la
condition et l'activation physiologique conceptuelle de C2, F(4, 51) = 2.90, p < .05,
η2 = .18. En ce qui concerne les différences de rappels de C2 à l'intérieur des conditions
(voir la figure 6 pour une illustration et le tableau 2 pour les moyennes, écart-types et
erreurs standards), seule la condition de relaxation observe un effet significatif des
concepts stimulants. Ceux-ci sont mieux rapportés, que les concepts neutres, t(54) =
2.07, p < .05, et que les concepts calmants, t(54) = 2.32, p < .05. Par contre, l'évolution
de la représentation des concepts entre les conditions présente plus d'impacts
significatifs. En ce qui concerne les concepts stimulants, conformément à notre
55
hypothèse, ils sont plus souvent rapportés, t(54) = -3.10, p < .01, en condition vélo qu'en
condition de base. De même, les concepts stimulants sont mieux rappelés, t(54) = -2.36,
p < .05, en condition vélo qu'en condition de relaxation. En ce qui concerne les concepts
calmants, contrairement à nos prédictions, les participants obtiennent de meilleurs
résultats, t(54) = -2.52, p < .05, en condition vélo qu'en condition de relaxation. Enfin,
les concepts neutres obtiennent, eux aussi, un meilleur taux de rappel, t(54) = -3.51, p
< .01, en condition vélo qu'en condition de base. Les concepts neutres sont aussi mieux
rappelés, t(54) = -4.67, p < .01, en condition vélo qu'en condition relaxation.
Tableau 2: moyennes, écarts-types et erreurs standards du taux de rappel des C2 (neutres, calmants et stimulants) en fonction des conditions (base, relaxation et vélo). (N = 55).
ConceptsConceptsConceptsConceptsConceptsConceptsConceptsConceptsConcepts
NeutreNeutreNeutre CalmantCalmantCalmant StimulantStimulantStimulant
Condition Ma SDb SEb Ma SDb SEb Ma SDb SEb
Base 36.1 32.6 4.39 38.3 33 4.45 35.8 33.09 4.46
Relax 33.5 29 3.91 34.3 31.15 4.2 38.8 33 4.23
Vélo 45.3 33.07 4.46 41.7 32.94 4.44 44.4 32.53 4.38a Les moyennes sont indiquées en pourcentageb Les résultats aux écarts-types et aux erreurs standards sont à échelle des pourcentages de la moyenne.
56
En résumé, cela signifie qu'à travers les conditions, les concepts auraient
toujours un meilleur taux de rappel en condition vélo qu'en condition de base et de
relaxation. Les concepts stimulants ont par contre un taux de rappel similaire dans les
conditions de base et de relaxation. De même, contrairement à nos hypothèses, les
concepts calmants sont moins bien perçus en condition de relaxation (bien que le taux
de rappel de la condition de base ne soit pas significativement différent des deux autres
conditions). Enfin, les concepts neutres ont un taux de rappel similaire en condition de
base et en condition de relaxation.
4.3. Corrélations aux questionnaires
Au-delà des résultats propres à la tâche de CA, les questionnaires présentent
aussi de multiples corrélations significatives avec ceux-ci. En effet, ce sont les scores
aux affects positifs du questionnaire PANAS qui obtiennent le plus de corrélations
significatives (voir tableau 3 pour un aperçu des corrélations de Pearson et leur taux de
significativité). Tout en restant conscient que les corrélations n'ont aucune prétention
d'expliquer un phénomène de cause à effet, il apparaît toutefois que lorsque les sujets
32,50
36,13
39,75
43,38
47,00
Conditions Base Relaxation Vélo
NeutresCalmantsStimulants
Taux de rappel de C2
Figure 6: taux de rappel des C2 (neutres, calmants et stimulants) en fonction des trois conditions (base, relaxation et vélo).
57
présentent des affects hautement positifs, leur taux de rappel de C2 est tout aussi élevé.
Cela s'observe premièrement, en condition de base, pour les concepts stimulants, pour
les concepts calmants et pour les concepts neutres. Deuxièmement, le même effet est
observé en condition relaxation pour les concepts stimulants. Enfin, troisièmement, la
même observation s'applique encore en condition vélo pour les concepts stimulants,
pour les concepts calmants et pour les concepts neutres.
A l'inverse, lorsque les participants ont obtenu un score élevé aux affects
négatifs, nous remarquons un plus faible taux de rappel de C2. Cela s'observe,
premièrement, en condition de base, pour les concepts calmants et les concepts neutres.
Cela s'observe également en condition vélo pour les concepts stimulants.
Tableau 3: corrélations entre les résultats aux sous-échelles de la PANAS et le taux de rappel des concepts (neutres, calmants et stimulants) selon la condition (de base, de relaxation et vélo)
Sous-échelles PA NA
Stimulant .32* -.24
Calmant .36** -.33*
Neutre .37** -.30*
Stimulant .34* -.22
Calmant .19 -.12
Neutre .22 -.16
Stimulant .40** -.27*
Calmant .37** -.22
Neutre .30* -.21
Base
Relaxation
Vélo
* p < .05; ** p < .01
58
Enfin, nos prédictions n'ont pu être constatées pour l'influence potentielle du
niveau d'alexithymie et d'empathie sur le taux de rappel de C2. Pourtant, pour le taux de
rappel des concepts calmants, le score total à la TAS-20 a obtenu une corrélation
positive, r(55) = .44, p < .01, entre la condition de base et la condition de relaxation. De
même, le score total à la TAS-20 présente aussi une corrélation négative entre la
condition de relaxation et la condition vélo, r(55) = -.31, p = .02. Mais il ne serait pas
pertinent d'utiliser ces derniers résultats comme argument dans le cadre de nos
hypothèses puisqu'il a été décrit précédemment que les mots calmants avaient obtenu un
résultat non significatif pour le taux de rappel entre les conditions de base et de
relaxation.
5. Discussion
L'objectif de cette expérience était de démontrer, à l'instar de l'expérience de
Vermeulen et al. (in press), qu'une activation perceptuelle préalable (l'amorce) allait
augmenter le taux de rappel de C2 si sa représentation conceptuelle correspondait avec
les caractéristiques sensorielles de l'amorce. Dans le cas présent, nous nous attendions à
ce que les participants rappellent plus de C2 stimulants lors de la condition vélo et plus
de C2 calmants lors de la condition de relaxation. Or les résultats ne vont pas vraiment
dans ce sens. A travers les analyses, l'observation principale indique que c'est la
condition vélo qui permet de voir le maximum de mots (quel que soit leur niveau
d'arousal conceptuel). La figure 6 illustre cette observation ainsi que l'ensemble des
descriptions suivantes.
En ce qui concerne le taux de rappel de C2 à l'intérieur de chaque condition,
contrairement à nos hypothèses, la condition de relaxation ne permet pas de rappeler
plus de mots calmants (au contraire, ce sont les mots stimulants qui sont le mieux
perçus dans cette condition). De même, la condition vélo ne permet pas aux sujets de
rapporter plus de mots stimulants que de mots calmants ou neutres. En ce qui concerne
l'évolution des cibles à travers les conditions, il apparaît que les concepts stimulants
sont mieux vus en condition de vélo qu'en condition de relaxation ou neutre. Bien que
ce résultat corresponde à nos hypothèses, le fait que les concepts neutres et calmants
soient aussi mieux rappelés quand ils sont dans la condition vélo ne va pas dans le sens
59
de nos hypothèses. Pire encore, les concepts calmants sont moins vus quand ils sont
dans la condition de relaxation (bien que leur taux de rappel en condition de base ne
diffère ni de la condition de relaxation, ni de la condition vélo).
Alors que nous nous attendions à un meilleur taux de rappel de la seconde cible
lorsque le niveau d'activation physiologique préalable était congruent avec le niveau
d'arousal conceptuel de C2, les résultats ne corroborent pas cette prédiction. Au
contraire, seule une haute activation préalable augmente le rappel de tous les C2. Il n'a
donc pas été possible de vérifier le modèle de la cognition incarnée pour les concepts
émotionnels, à travers cette expérience. Elle présente néanmoins l'intérêt de la
découverte d'un nouvel effet facilitateur dans le paradigme du CA. Des études
précédentes ont aussi relevé plusieurs effets facilitateurs. Par exemple, C2 est mieux
rappelé lorsqu'il est sémantiquement relié à C1 (Potter et al., 2005). Il l'est également
quand il est présenté en même temps qu'un stimulus auditif (Olivers & Van der Burg,
2008). Olivers et al. (2006) ont montré que ce phénomène se présente encore quand les
instructions sont légèrement modifiées, quand les sujets ne prêtent pas tellement
attention à la tâche de CA ou encore lorsque les participants exécutent la tâche avec des
affects positifs. De même, Vermeulen et al. (in press) ont montré un meilleur rappel de
C2 quand l'essai était précédé d'un stimulus perceptuel de la même modalité sensorielle
que la représentation sensorielle de C2. Dès lors, en plus de toutes ces études, notre
expérience a aussi permis de démontrer, malgré elle, un meilleur taux de rappel de C2
lorsque le niveau d'activation physiologique des sujets était relativement élevé (environ
110 pulsations par minute avant de commencer la série).
De nombreuses causes sont envisageables pour expliquer ce phénomène. La
première serait que les participants ont généré un plus grand taux de décharge de
dopamine liée à l'activité physique de la condition vélo. Les études s'accordent
effectivement sur le lien qu'entretiennent l'activité physique et la libération de dopamine
(Boecker, Henriksen, Sprenger, Miederer, Willoch, Valet, Berthele & Tölle, 2008;
Gilbert, 1995). Or la dopamine semble aussi avoir un rôle important pour l'attention
sélective et un meilleur encodage en MdT (Colzato, Slagter, Spapé & Hommel, 2008).
Colzato et al. (2008) ont par exemple observé que les sujets avec un plus haut taux de
dopamine présentaient un meilleur rappel de C2 dans un paradigme de CA. Une
seconde interprétation des résultats implique plutôt le niveau de décharge de
60
norépinéphrine (NE). Alors que le modèle LC-NE de Nieuwenhuis et al. (2005) propose
que la NE augmente le traitement de C1 et réduit celui de C2, par auto-inhibition,
l'activité phasique de la NE est connue pour améliorer le ratio signal/bruit et donc le
traitement des cibles (Aston-Jones & Cohen, 2005; Berridge et al., 2003; Oken,
Salinsky & Elsas, 2006). De même, la NE est liée au niveau d'activation physiologique
(dans des phénomènes tels que le sommeil, l'attention, l'anxiété, le stress et la
motivation - Aston-Jones et al., 2005). Or il a été remarqué qu'une activation
physiologique relativement élevée augmentait la performance aux tâches d'attention
soutenue (Aston-Jones et al., 2005). Bien que la NE ne pourrait pas expliquer
entièrement l'effet obtenu dans la condition vélo, il est fort probable que le locus-
coerulus ait déchargé plus de NE (grâce à l'activation du vélo) et ait aidé les participants
pour la dimension d'attention soutenue que requérait la tâche de CA. Enfin, il est
évidemment possible que la réduction du CA obtenu dans la présente expérience soit
due à d'autres facteurs comme, par exemple, une augmentation du taux d'oxygénation
du cerveau liée à l'activité physique. Alors que la littérature s'est principalement
intéressée au traitement particulier des stimuli chargés émotionnellement (Anderson et
al., 2001; Anderson, 2005; Mathewson et al., 2008; Öhman et al., 2002), l'impact de
l'activation physiologique préalable sur les traitements cognitifs reste à éclaircir.
Au-delà des considérations sur l'activation physiologique des sujets, la question
du niveau d'arousal conceptuel reste à clarifier. En effet, Anderson (2005) avait conclu
que les cibles avec un haut niveau d'arousal conceptuel avaient plus de chance
d'échapper au CA. Or, notre étude n'a pas décelé de véritables différences de rappel
entre les mots stimulants, neutres et calmants (sauf pour la condition de relaxation). Il
est dès lors probable que les termes émotionnels choisis n'étaient pas suffisamment
discriminants. En effet, puisque nous avons tenté de contrôler le nombre de lettres pour
les concepts présentés et que le lexique de mots émotionnels est plus limité que celui
des mots simplement visuels ou auditifs, il était plus difficile d'obtenir un bon
échantillon de mots particulièrement stimulants ou particulièrement calmants. Il serait
sûrement pertinent, dans une expérience future, de ne plus tenir compte du nombre de
lettres des cibles afin d'augmenter l'utilisation de mots fortement discriminants du point
de vue de leur niveau d'arousal conceptuel. Par ailleurs, il est possible que l'échantillon
de sujets ayant rempli le questionnaire de prétest n'était pas suffisamment grand
61
(seulement 20 sujets y ont répondu). Néanmoins, une nouvelle hypothèse pourrait être
formulée vis-à-vis des théories de la cognition incarnée. Puisqu'il a été relevé, dans cette
expérience, qu'une activation physiologique élevée réduisait le CA, il est possible que
l'effet observé par Anderson et ses collègues (2001, 2005) ainsi que d' autres chercheurs
(Mathewson et al., 2008; Silvert et al., 2004) soit le fruit d'une simulation d'un haut
niveau d'arousal par les concepts stimulants. Autrement dit, lors de la vision d'un
concept stimulant, l'organisme va simuler un état d'arousal élevé, ce qui augmentera les
traitements attentionnels qui lui sont dévoués. Les concepts stimulants seraient donc
mieux perçus grâce à la simulation d'une haute activation physiologique qu'ils
provoquent et non pas uniquement grâce aux mécanismes bottom-up et top-down
comme l'a, par exemple, décrit Vuilleumier (2005). A l'inverse, il est envisageable que
les concepts calmants aient simulé une plus profonde relaxation, donc un moins haut
niveau d'activation, ce qui a pour conséquence de moins bonnes performances. Bien que
la nature des concepts n'ait pas eu de véritable impact dans notre étude, l'hypothèse de la
simulation de l'activation mérite malgré tout d'être à nouveau investiguée.
Enfin, les corrélations entre les affects positifs et les résultats à la tâche de CA
correspondent effectivement avec ce qu'avaient découvert d'Olivers et al. (2006). En
effet, plus les sujets présentent des affects positifs, mieux ils rappellent la deuxième
cible. Selon ces auteurs, les affects positifs améliorent la flexibilité mentale et l'attention
sélective. De même, ils affirment que les affects positifs sont augmentés par un plus
haut niveau de dopamine. Or, comme nous l'avons cité précédemment, ce
neurotransmetteur est supposé améliorer la performance aux tâches de CA. En d'autres
termes, il est possible que l'activation du vélo ait augmenté le taux de libération de
dopamine qui, à son tour, a réduit le CA et augmenté les affects positifs (mesurés grâce
au questionnaire PANAS).
62
V. CONCLUSIONS
A travers nos études, nous avons voulu démontrer que les concepts étaient
représentés, au moins en partie, par les systèmes qui traitent les informations
sensorielles et qu'ils ne sont donc pas représentés sous une forme abstraite.
Lors de nos deux expériences, les sujets ont dû rappeler les deux cibles qu'ils ont
perçues dans une tâche de CA. D'après Potter et al. (2002), lorsque les deux cibles sont
présentées à un intervalle variant entre 200 et 500 ms (en l'occurrence, ici, 213 ms), C2
est beaucoup moins rappelé que C1. Toutefois, le fait que C2 ne soit pas rapporté ne
signifie pas une absence de traitements cognitifs. Il est d'ailleurs possible d'augmenter
sa probabilité de rappel. Potter et al. (2002) l'ont par exemple démontré en attribuant à
C2 un lien qui le relie sémantiquement à C1. Ou encore, Vermeulen et al. (in press) ont
augmenté le taux de rappel de C2 grâce à un signal avertisseur présenté dans la même
modalité sensorielle (auditive ou visuelle) que celle de la représentation conceptuelle de
C2.
Il est, par contre, aussi possible de réduire davantage encore le taux de rappel de
C2 en demandant au sujet d'accomplir une tâche de décision dans la même modalité
sensorielle que la représentation de C2. Notre première expérience l'a d'ailleurs
démontré. Les sujets rapportaient moins de C2 représentés par la modalité visuelle
lorsqu'une nouvelle tâche visuelle venait perturber le rappel de C2. A l'inverse, ces
mêmes C2 n'étaient pas affectés par l'accomplissement d'une autre tâche en modalité
auditive. Ces résultats confirment nos hypothèses en indiquant, une nouvelle fois, que
les concepts sont au moins partiellement ancrés dans les mêmes systèmes qui traitent les
informations sensori-motrices (Barsalou, 1999, 2008). Or, les modèles classiques de la
sémantique considèrent que les concepts sont stockés sous des formes abstraites, dénués
de leurs propriétés sensorielles, motrices et affectives (Pylyshyn, 1973). Ces modèles ne
pourraient donc pas expliquer les résultats obtenus dans la présente étude. Dans des
études de vérification de propriétés, ils pourraient néanmoins expliquer a posteriori que
"si les concepts et les propriétés sont stockées dans un mêmes système, alors les
propriétés qui partagent une même modalité pourraient être plus fortement associées.
Amorcer une propriété dans une modalité pourrait donc faciliter la vérification d'autres
63
propriétés dans la même modalité via une diffusion de l'activation" (Vermeulen et al.,
2008, p. 288). Mais il aurait été impossible à ce type de modèles d'expliquer en quoi une
tâche perceptive en modalité visuelle ou auditive modifierait les traitements de concepts
représentés visuellement ou auditivement comme l'a démontré notre étude. Même si
nous n'avons pas pu prouver le même impact de l'interférence intramodale (AA) pour
les concepts représentés par la modalité auditive, nous pensons malgré tout que cela
n'infirme pas pour autant nos hypothèses. Il est possible que les concepts auditifs ne
soient pas aussi bien simulés que les concepts visuels ou qu'ils soient victimes d'un coût
de changement de modalité dû à la présentation visuelle générale du CA. Il était dès lors
plus difficile d'obtenir une différence significative entre les conditions intra (AA) et
crossmodales (AV).
Comme nous venons de l'expliquer, le paradigme de CA a permis d'investiguer
l'accès conceptuel et d'obtenir des résultats qui ne pouvaient pas être expliqués par les
modèles classiques de la sémantique. Or, il convient d'ajouter que, malgré nous, la
manipulation de la modalité de représentation des concepts nous a aussi permis
d'obtenir des données en faveur du modèle de CA de Chun et al. (1995). Alors que
Vermeulen et al. (in press) ne pouvaient intégrer les résultats de leur étude qu'avec le
modèle de l'activation/inhibition d'Olivers et al. (2008), notre étude observe plutôt ce
qui ressemble à un partage des ressources attentionnelles entre C1 et C2 (comme le
suggèrent Chun et al., 1995). Les C1 sont mieux rappelés lorsque C2 était représenté par
la modalité auditive. Nos hypothèses proposent donc que les concepts représentés par la
modalité auditive sont soit moins bien simulés, soit victimes d'un coût de changement
de modalité sensorielle (de la modalité visuelle vers l'auditive). Dès lors, les C2 aux
représentations auditives vont être moins capables de rivaliser avec C1 qui aura, de son
côté, plus de chances d'être rappelé. Par contre, il est plus difficile de se positionner par
rapport au débat sur l'existence ou non d'un goulot d'étranglement amodal ou modal. S'il
existe une telle structure, nos résultats iraient plutôt dans le sens d'un goulot
d'étranglement amodal puisque les C2 représentés par la modalité auditive semblent
dépendre de l'encodage de C1 (qui n'est représenté ni visuellement, ni auditivement). De
même, le fait que le taux de C1 varie en fonction de la condition d'intra (AA) ou de
crossmodalité (AV) des C2 représentés par la modalité auditive, peut être aussi
interprété comme un argument signalant que la condition a réellement eu un impact sur
64
le taux de rappel de C2, même si les statistiques n'ont pas pu atteindre un niveau de
significativité suffisante pour le taux de rappel de C2. Ces dernières interprétations
pourraient toutefois aussi bien s'expliquer (voire mieux) par le modèle de l'activation/
inhibition d'Olivers et al. (2008). Puisque l'interférence se produit lors de la phase de
représentation des concepts en MdT, il est aussi probable que le taux de rappel de C1
légèrement supérieur en condition intramodale (AA) s'explique par une interférence
plus puissante en MdT pour les C2 auditifs. Les C2 auditifs ayant été oubliés (faute de
ressources de maintien), la MdT pourrait centrer ses efforts sur l'encodage ou le
stockage de C1.
Alors que les théories de la cognition incarnée trouvent des arguments en faveur
d'une simulation des concepts émotionnels grâce à ces mêmes systèmes sensori-moteurs
(Niedenthal et al., 2009), notre deuxième expérience n'a pu fournir une telle évidence.
Le niveau d'activation physiologique préalable n'a pas servi d'amorce uniquement pour
les concepts qui avaient une représentation d'arousal qui lui étaient similaires. Au
contraire, le haut niveau d'arousal lié au vélo a augmenté le taux de rappel de tous les
concepts (neutres, calmants et stimulants). Nous avons dès lors proposé que cet effet
soit dû à la conjonction de plusieurs facteurs tels qu'une libération accrue de dopamine
(qui améliore la performance aux tâches d'attention sélective - Colzato et al., 2008) ou
encore grâce à un plus haut taux de décharge de norépinéphrine (qui améliore la
performance aux tâches d'attention soutenue - Aston-Jones et al., 2005), voire une
amélioration générale des performances cognitives liée à une alimentation
particulièrement riche en oxygène du cerveau. Cela n'empêche pas non plus, selon nous
et conformément à la théorie SSP, que les concepts émotionnels simulent malgré tout le
niveau d'activation physiologique liée à l'émotion et que ce phénomène participe, entre
autres, aux meilleures performances des mots stimulants comme dans l'étude
d'Anderson (2005). Bien que cela reste une hypothèse à vérifier, il serait probable que
les concepts stimulants reproduisent une bribe des effets observés en condition de haute
activation physiologique, puisqu'un véritable haut niveau d'arousal améliore de taux de
rappel de C2. Cette dernière hypothèse nécessiterait de nouvelles recherches sous cet
angle afin d'être validée.
Finalement, la première expérience a offert un argument de valeur en faveur des
modèles de la cognition incarnée. Jusqu'à présent, la majorité des études qui avaient
65
tenté de démontrer l'existence d'une simulation des concepts via les systèmes sensori-
moteurs présentaient un biais majeur: les sujets possédaient toujours une marge de
liberté pour recourir à des stratégies d'imagerie mentale. Or, bien que l'imagerie mentale
corresponde à une simulation explicite qui permet évidemment de se représenter les
propriétés des objets que l'on analyse, la définition de la "simulation" propose qu'elle se
produise aussi de manière implicite. Le paradigme du CA a donc permis de tester l'accès
conceptuel sans que les sujets n'aient le temps de se former une représentation
consciente des concepts présentés. Cela signifie qu'il leur était impossible de se
focaliser sur le caractère visuel ou auditif de ces concepts. Puisque la tâche de décision
présentait des stimuli visuels ou auditifs sans signification, cela nous a permis de
démontrer le lien intime qu'entretiennent perception et représentation conceptuelle.
Le lien entre perception et représentation étant particulièrement évident dans la
première expérience, il est encore possible d'améliorer la procédure afin de tester la
véracité de nos interprétations. En effet, si les C2 auditifs sont moins bien simulés ou
qu'ils souffrent d'un coût de changement de modalité dû à la tâche elle-même, il faudra
trouver un moyen pour augmenter leur représentation lors de l'accès conceptuel.
L'expérience de Vermeulen et al. (in press) a réussi à augmenter leur rappel (et donc à
améliorer leur simulation) grâce à une amorce perceptuelle auditive ("prêt" dans les
haut-parleurs). Nous avons donc proposé, dans la première discussion, d'utiliser cette
même procédure (pour augmenter la représentation des C2 auditifs), puis d'y appliquer
une tâche de décision gauche/droite comme dans notre procédure. Nous faisons
l'hypothèse que la différence de rappel des C2 auditifs sera davantage significativement
différente en condition d'intramodalité (C2 auditif - décision auditive) qu'en condition
de crossmodalité (C2 auditif - décision visuelle).
Un autre commentaire éventuel de la première expérience concerne le timing
d'apparition de la tâche de décision gauche/droite. L'objectif était de démontrer qu'elle
allait interférer avec l'accès conceptuel. Or cette tâche s'exécute normalement après que
les concepts aient déjà été encodés en MdT. Autrement dit, il est possible que ce ne soit
pas tellement l'accès conceptuel qui ait été manipulé mais plutôt la représentation des
concepts en MdT. Il serait dès lors judicieux de charger la MdT pendant la tâche de CA.
L'étude de Vermeulen et al. (2008) pourrait nous servir à l'avenir. Dans leur étude, les
expérimentateurs ont demandé aux participants de mémoriser soit des formes (modalité
66
visuelle) soit des "bips" (modalité auditive) juste avant d'exécuter une tâche de
vérification de propriétés (visuelles vs. auditives). Les participants ont répondu moins
rapidement quand les sujets avaient dû mémoriser trois items dans la même modalité
que la propriété à vérifier que lorsqu'un seul était à mémoriser. Cela signifie que
pendant que la mémoire de travail recrute les systèmes sensoriels pour maintenir les
informations à la conscience, ces mêmes systèmes ont moins de ressources à allouer aux
nouveaux traitements conceptuels. Nous proposons donc qu'il serait pertinent de
demander aux sujets de mémoriser des formes (modalité visuelle) ou des
"bips" (modalité auditive) avant la tâche de CA où les C2 seront représentés par les
modalités soit visuelles, soit auditives. Alors que les systèmes visuels ou auditifs seront
mobilisés à maintenir la forme ou le bip initial en MdT, l'accès conceptuel des mots
représentés dans ces mêmes modalités sera alors directement entravé. Néanmoins,
même si notre étude présente la faiblesse de n'avoir pas pu maîtriser totalement la
période-même de l'accès conceptuel, nos interprétations restent malgré tout valides
puisque les sujets n'ont pas pu recourir à des stratégies d'imagerie mentale pour rappeler
les concepts qu'ils ont perçus.
Bien que le modèle SSP de Barsalou (1999) propose une explication des
mécanismes impliqués dans l'accès conceptuel qui ont fait l'objet d'un grand nombre de
validations scientifiques, les questions suivantes restent néanmoins à éclaircir. Qu'en
est-il finalement des concepts abstraits ? Sont-ils effectivement exclusivement simulés
via les systèmes sensori-moteurs comme le soutiennent Barsalou (1999), Prinz (2002) et
Niedenthal et al. (2009) ou bien sont-ils aussi en partie construits sur des mécanismes
ou des symboles amodaux (Dove, 2009; Mahon et al., 2009) ?
Pour notre part, il conviendrait également d'intégrer les théories de la cognition
incarnée dans de nouveaux modèles neuropsychologiques du langage. En effet
actuellement, pour prendre l'exemple de la dénomination d'une image, les modèles
neuropsychologiques envisagent les fonctions langagières comme suit: premièrement,
l'individu va d'abord analyser les caractéristiques visuelles du stimulus, puis tenter de
récupérer en mémoire une représentation structurale correspondante. Deuxièmement,
l'individu va tenter de récupérer la signification (système sémantique) de ce stimulus.
Enfin, il nommera l'objet grâce au lexique phonologique de sortie ou il l'écrira via le
lexique orthographique de sortie. Au vu des théories de la cognition incarnée, tous les
67
éléments de ce système reposent en partie sur les mêmes systèmes de traitement de
l'information. Il serait dès lors pertinent de se questionner sur les applications cliniques
(diagnostiques et rééducationnelles) qui peuvent être mises en place d'après les modèles
de la cognition incarnée. Cette nouvelle manière d'envisager la représentation des
concepts nécessite-t-elle une réévaluation totale des outils dont disposaient les
neuropsychologues cliniciens pour évaluer les troubles du langage ?
Enfin, puisque d'après le modèle SSP, c'est notre expérience sensori-motrice qui
crée nos représentations conceptuelles, celles-ci diffèrent donc légèrement d'un individu
à un autre (cette différence étant sûrement plus grande pour la représentation des
concepts abstraits). Une question émerge donc: comment la communication est-elle dès
lors possible ? Pour répondre à cette question, d'autres domaines de recherches sur la
cognition incarnée sont sans doute actuellement plus compétents (les neurosciences
sociales, par exemple, avec la recherche sur les neurones miroirs). Bien que la littérature
scientifique présente un ensemble de recherches aux procédures parfois très complexes
à comprendre, les théories de la cognition incarnée représentent un vaste champ de
recherches dont l'idée centrale est finalement simple et qui laisse présager de
nombreuses conciliations interdisciplinaires.
68
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Wu, L., & Barsalou, L. W. (2004). Perceptual simulation in property generation.
Manuscript submitted for publication.
78
VII. ANNEXES
Annexe 1: Expérience 1 - construction du bloc 1
Légende du code
D (= distracteurs) + (nombre de distracteurs) + modalité de la C2 (Auditive / Visuelle) +
L (= nombre de lettres du mot) + (nombre de lettres) + D (= décision) + modalité de la
décision (Auditive / Visuelle) + O (occurrence de ce code) + (numéro de l'occurrence)
DistracteursDistracteursDistracteursDistracteursDistracteurs Code CiblesCibles C2Auditif/
Visuel
DécisionAuditive
/ Visuelle
Gauche/ DroiteD1 D2 D3 D4 D5
Code
C1 C2
C2Auditif/
Visuel
DécisionAuditive
/ Visuelle
Gauche/ Droite
£74# &1#§ %29* D3AL4DAC1O1 cocu vent a a G
%5*£ 0@*% $21@ D3AL4DVC1O1 boxe echo a v G
$£@29 #&%4£ £4#21 D3AL5DAC1O1 enjeu tûûût a a D
#§*42 $5#§6 &5§£2 D3AL5DAC1O2 union biper a a G
&1§2£ 65@%1 *&87# D3AL5DVC1O1 grève gémir a v D
§%£1& 52%*$ #@16$ D3AL5DVC1O2 pacte dring a v G
§%£1& #&%4£ $21@§ D3VL5DAC1O2 remis gazon v a D
$4#£7 9#§&3 §#5£2 D3VL5DVC1O1 rôle rond v v G
#§*42 #&%4£ %5*£& D3VL5DVC1O2 untel pomme v v D
$5#§6 §#5£2 0@*%9 D3VL5DVC1O3 admis large v v G
2@*% 16%$ $8£& *4§# D4AL4DAC1O1 cure toux a a D
%56& *7§# 28%@ 2%8£ D4AL4DAC1O2 mais voix a a G
0@*%9 %5*£& £53@&
£%&91 D4AL5DAC1O3 unité juron a a D
£&@§2 £*2#8 §%9@7 76#@* D4AL5DVC1O1 baril eloge a v D
&4#§% £27#3 *6§#£ $91@§ D4AL5DVC1O2 tempe chant a v G
#&%41 $£@2§ 1%8£$ %69*+ D4VL5DAC1O1 faim vert v a G
§#£1& &$6§% &5§£2 9@&2# D4VL5DAC1O2 utile herbe v a D
12@%+ &1§3= 76#?@ £4#2§ D4VL5DVC1O1 perte grand v v D
#§*42 £%&9* *&87@
&$5§1 D4VL5DVC1O2 sinus sapin v v G
79
DistracteursDistracteursDistracteursDistracteursDistracteurs Code CiblesCibles C2Auditif/
Visuel
DécisionAuditive
/ Visuelle
Gauche/ DroiteD1 D2 D3 D4 D5
Code
C1 C2
C2Auditif/
Visuel
DécisionAuditive
/ Visuelle
Gauche/ Droite
$5#§6 #§*42 £%&9* *&87@ D4VL5DVC1O3 gamma hache v v D
$4#£ 7@&2 #@16 *3%& &$5§ D5AL4DVC1O1 pour allô a v D
52%*$ §#£1& &$6§% &5§£2 9@&2# D5AL5DAC1O1 vendu slurp a a G
9#§&+ $4#£= 7@&?2 #@16£ *3%&€ D5AL5DAC1O2 cycle prout a a D
13%$& 2@*%£ *4#&§ §#5£2 6*@7$ D5AL5DVC1O1 culot potin a v G
*8§#6 %56&§ 6*@5$ $8£&7 £2§%9 D5VL4DAC1O1 puis bois v a G
£*4#3 $&@§5 @§#2£ 78%*$ %1@6§ D5VL5DAC1O2 régal phare v a D
65@% *&87 &$6§% &5§£2 %56&§ D5VL5DAC1O3 appas astre v a G
52%*$ #@16$ #§*42 £%&9* 0@*%9 D5VL5DAC1O4 appui arbre v a D
#&%4£ £4#21 £%&9* *&87@ 2@*%£ D5VL5DVC1O1 chaud blanc v v G
$5#§6 &5§£2 7@&2 #@16 £&@§2 D5VL5DVC1O2 alpha ovale v v D
80
Annexe 2: Expérience 1 - construction du bloc 2
Légende du code
D (= distracteurs) + (nombre de distracteurs) + modalité de la C2 (Auditive / Visuelle) +
L (= nombre de lettres du mot) + (nombre de lettres) + D (= décision) + modalité de la
décision (Auditive / Visuelle) + O (occurrence de ce code) + (numéro de l'occurrence)
DistracteursDistracteursDistracteursDistracteursDistracteurs Code CiblesCibles C2Auditif/
Visuel
Décision Auditive/
Visuelle
Gauche/DroiteD1 D2 D3 D4 D5
Code
C1 C2
C2Auditif/
Visuel
Décision Auditive/
Visuelle
Gauche/Droite
6§#£ %24§ 0@%9 D3AL4DAC2O1 soif hein a a G
£53@ $91§ £&§2 D3AL4DVC2O1 vice watt a v D
£%&9* &5§£2 12@%£ D3AL5DAC2O1 iode hymne a a D
2%8£# £4#21 &4#§% D3AL5DVC2O1 magie aiguë a v G
76#@* *&87# #&%4£ D3AL5DVC2O2 jadis remix a v D
&$6§ #@16 $5#§ D3AL5DVC2O3 goutu oraux a v G
7@&2 §#5£ 5=+% D3VL4DAC2O1 réel noir v a D
#&%4£ #§*42 65@%§ D3VL5DAC2O1 mixte géant v a G
12@%& §%£1& $5#§6 D3VL5DVC2O1 bilan sable v v D
$5#§6 $4#£7 5+%?$ D3VL5DVC2O2 bénit bosse v v G
*4#& $8£& 5#§& 0@*% D4AL4DAC2O1 cuti bass a a G
6*@5 28%* 13%$ &4#§ D4AL4DAC2O2 sort vlan a a D
76#@* %5*£& £*4#9 12@%& D4AL5DAC2O2 moral pouet a a G
§#2£1 §%9@7 *8§#6 #&%4£ D4AL5DVC2O1 excès audio a v D
£%&91 £24#3 0@*%9 $5#§6 D4AL5DVC2O2 serre bruit a v G
$91@ $£@2 &4#§ 52%$ D4VL4DAC2O1 hier bleu v a D
$&@§5 @§#2£ 78%*$ #§*42 D4VL5DAC2O1 sucré boule v a G
%29=? &1§2% #&%4@ 9#§&§ D4VL5DVC2O1 assez stylo v v D
%56&§ 6*@5$ $8£&7 12@% D4VL5DVC2O2 basic mauve v v G
£4#21 £%&9* *&87@ §#£1& D4VL5DVC2O3 azote jaune v v D
£4#2 #§*4 65@% 13%$ &$5§ D5AL4DVC2O1 être oral a v D
*&87@ §%£1& $5#§6 *8§#6 9@&2#
D5AL5DAC2O1 mafia tempo a a D
81
DistracteursDistracteursDistracteursDistracteursDistracteurs Code CiblesCibles C2Auditif/
Visuel
Décision Auditive/
Visuelle
Gauche/DroiteD1 D2 D3 D4 D5
Code
C1 C2
C2Auditif/
Visuel
Décision Auditive/
Visuelle
Gauche/Droite
&5§£2 $4#£7 52%*$ £*4#8 *3%&6 D5AL5DAC2O2 péché couic a a G
#@16§ 2@*%£ 9#§&3 £53@&
6*@7$ D5AL5DVC2O1 norme ouais a v G
§#5£§ %56&£ 16%$# *6§#@ £2§%$ D5VL5DAC2O1 quête sang v a D
$8£&+ £&@§= *7§#? 2%8£6 %$€@1 D5VL5DAC2O2 pose brun v a G
65@% *&87 28%*& 52%* &1#§% D5VL5DAC2O3 bourg rouge v a D
52%*$ #@16$ £53@& $5#§6 65@% D5VL5DAC2O4 moite pastel v a G
#&%4£ £4#21 $8£&7 $5#§ 0@*%9 D5VL5DVC2O1 suret beige v v G
$5#§6 &5§£2 §%9@7 65@%§
#&%4£ D5VL5DVC2O2 delta pizza v v D
82
Annexe 3: Expérience 2 - construction du bloc 1
Légende du codeD (= distracteurs) + (nombre de distracteurs) + arousal conceptuel de C2 (Neutre / Low
= calmant / High = stimulant) + L (= nombre de lettres du mot) + (nombre de lettres) +
B (= bloc) + (numéro du bloc) + O (occurrence de ce code) + (numéro de l'occurrence)
DistracteursDistracteursDistracteursDistracteursDistracteurs Code CiblesCibles
D1 D2 D3 D4 D5
Code
C1 C2
#&%0+ $£@2= 1%8£& D3HL5B1O1 ville désir
12@%/ &1§31 76#@? D3HL5B1O2 jeudi crise
52%*$1 §#£1&+ &$6§%? D3HL6B1O1 groupe guerre
%56?/3 *7§0%£ 28%#@% D3HL6B1O2 rideau fureur
&4#§%4# £27#3*$ *6§#£1+ D3HL7B1O1 février nerveux
%5* 0@* 21 $ D3LL3B1O1 bic las
£74# &1#§ %29* D3LL4B1O1 haie paix
$£@29 #&%4£ £4#21 D3LL5B1O1 canne calme
$5#§64 #§*42£ £%&9*# D3LL6B1O1 papier tendre
0@*%**$ %5*£#@? £53@?=* D3LL7B1O1 plateau sommeil
&1§2* 65@%* *&87* D3NL5B1O1 stylo poche
£&@§1* £*2#$@ §%9@=? D3NL6B1O1 cintre cahier
§%£1 52%* #@16 2@£& D4HL4B1O1 pôle rage
9#§&6 $4#£% 7@&29 #@16# D4HL5B1O1 lundi drôle
*8§#6@ %56&§% 6*@5$* $8£&71 D4HL6B1O1 croisé danger
2@*%£?+ *4#&§/* §#5£2£@ 6*@7$*§ D4HL7B1O1 juillet énergie
#§* $5# &5§ $4# D4LL3B1O1 gaz bof
$4#£# 9#§&@ §#5£% %56*+ D4LL5B1O1 carte repos
13%$2+ 2@*%#? *4#&#= §#52£* D4LL6B1O1 céleri nature
2@*%£ 16%$& $8£&7 *4§#$ D4NL5B1O1 écran sucre
£*4#3* $&@§5# #%£*#@ 78%*$+ D4NL6B1O1 climat caille
$4#£8# 7@&2#@ #@16@% *3%&%+ D4NL6B1O2 membre miroir
%56&§0# 6*@5$@ $8£&78+ £2§%9%/ D4NL7B1O1 poivron fonction
$&@§54+ #028£*? 78%*$%/ %1@6§@# D4NL7B1O2 profond théorie
83
DistracteursDistracteursDistracteursDistracteursDistracteurs Code CiblesCibles
D1 D2 D3 D4 D5
Code
C1 C2
9#§&£ $4#£# 7@16% #@16* *3%&% D5HL5B1O1 mardi envie
*8§#63 %56&§# 6*@5$@ $8£&7$ £2§9#2 D5HL6B1O1 samedi irrité
13%$&$£ 2@*%£6 *4#&§1# §#5£2$* 6*@7$%@ D5HL7B1O1 octobre douleur
&4#§% £27#0 *6§#* $91@£ 78%*$ D5LL5B1O1 court ennui
$5#§6§ #§*§42 £%&9*6 *&§87@ &$5§1§ D5LL6B1O1 tympan serein
52%*$%% §#£1&#@ &$6§%4+ &5§£25= 9@&2#@? D5LL6B1O2 brique relaxé
9#§&3£% $4#£0*@ 7@&26§$ #@16à@§ *3%&%*# D5LL7B1O1 machine confort
%56 *7§ 28 % 2%9 #@1 D5NL3B1O1 riz vis
£&@§ £*2% §%9# 76#% §2%@ D5NL4B1O1 rond trou
0@*% %5*£ £53@ £%&9 $8£& D5NL4B1O2 case prix
13%$& 2@*%£ *4#&§ §#5£2 6*@7$ D5NL5B1O1 poste écrou
£*4#37 $&@§5# *%#1£5 78%*$4 %1@6§% D5NL6B1O1 housse neutre
84
Annexe 4: Expérience 2 - construction du bloc 2
Légende du codeD (= distracteurs) + (nombre de distracteurs) + arousal conceptuel de C2 (Neutre / Low
= calmant / High = stimulant) + L (= nombre de lettres du mot) + (nombre de lettres) +
B (= bloc) + (numéro du bloc) + O (occurrence de ce code) + (numéro de l'occurrence)
DistracteursDistracteursDistracteursDistracteursDistracteurs Code CiblesCibles
D1 D2 D3 D4 D5
Code
C1 C2
£74# &1#§ %29* D3HL4B2O1 goût trac
&1§2* 65@%* *&87* D3HL5B2O1 avril force
52%*$1 §#£1&+ &$6§%? D3HL6B2O1 mollet gaieté
0@*%**$ %5*£#@? £53@?=* D3HL7B2O1 édifice terreur
&4#§%4# £27#3*$ *6§#£1+ D3HL7B2O2 armoire violent
%5*£ 0@*% $21@ D3LL4B2O1 pâté doux
$£@29 #&%4£ £4#21 D3LL5B2O1 doigt câlin
12@%/? &1§31# 76#@,* D3LL6B2O1 montre pensif
$5#§64 #§*42£ £%&9*# D3LL6B2O2 oignon gentil
£&@§1*€ £*2#$@? §%9@=?$ D3LL7B2O1 horloge douceur
#&%0+ $£@2= 1%8£& D3NL5B2O1 année niche
%56?/3 *7§0%£ 28%#@% D3NL6B2O1 séance infini
$4#£ 9#§& §#5£ %56* D4HL4B2O1 fait viol
9#§&6 $4#£% 7@&29 #@16# D4HL5B2O1 colle tendu
£*4#3* $&@§5# #%£*#@ 78%*$% D4HL6B2O1 orteil fierté
$&@§54+ #028£*? 78%*$%/ %1@6§@# D4HL7B2O1 siècle tension
§%£1 52%* #@16 2@£& D4LL4B2O1 bois vide
2@*%£ 16%$& $8£&7 *4§#$ D4LL5B2O1 écrit plage
*8§#6@ %56&§% 6*@5$* $8£&71 D4LL6B2O1 marché soupir
%56&§0# 6*@5$@ $8£&78+ £2§%9%/ D4LL7B2O1 manière fatigue
%56&3§5 *7§#%£$ 28%* 2%8£5#@ D4NL7B2O2 manteau réunion
#§* $5# &5§ $4# D4NL3B2O1 jus sel
13%$2 2@*%# *4#&# §#52£ D4NL5B2O1 route leçon
85
DistracteursDistracteursDistracteursDistracteursDistracteurs Code CiblesCibles
D1 D2 D3 D4 D5
Code
C1 C2
$4#£8# 7@&2#@ #@16@% *3%&%+ D4NL6B2O1 commun goutte
2@*%£? *4#&§* §#5£2@ 6*@7$* D4NL6B2O2 ancien machin
9#§&£ $4#£# 7@16% #@16* *3%&% D5HL5B2O1 siège haine
£*4#37 $&@§5# *%#1£5 78%*$4 %1@6§% D5HL6B2O1 sachet colère
52%*$%% §#£1&#@ &$6§%4+ &5§£25= 9@&2#@? D5HL7B2O1 ampoule panique
&4#§% £27#0 *6§#* $91@£ 78%*$ D5LL5B2O1 creux songe
*8§#63 %56&§# 6*@5$@ $8£&7$ £2§9#2 D5LL6B2O1 avenue faible
9#§&3£% $4#£0*@ 7@&26§$ #@16à@§ *3%&%*# D5LL7B2O1 ketchup paradis
£&@ £*2 §%9 76# §2% D5NL4B2O1 dose vote
0@*% %5*£ £53@ £%&9 $8£& D5NL4B2O2 truc égal
13%$& 2@*%£ *4#&§ §#5£2 6*@7$@ D5NL5B2O1 privé chose
$5#§6§ #§*§42 £%&9*6 *&§87@ &$5§1§ D5NL6B2O1 bouton partie
13%$&$£ 2@*%£6 *4#&§1# §#5£2$* 6*@7$%@ D5NL7B2O1 marteau bouchon
86
Annexe 5: Expérience 2 - construction du bloc 3
Légende du codeD (= distracteurs) + (nombre de distracteurs) + arousal conceptuel de C2 (Neutre / Low
= calmant / High = stimulant) + L (= nombre de lettres du mot) + (nombre de lettres) +
B (= bloc) + (numéro du bloc) + O (occurrence de ce code) + (numéro de l'occurrence)
DistracteursDistracteursDistracteursDistracteursDistracteurs Code CiblesCibles
D1 D2 D3 D4 D5
Code
C1 C2
£74# &1#§ %29* D3HL4B3O1 haut choc
&1§2* 65@%* *&87* D3HL5B3O1 avril fâché
52%*$1 §#£1&+ &$6§%? D3HL6B3O1 argile humour
&4#§%4# £27#3*$ *6§#£1+ D3HL7B3O1 conseil courage
0@*%**$ %5*£#@? £53@?=* D3HL7B3O2 plafond passion
%5*£ 0@*% $21@ D3LL4B3O1 plat beau
$£@29 #&%4£ £4#21 D3LL5B3O1 porte suave
12@%/? &1§31# 76#@,* D3LL6B3O1 salade pardon
$5#§64 #§*42£ £%&9*# D3LL6B3O2 raisin désolé
£&@§1*€ £*2#$@? §%9@=?$ D3LL7B3O1 bouchon placide
#&%0+ $£@2= 1%8£& D3NL5B3O1 chaux engin
%56?/3 *7§0%£ 28%#@% D3NL6B3O1 ciment pierre
9#§&6 $4#£% 7@&29 #@16# D4HL5B3O1 colle cruel
£*4#3* $&@§5# #%£*#@ 78%*$% D4HL6B3O1 émirat enragé
$&@§54+ #028£*? 78%*$%/ %1@6§@# D4HL7B3O1 général surpris
§%£1 52%* #@16 2@£& D4LL4B3O1 gant joli
2@*%£ 16%$& $8£&7 *4§#$ D4LL5B3O1 heure bonté
*8§#6@ %56&§% 6*@5$* $8£&71 D4LL6B3O1 lettre amical
%56&§0# 6*@5$@ $8£&78+ £2§%9%/ D4LL7B3O1 royaume chaleur
#§* $5# &5§ $4# D4NL3B3O1 nez vis
$4#£ 9#§& §#5£ %56* D4NL4B3O1 long œuf
13%$2 2@*%# *4#&# §#52£ D4NL5B3O1 hanse trace
$4#£8# 7@&2#@ #@16@% *3%&%+ D4NL6B3O1 feutre résumé
2@*%£?+ *4#&§/* §#5£2£@ 6*@7$*§ D4NL7B3O1 poignée faculté
87
DistracteursDistracteursDistracteursDistracteursDistracteurs Code CiblesCibles
D1 D2 D3 D4 D5
Code
C1 C2
%56& *7§# 28%* 2%8£ #@16 D5HL4B3O1 cité peur
&4#§% £27#0 *6§#* $91@£ 78%*$ D5HL5B3O1 siège outré
*8§#63 %56&§# 6*@5$@ $8£&7$ £2§9#2 D5HL6B3O1 nombre stress
9#§&3£% $4#£0*@ 7@&26§$ #@16à@§ *3%&%*# D5HL7B3O1 voiture stressé
0@*%9 %5*£& £53@+ £%&91 $8£&7 D5LL5B3O1 wagon dépit
13%$&8 2@*%£$ *4#&§@ §#5£2# 6*@7$5 D5LL6B3O1 maison amitié
52%*$%% §#£1&#@ &$6§%4+ &5§£25= 9@&2#@? D5LL7B3O1 janvier sourire
£&@§ £*2% §%9# 76#% §2%@ D5NL4B3O1 taie drap
9#§&£ $4#£# 7@16% #@16* *3%&% D5NL5B3O1 large boîte
£*4#37 $&@§5# *%#1£5 78%*$4 %1@6§% D5NL6B3O1 toupie gourde
$5#§6§ #§*§42 £%&9*6 *&§87@ &$5§1§ D5NL6B3O2 peigne compas
13%$&$£ 2@*%£6 *4#&§1# §#5£2$* 6*@7$%@ D5NL7B3O1 oreille document
88
Annexe 6: Questionnaire TAS-20
Sexe Age 1 2 3 4 5 6 7 8 9 0
F x 10
M x 1
En ce qui me concerne personnellement, la proposition qui suit
1. désaccord complet. 2. désaccord relatif. 3. ni accord, ni désaccord. 4. accord relatif. 5. accord complet
1 Souvent, je ne vois pas très clair dans mes sentiments ………………………………............
2 J’ai du mal à trouver les mots qui correspondent bien à mes sentiments ………..…...........3 J’éprouve des sensations physiques que les médecins eux-mêmes ne
comprennent pas ............................................................................................................................4 J’arrive facilement à décrire mes sentiments……………………………………………...........
5 Je préfère analyser les problèmes plutôt que de me contenter de les décrire…………….........6 Quand je suis bouleversé(e), je ne sais pas si je suis triste, effrayé(e), ou en colère……….....
7 Je suis souvent intrigué(e) par des sensations au niveau de mon corps…………………….....8 Je préfère simplement laisser les choses se produire plutôt que de comprendre pourquoi
elles ont pris ce tour………............................................................................................................9 J’ai des sentiments que je ne suis guère capable d’identifier………………………………....
10 Etre conscient de ses émotions est essentiel………………………………………………......11 Je trouve difficile de décrire mes sentiments sur les gens………………………………….....
12 On me dit de décrire davantage ce que je ressens…………………………………………......13 Je ne sais pas ce qui se passe à l’intérieur de moi…………………………………………......
14 Bien souvent, je ne sais pas pourquoi je suis en colère…………………………………..........15 Je préfère parler aux gens de leurs activités quotidiennes plutôt que de leurs sentiments….....
16 Je préfère regarder des émissions de variétés et de divertissement plutôt que des films psychologiques…………………………..............................................................................
17 Il m’est difficile de révéler mes sentiments intimes même à des amis très proches………..…18 Je peux me sentir proche de quelqu’un même pendant les moments de silence…………........
19 Je trouve utile d’analyser mes sentiments pour résoudre mes problèmes personnels…............20 Rechercher le sens caché des films ou des pièces de théâtre perturbe le plaisir qu’ils
procurent…………...............................................................................................................
89
1 2 3 4 5
Annexe 7: Questionnaire PANAS
Sexe Age 1 2 3 4 5 6 7 8 9 0
F x 10 M x 1
Lisez chaque mot et mettez une croix dans la case qui correspond le mieux à l'intensité de ce que vous
ressentez maintenant."En ce moment, je me sens …" (veuillez mettre une seule croix par ligne; s'il vous plaît)
1= pas du tout 2= un peu. 3= moyennement. 4= beaucoup 5= extrêmement
1 intéressé(e)...........................................................................…………………………………2 en détresse, bouleversé(e)............................................................................……………..…..
3 gai(e), amusé(e), exalté(e).......................................................................................................4 agacé(e), énervé(e), perturbé(e).....................................................……………………..........
5 fort(e), d'attaque................................................................................................…………......6 coupable..................................................................................................................................
7 effrayé(e) ..................................................................................................................………..8 hostile, agressif(ve).................................................................................................................
9 enthousiaste...........................................................................………………………………..10 fier(e).......................................................................………………………………………....
11 irritable, irascible.................................................................………………………………...12 alerte, vif(e).....................................................................................................……………....
13 honteux(se)..............................................................................……………………………....14 inspiré(e), plein(e) d'inspiration................................................................……………….......
15 nerveux(se)..............................................................................................................................16 décidé, déterminé(e)................................................................................................................
17 attentif(ve), prévenant(e).................................................................................................……18 agité(e)............................................................................................................................….....
19 actif(ve)....................................................................................................................................20 apeuré(e)..................................................................................................................................
90
1 2 3 4 5
ANNEXE 8: Questionnaire IRI
Indiquez en utilisant les indications qui figurent ci-dessous à quel point vous êtes en Désaccord ou en Accord avec chacune des affirmations qui suivent. Ne donnez qu'une réponse pour chaque
proposition, puis reportez dans la case de droite le chiffre correspondant. Vous n’utiliserez le milieu de l’échelle que s’il vous est tout à fait impossible de porter un jugement sur votre manière de réagir.
Désaccord Désaccord Ni accord, Accord Accord complet relatif ni désaccord relatif complet 1 2 3 4 5
1) Assez régulièrement, je rêvasse et fantasme à propos de choses qui pourraient m’arriver.
1) __
2) J’ai souvent des sentiments de tendresse, de compassion pour les personnes moins favorisées que moi.
2) __
3) Je trouve parfois difficile de voir les choses du point de vue de l’autre. 3) __
4) Il m’arrive de ne pas me sentir sincèrement désolé(e) pour les autres lorsqu’ils ont des problèmes.
4) __
5) Je deviens vraiment absorbé(e) par les sentiments des personnages d’un roman. 5) __
6) Dans les situations d’urgence, je me sens inquiet(e) et mal à l’aise. 6) __
7) Lorsque je regarde un film ou une pièce de théâtre, je suis généralement objectif(ve), et il est rare que je sois complètement pris(e) dedans.
7) __
8) En cas de désaccord, j’essaie de voir le point de vue de chacun avant de prendre une décision.
8) __
9) Lorsque je vois une personne se faire exploiter, j’éprouve un certain sentiment de protection envers elle/à son égard.
9) __
10) Je me sens parfois désarmé(e) lorsque je me trouve au cœur d’une situation très émotionnelle.
10)__
11) Parfois, j’essaie de mieux comprendre mes ami(e)s en imaginant comment les choses se présentent de leur point de vue.
11)__
12) C’est assez rare que je sois fortement absorbé(e) par un bon livre ou un bon film. 12)__
13) Quand je vois qu’on fait du mal à quelqu’un, j’ai tendance à garder mon calme. 13)__
14) D’habitude, les malheurs des autres ne m’affectent pas vraiment. 14)__
15) Si je suis sûr(e) d’avoir raison sur un point, je ne perds pas tellement de temps à écouter les arguments des autres.
15)__
16) Après avoir vu une pièce de théâtre ou un film, il m’est arrivé de me sentir comme si j’étais un des personnages.
16)__
17) Me trouver dans une situation de tension émotionnelle me fait peur. 17)__
18) Il m’arrive de ne pas éprouver de pitié pour des personnes que je vois être traitées injustement.
18) __
19) En général, je suis plutôt efficace dans les situations d’urgence.
19) __
20) Je suis souvent assez touché(e) par les événements que je vois se produire. 20) __
21) Je crois qu’il y a deux côtés à toute question et j’essaie de les regarder tous les deux. 21) __
91
22) J’aurais tendance à me décrire comme une personne au cœur tendre/sentimentale. 22) __
23) Lorsque je regarde un bon film, je peux très facilement me mettre à la place du personnage principal.
23) __
24) J’ai tendance à perdre le contrôle de moi-même dans les situations d’urgence. 24) __
25) Quand j’en veux à quelqu’un, j’essaie habituellement de me mettre ‘dans sa peau’ pendant un moment.
25) __
26) Lorsque je suis en train de lire une histoire intéressante, j’imagine ce que je ressentirais si les événements de l’histoire m’arrivaient.
26) __
27) Je perds mes moyens quand je vois quelqu’un qui a gravement besoin d’aide dans une situation d’urgence.
27) __
28) Avant de critiquer quelqu’un, j’essaie d’imaginer comment je me sentirais si j’étais à sa place.
28) __
92