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Angeline Godeux La Maison Steingraeber Und Söhne Entre tradition et innovation Projet réalisé dans le cadre du jumelage Annecy-Bayreuth et du prix Peter Färber 2015

La Maison Steingraeber Und Söhne

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Angeline Godeux

La Maison Steingraeber Und Söhne

Entre tradition et innovation

Projet réalisé dans le cadre du jumelage Annecy-Bayreuth et du prix Peter Färber 2015

Préface

Depuis ma naissance, la musique fait mon quotidien ; c’est bien simple, il y a chezmoi en permanence environ une vingtaine de pianos. Ceci n’est pas la remarque prétentieused’une jeune fille gâtée issue d’une famille aisée des bords du lac d’Annecy. Mon père estsimplement facteur de pianos. J’imagine le regard surpris et surtout plein d’interrogationsqui se dessine sur votre visage à la lecture de cette dernière phrase. Il veut dire :« Simplement facteur de pianos ? Elle écrit cela avec tout le naturel du monde, comme s’ils’agissait d’un métier des plus communs ! Je ne la connais même pas cetteprofession,moi… »

Alors oui, pour commencer, nous parlons ici d’une profession, c’est-à-dire d’uneactivité à plein temps, d’un métier appris au cours d’une formation, au terme de laquelle onreçoit un diplôme. Pour ceux qui se demandent : «Mais sinon, il fait quoi dans la vie ? C’estquoi son vrai boulot ? », ce livre est là pour vous montrer qu’être un facteur de pianos estnon seulement passionnant, mais permet même de subvenir à ses besoins (si si ! Vraiment !).

Vous découvrirez l’ensemble de la profession, le parcours nécessaire à réaliser pour exercerce métier, les tâches différentes qui le composent… Tout cela à travers le récit, l’histoired’une passion, celle de mon père, Stéphane Godeux, facteur de pianos depuis plus de trenteans. Mais ce livre est aussi l’histoire de mon expérience. Celle que j’ai vécue à Bayreuth, du 11 au31 juillet 2015 au sein de la manufacture de pianos de renommée mondiale : la maisonSteingraeber Und Söhne. Le stage d’observation que j’ai effectué là-bas m’a permis dedécouvrir le monde de l’entreprise, son fonctionnement, les avantages et les inconvénients dutravail au sein du secteur privé, et bien d’autres choses encore.

Bayreuth est une ville historique, dans laquelle grand nombre de musiciens ontséjourné ou vécu. Son patrimoine, ses musées conservent les marques du passage de FranzLiszt, Richard Wagner et sa famille, … . Le festival Wagner, basé au Festpielhaus deBayreuth, témoigne de l’attachement de cette ville à la musique. Bref, vous l’avez compris, lamaison Steingraeber Und Söhne n’aurait pas pu rêver meilleur emplacement. Et moi, jen’aurais pas pu rêver meilleur endroit pour apprendre encore plus sur ma passion, renforcermon expérience et mettre à profit mes connaissances sur le piano et son univers.

C’est donc le monde passionnant de la facture de pianos que je vais vous laisserdécouvrir dans ce livre.

Chapitre 1La facture de pianos

Être facteur de pianos, c’est comme être musicien : il ne suffit pas d’apprendre latechnique ou de suivre une simple formation. Ce n’est pas un métier que tout le monde peutexercer. Il est nécessaire de posséder la “fibre musicale”. Autrement dit, il faut aimer lamusique au point de souhaiter en faire son métier et être sensible au son, ainsi qu’avoir uneoreille développée (qu’il est possible d'affiner encore davantage au fur et à mesure del’apprentissage). Ce sont les bases de ce métier. Il est également préférable d’être agile deses mains, sachant que 80 à 90 pour-cent du travail est essentiellement manuel.

Pour mieux comprendre le domaine de la facture de piano, j'ai interrogé mon pèreavant mon départ en Allemagne pour qu'il me fasse part de son expérience professionnelle etqu'il m'explique en quoi consiste exactement son métier.

Mon père est un artisan à son compte qui s'est installé à Sevrier, une petite ville à côtéd'Annecy. En tant que facteur de pianos, il est amené à accorder, louer et réparer des pianos,et également à vendre des pianos rachetés à des particuliers. Dans son atelier situé au rez-de-chaussée de notre maison, on y trouve des pianos qui valent entre 1500 et 6500 euros. Laplupart sont des instruments d'aspect contemporain, laqués, à bas prix. Ce sont les critèresles plus recherchés par la clientèle moyenne. Et ce sont ceux que l'on trouve chez les pianosde marques asiatiques telles que Kawaï ou Yamaha. Ces marques sont à l'origine d'uneconcurrence accrue entre les pays émergents et les pays ayant connu les premières grandesfabriques de pianos, comme la France avec Erard et Pleyel, les Etats-Unis avec Steinway, etbien sûr l'Allemagne avec Steingraeber Und Söhne. La Chine et le Japon fabriquentessentiellement du bas de gamme pas cher, ce qui peut tirer vers le bas des fabricants depianos de gamme qui se voient dans l'obligation de réduire les prix (et donc parfois laqualité) pour pouvoir continuer à vendre. Aujourd'hui, un des résultats de la mondialisationest le suivant : 90% des marques de pianos ne fabriquent pas leurs instruments en Europe,continent qui était pourtant autrefois le foyer des fabriques de pianos. Malheureusement,nous n'avons pas toujours su préserver notre patrimoine : la dernière fabrique de pianosPleyel a fermé il y a deux ans.

Aujourd'hui, non seulement nous n'avons plus de fabriques et peu de marques encoreen activité, mais le métier de facteur de pianos est également plutôt rare. On trouve plusieursraisons à cela : trop peu de personnes ont connaissance de cette profession et nous n'avonsqu'une unique école de formation en France : l'ITEMM (Institut Technologique Européen desMétiers de la Musique), situé au Mans.

Mon père l'a intégrée à l'âge de 16 ans, après ses 4 années de collège, pour unapprentissage en 2 ans à l'issue duquel il a obtenu son premier diplôme. Certains arrêtentleurs études à ce moment-là, mais lui a décidé de continuer encore 3 ans pour avoir uneformation complète et le double diplôme accordeur-réparateur, vivement conseillé lorsqu'onsouhaite s'installer en tant qu'auto-entrepreneur. L'école propose également une formationcontinue en cas de reconversion. Alors qu'apprend-on dans cette école ? Quelles sont lesbases techniques de ce métier ?

Tout ce qu'il y a à savoir sur la facture de pianos est décrit dans le livre LaRéparation du Piano écrit par Carl-Johan Forss et publié en partenariat avec l'ITEMM. Ilretrace l'évolution du piano, du clavicorde (instrument à clavier et cordes frappées) aupianoforte (la forme de piano que nous connaissons aujourd'hui), énonce les différentes

parties constituant l'instrument (table d'harmonie, chevalet, meuble, clavier, etc.) et décrit lemécanisme complet interne au piano.

Plutôt que de vous ennuyer inutilement avec des termes très techniques, je vous laissedécouvrir ces images qui suffiront à balayer l'ensemble des connaissances requises pourcomprendre mon livre et l'expérience que j'ai vécue.

Clavicorde imité d'un original de 1784 Source : http://operacritiques.free.fr

Pianoforte, Bartolomeo CristoforiSource : http://www.metmuseum.org

Piano droit ouvert Source : http://vente.artpianos.fr

Feutre: produit textile qui enrobe le marteau.Barre de repos du marteau: support pour le marteau lorsqu'il n'est pas actionné.

Levier d'échappement: pièce qui envoie la tête du marteau vers la corde.Étouffoir: pièce servant à empêcher la corde de vibrer.

Source : http://www.infovisual.info

Clavier

Table d'harmonie

Cadre

Marteaux (frappent les cordes pour produire le son)

Chevalet

Étouffoir

Comme nous l'avons dit précédemment, le métier de facteur de pianos n'est pas unmétier courant et il existe peu d'écoles dans le monde qui proposent une formationd'accordeur-réparateur (en Allemagne, il n'en existe également qu'une seule). Alors quelavenir pour les métiers du piano ?

Mon père ose espérer que « tant qu'il y aura des pianos, il faudra des gens pour lesréparer ». Mais en tant que membre de plusieurs associations de techniciens et membre dujury de l'ITEMM à deux reprises, il a déjà remarqué des dysfonctionnements dans laformation de plus en plus fréquents et significatifs : un niveau qui baisse considérablement,des étudiants qui se limitent au CAP « assistant technicien piano » pour s'installer et créerleur entreprise, et peu d'offres d'emploi.

Cependant, les métiers du piano sont portés par des associations plus ou moinsconnues et influentes qui encouragent la coopération entre les techniciens et fait perdurerl'esprit du métier : une passion commune et un attachement à un travail bien fait. LeGroupement Pianos Rhône-Alpes (ARP), dont mon père est membre, réunit une vingtaine demembres « sélectionnés selon des critères précis déontologiques et de sérieux professionnel ».Certains sont facteurs de pianos de père en fils, voire sur deux ou trois générations. Al'échelle nationale, l'association Europiano France regroupe 200 techniciens pianos, ainsique des commerçants du piano, des pianistes, des enseignants musiciens, des chercheurs etdes collectionneurs.

Ces deux associations proposent des stages techniques en interne dont l'échange, lepartage de techniques de travail, et la fédération professionnelle sont les maîtres mots. Ellesdiffusent également des plaquettes d'informations dans lesquelles on peut trouver des conseilsd'entretien, des guides de précaution et toutes les recommandations utiles aux particulierspour assurer la bonne conservation de leur piano.

Je pense que ces associations sont essentielles à la durabilité de cette profession ausein d'un cadre traditionnel, artisanal et déontologique.

Ce cadre est exactement celui dans lequel évolue la fabrique allemande SteingraeberUnd Söhne située à Bayreuth. En effet, les valeurs de tradition artisanale, de savoir-faireancestral et pérenne sont celles que la famille Steingraeber a toujours voulu défendre etconserver.

Chapitre 2

Pour comprendre la richesse culturelle que représente la fabrique Steingraeber, il estnécessaire de rappeler les grandes lignes de son histoire.

Gottlieb et Christian Steingraeber naissent respectivement en 1800 et 1801. En 1820,tandis que Gottlied crée son atelier de pianos à Amshauck, Neustadt, Christian crée sonatelier à Rudolstadt, Thuringe, où il travaille comme constructeur d’orgues. En 1823, Eduard Steingraeber, fils de Christian Steingraeber, naît. Il sera le fondateur de la maison Steingraeber en 1852, après avoir passé son examen de maître facteur depianos. Tout au long du 19ᵉ siècle, l’entreprise connaîtra un essor fulgurant et deviendra laplus grande manufacture de pianos bavaroise. Elle sera le fournisseur personnel de laMaison Royale de Bavière et des ducs de Saxe-Coburg.

Opus 1 : premier piano construit par Eduard Steingraeber

L'entreprise Steingraeber a évolué dans un environnement parfaitement propice à sondéveloppement : Bayreuth est une ville musicale. Les plus grands compositeurs s'y sontarrêtés, parfois durant une courte durée, parfois une grande partie de leur vie. A larecherche de calme et d'inspiration, Richard Wagner (1813-1883) s'y installe en 1872 avec safemme, Cosima Liszt, la fille du célèbre pianiste Franz Liszt, un ami de Wagner. L'opéraconstruit par la princesse fut le déclencheur de son départ pour Bayreuth.

Là-bas, il découvrit la fabrique Steingraeber, déjà réputée pour la qualité de sespianos et passe sa première commande d'un piano droit en 1876. Satisfait de cettetransaction, Steingraeber devient, dès la création du festival Wagner en 1876, le fournisseurofficiel du festival et de la famille Wagner.

Portrait de Richard Wagner (Liszt Museum, Bayreuth)

Richard Wagner n'a pas été le seul grand compositeur à entrer en contact avec lafamille Steingraeber. Franz Liszt (1811-1886), incontestablement le plus grand virtuose dupiano de son temps, avait confié à Eduard Steingraeber le réglage technique de ses pianospendant les concerts. Il a également passé commande d'un piano à queue en 1873. Celui-ciest toujours entreposé dans la salle Rococo, au premier étage de la maison Steingraeber,salle dans laquelle Liszt aimait jouer du piano avec ses amis et donner des récitals publics.

Portrait de Franz Liszt (Liszt Museum) Piano de Liszt, salle Rococo

En 1892, les deux fils d’Eduard entrent dans la société. La maison Steingraeberdevient définitivement une entreprise familiale. Elle accumule des brevets d’invention et desprix pour ses nombreuses innovations et la qualité de ses instruments.

C’est en 1898 que la manufacture s’installe dans son nouveau bâtiment, à Bayreuth.Au cours du 20ème siècle, l’entreprise perdure, et ses gérants se succèdent, tous

descendants de la famille Steingraeber, et Heinrich Schmidt la rénove totalement en 1960. Udo-Schmidt Steingraeber, l’actuel possesseur et directeur de l’entreprise, est à sa

tête depuis 1980. À la fin du 20ème siècle, les ateliers sont modernisés, de nouveaux modèlesentrent sur le marché, et Steingraeber se démarque de plus en plus grâce à ses pianos deconcert haut de gamme, ses meubles originaux et son attachement à la qualité du son ainsiqu’à une fabrication exclusivement artisanale.

Chapitre 3

Ce troisième chapitre comportera deux parties : la première concernera la vie dansles bureaux, la salle d’exposition et le magasin. La seconde présentera le travail réalisé parles artisans dans la fabrique de pianos.

Première partie

Entrée principale de la Maison Steingraeber

L'entreprise Steingraeber réunit trente-six employés, dont dix qui travaillent dans lesbureaux. La première semaine de mon stage, j'ai pu observer leur travail, la répartition deleurs tâches et leurs relations. A mon arrivée, j'ai très bien été accueillie par une stagiairequi m'a fait visité les bureaux, la salle d'exposition et les différentes pièces dans lesquellessont exposés les pianos mis en vente. Curieusement, la Maison Steingraeber ne vend passeulement des pianos qu'elle fabrique. Elle dispose également de pièces Yamaha et AugustFörster. Ces pianos s’adressent à une clientèle possédant un budget assez modeste qui nepeut pas se permettre d'acheter des pianos Steingraeber Und Söhne dont les prix se situententre 13 000 et 130 000 euros.

On peut observer une diversité au niveau des meubles : les bois utilisés pourconstruire les pianos sont très divers, ce qui donne un rendu plutôt original et spécifique àSteingraeber. La plupart des pianos sont construits sur mesure en fonction des commandespassées par les concertistes et autres grands adeptes de la musique. Monsieur Steingraeberm'a expliqué qu'il existe chez lui trois profils de clients : les concertistes, plus attachés à laqualité du son qu'à la dimension esthétique, les clients aisés qui considèrent le piano plutôtcomme un meuble de décoration original et unique, et la clientèle plus modeste, lesparticuliers amateurs qui eux se tournent vers les marques Yamaha et Förster.

Trois modèles de pianos droits Steingraeber Und Söhne

Piano à queue August Förster

J'ai eu à effectuer des tâches plus ou moins intéressantes. Je ne pense pas que vousparler de la façon dont j'ai utilisé la photocopieuse ou bien créé des pancartes « ne pastoucher » soit très utile. Je m'attarderai donc plutôt sur des travaux plus excitants.

Je me suis occupée de changer les affiches des prix des pianos en vente. En effet, à laveille du festival certains pianos sont en promotion, certaines durées de garantie changent,etc. Ce travail était assez intéressant, il m'a permis de balayer l'ensemble des produits envente et de découvrir leurs particularités. En comparaison avec les produits présents dans lemagasin d'un petit artisan de la région d'Annecy, on a chez Steingraeber des pianos uniques,qui ne sont pas produits en série, pratiquement tous haut de gamme et entièrement neufs.Mais en soi, les deux catégories représentent les métiers de la facture de pianos à deséchelles différentes. Elles sont donc difficilement comparables. Néanmoins, elles s'inscriventdans une continuité. Le technicien accordeur-réparateur donne une nouvelle vie et entretientles produits que des grandes fabriques comme Steingraeber Und Söhne mettent sur lemarché.

J'ai ensuite aidé les employés à organiser une exposition sur les plus grandes marquesde pianos françaises du dix-neuvième siècle : Erard, Gaveau et Pleyel. Les pièces présentéesétaient extrêmement intéressantes : anciennes photos d'une fabrique de pianos Pleyel,privilèges du roi Louis XIII accordés aux frères Erard pour l'une de leurs innovations,anciens pianos, etc. Beaucoup de documents étaient en français, ce qui m'a permisd'apprendre énormément de choses et de pouvoir organiser le fil de l'exposition plusfacilement.

Je me suis aussi occupée de préparer les guides d'exposition en français, carbeaucoup de visiteurs venaient de France (la plupart des produits de l'exposition prêtés àSteingraeber appartenaient à la collection de l'assurance AXA).

Le dernier travail que j'ai effectué fut la confection du programme des concertsorganisés par Steingraeber au sein même de sa maison (concerts de musique classique,chants d'opéra).

J'ai aimé réaliser ces tâches que l'on m'a confiées, mais j'avais hâte de découvrir lafabrique : être au cœur du travail manuel, voir comment sont fabriqués les pianos, c'est cequi m'intéressait le plus. Je voulais comprendre ce qui permettait à Steingraeber Und Söhnede continuer à vendre et à se développer malgré une production artisanale qui pourrait lesralentir et donc se transformer en handicap.

Deuxième partie

Photo de pianos bientôt près à la vente dans la salle des finalisations

Les jours que j'ai passés dans la fabrique m'ont permis de voir comment étaientfabriqués les pianos. En effet, tout est réalisé de manière artisanale. Steingraeber ne produitpas en série, contrairement aux usines Yamaha par exemple. Certes, cela ne leur permet pasde produire autant de pièces par an, mais le plus important pour la Maison Steingraeber c'estde construire des pièces prestigieuses, uniques, dans les règles de l'art, en respectant latradition et directement la demande des clients.

26 artisans travaillent dans la fabrique. Ils sont répartis sur 3 étages, chaque étageétant attribué à une étape de la fabrication (le meuble, l'harmonique, la surface, lamécanique, les réglages et la finalisation). Même si chaque ouvrier a son atelier attitré enfonction de sa spécialité, les artisans sont très mobiles et sont toujours amenés à réaliser destâches différentes. C'est d'ailleurs ce qu'ils aiment dans leur métier : il n'est pas répétitif.

Première salle de la fabrique : les pianos qui vont être réparés sont démontés. On construit l'harmonique des pianos fabriqués

J'ai passé la plupart de mon temps dans cette première pièce. On m'a confié ledémantèlement d'un très ancien piano Steingraeber, ramené à la fabrique pour être restauré.J'ai enlevé les cordes et emballé les différentes pièces. Ces tâches sont typiquement celleseffectuées par les jeunes stagiaires qui sortent de leur école et qui sont recrutés parSteingraeber.

Fonderie de la Maison Steingraeber : on y construit les cadres en fonte que l'on fixera sur la table d'harmonie des pianos

Ébénisterie : salle de travail du bois pour le meuble du piano

La maison Steingraeber prépare elle-même le bois pour ses meubles. Elle le reçoitbrut et s'occupe de le tailler, l'affiner, le poncer. Cela montre à quel point Steingraeber estattaché au savoir-faire artisanal du métier. Le capital humain est très important pour lamanufacture.

Salle d'assemblage : on fixe les cadres en fonte et on installe les cordes

La cabine de peinture

La salle des finalisations

Dans cette salle, j'ai lavé les touches des claviers et essuyé les pianos pour qu'ilssoient parfaitement prêts à la vente. Mais avant ce stade, la fabrication du piano suitdifférentes étapes. Quelles en sont les principales ?

Tout d'abord, on assemble le corps du meuble du piano en bois en fixant les pièces debois ensemble :

Source :passiondupiano.canalblog.com

On fabrique le cadre en fonte dans la fonderie, on le peint (souvent en doré), puis onpolit les différentes pièces de bois qui composeront le meuble. On monte ensuite les cordessur le cadre en les fixant avec des vis spéciales. On pose ensuite la mécanique et le clavier(on règle la hauteur des touches, des marteaux). Steingraeber ne fabrique pas sa mécanique,il l’achète à l'entreprise Renner, une entreprise allemande extrêmement renommée et estiméepour la qualité de ses mécaniques. Concernant la mécanique, il est vrai que Steingraeber nefait que de l'assemblage et du montage. Mais ici encore, c'est la qualité de ses instrumentsqu'il défend.

Après avoir passé trois semaines entre les murs de la manufacture Steingraeber UndSöhne, je me suis posé une ultime question : Comment se fait-il que Steingraeber ait aussibien survécu à travers les siècles et malgré de grands changements, alors que les meilleuresmanufactures de leur temps, à savoir des manufactures essentiellement françaises ont quant àelles rencontré de grosses difficultés qui les ont parfois amenées à disparaître ?

J'ai posé cette question à M. Steingraeber le dernier jour de mon stage. Selon lui, lesmanufactures Erard et Pleyel ont été innovantes jusqu'au début du vingtième siècle; mais,pensant avoir fait le maximum, elles ont arrêté d'innover et ne sont pas allées au bout deleurs idées. Steingaeber n'a jamais cessé d'innover, même si cela n'a pas toujours fonctionné.En se tournant vers le luxe, Pleyel a fait une grosse erreur : il s'intéressait moins au son et autoucher qu'au meuble, mettant en avant le côté « design ». Les prix de leurs produits ontconsidérablement augmenté, ce qui a réduit leur panel de clients, et leurs pianos n'attiraientplus les professionnels pour qui la qualité du son est primordiale.

La force de Steingraeber Und Söhne, c'est cette capacité à innover sans cesse, utiliserde nouveaux matériaux pour ses meubles de pianos et créer toujours plus de nouveauxmodèles d'instruments de prestige. Ajoutant à cela un savoir faire ancestral qui s'exerce aucœur de la fabrique et des artisans attachés à la qualité d'un travail bien fait, la manufacturede renommée mondiale est une des grandes richesses du patrimoine de Bayreuth.

Table des matières

Préface

Chapitre 1 : la facture de pianos

Chapitre 2 : histoire de la Maison Steingraeber, une entreprise familiale

Chapitre 3 : la Maison Steingraeber aujourd’hui

Remerciements

Je voudrais tout d'abord remercier M. Steingraeber pour m'avoir permis de réaliserce stage, et bien sûr tous ses employés pour avoir accepté de me prendre en charge

pendant trois semaines.Je souhaiterais également remercier la Ville d’Annecy pour m'avoir attribué une

bourse grâce à laquelle j'ai pu vivre cette expérience et tirer profit au maximum demon séjour.

Un grand merci aussi à mon papa qui m'a apporté son expérience et permis dedécouvrir plus en profondeur l'univers de la facture de pianos.

Merci à Jean-Luc Manceau, mon professeur d'allemand, qui m'a soumis l'idée de ceprojet et guidé tout au long de sa réalisation.

Angeline Godeux