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1 Tribunal administratif N° 40571 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 5 janvier 2018 2 e chambre Audience publique du 13 juillet 2020 Recours formé par le syndicat des copropriétaires des copropriétés « ... » et autres, , contre une « décision » et une décision du conseil communal de la Ville de Luxembourg, une décision du ministre de l’Intérieur et une décision du ministre de l’Environnement en matière de plan d’aménagement général JUGEMENT Vu la requête inscrite sous le numéro 40571 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 5 janvier 2018 par Maître Georges Krieger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom : 1. du syndicat des copropriétaires des copropriétés « ... » sises à ..., et , représenté par son syndic actuellement en fonctions, la société ..., ayant son siège social à , inscrite au Registre de Commerce et des Sociétés de Luxembourg sous le numéro , représentée par son gérant actuellement en fonctions ; 2. du syndicat des copropriétaires de la résidence ..., sise à ..., représentée par son syndic actuellement en fonctions, la société ..., ayant son siège social à , inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro représentée par son gérant actuellement en fonctions ; 3. du syndicat des copropriétaires de la résidence ..., sise à ..., représentée par son syndic actuellement en fonctions, la société ..., préqualifiée ; 4. Monsieur ..., demeurant à ... ; 5. Madame ..., demeurant à ... ; 6. Monsieur ..., demeurant à ... ; 7. Madame ..., demeurant à ... ; tendant à l’annulation de 1) « [l]a décision du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 13 juin 2016 adoptée en application de l'article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l'aménagement communal et le développement urbain, portant « mise sur orbite » du projet de refonte globale du Plan d'Aménagement Général de la Ville de Luxembourg ; 2) [l]a décision du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 28 avril 2017 portant adoption du projet de refonte globale du Plan d'Aménagement Général de la Ville de Luxembourg ;

JUGEMENT · 2020. 7. 17. · JUGEMENT Vu la requête inscrite sous le numéro 40571 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 5 janvier 2018 par Maître Georges

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    Tribunal administratif N° 40571 du rôle

    du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 5 janvier 2018

    2e chambre

    Audience publique du 13 juillet 2020

    Recours formé par

    le syndicat des copropriétaires des copropriétés « ... » et autres, …,

    contre une « décision » et une décision du conseil communal de la Ville de Luxembourg,

    une décision du ministre de l’Intérieur et une décision du ministre de l’Environnement

    en matière de plan d’aménagement général

    JUGEMENT

    Vu la requête inscrite sous le numéro 40571 du rôle et déposée au greffe du tribunal

    administratif le 5 janvier 2018 par Maître Georges Krieger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de

    l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom :

    1. du syndicat des copropriétaires des copropriétés « ... » sises à ..., et …, représenté

    par son syndic actuellement en fonctions, la société ..., ayant son siège social à …, inscrite au

    Registre de Commerce et des Sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son gérant

    actuellement en fonctions ;

    2. du syndicat des copropriétaires de la résidence ..., sise à ..., représentée par son syndic

    actuellement en fonctions, la société ..., ayant son siège social à …, inscrite au registre de commerce

    et des sociétés de Luxembourg sous le numéro … représentée par son gérant actuellement en

    fonctions ;

    3. du syndicat des copropriétaires de la résidence ..., sise à ..., représentée par son syndic actuellement en fonctions, la société ..., préqualifiée ;

    4. Monsieur ..., demeurant à ... ;

    5. Madame ..., demeurant à ... ;

    6. Monsieur ..., demeurant à ... ;

    7. Madame ..., demeurant à ... ; tendant à l’annulation de

    1) « [l]a décision du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 13 juin 2016

    adoptée en application de l'article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant

    l'aménagement communal et le développement urbain, portant « mise sur orbite » du projet de

    refonte globale du Plan d'Aménagement Général de la Ville de Luxembourg ;

    2) [l]a décision du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 28 avril 2017 portant adoption du projet de refonte globale du Plan d'Aménagement Général de la Ville de

    Luxembourg ;

  • 2

    3) [l]a décision du ministre de l'Intérieur du 5 octobre 2017 approuvant les décisions précitées de la Ville de Luxembourg[ ;]

    4) [l]a décision de la ministre de l'Environnement du 6 octobre 2017 approuvant les décisions précitées de la Ville de Luxembourg. » ;

    Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Christine Kovelter, en remplacement de

    l’huissier de justice Frank Schaal, demeurant à Luxembourg, du 12 janvier 2018, portant

    signification de ce recours à l’administration communale de la Ville de Luxembourg établie à

    L-1648 Luxembourg, 42, Place Guillaume II, représentée par son collège des bourgmestre et

    échevins actuellement en fonctions ;

    Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 5 février 2018 par

    la société anonyme Arendt & Medernach SA, inscrite au barreau de Luxembourg, établie et ayant

    son siège social à L-2082 Luxembourg, 41A, avenue J.F. Kennedy, immatriculée au registre de

    commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B186371, représentée aux fins de la

    présente procédure par Maître Christian Point, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des

    avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

    Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 19 février 2018 par

    Maître Albert Rodesch, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg,

    au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, représenté par son Ministre d’Etat ;

    Vu la requête en prorogation des délais pour déposer le mémoire en réponse ainsi que le

    mémoire en duplique, présentée par Maître Albert Rodesch, pour compte de l’Etat du Grand-Duché

    de Luxembourg, en date du 22 février 2018 ;

    Vu les accords de toutes les autres parties avec la mesure sollicitée ;

    Vu les avis des 8 et 12 mars 2018 du tribunal administratif fixant les délais pour déposer les

    mémoires en réponse, réplique et duplique ;

    Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 29 juin 2018 par la

    société anonyme Arendt & Medernach SA, au nom de l’administration communale de la Ville de

    Luxembourg ;

    Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 29 juin 2018 par

    Maître Albert Rodesch, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

    Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 26 octobre 2018 par

    Maître Georges Krieger au nom des parties demanderesses ;

    Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 31 janvier 2019 par

    Maître Albert Rodesch, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

    Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 1er février 2019 par

    Maître Christian Point au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

  • 3

    Vu le courrier déposé au greffe du tribunal administratif le 21 février 2019 par Maître

    Georges Krieger au nom des parties demanderesses tendant à pouvoir déposer un mémoire

    supplémentaire ;

    Vu le courrier déposé au greffe du tribunal administratif le 5 mars 2019 par Maître Albert

    Rodesch, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, ne s’opposant pas au dépôt d’un

    mémoire supplémentaire ;

    Entendu les parties en cause en chambre de conseil du 20 mars 2019, lors de laquelle le

    tribunal ordonna la mise en intervention des parties tierces-intéressées ;

    Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Laura Geiger, en remplacement de l’huissier

    de justice Carlos Calvo, demeurant à Luxembourg, des 5 et 8 avril 2019, portant signification de ce

    recours à

    1) la société ..., établie et ayant son siège social à ..., inscrite au registre de commerce et des sociétés sous le numéro ..., représenté par son conseil d’administration actuellement en

    fonctions,

    2) la société ...(...), établie et ayant son siège social à ..., inscrite au registre de commerce et des sociétés sous le numéro ..., représenté par son conseil d’administration actuellement

    en fonctions,

    3) la société ..., établie et ayant son siège social à ..., inscrite au registre de commerce et des sociétés sous le numéro …, représentée par son conseil d’administration

    actuellement en fonctions ;

    Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 16 avril 2019 par

    Maître Steve Helminger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg,

    au nom la société ... (...) ;

    Vu le mémoire supplémentaire, intitulé « mémoire en réponse », déposé au greffe du tribunal

    administratif le 2 juillet 2019 par Maître Steve Helminger, au nom de la société ... (...) ;

    Vu le mémoire supplémentaire, intitulé « mémoire en réponse », déposé au greffe du tribunal

    administratif le 4 juillet 2019 par Maître Steve Helminger, au nom des sociétés ... et ... ;

    Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 18 octobre 2019

    par Maître Georges Krieger, au nom des parties demanderesses ;

    Vu les pièces versées en cause ainsi que les décisions attaquées ;

    Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Sébastien Couvreur, en

    remplacement de Maître Georges Krieger, Maître Paul Schintgen, en remplacement de Maître

    Albert Rodesch, Maître Gilles Dauphin, en remplacement de Maître Christian Point, et Maître Steve

    Helminger en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 21 octobre 2019.

    Lors de sa séance publique du 13 juin 2016, le conseil communal de la Ville de

    Luxembourg, ci-après désigné par le « conseil communal », se déclara d’accord, en vertu de

    l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le

  • 4

    développement urbain, désignée ci-après par « la loi du 19 juillet 2004 », « (…) pour lancer la

    procédure d’adoption du nouveau projet d’aménagement général (PAG) de la Ville de

    Luxembourg, parties écrite et graphique accompagnées des documents et annexes prescrits par la

    législation y relative (…) » et « (…) charge[a] le collège des bourgmestre et échevins de procéder

    aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant

    l’aménagement communal et le développement urbain et à l’article 7 de la loi modifiée du 22 mai

    2008 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement

    (…) ».

    Par courriers respectifs des 1er, 11 et 18 juillet 2016, Madame ... et Monsieur ..., déclarant

    agir en leur qualité de propriétaire d’un appartement sis à ..., la société ..., agissant en sa qualité de

    syndic des syndicats des copropriétaires des résidences « ... », sises à ... et à ... et Monsieur ... et

    Madame ..., en leur qualité de membres du conseil syndical de la résidence ..., sise à ..., ainsi qu’en

    leurs noms personnels, soumirent au collège des bourgmestre et échevins des objections à

    l’encontre du projet d’aménagement général.

    Lors de sa séance publique du 28 avril 2017, le conseil communal, d’une part, statua sur

    les objections dirigées à l’encontre du projet d’aménagement général et, d’autre part, adopta ledit

    projet, « (…) tel qu’il a été modifié suite aux réclamations et avis ministériels reçus (…) ».

    Par trois courriers séparés du 22 mai 2017, les copropriétés « ... », le syndicat des

    copropriétaires de l’immeuble « ... » et Madame ... et Monsieur ... introduisirent auprès du ministre

    de l’Intérieur, ci-après désigné par « le ministre », une réclamation à l’encontre de la susdite

    délibération du conseil communal du 28 avril 2017 portant adoption du projet d’aménagement

    général et ayant statué sur les objections dirigées par les administrés à l’encontre de ce même

    projet. Monsieur ... et Madame ... introduisirent à leur tour une réclamation par courrier du 11 mai

    2017.

    Par décision du 5 octobre 2017, le ministre approuva la délibération, précitée, du conseil

    communal du 13 juin 2016, de même que celle du 28 avril 2017 portant adoption du projet

    d’aménagement général, tout en statuant sur les réclamations lui soumises, en déclarant fondées

    une partie de celles-ci et en apportant, en conséquence, certaines modifications aux parties

    graphique et écrite du plan d’aménagement général (« PAG »), les réclamations introduites par les

    réclamants prémentionnés ayant, cependant, été déclarées non fondées. Cette décision est libellée

    comme suit :

    « (…) Ad réclamations ... (rec …), ... et ... (rec …), société ... (rec …), ... (rec …), ... et ...

    (rec …), COPROPRIÉTAIRES RÉSIDENCE « ... » (rec …), ... (rec …), ... (rec …), ... (rec …)

    et (rec …), ainsi que ... (rec …)

    Les réclamants contestent de manière générale le classement du site dénommé « ... »,

    actuellement sis, suite au vote du conseil communal du 28 avril 2017, en « zone d'habitation 2

    [HAB-2] », superposée d'une « zone soumise à l'élaboration d'un plan d'aménagement particulier

    "nouveau quartier " », partiellement d'une « zone de servitude "urbanisation — éléments naturels"

    EN » » et partiellement d'une « zone d'aménagement différé [ZAD] ».

    Certains réclamants, en l'occurrence Monsieur et Madame ..., le ..., ainsi que les

    copropriétaires de la résidence « ... », revendiquent le reclassement des surfaces sises en zones

    destinées à être urbanisées intitulées [ZAD-SD : KI02B] et [PAP ...], qui connaissent une déclivité

    importante, en zone verte, au sens de l'article 5 de la loi précitée du 19 janvier 2004 concernant

    la protection de la nature et des ressources naturelles.

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    Dans ce même contexte, il est aussi demandé par des réclamants, en l'occurrence la société

    ... et les copropriétaires de la résidence « ... », de réduire la délimitation de la zone destinée à être

    urbanisée, de manière à ne pas empiéter sur la forêt existante, afin de ne pas affecter les biotopes

    et les espèces protégées, présents sur le site.

    Par ailleurs, certains réclamants, en l'occurrence la société ..., le ... ainsi que les

    copropriétaires de la résidence « ... », constatent que la délimitation de la zone verte a été modifiée

    en ces lieux, de sorte à agrandir la zone destinée à être urbanisée, ce qui a pour conséquence une

    augmentation artificielle de la surface brute, voire le potentiel constructible par rapport à la

    situation de droit actuelle.

    De même, la majorité des réclamants en l'occurrence Monsieur et Madame ..., Monsieur

    ..., Monsieur ..., la société ..., le ..., Madame ..., Monsieur ..., les copropriétaires de la résidence

    « ... », la société ..., ainsi que Madame ..., souhaitent une nette réduction du potentiel constructible,

    afin notamment d'éviter l'implantation de tours hautes, ceci pour des raisons environnementales,

    esthétiques et de trafic supplémentaire généré par le projet. Ils déplorent entre autres que le projet

    litigieux entraînerait une réduction manifeste de la qualité de vie dans le quartier. Il est ainsi

    soulevé que la densité de logement y fixée serait contraire à l'article 2 de la Loi, voire à l'intérêt

    général.

    Dans ce contexte, il est rendu attentif au fait que les coefficients définis ne permettent pas

    de répondre à l'objectif, tel que fixé dans l'étude préparatoire, qui prescrit notamment que « les

    maisons plurifamiliales doivent être de taille raisonnable et proposer un concept architectural qui

    garantit un bon cadre de vie... » et il est plaidé pour la réalisation d'un quartier « à échelle

    humaine ». Il est ainsi revendiquée une réduction, soit de la surface brute des PAP et ZAD, soit

    du coefficient d'utilisation du sol et de la densité de logement.

    Certains réclamants, en l'occurrence Monsieur et Madame ..., Madame ..., Monsieur ...,

    ainsi que la société ..., souhaitent même le reclassement intégral des terrains litigieux en zone

    verte, au sens de l'article 5 de la loi précitée du 19 janvier 2004.

    Il est également revendiqué par les copropriétaires de la résidence « ... » une renonciation

    à la construction sur les terrains de sports, classés, suite au vote du conseil communal du 28 avril

    2017, en « zone d'aménagement différé [ZAD] ».

    Certains réclamants, en l'occurrence la société ..., le syndicat d'intérêts Kirchberg, les

    copropriétaires de la résidence « ... », ainsi que Madame ..., demandent encore de réduire le

    coefficient de scellement du sol [CSS] et le coefficient d'occupation du sol [COS] aux valeurs

    définies initialement dans le projet soumis à la saisine du conseil communal, conformément à

    l'article 10 de la Loi.

    Finalement, certains réclamants, en l'occurrence la société ... et la société ..., revendiquent

    que la surface de la « zone de servitude "urbanisation - éléments naturels" EN» couvrant la zone

    soumise à l'élaboration d'un plan d'aménagement particulier « nouveau quartier », intitulée [PAP

    ...], soit considérablement réduite, étant donné qu'elle engendrerait une densité de logement

    excessive sur la partie de ladite zone qui reste réellement constructible.

    Dans ce contexte, d'autres réclamants, en l'occurrence la société ..., ainsi que la société ...,

    contestent encore le fait qu'il résulte de la délimitation de ladite servitude « une densité et des

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    gabarits de construction excessifs par rapport à l'environnement bâti existant, puisque la densité

    sera concentrée près des résidences existantes.».

    Premièrement, en ce qui concerne la demande de certains réclamants que la surface de la

    « zone de servitude "urbanisation — éléments naturels" EN », couvrant la zone soumise à

    l'élaboration d'un plan d'aménagement particulier « nouveau quartier », intitulée [PAP …], soit

    considérablement réduite, étant donné qu'elle engendrerait une densité de logement et de

    construction excessive sur la partie de ladite zone qui reste réellement constructible, cette

    objection est fondée d'un point de vue urbanistique, mais le ministre de l'Intérieur ne saurait y

    faire droit sous peine de commettre un excès de pouvoir.

    En effet, un arrêt de la Cour Administrative rendu en date du 13 juillet 2017 (n° 39294C

    du rôle) a délimité les compétences des différents pouvoirs tutélaires et a, à cette occasion, pu

    retenir que le Ministre de l'Intérieur ne saurait faire droit à la demande de suppression de la zone

    superposée « Servitude "urbanisation-éléments naturels" » couvrant les fonds litigieux, alors que

    de telles servitudes concourent de par leur objet et leur nature intrinsèque à la réalisation des

    objectifs prônés par la loi modifiée du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et

    des ressources naturelles et ce nonobstant le fait que ces servitudes urbanistiques sont, de par leur

    portée et leur contraignante, susceptibles d'hypothéquer factuellement le développement du site

    classé en zone d'habitation. Conformément à la jurisprudence précitée, le ministre de l'Intérieur

    aurait pu faire droit aux réclamants si la servitude litigieuse aurait bouleversé l'économie générale

    et la cohérence du PAG pris dans sa globalité. Or, tel n'est manifestement pas le cas en l'espèce.

    En effet, la servitude litigieuse hypothèque uniquement le développement du site en question et

    n'affecte pas le développement de l'ensemble du PAG. Dès lors, le ministre de l'Intérieur ne saurait

    faire droit aux revendications des réclamants.

    Partant, le classement actuel est maintenu.

    Deuxièmement, force est de constater que les terrains litigieux font partie intégrante d'un

    site qui est prédestiné au développement d'un quartier résidentiel. En effet, malgré le fait que les

    fonds en question ne profitent pas d'une centralité aussi forte que, à titre d'exemple, la zone

    destinée à être urbanisée dénommée [PAP …] ou encore la zone destinée à être urbanisée

    dénommée [PAP …], les deux étant situées sur le plateau du Kirchberg, il n'en reste pas moins

    que l'urbanisation en ces lieux est parfaitement justifiée. En effet, il s'agit en l'occurrence d'un

    terrain sis à l'intérieur de l'agglomération de la Ville de Luxembourg et non loin de points

    d'intérêts majeurs, dont le pôle d'emplois, ainsi que les équipements scolaires, commerciaux et

    culturels du Kirchberg. De plus, il appartient d'arrondir le quartier résidentiel dénommé « ... »,

    réalisé lors d'une première phase, moyennant un nouveau développement urbain, qui permet

    d'améliorer la situation urbanistique existante et attrayante en ces lieux.

    Il y a également lieu de constater que le site en question est fortement exposé et visible

    notamment depuis le pont rouge. Ainsi, la réalisation d'immeubles élevés en ces lieux, émanant

    des densités de construction actuellement projetées, risque de nuire sensiblement aux qualités

    paysagères du site et de certains quartiers limitrophes, ce qui s'avère être contraire à l'intérêt

    général. De plus, les nuisances émanant du trafic routier supplémentaire généré par la densité de

    logement actuellement fixée, ainsi que la réduction implicite de la qualité de vie des citoyens,

    risquent fortement d'être en contradiction avec les dispositions de l'article 2 de la Loi.

    De même, il importe de signaler que, conformément au vote du conseil communal du 28

    avril 2017, la zone soumise à l'élaboration d'un plan d'aménagement particulier « nouveau

    quartier », intitulée [PAP …] a été couverte d'une « zone de servitude "urbanisation — éléments

  • 7

    naturels" EN » couvrant quelque 63 % de la surface du terrain brut de ladite zone. Ceci dit, le

    potentiel constructible émanant du CUS, actuellement fixé à 0,82 pour toute la zone [PAP …], se

    verra transféré sur les 37% de la surface du terrain de ladite zone, qui reste effectivement

    constructible. Il en résulte que la densité de construction effective en ces lieux ne correspondra

    pas à un CUS de 0,82, mais plutôt à un CUS d'environ 2,2. Il en est de même pour la densité de

    logement, qui passe de 60 logements par hectare à 162 logements par hectare.

    Encore il y a lieu de relever que la délimitation de la zone destinée à être urbanisée a

    largement été inspirée de la délimitation d'un PAP, voté définitivement par le conseil communal

    le 25 juin 1972 et approuvé par le ministre de l'Intérieur le 25 juillet 1973. Ce PAP a encore connu

    une modification assez substantielle sur les terrains litigieux, approuvée par le ministre de

    l'Intérieur en date du 21 août 1981. Cette délimitation est notamment reprise sur la partie

    graphique du PAG actuellement en vigueur et dit « plan Joly ». Or, lors de la procédure d'adoption

    dudit « plan Joly », certains fonds, sis à l'intérieur de cette délimitation du PAP précité, ont été

    classés en zone verte, au sens de l'article 5 de la loi précitée du 19 janvier 2004. Partant, le projet

    de PAG sous marge propose une extension de la zone destinée à être urbanisée, telle qu'évoquée

    par certains réclamants.

    En conclusion, vu qu'il n'appartient guère au ministre de l'Intérieur de modifier ni la

    délimitation, ni le libellé de la servitude environnementale, vu qu'il est tout à fait justifié de

    procéder à un développement urbain en ces lieux et vu que le projet actuel se caractérise par un

    degré d'utilisation du sol démesuré, afin de réduire l'impact du développement urbain y prévu et

    de garantir la conformité du projet à l'article 2 de la Loi, il s'impose de réduire sensiblement le

    potentiel constructible. Ainsi, le CUS et la DL pour la zone intitulée [PAP ...] sont réduits, de sorte

    à retrouver pour la zone effectivement constructible précitée (37% de la surface du terrain brut

    actuel) un CUS théorique de quelque 1,78 et une DL théorique de 120 logements par hectare. Le

    potentiel constructible y résultant s'élèverait pour la zone intitulée [PAP …] à quelque 29.000 m2

    et quelque 200 logements.

    Qui plus est, il y a lieu d'adapter la délimitation de la zone verte exactement à celle prévue

    par le PAG actuellement en vigueur. En effet, aucun argument valable ne permet de justifier une

    extension urbaine en ces lieux, tout en plus que, d'un point de vue de la protection de la nature, il

    s'agit manifestement d'un terrain particulièrement sensible.

    Partant, et compte tenu de la nouvelle délimitation de la zone destinée à être urbanisée,

    telle que proposée ci-dessus, il appartient de fixer le CUS à 0,80 et la DL à 57 pour la zone intitulée

    [PAP ...].

    Cependant, il importe de ne réduire ni le COS, ni le CSS, ceci afin d'éviter, notamment

    pour les raisons évoquées plus haut, des hauteurs de construction trop élevées en ces lieux.

    Pour les mêmes raisons qu'évoquées ci-dessus et malgré le fait que la zone intitulée [ZAD-

    SD : KI-02B] soit couverte d'une « zone d'aménagement différée [ZAD] », pouvant certes

    connaître encore des adaptations quant au degré d'utilisation du sol lors d'une levée éventuelle du

    statut d'aménagement différé moyennant une procédure de modification du PAG, il y a lieu de

    fixer pour ces fonds le même CUS et la même DL que proposés pour la zone intitulée [PAP …].

    Subsidiairement, il y a lieu de noter que le potentiel constructible, tel qu'initialement fixé

    par le PAP susmentionné et dûment approuvé, est augmenté de minimum 4000 m2 et ceci malgré

    le fait que lors de la présente décision il a été opté de réduire le potentiel constructible proposé

    par le projet de PAG. Or, cet ajustement du degré d'utilisation du sol permet justement de garantir

  • 8

    la conformité du projet au point (a) de l'article 2 de la Loi, en y générant une utilisation rationnelle

    du sol, de même qu'aux points (b) et (c) dudit article, en y générant une intégration harmonieuse

    des constructions dans le tissu urbain existant et dans le paysage, ainsi qu'une qualité de vie

    optimale pour les habitants. (…)

    Troisièmement, quant à la demande de certains réclamants de ne pas classer le site dit “

    ... » en zone destinée à être urbanisée, il faut constater que les servitudes environnementales

    précitées limitent en surface le développement du site en question. En effet, la protection adéquate

    de la flore et de la faune du site est assurée par les servitudes incombant, fixées par la partie

    réglementaire du PAG.

    Qui plus est, le site en question tombe sous le champ d'application des articles 17 et 20 de

    la loi du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles,

    garantissant ainsi une protection suffisante de la faune et de la flore.

    Quatrièmement, il importe de relever qu'une réclamation à l'encontre de l'étude

    environnementale (SUP) n'est pas recevable dans le présent contexte.

    Finalement, les doléances formulées à l'encontre des schémas directeurs ne sont pas

    recevables dans le présent contexte. En effet, ces derniers ne font pas partie intégrante du volet

    réglementaire du PAG proprement dit, puisqu'ils servent exclusivement à des fins d'orientation.

    De plus, ils peuvent être modifiés ultérieurement. Dans ce contexte, il y a lieu de citer

    l'article 29 (2), alinéa 3, qui dispose que : « Le schéma directeur peut être adapté ou modifié par

    le plan d'aménagement particulier „nouveau quartier" à condition qu'une telle modification ou

    adaptation s'avère indispensable pour réaliser le plan d'aménagement particulier „nouveau

    quartier", respectivement pour en améliorer la qualité urbanistique, ainsi que la qualité

    d'intégration paysagère. ». (…) ».

    Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 5 janvier 2018, le syndicat des

    copropriétaires des copropriétés « ... », le syndicat des copropriétaires de la résidence ..., le

    syndicat des copropriétaires de la résidence ..., Monsieur ..., Madame ..., Monsieur ... et Monsieur

    ..., ci-après désignés par « les propriétaires », ont fait introduire un recours tendant à l’annulation

    de (i) « [l]a décision du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 13 juin 2016 adoptée en

    application de l'article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l'aménagement

    communal et le développement urbain, portant « mise sur orbite » du projet de refonte globale du

    Plan d'Aménagement Général de la Ville de Luxembourg » de (ii) « [l]a décision du conseil

    communal de la Ville de Luxembourg du 28 avril 2017 portant adoption du projet de refonte

    globale du Plan d'Aménagement Général de la Ville de Luxembourg », de (iii) « [l]a décision du

    ministre de l'Intérieur du 5 octobre 2017 approuvant les décisions précitées de la Ville de

    Luxembourg » et (iv) de « [l]a décision de la ministre de l'Environnement du 6 octobre 2017

    approuvant les décisions précitées de la Ville de Luxembourg. ».

    A titre liminaire et avant de procéder à l’analyse du recours sous examen, il échet de

    préciser qu’à l’audience publique des plaidoiries, sur question afférente du tribunal, les

    litismandataires des différentes parties en cause n’ont soulevé aucune contestation relative à la

    notification entre eux de l’ensemble des mémoires respectifs, par actes d’avocat à avocat, au cours

    de la procédure contentieuse.

    I) Quant à la compétence

  • 9

    Les décisions sur les projets d’aménagement, lesquelles ont pour effet de régler par des

    dispositions générales et permanentes l’aménagement des terrains qu’elles concernent et le régime

    des constructions à y ériger, ont un caractère réglementaire. Les décisions d’approbation du

    ministre participent au caractère réglementaire des actes approuvés1, étant précisé qu’en ce qui

    concerne la procédure d’adoption du PAG, le caractère réglementaire ainsi retenu s’étend

    également au volet de la décision litigieuse du 5 octobre 2017 ayant statué sur la réclamation

    introduite par les demandeurs, intervenue dans le processus général de l’élaboration de l’acte

    approuvé.

    Conformément à l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des

    juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par « la loi du 7 novembre 1996 », seul un

    recours en annulation est susceptible d’être introduit contre un acte administratif à caractère

    réglementaire.

    Il convient de prime abord de déterminer la nature du recours susceptible d’être introduit à

    l’encontre de la décision du ministre de l’Environnement, dans la mesure où la loi du 19 janvier

    2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, ci-après désignée par « la loi

    du 19 janvier 2004 », sur base de laquelle la décision litigieuse a été prise et qui était en vigueur au

    moment du dépôt du recours sous analyse, a été abrogée par la loi du 18 juillet 2018, publiée au

    Mémorial A le 5 septembre 2018 et entrée en vigueur 3 jours après sa publication à défaut de

    disposition spéciale de mise en vigueur contraire. En effet, la loi du 19 janvier 2004 prévoyait un

    recours au fond contre les décisions prises en vertu de cette loi, alors que la loi du 18 juillet 2018

    prévoit en son article 68 un recours en annulation contre les décisions prises en vertu de cette loi.

    Le tribunal constate encore que par l’article 83 de la loi du 18 juillet 2018, le législateur s’est

    limité à abroger purement et simplement la loi du 19 janvier 2004 dans son intégralité, sans prévoir

    de mesures transitoires autres que celles visant les roulottes et les mesures compensatoires, non

    pertinentes en l’espèce.

    En ce qui concerne les voies de recours à exercer contre une décision prise sur le fondement

    de la loi du 19 janvier 2004, seule la loi en vigueur au jour où la décision a été prise est applicable

    pour apprécier la recevabilité d’un recours contentieux dirigé contre elle, étant donné que l’existence

    d’une voie de recours est une règle du fond du droit judiciaire, de sorte que les conditions dans

    lesquelles un recours contentieux peut être introduit devant une juridiction doivent être réglées

    suivant la loi sous l’empire de laquelle a été rendue la décision attaquée, en l’absence, comme en

    l’espèce, de mesures transitoires2. Il s’ensuit que la recevabilité d’un recours contre une décision

    prise sur le fondement de la loi du 19 janvier 2004 devra être analysée conformément aux

    dispositions de cette même loi, qui en son article 58 disposait que « Contre les décisions prises en

    vertu de la présente loi un recours est ouvert devant le tribunal administratif qui statuera comme

    juge du fond ».

    Les décisions d’approbation ou de non-approbation des ministres de l’Intérieur et de

    l’Environnement rendues en matière d’établissement ou de modification de plans d’aménagement

    généraux ou particuliers constituent des actes de tutelle administrative réputés rétroagir au jour de

    la décision communale concernée. Ces décisions participent au caractère réglementaire de la

    1 Cour adm., 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Pas. adm. 2018, V° Actes réglementaires, n° 49 et les autres références

    y citées. 2 Trib. adm., 5 mai 2010, n° 25919 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Procédure contentieuse, n° 315 et les autres références

    y citées ; Cour adm., 13 décembre 2018, n° 41218C du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu.

  • 10

    procédure de modification de ces plans et sont comme tels susceptibles de recours sur base de

    l’article 7 (1) de la loi du 7 novembre 19963.

    Cependant, la démarche du législateur devant être présupposée comme visant un résultat

    cohérent, les dispositions de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 et celles de l’article 58 de la

    loi du 19 janvier 2004 sont à lire de façon complémentaire, en sorte que l’article 58, en désignant

    les décisions prises par le ministre de l’Environnement en application de la loi du 19 janvier 2004,

    concerne, suivant les termes mêmes employés, les seules décisions administratives individuelles à

    l’exception des actes administratifs à caractère réglementaire. Il s’ensuit qu’en application de

    l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996, seul un recours en annulation peut être introduit à l’encontre

    d’un arrêté du ministre de l’Environnement par lequel il approuve ou refuse d’approuver une

    délibération d’un conseil communal modifiant la délimitation de la zone verte4.

    Ainsi, la décision du 6 octobre 2017 par laquelle le ministre de l’Environnement a approuvé

    le PAG de la Ville de Luxembourg tel qu’approuvé par le conseil communal le 28 avril 2017 est

    susceptible de faire l’objet d’un recours contentieux en application de l’article 7 de la loi précitée

    du 7 novembre 19965, de sorte que les demandeurs ont valablement pu introduire un recours en

    annulation contre ladite décision.

    Il s’ensuit que le tribunal est compétent pour connaître du recours en annulation introduit en

    l’espèce.

    II) Quant à la loi applicable

    Quant au volet du recours dirigé contre la décision du ministre de l’Environnement, le

    tribunal vient de retenir qu’il est compétent pour connaître du recours en annulation introduit contre

    ladite décision. Dans le cadre d’un tel recours, le juge administratif est amené à apprécier la légalité

    de la décision déférée en considération de la situation de droit et de fait ayant prévalu au jour où elle

    a été prise6, de sorte que la loi précitée du 18 juillet 2018, entrée en vigueur postérieurement à la

    prise de l’acte litigieux, n’est pas à prendre en considération en l’espèce, étant plus particulièrement

    précisé à cet égard que les actes de tutelle administrative, tels que la décision ministérielle litigieuse,

    rétroagissent à la date de la décision approuvée et tombent dès lors sous le champ d’application des

    lois en vigueur à la date de la prise de décision de l’acte initial.

    Le tribunal précise que la procédure d’adoption d’un PAG est prévue par la loi du

    19 juillet 2004. Or, celle-ci a été modifiée à plusieurs reprises et dernièrement (i) par une loi du

    28 juillet 2011 entrée en vigueur, en application de son article 45, en date du 1er août 2011, (ii) par

    la loi du 30 juillet 2013 concernant l’aménagement du territoire, publiée au Mémorial A, n° 160

    du 6 septembre 2013, (iii) par la loi du 14 juin 2015 portant modification de l’article 108 de la loi

    modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain,

    publiée au Mémorial A, n° 113 du 17 juin 2015, (iv) par la loi du 3 mars 2017 dite « Omnibus »,

    entrée en vigueur, en application de son article 76, le 1er avril 2017, (v) par la loi du 17 avril 2018

    concernant l’aménagement du territoire et (vi) par la loi du 18 juillet 2018 portant modification de

    l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le

    développement urbain.

    3 Cour adm., 24 janvier 2006, n° 20233C du rôle, Pas. adm. 2018, V° Actes réglementaires, n° 52 et l’autre référence

    y citée. 4 Trib.adm. 17 janvier 2008, n° 22263 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Actes réglementaires, n° 53 et les autres références

    y citées. 5 Ibidem. 6 Trib. adm., 27 janvier 1997, n° 9724 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Recours en annulation, n° 20 et les autres références y citées.

  • 11

    Etant donné, d’une part, que le tribunal vient de retenir que seul un recours en annulation

    a pu être introduit à l’encontre des actes déférés et, d’autre part, que dans le cadre d’un tel recours,

    le juge administratif est amené à apprécier la légalité de la décision déférée en considération de la

    situation de droit et de fait ayant prévalu au jour où elle a été prise7, les modifications apportées à

    la loi du 19 juillet 2004 par les lois, précitées, des 17 avril et 18 juillet 2018, adoptées et entrées

    en vigueur postérieurement à la prise des actes déférés, ne sont pas à prendre en considération en

    l’espèce.

    Selon les dispositions transitoires figurant à l’article 108ter (1) de la loi du 19 juillet 2004,

    tel que modifié en dernier lieu par la loi précitée du 1er août 2011, « La procédure d’adoption des

    projets d’aménagement général, dont la refonte complète a été entamée par la saisine de la

    commission d’aménagement avant le 1er août 2011, peut être continuée et achevée conformément

    aux dispositions du Titre 3 de la présente loi qui était en vigueur avant le 1er août 2011. (…) ».

    Le tribunal relève que le conseil communal a émis son vote positif, au sens de l’article 10

    de la loi du 19 juillet 2004, en date du 13 juin 2016, de sorte que la saisine de la commission

    d’aménagement en application de l’article 11 de la même loi s’est a fortiori opérée après la date

    butoir du 1er août 2011, fixée par l’article 108ter (1), alinéa 1er de la loi du 19 juillet 2004.

    Il suit de ces constats que la version de la loi du 19 juillet 2004 applicable au présent litige

    est – sous réserve des précisions faites ci-après – celle résultant des modifications opérées par les

    lois des 28 juillet 2011, 30 juillet 2013, 14 juin 2015 et 3 mars 2017.

    S’agissant plus particulièrement de l’applicabilité de cette dernière loi, le tribunal relève

    que dans un arrêt du 24 septembre 2015, portant le numéro 36179C du rôle8, la Cour administrative

    a retenu ce qui suit : « (…) Si le droit administratif est notamment régi par le principe de l’effet

    immédiat de la loi nouvelle, celui-ci ne s’applique néanmoins en principe qu’aux situations

    juridiques nées postérieurement à la date normale de son entrée en vigueur après sa publication,

    ainsi qu’aux situations encore dépourvues de caractère définitif lors de l’entrée en vigueur de la

    loi nouvelle. En outre, les dispositions modifiant une procédure administrative et désignant les

    autorités compétentes sont applicables aux procédures pendantes, sans que les administrés

    puissent prétendre à un droit acquis à voir leur cas traité par l’autorité désignée comme

    compétente par les dispositions antérieures (…). En revanche, le principe de non-rétroactivité des

    lois commande que ne soient pas remis en cause les actes déjà valablement accomplis (…) ».

    Dès lors, si la procédure d’adoption du PAG a certes débuté avant l’entrée en vigueur de la

    loi du 3 mars 2017, laquelle a eu lieu le 1er avril 2017, en application de l’article 76 de ladite loi,

    tel que relevé ci-avant, il n’en reste pas moins qu’à cette dernière date, la procédure en question

    était toujours en cours, de sorte à devoir être qualifiée de procédures pendante, respectivement de

    situation juridique dépourvue de caractère définitif lors de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle.

    Il s’ensuit que conformément aux principes dégagés par la Cour administrative dans l’arrêt, précité,

    du 24 septembre 2015, cette dernière loi doit s’appliquer à la procédure en question dès son entrée

    en vigueur en date du 1er avril 2017. Ainsi, le tribunal doit en tenir compte, dans le cadre de

    l’examen de la légalité des décisions déférées des 28 avril 2017 et 5 octobre 2017, toutes adoptées

    postérieurement au 1er avril 2017. En revanche, en vertu du principe de non-rétroactivité des lois,

    l’acte déféré du conseil communal du 13 juin 2016 ne saurait être remis en cause par ladite loi du

    7 Trib. adm., 27 janvier 1997, n° 9724 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Recours en annulation, n° 20 et les autres références

    y citées. 8 Pas. adm. 2018, V° Lois et règlements, n° 81.

  • 12

    3 mars 2017, s’agissant d’un acte valablement accompli avant l’entrée en vigueur de la loi en

    question.

    III) Quant à la recevabilité

    a) Quant au moyen ayant trait à une irrecevabilité omisso medio

    L’administration communale de la Ville de Luxembourg, ci-après désignée par « l’administration communale, soutient que le syndicat des copropriétaires de la résidence « ... » n'aurait pas soumis d'objections contre le projet d'aménagement général mis en procédure. Les parties intervenantes font valoir que seuls le syndicat des copropriétaires des copropriétés « ... », Monsieur ... et Madame ... auraient émis des objections et réclamations dans le cadre de la procédure d’adoption du PAG. Elles insistent sur le fait qu’il serait de jurisprudence constante que la loi du 19 juillet 2004 prévoit en ses articles 13 et 16 une procédure non contentieuse d'adoption et d'approbation des plans d'aménagement tendant à voir disparaître, au fur et à mesure des aplanissements des difficultés, les objections et réclamations solutionnées, tout en ne laissant subsister que celles maintenues et réitérées, lesquelles seraient seules susceptibles d'être portées devant les juridictions administratives.

    Ainsi, le recours introduit devant le juge administratif contre un projet d'aménagement général ne serait recevable qu'à condition de l'épuisement de la procédure non contentieuse de réclamation prévue par la loi du 19 juillet 2004, de sorte que l'omission d'emprunter la voie de l'objection à adresser au collège des bourgmestre et échevins à l'encontre d'un projet entraînerait l'irrecevabilité omisso medio du recours devant le juge administratif.

    L’administration communale et les parties intervenantes plaident que le recours serait

    irrecevable dans le chef des propriétaires n’ayant pas formulé d’objection, respectivement de

    réclamation contre le PAG mis en procédure.

    Les propriétaires font valoir qu’une éventuelle irrecevabilité omisso medio dans le chef du

    syndicat des copropriétaires de la résidence « ... » n’aurait aucune incidence sur la recevabilité du

    recours dans le chef des autres parties demanderesses.

    En regrettant que la commune entendrait porter le débat sur la recevabilité du recours, ils

    rappellent que le syndicat des copropriétaires de la résidence « ... », représentée par son syndic, la

    société ..., aurait réclamé auprès du ministre de l'Intérieur, lequel aurait considéré la réclamation

    comme étant recevable, de sorte qu'il ne saurait être question d'une quelconque irrecevabilité

    omisso medio.

    A titre subsidiaire, les propriétaires soutiennent que l'irrecevabilité omisso medio ne saurait

    être retenue, alors qu'il serait de jurisprudence que le terme « forclusion » viserait uniquement la

    réclamation introduite auprès du collège échevinal et non l'éventuel recours subséquent. Tout en

    admettant qu’il y aurait des décisions divergentes des juridictions administratives, « en adoptant

    une position contra-legem », il n'en demeurerait pas moins que la jurisprudence sur la recevabilité

    omisso medio ne résisterait pas à une analyse juridique rigoureuse. Ainsi, elle partirait de fausses

    prémisses et de confusions entre les réclamations portées à un niveau précontentieux et des recours

    obligatoires organisés par un texte. Ladite jurisprudence poserait également question eu égard au

    droit à un recours effectif, prévu aux articles 6 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde

    des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, ci-après désignée par « la CEDH ».

    Il échet de rappeler que la loi du 19 juillet 2004 prévoit en son « Chapitre 3 - Procédure

    d’adoption du plan d’aménagement général » les règles applicables à la procédure d’adoption d’un

    PAG. Quant à la question plus précise des réclamations à faire valoir lors de l’élaboration d’un PAG,

  • 13

    celles-ci sont visées aux articles 13 et 16 de la loi du 19 juillet 2004, tels qu’en vigueur au moment

    de la prise des décisions litigieuses, lesquels disposent comme suit :

    « Art. 13. Réclamations

    « Dans le délai de trente jours de la publication du dépôt du projet dans les quatre

    quotidiens imprimés et publiés au Grand-Duché de Luxembourg, les observations et objections

    contre le projet doivent être présentées par écrit au collège des bourgmestre et échevins sous peine

    de forclusion.

    Au cas où une ou plusieurs observations écrites ont été présentées dans le délai, le collège

    des bourgmestre et échevins convoque les réclamants qui peuvent, en vue de l’aplanissement des

    différends, présenter leurs observations. »

    « Art. 16. Réclamations contre le vote du conseil communal

    Les réclamations contre le vote du conseil communal introduites par les personnes ayant

    réclamé contre le projet d’aménagement général conformément à l’article 13 doivent être adressées

    au ministre dans les quinze jours suivant la notification prévue à l’article qui précède, sous peine

    de forclusion.

    Les réclamations dirigées contre les modifications apportées au projet par le conseil

    communal doivent être adressées au ministre dans les quinze jours de l’affichage prévu à l’article

    qui précède, sous peine de forclusion.

    Sont recevables les réclamations des personnes ayant introduit leurs observations et

    objections conformément à l’article 13 et les réclamations dirigées contre les modifications

    apportées au projet par le conseil communal lors du vote.».

    Ainsi, les articles 13 et 16 précités prévoient à deux stades différents de l’élaboration d’un

    plan d’aménagement la possibilité d’introduire une réclamation, à savoir dans les trente jours qui

    suivent la mise en procédure par le conseil communal, où les observations et objections contre le

    projet doivent être présentées par écrit au collège des bourgmestre et échevins sous peine de

    forclusion, et, dans les quinze jours suivant la notification de la décision définitive aux intéressés

    par lettre recommandée avec avis de réception, où les réclamations contre le vote du conseil

    communal portant adoption du projet doivent être adressées au ministre sous peine de forclusion.

    En d’autres termes, la procédure d’adoption d’un PAG a été mise en place en vue d'aplanir

    les différends dans une phase non contentieuse, cette procédure permettant, en effet, aux personnes

    intéressées de faire valoir leurs points de vue, leurs argumentaires et ce, en dehors de tout procès.

    S’agissant d’une phase précontentieuse, les différents acteurs s'efforcent de trouver une solution aux

    réclamations introduites en ayant pour objectif d'éviter un allongement des procédures, allongement

    qui serait inévitable si chaque réclamation devait faire l'objet d'une procédure contentieuse.

    En l’espèce, il échet de constater que le syndicat des copropriétaires de la résidence « ... »

    n’a pas adressé d’objections à l’encontre du projet d’aménagement général au collège des

    bourgmestre et échevins dans le délai imparti mais a réclamé contre la délibération du conseil

    communal du 28 avril 2017 auprès du ministre par courrier du 22 mai 2017. Madame ... a introduit

    ses objections contre la délibération du conseil communal du 13 juin 2016 par courrier entré au

    secrétariat de la Ville de Luxembourg en date du 20 juillet 2016 et a réclamé auprès du ministre par

    courrier du 22 mai 2017. Monsieur et Madame ... et ... ont formulé des objections auprès du collège

    échevinal par courrier du 1er juillet 2016 et leur courrier de réclamation est daté au 11 mai 2017, ce

    courrier étant signé par « ... dit ... », pour autant que les parties intervenantes auraient entendu mettre

  • 14

    en doute l’identité de Monsieur ... à travers leur contestation. Quant au syndicat des copropriétaires

    de la résidence « ... », il échet de constater que par courrier du 18 juillet 2017 Monsieur ... et Madame

    ... ont formulé des objections auprès du collège des bourgmestre et échevins en leur qualité de

    membres du conseil syndical de la résidence « ... ». Or, selon l’article 14 de la loi modifiée du 16

    mai 1975 portant statut de la copropriété des immeubles bâtis, « [l]’exécution des décisions du

    syndicat est confiée à un syndic placé éventuellement sous le contrôle d’un conseil syndical. (…)

    Le syndic représente le syndicat dans tous les actes civils et en justice. Les actes de procédure

    concernant le syndicat des copropriétaires sont régulièrement signifiés, suivant les cas, au syndic

    ou à la requête de celui-ci. ». Ainsi, le conseil syndical en tant qu’organe de contrôle du syndic

    n’avait a priori pas le pouvoir de formuler des objections au nom du syndicat, de sorte que le

    syndicat des copropriétaires de la résidence « ... » doit être considéré comme n’ayant pas introduit

    d’objection auprès du collège des bourgmestre et échevins. Il n’a pas non plus formulé de

    réclamations auprès du ministre par la suite.

    Ainsi, le syndicat des copropriétaires de la résidence « ... » n’a ni formulé d’objection ni de

    réclamation auprès collège des bourgmestre et échevins, respectivement du ministre, tandis que le

    syndicat des copropriétaires de la résidence « ... » n’a pas soumis d’objection auprès du collège

    échevinal à la suite de la délibération du conseil communal du 13 juin 2016.

    L’objectif des différentes étapes de la procédure d’adoption d’un PAG est d’éviter que des

    objections qui auraient pu être soulevées et résolues au cours de la phase précontentieuse ne soient

    soulevées pour la première fois dans le cadre d’un recours contentieux et risquent ainsi de prolonger

    inutilement l’élaboration du PAG. Il s’ensuit que le recours introduit devant le juge administratif

    contre un PAG n’est recevable qu’à condition de l’épuisement de la procédure non contentieuse de

    réclamation prévue par l’article 16 de la loi du 19 juillet 2004 impliquant en particulier que

    l’omission d’emprunter la voie de la réclamation à adresser au ministre à l’encontre du vote du

    conseil communal portant adoption du projet d’aménagement général entraîne l’irrecevabilité

    omisso medio du recours devant le juge administratif, de sorte que le recours introduit au nom du

    syndicat des copropriétaires de la résidence « ... » est irrecevable, en ce qu’il est dirigé à l’encontre

    des décisions communale et ministérielle des 28 avril et 5 octobre 2017 portant adoption,

    respectivement approbation du PAG.

    Ensuite, concernant le fait que les syndicats des copropriétaires des résidences « ... » n’a pas

    soumis d’objections au conseil échevinal, il échet de retenir qu’en l’absence de réclamation portée

    antérieurement devant le collège des bourgmestre et échevins par ledit syndicat des copropriétaires,

    toute l’économie du système de l’aplanissement des difficultés surgissant dans le cadre de

    l’élaboration d’un PAG et prévue à un stade précontentieux tombe à faux. L’intervention du ministre

    correspondant au dernier échelon précontentieux d’un recours administratif prévu par la loi ne se

    produirait, par impossible, que de manière tronquée voire biaisée étant donné que tous les stades de

    réclamation précédents et nécessaires en vue de la résolution des difficultés soulevées par les

    réclamants ont manifestement été omis9.

    S’agissant de l’affirmation des propriétaires selon laquelle le ministre aurait déclaré sa

    réclamation comme étant recevable, « de sorte qu’il ne saurait être question d’une quelconque

    irrecevabilité omisso medio », il échet d’abord de constater qu’il ne ressort pas de la décision

    ministérielle que le ministre se serait explicitement prononcé quant à la recevabilité de la

    réclamation du syndicat des copropriétaires de la résidence « ... » et ensuite que même à supposer

    que le ministre se serait prononcé quant à la recevabilité de la réclamation, ce constat ne s’imposerait

    pas au tribunal ayant à connaître du recours en annulation introduit contre cette décision

    ministérielle.

    9 Trib. adm. 15 janvier 2016, n°35395 du rôle, non publié.

  • 15

    Concernant l’affirmation des propriétaires selon laquelle l’irrecevabilité omisso medio

    violerait le droit du syndicat des copropriétaires de la résidence « ... » à un recours effectif prévu à

    l’article 6 de la CEDH, lequel dispose que toute personne a le droit d’être jugée par un juge

    indépendant et impartial dans le cadre d’un procès équitable, respectivement de l’article 13 de la

    CEDH, lequel consacre le droit à un recours effectif, il y a lieu de retenir que la procédure d’adoption

    d’un PAG ne prive pas les administrés d’intenter un recours contentieux devant les juridictions

    administratives mais en conditionne uniquement la recevabilité par l’usage par l’administré du droit

    lui conféré à réclamer auprès des instances compétentes dans les délais légalement impartis. En

    effet, les articles 6 et 13 de la CEDH n’interdisent pas l’existence de règles relatives à des formalités

    et à des délais à observer préalablement à l’introduction d’un recours contentieux10.

    Il suit de ce qui précède que le recours est à déclarer irrecevable dans le chef du syndicat des

    copropriétaires de la résidence « ... » ainsi que dans le chef du syndicat des copropriétaires de la

    résidence « ... », en ce qu’il est dirigé contre la décision du conseil communal du 28 avril 2017 et la

    décision du ministre du 5 octobre 2017.

    b) Quant à la question du caractère décisionnel de la délibération du conseil communal du 13 juin 2016

    L’administration communale, la partie étatique et les parties intervenantes soulèvent

    l’irrecevabilité du recours en ce qu’il vise la délibération du conseil communal du 13 juin 2016,

    au motif, en substance, qu’il ne s’agirait que d’un accord ou d’un « feu vert » – dépourvu de

    caractère décisionnel – donné au collège échevinal pour entamer la procédure d’adoption du PAG,

    ainsi que cela se dégagerait de la jurisprudence des juridictions administratives.

    Dans le cadre de son mémoire en réplique, la société demanderesse se rapporte à prudence

    du tribunal en ce qui concerne la question de la recevabilité du volet du recours dirigé contre la

    délibération du conseil communal du 13 juin 2016.

    L’acte administratif susceptible de faire l’objet d’un recours contentieux doit constituer une

    véritable décision de nature à faire grief, c’est-à-dire un acte susceptible de produire par lui-même

    des effets juridiques affectant la situation personnelle et patrimoniale de celui qui réclame. N’ont

    pas cette qualité de décision faisant grief, comme n’étant pas destinées à produire, par elles-mêmes,

    des effets juridiques, les informations données par l’administration, tout comme les déclarations

    d’intention ou les actes préparatoires d’une décision.11

    Dans un arrêt du 15 décembre 2016, portant le numéro 38139C du rôle, la Cour

    administrative a précisé la nature juridique du vote du conseil communal prévu par l’article 10 de

    la loi du 19 juillet 2004. Dans l’arrêt en question, la Cour administrative, après avoir relevé

    qu’avant la prise d’effet des modifications apportées à la loi du 19 juillet 2004 par celle du 28

    juillet 2011, les PAG étaient soumis à la « (…) procédure classique d’adoption et d’approbation

    (…) en deux temps (…)[, qui] comprenait d’abord un vote provisoire par le conseil communal

    contre lequel des objections étaient ouvertes, elles-mêmes vidées par le même conseil communal

    à travers le vote définitif, contre lequel des réclamations pouvaient être introduites devant le

    ministre de l’Intérieur qui, dans le cadre de ses attributions de tutelle d’approbation, était amené

    à vider les réclamations ainsi portées devant lui, et à approuver ou non le PAG, de sorte à revêtir

    une double casquette à ce sujet. (…) », et après avoir précisé que dans le cadre de cette procédure

    10 Cour adm. 5 juillet 2018, n° 40866C du rôle, disponible sur www.ja.etat.lu. 11 Trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9658 du rôle, confirmé sur ce point par Cour adm. 19 février 1998, n° 10263C du rôle,

    Pas. adm. 2018, V° Actes administratifs, n° 61 et les autres références y citées.

  • 16

    classique « (…) le conseil communal, en adoptant provisoirement un projet de PAG, avait en

    quelque sorte fait sien le projet d’une manière effective en l’adoptant à un premier stade, quitte à

    ce que des objections puissent être formulées relativement à cette première adoption communale

    (…) », a constaté que cette procédure avait été modifiée par ladite loi du 28 juillet 2011. Ainsi,

    l’article 10 prévoit, dans sa version modifiée, que le conseil communal délibère sur le projet

    d’aménagement général, tel qu’il lui est présenté par le collège des bourgmestre et échevins,

    ensemble avec l’étude préparatoire, le rapport de présentation ainsi que, le cas échéant, le rapport

    sur les incidences environnementales, et qu’en cas de vote positif, le collège des bourgmestre et

    échevins peut lancer les différentes procédures de consultation. L’article 14, quant à lui, prévoit,

    dans sa version modifiée, que le projet d’aménagement général ensemble avec toutes les pièces

    mentionnées à l’article 10 est soumis au conseil communal avec l’avis de la commission

    d’aménagement et, le cas échéant, avec l’avis du ministre ayant dans ses attributions

    l’environnement, le rapport sur les incidences environnementales, les réclamations et les

    propositions de modifications du collège des bourgmestre et échevins. Le conseil communal peut

    ensuite approuver le projet tel que présenté ou y apporter des modifications issues des propositions

    de la commission d’aménagement, de l’avis émis par le ministre de l’Environnement ou encore

    des observations et objections présentées. Enfin, le conseil communal peut renvoyer le dossier

    devant le collège des bourgmestre et échevins – qui est tenu de recommencer la procédure prévue

    aux articles 10 et suivants – lorsqu’il entend apporter d’autres modifications au projet

    d’aménagement général.

    A partir d’une lecture combinée des articles 10 à 14 de la loi du 19 juillet 2004, tels que

    résultant de la modification du 28 juillet 2011, la Cour administrative est arrivée à la conclusion

    que le vote du conseil communal prévu à l’article 10, alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004, dans sa

    version applicable depuis la modification par la loi du 28 juillet 2011, n’est plus comparable à

    l’adoption provisoire du PAG – prévue par l’ancienne version dudit article – et ne peut dès lors

    plus être analysé en adoption du projet de plan, mais en une sorte de mise sur orbite dudit projet,

    respectivement en un feu vert donné au collège échevinal pour procéder aux consultations prévues

    aux articles 11 et 12 de la même loi. La Cour a encore retenu que l’opération visée à l’article 14

    consiste en règle générale dans l’adoption unique et définitive par le conseil communal du projet

    de PAG qui devient le PAG adopté par l’organe compétent de la commune. Cette adoption peut se

    faire soit sous la forme originale, soit, dans la majorité des cas, sur les modifications opérées par

    le conseil communal compte tenu des consultations menées.

    Ainsi, le vote positif émis par le conseil communal, en application de l’article 10, alinéa 2

    de la loi du 19 juillet 2004, ne constitue qu’une « (…) mise sur orbite [du] projet (…) »,

    respectivement un « feu vert » que le conseil communal donne au collège échevinal pour continuer

    la procédure et pour procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi du 19 juillet

    2004, après avoir constaté que le projet est suffisamment élaboré à cette fin.

    Or, une telle « mise sur orbite », respectivement un tel « feu vert », qui n’emporte aucune

    adoption ou approbation du projet d’aménagement général, mais qui traduit le seul constat du

    conseil communal que le projet est suffisamment élaboré pour que le collège échevinal puisse

    continuer la procédure, ne fait que préparer l’adoption ultérieure de ce projet, sans être susceptible

    de produire par elle-même, respectivement par lui-même des effets juridiques sur la situation

    personnelle ou patrimoniale des administrés, de sorte à constituer, non pas un acte administratif de

    nature à faire grief, mais un simple acte préparatoire ne pouvant, en tant que tel, faire l’objet d’un

    recours contentieux.12

    12 Trib. adm., 25 septembre 2017, n° 37637 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Actes règlementaires, n° 56 et les autres

    références y citées.

  • 17

    Il s’ensuit que le recours en annulation est à déclarer irrecevable pour autant qu’il vise la

    délibération du conseil communal du 13 juin 2016.

    c) Quant au moyen d’irrecevabilité ayant trait à un défaut d’intérêt à agir dans le chef des propriétaires

    Les parties intervenantes soulèvent l’irrecevabilité du recours des propriétaires pour défaut

    d’intérêt à agir en soutenant qu’ils essaieraient de justifier leur intérêt à agir par des désagréments

    qu'ils subiraient en raison du projet d'une envergure de 8 hectares. Or, s'il est vrai que l'ensemble

    du site accuserait une superficie totale de 8 hectares, la viabilisation finale serait limitée à 1,62

    hectares seulement. L’attitude des propriétaires serait « à caractériser de «NIMBY» (not in my

    backyard) », alors que la viabilisation projetée ne serait rien d'autre que la suite logique d'un

    urbanisme cohérent à cet endroit du territoire de la Ville de Luxembourg. Elles soulignent que le

    site aurait toujours été classé en zone constructible dont les propriétaires auraient pu eux-mêmes

    profiter pour leurs propres habitations et qu’une augmentation du trafic due aux 414 logements

    ferait partie des contraintes normales d'une vie en société et encore plus d'une vie dans la capitale

    d'un pays.

    Les propriétaires ne prennent pas position quant à ce moyen d’irrecevabilité.

    Il échet, à titre liminaire, de retenir que, dans la mesure où le recours vient d’être déclaré

    irrecevable omisso medio dans le chef des syndicats des copropriétaires des résidences « ... » et

    « ... », en ce qu’il vise les décisions des 28 avril et 5 octobre 2017 portant adoption, respectivement

    approbation du PAG, le tribunal ne procédera pas à l’analyse de l’intérêt de ces parties à agir contre

    lesdites décisions.

    Quant à la question de l’intérêt à agir en matière de PAG, le tribunal rappelle qu’il ressort

    d’une jurisprudence constante des juridictions administratives13 que le recours introduit devant le

    juge administratif contre un projet d’aménagement général communal n’est recevable qu’à

    condition de l’épuisement de la procédure non contentieuse de réclamation, entraînant qu’en

    particulier l’omission d’emprunter la voie de la réclamation à adresser au gouvernement à

    l’encontre de la délibération portant adoption d’un projet entraîne l’irrecevabilité omisso medio du

    recours devant le juge administratif. Il ressort de cette même jurisprudence qu’en contrepartie, peu

    importe que cette réclamation ait été déclarée irrecevable ou non fondée par le ministre, le

    réclamant en question dispose d’un intérêt à voir vérifier la légalité de la décision ministérielle

    prise à son encontre et, plus loin, de la délibération communale ainsi approuvée, de sorte que son

    recours en annulation est recevable sous l’aspect de l’intérêt à agir au-delà de toutes autres

    considérations, fussent-elles du domaine politique.

    En l’espèce, il est constant que les propriétaires, à l’exception des syndicats des

    copropriétaires des résidences « ... » et « ... », avaient introduit une objection auprès du collège

    des bourgmestre et échevins contre le projet de refonte du PAG et il se dégage des pièces versées

    en cause, notamment du tableau renseignant les réponses données par le conseil communal aux

    différentes réclamations lui soumises, que dans le cadre de la prise de la décision d’adoption dudit

    projet, approuvée par le ministre, le conseil communal a fait droit à certains points de l’objection,

    tout en rejetant la réclamation pour le surplus. Il est encore constant en cause que les demandeurs

    ont introduit une réclamation auprès du ministre contre le vote du conseil communal portant

    13 Cour adm., 17 avril 2008, n° 23846C du rôle, Pas. adm. 2018, V° Urbanisme, n° 258 et les autres références y citées,

    ainsi que trib. adm., 24 mars 2004, n° 16556 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Procédure contentieuse, n° 103 et les autres

    références y citées, de même que trib. adm., 8 décembre 2014, n° 33918 du rôle, confirmé par Cour. adm., 12 mai 2015,

    n° 35730C du rôle, Pas. adm. 2018, V° Procédure contentieuse, n° 101 et les autres références y citées.

  • 18

    adoption du projet d’aménagement général. Par la suite, le ministre a, à travers sa décision déférée

    du 5 octobre 2017, approuvé la délibération du conseil communal du 28 avril 2017 portant

    adoption du projet d’aménagement général, tout en déclarant les réclamations afférentes des

    propriétaires non fondées.

    Eu égard aux considérations qui précèdent, les demandeurs disposent partant en l’espèce

    d’un intérêt à agir suffisant par le seul fait que leurs réclamations dirigées contre le projet

    d’aménagement général ont été rejetées par le ministre, respectivement par le conseil communal,

    avec l’approbation du ministre.

    A défaut par les parties intervenantes d’avoir formulé des arguments spécifiques quant à

    un défaut d’intérêt à agir contre la décision du ministre de l’Environnement et, dans la mesure où

    ladite décision du 6 octobre 2017 porte, entre autres, sur le site « ... », l’intérêt des parties

    demanderesses à agir à l’encontre de ladite décision n’a pas été valablement remis en cause.

    Le moyen d’irrecevabilité afférent encourt, dès lors, à son tour, le rejet.

    c) Quant au moyen d’irrecevabilité omisso medio concernant certains moyens

    d’annulation

    L’administration communale conclut à l’irrecevabilité omisso medio du recours, en

    soutenant que certains moyens, soulevés dans la requête introductive d’instance, n’auraient pas été

    invoqués par les demandeurs dans le cadre de la procédure précontentieuse. Sont ainsi visés les

    moyens suivants :

    - moyen tiré de la violation de l'article 14 de la loi du 19 juillet 2004 (2e branche) - moyens tirés d’une violation des articles 5, 13, 17 et 20 de la loi du 19 janvier 2004.

    A l’appui de ce moyen d’irrecevabilité, l’administration communale soutient que le tribunal

    administratif, dans un jugement du 10 juillet 2014, portant le numéro 32627 du rôle, ainsi que la

    Cour administrative, dans l’arrêt confirmatif afférent du 4 juin 2015, portant le numéro 35035C

    du rôle, auraient précisé que la loi du 19 juillet 2004 prévoirait dans son article 30 une procédure

    non contentieuse d’adoption et d’approbation des PAP, dont le but serait précisément de voir

    disparaître, au fur et à mesure des aplanissements des difficultés, les objections et réclamations

    solutionnées, tout en ne laissant subsister que celles maintenues et réitérées, lesquelles seraient

    seules susceptibles d’être portées devant les juridictions administratives, de sorte qu’en cas de

    défaut d’épuisement de la procédure précontentieuse de réclamation ainsi mise en place par le

    législateur, le recours contentieux introduit à l’encontre d’un PAP serait irrecevable omisso medio.

    Ces principes devraient également s’appliquer en matière de PAG, au regard des dispositions des

    articles 13 et suivants de la loi du 19 juillet 2004. Par ailleurs, ces mêmes principes devraient

    s’appliquer non seulement en l’absence de toute réclamation au cours de la procédure

    précontentieuse d’adoption des PAP et PAG, mais également et a fortiori en présence de moyens

    d’annulation invoqués pour la première fois au cours de la procédure contentieuse, sous peine de

    priver d’effet ladite procédure précontentieuse, destinée à résoudre les réclamations à un stade

    non-contentieux. Ainsi, seuls les arguments effectivement soulevés à un stade précontentieux

    pourraient être invoqués devant les juridictions administratives. Admettre le contraire aurait pour

    conséquence de légitimer des objections et réclamations stéréotypés, consistant, le cas échéant, en

    une seule « (…) ligne de principe (…) », ce qui serait contraire aux objectifs de la loi du 19 juillet

    2004 et aurait pour effet de vider de leur substance les dispositions des articles 13, 16 et 30 de

    ladite loi. L’administration communale en conclut que le recours devrait être déclaré irrecevable

    sous l’angle des moyens d’annulation invoqués dans la requête introductive d’instance, mais non

    formulés par les demandeurs dans leurs courriers précités, à titre d’objections, respectivement de

  • 19

    réclamation.

    Les demandeurs sollicitent le rejet de ce moyen d’irrecevabilité.

    Le tribunal rappelle qu’à travers les articles 10 et suivants de la loi du 19 juillet 2004, le

    législateur a mis en place une procédure d’adoption des PAG qui se déroule en plusieurs étapes,

    comprenant une enquête publique. Ainsi, l’article 12 de ladite loi dispose qu’après le vote du

    conseil communal prévu par l’article 10, le projet d’aménagement général fait l’objet d’une

    publication, comprenant, notamment, le dépôt du projet pendant trente jours à la maison

    communale où le public peut en prendre connaissance, ainsi que des mesures de publicité de ce

    dépôt. L’article 13 de la même loi prévoit que dans le délai de trente jours de la publication du

    dépôt du projet dans les quatre quotidiens imprimés et publiés au Grand-Duché de Luxembourg,

    les observations et objections contre le projet doivent être présentées par écrit au collège des

    bourgmestre et échevins, sous peine de forclusion. Cette disposition légale dispose encore qu’au

    cas où une ou plusieurs réclamations écrites ont été présentées dans le délai, le collège des

    bourgmestre et échevins convoque les réclamants qui peuvent, en vue de l’aplanissement des

    différends, présenter leurs observations. Aux termes de l’article 14, alinéa 1er de la loi du

    19 juillet 2004, le projet d’aménagement général est ensuite soumis au conseil communal qui peut

    approuver le projet dans sa forme originale ou y apporter des modifications qui soit sont proposées

    par la commission d’aménagement, soit répondent en tout ou en partie à l’avis émis par le ministre

    ayant l’Environnement dans ses attributions, soit prennent en compte en tout ou en partie des

    observations et objections présentées. En vertu du 3e alinéa du même article, le conseil communal

    est tenu de renvoyer le dossier au collège des bourgmestre et échevins lorsqu’il entend apporter

    des modifications autres que celles visées à l’alinéa 1er. Enfin, il peut rejeter le projet

    d’aménagement général présenté et dans cette hypothèse, le dossier est clôturé. Aux termes de

    l’article 15 de la loi du 19 juillet 2004, la décision du conseil communal fait l’objet d’une

    publication, par voie d’affichage et par notification aux personnes ayant introduit une réclamation

    écrite. Cette publication est suivie d’une procédure de réclamation devant le ministre, organisée

    par l’article 16 de la même loi, libellé comme suit : « Les réclamations contre le vote du conseil

    communal introduites par les personnes ayant réclamé contre le projet d’aménagement général

    conformément à l’article 13 doivent être adressées au ministre dans les quinze jours suivant la

    notification prévue à l’article qui précède, sous peine de forclusion.

    Les réclamations dirigées contre les modifications apportées au projet par le conseil

    communal doivent être adressées au ministre dans les quinze jours de l’affichage prévu à l’article

    qui précède, sous peine de forclusion.

    Sont recevables les réclamations des personnes ayant introduit leurs observations et

    objections conformément à l’article 13 et les réclamations dirigées contre les modifications

    apportées au projet par le conseil communal lors du vote. ». Aux termes de l’article 18 de ladite

    loi du 19 juillet 2004, le ministre est, par la suite, amené à statuer sur les réclamations lui soumises,

    en même temps qu’il décide de l’approbation définitive du projet d’aménagement général,

    dénommé PAG dès cette approbation.

    Aux termes d’une jurisprudence des juridictions administratives devenue constante, le

    recours introduit devant le juge administratif contre un PAG n’est recevable qu’à condition de

    l’épuisement de la procédure non contentieuse de réclamation ainsi mise en place par les articles

    13 et suivant de la loi du 19 juillet 2004 impliquant en particulier que l’omission d’emprunter la

    voie de la réclamation à adresser au ministre à l’encontre du vote du conseil communal portant

  • 20

    adoption du projet d’aménagement général14 entraîne l’irrecevabilité omisso medio du recours

    devant le juge administratif.

    En ce qui concerne le contenu de la réclamation à adresser au ministre, il convient d’abord

    de constater que la loi du 19 juillet 2004 a prévu à travers ses articles 13 et suivants une procédure

    non contentieuse d’adoption et d’approbation des PAG tendant à voir disparaître, au cours de

    l’élaboration du PAG les objections et réclamations solutionnées, tout en ne laissant subsister que celles maintenues et réitérées, lesquelles seraient partant seules susceptibles d’être portées devant

    les juridictions de l’ordre administratif. Le fait que l’intention du législateur est de faire disparaître

    au fur et à mesure des procédures d’aplanissement des difficultés les différentes demandes et

    réclamations des administrés implique que seules les réclamations d’ores et déjà formulées au cours de la procédure précontentieuses sont susceptibles d’être portées devant le juge administratif,

    étant précisé à cet égard que la motivation à l’appui de ces réclamations peut être complétée et

    développée durant la phase contentieuse pour autant que la réclamation en elle-même ait d’ores et

    déjà été présentée en phase précontentieuse. Il y a partant lieu de distinguer entre le moyen nouveau avancé à l’appui d’une réclamation et la demande nouvelle invoquée une toute première fois

    devant les juridictions administratives. Ainsi, le moyen nouveau qui se définit comme la raison de

    droit ou de fait invoquée à l’appui de la réclamation est susceptible d’être invoqué devant le

    tribunal administratif même s’il y est invoqué pour la première fois, pour autant que la réclamation ait d’ores et déjà traversé la procédure précontentieuse sans aboutir. En revanche, les demandes

    nouvelles, se définissant comme demandes qui diffèrent de la demande initiale contenue dans

    l’observation ou la réclamation par son objet, par sa cause ou par les personnes entre qui elle est

    engagée n’ayant pas été présentées au cours de la procédure d’élaboration du PAG mais qui sont invoquées pour la première fois devant les juges administratifs sont irrecevables.15

    En l’espèce, dans le cadre de la procédure d’élaboration du PAG litigieux, les demandeurs

    avaient présenté des objections et observations auprès du collège des bourgmestre et échevins, respectivement une réclamation auprès du ministre, visant à convaincre ces autorités à ne pas

    adopter, respectivement approuver, sous leur forme soumise à l’enquête publique, le projet afférent

    en raison de certaines irrégularités et illégalités. Le recours contentieux sous examen vise à son

    tour l’annulation de la décision du conseil communal portant adoption du projet d’aménagement général, ainsi que de la décision ministérielle portant approbation de ladite décision du conseil

    communal. Indépendamment de l’argumentation juridique soulevée, d’une part, au cours de la

    procédure précontentieuse et, d’autre part, dans le cadre du présent litige, force est au tribunal de

    constater que les demandes présentées dans le cadre de ces deux procédures sont identiques, en ce qu’elles tendent, en substance, à la disparition de l’ordonnancement juridique du PAG sous

    examen. En effet, aucune demande nouvelle ne peut être décelée dans le recours sous examen par

    rapport aux observations et objections introduites devant le collège des bourgmestre et échevins,

    respectivement à la réclamation soumise au ministre. Le moyen d’irrecevabilité afférent est partant à rejeter pour ne pas être fondé.

    d) Quant au moyen ayant trait à l’irrecevabilité du recours en ce qu’il vise la décision du ministre de l’Environnement

    L’administration communale et les parties intervenantes concluent à l’irrecevabilité du recours en ce qu’il est dirigé contre la décision du ministre de l'Environnement approuvant le PAG, alors qu’en application de l'article 5 de la loi du 19 janvier 2004, cette décision ne porterait que

    14 P. ex. : Cour adm., 17 avril 2008, n° 23846C du rôle, Pas. adm. 2018, V° Urbanisme, n° 258 et les autres références

    y citées. 15 Trib. adm., 28 juin 2018, n° 39248 du rôle, non réformé sur ce point par Cour adm., 7 février 2019, n° 41544C du

    rôle ; voir également : trib. adm., 4 octobre 2018, n° 39421 du rôle, non réformé sur ce point par Cour adm., 21 mars

    2019, n° 41948C et 41949C du rôle, disponibles sur www.jurad.etat.lu.

  • 21

    sur des modifications de la délimitation de la zone verte. Or, en l'espèce, la version du PAG refondu tel qu'approuvé par le ministre ne comporterait pas de modifications de la délimitation de la zone verte concernant le site ....

    Les demandeurs concluent au rejet de ce moyen.

    Force est au tribunal de retenir que le moyen d’irrecevabilité tel que formulé par la partie

    communale et les parties intervenantes relève du fond de l’affaire et qu’il n’est dès lors pas

    susceptible d’affecter la recevabilité de la requête introductive d’instance, étant rappelé que l’intérêt

    à agir n’est pas à confondre avec le fond du droit en ce qu’il se mesure non au bien-fondé des moyens

    invoqués à l’appui d’une prétention, mais à la satisfaction que la prétention est censée procurer à

    une partie16.

    Le moyen d’irrecevabilité afférent encourt, dès lors, à son tour, le rejet.

    En l’absence d’autres moyens d’irrecevabilité, le tribunal est amené à conclure que le

    recours en annulation est recevable en ce qu’il est introduit par le syndicat des copropriétaires des

    copropriétés « ... », Monsieur ..., Madame ..., Monsieur ... et Madame ... à l’encontre de la décision

    du conseil communal du 28 avril 2017, de la décision du ministre du 5 octobre 2017 et de la

    décision du ministre de l’Environnement du 6 octobre 2017 pour avoir été introduit dans les formes

    et délai de la loi.

    IV) Quant au fond

    A titre liminaire, le tribunal relève qu’il lui appartient de déterminer la suite du traitement

    des moyens et arguments des parties compte tenu de la logique juridique dans laquelle ils

    s’inscrivent, sans être lié par l’ordre dans lequel les moyens ont été présentés par les parties,

    l’examen des moyens tenant à la légalité externe devant précéder celui des moyens tenant à la

    légalité interne, étant encore précisé qu’après avoir jugé les qualités et intérêt à agir d’une personne

    comme étant vérifiés, la juridiction administrative ne vérifie pas l’intérêt au moyen.17

    1) Quant au moyen ayant trait à une violation de la loi communale

    En se basant sur l'article 13 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988, ci-après

    désignée par « la loi du 13 décembre 1988 », les demandeurs soutiennent que le projet

    d'aménagement général de la Ville de Luxembourg aurait été voté en séance du conseil communal

    du 13 juin 2016, alors que tous les documents élaborés par le bureau ..., dont notamment l'étude

    préparatoire du PAG, le rapport de justification, la partie écrite du PAG et la partie écrite des plans

    d’aménagement particulier « quartier existant », ci-après désignés par « PAP QE », seraient datés

    également au 13 juin 2016, de sorte que les documents précités n’auraient pas été consultables au

    moins 5 jours avant la délibération du conseil communal.

    Il en résulterait que le vote du conseil communal du 13 juin 2016 serait irrégulier, de sorte

    que la procédure de refonte du PAG serait viciée sur un point fondamental qui impacterait la

    légalité de toutes les décisions ultérieures.

    16 Trib. Adm. 30 juin 2010, n° 26267 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Procédure contentieuse, n° 4 et les autres références

    y citées. 17 Cour adm., 12 février 2015, n° 34667C, 34671C et 34683C du rôle, Pas. adm. 2018, V° Procédure contentieuse, n°

    8 ; voir également : trib. adm. prés., 9 novembre 2015, n° 37082 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Procédure contentieuse,

    n° 34 et les autres références y citées.

  • 22

    Il s’y rajouterait que le ministre n'aurait pas statué sur cette objection déjà formulée devant

    lui.

    L’administration communale fait valoir que dans la mesure où les documents en question

    auraient été destinés à être soumis au vote des conseillers communaux, ils auraient été datés non

    pas de la date de leur établissement, ni de leur soumission aux conseillers, mais ils porteraient la

    date du conseil communal à l'ordre du jour duquel ils figuraient, de sorte qu’il ne saurait en être

    déduit une quelconque violation de l'article 13 de la loi communale, d’aut