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Pour citer cet article : Pourrat O. La médecine interne de la femme enceinte : son rôle dans le système de santé publique franc ¸ ais. Rev Med Interne (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2014.03.002 ARTICLE IN PRESS G Model REVMED-4742; No. of Pages 4 La Revue de médecine interne xxx (2014) xxx–xxx Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com Éditorial La médecine interne de la femme enceinte : son rôle dans le système de santé publique franc ¸ ais Obstetric medicine: Its relevance in the French health system O. Pourrat Consultation de médecine interne, service de réanimation médicale et médecine interne, CHU de Poitiers, université de Poitiers, 2, rue de la Milétrie, BP 577, 86021 Poitiers, France i n f o a r t i c l e Historique de l’article : Disponible sur Internet le xxx Mots clés : Médecine interne de la grossesse Médecine interne obstétricale Pathologies médicales et grossesse Complications médicales de la grossesse Grossesse à haut risque Keywords: Internal medicine and pregnancy Obstetric medicine Pregnancy-related medical conditions Medical complications during pregnancy High-risk pregnancy Depuis une vingtaine d’années s’est développé un exercice par- ticulier de la médecine interne dénommé par les anglo-saxons obstetric medicine [1]. Cet exercice s’appuie sur le principe de la collaboration des internistes avec les gynécologues-obstétriciens, dans le but d’assurer une prise en charge globale et complète des pathologies associées à la grossesse. Cette activité s’exerce sous la forme de consultations externes, mais aussi de réunions de concer- tation pluridisciplinaire dans les services de médecine interne et les services de gynéologie-obstétrique. En France, l’implication des internistes n’est pas récente [2], mais elle ne s’est vraiment singu- larisée que depuis une quinzaine d’années [3,4]. Sur le plan du concept, de même que la pédiatrie est l’approche globale des aspects médicaux très particuliers à l’enfant et que, de fac ¸ on similaire, la gériatrie le fait pour les personnes âgées, la médecine obstétricale concerne toutes les affections de type médi- Adresse e-mail : [email protected] cal affectant les femmes enceintes. Elle prend donc en charge trois types de conditions pathologiques : les affections chroniques préexistant à la grossesse et dont la grossesse peut influencer l’évolution ; les maladies survenant de novo pendant la grossesse, dont il importe de vérifier la guérison dans le post-partum ; enfin, les facteurs de risque cardiovasculaire, thrombotique et métabolique, souvent retrouvés lors des pathologies gravidiques, qui influencent le pronostic à moyen et long terme [5]. Cette prise en charge des affections médicales au cours de la grossesse relève tout naturellement de la compétence de l’interniste, du fait même de sa méthode habituelle de démarche diagnostique, méthode qui est à la fois analytique, de fac ¸ on détaillée et globale, sans exclure d’organe, puis synthétique, en regroupant les divers signes sous la forme d’une maladie définie, ou du moins d’un syndrome [5]. De plus, l’interniste doit prendre en considéra- tion, tout autant que l’obstétricien, « le second patient », le fœtus, et http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2014.03.002 0248-8663/© 2014 Publi ´ e par Elsevier Masson SAS pour la Société nationale française de médecine interne (SNFMI).

La médecine interne de la femme enceinte : son rôle dans le système de santé publique français

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. Pourratonsultation de médecine interne, service de réanimation médicale et médecine interne, CHU de Poitiers, université de Poitiers, 2, rue de la Milétrie, BP 577,6021 Poitiers, France

i n f o a r t i c l e

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ots clés :édecine interne de la grossesseédecine interne obstétricale

athologies médicales et grossesseomplications médicales de la grossesserossesse à haut risque

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igh-risk pregnancy

Depuis une vingtaine d’années s’est développé un exercice par-iculier de la médecine interne dénommé par les anglo-saxonsbstetric medicine [1]. Cet exercice s’appuie sur le principe de laollaboration des internistes avec les gynécologues-obstétriciens,ans le but d’assurer une prise en charge globale et complète desathologies associées à la grossesse. Cette activité s’exerce sous laorme de consultations externes, mais aussi de réunions de concer-ation pluridisciplinaire dans les services de médecine interne etes services de gynéologie-obstétrique. En France, l’implication desnternistes n’est pas récente [2], mais elle ne s’est vraiment singu-arisée que depuis une quinzaine d’années [3,4].

Sur le plan du concept, de même que la pédiatrie est l’approche

Pour citer cet article : Pourrat O. La médecine interne de la femme enMed Interne (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2014.03.002

lobale des aspects médicaux très particuliers à l’enfant et que,e fac on similaire, la gériatrie le fait pour les personnes âgées, laédecine obstétricale concerne toutes les affections de type médi-

Adresse e-mail : [email protected]

http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2014.03.002248-8663/© 2014 Publie par Elsevier Masson SAS pour la Société nationale française de

cal affectant les femmes enceintes. Elle prend donc en charge troistypes de conditions pathologiques :

• les affections chroniques préexistant à la grossesse et dont lagrossesse peut influencer l’évolution ;

• les maladies survenant de novo pendant la grossesse, dont ilimporte de vérifier la guérison dans le post-partum ;

• enfin, les facteurs de risque cardiovasculaire, thrombotique etmétabolique, souvent retrouvés lors des pathologies gravidiques,qui influencent le pronostic à moyen et long terme [5].

Cette prise en charge des affections médicales au cours dela grossesse relève tout naturellement de la compétence del’interniste, du fait même de sa méthode habituelle de démarchediagnostique, méthode qui est à la fois analytique, de fac on détaillée

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et globale, sans exclure d’organe, puis synthétique, en regroupantles divers signes sous la forme d’une maladie définie, ou du moinsd’un syndrome [5]. De plus, l’interniste doit prendre en considéra-tion, tout autant que l’obstétricien, « le second patient », le fœtus, et

médecine interne (SNFMI).

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ien connaître comment l’affection de la mère autant que le traite-ent médicamenteux et les stratégies de prise en charge peuvent

nfluencer le bien-être de l’enfant et son pronostic à court et longerme [5].

La multiplicité des problèmes liés à ces aspects caractéristiqueses maladies générales, fait envisager que les obstétriciens qui sontar définition les spécialistes de la grossesse ne sont pas toujoursuffisamment expérimentés sur chacun des problèmes médicauxarticuliers dont l’interniste est familier. D’une fac on similaire, lespécialistes d’un organe donné comme le rein, le cerveau ou le foie,e sont pas toujours à l’aise devant une affection médicale de larossesse, même dans le cadre de leur propre spécialité, car ilse rencontrent que rarement les problèmes très spécifiques de cesathologies médicales du fait même de l’état gravidique. De plus,

l n’est pas rare qu’une patiente enceinte soit dans une situationédicale qui concerne deux spécialités ou même davantage, ce qui

st caractéristique du champ d’exercice de la médecine interne,pécialité de la polypathologie. L’intervention de l’interniste danses cas n’exclut pas d’avoir recours secondairement, pour complé-er et préciser le diagnostic et le traitement, à l’avis d’un spécialisteu ou des organes concernés par l’affection en question. L’interniste

alors un rôle clé à jouer dans la coordination des soins autour dea femme enceinte [5–7].

Le champ d’application du concept de médecine interne obs-étricale couvre les trois domaines habituels d’exercice de la

édecine : les soins bien sûr avant tout, mais aussi l’enseignementt la recherche.

. Dans le domaine des soins

Il s’agit là d’un mode d’exercice médical très particulier où le dialogue singulier » habituel en médecine est en quelque sorteemplacé par une communication impliquant trois personnes (leutur père ne devant bien sûr pas être oublié au niveau de’information sur les problématiques de santé évoquées pour saonjointe et leur enfant à naître). En termes de soins, cette acti-ité de médecine obstétricale correspond tout particulièrement auxriorités majeures de santé publique, représentées par la prise enharge, d’une part, des complications médicales de la grossesse, en’intégrant au système de soins organisé en réseaux régionaux deérinatalité, d’autre part, des maladies fréquentes métaboliques etardiovasculaires.

Pour aider l’obstétricien dans la prise en charge globale desatientes, l’interniste a ainsi un rôle primordial à jouer en troisirconstances et à deux niveaux.

.1. L’interniste intervient en trois circonstances [1,3–7]

Cette intervention se fait bien sûr le plus tôt possible, dèsu’apparaît au cours d’une grossesse une affection médicale néces-itant un avis spécialisé, afin de préciser le schéma de surveillancet de traitement pendant la grossesse et le post-partum immé-iat. Mais c’est aussi en pré-conceptionnel que l’aide de l’internisteoit être sollicitée dès qu’une femme atteinte d’une pathologiehronique comme un lupus, un syndrome des antiphospholipidesSAPL), une néphropathie, un antécédent thrombotique artérielu veineux, une anomalie thrombophilique héréditaire ou uneTA chronique, fait part à son gynécologue ou à son médecine famille d’un projet de maternité. L’intervention de l’internisteoit enfin se prolonger à distance de l’accouchement pour préci-er les conditions de l’exploration et du traitement de l’affection

Pour citer cet article : Pourrat O. La médecine interne de la femme enMed Interne (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2014.03.002

édicale donnée. Cette consultation du post-partum permettragalement de déterminer les contre-indications médicales éven-uelles de la contraception œstroprogestative classique, mais aussie discuter la conduite à tenir en cas de grossesse ultérieure [8].

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Enfin, la grossesse peut être l’occasion de dépister des risques éle-vés d’apparition ultérieure d’affections métaboliques comme lediabète, ou cardiovasculaires comme l’HTA essentielle, c’est direl’importance de la consultation systématique de médecine internedu post-partum, six semaines environ après la fin de la grossesse[8].

1.2. L’interniste intervient à deux niveaux dans la prise en chargedes femmes enceintes

1.2.1. Pour l’aide au diagnosticLes divers articles de ce numéro de La Revue de Médecine

Interne illustrent l’aide spécialisée que l’interniste peut apporterà l’obstétricien : d’abord, par la consultation pré-conceptionnelleen cas d’affections chroniques comportant des risques particulierspour la mère ou l’enfant ; ensuite, pour les situations diffi-ciles d’échecs de grossesse que représentent les fausses couchesitératives inexpliquées ou les morts fœtales, pour lesquellesl’obstétricien souhaite vérifier si une maladie est susceptible d’enexpliquer la survenue ; mais aussi pour des pathologies auto-immmunes comme le lupus systémique, le lupus néonatal [9], leSAPL [10], ou le purpura thrombopénique immunologique (PTI)[11] ; ou encore pour des maladies thrombotiques, hépatologiques,dermatologiques ou thyroïdiennes ; enfin, pour évaluer les risquesde certains médicaments pour l’embryon et le fœtus, ainsi que lesrisques des techniques d’assistance médicale à la procréation pourla mère.

Au total, lorsque l’obstétricien doit solliciter pour toutes cessituations pathogiques une aide spécialisée, l’interniste est indiscu-tablement son correspondant privilégié ; cela n’exclut pas d’avoirrecours secondairement, si nécessaire pour compléter et préciserle diagnostic, à l’avis d’un spécialiste de l’organe (des organes)concerné(s) par l’affection en question [1,2,4–6].

1.2.2. Pour l’aide au traitementLes consultants intervenant à la maternité doivent être par-

ticulièrement expérimentés dans le domaine des particularitésphysiologiques de la grossesse et des problématiques spécifiquespour le fœtus : ainsi, chez une patiente lupique il est habituelde maintenir la corticothérapie à la dose antérieure, et sur-tout de maintenir le traitement par hydroxychloroquine ; dansle domaine de l’hypertension artérielle (HTA), les schémas thé-rapeutiques à respecter au cours de la grossesse sont totalementdifférents de celles de l’HTA en général, puisque certaines classesd’antihypertenseurs sont contre-indiquées, mais aussi parce que leparfait contrôle des chiffres tensionnels habituellement souhaité(en dehors de la grossesse) peut être préjudiciable au développe-ment fœtal [12].

1.3. La médecine interne obstétricale est enfin une médecine detoute la vie d’une femme

1.3.1. Morbi-mortalité pendant la grossesseLa grossesse occasionne encore en 2014 une morbi-mortalité

qu’il faut garder à l’esprit quand on donne un avis sur les risquesd’une grossesse dans certaines pathologies médicales graves.

1.3.1.1. Chez la mère. De fac on globale, la mortalité maternelleau cours de la grossesse représente des chiffres effrayants :500 000 morts par an dans le monde, soit une mort chaqueminute (dont 99 % dans les pays en voie de développement). EnFrance, la mortalité maternelle n’a pas baissé de fac on radicale au

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cours des 30 dernières années : avec 254 morts de 2007 à 2009, letaux de mortalité maternelle a atteint 10,3 décès maternels pour100 000 naissances vivantes [13]. Dans 60 % des décès, les soinsn’avaient pas été optimaux. Les deux tiers des décès relèvent de

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auses obstétricales directes, le reste relevant de causes indirectes,’est-à-dire de maladies préexistantes ou d’affections de type médi-al apparues au cours de la grossesse. La première cause reste’hémorragie obstétricale (18 % des décès), puis les embolies pulmo-aires (11 %) et les complications de l’HTA (9 %). L’évolution actuellen France est marquée par une réduction des morts liées aux acci-ents cérébrovasculaires et à des cardiopathies préexistantes. Cesathologies cardiovasculaires augmentent avec l’âge de plus enlus avancé de survenue des grossesses et avec l’augmentatione la prévalence de l’obésité. Le risque cardiaque est certainementrop souvent sous-estimé, avec un risque de mortalité de l’ordre de5 à 50 % dans l’hypertension pulmonaire, la coarctation aortique, laaladie de Marfan [5]. Il est donc particulièrement essentiel qu’un

vis très expérimenté soit donné avant d’autoriser une grossesseur un terrain de cardiopathie. L’embolie pulmonaire ne repré-ente en France que la deuxième cause de mortalité maternelle,raisemblablement en raison de l’application courante des recom-andations prophylactiques publiées en France.La consultation de l’interniste dans le post-partum, une fois passé

e cap de la naissance de l’enfant, représente une occasion pri-ilégiée de privilégier l’étape de l’information de l’accouchée ete son conjoint, en vue d’une prévention adaptée des complica-ions pouvant survenir lors d’une grossesse ultérieure. Le risquee récidive d’une pré-éclampsie par exemple est évalué à 25 % deac on globale, 10 % si la pré-éclampsie avait été tardive, apparueprès 34 semaines d’aménorrhée (SA), 35 à 50 % si elle était apparuevant 34 SA, et jusqu’à 65 % si elle était apparue avant 28 semaines’aménorrhée [8]. Un antécédent de diabète gestationnel fait partiees critères justifiant le dépistage précoce d’une récidive lors d’uneutre grossesse.

.3.1.2. Chez l’enfant. La survenue d’un bloc auriculo-ventriculaireié à un anticorps anti-SSA ou anti-SSB lors d’une grossesserécédente justifie une surveillance échocardiographique fœtalearticulière et surtout un traitement par hydroxychloroquine, quiemble réduire le risque de récidive [14].

.3.2. Devenir à long terme

.3.2.1. De la mère. Lors de la consultation de l’interniste danse post-partum, l’information en vue de la prévention doit aussiorter sur le risque de maladies vasculaires et métaboliques

plus long terme [8,15,16]. Il existe en effet maintenant uneocumentation tout à fait démonstrative des risques majorés deurvenue de complications cardiovasculaires telles qu’HTA chro-ique, accident vasculaire cérébral, infarctus du myocarde, maisgalement rénales (néphropathie, insuffisance rénale chronique)t du syndrome métabolique après une grossesse compliquée’une pathologie placentaire d’origine circulatoire [8,15,16]. Ainsi,n antécédent d’atteinte placentaire d’origine ischémique commene pré-éclampsie–éclampsie, un syndrome HELLP, un hématomeétroplacentaire ou une hypotrophie fœtale, représente un nouveauacteur de risque artérioscléreux qu’il paraît justifié d’ajouter à laiste classique des facteurs de risque cardiovasculaire [15]. De plus,n antécédent de diabète gestationnel fait partie des critères jus-ifiant le dépistage ultérieur régulier de l’installation d’un diabèteermanent.

.3.2.2. De l’enfant. Même si l’interniste n’a bien sûr pas voca-ion à assurer le suivi des enfants nés à l’issue d’une grossesse àisque élevé qu’il a contribué à prendre en charge, il doit savoir

Pour citer cet article : Pourrat O. La médecine interne de la femme enMed Interne (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2014.03.002

ue ces enfants peuvent présenter des risques de développer desathologies cardiovasculaires ou métaboliques, comme cela a étéocumenté pour les enfants nés de mères atteintes d’obésité [16]u ayant eu une pathologie circulatoire placentaire [8].

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2. Dans le domaine de l’enseignement

L’intégration de la médecine obstétricale dans le champd’exercice de la médecine interne doit se retrouver au niveau del’enseignement des étudiants en cours de spécialisation, commecela a déjà été appliqué aux États-Unis depuis une quinzained’années [17,18]. Au Royaume-Uni existe aussi depuis plusieursannées un enseignement spécifique, sous la forme d’un coursannuel d’obstetric medicine.

En France, le club FEMI (femme enceinte et médecine interne)a été créé en 2009 et tient une séance thématisée annuelle dansle cadre des sessions de développement professionnel continu descongrès de notre société. Sur le plan académique, un diplôme inter-universitaire de médecine interne de la femme enceinte vient d’êtrecréé et assure la formation spécialisée des jeunes internistes dansce domaine particulier.

3. Dans le domaine de la recherche

L’approfondissement des diagnostics et des stratégies de priseen charge apporté par les spécialistes de médecine obstétricalepermet l’exploitation d’observations cliniques relativement raresà fins de publication [14]. Des protocoles de recherche multicen-triques pluridisciplinaires sont également élaborés pour progressersur des problématiques spécifiques de femmes enceintes, commepar exemple le protocole TIGRO étudiant l’influence de la gros-sesse sur l’évolution du PTI (PHRC AOM12206), l’associationde l’intervillite avec les affections auto-immmunes, ou encoredes essais thérapeutiques contrôlés multicentriques. Cette actionde recherche concertée au sein de la communauté des inter-nistes vient d’être officialisée avec la création du groupe derecherche GR2 (groupe de recherche sur la grossesse et lesmaladies rares) qui met en place une large étude prospectivefranc aise dans ce domaine (pour participer à cette étude, contacter :[email protected]).

En ce qui concerne l’implication des sociétés savantes dansl’activité de recherche, en France la SNFMI, et son journal La Revuede Médecine Interne, de même que la SEHTAG (Société d’étudesde l’hypertension artérielle au cours de la grossesse) et, dansles pays anglo-saxons, l’ISOM (International Society of ObstetricMedicine) et sa revue Obstetric Medicine, ainsi que l’ISSHP (Inter-national Society for the Study of Hypertension in Pregnancy) etsa revue Hypertension in Pregnancy, mais encore d’autres revuesde médecine interne, d’auto-immunité et d’hémostase, témoignentpar de nombreuses publications du dynamisme de la communautéd’internistes engagés dans cet exercice particulier de la médecineinterne.

4. Conclusion

La médecine obstétricale est un mode particulier d’exercicemédical récemment mis en exergue, qui illustre bien le carac-tère nécessaire et efficace de l’approche pluridisciplinaire, globale,transversale, des patients présentant des problèmes complexes.Les internistes tiennent une place privilégiée dans cet exercice desoins, mais aussi dans l’enseignement de ses particularités et dansl’investissement au niveau de la recherche sur ces thématiquesspécifiques. Cette activité médicale a aussi une dimension longitu-dinale car les pathologies médicales observées pendant la grossesse

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représentent « une fenêtre ouverte sur la santé future de la femme »[19]. La médecine de la grossesse représente ainsi une forme essen-tielle de l’exercice des internistes, récemment individualisée, enplein développement aujourd’hui et riche d’avenir.

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éclaration d’intérêts

L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relationvec cet article.

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