La lettre soufie n°8

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  • 8/14/2019 La lettre soufie n8

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    Mars/Avril 2003

    N 8

    La Lettre Soufie regroupe quelques articles sur le soufisme selon quatre thmesprincipaux, pome, article gnral, discours du matre de lordre Nmatollahi DrNurbakhsh et histoire. Elle est publie bi-mensuellement et reflte le contenu dusite web Le Journal Soufi (journalsoufi.multimania.com)

    Devenir discipleSommaire

    Discours 1

    Devenir disciple

    Pome 3

    La passion de la folie

    Article 4

    Chercheur de dattes

    Humour 14

    L'idiot

    Par Dr Nurbakhsh

    Il existe plusieurs raisons pourlesquelles on cherche un matre

    puis se soumet lui. Citons en

    quelques-unes:

    1. Le disciple est motiv dans le

    but d'obtenir de la

    connaissance. Apres un certain

    temps, il ralise que l'on ne

    trouve pas de connaissance

    dans cette voie. Au contraire,

    on vient ici pour se librer du

    joug de la connaissance.

    Quelqu'un qui suit cette voiedans le but d'obtenir de la

    connaissance est sure de ne

    pas en trouver, et s'engage

    dans cette voie pour de fausses

    raisons, ne comprenant pas

    que:

    Une fois que j'ai perdu connaissance de

    moi-mme,

    j'ai pu goter toute sorte de

    connaissance;

    Perds la connaissance, car il existe

    toutes sortesde connaissance dans cette perte de

    connaissance.

    2. Le disciple est motiv pour

    se soumettre un matre car

    celui-ci correspond l'ide que

    le disciple s'tait faite de ce que

    devait tre un matre. En

    tudiant, on peut connatre lestats des matres, ou bien

    devenir familier avec de

    fervents disciples, et ainsi avoir

    une ide du matre idal. Ces

    personnes se soumettent un

    matre pour raliser quelques

    annes plus tard que ce matre

    ne correspond pas l'ide qu'il

    s'en tait faite. Par consquent,

    ces personnes finissent par

    quitter le matre pour prendre

    leur propre chemin et en

    viennent mme dfier lematre et par consquent le

    renier. Ces disciples voient le

    monde du matre par rapport

    leur propre monde, et donc

    finissent par le critiquer pour

    finalement le rejeter. En ralit,

    ces personnes cherchaient un

    matre qu'ils avaient concoct

    dans leur imagination. Comme

    le dit Roumi:

    Ils mangent et dorment

    dans leur imaginationIls dsirs et renient

    travers leur imagination.

    3. Le disciple est motiv dans le

    seul but d'atteindre la Ralit. Il

    trouve un matre sans l'aide de

    son esprit, mais grce

    l'attraction, l'amour et l'aide

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    La Lettre SoufiePage 2

    divine, et se soumet au matre

    en toute sincrit. Il accepte le

    matre tel qu'il est. Il n'impose

    pas au matre ses ides

    propres, aimant le matre de

    tout son cur, afin que quoique

    le matre fasse, il trouve celaacceptable.

    Il n'attache pas d'importance

    la foi ou l'infidlit du matre.

    D'ailleurs, il a t dit que

    l'infidlit du matre est la foi du

    disciple. Ce qui veut dire qu'a

    chaque fois que le matre se

    comporte d'une faon que le

    disciple trouve difficile

    accepter, il doit toujours avoir

    foi en son matre, sans que sa

    dvotion pour lui n'en soitaffecte.

    Dans cette voie, le principal

    capital du disciple est la grce

    de Dieu, qui confirme la fidlit

    du disciple. Comme le dit

    Hafez:

    Je suis dvou au matre Magus

    qui me libre de l'ignorance;

    Quoique le matre fasse est en

    harmonie

    avec le Transcendent.

    De tels disciples, quelle que soit

    l'poque, se comptent sur les

    doigts de la main. Ils

    confrontent leur tre la

    flamme de la Ralit absolue,

    dans laquelle ils se consument..

    Traduit du magazine SUFI n 54 Ete

    2002, pp. 15 "Becoming a disciple".

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    Page 3 La Lettre Soufie

    La passion de la folieTir du magazine Sufi numro 20The Passion of Madness de Dr. Nurbakhsh

    Ah! Si javais pu maintenir mon regard constant sur vous,Alors, aurai-je dcouvert, la passion de la folie!

    En humble derviche dmuni,

    En offrande votre Sublime Prsence

    Furent prsents le cur et l`me,

    Monnaie solide,

    Argent comptant que je mis de ct si patiemment.

    Le papillon nocturne me trouva bloui

    par la luminosit de votre chandelle ---

    La pauvre crature

    Ignorait mon tat dextinction.

    LAmour vnt et teignit la bougie quen chemin vers VousJavais si sagement allume ma vie durant.

    Le manteau de lunion qui fut cousu

    Avec laiguille du dsir, sur Votre Route,

    Se retrouva dchir par centaines de morceaux.

    NURBAHSH Vous ftes gnreux---

    Vous laviez recueilli bien avant

    Quil ne se livre Vous..

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    La Lettre SoufiePage 4

    Un chercheur de dattes perdu au milieud'un verger de dattes

    Par Jeffrey ROTHSCHILD

    Chaque personne qui vient dansla voie en attend quelque chose.

    Le plus grand nombre dsire des

    pouvoirs spirituels ou

    lillumination, certains cherchent

    chapper eux-mmes et aux

    pressions de la vie. Certains

    autres esprent simplement tre

    soulags de leur solitude et de

    leur mal tre ou tristesse et

    trouver un havre damour bont.

    Ceux qui viennent la voie

    veulent obtenir un certain nombrede choses quelles soient bonnes

    ou mauvaises. Mais chacun de

    nous veut quelque chose.

    Le fait est cependant que la voie

    implique quon ne dsire rien sauf

    Dieu or justement personne ne

    vient avec le dsir de Dieu; ainsi

    nous faisons tous le premier pas

    dans lerreur.

    Il ya de cela plusieurs annes, un

    homme vint trouver le Matre afin

    dtre initi. Il semblait srieuxextrmement et sincre dans son

    intention de suivre la voie.

    Lorsque le Matre lui demanda

    pourquoi il tait venu lui, il

    expliqua que sa femme tait

    mourante dun cancer et quil avait

    entendu dire que les soufis

    avaient des pouvoirs de gurison

    spciaux. Il esprait alors devenir

    soufi afin de pouvoir soigner sa

    femme quil aimait profondment.

    Le Matre fut trs avenant et douxavec lhomme mais il ne linitia

    pas. Aprs son dpart, le Matre

    se tourna vers le derviche qui tait

    assis ct de lui en secouant la

    tte puis il dit tristement:ce nest

    pas cela le soufisme.

    Nous sommes tous pareils cet

    homme. Nous ne venons pas la

    voie avec le dsir de Dieu, aussinobles que soient nos motivations

    car dsirer Dieu signifie

    absolument ne rien dsirer .Il ne

    serait mme pas correct de croire

    que vouloir Dieu cest ne rien

    devenir ou tre rien(comme je le

    croyais lorsque je suis entr dans

    la voie),car mme cela, cest

    vouloir devenir quelque chose. Et

    vouloir quelque chose signifie que

    lon ne sest pas totalement

    soumis la volont de Dieuquelque soit celle-ci mme si elle

    consiste rester telle que nous

    sommes.

    Comme le Matre la dit une fois

    un disciple qui exprimait son dsir

    dtre guri de son nafs (go),

    Ne crois-tu pas que cette

    purification est elle-mme un dsir

    du nafs? Contente-toi daccomplir

    ton rappel(zekr) de Dieu

    Les implications des vrits ci

    dessus exposes sont difficiles accepter. Par exemple nous

    croyons tous que nous venons

    dans la voie avec lintention de la

    suivre jusquau bout, mais en fait

    aucun de nous na la moindre

    intention de terminer la voie et

    datteindre Dieu quand nous nous

    engageons Malgr tout ce que

    nous affirmons. Ce que nous

    voulons ce nest pas atteindre

    Dieu, mais plutt obtenir ce que

    nous voulions lorsque nous

    sommes venus la voie._ que cesoit des pouvoirs spirituels

    ,lillumination, un soulagement,

    tre aim ou mme tre rien.

    Ne crois-tu pas quecette purification est

    elle-mme un dsir dunafs? Contente-toi

    daccomplir tonrappel(zekr) de Dieu

    Cest une chose effrayante que de

    raliser que lon ne veut pas en

    ralit terminer la voie et atteindre

    Dieu. Je sais combien cela est

    effrayant parce que il ma t

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    La Lettre SoufiePage 5

    accord la bndiction de

    comprendre cette vrit lgard

    de ma propre personne aprs

    seulement quelques mois sur la

    voie bien que cela me prit des

    annes pour le comprendre et

    bien plus encore pour laccepter.Quelques mois aprs mon

    initiation jeus lopportunit daller

    en Iran pour vivre la khanaqah

    de Thran. Evidemment je

    bondis sur loccasion qui mtait

    offerte dtre avec le Matre. Je

    me sentais exceptionnel, ce qui

    tait une norme mprise:nul sur

    la voie nest suprieur un autre.

    Car tous sont Un et tout disciple

    qui se sent exceptionnel court au

    devant dune rude dsillusion.Lorsque nous arrivmes ce soir l

    Thran il se faisait tard. Le

    Shaykh qui mavait initi, son

    traducteur, et moi nous fmes

    accueillis laroport par un

    homme g de petite allure. Il

    avait un pick-up caboss qui

    semblait peine moins g que

    lui mme. Il ny avait que deux

    places dans la cabine ,je montai

    donc larrire du vhicule sur un

    tas de ferrailles et de planches de

    bois. A chaque bond (et il y en

    eut) ,je me cramponnais de plus

    en plus fort la carrosserie du

    camion de peur que je sois ject

    de mon sige de fortune, men

    remettant surtout Dieu.

    Lorsque nous empruntmes le

    chemin de terre qui menait la

    khanaqah mes bras taient

    douloureux, mes yeux fouetts

    par le vent me piquaient et javais

    un mal de tte atroce d mon

    inquitude. Nous suivions uneroute en terre et tout ce que je

    pouvais distinguer dans

    lobscurit, ctait un haut mur de

    pierres derrire lequel on pouvait

    deviner les contours dun pt de

    maisons. Sur les deux portes en

    face de moi, je vis les deux

    haches croises symboles de

    lordre. Alors que les portes

    souvraient et que javanais vers

    lentre, je me surpris regarder

    de luxuriants jardins autour de

    trois alles darbres, et des

    fontaines aux eaux bleutres. Je

    navais jamais rien vu desemblable. Dpassant les murs, il

    y avait de tous les cts des murs

    de pierres qui slevait haut dans

    le ciel. Directement en face de

    moi sur le mur du fond se trouvait

    trois normes arcades dont le

    haut se terminait par des

    mosaques complexes aux motifs

    en carreaux bleus. Ctait un

    spectacle couper le souffler et

    jeus une sensation de petitesse

    devant tant de beaut et

    dharmonie.

    Puisquil tait trs tard, le matre

    devait dj stre couch. Il y avait

    notre arrive une poigne de

    derviches dont trois amricains

    qui rsidaient galement la

    Khanaqah (bien que jappris plus

    tard que deux dentre eux, un

    couple mari venait de la

    khanaqah de Shiraz pour une

    visit). Aprs mavoir fait visiter

    les lieux, le couple se retira pour

    aller se coucher et lautreamricain et moi portmes dehors

    un lit en bois pour que je puisse y

    dormir. Juste ct dune des

    chatoyantes fontaines bleues.

    Mme si plus tard je pris

    lhabitude de dormir sur le sol en

    pierres de la salle de th o nous

    vivions, ce soir l lamricain d

    penser que ce serait trop dur pour

    moi. Le choc culturel est -- et je

    lappris vite -- quelque chose que

    jallais exprimenter plusieursreprises plus que tout autre chose

    dans les mois venir.

    Le matin je me rveillai au son du

    chant des oiseaux quentrecoupait

    le bruit des chasseurs de la flotte

    arienne du Shah. Tout cela me

    semblait si bizarre que je me

    sentis dboussol, je voulais

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    La Lettre SoufiePage 6

    dsesprment sauter dans le

    premier avion pour lAmrique.

    Alors que jtais couch rvant

    veill de me retrouver chez moi,

    jentendis la voix dun derviche

    persan que javais brivement

    rencontr la veille. Cela me prit unmoment pour raliser quil

    sadressait moi. Allez lve toi.

    Nous devons enlever ce lit. Le

    Matre est dans le salon de th et

    je ne voudrais pas quil voit ce lit

    sil vient dehors.

    Je navais aucune ide de la

    raison pour laquelle le Matre ne

    devait pas voir le lit, et jtais un

    peu froiss lide dtre rveill

    si brusquement car je ny tais

    gure habitu. Cependant nesachant pas trop quoi men

    tenir je suivis passivement la

    suggestion du derviche mme si

    je le fis avec la mine renfrogne.

    Le chemin le plus court pour aller

    lendroit o ranger le lit passait

    devant les portes entrouvertes du

    salon de th. Je me mis donc tout

    naturellement aller dans cette

    direction avec le lit, mais mon

    compagnon le tira brusquement

    sur la droite loin de la salle de th

    vers lautre ct de la Khanaqah.Je crus un instant quil avait perdu

    la raison. O vas tu? le magasin

    ne se trouve til pas dans cette

    direction? lui demandai-je en

    indiquant lentre du salon de th.

    Il approuva de la tte. Oui cest

    exact; mais je ne veux pas y

    passer avec le lit, je ne voudrais

    pas que le Matre nous voie

    L, je commenais vraiment tre

    agac. Je le fixai et je lui parlai

    avec une bonne dose de ddaindans la voix. Et pourquoi pas...si

    je puis me permettre de

    demander? ya t-il un mal dormir

    sur un lit?

    Il haussa les paules cest toi

    de dcider .Nul na te dire ici ce

    que tu dois ou ne pas faire. Je

    veux juste marquer mon respect

    pour le Matre en ne le drageant

    pas .Il sarrta un moment puis

    dit En outre, il est mieux dtre

    invisible ici autant que possible.

    Je ne souhaite pas attirer

    lattention sur ma personne

    Ctait en fait un excellent conseilcomme jallais men rendre

    compte plus tard, mais sur le

    champ jtais trop troubl pour le

    comprendre. Je me revois en train

    de penser combien je trouvais

    que tout ceci tait hypocrite

    jexiste toujours, je suis l. me

    dis je. Alors pourquoi devrais-je

    essayer de me comporter

    humblement alors que ce ntait

    pas du tout ce que je ressentais.

    Et dailleurs pourquoi devrais-jeavoir du respect pour quelquun

    que je navais jamais rencontr?

    jai toujours t de ceux qui

    dfient lautorit plutt que dtre

    soumis. Jaccorde mon respect

    aux autres en fonction de ce quils

    sont ( la personnalit) et non de

    ce quils ont (le titre, la fonction).

    Nanmoins je mabstins de dire

    quoi que ce soit et, je suivis le

    derviche en portant le lit tout le

    long de lautre ct de la

    khanaqah afin de ne pas tre vupar le Matre. A mon retour

    cependant je pris soin de passer

    bien en face du salon de th.

    Jessayai mme de jeter un

    regard furtif lintrieur mais je ne

    vis rien de plus quune grande

    silhouette assise sur un tapis en

    peau de mouton derrire un petit

    bureau. En face de la silhouette,

    tait assis le Shaikh qui mavait

    initi, la tte baisse contre sa

    poitrine.

    Quelques minutes plus tard

    jentendis appeler mon nom.

    Aprs un profond soupir, je

    mavanai pas audacieux vers le

    salon de th. Jtais rsolu ne

    pas me laisser intimider

    Cependant, lentre de la pice

    quelque chose me poussa

    marrter et baisser la tte.

    En outre, il est mieuxdtre invisible ici autant

    que possible. Je nesouhaite pas attirerlattention sur ma

    personne

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    La Lettre SoufiePage 7

    Jentendis une voix lintonation

    profonde qui faisait cho dans ma

    poitrine me dire:Asseyez vous.

    Le Matre mindiqua du doigt un

    coussin pos mme le sol sa

    droite. Je massis l o il avait

    indiqu. Aprs quelques minutes je devins si nerveux que je lui

    lancai un regard la drobe. Il

    tait plus jeune que je limaginais

    et avais un visage la fois dune

    svrit effrayante et dune bont

    indescriptible. Ses cheveux noirs

    parsems de mches grises

    taient coiffs vers larrire

    laissant voir son front. Il crivait

    quelque chose sur un bout de

    papier derrire son petit bureau

    tout en mignorant compltement.Alors que le silence devenait long,

    je commenai mnerver

    encore. Jtais (quand mme)

    venu ici aprs avoir travers la

    moiti de la terre juste pour le voir

    en abandonnant mon premier

    vritable boulot dcrivain, mon

    appartement confortable, tous

    mes livres, ma petite amie, mon

    vrai pays, et lui tait assis l le

    plus simplement du monde

    ignorer ma prsence; comme si

    jtais juste venu du bout de la rue

    voisine pour lui rendre visite. Irrit

    vif, inexpriment et ignorant je

    me sentis bless, ce qui

    augmentait encore plus ma

    colre. Finalement, aprs ce qui

    me parut durer des heures, il posa

    son stylo et me regarda au-

    dessus de ses lunettes de lecture.

    Alors, pourquoi tes vous ici?.

    Pensant quil me posait une

    question srieuse sur la faondont jtais parvenu la voie je

    commenai en guise de rponse

    une longue tirade dcrivant tous

    les dtails qui selon moi mavaient

    conduit la Khanaqah de New

    York. Cependant aprs mes

    premires phrases, il secoua la

    tte impatiemment et

    minterrompit.

    Alors, pourquoi tes vous ici?

    Je crus alors quil voulait savoir ce

    qui mavait dcid venir

    Thran. Je me mis alors lui

    expliquer ce que le Shaikh mavait

    dit propos de mon incapacit

    (due ma paresse) obtenir mondoctorat et la possibilit de venir

    Thran pour le russir. Il balaya

    mes propos du revers de la main.

    Alors, pourquoi tes vous ici?

    Frustr, ma colre et mon irritation

    ne cessant daugmenter, je

    narrivais plus me contenir. je

    ne sais pas pourquoi je suis ici

    laissai je tomber avec amertume.

    Il approuva alors de la tte avec

    un regard de satisfaction.Bien, cest la bonne rponse. Tu

    ne sais pas .

    Dites-moi alors pourquoi je suis

    ici?

    En fait ce ntait pas vraiment une

    question, mais un dfi que je lui

    lanais en raison de mon tat

    ngatif. Le Matre sarrta et me

    fixa avant de rpondre.

    Je ne le sais pas non plus. Vous

    ne le savez pas et moi je ne lesais pas. Seul Dieu sait

    Soudain, il se leva de la peau de

    mouton sur laquelle il tait assis et

    repoussa sa petite table de travail.

    Je narrivais pas croire quil tait

    sur le point de sen aller aprs

    mavoir parl peine cinq

    minutes. Ctait tout ce dont jtais

    digne aprs tous les sacrifices

    que javais consenti a faire en

    venant Thran. Jtais trop

    stupide pour me rendre compte dela grce que reprsentait le simple

    fait quon mait permis de venir

    ainsi que le cadeau que me faisait

    le Matre en mignorant. Je ne

    ralisais pas de mme combien

    mes pseudo sacrifices taient

    mesquins; car en fait je navais

    aucune ide de ce qutait un

    sacrifice.

    Alors, pourquoi tesvous ici?je ne sais pas

    pourquoi je suis icilaissai je tomber avecamertume. Il approuvaalors de la tte avec unregard de satisfaction.Bien, cest la bonne

    rponse. Tu ne sais pas.

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    La Lettre SoufiePage 8

    Juste avant de quitter la pice, le

    Matre sarrta et se tourna vers

    moi.

    Ecoutes bien. Ton esprit est ton

    matre; tu nes pas le matre de

    ton esprit. Avant tout tu dois

    apprendre tre le capitaine deton propre bateau. Aprs on

    verra.

    Avant que je puisse placer le

    moindre mot, il disparut derrire la

    porte.

    Je restai l abasourdi. Je savais

    quil avait raison mme si je ne

    men tais pas rendu compte

    auparavant. Mon esprit avait

    toujours t ma force mais ctait

    galement ma grande faiblesse.La plupart du temps, mes

    perturbations et mes problmes

    taient dus mon esprit et au

    contrle quil exerait sur moi.

    Jtais honteux et je men voulais

    pour la faon dont je mtais

    exprim face au Matre.

    Tout en larmes, je sortis

    prcipitamment de la pice en

    qute dun endroit o me cacher

    avec mon humiliation, ignorant

    que la khanaqah il ny a aucun

    endroit o se cacher. Je finis par

    masseoir terre dans un coin de

    la cour o se trouvait encore les

    ruines de la fondation de

    lancienne khanaqah de Thran.

    A prsent, le soleil tait haut

    dans le ciel rpandant sa chaleur

    brlante partout. Mon visage tait

    couvert de larmes et de sueur. Je

    savais que toute personne qui

    regarderait dans la cour depuis un

    des btiments alentours me

    verrait mais je men moquait.Soudain, je vis la femme

    amricaine qui venait de Shiraz

    arriver vers moi. Enfin me dis je

    quelquun qui pourrait me

    comprendre et me rconforter.

    Jessayai de rprimer mes pleurs

    tout en massurant quelle puisse

    voir mes larmes. Je sanglotais

    encore lorsquelle arriva ma

    hauteur et sarrta au-dessus de

    moi. Je sentais son regard pos

    sur moi et je la scrutais travers

    lclat du soleil. Elle me sourit

    gentiment et me parla dune voix

    mlodieuse. Tu sais, tu nedevrais pas rester assis ainsi au

    soleil .LIran nest pas comme

    lAmrique, tu peux avoir des

    coups de soleil. Au moins met un

    foulard sur ta tte si tu veux rester

    l..

    Sur ces paroles elle retourna la

    cuisine o elle tait en train de

    travailler. Aucun mot de

    sympathie, aucune indulgence

    pour mon comportement stupide.

    Juste une suggestion pratique si je voulais rester l assis me

    conduire comme un idiot. Jtais

    froiss. Autrefois, javais toujours

    russi attirer la sympathie des

    femmes, mais mme cela ,je nen

    tais plus capable apparemment.

    Compltement secou, jessayai

    tant bien que mal de me ressaisir

    et de m'abriter du soleil. Je ne

    voulais pas ajouter un coup de

    soleil mes autres soucis. Aprs

    avoir march travers la cour

    lombre des arbres, japerus le

    mari de la femme amricaine

    assis sur les escaliers en bton du

    salon de th. Il tait occup

    crire dans un carnet de notes. Je

    marrtai devant lui la tte baisse

    et attendit quil leva les yeux.

    Aprs un moment il sarrta enfin

    dcrire et parut remarquer ma

    prsence.

    Oui?

    Je ne savais pas par ocommencer ce que je voulais dire.

    Je crois que je voulais juste quon

    me dise que les choses

    rentreraient dans lordre, juste

    entendre un mot de sympathie.

    Je voudrais vous poser une

    question murmurai-je.

    Pardon?

    "Ton esprit est tonmatre; tu nes pas lematre de ton esprit.

    Avant tout tu doisapprendre tre lecapitaine de ton proprebateau. Aprs on verra"

  • 8/14/2019 La lettre soufie n8

    9/15

    Page 9 La Lettre Soufie

    je voudrais juste vous poser une

    ques...non laissez tomber. Je ne

    devrais pas la poser.

    Jaurais voulu quil me dise,ok,

    allez y vous pouvez me parler.

    Vous pouvez me demander tout

    ce que vous voulez. Jauraisvoulu quil me dise combien ctait

    dur dtre l, quil me rassure. Au

    lieu de tout ceci il rpondit par un

    seul mot ma suggestion de

    laisser tomber ma question:Bien

    et il se remit crire.

    Ce ntait pas juste. Personne ne

    jouait mon jeu dans cet endroit.

    Personne ne suivait les rgles

    habituelles. Je maperus alors

    petit petit que toutes mes

    larmes et mon apitoiement surmon sort ne me seraient daucune

    utilit. Je retournai alors au salon

    de th, massis dans un coin et fis

    mon rappel (de Dieu).

    Je me trompais lourdement en

    croyant quavec le temps, la vie

    la khanaqah serait plus

    supportable ou facile. Tant quon

    reste soi mme, la vie la

    khanaqah notamment avec le

    Matre reste pnible. Et pour

    avoir un ego ,jen avais un!Chaque jour tait semblable au

    prcdent. Il ny avait aucune

    occupations extrieures, aucune

    distraction. Je me levais laube ,

    habituellement au son de lappel

    la prire provenant dune

    mosque voisine. Aprs mes

    prires, je prenais mon petit

    djeuner compos dun pain plat,

    dun fromage lourd (que je

    digrais peine) et de th. Aprs

    le petit djeuner, il ny avait pas

    grand chose faire.

    La plupart des derviches

    travaillaient pour gagner leur vie.

    Seuls quelques-uns uns taient

    prsents la khanaqah durant la

    journe et ils parlaient rarement

    langlais. Les seules choses que

    je pouvais faire taient de lire un

    des rares bouquins que javais

    amen avec moi, crire dans mon

    journal, dormir ou mditer. Les

    jours de runion il marrivait de

    balayer les escaliers et les alles

    paves de pierres de la khanaqah

    ou de nettoyer les deux toilettes

    lusage des derviches.Parfois en fin daprs midi, jtais

    autoris arroser les plantes et

    les fleurs qui ornaient la cour de la

    khanaqah. Une ou deux fois par

    semaine je me rendais au seul

    endroit o je pouvais aller tout

    seul (les bains publics). Je me

    rasais la barbe et je me lavais les

    cheveux chose impossible faire

    sous les robinets deau froide

    situs en plein air la khanaqah.

    Aprs quelques semainespasses ce rythme le Matre me

    demanda un jour si je voulais aller

    suivre les cours de lacadmie de

    langues pour apprendre le persan

    en prvision de mon entre

    luniversit. Je nai jamais t bon

    en langues trangres et lide

    dapprendre lalphabet arabe

    mintimida mais au point o jen

    tais ,jaurais pu accepter

    nimporte quoi pour avoir la

    possibilit de sortir de la

    khanaqah quelques heures par

    jour.

    Le Matre demanda un derviche

    de maccompagner lcole des

    langues puisque jtais incapable

    de retrouver mon chemin dans la

    ville de Thran. Nous y allmes

    le lendemain. Le seul problme

    tait que nous tions au mois de

    Ramadan en pleine priode de

    jene. Mon compagnon refusa de

    prendre le taxi bien que cela tait

    absolument ncessaire car ilconsidrait cela comme une

    facilit et donc un gaspillage

    dargent. En lieu et place, nous

    tions tenus de marcher ou

    dfaut de prendre le bus qui

    cotait peine lquivalent dun

    penny.

    Tant quon reste soimme, la vie lakhanaqah notammentavec le Matre reste

    pnible

  • 8/14/2019 La lettre soufie n8

    10/15

    La Lettre SoufiePage 10

    Trouver lacadmie nous prit deux

    heures en partie cause des

    arrts incessants du bus et dautre

    part en raison de nos garements.

    Nous avions pass lune de ces

    deux heures marcher dans les

    rue venteuses des banlieues deThran sous lardent soleil de

    laprs midi. Cela faisait plus de

    huit heures que je navais absorb

    aucune nourriture ni boisson et je

    dsirais dsesprment un coca,

    un cheeseburger avec des frites,

    un dessert la glace et aux fruits

    ainsi quune confiserie chaude.

    Jaurais tout donn pour un verre

    deau.

    Aprs mon inscription pour suivre

    les cours de mon niveau, nousretournmes la khanaqah. En

    route, jessayai avec beaucoup de

    difficults de convaincre le

    derviche qui maccompagnait de

    nous arrter dans un magasin de

    livres en anglais devant lequel

    nous tions passs en allant

    lcole des langues. Les livres

    avaient occup la plus grande

    partie de ma vie avant mon

    initiation et les laisser derrire moi

    a t la chose la plus difficile

    aprs mon dpart pour lIran.Lide de passer une heure dans

    une librairie tait paradisiaque

    pour moi. Quimporte ce que cela

    pourrait avoir comme

    consquence notre retour la

    khanaqah. Je ne voulais mme

    pas y penser.

    Aussi difficile quait pu tre la vie

    la khanaqah pour moi, il y avait

    aussi des avantages dont le plus

    important tait la prsence du

    Matre. Chaque jour nous sortionsun grand lit en bois et le placions

    dans le jardin o le Matre

    sinstallait pour recevoir les gens

    dont la plupart venaient solliciter

    ses faveurs, un conseil ou sa

    bndiction pour ceci ou cela.

    Les jours de runion, lorsque la

    khanaqah tait remplie de

    derviches, il tait trop pris pour

    soccuper de moi. Mais quand les

    choses taient plus calmes il me

    faisait souvent appeler pour savoir

    comment jallais

    Une nuit, alors que jtais assis

    ct de lui, le portier vint annoncerun jeune amricain qui voulait lui

    parler. Le Matre donna son

    accord et on introduisit le visiteur.

    Il se trouva que lhomme parlait

    couramment le persan et larabe

    et connaissait par cur une

    bonne partie du Coran. Il avait

    voyag toute une anne dans le

    Moyen orient en qute dun ordre

    pour tre initi et avait rencontr

    quatre ou trois shaykh dordres

    diffrents qui lui avaient tousrefus linitiation

    En observant lchange de

    lhomme avec le Matre, jeus

    limpression quil tait sincre

    dans sa qute et ntait pas un

    chercheur curieux ou un simple

    dilettante. Mais il y avait quelque

    chose dtrange dans toute la

    conversation. Voici un homme qui

    avait cherch pendant des mois

    entrer dans la voie et qui se

    trouvait en prsence dun matrede la voie mais, aucun moment

    il ne lui exprima son dsir dtre

    initi par lui. Au contraire, la seule

    chose qui semblait le proccuper

    ctait dexprimer sa sincrit et

    toute la souffrance quil avait vcu

    lors de ses tentatives dentrer

    dans la voie.

    Il me vint lesprit quil tait

    comme quelquun qui tait obsd

    par lenvie de manger des dattes

    et qui finalement avait russi trouver un oasis de dattiers. Tout

    ce qui lentourait tait fait de

    dattes ou consacr la culture

    des dattes: les arbres taient

    couverts de dattes, des plateaux

    chargs de dattes lentouraient et

    le propritaire des dattiers tait

    assis l en face de lui et pourtant

    tout ce qui lintressait tait

  • 8/14/2019 La lettre soufie n8

    11/15

    La Lettre SoufiePage 11

    dexprimer son dsir fou de

    manger des dattes.

    Aprs un moment, lhomme

    demanda au matre sil pouvait

    faire quelque chose pour laider

    trouver un Matre. En guise de

    rponse le Matre madressa unsourire espigle. Il prit alors un

    bout de papier sur lequel il

    marqua un verset coranique en

    demandant au monsieur de le

    rciter quotidiennement une

    centaine de fois avant de se

    mettre au lit. Si telle est la volont

    de Dieu lui dit le Matre, il finira

    par trouver un matre. Lhomme

    remercia infiniment le Matre et se

    leva pour partir. A ce moment le

    Matre lui fit signe de sarrter etlui dit que sil ne trouvait personne

    pour se faire initier, il pourrait

    toujours revenir pour se faire

    initier dans notre ordre.

    Jaccepterai tous ceux qui ont t

    rejets par quelquun dautre

    ajouta t-il avec un sourire. Mais le

    monsieur ne revint jamais.

    A lpoque jtais dsol pour cet

    homme. Jeus galement un

    sentiment de supriorit car je

    pensais que jtais diffrent de lui.

    Navais-je pas trouv mon chemin

    vers la voie alors quil tait encore

    en train de patauger.? Jappris

    trs vite combien javais tort et

    combien jtais semblable cet

    homme. Nous pouvons croire que

    cest nous qui choisissons de

    venir dans la voie mais en ralit

    cest Dieu et Lui seul qui nous

    guide vers la Voie ou qui nous en

    loigne et ce, malgr tous nos

    raisonnements et nos dsirs.

    Cela arriva un jour comme tousles autres la Khanaqah. Jtais

    assis dans la salle de th

    essayant de faire mon rappel

    (zekr). La seule personne

    prsente avec moi tait M.Kobari,

    un ancien derviche qui soccupait

    de toutes les affaires de la

    khanaqah. Un travail faire

    perdre la raison(Pour donner

    une ide de lampleur de son

    travail, aprs la mort de M Kobari,

    il faudra cinq personnes pour

    accomplir le travail quil effectuait

    tout seul pendant des dcennies)

    M.Kobari tait un hommeextraordinaire au vrai sens du

    terme. Ctait un Majnun, un attir

    si brlant damour pour le Matre

    et pour Dieu quil tait dispens

    de suivre la voie suivant le

    procd ordinaire. Fait

    extrmement rare chaque re

    mais surtout quasiment inexistant

    notre poque fait de

    matrialisme, davidit et

    dgosme. En tant que tel, il est

    difficile de le dcrire avec desmots. Malgr cela ou peut tre

    cause de cela, on raconte plus

    dhistoires sur lui qu propos de

    nimporte quel autre derviche.

    Chacune des personnes ayant

    connu M. Kobari a une anecdote

    rapporter son sujet.

    Alors que jtais assis en face de

    M. Kobari ce jour l, je me

    demandais ce que ce serait dtre

    comme lui -- tre un amant aussi

    sincre --- ne serait-ce quun

    instant. Je savais que ce serait

    une grande chance pour moi

    davoir une part infiniment petite

    de sa dvotion malgr tout le

    temps que javais pass sur la

    voie.

    Aprs un petit moment, jentendis

    la voix du Matre lextrieur de la

    pice. Je levai les yeux juste au

    moment o il entrait dans la pice.

    M Kobari continuait travailler

    apparemment inconscient du

    monde extrieur. Le Matre lui ditquelque chose. Il murmura une

    rponse et retourna son travail.

    Un instant aprs le Matre dit

    quelque chose dautre et avec un

    grognement dexaspration M

    Kobari posa son stylo souleva le

    dessus de son petit bureau et

    tendit un trousseau de cls au

    Nous pouvons croireque cest nous quichoisissons de venirdans la voie mais enralit cest Dieu et Luiseul qui nous guide versla Voie ou qui nous enloigne et ce, malgrtous nos raisonnementset nos dsirs

  • 8/14/2019 La lettre soufie n8

    12/15

    La Lettre SoufiePage 12

    Matre. Prenant les cls, le Matre

    sourit et alla ouvrir une armoire de

    laquelle il retira un classeur avec

    des papiers et revint sasseoir

    prs de M. Kobari. Les deux

    hommes assis cte cte

    ignoraient compltement maprsence. Ils avaient lair de

    partager un lien profond comme

    sils ntaient plus des tres

    spars mais une entit unique.

    Je fermai les yeux et

    recommenai faire mon rappel.

    Je nai aucune ide du temps qui

    sest coul car le temps navait

    plus dimportance pour moi ce

    moment l. Mme d'crire avec

    des mots ce qui sest ensuite

    pass est difficile vu que les motssont du royaume de lesprit alors

    que ce qui allait arriver appartient

    au royaume du cur qui est le

    silence.

    Le premier jour la khanaqah,

    lorsque jtais assis dans la salle

    de th aprs ma dbcle avec le

    Matre, jai fait le vu de

    progresser suffisamment en Iran

    afin de retourner en Amrique en

    tant que chercheur avanc sur la

    Voie. Qui sait peut tre serais -je

    le premier amricain recevoir la

    permission dinitier les autres.

    Cest avec de telles penses que

    je me flattais. A prsent jtais

    assis dans la pice aux pieds du

    Matre et dun vrai disciple. Je

    sentis mon tre emport et mes

    chimres entranes dans un

    gouffre que je ne comprenais pas

    mais quon ne pouvait quaccepter

    et exprimenter. Ctait comme si

    jtais suspendu une corde au

    dessus dun grand vide et la seulechose que javais faire tait de

    lcher prise, de me laisser aller

    pour tre englouti par ce vide et

    perdre mon moi. Je navais mme

    pas faire quoi que ce soit; je

    devais seulement me laisser aller

    et je savais au fond de moi que je

    cesserai alors dexister. je

    serais alors rien; il ny aurait plus

    de voie.

    Aussi ridicule que cela puisse

    paratre avec du recul, au mme

    moment je savais aussi que je ne

    dsirerais plus de cheeseburger

    ou mes chers livres ou que jenappellerai plus un vieil ami pour

    discuter, que je naurai plus

    besoin de voir ma famille ou

    daller avec une femme. Je ne

    voudrais plus rien. Tout ce que

    javais connu ou dsir serait

    dsormais insignifiant.

    Je regardai dans labme, dans ce

    nant et je sus ce quil signifiait

    mais je ne pouvais pas me laisser

    aller. Et ce moment je me rendis

    compte que achever la voie nemintressait pas, que tous mes

    fantasmes sur la perte ou

    leffacement totale de soi ntaient

    que chimres et rves en tat

    dveil. On mavait offert

    loccasion en un clin dil de

    parcourir la voie et jtais

    incapable de la saisir. Je ne

    pouvais pas tout simplement

    renoncer ma personne. Je ne

    pouvais pas lcher prise et me

    laisser aller.

    Et ce moment je merendis compte que

    achever la voie nemintressait pas, quetous mes fantasmes surla perte ou leffacementtotale de soi ntaientque chimres et rvesen tat dveil

    Bien que je me sois apitoy sur le

    sort du monsieur qui tait venu

    voir le Matre, je ne faisais en fait

    que me tromper moi mme en

    croyant que jtais suprieur lui.

    Moi aussi je ntais rien dautre

    quun chercheur de dattes perdu

    au milieu des dattiers. Malgr le

    fait que son but tait l en face de

    lui, il ne pouvait pas ou ne voulait

    pas le voir. Et il en est de mme

    pour vous. Mais nous ne pouvons

    pas laccepter. Tout comme cepauvre chercheur dans lerreur ;

    nous fuyons le but mais nous

    navanons pas vers lui parce que

    nous ne pouvons pas supporter

    lide davoir abandonner nos

    divers liens et dsirs. Nous nous

    cramponnons ces derniers et

    quelle que soit la raison pour

  • 8/14/2019 La lettre soufie n8

    13/15

    La Lettre SoufiePage 13

    laquelle nous sommes venus la

    voie, ce nest en tous cas pas

    pour atteindre Dieu. Pareils des

    enfants qui font de leurs

    vtements des montures pour

    jouer, nous sommes monts sur

    nos chevaux de vtements etcroyons que nous allons au

    champ de bataille. Mais la

    moindre alerte, au moindre signe

    vritable du combat nous cachons

    nos visages avec ces vtements

    et nous fuyons.

    Quelques semaines aprs avoir

    constat mon incapacit

    renoncer ma personne, mon

    manque total de toute intention

    dachever la voie et datteindre

    Dieu, le Matre pronona undiscours au cours dune

    crmonie spciale qui eut lieu un

    jour de runion. Voici les

    dernires phrases de ce discours.

    Les gens viennent la khanaqah

    en prtendant chercher Dieu.

    Mais en ralit ils dsirent des

    choses qui ne sont pas Dieu. Ils

    disent,Sil vous plat priez Dieu

    pour moi propos de ceci ou

    Demandez Dieu de nous

    pardonner cela ou encore Sil

    vous plat faites ceci ou cela pour

    moi --- toutes choses qui nont

    rien voir avec Dieu. En agissant

    ainsi, ils oublient dcouter avecle cur raison pour laquelle ils

    sont censs se trouver ici. A ce

    niveau le Matre fit une pause et

    regarda lensemble des derviches

    prsents. Puis il poursuivit.

    Lessence du soufisme est le

    taslim, la soumission Dieu.

    Ainsi, vous devez vous soumettre

    totalement la volont de Dieu

    pour ceci ou cela, pour tout.

    Autrement vous ntes

    vritablement pas du tout

    derviche

    toi qui durant touteune viea dsir lunion avec LuiPourquoi nes tu pasall au del de tous lesdsirs

    pour lamour de cedsir?- Maghrebi

    Depuis ce jour, je ne suis pas

    encore parvenu me considrer

    comme tant un derviche.

    Article extrait du magazine "SUFI", n7,

    automne 1990

  • 8/14/2019 La lettre soufie n8

    14/15

    Histoire de Mulla Nasrouddin

    L'idiot...

    Un philosophe qui voulait discuter avait pris rendez-vous avec

    Nasroudin. Il se rendit chez lui et ne trouva personne. Furieux, il sesaisit d'un morceau de craie et crivit sur la porte de Nasroudin :

    "Idiot stupide".

    Ds qu'il fut de retour et qu'il lut ces mots, le Mulla se prcipita chez le

    philosophe:

    "J'avais oubli", lui dit-il, "que vous deviez me rendre visite. Et je vous

    prie de m'excuser pour mon absence. Naturellement, je me suis tout de

    suite souvenue du rendez-vous quand j'ai vu que vous aviez laiss votre

    nom sur la porte."

    La Lettre SoufiePage 14

  • 8/14/2019 La lettre soufie n8

    15/15

    A propos de la Lettre Soufie

    La Lettre Soufie est une compilation d'articles rcents publis sur le sit

    web journalsoufi.multimania.com et distribue lectroniquement. L

    plupart des articles sont des traductions d'articles crits en anglais et e

    persans dans le magazine Sufi (http ://www.nimatullahi.org/MAG.HTM)

    Adresses des Maisons de SoufisAdresse des Maisons de Soufis de la confrrie Nmatollahi en pay

    Francophones (liste complte sur site http://journalsoufi.multimania.com)

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