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D ébut décem- bre. Londres est recouverte d’un manteau blanc. Ayant réussi in extremis à passer le tunnel sous la Manche malgré les conditions météo, le minis- tre wallon de l’Économie Jean- 46 23 DÉCEMBRE 2010 | WWW.TRENDS.BE ANALYSEINVESTISSEMENTS EN PLEIN IMBROGLIO COMMUNAUTAIRE La Belgique veut encore séduire les étrangers Les atouts fiscaux de la Belgique Divers systèmes ou avantages fiscaux renforcent l’intérêt de la Belgique pour les inves- tisseurs étrangers. 1. Le régime des holdings «Le pays est l’un des seuls de la zone euro à avoir instauré une exonération intégrale et quasi incondi- tionnelle des plus-values réalisées sur la cession d’actions ou de titres. A cela s’ajoute, la pos- sibilité d’exonérer, à concurrence de 95 %, les dividendes perçus par une holding», résume Jean-Michel Degée, avocat spécialiste en droit fiscal chez Liedekerke. En outre, les dividendes distribués par les filiales belges à leur société mère ne font la plupart du temps pas l’objet d’une retenue à la source chez nous. 2. Les intérêts notionnels Ce système reste pour l’instant l’atout majeur de la Belgique, estime Olivier Van Bauwel, fiscaliste chez Ernst & Young. En résumé, les entreprises peuvent réduire leur base imposable en utilisant des capitaux propres pour financer leurs investisse- ments. Les montants déductibles correspondent à un intérêt fictif (3,8 % en 2010, majoré de 0,5 % pour les PME) calculé sur les fonds propres corrigés de la société. 3. Les fonds d’investissement En 2006, la Belgique a dessiné pour les multina- Au Royaume-Uni, comme dans de nombreux autres pays, la Belgique et ses Régions tentent de se vendre. Pour attiser l’intérêt des investisseurs, elles revêtent leurs plus beaux atours fiscaux. GÉRALDINE VESSIÈRE JEAN-CLAUDE MARCOURT, MINISTRE WALLON DE L’ÉCONOMIE La Wallonie se concentre sur les investisseurs étrangers potentiels actifs dans les cinq pôles de compétitivité du plan Marshall et dans les énergies renouvelables. BELGA

La Belgique veut séduire les étrangers

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D ébut décem-bre. Londresest recouverted’un manteaublanc. Ayant

réussi in extremis à passer letunnel sous la Manche malgréles conditions météo, le minis-tre wallon de l’Économie Jean-

46 23 DÉCEMBRE 2010 | WWW.TRENDS.BE

ANALYSEINVESTISSEMENTS

E N P L E I N I M B R O G L I O C O M M U N A U T A I R E

La Belgique veut encoreséduire les étrangers

Les atouts fiscaux de la BelgiqueDivers systèmes ouavantages fiscauxrenforcent l’intérêt de la Belgique pour les inves-tisseurs étrangers.1. Le régime des holdings

«Le pays est l’un des seulsde la zone euro à avoirinstauré une exonérationintégrale et quasi incondi-tionnelle des plus-valuesréalisées sur la cession

d’actions ou de titres. A cela s’ajoute, la pos -sibilité d’exonérer, à concurrence de 95%, les dividendes perçus parune holding», résumeJean-Michel Degée, avocatspécialiste en droit fiscalchez Liedekerke. En outre, les dividendesdistribués par les filialesbelges à leur société mère

ne font la plupart du tempspas l’objet d’une retenue à la source chez nous.2. Les intérêts notionnels

Ce système reste pourl’instant l’atout majeur dela Belgique, estime OlivierVan Bauwel, fiscaliste chezErnst & Young. En résumé,les entreprises peuventréduire leur baseimposable en utilisant

des capitaux propres pourfinancer leurs investisse-ments. Les montantsdéductibles correspondentà un intérêt fictif (3,8% en 2010, majoré de 0,5%pour les PME) calculé surles fonds propres corrigésde la société. 3. Les fonds d’investissement

En 2006, la Belgique adessiné pour les multina-

Au Royaume-Uni,comme dans denombreux autres pays,la Belgique et ses Régions tentent de se vendre. Pour attiser l’intérêtdes investisseurs, elles revêtentleurs plus beauxatours fiscaux. GÉRALDINE VESSIÈRE

JEAN-CLAUDE MARCOURT,MINISTRE WALLON DE

L’ÉCONOMIELa Wallonie se concentre

sur les investisseursétrangers potentiels actifs

dans les cinq pôles de compétitivité du plan

Marshall et dans les énergies renouvelables.

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LGA

Claude Marcourt, encadré deson chef de cabinet, de son atta-chée de presse, de représentantsde l’Agence wallonne à l’expor-tation et aux investissementsétrangers (Awex) et de deuxjournalistes, arrive à l’ambassadede Belgique, afin de rencontrerdes investisseurs potentiels. DomMcKenna et Konstantin Skorik,deux directeurs de Freightliner,une société de transport ferro-viaire, sont déjà là. Ils veulentprésenter leur entreprise auministre mais aussi lui faire partde leurs préoccupations.

Présents en Grande-Bretagne,en Pologne et en Australie, ilsenvisagent de se développer enBelgique, mais qu’est-ce que leroyaume a à leur offrir? AlphieCartuyvels, directeur zoneEurope de l’Awex, énumère lesatouts du plat pays, notammentles subsides. Puis, Jean-ClaudeMarcourt a le mot de la fin. Onse sert la main et on promet dese revoir.

Tous les deux mois, AlphieCartuyvels se rend à Londrespour rencontrer des investis-seurs potentiels. «Ce qui nousexcite, ce sont les projets por-teurs d’emplois comme ce qu’ona eu avec H&M ou Google»,confie-t-il.

La Wallonie se concentre surles entreprises actives dans lescinq pôles de compétitivité duplan Marshall — aéronautique,logistique, biotechnologie, méca-tronique (mécanique et élec-tronique) et agro-industrie — etdans les énergies renouvelables,un secteur qui prend de plus enplus d’importance. Outre sesrendez-vous bimestriels en têteà tête, l’Awex organise aussi desréunions d’information s’adres-sant à des groupes d’investis-

seurs particuliers. Début 2010,des hommes d’affaires — indienspuis européens — ont ainsi étéinvités à la table de l’ambassa-deur pour une présentation desatouts économiques et fiscauxbelges. «L’ambassadeur a unimportant rôle économique àjouer», confie Johan Verbeke,le titulaire du poste à Londres.

Une place centrale«La Belgique souffre d’un pro-

blème de marketing et de com-

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Qui investit où chez nousSelon le Baromètre d’attractivité de la Belgique 2010réalisé par Ernst & Young, le nombre d’investissementsen Belgique est passé de 142 en 2008 à 146 en 2009. La Flandre est toujours en tête : elle récolte 43,9% deces apports. Sur une période de cinq ans, sa part n’acependant pas cessé de reculer. Bruxelles, délaisséepour le Brabant wallon, et particulièrement Nivelles, ne fait guère mieux. La Wallonie par contre progressepositivement. L’année dernière, elle a accueilli 17 inves-tissements de plus qu’en 2008 alors que la Flandre et Bruxelles en attiraient respectivement 10 et trois de moins. La plus grande partie des investissements continue à venir des Etats-Unis. Le Royaume-Uni, la France,l’Allemagne et les Pays-Bas sont aussi fort présents. Ce Top 5 représente environ 61% des investissementsétrangers directs chez nous. Les BRIC (Brésil, Russie,Inde, Chine) semblent nettement moins intéressés par la Belgique pour le moment. La Chine est la seule à y avoir placé quelques billes l’année dernière, mais sa présence reste infime.

tionales un cadre globalpour les fonds de pensionpaneuropéens et interna-tionaux. Il prévoit des fraisde gestion limités, des procédures simplifiéeset un régime financier etfiscal favorable : aucunetaxe n’est due sur les revenus générés par les contributions des clients. On attend

cependant les arrêtésd’exécution permettant à cette loi de sortir ses pleins effets.4. Soutien à la recherche

et au développement

L’ensemble des mesuresfiscales avantageuses enmatière de R&D — tels des crédits d’impôt, la déductibilité des fraisexposés à des fins de

recherche et de dévelop-pement, l’exonérationpartielle du versement du précompte profession-nel pour les chercheurs,ainsi que la déductibilité, à concurrence de 80%,des revenus de brevets — crée un environnementattractif. Grâce à ces incitants, la taxationdes revenus provenant

des brevets passefacilement de 33,99% à 6,8%, voire moins si on tient compte de la possibilité de déductionpour capital à risque. 5. Fiscalité des expatriés

Outre l’absence d’impôtsur la fortune et un sys -tème de donationmobilière plus qu’intéres-sant, le régime fiscal

4POUR CENTTelle est l’augmentation des investissementsétrangers directschez nous en 2009,contre une réductionde 11% en moyenneen Europe. (Source: Baromètred’attractivité de la Belgique 2010d’Ernst & Young.)

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Mais «ces critiques méconnais-sent les mécanismes belges quiviennent réduire ce taux», faitobserver Philippe Malherbe,avocat fiscaliste chez Liedekerke(lire par ailleurs «Les atouts fis-caux de la Belgique», p. 46).

Apparemment, les entrepre-neurs étrangers commencent àreconnaître la Belgique commeterre d’accueil intéressante.Alors qu’en 2009, les investis-sements étrangers directs bais-saient de 11% en Europe, ils aug-mentaient de 4% chez nous,toujours selon le Baromètre 2010d’attractivité de la Belgiqued’Ernst & Young. Le pays estainsi passé de la huitième à lasixième place dans le Top 10 desEtats européens ayant attiré leplus de nouveaux investisse-ments directs en 2009, devan-çant les Pays-Bas (septième) etla Pologne (huitième). z

munication, regrette DidierDenayer, conseiller de l’Awex àLondres. Lorsqu’on prend letemps d’expliquer ce qu’elle peutoffrir aux investisseurs poten-tiels, ils sont étonnés.» La posi-tion centrale du pays est un desarguments mis en avant. «AuRoyaume-Uni, on met beaucoupen évidence les possibilités logis-tiques», résume Pauline Bourcet,managing consultant de Fren-ger, agence de consultance quidéniche des investisseurs poten-tiels pour la Wallonie (vial’Awex). «Pour une entrepriseinstallée sur une île, il est bond’avoir une base sur le continent,explique-t-elle. Et la Belgique,avec sa position centrale et unetrès bonne infrastructure detransport, a de solides argumentsà faire valoir.»

Les chefs d’entreprise eux-mêmes reconnaissent les quali-tés du plat pays. Interrogés parErnst & Young pour son Baro-mètre 2010 de l’attractivité enBelgique, ils soulignent la qua-lité de la vie, les infrastructuresde télécommunication, de trans-port et de logistique, les com-pétences des travailleurs belges,l’esprit d’entreprise ou encorele climat social ainsi qu’un cadrejuridique et politique stable(l’étude a été menée avant ladémission du gouvernement etles élections de juin). Ils criti-quent par contre le coût élevéde la main-d’œuvre. «Oui maisles économies globales que le

pays peut offrir sont plus inté-ressantes, relativise PaulineBourcet. Le transport revientpar exemple souvent moins cher.La Belgique ayant une positioncentrale, il y a moins de dépla-cements et donc moins de frais.»

La vraie fiscalité des entreprises

La fiscalité belge est aussi sou-vent pointée du doigt. Les Etatslimitrophes ont de fait un impôtdes sociétés à première vue plusattractif, avec un taux nominald’impôt des sociétés de 20 ou25,5% aux Pays-Bas, d’un peuplus de 28% en moyenne (15%de taux de base + taxes supplé-mentaires diverses) au grand-duché de Luxembourg, de 29,83%en moyenne en Allemagne ouencore de 33,33% en France.Chez nous, le taux est de 33,99%.

belge est avantageuxpour les cadres étrangersqui travaillent chez nouspour le compte d’ungroupe international.Considérés, à certainesconditions, comme desnon-résidents, ils ne sontimposés que sur les revenus perçus enBelgique et seulement en proportion du tempspresté dans notre pays.

6. Les traités de prévention

contre la double imposition

La Belgique possède un vaste réseau de traitéspréventifs contre la double imposition(imposition dans deuxpays) de revenus etcapitaux.De quoi offrir une certainesécurité juridique aux investisseursétrangers.

7. Le «ruling»

Grâce au ruling, obtenuauprès du Service des décisions anticipées,les entreprises peuventbénéficier d’une meilleuresécurité juridique. Elles ont ainsi la pos -sibilité d’interroger le fiscbelge sur les conséquencesfiscales d’une opérationou d’un projet d’investis-sement. La décision

rendue sera valable cinq anset liera le fisc. 8. «Tax shelter» et autres

subsides

Le Tax shelter est un in -citant fiscal belge quiencourage la productiond’œuvres audiovisuelles. Il existe en outre une mul -titude d’aides et desubsides mis en place par l’Union européenne etles trois Régions belges.

«Lorsqu’on prend le temps d’expliquerce que la Belgiquepeut offrir auxinvestisseurspotentiels, ils sont étonnés.» DIDIER DENAYER, CONSEILLER DE L’AWEX À LONDRES

BELGA

JOHAN VERBEKE,AMBASSADEURDE BELGIQUE ÀLONDRES«L’ambassadeura un importantrôle économiqueà jouer.»