36
Arrêt sur image(s) Actes de la rencontre professionnelle culture/jeunesse Jeudi 12 avril 2012 Salle Jean-Louis Barrault Les Cinoches À Ris-Orangis Journée organisée en collaboration avec

Jeudi 12 avril 2012 - essonne.fr · l’« homo connectus ». Pour autant, l’apparente dextérité de ces adolescents à manipuler smartphones, caméras vidéos et appareils photo

  • Upload
    doanque

  • View
    213

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Arrêt sur image(s) Actes de la rencontre professionnelle culture/jeunesse

Jeudi 12 avril 2012

Salle Jean-Louis BarraultLes CinochesÀ Ris-Orangis

Journée organiséeen collaboration avec

Nous souhaitons remercier les membres du comité de pilotage qui nous ont aidés à préparer cette journée, les intervenants pour la qualité de leur propos, la ville et la MJC de Ris-Orangis, la Communauté d’agglomération d’Évry Centre Essonne et toute l’équipe technique de la salle Jean-Louis Barrault des Cinoches pour leur accueil.

Remerciements

2

Sommaire

Remerciements

4 Avant-propos

5 Ouverture de la journée

9 Introduction

11 L’éducation à l’image face aux cultures numériques

17 Première table rondeComment accompagner le regard : usages, ressources, projets

25 L’Atelier du regardeur : ressource pédagogique numérique en éducation aux images

26 Deuxième table ronde

Les pratiques de l’image : du sténopé au Vjing

Sommaire

3

Partager une réflexion commune, instaurer un dialogue, initier le

développement de projets à destination des jeunes.

Comment accompagner les jeunes dans des pratiques

de l’image dont ils maîtrisent parfaitement les outils ?

Comment apprendre ensemble

à lire, décrire et faire partager ces images photographiques

ou cinématographiques ?

Comment qualifier des ateliers de pratique artistique ?

Dans le cadre de ses missions d’animation du territoire et de développement des publics, la Direction de la Culture du Conseil général de l’Essonne organise tous les ans une journée de rencontre professionnelle entre les acteurs de la culture et les professionnels du social.

Inscrite au plan d’actions des Engagements du Conseil général pour la jeunesse voté en décembre 2011, la 3e journée Passerelles « Arrêt sur image(s) » a eu lieu le jeudi 12 avril 2012 aux Cinoches (salle Jean- Louis Barrault) de Ris-Orangis. Elle était consacrée aux pratiques culturelles des jeunes avec un focus particulier sur l’image (fixe et animée) et le rapport des jeunes à celle-ci.

Organisée en collaboration avec le Centre de Ressources Politique de la Ville en Essonne, cette rencontre a ainsi réuni des professionnels du social, de la jeunesse et de la culture avec pour but de partager une réflexion commune, d’instaurer un dialogue et d’initier le développement de projets à destination des jeunes.

Dès lors, comment accompagner les jeunes dans des pratiques de l’image dont ils maîtrisent parfaitement les outils ? Comment apprendre ensemble à lire, décrire et faire partager ces images photographiques ou cinématographiques ? Comment qualifier des ateliers de pratique artistique ?

Un comité de pilotage, réunissant les différents services concernés, a préparé le contenu de cette rencontre qui articulait réflexion théorique, échanges d’expériences lors de tables rondes et partage de moments artistiques (diaporama, court-métrage…) avec, en clôture, un ciné-concert de l’ensemble Anytia (ensemble orchestral de sound-painting). La journée a été modérée par Wilfried JUDE, réalisateur, intervenant artistique, ex-coordinateur de l’opération « Passeurs d’images » en Région Centre.

Avant-propos

4

Ouverture de la journée

Avant-propos

Denis DECLERCK

Directeur de l’action culturelle à la Communauté d’agglomération Évry Centre Essonne représentant Manuel Valls, Président de la CAECE et Député-maire d’Évry

Bonjour à tous, je vous accueille ce matin au nom de Manuel Valls, notre Président, et de Denis Cerisy, Vice-président chargé du développement culturel, retenus tous deux par d’autres obligations.

Je vous souhaite la bienvenue à Ris-Orangis, dans cette salle Jean-Louis Barrault, communément nommée « salle de la Nationale 7 » qui est l’une des 3 salles de cinéma gérées par le Centre Culturel Robert Desnos.

Le Centre Robert Desnos est lui-même l’un des nombreux établissements rattachés à la direction de la culture de l’agglomération d’Évry Centre Essonne qui compte un réseau de 8 médiathèques et de 5 conservatoires, 5 salles de spectacle offrant des jauges de 250 à 2 500 places, des ateliers d’art plastique et des salles de répétition pour les musiques actuelles. Forte de cette richesse, notre agglomération est porteuse d’une ambition culturelle qui s’affirme autour de trois grandes priorités : l’éducation, la diversité et l’innovation.

Nous avons travaillé pendant près d’une année avec les élus et les services de l’Agglomération et des Villes ainsi qu’avec l’ensemble des acteurs culturels du territoire à définir notre stratégie de développement culturel. Celle-ci fait désormais l’objet d’un « Schéma de référence pour le développement culturel d’Évry Centre Essonne » qui a été adopté le 14 novembre dernier à l’unanimité des 57 conseillers de notre Communauté d’Agglomération.

J’imagine aisément que la première priorité de notre projet culturel, l’éducation, retiendra particulièrement votre attention aujourd’hui. Cette priorité doit se traduire par des actions concrètes de médiation en direction de tous les publics. Je vous souhaite une très bonne journée de travail, en espérant que de fructueux liens professionnels pourront se tisser entre tous les participants.

Ouverture de la journée

5

Évelyne BOUZZINE

Directrice du Centre de Ressources Politique de la Ville en Essonne, représentant Romain Colas, Président du Centre de Ressources Politique de la Ville en Essonne, Président délégué du Conseil général de l’Essonne en charge de la cohésion sociale et urbaine.

Monsieur le Président, Monsieur le Vice-président, Mesdames, Messieurs,

Il me revient la tâche de remplacer Romain Colas, président du CRPVE, qu’une obligation empêche d’être parmi nous et qui vous prie de bien vouloir excuser son absence.

Le Centre de Ressources Politique de la Ville en Essonne est heureux d’avoir participé à l’organisation de cette journée Passerelles consacrée aux pratiques numériques des jeunes, et notamment des jeunes habitants des quartiers prioritaires. Les difficultés d’accès à l’emploi que rencontrent ces jeunes des quartiers en politique de la Ville sont considérables, le taux de chômage de la jeunesse s’élève à 45% tandis que le décrochage scolaire est désormais identifié comme une problématique sociale pénalisante, une hypothèque sur leur avenir. Quant à leur bien-être, les situations de renoncement à la santé deviennent fréquentes.

Cet état des lieux succinct révèle donc d’importants écarts entre les jeunesses selon leur milieu social. Mais ce n’est pas parce que les temps sont difficiles et que ces quartiers ont à faire face à une crise du logement et de l’emploi aiguë que l’accès à la culture et en particulier l’alphabétisation numérique de la jeunesse doivent passer au second plan et attendre des jours meilleurs, l’art n’étant pas une discipline périphérique.

En raison des possibilités créatrices qu’elles offrent et qu’elles peuvent engendrer, les technologies numériques devraient bénéficier d’une attention particulière. Ces jeunes sont de grands utilisateurs de nouvelles technologies de l’information et de la communication, les « NTIC ». Ils se nourrissent autant que les autres du flot d’images et de sons qui sollicitent et distraient en permanence l’attention de l’« homo connectus ».

Pour autant, l’apparente dextérité de ces adolescents à manipuler smartphones, caméras vidéos et appareils photo ne doit pas laisser penser qu’ils seraient tous des utilisateurs avertis auxquels les adultes n’auraient rien à apprendre.

Les études pointent au contraire un déficit de compréhension et de verbalisation plus important que chez les jeunes issus de milieux favorisés.

6

Avec un capital scolaire et culturel en général moindre, ils n’ont bien souvent pas la possibilité de s’appuyer sur leur famille. Ils doivent donc apprendre par eux-mêmes ce qui peut être montré ou non, filmé ou non, communiqué ou non.

Les technologies numériques, en particulier celles de l’image, devraient, à notre sens, bénéficier d’une attention privilégiée dans les quartiers prioritaires.

L’ère numérique, en général, et l’image numérique nécessitent une alphabétisation critique et créatrice de la jeunesse. L’« e-inclusion » doit se concrétiser par la capacité à créer pour analyser et utiliser toute proposition numérique, quelle que soit sa sphère d’application : sociabilité, travail, loisirs, arts, relations humaines...

Ces pratiques numériques interpellent aujourd’hui les professionnels du social, de la jeunesse et de la culture exerçant, entre autres, dans les quartiers en politique de la Ville auxquels se posent les questions suivantes : « Comment accompagner les jeunes qu’ils encadrent dans des pratiques de l’image ? Comment leur apprendre à lire, décrypter ces flux et faire partager ces images photographiques ou cinématographiques ? Comment reconnaître la créativité des jeunes dans la pratique de l’image ? Comment anticiper les risques d’addiction qui alertent parents et éducateurs ? »

Voilà quelques questions que nous aborderons lors de cette journée Passerelles « Arrêt sur image(s) » qu’organise aujourd’hui le Conseil général de l’Essonne, avec la collaboration du CRPVE. Son but premier étant de permettre aux professionnels du social, de la jeunesse et de la culture de partager une réflexion commune, d’instaurer un dialogue et d’initier le développement de projets insufflés par des jeunes des territoires en politique de la Ville.

Michel POUZOL

Vice-président du Conseil général de l’Essonne en charge de la culture, du sport, de la vie associative et de la coopération décentralisée

C’est un plaisir pour moi d’ouvrir cette journée partenariale avec le Centre de Ressources Politique de la Ville en Essonne, cher à mon cœur puisque j’ai eu l’honneur de le présider durant trois ans. Les chantiers qui s’y sont créés l’ont été dans l’enthousiasme et une bonne collaboration.

Dans le cadre de ses missions d’animation du territoire et de développement des publics, la Direction de la Culture du Conseil général organise chaque année une journée Passerelles, réunissant des professionnels de la culture et du social.

7

« Comment accompagner les jeunes qu’ils encadrent dans des pratiques de l’image ?

Comment leur apprendre à lire, décrypter ces flux et faire partager ces images photographiques ou cinématographiques ?

Comment reconnaître la créativité des jeunes dans la pratique de l’image ?

Comment anticiper les risques d’addiction qui alertent parents et éducateurs ? »

Dans le cadre du plan d’actions des Engagements pour la jeunesse en Essonne, voté en décembre 2011, le Conseil général a décidé de consacrer cette rencontre professionnelle aux pratiques culturelles des jeunes et plus particulièrement aux pratiques de l’image.

Aujourd’hui, les supports d’images se sont multipliés de façon exponentielle. Il peut être surprenant, voire agaçant, de voir les jeunes passer d’un écran à l’autre sans discontinuité, dans un flot d’images à la fois contradictoires et complémentaires.

Il s’agit d’une approche nouvelle de l’image et de la communication. Ce flot continu et massif peut sembler problématique. Quelle est notre position à nous qui devons éduquer les jeunes ? Comment l’appréhender ?

Il y a quelques années, Francis Ford Coppola annonçait que le prochain chef-d’œuvre du cinéma serait réalisé par une petite fille de 12 ans au fin fond de l’Oklahoma. Cette prédiction était déjà révélatrice d’une tendance contemporaine répandue à présent qui voit les jeunes réinventer l’image et les manières de l’utiliser.

Face à ce mouvement et à cette capacité des jeunes à se connecter à ces écrans multiples, à digérer plus ou moins bien ce flot d’images, quelle est notre position en tant que pédagogues ? La révolution technologique que nous vivons transforme le rapport de ces jeunes avec le monde, l’éducation, l’apprentissage. Toutefois, ces bouleversements ne concernent pas seulement la jeunesse. Ils s’imposent aussi aux professionnels et aux éducateurs. La question de la transmission de savoirs est désormais assortie de nouveaux enjeux.

Nous savons tous que les images peuvent être sidérantes, dans tous les sens du terme. Nous devrons nous interroger sur le sens d’une image alors que chacun sait qu’elle sera presque immédiatement chassée par une autre.

Toutes ces questions ont contribué à la construction du programme de cette journée. La présence de professionnels aux métiers très divers est une réussite.

À travers les interventions et projections proposées aujourd’hui, nous commencerons à travailler sur l’élaboration d’un cadre commun de référence, de dialogue entre acteurs du territoire et professionnels de l’image.

Le Conseil général a souhaité que la Direction de la Culture s’empare de ce sujet de l’image. Toutefois, nous ne ferons rien seuls mais œuvrerons avec les partenaires que vous êtes.

La culture participant de l’émancipation des personnes, nous ferons de cette éducation aux images une priorité de la politique du département.

8

Introduction

Face à ce mouvement et à cette capacité des jeunes

à se connecter à ces écrans multiples, à digérer plus ou

moins bien ce flot d’images, quelle est notre position en tant

que pédagogues ?

La révolution technologique que nous vivons transforme

le rapport de ces jeunes avec le monde, l’éducation,

l’apprentissage.

Toutefois, ces bouleversements ne concernent pas seulement

la jeunesse. Ils s’imposent aussi aux professionnels et aux

éducateurs. La question de la transmission de savoirs est

désormais assortie de nouveaux enjeux.

7 milliards d’images sont partagées chaque mois sur Facebook, entre 500 et 800 milliards de photographies ont circulé sur la toile en 2011…

Julie CORTEVILLE

Conservatrice en chef du musée français de la Photographie

Le musée français de la Photographie s’intéresse plus particulièrement aux usages sociaux de la photographie. Pourquoi et comment faisons-nous des photos ? Quelle place la photographie occupe-t-elle dans notre société (information, média, publicité, sciences…) ? En quoi les nouvelles technologies modifient-elles l’approche photographique ? Nous avons justement choisi de montrer l’œuvre de Claudia Sola, une jeune artiste hollandaise, « Being there », récemment acquise par le musée. Cette vidéo dérangeante reflète et analyse les images qui circulent sur Internet, auxquelles les jeunes ont accès et qu’ils peuvent être amenés à regarder. Cette œuvre nous a semblé à la fois difficile et intéressante parce qu’elle interroge la photographie numérique qui circule en nombre sur internet : 7 milliards d’images sont partagées chaque mois sur Facebook, entre 500 et 800 milliards de photographies ont circulé sur la toile en 2011…

Réalisée entre 2007 et 2009, elle a été présentée lors des Rencontres d’Arles de 2011, dans le cadre de l’exposition expérimentale « From Here On » (« À partir de maintenant... »). Cette exposition montre comment les artistes s’approprient la matière disponible sur le net et interprètent ce gisement d’images. Il s’agit d’un fort courant de la photographie aujourd’hui qui interpelle cette masse d’images existantes. Marcel Duchamp avait lui aussi recyclé des objets de la vie quotidienne. Le détournement et la réappropriation des objets du quotidien ne sont donc pas nouveaux.

Un spécialiste de la photographie, Quentin Bajac, compare cette déferlante d’images à l’arrivée de l’eau et de l’électricité dans les immeubles. Elle bouleverse nos habitudes visuelles et modifie d’autant notre rapport aux images et au réel.

Encore une fois, le montage de Claudia Sola est réalisé essentiellement à partir d’images récupérées sur Internet. Cette œuvre dense soulève d’innombrables questions. Elle interroge presque tous les champs de la photographie tels que la famille, les vacances, la cuisine, les voyages, les paysages. En outre, elle montre l’évolution de la représentation de soi dans la photographie, qui s’est radicalement transformée au cours de ces dernières années. La question de l’interculturalité est également présente, à travers la diversité des représentations religieuses et l’uniformité des codes.

L’enjeu symbolique de cette œuvre est très vif, car elle montre un monde à recoudre, à panser (et à penser), à soigner. L’introspection autour du corps est très présente : aujourd’hui, on passe simultanément du trop visible (le sexe, les cicatrices) à l’invisible (la radiographie, le squelette, les cellules).

9

Introduction

L’enjeu symbolique de cette œuvre est très vif, car elle montre un monde à recoudre, à panser (et à penser), à soigner. L’introspection autour du corps est très présente : aujourd’hui, on passe simultanément du trop visible (le sexe, les cicatrices) à l’invisible (la radiographie, le squelette, les cellules).

Claudia Sola, Being There, vidéo, 2008 (capture d’écran). Collections du musée français de la Photographie.

Si rien ne se révèle littéralement nouveau dans cette circulation d’images, c’est toutefois l’immédiateté, le flux constant et la masse qui posent question. Notre rôle d’adulte, dans ce contexte consiste bien à accompagner le processus de sélection et d’analyse de l’image. Cette disponibilité d’images ne résout, en effet, en rien la question du désir de savoir. Nous, adultes, avons malgré tout des messages à transmettre aux jeunes.

Projection de la vidéo de Claudia Sola « Being there »

10

L’éducation à l’image face aux cultures numériques

Claudia Sola, Being There, vidéo, 2008 (captures d’écran). Collections du musée français

de la Photographie.

Jean-Marc GÉNUITE

Conseiller d’éducation à l’image à « Kyrnea International » (coordination nationale du dispositif « Passeurs d’images ») et critique de cinéma pour la revue « Tausend Augen »

Je souhaite tout d’abord préciser que la présente intervention ne vise à énoncer aucun « discours de vérité » sur les actions et expériences pédagogiques généralement regroupées sous l’appellation générique d’Éducation à l’image.

Je tenterais plutôt d’y interroger la place, le rôle et les conditions d’existence d’une démarche éducative confrontée aux productions visuelles et audiovisuelles émergentes, dont l’essor accompagne le développement de ce que l’on nomme le Web collaboratif, Web social ou Web 2.0. Engendrant un véritable « tournant culturel », le Web 2.0 a significativement affecté l’ordre des pratiques et des usages et favorisé l’avènement de nouveaux moyens d’expression et de nouvelles formes de « récits » audiovisuels.

En offrant à chaque citoyen ordinaire la possibilité de s’investir dans un « devenir média » (Olivier Blondeau) par la production et la diffusion de ses propres informations, images et autres « réalisations » audiovisuelles, le Web collaboratif participe également de ce que le chercheur Milad Doueihi pourrait nommer une « grande conversion numérique ».

Le contexte socioculturel qui s’est imposé à l’ère numérique provoque ainsi un phénomène d’extension des domaines de consommation, de production et de diffusion d’images, phénomène de prolifération qui ne peut évidemment rester sans incidences sur le statut, la fonction, les perspectives, pour ne pas dire la légitimité de l’éducation à l’image et de ses acteurs.

Comme l’incarnation d’un signe des temps, les dernières Rencontres d’Arles (été 2011) proposèrent au sein de l’Atelier de mécanique, une singulière exposition photographique au titre énigmatique de « From Here On » (« À partir de maintenant... ») que les cinq commissaires avaient tenu à accompagner d’un court Manifeste (1).

11

L’éducation à l’image face aux cultures numériques

(1) : « Maintenant, nous sommes une espèce d’éditeurs. Tous, nous recyclons, nous faisons des copier-coller, nous téléchargeons et remixons. Nous pouvons tout faire faire aux images. Tout ce dont nous avons besoin, c’est d’un œil, un cerveau, un appareil photo, un téléphone, un ordinateur, un scanner, un point de vue. Et, lorsque nous n’éditons pas, nous créons. Nous créons plus que jamais, parce que nos ressources sont illimitées et les possibilités infinies. L’Internet est plein d’inspirations, du profond, du beau, du dérangeant, du ridicule, du trivial, du vernaculaire et de l’intime. Nos petits appareils de rien du tout capturent la lumière la plus vive comme l’obscurité la plus opaque. Ce potentiel technologique a des répercussions esthétiques. Il change l’idée que nous nous faisons de la création, il en résulte des travaux qui ressemblent à des jeux, qui transforment l’ancien en nouveau, réévaluent le banal. Des travaux qui ont une histoire, mais s’inscrivent pleinement dans le présent. Nous voulons donner à ces travaux un nouveau statut. Car les choses seront différentes, à partir de maintenant... »

Ce manifeste est signé par les cinq commissaires de l’exposition éponyme présentée aux Ren-contres Internationales de la Photographie d’Arles 2011 : Clément Chéroux, Joan Fontcuberta, Erik Kessels, Martin Parr et Joachim Schmid.

Survenant à une époque où la philosophie du Web 2.0 s’affirme comme un paradigme dominant au sein de la galaxie numérique, un tel événement culturel semble postuler que nous sommes parvenus à l’aube d’une ère nouvelle où les rapports anthropologiques à la fabrique des images connaîtraient une situation inédite.

Cette hypothèse rencontre la réflexion initiée par André Gunthert autour des « cultures visuelles » lorsqu’il rappelle par exemple qu’à « l’heure numérique » se réalise l’utopie clairvoyante imaginée dès 1928 par le poète Paul Valéry. Dans un court texte tourné vers « La conquête de l’Ubiquité », l’académicien prophétisait effectivement l’avènement d’une révolution sociétale semblable à celle que nous vivons actuellement : « Comme l’eau, comme le gaz, comme le courant électrique viennent de loin dans nos demeures répondre à nos besoins moyennant un effort quasi nul, ainsi serons-nous alimentés d’images visuelles ou auditives, naissant et s’évanouissant au moindre geste, presque à un signe » (2).

Avec Internet, le Web 2.0 et l’émergence d’une « culture des usages », l’image est indéniablement devenue un bien de consommation courante comme l’imaginait Paul Valéry en son temps et le geste qui consiste à « faire » une image, voire « à faire » image compte parmi les us et coutumes et habitus de l’homme des sociétés modernes.

En donnant corps à la prophétie lancée par le poète sétois, la manifestation photographique « À partir de maintenant... » exposait et interprétait, en le détournant, l’environnement du « tout à l’image » (Serge Daney) au sein duquel nous évoluons quotidiennement. Une trentaine d’artistes avaient en effet été conviés à réaliser des œuvres et des installations photographiques, en s’appropriant un magma « primordial » hétérogène constitué d’images puisées dans les bases de données offertes par des sites de partage comme Flickr ou le moteur de recherche Google Images. De l’anonymat de ces bases de données, les artistes invités en Arles avaient extrait de multiples clichés photographiques privés d’identités propres, chacun d’entre eux pouvant d’ailleurs parfaitement se définir à l’aide du célèbre aphorisme godardien : « Ce n’est pas une image juste, juste une image ».

L’exposition mettait ainsi en scène les gestes d’appropriation au cœur des usages culturels de l’ère numérique, elle offrait une mise en abyme de ses pratiques de détournement, interrogeait le statut même des images qui composent la galaxie numérique et problématisait la notion et le statut d’auteur. Elle exposait, au sens littéral, différentes manières de continuer à penser l’acte de création photographique face à la profusion des images disponibles, et elle le faisait dans une conjoncture culturelle qui résonne de plus en plus d’un « tous photographes ! » pour reprendre le titre d’une exposition proposée en 2007 au musée de l’Élysée de Lausanne (3).

12

(2) : Paul Valéry cité par André Gunthert dans « L’image partagée. Comment Internet a changé l’économie des images ».(3) : « Tous photographes ! La mutation de la photographie amateur à l’ère numérique ».

Plate forme de socialisation, jeux de rôle en ligne, territoires virtuels, webdocumentaires, web-séries, machinimas…

L’inflation exponentielle des images produites à l’ère des cultures numériques et de la globalisation culturelle incarne une rupture d’ordre anthropologique, un basculement de civilisation et nous contraint à repenser les enjeux, les perspectives, sinon la fonction de l’éducation à l’image.

Comme en témoignent la manifestation « From Here On » et le Manifeste qui lui est associé, le développement du Web 2.0 s’accompagne d’une prolifération effrénée et incontrôlable d’images produites et mises en circulation qui informent, voire gouvernent nos comportements culturels et sociaux.

Nous vivons effectivement au sein de sociétés en réseaux où chacun est susceptible d’être multiplement « connecté » et où le tissu des relations interindividuelles et collectives semble de plus en plus se tramer au sein de ce que le philosophe Vilém Flusser appellerait un « scénario planétaire d’images » (4).

Mouvement caractéristique de la société des technologies de l’information et de la communication, l’inflation exponentielle des images produites à l’ère des cultures numériques et de la globalisation culturelle incarne une rupture d’ordre anthropologique, un basculement de civilisation et nous contraint à repenser les enjeux, les perspectives, sinon la fonction de l’éducation à l’image.

En effet, depuis une décennie et l’avènement du Web 2.0, la « révolution culturelle » numérique et son mouvement inexorable ont engendré de nouvelles formes d’expressions audiovisuelles voire de nouvelles perspectives d’écritures fictionnelles dont les acteurs de l’éducation à l’image ne peuvent ignorer l’importance. À titre d’exemples, nous pourrions citer :

• Second life, plateforme de socialisation qui a eu notamment un rôle de véritable lieu d’exposition pour des artistes contemporains tels que Chris Marker, et qui est moins fréquentée aujourd’hui ;

• les jeux de rôles en ligne tels que World of Warcraft, où les joueurs ont des missions et se constituent des avatars ;

• un grand nombre de territoires virtuels – territoires émergents – dont certains plutôt destinés aux enfants ;

• le monde du webdocumentaire avec, entre autres, les plateformes d’Arte.fr et du Monde.fr ;

• les web-séries, comme The Guild qui met en abyme une réflexion sur la pratique du joueur de World of Warcraft ;

• les machinimas, courts métrages élaborés à partir de mondes virtuels et de jeux vidéo.

Ces exemples témoignent d’une profonde mutation des pratiques et des usages culturels que ces territoires émergents provoquent, accompagnent et dont ils découlent également.

« Phénomène » social particulièrement prégnant chez les adolescents « immergés » depuis leur naissance au sein d’un environnement numérique, une telle évolution nous oblige à reconsidérer la place et la fonction des pédagogues et autres médiateurs culturels impliqués dans le domaine de l’éducation à l’image.

13

Le développement du Web 2.0 s’accompagne d’une prolifération effrénée et incontrôlable d’images produites et mises en circulation qui informent, voire gouvernent nos comportements culturels et sociaux.

(4) : Vilém Flusser in « Pour une philosophie de la photographie ».

Pour éviter d’être totalement « court-circuité » par les pratiques audiovisuelles de la « génération numérique » et d’adopter la position de l’« observateur lointain » face aux usages culturels qui ont cours, chacun doit en expérimenter les diverses incarnations. Dans le contexte numérique contemporain, il est devenu primordial pour les acteurs de l’éducation à l’image d’acquérir des connaissances et compétences culturelles consubstantielles aux univers numériques. Seule une telle démarche permettra d’éviter que le fossé ne se creuse davantage entre la « réalité » des pratiques culturelles adolescentes et les activités pédagogiques qui sont parfois proposées aux « jeunes ».

En offrant aux différents acteurs de l’éducation à l’image la possibilité de découvrir de nouveaux territoires audiovisuels et de renouveler leurs perspectives éducatives, certaines formations portant sur les cultures numériques pourraient ainsi favoriser une meilleure compréhension entre ceux que le chercheur américain Marc Prensky nomme les « natifs numériques » ou « autochtones numériques » et les « immigrants numériques » qui les accompagnent.

Elles pourraient faciliter l’émergence de politiques de la transmission mieux adaptées à l’environnement culturel au sein duquel nous évoluons quotidiennement.

Enfin, ces formations permettraient aux médiateurs culturels de l’éducation à l’image de plus facilement répondre à ce que le sociologue Olivier Donnat a mis en évidence dans l’enquête qu’il a menée sur « les pratiques culturelles des Français à l’ère numérique » (2008) et qui réside dans la nécessité de passer d’une « politique des publics » à une « politique des usages » pour penser la complexité des pratiques culturelles contemporaines.

Wilfried JUDEEn tant que professionnel socioculturel, comment ne pas être soumis à une inquiétude, en constatant que les adolescents adoptent des pratiques qui nous échappent ? Comment réinventer ces pratiques avec les publics avec lesquels nous travaillons ?

Avez-vous des questions et des réactions au sujet des installations que vous a présentées Jean-Marc Génuite ?

De la salleQu’est-ce qu’un Serious Game ?

Jean-Marc GÉNUITELes Serious Games sont des jeux imaginés dans le cadre d’activités pédagogiques. Ils constituent des socles de transmission, des territoires permettant de mettre en place des itinéraires. Il s’agit de territoires de simulation qui peuvent être utilisés dans des cadres professionnels, dans le domaine médical par exemple, afin de simuler certaines actions. Aux États-unis, certains Serious Games permettent à des

14

Pour éviter d’être totalement « court-circuité » par les

pratiques audiovisuelles de la « génération numérique » et d’adopter la position de

l’« observateur lointain » face aux usages culturels

qui ont cours, chacun doit en expérimenter les

diverses incarnations.

Seule une telle démarche permettra d’éviter que le fossé ne se creuse davantage entre

la « réalité » des pratiques culturelles adolescentes et les

activités pédagogiques qui sont parfois proposées aux « jeunes ».

internes en médecine de simuler des actes opératoires. Ces jeux sont parfois portés par des velléités politiques. Un collectif italien nommé MolleIndustria a réalisé des jeux invitant le joueur à expérimenter des postures sociales, des rapports hiérarchiques, des rapports de force. L’un d’eux invite par exemple le joueur à occuper toutes les positions hiérarchiques dans un restaurant MacDonald’s.

Le jeu Vigilance 1.0 de Martin Le Chevallier a été exposé dans une galerie d’art. Le joueur est invité à occuper la place de sentinelle de l’ordre social. Il devient un point d’observation omnipotent et contrôle les espaces urbains selon le principe de la « Tolérance 0 ».

De la salleDans les exemples que vous présentez, il semble que les images reproduisent toujours une société en guerre, une société sous contrôle. L’image peut-elle être utilisée également dans des jeux sociaux évoquant une autre forme de vivre ensemble, des idéologies de rêve ?

Jean-Marc GÉNUITELe jeu Vigilance 1.0 reprend des théories de Michel Foucault sur la surveillance. Second life, quant à lui, a incarné de multiples formes de vivre ensemble : les universités ont ouvert des antennes, des concerts ont eu lieu, etc. Les grandes enseignes ont compris qu’elles pouvaient investir sur ces territoires mais ont conclu qu’elles y gagneraient peu. Ce sont également des lieux d’expérimentations identitaires.

C’est dans ce type de jeu qu’intervient la figure de l’avatar. Chacun est habité par de multiples possibilités fictionnelles : personne n’est doté d’une identité monolithique. Dans les mondes virtuels, les individus expérimentent leurs possibilités identitaires et fictionnelles.

De la salleIl me semble intéressant, pour les professionnels qui accompagnent les jeunes, d’évoquer le devenir citoyen par les médias. Je pense notamment au « Printemps arabe » et au rôle qu’y ont joué les réseaux et Internet.

Jean-Marc GÉNUITELorsque Olivier Blondeau emploie l’expression « devenir media », il entend en fait : « ne hais pas les médias, deviens les médias ». Il s’agit de produire des récits alternatifs afin de contrecarrer ceux qui sont considérés comme relevant du discours de la domination.

Wilfried JUDEIl s’agit également, comme le soulignait un intervenant dans le public, de créer de l’utopie.

15

Lorsque Olivier Blondeau emploie l’expression « devenir media », il entend en fait : « ne hais pas les médias, deviens les médias ». Il s’agit de produire des récits alternatifs afin de contrecarrer ceux qui sont considérés comme relevant du discours de la domination.

Jean-Marc GÉNUITEGrand nombre des lignes de partage qui existaient avant l’arrivée du web 2.0 en 2003 sont en train de tomber. Il faut accepter de renier cette hiérarchie entre culture légitime et culture Internet.

Jusqu’à présent, il existait une vision très verticale de la transmission. Or il convient de penser non plus aux publics auxquels il s’agirait d’apporter un savoir infaillible, mais de penser dans une logique horizontale, en termes d’usages. La dichotomie entre culture de masse et culture légitime doit disparaître. La culture est l’ensemble des représentations d’une société : « La culture va de Goya à Chantal Goya » !

J’ai eu l’occasion de mettre en place des formations autour des cultures numériques pour les enseignants, les éducateurs, etc. Celles-ci étaient gratuites. À présent, certaines entreprises privées proposent des formations très chères. Nous devons veiller à ne pas nous laisser déposséder par ces acteurs privés.

De la salleLa formidable installation du Foam (5) révèle un fort besoin de revenir au monde physique. Je pense notamment aux apéritifs géants organisés dans les villes via les réseaux sociaux. Il existe un besoin de réincarner les actions menées virtuellement. Comment prendre en compte ce besoin dans un contexte éducatif ?

Jean-Marc GÉNUITEIl est délicat de répondre à cette question de manière abstraite, hors contexte. Lors d’une rencontre avec des adolescents, une intervention trop préparée ne fonctionne pas. Il faut rester ouvert à l’invention et à l’improvisation.

De la salleUn collègue travaillant dans un musée a mis en place des dispositifs numériques car il s’agit d’une injonction commune et pressante. Mais il a également organisé des ateliers sur le bois, comme si ce besoin physique subsistait malgré tout.

Jean-Marc GÉNUITEL’essentiel est de s’attacher à mettre en perspective la question du sens.

16

Il faut accepter de renier cette hiérarchie entre culture légitime

et culture Internet.

Jusqu’à présent, il existait une vision très verticale de la

transmission. Or il convient de penser non plus aux publics

auxquels il s’agirait d’apporter un savoir infaillible, mais de

penser dans une logique horizontale, en termes d’usages.

La dichotomie entre culture de masse et culture légitime

doit disparaître. La culture est l’ensemble des représentations d’une société : « La culture va

de Goya à Chantal Goya » !

Première table rondeComment accompagner le regard : usages, ressources, projets

(5) : Musée dédié à la photographie à Amsterdam.

Pauline CHASSERIAU, responsable du département éducation à l’image a l’ACAP-Pôle Image Picardie, Lorenzo CIESCO, directeur des « Cinoches », Éric DALIZON, délégué général de l’association Cinessonne, Aurélia COINTRE-MAZNI, vidéothécaire à la Bibliothèque départementale de l’Essonne, Laurent LALIBERTÉ, responsable du développement culturel au musée français de la Photographie

Pauline CHASSERIAUL’ACAP est une structure d’action culturelle cinéma, qui intervient dans les milieux scolaires et hors temps scolaires. Il existe 14 pôles en France.

Wilfried JUDEPourquoi les pôles ont-ils élaboré une réflexion autour de ces thèmes ?

Pauline CHASSERIAUNous nous trouvons dans un environnement qui a largement évolué. Les dispositifs sur lesquels nous travaillons ont 15 ans. Il était sain de les réinterroger à l’aune de nouvelles problématiques. En outre, nous étions nombreux à être lassés d’un discours présentant les jeunes comme naïfs face à l’image. Nous souhaitions élaborer un discours plus objectif.

En quoi consistent ces nouvelles pratiques ? Afin de mieux caractériser l’environnement numérique des jeunes, voici un résumé des grands thèmes qui le constituent :

• La question de la montée en puissance de la culture des écransOlivier Donnat a effectué une étude pour le Ministère de la Culture en 2008 mettant en évidence l’élargissement de l’utilisation des écrans et d’Internet. Le temps passé devant les écrans était alors de 31 heures. Ces éléments sont corroborés par une récente enquête de l’INSEE, consacrée à la manière dont les Français utilisent leur temps. La moitié du temps libre est consacrée à la télévision, sachant que les 15-24 ans ont en partie remplacé la télévision par l’ordinateur.

• Le développement des pratiques amateursOlivier Donnat affirmait, dans son étude, qu’Internet et les objets numériques ont transformé nos usages et nos pratiques de la photographie et de la vidéo. En 2008, 30 % des Français avaient réalisé une vidéo.

• Les contenus et les images Nous disposons d’un écran unique pour regarder toutes sortes de contenus. L’écran devient espace de travail, d’information, de loisirs, etc. Tout y est présenté au même niveau. Le statut de ces images n’est pas toujours très clair. En outre, les images sont de plus en plus hybrides (la publicité s’inspirant du cinéma, etc.).

17

Première table rondeComment accompagner le regard : usages, ressources, projets

• Le rapport au tempsL’accès à une multitude de contenus se généralise mais nous n’avons pas le temps de tout accomplir. La pratique du multitasking nous conduit à nous interroger sur notre rapport au temps. Si trois minutes suffisent pour télécharger Proust, combien de temps prenons-nous pour le lire ? Combien de temps accordons-nous, de manière générale, à l’approfondissement ?

Ces éléments permettent d’affirmer que nous vivons une grande révolution interrogeant notre rapport au monde et aux autres. Ces nouvelles pratiques impactent nos actions, nos pratiques, nos publics.

Certaines personnes parmi les acteurs de l’éducation artistique et à l’image affirment que ces questions ne sont pas les nôtres. Pourtant, il est primordial d’accompagner les jeunes afin qu’ils puissent comprendre qui parle à travers les images, à partir de quel point de vue et quelle représentation du monde celles-ci donnent à voir.

Comment ne pas tomber dans le piège des préjugés passéistes ou dans l’engouement béni-oui-oui pour ces nouvelles technologies ?

Nous vivons une période passionnante en termes de possibles qui suscite des interrogations sur nos propres projets. Des ateliers expérimentaux sont réalisés sur le Vjing, les machinimas. Ainsi, nous pouvons aborder les questions de cinéma et intéresser le public à la mise en scène des images de manière différente. De plus en plus de structures culturelles se demandent comment travailler avec Facebook, Flickr, etc.

Dans ce contexte, nous devons rester vigilants sur deux points :

• Il ne s’agit pas de faire table rase du passé, mais de trouver le juste équilibre entre la prise en compte de cette révolution et nos pratiques existantes, sans négliger les questionnements fondamentaux qu’elles entraînent sur la temporalité, le point de vue, etc.

• La question de la formation des éducateurs à l’image est centrale : comment identifier les bons partenaires et avec quels moyens ?

Wilfried JUDEÀ travers vos pratiques, vous pouvez également faire de l’autoformation. La salle de cinéma possède encore une utilité dans le cadre de l’éducation aux images : en quoi le travail qui s’y déroule mute-t-il avec les nouvelles formes de projection ?

Lorenzo CIESCOEn tant qu’exploitants de salle, la démarche consistant à aller voir des images partout ailleurs que sur les écrans de cinéma nous interpelle. Nous avons le sentiment que l’écran de cinéma peine à trouver sa place entre toutes les activités qui sont proposées.

18

Il est primordial d’accompagner les jeunes afin qu’ils puissent

comprendre qui parle à travers les images, à partir

de quel point de vue et quelle représentation du monde

celles-ci donnent à voir.

Dans ce contexte, nous devons rester vigilants sur deux points :

• Il ne s’agit pas de faire table rase du passé, mais de trouver le juste équilibre entre la prise

en compte de cette révolution et nos pratiques existantes, sans négliger les questionnements

fondamentaux qu’elles entraînent sur la temporalité, le

point de vue, etc.

• La question de la formation des éducateurs à l’image est

centrale : comment identifier les bons partenaires et avec

quels moyens ?

Le cinéma n’a pas disparu avec l’avènement des nouvelles technologies. Ainsi, nous veillons à ce que les personnes qui s’adressent à nous s’interrogent sur sa place dans le contexte des nouvelles formes d’images.

Nous veillons toujours à ce que la légitimité de la salle de cinéma, dans sa proximité avec les utilisateurs, se maintienne sans rupture.

Or, le cinéma n’a pas disparu avec l’avènement des nouvelles technologies. Ainsi, nous veillons à ce que les personnes qui s’adressent à nous s’interrogent sur sa place dans le contexte des nouvelles formes d’images.

Nous veillons toujours à ce que la légitimité de la salle de cinéma, dans sa proximité avec les utilisateurs, se maintienne sans rupture. Nous travaillons à assurer cette continuité historique, tout en ouvrant le lieu aux nouvelles pratiques telles que le numérique qui facilite par exemple les projections.

Wilfried JUDELes festivals de cinéma développent également des actions culturelles en direction des publics.

Éric DALIZONLe Festival Européen en Essonne s’appuie sur un collectif de programmateurs qui prennent le temps de s’interroger sur leurs pratiques. L’arrivée de la projection numérique a favorisé ces questionnements. La dynamique du réseau permet une originalité dans la programmation. Par exemple, en quoi les liens possibles entre séries télévisées et cinéma sont-ils historiquement pertinents ? Le festival pourrait constituer un moment où des connexions de cet ordre seraient proposées.

Nous nous efforçons de valoriser les connexions entre les œuvres, en partenariat avec le public, et notamment le public jeune. Cinessonne est par exemple porteuse du dispositif « Collège au cinéma ». Les lycéens et collégiens sont sollicités dans le cadre du festival pour la programmation des courts-métrages. Nous travaillons sur la formation du public et nous interrogeons sur ce qui constitue un spectateur, sa pensée.

Nous souhaitons créer des connexions tout au long de l’année, qui participent de cette éducation à l’image, en révélant, au sein de ce flux, le cinéma.

Je tiens à rappeler que la première des ressources est humaine : les équipes des salles, les professionnels du métier sont au cœur de ces démarches. La technique n’est pas le seul domaine sollicité : l’action culturelle est primordiale et la salle reste un lieu vivant.

Nous nous demandons également comment articuler les moments où les jeunes sont présents dans nos salles à travers ces dispositifs, et ceux où ils se trouvent en dehors.

Wilfried JUDEL’autre ressource fondamentale est la bibliothèque-vidéothèque. Celle de l’Essonne met en place une veille Internet.

19

Aurélia COINTRE-MAZNIAvant toute chose, je souhaiterais préciser que certaines zones de l’Essonne ne sont pas desservies par les cinémas. Les bibliothèques peuvent être un interlocuteur privilégié dans ce domaine.

La bibliothèque départementale réalise une veille autour du thème de l’éducation aux images et l’éveil du regard sur scoop.it. Ce service permet de recenser les ressources en ligne (http://www.scoop.it/t/analyse-de-l-image). Il est possible de trier les sites sélectionnés par grands thèmes grâce à l’onglet Select (Pré-cinéma, ateliers interactifs…). De plus, les internautes peuvent suggérer des sources (onglet suggest).

La bibliothèque départementale de l’Essonne s’adresse aux autres bibliothèques de l’Essonne. Elle ne mène pas d’actions directes auprès du public, mais joue un rôle de centre ressources.

Notre vidéothèque a été créée en 1999. Il y a 13 ans, seules quelques grandes bibliothèques essonniennes avaient une vidéothèque. Aujourd’hui, la bibliothèque départementale possède 21 600 films en DVD et 62 % des bibliothèques essonniennes ont une vidéothèque.

Nos objectifs sont :

Donner accès au cinéma à tous les Essonniens, même dans les plus petites communes.

Donner à voir des films variés de qualité, qui ouvrent des fenêtres sur le monde.

Donner accès aux habitants éloignés des cinémas à des fonds cinéma par le biais de leurs bibliothèques, qui sont des lieux de proximité et de socialisation importants.

Pour cela, nous prêtons des fonds de 150 à 200 DVD aux bibliothèques qui le souhaitent. Nous devons accompagner les bibliothécaires qui sont plutôt des « gens du livre ». Nous formons le réseau à la gestion de la vidéothèque et nous proposons tous les ans des formations, données par un spécialiste du domaine, sur un genre cinématographique, l’actualité cinématographique…

Depuis deux ans, nous avons développé une offre d’animations clé en main autour d’un genre de cinéma, d’un pays ou d’un film (cinéma iranien, « Les images mentent-elles ?», des expositions sur des films du studio Folimage…). Nous prêtons aujourd’hui une trentaine de ces « Ciné en balade » (http://expos91.blogspot.fr/p/cine-en-balade.html). Les affiches sont accompagnées des films en DVD destinés au prêt.

20

La bibliothèque départementale réalise une veille autour du

thème de l’éducation aux images et l’éveil du regard

sur scoop.it.

La bibliothèque départementale possède 21 600 films en DVD

et 62 % des bibliothèques essonniennes ont une vidéothèque.

Visuel de l’exposition « Les images mentent ? Manipuler les images ou

manipuler le public », téléchargeable gratuitement sur

le site « decryptimages.net ».

C’est en situation que l’on invente. Le musée propose une offre clé en main, mais le plus intéressant est ce que l’on met au point lors d’une rencontre faisant intervenir les compétences propres des partenaires et celles des professionnels de la médiation du musée.

Selon les publics ou les acteurs, une co-construction se met en place, liée notamment aux nouvelles pratiques de l’image photographique.

Nous pouvons, par exemple, proposer aux enfants de devenir eux-mêmes des « médiateurs » à partir des collections numérisées du musée.

A charge pour les bibliothèques d’organiser, si elles le souhaitent, dans leur locaux une projection ou avec le cinéma local si elles ont la chance d’en avoir un sur leur commune. Nous venons aussi d’acquérir la malle « Balbu-ciné » qui permet la mise en place d’ateliers interactifs avec des objets du pré-cinéma (thaumatrope, zootrope…).

Wilfried JUDEComment le musée français de la Photographie s’investit-il dans le champ de l’action culturelle ? Comment ouvre-t-il ses portes au personnel socioculturel ?

Laurent LALIBERTÉJe souhaite exprimer le plaisir que l’on éprouve à travailler dans un musée de la photographie aujourd’hui au cœur des bouleversements introduits par le numérique. Le musée français de la Photographie, qui couvre d’immenses domaines, est centré sur les usages sociaux de la photographie. Pourquoi fait-on des images, que nous racontent-elles dans cet éventail des pratiques, artistiques ou amateurs ? Nous sommes très orientés sur l’éducation aux images, à savoir :• la compréhension des conditions de productions techniques, sociales, culturelles de la photographie ;• l’observation de la diffusion et la circulation des images, avec l’imprimé et maintenant les réseaux informatiques qui permettent de les diffuser de manière massive et rapide ;• l’étude de la réception et de l’effet de ces images sur ceux qui les regardent.

Le musée est un lieu de découverte des collections, un lieu d’actions culturelles. Nous sommes également dotés d’un site Internet, instrument de visibilité des collections, certaines n’étant montrées qu’en ligne. Une nouvelle section, l’Atelier du regardeur consiste en un atelier de médiation « virtuel ».

Je reprendrai l’expression de Jean-Marc Génuite à mon compte : c’est en situation que l’on invente. Le musée propose une offre clé en main, mais le plus intéressant est ce que l’on met au point lors d’une rencontre faisant intervenir les compétences propres des partenaires et celles des professionnels de la médiation du musée.

Selon les publics ou les acteurs, une co-construction se met en place, liée notamment aux nouvelles pratiques de l’image photographique. Les outils actuels sont formidables car ils permettent une appropriation culturelle et scientifique démultipliée.

Nous pouvons, par exemple, proposer aux enfants de devenir eux-mêmes des « médiateurs » à partir des collections numérisées du musée. L’accès à des outils techniques puissants (pour le traitement des images, leur présentation…) est incroyablement facilité aujourd’hui. Néanmoins, nous n’oublions pas qu’il existe un pas gigantesque entre la maîtrise technique des outils et la production de sens.

21

Le musée français de la Photographie offre une mise en perspective historique. Nous évoquions tout à l’heure la question des avatars numériques. Historiquement, le musée nous permet de remonter aux daguerréotypes du XIXe siècle, qui révèlent combien les bourgeois se mettaient en scène en photographie, afin de valoriser leur image sociale. Il est intéressant de les observer en regard de la mise en scène de soi sur les réseaux sociaux.

Notre culture visuelle se construit donc également sur des contenus anciens. L’éducation à l’image constitue une multitude de pratiques et de théories mises en œuvre.

Face au flux permanent d’images, l’enjeu pour nous tous reste le temps du regard, le temps accordé à certains objets tels que les photos, les animations, les vidéos, en espérant que la petite grille de lecture critique que l’on se constitue pourra s’appliquer ensuite de manière presque automatique à la masse d’images consommées quotidiennement.

De la salleLes expositions que vous proposez sont-elles aussi à disposition des associations ?

Aurélia COINTRE-MAZNILes malles pédagogiques que nous proposons sont destinées à tous. Les expositions clé en main que nous réalisons peuvent être empruntées par des structures éducatives ou sociales (maisons des solidarités, etc.).

La BDE s’adresse avant tout aux autres bibliothèques, mais si le dispositif s’y prête, elle peut également mettre à disposition ses outils à d’autres structures.

Éric DALIZONNous pouvons compléter les dispositifs que vous proposez avec nos propres malles pédagogiques et l’accompagnement que nous offrons. En effet, l’accompagnement humain reste nécessaire par rapport à nos lieux et nos pratiques.

De la salleJe dirige une école de pratiques amateurs dans le domaine des arts plastiques et visuels. Nous travaillons à la reconquête des publics adolescents, en partant de leurs usages. Nous nous interrogeons entre autres sur la place du téléphone portable et sur la réappropriation des lieux culturels par les jeunes.

Le « Marathon Cinéma » consiste à réaliser un film en plan-séquence en 24 heures. Il se déroulera les 11 et 12 mai prochain au centre commercial d’Evry 2. L’intérêt est de montrer que les téléphones, qui sont tous munis de caméras, peuvent être aussi un outil pour créer de manière plus significative, en prenant du temps. La technique offre ainsi des outils pouvant être utilisés de manière créative.

22

Les malles pédagogiques que nous proposons sont

destinées à tous.

Les expositions clé en main que nous réalisons peuvent être

empruntées par des structures éducatives ou sociales (maisons

des solidarités, etc.).

Wilfried JUDELes pratiques amateurs en ateliers, lorsqu’elles sont valorisées dans la salle de cinéma, acquièrent une place unique, avec un public.

De la salleTravaillant en bibliothèque, je suis souvent surprise que les films empruntés par les enfants soient peu adaptés à leur âge. Peut-être conviendrait-il de transmettre aux parents des listes de films, afin de les orienter dans leurs choix. Je m’étonne de l’absence d’outils de repères de ce genre dans les bibliothèques.

Aurélia COINTRE-MAZNICes démarches peuvent être délicates. Elles dépassent également le rôle de la bibliothèque même. Les parents ont un rôle éducatif à jouer en priorité. Il est certes possible de mettre en place des signalétiques d’âge, mais cela devient plus difficile au niveau de la cotation, etc.

Lorenzo CIESCOPar exemple, nous diffusons Shrek et proposons des animations dans la salle de cinéma. Nous mettons en place des séances spécifiques afin d’éclairer les parents et les enfants qui participent. Le dimanche matin, nous présentons également des grands classiques du cinéma familial. Les parents sont accompagnés dans ce cadre.

Éric DALIZONEn effet, il existe de nombreuses demandes de la part des parents. Nous devons organiser l’offre, l’orienter. C’est une démarche nécessaire par rapport à une demande qui peut être très vaste.

Aurélia COINTRE-MAZNIL’année dernière, nous avions organisé une journée sur l’image et la petite enfance. Une filmographie a été élaborée dans ce cadre. Il faut aussi que les professionnels prennent l’initiative de se l’approprier. Chaque lieu peut élaborer son propre travail de médiation.

De la salleJe suis bibliothécaire et anime un club de lecture d’adolescents. J’ai récemment commencé à proposer des films. Les adolescents garçons sont, dans leur grande majorité, en demande de films de guerre violents. Comment leur montrer ce genre de films ? Et lesquels ?

Wilfried JUDEIl ne faut pas s’interdire de montrer. L’essentiel reste l’accompagnement. Il faut aborder la démystification de la représentation de la guerre, de la peur, etc.

Éric DALIZONLe premier court-métrage que nous vous proposons, The sick boy and the tree, de Paul Jeagger, a été primé par le jury collégien du festival Cinessonne dans le cadre de « Collège au cinéma ».

23

Ce dispositif national, réalisé en collaboration avec le Conseil général, propose un vaste corpus de films très représentatif de l’histoire du cinéma. Un comité de pilotage choisit les films qui seront projetés aux collégiens, selon leur résonance dans l’histoire, entre eux, et dans le monde contemporain.

La question « que montrer aux adolescents ? » s’instaure aussi dans ce genre de dispositif. Ils regardent cinq heures de films, de courts-métrages, puis débattent entre eux.

Le second film, Casus Belli, de Georgios Zois, a reçu le prix du public, mais fait partie de ceux que les collégiens ont également pu voir.

Projection des deux courts-métrages évoqués ci-dessus.

24

L’Atelier du regardeur : ressource pédagogique numérique en éducation aux images

Casus belli, de Georgio ZOIS, Grèce, 2010

The sick boy and the tree, de Paul JAEGER, France, 2009

Wilfried JUDELaurent Laliberté va procéder à la démonstration de l’outil « l’Atelier du regardeur », élaboré autour de l’image fixe. Vous pourrez ainsi vous l’approprier et l’utiliser avec les publics avec lesquels vous travaillez.

Laurent LALIBERTÉCette partie du site a été mise en ligne la semaine dernière. Il s’agit aujourd’hui de sa première présentation publique.

Ce projet a été mené pendant deux ans en partenariat avec Paris 1 Panthéon-Sorbonne, un groupe de chercheurs et une dizaine d’étudiants en Master 2 professionnel « Multimédia interactif ».

Le musée a procédé à une présélection d’images issues de ses collections. Les chercheurs en ont prélevé une quinzaine selon leurs axes de recherche, puis ont rédigé des analyses de ces images, accessibles à des lecteurs motivés. Les réflexions de ces spécialistes ont ensuite été transposées et simplifiées, afin d’aboutir à de petites animations interactives.

Le public visé est celui des jeunes de 10 à 13 ans. Nous souhaitions réaliser des ressources utilisables dans et hors cadre scolaire. Je vais vous présenter deux études détaillées des chercheurs transformées en animation.

Pour chaque animation sont prévues une présentation de contexte et une partie interactive.

Les textes précisent les objectifs des chercheurs et ce qui est proposé dans l’activité. Pour le moment, il en existe neuf au total. Ce dispositif a encore un caractère expérimental.

La ressource peut être utilisée à l’école ou au collège, au sein d’un atelier multimédia, à deux, tout seul, etc.

Il est possible de prolonger l’activité en puisant dans le vaste répertoire des collections numérisées du musée.

L’intitulé « l’Atelier du regardeur » nous a été inspiré par Marcel Duchamp qui déclarait que « c’est le regardeur qui fait le tableau ».

Laurent Laliberté procède à la démonstration.

L’Atelier du regardeur : ressource pédagogique numérique en éducation aux images

25

Captures d’écrans de l’Atelier du regardeur (www.museedelaphoto.fr)

Judith BAUDINET, photographe, vidéaste, Audrey LEHONT, réalisatrice, intervenante pédagogique à l’association Marianne Films, Nicolas SORNAT, directeur de la MJC de Corbeil-Essonnes, Uda BENYAMINA, réalisatrice, déléguée générale de l’association « 1000 visages », Romuald BEUGNON, réalisateur et intervenant cinéma

Wilfried JUDENous allons évoquer à présent les pratiques de l’image. Comment monte-t-on un projet d’éducation à l’image ? Des réalisateurs, photographes, éducateurs nous présenteront leur travail, puis débattront avec vous.

Judith Baudinet a monté une expérience très intéressante au sein de la ville de Massy, en réalisant des sténopés dans la rue. Je vous propose de les regarder.

Judith BAUDINETLa ville de Massy m’avait commandé un projet photographique qui devait porter sur l’architecture et la ville. J’avais été chargée de croiser les regards entre les quartiers de cette ville très éclatée.

Je réalise mes photos avec une boîte de conserve trouée à la perceuse et un bout de scotch en guise d’obturateur. Les temps de pose oscillent entre 15 secondes et 20 minutes. À ce rythme, les mouvements rapides disparaissent et les mouvements très lents se mettent à vibrer. Ces photographies sont très longues à tirer.

Je devais réaliser des photographies d’architecture. Dans la mesure où la mairie me commandait une série intitulée « Regards croisés » à destination des habitants, il était important d’y faire également figurer des personnes.

Je les ai ensuite imprimées sur du papier affiche et disposées dans la ville.

Wilfried JUDEÀ l’heure des téléphones portables et appareils photos numériques, pourquoi ralentir soudain le temps ? Pourquoi se poser quinze minutes dans un environnement urbain ?

Judith BAUDINETIl s’agit là d’une technique pauvre. Le ralentissement est une réaction au monde dans lequel nous vivons et dans lequel nous sommes constamment sollicités pour produire plus et plus vite. Je suis spécialiste en arts numériques, ce qui inclut la musique électronique et la pratique du Vjing. Ces savoirs requièrent un temps d’apprentissage et des moyens techniques plus lourds. Or, ce matériel pauvre, dans le cadre d’ateliers, permet d’entrer en contact avec les gens plus facilement et de créer avec moins de contraintes techniques.

26

Deuxième table rondeLes pratiques de l’image : du sténopé au Vjing

Je réalise mes photos avec une boîte de conserve trouée à la

perceuse et un bout de scotch en guise d’obturateur.

« L’homme de la piscine - Massy 2009 - sténopé argentique »,

Judith BAUDINET

Cela permet, par exemple, de faire de l’optique ludique et facile, il est possible de montrer aux jeunes que l’on peut réaliser des créations intéressantes avec peu d’argent.

Wilfried JUDEQuel est l’intérêt de monter un atelier sténopé avec les publics ?

Judith BAUDINETCela permet, par exemple, de faire de l’optique ludique et facile, il est possible de montrer aux jeunes que l’on peut réaliser des créations intéressantes avec peu d’argent. Nous possédons tous un appareil photo et sommes tous écrasés par le déferlement d’images produites. Ma démarche consistait, en quelque sorte, à reprendre le temps. Le temps du regard, de la prospection de l’oeil, comme celui de l’imaginaire. Comme on ne voit pas ce que l’on photographie, il est nécessaire d’imaginer. Quant à l’aspect pédagogique, il apparaît surtout avec les enfants, en leur mettant une perceuse entre les mains par exemple. L’élément « sportif » de la fabrication est attractif. Une seule photo est produite et ce moment de recherche, de recadrage mental, initie les personnes sans qu’elles s’aperçoivent qu’elles sont en train de réaliser un travail d’élaboration critique.

Wilfried JUDELa condition fondamentale pour assurer la réussite d’un atelier est l’interaction et la complémentarité de l’intervenant artistique et du professionnel socioculturel.

Je vous invite à présent à regarder le court-métrage réalisé par des adolescents au sein d’une MJC sur le thème de l’égalité hommes/femmes.

Comment se monte un atelier de ce type ?

Audrey LEHONTIl s’agit du premier projet monté par « Marianne Films ». Nous souhaitions qu’il soit ancré dans un territoire, avec les jeunes de différents quartiers.

Ce projet est issu d’un travail de fond sur le terrain et conçu sur une échelle de dix ans. Il propose aux jeunes d’acquérir les compétences pour la réalisation d’un film, tout en proposant des thématiques citoyennes. Il n’est toutefois pas évident de solliciter des jeunes sur le long terme.

Nicolas SORNATL’envie de transmettre notre passion pour le cinéma nous anime tous. La prédominance très forte des images dans la société nous incite à nous interroger : comment travailler sur les représentations, sur des thématiques complexes telles que la discrimination, etc. ?

Notre but est que les jeunes soient intégralement acteurs de ce projet. Je défends l’idée qu’ils possèdent une culture des images que nous devons prendre en compte. L’accompagnateur a pour rôle de les guider dans leur rapport aux outils ou dans la découverte d’autres genres.

27

Deuxième table rondeLes pratiques de l’image : du sténopé au Vjing

Ce matériel pauvre, dans le cadre d’ateliers, permet d’entrer en contact avec les gens plus facilement et de créer avec moins de contraintes techniques.

« Le primeur de la gare RER - Massy 2009 - sténopé argentique », Judith BAUDINET

Ensuite, comment travaille-t-on ensemble ?

Afin qu’un atelier puisse fonctionner avec des adolescents, il est nécessaire de créer un duo entre un référent éducatif au quotidien avec les jeunes dans la structure et un intervenant plus spécialisé dans la technique ou le domaine artistique. Ce travail collaboratif conçu dans la durée permet d’accompagner les jeunes, en abordant des thèmes qui les touchent comme la place des filles dans les quartiers.

Audrey LEHONTIl est difficile de mobiliser les jeunes tout au long de l’année. Il faut toujours réinventer des accroches afin de redynamiser les groupes et s’adapter à eux. En ce qui concerne Marianne Films, un riche échange s’est établi entre les adolescents du groupe et l’équipe, portant notamment sur nos différents milieux sociaux. Nous créons ainsi un lien affectif, humain, amical, qui sort du cadre d’animation au quotidien. Si chacun parvient à créer ce lien, il devient alors possible de mobiliser les jeunes. Cependant, cela reste un luxe de pouvoir s’inscrire dans la durée.

Wilfried JUDEComment un tel projet est-il financé ?

Audrey LEHONTIl s’appuie beaucoup sur le bénévolat et le temps personnel investi.

Nicolas SORNATCela s’apparente à un parcours du combattant. Il devient de plus en plus complexe de trouver des fonds dès que l’on souhaite monter un atelier dans un quartier ou une MJC. Nous désirions également instaurer une mixité intergénérationnelle afin de favoriser la transmission d’expériences. Or, les financements sont très ciblés. Le Conseil général participe aussi à ce financement. L’éternelle frontière entre culture légitime et culture de masse est toujours au centre des enjeux. Le mécénat et les fondations peuvent également fournir un soutien financier, mais plus rarement. Le plus difficile est de parvenir à pérenniser ces actions.

Wilfried JUDENous abordons ici deux manières d’approcher l’accès à l’éducation à l’image : la démarche pré-professionnalisante, avec l’association « 1000 Visages » ; la démarche plus amateur avec Romuald Beugnon qui est issu de la FEMIS : il a réalisé des films mais s’intéresse aussi aux nouvelles pratiques.

Deux extraits de films vous seront présentés : l’un très classique dans sa fabrication, l’autre réalisé avec des téléphones portables consistant en un poème visuel réalisé autour d’une classe de 4e.

28

Notre but est que les jeunes soient intégralement acteurs

de ce projet. Je défends l’idée qu’ils possèdent une

culture des images que nous devons prendre en compte.

L’accompagnateur a pour rôle de les guider dans leur rapport

aux outils ou dans la découverte d’autres genres.

Afin qu’un atelier puisse fonctionner avec des

adolescents, il est nécessaire de créer un duo entre un

référent éducatif au quotidien avec les jeunes dans la

structure et un intervenant plus spécialisé dans la technique ou

le domaine artistique.

Nous créons ainsi un lien affectif, humain, amical, qui

sort du cadre d’animation au quotidien. Si chacun parvient

à créer ce lien, il devient alors possible de mobiliser les jeunes.

Cependant, cela reste un luxe de pouvoir s’inscrire

dans la durée.

Uda BENYAMINALes membres de l’association « 1000 visages » ont constaté que le cinéma était un art difficile d’accès pour ceux qui en sont éloignés. L’accès à la professionnalisation pour un jeune issu de quartier s’avère plus difficile.

L’éducation à l’image que nous proposons s’adresse aux 15-18 ans. Les ateliers ont lieu toute l’année. Nous proposons également une initiation aux métiers du cinéma, avec des professionnels qui viennent réaliser un film avec les participants. Nous souhaitons encourager la mise en réseau de ces personnes qui souhaitent se professionnaliser, en intégrant une école par exemple.

Les personnes présentes dans l’association proviennent également de classes moyennes ou de classes aisées. Comme les autres, elles n’ont pas de réseaux. Nous encourageons une démarche citoyenne, en tentant d’apporter une offre de qualité à des personnes qui n’y ont pas toujours accès dans leur quartier.

Au-delà de la formation de futurs cinéastes, cette éducation forme à de nombreuses branches du domaine de l’image, en incluant théorie et pratique. Nous essayons également de travailler avec des lycées professionnels. « 1000 visages » organise des stages tout au long de l’année qui ont pour but d’éduquer à l’image, de sensibiliser les jeunes de 14 à 30 ans aux pratiques artistiques.

Ce dispositif appelé Cinétalent est une initiation théorique au langage cinématographique, une éducation à l’image à travers la mise en place d’un Ciné-club, l’expérimentation de l’ensemble des postes clés nécessaires à la création d’un film, à travers la réalisation d’un court-métrage, ainsi qu’une valorisation des travaux réalisés à l’occasion d’une projection publique et d’une remise de prix.

Wilfried JUDEDans votre démarche, le cinéma permet d’apprendre à vivre ensemble.

Uda BENYAMINAL’équipe est très favorable à l’autodiscipline. À mon sens, il est difficile de créer un groupe qui fonctionne et qui perdure. Nous fonctionnons généralement sur le principe du bénévolat, mais nous avons trouvé des accroches afin de tenir un groupe, qui est devenu complètement autonome et finance ses actions. Par exemple, les membres du groupe ont vendu des DVD afin de se rendre au Festival de Cannes. Cet encouragement initial est suivi du plaisir de réaliser des films en toute autonomie. Lors du dernier stage, les intervenants n’étaient plus sollicités. Les jeunes de 15 à 17 ans ont réalisé seuls leur film.

Wilfried JUDERomuald Beugnon, pouvez-vous nous parler de vos projets ?

29

Nous encourageons une démarche citoyenne, en tentant d’apporter une offre de qualité à des personnes qui n’y ont pas toujours accès dans leur quartier.

Romuald BEUGNONLorsque j’ai découvert le Festival Pocket Film, j’étais en train de réaliser mon long-métrage. Je n’accordais que peu de crédibilité à ce festival. À l’issue de mon tournage, on m’a donné l’occasion d’y participer. J’ai découvert que les téléphones, surtout les premiers portables, étaient artistiquement intéressants car moins élaborés qu’aujourd’hui, ce qui offrait un rendu plastique étonnant. En outre, le téléphone permet de filmer n’importe quand. Cet objet, conçu pour filmer des choses à portée de main, se révèle une machine à autofiction. Spontanément, il ne suscite pas l’envie de tourner un film de grande envergure, mais de s’accrocher à des sujets intimes. C’est cela qui m’intéressait.

Le premier atelier que Wilfried Jude m’a proposé m’a permis de m’apercevoir qu’il s’agissait d’un formidable outil d’éducation à l’image. Ce ne sont pas des projets à long terme, le film que vous avez vu a été réalisé en quatre séances. Le public n’est pas à la recherche d’un apprentissage professionnalisant, mais a besoin d’acquérir des notions. Avec cet outil, nous perdons le référent cinéma, qui comporte ce côté parfois stressant de la gestion technique et de la présentation devant la caméra. Souvent, dans les « pocket films », les jeunes jouent mieux et filment mieux. Ils s’interrogent davantage sur les raisons de leur pratique, sur les questions de mise en scène plutôt que sur les problèmes techniques.

Le film a été tourné avec des élèves de 4e SEGPA. Nous sommes partis du thème de l’autoportrait et avons réalisé une sorte de photo de classe animée. Pour eux, le simple geste de se présenter constituait un premier pas vers l’extérieur. Nous avons également inclus d’autres techniques telles que le stop motion, etc. Je me suis basé sur leurs images et leur pratique. Par exemple, l’un d’entre eux a monté les images sur son portable.

Je leur apprends à se servir de leur appareil, car ils ne le maîtrisent pas toujours. Je suis présent au début, puis les laisse créer. Il s’agit d’un rapport d’autonomie plus que de tutorat.

Wilfried JUDEQuelle est votre position sur le fait de considérer l’enfant comme un pair ? Que pensez-vous de ce rapport d’égalité ?

Judith BAUDINETLa question intergénérationnelle me semble primordiale. Il est bon de s’extraire d’un rapport d’autorité et d’entrer dans un dialogue plus pacifié. Il est important de désacraliser les rôles et les positions.

Romuald BEUGNONIl est plus facile de créer des rapports de pairs hors temps scolaire. Sinon, les élèves reproduisent par habitude les comportements hiérarchiques existant à l’école. Je les invite par exemple à me tutoyer.

30

J’ai découvert que les téléphones, surtout les premiers portables, étaient artistiquement intéressants car moins élaborés qu’aujourd’hui, ce qui offrait un

rendu plastique étonnant. En outre, le téléphone permet

de filmer n’importe quand.

Souvent, dans les« pocket films », les jeunes

jouent mieux et filment mieux. Ils s’interrogent davantage sur

les raisons de leur pratique, sur les questions de mise

en scène plutôt que sur les problèmes techniques.

Judith BAUDINETJe préfère, pour ma part, être appelée Madame. N’oublions pas que nous sommes dans un rapport où c’est l’adulte qui doit tenir le groupe. Mais nous ne sommes pas des professeurs ; nous intervenons en tant qu’artistes et en tant que citoyen. Je ne saurais pas transmettre de savoirs sur la question « Comment faire une œuvre d’art ? ». Dans un premier temps, il s’agit davantage d’une leçon de choses, d’humain expérimenté à adultes en devenir.

Je constate que nous parvenons tous aux mêmes conclusions : nous essayons d’abord de remettre en place des relations qui ont pu échouer à l’école.

Lorenzo CIESCOQuelle est la place de la salle de cinéma dans les actions que vous menez ? L’intégrez-vous ou non ?

Uda BENYAMINATous les travaux que les jeunes réalisent sont diffusés dans une salle de cinéma de notre ville, avec laquelle nous avons un partenariat. Nous sommes en train de mettre en place un ciné-club avec les jeunes. Il existe également un pan théorique, avec des cours sur les métiers et donc sur la place de la salle de cinéma.

Audrey LEHONTIl est déjà extraordinaire pour nous de parvenir à faire visionner nos films lors d’une projection publique. C’est alors l’occasion pour les jeunes de prendre conscience de leur création, de se voir eux-mêmes, de constater le décalage entre ce qui est imaginé et le résultat. La phase conviviale et sociale consistant à inviter proches et amis à la projection est également primordiale.

S’agissant de films réalisés en ateliers, il est très difficile d’envisager une projection dans une salle de cinéma. Je n’ai pas connaissance de salles disposant de créneaux qui favorisent ce genre de projection.

Lorenzo CIESCODe nombreuses salles proposent des créneaux pour restituer les travaux réalisés dans le cadre d’ateliers. Nous sommes d’ailleurs partenaires de certains d’entre eux.

En outre, je souhaitais réagir au sujet d’une information qui m’a été transmise récemment par le responsable de la FEMIS. Il déclarait que les étudiants du département Exploitation, malgré leur grande connaissance du cinéma et des films, ne fréquentaient presque pas les salles d’art et d’essai de proximité. Cela nous interpelle.

Nicolas SORNATLe cinéma d’art et essai local est un partenaire important lorsque nous montons un atelier. Il est évident qu’ensuite, nous emmenons les

Le cinéma d’art et essai local est un partenaire important lorsque nous montons un atelier. Il est évident qu’ensuite, nous emmenons les jeunes qui ont participé au film dans les salles. Elles conservent un rôle incontournable.

Je constate que nous parvenons tous aux mêmes conclusions : nous essayons d’abord de remettre en place des relations qui ont pu échouer à l’école.

31

jeunes qui ont participé au film dans les salles. Elles conservent un rôle incontournable.

Romuald BEUGNONJe crois également qu’il n’existe pas de bon atelier sans la valorisation qu’offre la salle. Même s’agissant des « pocket films », il est important de s’extraire de l’écran de l’ordinateur et de découvrir les films plastiquement sur grand écran.

Je travaille à Grigny dans le cadre d’un atelier monté en partenariat avec le collège et la salle de cinéma. Nous regardons des films, et les éléments d’analyse nous aident à monter le nôtre.

Wilfried JUDEDans le domaine de l’éducation à l’image, il est important d’articuler le « voir » et le « faire », et de laisser, si possible, les enfants programmer.

De la salleVoir diffuser son film sur grand écran est très valorisant. La jeunesse, la culture, le social sont des thèmes contemporains. La salle de cinéma permet justement de voir ensemble, et non plus séparément chez soi ou dehors.

Judith BAUDINETL’idée qui nous rapproche est le souhait de désenclaver les banlieues et les catégories sociales. Or, actuellement, les castes se recréent. Le cinéma ne doit-il pas lui aussi sortir de sa salle ? Le projet Massy aurait dû se tenir dans une galerie d’exposition. J’ai souhaité un autre parti pris car je savais que nous nous serions retrouvés entre « gens qui savent », les personnes à qui était destinée cette exposition ne fréquentent pas nécessairement les salles d’exposition. Il convient donc de chercher des solutions alternatives, afin de susciter de nouvelles rencontres.

De la salleNous parlons tous d’éducation à l’image et du désir de susciter des rencontres entre des publics, des œuvres et des artistes. Une rencontre avec une œuvre peut également changer une vie.

Romuald BEUGNONJ’ai souhaité réaliser des « pocket films » ou des ateliers d’éducation alternatifs à l’image, car je n’avais pas le temps de proposer des ateliers selon des modalités classiques. Écrire un scénario avec le groupe n’est intéressant que si l’on a le temps de l’élaborer. Souvent, sur un tournage, lorsque j’essaie de respecter les codes, les règles, etc., tout en restant dans les délais, je me retrouve à diriger comme un professionnel du cinéma. Je me suis mis à la recherche d’autres outils afin de créer des gestes plus personnels.

32

Je crois également qu’il n’existe pas de bon atelier sans

la valorisation qu’offre la salle. Même s’agissant des

« pocket films », il est important de s’extraire de l’écran

de l’ordinateur et de découvrir les films plastiquement

sur grand écran.

Voir diffuser son film sur grand écran est très valorisant.

La jeunesse, la culture, le social sont des thèmes contemporains.

La salle de cinéma permet justement de voir ensemble,

et non plus séparément chez soi ou dehors.

De la salleLes projets qui ont été présentés ont été réalisés dans des quartiers où était mise en œuvre une politique de la Ville. Cependant, l’enclavement n’existe pas uniquement dans les quartiers : le principal ghetto est celui des riches.

À travers vos propos, vos divers travaux, nous pouvons constater qu’il suffit que des adultes se présentent avec un regard bienveillant, confiant, coopérant, pour qu’une multiplicité d’énergies émerge.

Judith BAUDINETIl s’agit de désenclaver les pratiques et les modes de représentation. Travailler pour des MJC n’est pas porteur en matière de carrière ! Dans tous les domaines, qu’il s’agisse de pratiques artistiques, artisanales ou autres, tout ce que nous produisons, dans ce type de cadre, est politique.

Réaliser des sténopés est un choix politique. Lorsque je vais travailler à Massy, c’est en effet un désert culturel au niveau des structures, des musées, qui suppose alors d’inventer de nouvelles pratiques.

Nicolas SORNATJe partage votre point de vue sur les ghettos de classe qui nécessiteraient d’être désenclavés.

Uda BENYAMINAAu sein de notre association 1000 Visages, nous cherchons à réconcilier les milieux dont nous sommes issus. Cette mixité apparaît dans nos pratiques. Lorsque j’étais enfant, ma cité était habitée par des personnes riches et pauvres. Aujourd’hui, elle ne l’est plus que par des pauvres. Nous devons rester les garants de cette mixité, même si cela s’avère très difficile.

Wilfried JUDEAfin de conclure cette journée, Romuald Beugnon va procéder à une démonstration de manipulation d’images via un dispositif de son invention.

De nouvelles pratiques émergent : pour les professionnels que vous êtes, aller à la rencontre des artistes est important. Ainsi, je vous invite à aller vous-mêmes vous former. Il existe de nombreuses propositions de formations permettant de s’immerger dans le montage de projets.

Merci à tous.

33

Dans tous les domaines, qu’il s’agisse de pratiques artistiques, artisanales ou autres, tout ce que nous produisons, dans ce type de cadre, est politique.

34

Copyright

Couverture, p 26 et p 27 © - Judith BAUDINET

p 9, 10, 25 © - Collections du musée français de la Photographie, Conseil général de l’Essonne

p 20 © - Jean-Hugues BERROU, collection Musée du Vivant-AgroParisTech

p 24 © - Paul JAEGER

p 24 © - Georgio ZOIS

35

Copyright Contacts

Centre de Ressources Politique de la Ville en Essonne Évelyne Bouzzine Directrice [email protected] 01 64 97 00 32

Conseil général de l’EssonneDirection de la Culture

Odile Gaillard Chargée de mission jeune public [email protected] 01 60 91 93 90

Bernard Guirmand Chargé de mission animation du territoire [email protected] 01 60 91 78 19

Couverture, p 26 et p 27 © - Judith BAUDINET

p 9, 10, 25 © - Collections du musée français de la Photographie, Conseil général de l’Essonne

p 20 © - Jean-Hugues BERROU, collection Musée du Vivant-AgroParisTech

p 24 © - Paul JAEGER

p 24 © - Georgio ZOIS