20
La lecture à voix haute Du plaisir en partage

La lecture à voix haute - fol43.orgfol43.org/pdf/culture/lfl/didierjeunesse-lectureavoixhaute.pdf · spécialistes de la petite enfance ont dit combien étaient précieux les mo-

  • Upload
    lamhanh

  • View
    219

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

”La lecture

à voixhaute

Du p la i s i r en par tage

2

L’oralité,à la source du goûtpour la lecture

Trop longtemps, on a op-posé oral et écrit. Pour-tant, il suffit d’écouter des

lecteurs évoquer leurs souvenirs d’en-fance pour comprendre qu’avant le li-vre, il y a bien souvent la voix : nombred’entre eux mentionnent une scène« fondatrice » où la voix est essen-tielle. Dans cette scène, tantôt l’his-toire est lue, tantôt elle est contée – mais dans ce cas l’enfant aurait sentique ces récits avaient un rapport avecdes livres, qu’ils n’étaient pas issus dela seule fantaisie de l’adulte, qu’ilsexistaient indépendamment de lui.

Très souvent, c’est la mère qui litou raconte des histoires, mais ce peutêtre le père, la grand-mère, le grand-père, une tante, un enfant plus âgé ouun adulte extérieur à la famille. Parfois,l’enfant et l’adulte compulsent des li-vres côte à côte et lisent à tour de rôle,ou l’enfant lit pour l’adulte. Parfois, ilsentendent ensemble des histoires luesà la radio ou sur un support audio. Lascène a souvent lieu le soir et aide àtraverser la nuit, mais des lectures par-tagées en plein jour sont aussi men-tionnées.

Ce qui revient beaucoup, c’est lamention, dans les histoires entendues,de quelques mots mystérieux qui au-raient aiguisé la curiosité ; c’est aussil’origine énigmatique de ces récits ;c’est encore l’association avec desnourritures liquides et sucrées, le lait,le chocolat, le thym parfumé au miel.Ce que l’on retrouve, c’est quelque

chose de paradoxal, un moment oùétait comme célébré le fait d’être en-semble, une intensité d’émotions par-tagées, une proximité charnelle, la ca-resse de la voix sur le corps ou lesgestes de tendresse qui se mêlent auxmots, et dans le même temps unecertaine mise à distance, l’ouvertured’une autre dimension, la découverted’un lointain, d’un autre temps, d’au-tres mondes.

Si les livres sont associés à ces mo-ments, soit que l’adulte y ait puiséles histoires lues, soit que l’enfant aitimaginé qu’elles y trouvaient leursource, ils seront le royaume où re-joindre cet univers, même si d’autressupports permettront aussi de s’enapprocher. Par leur biais, bien des lec-teurs cherchent peut-être à atteindrela richesse, l’intensité, la complexitéde l’expérience vécue dans ces mo-ments-là. À retrouver l’écho de la voixd’un être aimé, l’évocation d’untemps où les mots étaient encore im-prégnés de la présence des êtres etdes choses, forts de leur matérialitésonore et de leur capacité à intriguer,et pas seulement de leur significa-tion ; et tout un monde des possiblesqui s’ouvrait, où l’on pourrait tracerson propre chemin.

Au début n’était donc pas leverbe, mais un être aimé avec sa pré-sence charnelle, sa voix ; au débutétait le partage ou le désir du par-tage ; au début était l’intrigue, l’éton-nement, l’appel de l’inconnu ; la dé-

Par Michèle Petit, anthropologue

Au débutn’était donc pasle verbe,mais un êtreaimé avecsa présencecharnelle,sa voix ;au début étaitle partageou le désirdu partage.

3

couverte d’une langue autre que cellequi sert à la désignation immédiatedes choses et des gens ; la révélationd’un autre univers. C’est quand ils re-présentent un passage vers tout celaque les livres sont désirables.

La lecture à voix haute est ainsil’une des voies royales d’accès au désirde lire, à quelques conditions toute-fois : que l’enfant sente que l’adultesouhaite partager avec lui quelquechose qui lui tient à cœur ; qu’il puissebouger si cela lui chante et fairel’usage qu’il veut de ce qu’il entend,dans le secret de sa rêverie, sans quel’on contrôle cet usage, sans qu’ons’assure constamment qu’il a « biencompris » ; que l’adulte ne se mettepas trop en avant, mais prête sa voixau texte.

Cela suppose sans doute aussi que,très tôt, des chants, des comptines mê-lées à des gestes de tendresse, aiententouré l’enfant et l’aient déjà pris aucharme d’un usage, aussi vital qu’inu-tile, de la langue. De cela, les lecteursn’ont pas le souvenir, du fait de la cu-rieuse amnésie qui touche les pre-mières années. Mais tous les grandsspécialistes de la petite enfance ontdit combien étaient précieux les mo-ments où la mère (ou la personne quidispense les soins maternels) s’adonneavec le bébé à un usage ludique, gra-tuit, poétique, fantaisiste, du langage,en lui chantant une petite chanson ouen lui disant une comptine, sans autrebut que le plaisir partagé des sonorités

et des mots. Autrementdit, la parole vaut d’abord par ses mo-dulations, son rythme, son chant.

Tous les enfants n’ont pas l’expé-rience de tels moments où la littéra-ture, orale et écrite, initie à un usagedes mots au plus près de la vivacitédes sens, du plaisir partagé, de l’éton-nement de vivre, au plus loin ducontrôle et de la notation. Si dans leurentourage, le langage ne sert qu’à ladésignation immédiate des choses,une étape leur manquera pour désirers’approprier un jour la culture écrite.

Toutefois, des médiateurs cultu-rels peuvent recréer des situationsd’oralité heureuse, permettant une re-traversée, un détour par ce temps oùles mots sont bus comme du lait oudu miel ; toucher une sensibilité pre-mière, susciter, par la voix, des allers etretours entre corps et pensée et faireretrouver, sous le texte, un arrière-paysde sensations, un mouvement, unrythme.

À cet égard, la librairie ou la bi-bliothèque sont des cadres particuliè-rement propices à cette oralité : ellessont le lieu des milliers de voix ca-chées dans des livres qui ont été écritsà partir de la voix intérieure d’un au-teur. Quand il lit, chaque lecteur faitrevivre cette voix. Mais à ceux qui ontgrandi loin des supports imprimés,quelqu’un doit prêter sa voix pourqu’ils entendent celle que le livretransporte. �

Michèle Petitest anthropologuede la lecture au CNRS.Elle s’est intéresséeà l’expérience intimeet singulière des lecteurs,ce qui l’a conduiteà étudier le rôlede la lecturedans la constructionde soi. Elle est l’auteurede Éloge de la lectureet L'art de lireaux éditions Belinet d'Une enfanceaux pays des livresaux éditionsDidier Jeunesse.

4

CHANTAL, L’ÎLE AUX LIVRES« Depuis 5 ans, nous organisons des soirées lectures-siropsle dernier mardi de chaque mois à partir de 19 heures.Ces lectures sont destinées aux enfants à partir de 5 anset à leurs parents. Elles sont gratuites, car je tiens à donnerla possibilité à tous de venir découvrir le livre autrement.Durant trois quarts d'heure, mes collaboratrices et moilisons à tour de rôle des textes autour d’un thème choisi,quelques fois à l’aide d’un kamishibaï. Les textes ne sont pastrop longs (maximum 7 minutes) et ont des rythmes variés,ce qui permet aux enfants de ne pas décrocher.Nous incluons également des textes classiques ou pouradultes, car je tiens tout particulièrement à faire découvriraux enfants des textes plus difficiles.Notre astuce : cette communion autour du livreentre enfants et adultes qui écoutent et rient ensembleau même endroit, à la même heure avec en prime le droitde se coucher un peu plus tard que d'habitude.Parfois le public doit se serrer mais l'attente est si forteque le confort importe peu. Quand la lecture est terminée,nous offrons un verre avec de quoi grignoter.Ce concept a du succès : nos lectures-sirops sont,depuis l'année dernière, demandées dans des établissementsscolaires et dans des médiathèques. […]Rien, absolument rien, ne peut se transmettre sans passion.Quand les enfants découvrent tout le plaisir que nous avonsà leur lire des textes émouvants, sérieux ou amusants,ils ne peuvent qu'éprouver le désir de lire et de partagercette lecture. »

GONZAGUE,LE BATEAU LIVRE« Je fais appel à l’associationLis avec moi. Des lecteursprofessionnels interviennent ainsidans la librairie deux fois par moispour des séances d’une heure.Ce ne sont pas des séances de conte,mais bien de lecture à voix haute ;le support du livre est toujoursemployé. Le lecteur de l’associationchoisit les livres lui-mêmesans qu’il y ait de thématique définieet accompagne souvent leur lecturede chansons. L’inscription est gratuiteet les parents assistent égalementaux rencontres car je souhaiteleur donner l’envie de raconterà leur tour des histoires. Cela fait plusde 10 ans que ces séances de lectureont lieu dans un coin de la librairie.Il y a toujours beaucoup d’inscrits.Ce sont des habitués qui reviennentsur plusieurs séances, puisun roulement s’établit. Cela se passetrès simplement, grâce à l’association. »

Les libraires racontent…

Organiserune séancede lecture à voix haute

5

“SÉVERINE, LES MODERNES« La séance de lecture pour les 0-3 anscomprend des comptines et des jeuxde doigts. Ils sont alternés pourcréer une vraie dynamique. Les jeuxde doigts demandent en effet plusd’attention, tandis que les comptinessont plus rythmées. J’essaiede maintenir des enchaînementstrès rapides et d’interpeller beaucoupparents et enfants. Il ne faut pas avoirpeur du bruit et du mouvement.Les petits se déplacent, parfoismontent sur les genoux, tripotentles pieds. C’est naturel. J’utilisebeaucoup mon visage, je regardeles enfants, je m’adresse directementà eux, je leur pose des questions.J’agis vraiment au feeling.Pour les plus grands, si l’attentionbaisse, je garde toujours à dispositionune grosse pile d’ouvragesdans lesquels je peux piocher,avec des textes plus courts,plus longs… et deux ou trois livres-jeuxpour créer des rythmes différents.L’essentiel est vraiment d’avoir prévuun maximum de titres, comptineset jeux de doigts pour parerà tout éventualité. J’effectue parfoisune sélection par thème, d’autre foisj’ai envie de mettre en avantles nouveautés que les parentsn’auraient pas eu l’idée d’aller voir. »

SYLVIE, L’EAU VIVE« Mes séances de lecture durent environ une demi-heure : 5-10 minutes consacrées aux tout-petits, le reste du tempspour les 5-6 ans. Ces séances débutent en septembreet comprennent une dizaine d’enfants ainsi que leursparents, qui les apprécient tout autant !Nous nous installons par terre avec des tapis et des coussins.Je travaille avec une dizaine de livres choisis parce queje les aime. En effet, je pense qu’il faut prendre du plaisirpour le communiquer. Mon astuce lorsque l’attention faiblit :parler plus doucement, prendre du temps, demanderaux enfants de choisir dans la pile de livres celuiqu’ils veulent. Une astuce : s’ils baillent ou montrentdes signes de fatigue, annoncer qu’il s’agit de la dernièrehistoire, cela ravive leur intérêt. »

Fiche pratiqueVoici une fiche technique synthétisantles pratiques de différents libraires, habituésdes séances de lecture à voix haute.Vous y trouverez les informations nécessairespour mettre en place vos propres séances.

Planning :Le mardi soir ou le mercredi,en moyenne une à deux fois par mois.Durée de la séance :– 20 à 30 minutes pour les tout-petits– ¾ d’heure à une heure pour les plus grandsDurée de lecture effective :– 10-15 minutes pour les tout-petits– une ½ heure pour les plus grandsLes lecteurs :Les libraires eux-mêmes ou des lecteurs invitésdans le cadre d’associations pour la lecture.Le public :Les enfants et leurs parents (indispensables !)Communication :Vitale, elle se fait par le biais d’affiches sur la portede la librairie, d’envoi de newsletters grâce au fichierclients, d’annonces sur le site Internet et dansles magazines répertoriant les activités culturellesde la région, mais aussi par le bouche-à-oreille !Un programme annuel ou mensuel est établi lorsqu’ils’agit de séances thématiques.Matériel : Il suffit de quelques sièges, ou d’un tapiset de coussins et d’une pile de livres !Sélection : Prévoir suffisamment de titres de longueurs,d’atmosphères et de rythmes différents. Agrémenterces lectures de jeux de doigts et de comptines, surtoutpour les plus jeunes.Satisfaction : Une fois que le rythme est pris,toujours au rendez-vous !

Merci à Chantal Rossettide L’île aux livres(Annecy), SéverineCarpentier des Modernes(Grenoble), GonzagueSteenkiste du Bateau livre(Lille) et Sylvie Sourdaisde L’eau vive (Avignon)pour avoir partagé avecnous leurs expériencesde lecture à voix haute.

Daniel Fatous, comédien, metteur en scène et formateur.Interview réalisée par Michèle Moreau.

Ensuite, il est bon d’avoir une pen-sée sur l’espace et je ne parle pas seu-lement de l’espace réel, physique,même si celui-ci a toute son impor-tance, mais de l’espace symboliquedans lequel la lecture a lieu. Nousvoilà, non pas dans un espace de théâ-tre, mais dans un espace de média-tion, médiation qui se joue dans unegrande proximité. Le lecteur n’a pas àjouer qu’il lit. En tant que médiateur, iln’a pas à envahir la lecture, mais àfaire vivre le livre. Son rôle est d’allu-mer le désir, de transmettre un rapportamoureux au livre.

Pour entrer dans cet espace sym-bolique, autour de la médiation, ilest important de créer des rituels,qui ne seront donc pas ceux duthéâtre. En librairie, ce peut être deménager un espace, toujours le même,à cet usage : en déplaçant une éta-gère, en plaçant quelques coussins,quelques sièges... On ne laissera pasentrer les gens n’importe comment,n’importe quand : les manteaux peu-vent être déposés ailleurs, par exem-ple… Du coup, parents et enfants semettent d’emblée en conditiond’écoute de la lecture.

Si nous gardons à l’esprit que noussommes dans un espace de médiation,qui ne peut, en rien, être un espace depouvoir, l’attitude du lecteur a son im-portance.

Quand le lecteur lit en tenant l’al-bum devant soi, puis montre lesimages, il « sait » avant les enfants, ilest davantage dans une situation de

Lire à voix haute, c’est

allumer le désir !

Vous intervenez régulièrement auprèsde lecteurs, bénévoles de l’associationLis avec moi, bibliothécaires, etc.Vous êtes lecteur vous-même. Quels conseilsdonneriez-vous à des libraires qui se lancentdans l’aventure de la lecture à voix haute ?

Tlconvient tout d’abordde questionner l’actelui-même. Qu’est-ce que

l’acte de lire ? Ou plutôt qu’est-ce qu’iln’est pas ? Au sein de l’association Lisavec moi pour laquelle je travaille, oude l’agence Quand les livres relient,ces questions sont régulièrement re-mises sur le marbre.

Dans un premier temps, il est im-pératif de se positionner par rapport àl’école. On ne va pas refaire ce qui s’yfait, l’apprentissage des codes... Lachose la plus importante, c’est deconsidérer l’acte de lire à voix hautedans sa pure gratuité. C’est avant toutun acte d’éveil. Il s’agit d’allumer le dé-sir, le désir du livre… Le lecteur doitêtre en état de grande tranquillité in-térieure. Qu’il ne cherche donc pas, nien cours de lecture, ni ensuite, à serassurer sur ce que son public com-prend ou sur le plaisir qu’il y a pris. Leplaisir que je prends à lire est toujoursdu plaisir donné. Évitons les séquencesde questions-réponses en fin de lec-ture. Elles ne feraient que rétrécirl’imaginaire de chaque enfant au nomd’une vérité commune qui empêchel’appropriation singulière d’une his-toire.

7

pouvoir. Recherchons plutôt la simul-tanéité dans la lecture. Si le groupe estrestreint (trois ou quatre enfants), onpeut poser le livre sur le sol, sinon ilfaut le tenir sur le côté de manière à ceque les enfants puissent le voir enmême temps que nous. Tout dépenddes albums choisis, bien évidemment,certains ne se prêtent qu’à une explo-ration en tête-à-tête. D’autres, commeles contes, peuvent parfois se passerdes images… Choisir les albums avecsoin est essentiel ! Dans une séance delecture, il est très important aussid’avoir une intention rythmique : unalbum long, un court, une chanson…

Ensuite, au fil de la lecture, c’esten restant dans un état de présencequ’on peut être « juste » et libérer leplus de possibles. Lorsque vous lisezun livre à un enfant le soir, l’enfant re-garde le livre et non le lecteur. Il doiten être de même devant un groupe : lelivre prend le pas sur le lecteur, il doitoccuper le devant de la scène. Il fautd’ailleurs revenir aux livres en fin deséance. À cet effet, il est bon de mé-nager un temps d’appropriation,d’une vingtaine de minutes au moins,pendant lequel les enfants peuventtoucher, saisir les livres. Si l’on a éveilléleur désir, ils le feront d’eux-mêmes.

Lire, c’est l’acte culturel fonda-mental : les livres nous invitent à nousy reconnaître. L’appétit de lire est si-multané au désir de comprendre, ausens étymologique, c’est-à-dire deprendre en soi les situations que nousy rencontrons, toute l’expérience hu-maine et de faire des liens. Lire estl’anagramme de lier, relire de relier.

C’est pourquoi il nous faut trou-ver une lecture qui n’est pas appli-quée, mais bien impliquée. Le plusimportant est de lire tel qu’on est, soi ;il n’y a pas de « bien lire ». Il faut justelire en présence. C’est pourquoi, il estpossible de donner des voix aux per-sonnages, mais celles-ci doivent être

des voix de citation, non des voixd’identification. Surtout devant un pu-blic d’enfants : à trop en faire, à tropjouer le loup, par exemple, on risquede les laisser seuls avec le loup ! Le nar-rateur doit être toujours présent.

Je donnerais une seule recette : aumoment où vous allez lire, regardeztout le monde, souriez et pensez : « Ilsont de la chance que ce soit moi ! ».Lire doit être une relation de con -fiance : confiance dans l’album qu’onlit, confiance dans le public en face desoi et confiance en soi. Il peut y avoirdu trac, mais il ne faut pas en avoirpeur. Le trac nous place en effet à lahauteur de l’enjeu. Il faut se dire :« Chouette, c’est important » et savoirs’abandonner au moment, à ce quisurgit, au plaisir de lire. Ne formatonspas nos voix, nos effets. Laissons venir.Le choix des albums peut aussi s’im-proviser pendant la lecture, suivantl’envie qu’on a de lire, suivant l’at-tente qu’on suscite en lisant.

Devant un groupe dissipé, n’agis-sons pas d’autorité. La dissipation neveut pas toujours dire qu’un groupen’écoute pas. Mais si nous le perce-vons ainsi, demandons-nous pourquoi.Est-ce qu’on est sûr du choix des al-bums ? Est-ce qu’on est à l’aise aveccelui-ci ou celui-là ou avec l’acte de lirece jour-là ?

Lorsque nous lisons un livre, nousle lisons en tant qu’adulte. Il est im-portant de comprendre que notrechoix est singulier et non didactique.Même s’il faut savoir identifier les rai-sons de notre choix, il s’agit avant toutd’un rapport amoureux au livre et aumoment de la lecture. En réalité, laseule chose qui vaille, c’est reconnaîtreson propre plaisir à lire, témoigner dece plaisir et donner à l’enfant l’exem-ple de ce qu’il peut attendre de mieuxd’une lecture : la gourmandise degrandir sans cesse. �

Le plus importantest de liretel qu’on est, soi ;il n’y a pas de« bien lire ». Il fautjuste lire en présence.

8

La lecture à voix haute ?

Au cœur denotre pratiquechez Didier jeunesse !

P as un de nos livres neparaît sans avoir fait sespreuves en la matière au

sein de l’équipe. De la lecture desmanuscrits jusqu’à la présentation auxreprésentants (un excellent public !),aux libraires ou aux divers profession-nels, nos albums sont mis à l’épreuvede leur transmission orale.

Pour ma part, je suis très sensibleà la musicalité d’un texte, celle qui nes’exprime pas seulement au travers desrimes, mais celle qui dit la petite mu-sique singulière d’une voix, d’un au-teur. Quand je lis un texte, et surtoutun manuscrit d’album, je me placed’emblée en position de passeuse. Unelecture à voix basse, certes, mais quianticipe le futur auditeur, lecteur… Si rien ne se passe lors de cette pre-mière lecture, il est évident que j’aurais

beaucoup de mal à m’investir dans leprojet, à le porter, à aimer le lire en-suite… J’imagine qu’il en va de mêmepour tous les membres du comité delecture.

Si le charme opère, et que le texteme séduit, je me sens prête à le dé-fendre, à le travailler au corps, lorsqu’iln’est pas encore abouti et qu’il a be-soin de trouver sa forme définitive.C’est dans l’échange oral, en directavec l’auteur, que je me sens le mieuxpour faire avancer les choses dans cecas. Souvent, je lis devant lui les pas-sages qui me gênent. C’est par la voix,l’intonation, que je peux ressentir cequi manque au niveau du rythme, dela prosodie, du sens, de l’élan du texteet c’est ainsi que le message passe lemieux. L’auteur entend alors son textede l’extérieur et tout ce qui est en ges-tation peut advenir. J’ai besoin d’enpasser par là. Toujours. Parfois, cettelecture infléchit mon appréciation et jecomprends la nécessité intérieure decertains passages, mieux que d’aucuneautre manière.

Certains textes intimistes, singu-liers dans leur rapport à l’image peu-vent ainsi devenir de véritables sourcesd’émotion partagée. Je suis souventtrès heureusement surprise du plaisirque j’ai ensuite à les lire à voix haute

Par Michèle Moreau, directrice de Didier Jeunesse

9

devant les publics que je rencon-tre. Les albums d’Ilya Green, de-puis Histoire de l’œuf jusqu’à So-phie et les petites salades, ouencore par exemple, La petite filleet l’oiseau, Un parapluie vert, En at-tendant maman, peuvent provoquerdes moments très forts.

Nous publions souvent, chez Di-dier jeunesse, des textes proches del’oralité, vivants en diable. Les conteset comptines bien sûr, se prêtent plusque tous les autres à la lecture à voixhaute. Un grand soin est apporté àleur mise en page qui agit comme unepartition entre les mains du lecteur.L’usage des graisses, des changementsde corps ou de caractères, tout in-dique les intentions voulues par le gra-phiste, qui joue avec l’illustrateur lerôle de metteur en scène de la lecture.L’image du texte sur la page agit in-consciemment auprès du lecteur pourl’orienter dans sa mise en voix. Plus en-core que les effets de volume, ce sontd’ailleurs les blancs, les silences quidonnent vie au texte lu. Les espacesentre les paragraphes, dans le blanc dela page, sont travaillés avec beaucoupde finesse. Ils permettent au lecteur dese poser, de savourer l’écoute, de dé-cider d’accélérer ou pas, de changer derythme ou d’intonation…

L‘enfant qu’on dit « non lecteur »ne s’y trompe pas : lui qui n’est pas en-core entré dans l’apprentissage ducode, il perçoit mieux que quiconquele dessin de la lettre, dans toute saprésence physique, poétique et sen-sorielle. Cette perception est indisso-ciable de celle des illustrations. L’es-pace de la page ou de la double-pageest lisible dans sa dynamique, dans lejeu entre le vide et le plein, le tout estchargé de sens ! Tout enfant confrontéau livre est déjà lecteur…

On le voit, c’est le travail de touteune équipe : auteur, graphiste, illus-trateur, éditeur… récompensé par leplaisir des lecteurs de tout âge ! �

10

Les sélections Didier JeunesseDes sélections thématiques ouvertes alternant textes courtset longs, drôles, dynamiques ou calmes, comptines,contes et récits pour laisser libre cours à votre imagination.Choisissez votre registre et amusez-vous ! Nous vous proposonsquelques parcours rythmés à moduler à votre guise.Ils sont calibrés pour une durée d’une demi-heure environ.Tous commencent par une comptine de la collection « Pirouette » :une des meilleures entrée en matière qui soit !Pour les plus grands, des textes plus longs vous sont proposés :à lire en entier ou en choisissant des extraits…

Il n’est pas nécessaired’aller bien loin pouravoir le sentimentde voyager !S’aventurerdans la ville, allerà la découvertede l’autre, remonterla rivière en bateau…c’est déjà touteune histoire.Quelques livresqui emmènent…ailleurs.

SélectionBateau sur l’eauMartine Bourre, « Pirouette »

Le bateau de M. ZouglouglouColine Promeyrat et Stefany Devaux« À petits petons »

Le petit cochon têtuJean-Louis Le Craver et Martine Bourre« À petits petons »

La princesse au petit poisAndersen et Delphine Grenier

La grenouille à grande boucheFrancine Vidal et Elodie Nouhen

À Paris sur un petit cheval grisMartine Bourre, « Pirouette »

Monsieur p'tit souEdmée Cannard

Les petits pains au nuageBaek Hee-Na et Kim Hyang-Soo

ElvisRégis Lejonc et Christophe Alline

Jo JuniorPraline Gay-Para et Rémi Saillard, « Escampette »

Bonne nuit, mon tout-petitSoon-hee Jeong

11

Et aussi... AttendsSuzy Chic et Monique Touvay

Les trois boucsJean-Louis Le Craveret Rémi Saillard

Le chat ventruMichèle Simonsenet Hélène Micou

La toute petite,petite bonne femmeJean-Louis Le Craveret Delphine Grenier

Autres comptines« Pirouette »Lundi matin,l’Empereur,sa femme...Martine Bourre

Mam’zelle AngèleAnne-Laure Wtischgeret Hélène Moynard

Dans ParisChristophe Alline.

Jeux de doigtsLes jeux chantésdes tout-petits« Le pouce part en voyage » p.6,« En grimpant au plus gros » p.11,« L'araignée Gypsie » p.12,« Le jardin, le trottoir » p. 22

Pour les plus grandsLe petit poucetJean-Pierre Kerloc’het Isabelle Chatellard

Trouvé-dans-un-nidPraline Gay-Paraet Rémi Saillard

Levoyage

1

12

SélectionPirouette, cacahouetteCharlotte Mollet, « Pirouette »

Petite fille et le loupAgnès Grunelius-Hollardet Chris Raschka« À petits petons »

Pendant quele loup n’y est pasEric Battut

Le loup et la mésangeMuriel Bloch et Martine Bourre« À petits petons »

À la volette !Cécile Bonbon, « Pirouette »

La petite poule roussePierre Delye et Cécile Hudrisier

Le bâtonOlivier de Solminihac

Le parapluie vertYun Dong-jae et Kim Jae-hong

Hector, l’hommeextraordinairement fortMagali Le Huche

StrongboyIlya Green

Sophieet les petites saladesIlya Green

Le fils du tailleurde pierreMoon-hee Kwon

LeJeu2

13

Sans le jeu,pas d’enfance !Le thème est vaste,propice à toutesles explorations.Comme il est bonde partagerles aventuresde Sophie, la petitechapardeuse,de la mésangeinsoucianteou de l’âne malade !

Et aussi...Histoire de l’œufIlya Green

Olga, arracheusede margueritesIlya Green

En attendant mamanTae-jun Lee et Dong-sung Kim

Les petits painsaux nuagesBaek Hee-na et Kim Hyang-Soo

Le secret Eric BattutSssi j’te mords,t’es mort !Pierre Delye et Cécile Hudrisier

Autres comptines« Pirouette »Une souris verteCharlotte Mollet

Mon âneChristine Destours

Jeux de doigtsLes jeux chantésdes tout-petits« Ainsi font font font » p.8,« Deux gros oiseauxsur un poteau » p.17.

Pour les plus grandsLa tour de BabelFrancine Vidal et Élodie Nouhen

Sous la peaud’un hommePraline Gay-Para et Aurélia Fronty

14

SélectionDame TartineStefany Devaux, « Pirouette »

La souris et le voleurJihad Darwicheet Chrisitan Voltz« À petits petons »

L'ogre BabborcoMuriel Blochet Andrée Prigent« À petits petons »

La grosse faimde P'tit BonhommePierre Delyeet Cécile Hudrisier

J’aime la galetteMartine Bourre« Pirouette »

La bonne bouillieColine Promeyratet Géraldine Alibeu« À petits petons »

Le poussinet le chatPraline Gay-Paraet Rémi Saillard« À petits petons »

Les deux maisonsDidier Kowarskyet Samuel Ribeyron« À petits petons »

La soupe aux poisMagali Le Huche

Histoire de l’œufIlya Green

Roulé le loupPraline Gay-Paraet Hélène Micou« À petits petons »

3Lagourmandise

15

Et aussi...Et on mangerades réglissesSylvia van Ommen

La mare aux aveuxJihad Darwicheet Christian Voltz

L’ogresseet les 7 chevreauxPraline Gay-Paraet Martine Bourre

Autres comptines« Pirouette »Au clair de la luneDelphine Grenier

Une poule sur un murStefany Devaux

Fais dodo,Colas mon petit frèreDelphine Grenier

Jeux de doigts :Les jeux chantésdes tout-petits« Petit pouce dortbien au chaud » p.5,« Petit oiseau d'or et d'argent » p.16,« Au cluguet, tiroluret » p.30,« Bats la pâte » p.31.

Pour les plus grandsMon miel, ma douceurMichel Piquemalet Élodie Nouhen

Moitié de coqPierre Delye et Ronan Badel

Depuis toujours,ogres, loups affaméset gourmandsen tout genre peuplentles contes. Les livresDidier Jeunesseen sont remplis !À lire juste avantle goûter pourse mettre en appétit.

16

SélectionLoup y es-tu ?Charlotte Mollet« Pirouette »

Les trois petitspourceauxColine Promeyratet Joëlle Jolivet« À petits petons »

Le P'tit Bonhommedes BoisPierre Delye et Martine Bourre

Héléna, Ivan et les oiesMuriel Bloch et Régis Lejonc« À petits petons »

Un grand cerfMartine Bourre, « Pirouette »

Bouche cousueGigi Bigot, Pépito Matéoet Stéphane Girel

Je t’aimetous les joursMalika Doray

Le magasinde CélestinJunzô Terada

Juste avantil y avait un plafondLiniers

Au feu les pompiersÉlodie Nouhen, « Pirouette »

Filletteset gros alligatorMuriel Bloch et Andrée Prigent« À petits petons »

La chèvre BiscornueChristine Kiffer et Ronan Badel« À petits petons »

BasculeYuichi Kimura et Koshiro Hata

Lespremièrespeurs

4

17

Des livrespour les plus grandsdes petits avecde vrais méchants,des situationspérilleuses,des animaux féroces !Une séance de frissonpour se serrer les unscontre les autres etclaquer des dents…tout en rigolant !

Avoir peur…en toute sécurité.« Certaines histoires ont une fin heureuse,d’autres une fin ouverte et d’autres encore nelaissent pas la moindre chance au personnageen danger ayant (toujours) négligé le principede réalité. Elles donnent ainsi en amusantforme et expression à des peurs, frayeurs,angoisses profondes ou passagères quel’enfant a déjà en lui et transforment unesituation d’impuissance en action. Ellesrépondent en même temps à deux attentesfortes de tout lecteur : le goût du mystèreet le plaisir d’avoir peur… en toute sécurité. »Joëlle Turin

Et aussi...Olga, arracheusede margueritesIlya Green

Sophie et lespetites saladesIlya Green

L’ogresseet les 7 chevreauxPraline Gay-Paraet Martine Bourre

Les deux maisonsDidier Kowarskyet Samuel Ribeyron

Le chat ventruMichèle Simonsen et Hélène Micou

Autres comptines« Pirouette »Une souris verteCharlotte Mollet

Un petit chat grisMartine Bourre

Jeux de doigtsLes jeux chantésdes tout-petits« Un crabe méfie-toi » p. 36,« Petits pouces ont peur du loup »p. 41, « Marie et Pierrot » p. 42-43

Pour les plus grandsDame HiverGrimm et Nathalie Novi

Les trois fileusesSylvie Delom et Géraldine Alibeu

18

Plusieurs livresnous le prouvent :les animaux sont bienplus proches de nousqu'il n'y paraît !Eux aussi ont une vieparfois mouvemen-tée, des envies,des problèmeset des rêves...

SélectionUn petit chat grisMartine Bourre« Pirouette »

Quel radis dis-donc !Praline Gay-Para et Andrée Prigent« À petits petons »

La sourisqui cherchait un mariFrancine Vidal et Martine Bourre,« À petits petons »

Din’Roa la vaillanteJean-Louis Le Craveret Martine Bourre« Escampette »

Les petits poissonsChristine Destours« Pirouette »

Sssi j’te mords,t’es mort !Pierre Delye et Cécile Hudrisier

Le secretÉric Battut

Le machinStéphane Servantet Cécile Bonbon

À quoi rêventles vaches ?Anne isabelle Le Touzé

Ours qui litÉric Pintus et Martine Bourre

Le pou et la pucePraline Gay-Para et Rémi Saillard« À petits petons »

Et aussi...Gare aux lapinsMalika Doray

Autres comptines« Pirouette »Une souris verteCharlotte Mollet

Ah ! les crocodilesStefany Devaux

Mon père m’a donnéun mariChristine Destours

Jeux de doigtsLes jeux chantésdes tout-petits« Un gros chat gris dormait » p. 29,« La petite alouette est passéepar là » p. 18, « Monsieur poissonse promène » p. 33.

Pour les plus grandsLa femme-phoqueCatherine Gendrinet Martine Bourre

La chèvre de M. SeguinAlphonse Daudet et Éric Battut

5 Lesanimaux

19

A.C.C.E.SPrésidente : Marie Bonnafé

L'objectif d'A.C.C.E.S. est de mettre récitset albums à la disposition des tout-petitset de leur entourage en s'appuyantsur les structures existantes, bibliothèqueset services de la petite enfance,et les incitant à coordonner leurs actions.Cette association œuvre pour quetous les enfants issus des milieuxdéfavorisés aient accès au livre.A.C.C.E.S28 rue Godefroy Cavaignac 75011 ParisTél. 01 43 73 83 53 E-mail : [email protected]://www.acces-lirabebe.fr/

Quand les livres relientPrésidente : Luce Dupraz

Cette agence propose une listedes associations promouvant la lecture,réparties sur tout le territoire, régulièrementmise à jour (Livre Passerelle, L.I.R.E. à Paris,Lis avec moi…). Elle constitue un réseaude professionnels et de bénévolesde secteurs d’activité divers, sensibilisésaux enjeux de l’éveil culturel et impliquésdans la prévention des inégalités culturellespar le biais d’actions lecture auprèsde différents publics. Quand les livresrelient organise également des cyclesde rencontres déclinés sur des thèmesprécis avec des intervenants spécialisés(Cycle I : « la lecture à voix haute »). Quand les livres relient 72 rue Jean Bart 59260 Hellemmes Tél. 06 89 92 59 19 E-mail : [email protected]://www.quandleslivresrelient.fr

Promouvoir la lecture à voix hauteVoici trois structures œuvrant pour la promotionde la lecture à voix haute à l’échelle nationale.Grâce à elles vous pourrez contacter des lecteursprofessionnels pour intervenir dans vos librairies,participer à des formations et à des rencontres…“

À paraître :Lire à haute voix des livres à des tout-petits,Quand les livres relient (Agence nationaledes pratiques culturelles), Érès, 2009.

Lire et faire lirePrésident : Gérard David

Lire et faire lire est un programmede développement du plaisir de la lectureet de la solidarité intergénérationnelleen direction des enfants fréquentantles écoles primaires et autres structureséducatives (centres de loisirs, crèches,bibliothèques...). Des séances de lecturesont organisées à la demanded’enseignants ou d’animateurs en petitgroupe, une ou plusieurs fois par semaine,dans une démarche axée sur le plaisirde lire et la rencontre entre les générations.Lire et faire lire est développé dans chaquedépartement par des coordinateursdes deux réseaux associatifs nationaux :la Ligue de l’Enseignementet l’Union Nationale des AssociationsFamiliales (UNAF).Association nationale3 rue Récamier 75341 Paris Cedex 07 Tél. 01 43 58 96 27 E-mail : [email protected]://www.lireetfairelire.org/LFL/

Dans ce petit guide vous trouverez :– Des sélections thématiquesenrichies de comptines et jeux de doigts– Des articles de référence– Une fiche pratique– Des témoignages de professionnels– Des associations pratiquant la lecture à voix haute...

Diff

usio

n : H

atie

r / C

once

ptio

n gr

aphi

que

: Cla

ire

Robe

rt

Didier Jeunesse : 8, rue d’Assas 75006 Paris / Tél. : 01 49 54 48 30Fax : 01 49 54 48 31 / [email protected] / www.didierjeunesse.com