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Chapitre 4 LA PAROLE DES PARTENAIRES 164

La parole des partenaires - solidarcite.be · le déroulement et sur la façon dont ils ont vécu les différents aspects du chantier ». - Une rencontre est prévue entre le partenaire

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Chapitre 4LA PAROLE DES PARTENAIRES

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Pour comprendre la nature des partenariats noués autour de Solidarcité :

- Dans un premier temps, nous nous sommes intéressés à ce que le guide méthodologique de Solidarcité prévoit en matière de partenariat.

- Dans un second temps, nous avons rencontré environ la moitié des partenaires et nous nous sommes entretenus avec eux.

Ces entretiens permettent d’aller au-delà des déclarations d’intention et d’affiner les informations concernant les partenariats, en particulier en ce qui concerne :

- leur naissance,

- leur préparation,

- la présentation et la présence auprès des volontaires,

- les bénéfices pour les partenaires comme pour les volontaires,

- l’évaluation,

- et les perspectives.

Ils ont permis par ailleurs de mieux connaître les perceptions des partenaires :

- à l’égard des jeunes volontaires,

- ainsi qu’à l’égard de Solidarcité en général et des responsables d’équipe.

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Nom des partenaires rencontrés

Objet social Nature du partenariat Modalité d’entretien

Asmae Association de coopération Nord-Sud

Formation aux problématiques Nord-Sud et préparation du chantier international au Sénégal

Enregistrement

Le Bataclan Association d’aide aux personnes handicapées

Chantier de rénovation de bâtiment, peinture, plafonnage et déménagement

Enregistrement

Bouillon de culture Maison de quartier Chantier de rénovation de bâtiment, peinture et plafonnage Enregistrement

Le CFA Association de formations à l’animation et à la vidéo

Formation à l’animationFormation à la vidéo et réalisation de documentaires

Prise de notes

La Croix-Rouge Secourisme et promotion de la santé

Rallye Benjamin secouriste : animation de stands dans le cadre d’une activité pour enfants.

Enregistrement

Le Coron Association d’animations pour enfants autour de la problématique Nord-Sud

Aménagement d’espaces extérieurs et peinture Prise de note

La Gerbe A.M.O. Animations d’enfants autour du vélo Enregistrement

Maison en plus Maison de quartier Préparation d’une exposition sur un quartier Enregistrement

Mémoire vivante Association d’animations intergénérationnelles

Projet « âge et images », échanges avec les aînés autour de thématiques choisiesSensibilisation à l’animation de personnes âgées en homes

Enregistrement

La Mission locale de Bruxelles

Recherche d’emploi et insertion socio-professionnelle

Axe « maturation personnelle » Enregistrement

Le Mrax Mouvement contre le racisme et la xénophobie

Formation à la multiculturalité Enregistrement

Nos Pilifs « la Ferme » Construction d’un étang et peinture Enregistrement

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1. Les différents partenariats et leur définition par le guide méthodologique de Solidarcité

L’organisation de Solidarcité repose sur l’existence de partenariats multiples. En effet, les trois facettes d’actions déterminées pour atteindre les objectifs du projet (chantiers, formations et maturation personnelle) impliquent, chacune, des collaborations diverses.

Pour chacune des facettes, le guide méthodologique de Solidarcité prévoit une série de dispositions qui définissent précisément les types de partenariats envisagés et leurs modalités pratiques.

1.1. Les partenaires dans le cadre de la facette « chantiers »

En ce qui concerne les chantiers, le lien qui unit Solidarcité à différents partenaires est clairement défini comme un réel partenariat. Ce partenariat exclut d’emblée toute confusion avec une quelconque relation commerciale reposant sur une prestation contre rémunération. Le partenariat est conçu comme « un échange au sein d’un espace de valorisation mutuelle ».

1.1.1. Critères pour le choix des partenaires

Le guide méthodologique définit une série de critères qui permettent d’évaluer si tel ou tel partenariat est envisageable ou non. Ces critères sont déterminés dans un souci de cohérence globale du projet. Ils constituent en quelque sorte des balises pour le choix des partenaires.

- Il convient tout d’abord que les chantiers puissent « répondre à de réels besoins de la collectivité ou d’une population en difficulté ». L’action prioritaire au profit de personnes défavorisées n’exclut pas d’autres chantiers à partir du moment où ils permettent d’aborder plus largement des thématiques citoyennes telles que, par exemple, écologie, culture, mobilité, santé,…

- Les chantiers ne doivent pas nécessiter la mise sur pied de nouvelles structures qui entreraient en concurrence avec des associations déjà existantes. Au contraire, il s’agit de collaborer avec « des structures locales d’entraide ou de développement », déjà en place, afin de répondre à leurs besoins. Il convient en outre que, confrontée à ses besoins, une association demandeuse d’un partenariat n’ait pas d’autre moyen que de faire appel à des volontaires. Ce critère permet d’éviter d’éventuelles concurrences avec des professionnels qui pourraient être rémunérés dans le cadre d’un projet si l’association en avait les moyens, qu’il s’agisse de professionnels du bâtiment dans le cadre d’aménagements et de rénovations ou d’éducateurs ou animateurs professionnels dans le cadre d’une animation. Dans le même ordre d’idée, il s’agit de « reconnaître une place pour les volontaires, une spécificité, sans occulter ni prendre le rôle d’autres personnes ».

- Il faut que les chantiers puissent « permettre aux volontaires de s’ouvrir aux différents mondes de la solidarité active ». Dans cette optique, les chantiers doivent permettre de « faire découvrir à l’équipe de volontaires des enjeux de société sous-jacents aux projets et aux partenaires rencontrés ».

- Il convient en outre que les chantiers permettent de « développer chez les volontaires un certain nombre de savoir-être et de savoir-faire », tout en restant réalisables et « accessibles à tous les

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volontaires ». A cet égard, un chantier peu s’avérer exigeant, mais il ne peut nécessiter un seuil de compétence trop élevé.

- Enfin, les chantiers doivent être utiles et, en ce sens, ils doivent « être mis en place avec un souci de pérennisation de l’action. Quand les locaux sont rénovés, a priori, c’est pour qu’ils servent… Quand des ateliers sont mis en place, c’est pour qu’ils continuent… Quand une dynamique est lancée, c’est pour qu’elle perdure ».

1.1.2. Modalités de partenariat

1.1.2.1. Phase de préparation

La phase de préparation est d’une importance capitale pour la réussite des chantiers. « Avant chaque chantier, des rencontres préalables sont organisées avec le futur partenaire ». Ces rencontres permettent d’échanger mutuellement les informations utiles au partenariat. Elles permettent une identification réciproque nécessaire pour éviter tout malentendus sur l’objet social, les objectifs, les publics bénéficiaires, les types d’activités développées, par Solidarcité d’une part et par le partenaire d’autre part.

Il s’agit, pour le partenaire, qu’il soit bien au clair avec l’organisation de Solidarcité, ses objectifs, le statut et le profil des volontaires,…

Il s’agit, pour Solidarcité, d’« analyser la demande et de déterminer si elle entre dans ses ‘critères de sélection’ » et « d’ébaucher avec le partenaire la réalisation concrète du chantier ».

1.1.2.2. Phase de convention et d’organisation pratique

« Une fois la demande du partenaire identifiée et susceptible d’être prise en charge par l’équipe de volontaires, il faut alors organiser l’action en tant que telle. Une convention de partenariat est alors établie entre les deux parties, elle est rédigée par le responsable de Solidarcité et régit clairement l’accord qui les lie ».

Outre la définition des partenaires et de leurs projets respectifs, chaque convention décrit les contenus, méthodes et planification des actions à entreprendre et des tâches à accomplir. « C’est une condition ‘sine qua non’ au bon déroulement des chantiers. C’est à ce moment que doivent également être abordés les points spécifiques du projet, tels que la difficulté physique éventuelle des tâches, façon d’appréhender le public cible, etc ».

La convention définit clairement les moyens engagés respectivement par Solidarcité et par le partenaire.

Pour sa part, le partenaire s’engage à définir une personne de référence « qui sert de relais et de soutien pour la réalisation et le suivi du projet ». Il s’engage aussi à prévoir un moment d’intégration des volontaires. Il doit prévoir un moment pour présenter son association (objectif, actions entreprises et envisagées, public(s) bénéficiaire(s), enjeux sous-jacents). « Ce moment est un élément capital …. En effet, il permet aux volontaires d’avoir une meilleure vision du travail qui leur est demandé, d’en comprendre l’intérêt, les répercutions à court et à long terme et d’en intégrer les différents enjeux ». Enfin, la convention définit le matériel nécessaire à la réalisation du chantier et que le partenaire s’engage à mettre à disposition.

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Quant à Solidarcité, la convention précise la mise à disposition de l’équipe, le nombre de volontaires et leurs horaires. Elle définit l’encadrement de l’équipe par son responsable. Elle clarifie la question des assurances. Enfin, elle définit le matériel mis à disposition, car si c’est le partenaire qui prend effectivement le matériel en charge, Solidarcité peut fournir certains équipements (échelles, pinceaux,…) comme support à l’action.

Enfin, la convention précise les modalités d’évaluation du chantier.

1.1.2.3. Phase d’évaluation

Outre les débriefings et les moments informels au quotidien, des modalités d’évaluation finale sont définies.

A la fin de chaque chantier :

- Les volontaires remplissent un questionnaire d’évaluation « sur le déroulement et sur la façon dont ils ont vécu les différents aspects du chantier ».

- Une rencontre est prévue entre le partenaire et les responsables de Solidarcité. Des sujets tels que la réalisation du chantier, la réalisation des objectifs, la dynamique du groupe, la relation avec le public cible, les modalités de partenariat et la pérennisation éventuelle du partenariat sont abordés.

- Chacun de leur côté, le partenaire et les responsables de Solidarcité formalisent leur évaluation dans un document écrit.

- Même si elle ne figure pas dans le guide méthodologique, dans la pratique, cette année, une rencontre était prévue entre le partenaire, le responsable d’équipe et les volontaires.

1.2. Les partenaires dans le cadre de la facette « formation »

La facette « formation » fait aussi l’objet de divers partenariats. Les partenaires sont choisis d’une part en fonction d’un cursus défini au préalable, soit en fonction des intérêts et demandes des volontaires en cours de processus.

- Des formations-réflexions sur des sujets sous-jacents de différents chantiers sont « organisées en interne avec l’aide des associations bénéficiaires ».

- Des formations techniques et personnelles sont « organisées par des partenaires spécialisés » dans des domaines suscitant l’intérêt de l’équipe éducative ou des volontaires de Solidarcité.

- Enfin, des formations plus générales à la citoyenneté « sont prises en charge par les associations d’éducation permanente spécialisées en la matière ».

Les modalités de ces partenariats sont peu formalisées dans le guide méthodologique. Toutefois, dans les faits, comme pour les chantiers, Solidarcité accorde une attention particulière à la préparation des formations. Les modalités de préparation prévues dans le cadre des chantiers peuvent aussi s’appliquer à la préparation des partenariats en matière de formation, sauf que dans ce cas, c’est davantage à Solidarcité à préciser ses demandes.

Par contre, les modalités d’évaluation des formations font l’objet d’un point spécifique du guide méthodologique. Elle sont en tout point équivalentes aux modalités d’évaluation des chantiers.

1.3. Les partenaires dans le cadre de la facette « maturation personnelle »

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Hormis le stage de découverte professionnelle, proposé individuellement à chaque volontaire en fin d’année1 qui se traduit par des conventions particulières de partenariat, la facette « maturation personnelle » fait surtout l’objet d’un partenariat spécifique avec la Mission locale de Bruxelles. Au cours de l’année, cette dernière anime un module de détermination et d’orientation en trois sessions. Par ailleurs, Solidarcité propose à chaque volontaire un suivi individuel organisé par la Mission locale afin de se lancer dans un projet personnel dès la fin de l’année citoyenne.

Ces partenariats font aussi l’objet d’une évaluation par le partenaire, les volontaires et les responsables de Solidarcité.

Au-delà de ce qui est prévu par le guide méthodologique, au-delà des déclarations d’intention, reste à voir ce qu’il en est effectivement et d’entendre ce qu’en disent les partenaires eux-mêmes.

2. La naissance des partenariats

2.1. La naissance et l’évolution des partenariats

Les différents partenariats naissent soit à l’initiative de Solidarcité soit à l’initiative d’associations.

2.1.1. La naissance des partenariats « chantiers »

En ce qui concerne les chantiers, les partenariats naissent le plus souvent à l’initiative d’associations.

1 Pas pour l’équipe de volontaires qui a débuté en février 2003, par manque de temps.

- soit des associations qui ont connu Solidarcité par la diffusion promotionnelle de Solidarcité, par la découverte de réalisations effectuées par Solidarcité ou par le bouche à oreille,

En fait, j’ai eu des contacts avec eux parce qu’ils ont travaillé dans l’association ici à côté (la COBEFF) pour rénover un local et c’est comme ça que j’ai eu leurs références, comme ils avaient été contents ici à côté, ça c’est bien passé. Le résultat était très bon aussi donc j’ai pris contact avec eux et ils sont venus me voir. (Bouillon de culture)

On a reçu un dépliant. Je ne sais pas comment ni pourquoi. Et quand j’ai reçu ce dépliant, je me suis dit : « Tiens, à retenir ». Et puis au moment où on a décidé de changer de locaux, on s’est dit qu’il y avait pas mal de choses à envisager au niveau travaux. Et dans ce cadre là, on a demandé à Solidarcité ce qu’ils pouvaient éventuellement faire avec nous. (Le Bataclan)

Au départ, il y a eu une séance d’information à Solidarcité, où ma collègue est allée. Nous, ça faisait longtemps qu’on avait envie de faire un projet vélo avec les jeunes ici, parce qu’ils étaient très demandeurs. Et c’était difficile à faire pour nous en termes de matériel et aussi en termes d’encadrement. A cette séance, ma collègue est allée parler avec Benoît et on s’est tout de suite rendus compte que le projet pouvait être réalisable avec Solidarcité, parce qu’eux pouvaient nous offrir quelque chose qu’on n’avait pas […]. Ils pouvaient nous offrir quelque chose en terme matériel et on s’est rendu compte aussi que dans l’objectif de l’AMO, ça pouvait être intéressant de faire se rencontrer nos jeunes et des jeunes un peu plus âgés. Donc le projet nous a tout de suite intéressés, surtout qu’il y avait quelque chose un peu de l’ordre de la transmission d’un savoir que eux auraient acquis et qu’ils auraient pu transmettre aux jeunes chez-nous. […] A Solidarcité, ils sont allés à la rue Voot pour apprendre des choses sur le vélo et puis ils sont venus transmettre ça aux jeunes de chez-nous. Ils sont allés à la rue Voot où on les a aidés à trouver des vélos. Ils sont venus ici avec les vélos. On les a repeint entièrement avec les jeunes, on les a réparés. Le plus gros avait été fait à la rue Voot, mais on a appris à réparer une chambre à air, à remettre des freins convenablement, à remettre la chaîne quand elle a déraillé. Tous ces petits aspects là. Ensuite, on a fait un aspect sécurité routière. […] Et puis on a sollicité pro-vélo pour faire une première balade. Et ça c’est terminé par une journée à la mer où on est allé faire

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une balade à vélo. […] Et puis les jeunes de chez-nous on chacun reçu leur vélo après cette balade. (La Gerbe)

- soit des associations qui ont découvert Solidarcité par des anciens volontaires ou par leur propre public.

Via une jeune du quartier que je connais depuis longtemps. Elle avait participé avec son école au concours vidéo organisé par la ligue de santé mentale. Ils avaient gagné le deuxième prix et Solidarcité le premier. Elle m'avait invitée à la projection et à la remise des résultats et j'ai été séduite par leur projet de film qui abordait la question des rencontres intergénérationnelles. A la Maison en Plus, il y avait un groupe de jeunes filles désireuses de réaliser une vidéo ainsi qu'un projet communautaire de rencontres des personnes âgées, j'ai pris contact avec Solidarcité. (Maison en plus)

Toutefois, certains chantiers naissent parfois à l’initiative de Solidarcité :

- soit à l’initiative de l’équipe éducative, du responsable des relations avec les partenaires ou d’un(e) responsable d’équipe

Oui, en fait c’est par Yannick qui était venue en stage ici il y a un an et demi plus ou moins, quand elle a suivi sa formation d’éco-conseillière. Donc elle a accompli son stage ici, puis je ne l’ai plus vue. Cette année, elle m’a recontacté en disant « ben voilà, si tu veux, il y a un projet avec Solidarcité ». En tout cas nous, à « la ferme », c’est comme ça qu’on a eu un contact avec eux, parce qu’après j’ai appris que le « centre » aussi avait été contacté par Solidarcité. Mais eux je sais pas par quel moyen. (la Ferme Nos Pilifs)

- soit à l’initiative d’une volontaire, comme c’est le cas en particulier du chantier de la Porte du Pèlerin proposé par Floriane.

En outre, il arrive qu’un partenariat naisse de la rencontre quasi simultanée d’une demande d’une association et de son public et d’une demande de Solidarcité. C’est le cas de la naissance du

partenariat entre Solidarcité et Mémoire Vivante, non pas cette année, mais l’année précédente. Le public de personnes âgées de Mémoire Vivante était demandeur de rencontres avec des « jeunes plus âgés » (17-25 ans). Au même moment, Solidarcité recherchait des partenaires pour réaliser un projet vidéo et avait déjà imaginé pouvoir centrer ce projet vidéo sur le thème de la rencontre intergénérationnelle.

Donc c’est vrai que la plupart des projets se déroulent avec les primaires ou avec de jeunes enfants mais la demande des aînés était de pouvoir rencontrer des jeunes plus âgés des jeunes avec qui on peut échanger, avec qui on peut avoir de vraies conversations d’adultes, voir un peu leur problématique de jeune, comment eux se retrouvent dans la société, comment eux perçoivent les personnes âgées aussi. Et c’est un désir qu’ils avaient émis depuis quelques années. Et puis mémoire vivante a eu un stand au forum de la santé mentale et c’est là qu’on a rencontré Solidarcité qui, à ce moment là, allait participer au concours projet vidéo organisé par la ligue et qui était donc en recherche de partenaires. Ils avaient déjà imaginé que le partenaire, le public à la rencontre de qui ils pourraient aller, pourrait être des personnes âgées. Donc voilà, la rencontre s’est faite. (Mémoire Vivante)

2.1.2. La naissance des partenariats « formation »

En ce qui concerne les formations, les partenariats naissent généralement à l’instigation de Solidarcité.

On avait déjà commencé l’année passée avec des animations pour les volontaires et puis on a fait une animation pour la sensibilisation de la lutte contre le racisme. On a débattu à propos du racisme, de l’origine du racisme et à l’époque on a été contacté par Solidarcité qui a demandé cette animation. Par après, on a gardé les contacts et on a été sollicité pour faire une autre intervention pas vraiment une animation, plutôt une formation par rapport à la multiculturalité : qu’est-ce que c’est qu’une société multiculturelle, la différence entre multi et interculturalité, qu’est-ce que la notion de culture, comment ça se construit. (MRAX)

Puis Solidarcité a été créé. Benoît m’a rappelé en disant « dans un premier temps est-ce que ce serait possible, comme vous avez travaillé

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dans le secteur de la collaboration au développement et que nous voudrions mettre ça en avant dans nos formations, est-ce que vous pourriez prendre 2 après-midi, pour avoir une ouverture sur tous ces mondes-là : la coopération au développement qu’est-ce que c’est ; la dette et ce genre de choses ? » Donc c’était, je crois, il y a trois ans. (Asmae)

Deux-trois animateurs de Solidarcité avaient suivi une formation vidéo chez-nous. Nous avons eu de bons contacts. Puis, comme ils avaient imaginé proposer des chantiers d’animation aux volontaires, et qu’ils ne voulaient pas les lâcher dans des animations sans les avoir au minimum préparés à ça, ils nous ont demandé pour faire une formation à l’animation pour les volontaires. C’est comme ça que ça a commencé. (CFA, paraphrasé)

2.1.3. Evolution des partenariats : vers des « hybrides » formation-chantier

Certains partenariats perdurent et évoluent avec le temps, de sorte que :

- envisagés au départ dans l’optique d’une formation, des partenariats donnent lieu à des réalisations de chantiers.

Donc il y a trois ans avec le premier groupe dont Khalid est issu et qui est animateur maintenant, j’ai fait avec eux deux animations basées sur : - De un, tout ce qui historique du développement, avec comme méthodologie, toujours, la mise en situation : jeux de rôles, debreafing et exposés théoriques sans trop charger,- Et de deux, tout ce qui est l’interculturel, l’interculturel c’est quoi, la culture c’est quoi. Et puis est venue la question de Benoît, de la réflexion ensemble, de se dire « tiens ben là on a la possibilité pour un groupe d’effectuer un camp de chantier ». Et donc on a mis en place l’année d’après une sorte de partenariat par rapport à un chantier sur base de l’idée qu’on avait avant, c’est-à-dire que ce soit le groupe qui soit vraiment créateur de son propre projet.. […] On a commencé une animation de sensibilisation à des problématiques Nord-Sud. Et puis on est arrivé sur la construction d’un projet. Pourquoi ? Parce que Benoît, lui, avait vécu un camp chantier et donc, comme ça a été bénéfique pour lui, il a eu envie d’en

faire bénéficier les volontaires. Enfin c’est comme ça que moi je le sens. Et j’ai l’impression que ça a une plus-value pour les jeunes. Si je ne le sentais pas on ne le proposerait pas évidemment. Ca c’est clair (Asmae)

Donc, on donnait une formation à l’animation aux volontaires. Puis, dans le cadre de « Quartier libre », on avait un projet vidéo et on cherchait des partenaires. Les contacts étaient bons avec Solidarcité et on trouvait que ça pourrait être intéressant aussi pour les volontaires. Alors on a proposé à Solidarcité d’articuler une formation à la vidéo et la réalisation de petits films. L’année dernière, on a réalisé sept petites fictions et cette année, on a réalisé des documentaires. Je pense que ça correspondait à un intérêt pour eux comme pour nous. (CFA, paraphrasé)

- envisagés dans un premier temps dans l’optique d’un chantier, des partenariats donnent lieu à des formations.

Puis nous avons eu une autre proposition de Solidarcité qui a fait appel à moi en tant que professionnelle travaillant avec les aînés. La demande était la suivante : « On a un groupe qui va aller faire de l’animation en maison de repos. Ils ne connaissent pas le public des aînés pour la plupart. Ils aimeraient bien savoir de quoi il faut tenir compte quand on va faire de l’animation en maison de repos ». […] Moi j’ai préféré leur répondre « ben demandons aux aînés ». […] En tant que professionnelle j’ai une idée de ce dont il faut tenir compte, à force de travailler avec eux. Mais les plus à même de répondre à cette question, ce sont les aînés eux-mêmes et pour aller plus loin, des aînés en maison de repos parce que ce n’est pas pareil quand on vit en domicile et en maison de repos. J’ai donc renvoyé la proposition autrement « Que diriez vous de rencontrer les aînés et de leur poser cette question-là ? ». Ils ont accepté de collaborer avec trois maisons de repos. Donc quelques aînés venant de maison de repos sont venus ici rencontrer ces jeunes, avec l’idée de pouvoir un peu les aider en la concrétisation de ce projet-là. (Mémoire vivante)

Ca remonte à deux ans déjà puisqu’il y a deux ans on a eu un premier contact. Solidarcité a fait appel à la Croix rouge, à la maison mère, et puis leur demande est arrivée chez-nous mais de manière assez tardive par rapport aux activités qui étaient déjà lancées. Et après une rencontre, il a été décidé que Solidarcité pourrait participer à un rallye [organisé pour les enfants d’écoles primaires dans le cadre de leur formation de benjamin secouriste]. C’était la seule possibilité, parce qu’on ne voyait pas très bien que faire avec les jeunes, parce qu’ici c’est

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quand même fort administratif et qu’au niveau des sections locales ça se passe souvent le week-end et non pas la semaine. Il était difficile de trouver un accord et puis au début de cette année scolaire-ci, ils m’ont retrouvé, en redemandant une collaboration, on a travaillé un peu plus en profondeur. On a essayé de construire un peu mieux le projet parce qu’il y a deux ans cela manquait un peu de construction, de collaboration, on ne s’était même jamais rencontrés, je crois.Dans le sens où les volontaires Croix Rouge qui animent le cours de benjamin secouriste sont eux–mêmes secouristes, ont suivi la formation et comme, lors des rallyes, se sont les enfants qui ont suivi les cours qui se rassemblent, il était pour moi intéressant que les volontaires aient eu la formation, qu’ils sachent un peu de quoi il s’agit, le secourisme, qu’ils en aient une idée. Mais puisque c’est un autre service qui organise ces cours-là, et bien Simon et compagnie ont fait appel à l’autre service pour cette formation. […] Le fait que les jeunes de Solidarcité aient suivi le secourisme c’était intéressant parce qu’ils connaissaient déjà la matière. Il me restait alors à apporter ce que les enfants ont vu. Je leur ai montré ce que les enfants ont suivi comme cours de secourisme à leur niveau et une présentation assez succincte pour qu’ils voient un peu dans quoi ils allaient mettre les pieds lors des rallyes. (Croix Rouge)

2.1.4. Le partenariat « maturation personnelle » avec la Mission Locale de Bruxelles

Le partenariat avec la Mission Locale de Bruxelles est né à la demande de Solidarcité qui cherchait un partenaire apte à accompagner le processus de maturation personnelle des volontaires en vue de préparer leur « après-Solidarcité ». Le partenariat est né en 2000, dans le cadre du projet pilote, et perdure jusqu’à aujourd’hui.

Ici à la mission locale, on fait des modules, d’une durée de sept semaines, avec les demandeurs d’emplois, en recherche d’orientation ; au terme de ce module, l’objectif c’est qu’il puisse trouver une orientation, que ce soit une recherche d’emploi ou, qu’ils puissent avoir un projet. C’est un travail de groupe et c’est pratiquement le même public qu’à Solidarcité. On a beaucoup discuté avec Benoît, il était en recherche de partenariat dans le cadre de la maturation personnelle et c’est comme ça que ça a démarré. (Mission Locale de Bruxelles)

3. La préparation des partenariats

Une bonne préparation des partenariats est une condition sine qua non à la bonne marche d’un chantier ou d’une formation.

J’ai pris contact avec eux et ils sont venus me voir. Ils sont bien passés trois fois pour mettre les choses au point. Et pour que tout se passe bien. (Bouillon de culture)

La préparation recouvre diverses dimensions : - dimension matérielle,- définition de fonctions,- définition des demandes mutuelles.

3.1. Dimension matérielle

Lorsqu’on parle de préparation, on imagine surtout la définition de dimensions strictement matérielles telles que la période de chantier ou de formation, les matériaux nécessaires et qui les prévoit, qui les met à disposition, les tâches à effectuer, etc…

Cette dimension est importante car elle garantit le cadre organisationnel sur lequel reposera l’effectivité du partenariat.

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3.2. Définition de fonctions

La phase de préparation est aussi l’occasion de préciser quelles vont être les fonctions de chacun. Les chantiers d’animation sont particulièrement concernés par cette définition de fonction parce que les zones se superposent entre les jeunes publics de Solidarcité et les publics du partenaire, entre le(s) animateur(s) partenaire(s), le responsable d’équipe et les volontaires, eux-mêmes parties prenantes dans l’animation.

On a eu une évaluation avec Khalid, après. Et on s’est rendu compte que le projet avait commencé un peu de manière floue, parce qu’on n’avait pas mis les choses par écrit. Et ça je pense que c’était une grande faute de notre part. Il n’y a rien eu par écrit de ce qu’on allait faire, de qui allait faire quoi, des objectifs derrière… Et c’est apparu dans l’évaluation que Khalid attendait quelque chose de nous. Il s’attendait qu’on s’investisse vraiment avec lui dans l’organisation et nous on n’avait pas cette idée. Pour nous, l’idée c’était que, lui, gérait avec son groupe les animations et que nous on gérait les enfants pendant l’animation. Donc là, il y a eu une erreur de notre part. D’habitude, ils préparent les chantiers avec Simon. Je ne sais pas pourquoi ça ne s’est pas fait ce coup-ci. Je ne sais pas. Est-ce que c’était l’excitation de commencer le projet ? Est-ce que les choses paraissaient tellement claires dans la tête des gens que chacun c’est dit qu’on n’avait pas besoin de faire ça. Mais il se fait que ce n’était pas clair finalement. (La Gerbe)

3.3. Définir les demandes mutuelles, se fixer des objectifs communs

Si les dimensions matérielles et fonctionnelles constituent une part importante, elles n’épuisent pas la préparation des partenariats. En effet, à quoi servirait un cadre organisationnel, fût-il parfait, si un partenariat ne reposait sur aucun objectif, sur des objectifs flous ou encore sur des objectifs multiples mais contradictoires ?

En priorité, il s’agit de bien définir les demandes mutuelles du partenaire et de Solidarcité. En effet, si l’initiative d’un partenariat provient en général, soit de Solidarcité (surtout en matière de formation), soit d’un partenaire (surtout en matière de chantier), le partenariat reste, dans tous les cas, le résultat de demandes mutuelles et une bonne part de la préparation consiste donc en l’ajustement des demandes respectives de Solidarcité et du partenaire.

L’ajustement mutuel des demandes constitue le socle sur lequel repose les objectifs du partenariat. De la solidité de ce socle dépendent largement la réussite du partenariat et la satisfaction que le partenaire et Solidarcité, en particulier les jeunes volontaires, vont pouvoir en retirer. En outre, une définition précise, et a priori, des objectifs est le seul moyen de pouvoir évaluer valablement un partenariat, d’une part en cours de route pour le réajuster au quotidien et d’autre part à son terme pour en retirer les enseignements nécessaires et envisager l’avenir, d’autres collaborations avec le partenaire, voire la pérennisation éventuelle d’un partenariat.

3.3.1. Demandes de Solidarcité

Le guide méthodologique de Solidarcité illustre bien combien ses demandes sont précises dans le cadre des partenariats. La préparation des chantiers et formations permet de s’assurer que ces demandes seront rencontrées et aussi de négocier les tâches à effectuer en fonction du degré de compétence des volontaires ainsi que de la volonté de proposer un programme diversifié.

Donc finalement, c’est par Yannick. Alors elle m’a un peu présenté le projet par téléphone : « Et ben oui d’accord, pourquoi pas ». C’est une expérience d’autant plus qu’on s’occupe déjà de personnes en difficultés. Alors pourquoi ne pas s’occuper… Enfin pas s’occuper, mais pourquoi ne pas donner la chance à d’autres de réaliser leur projet. Il y avait trois projets. Enfin, au départ, j’avais dit à Yannick que ce serait intéressant

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d’avoir un projet de peinture parce qu’il y avait tout le hall d’entrée qui était à rénover. Elle m’a dit : « On a souvent de la peinture, est ce qu’on ne peut pas avoir autre chose ? Quelque chose qui se fait à l’extérieur par exemple ? ». Alors j’ai dit : « Pas de problème ». A ce moment là, on a eu le projet de la mare à canard. Il y a eu un projet de peinture, malgré tout, parce qu’on nous a rajouté une semaine aussi, donc de l’étable et la rénovation du parking. (Nos Pilifs)

Il peut arriver que certains décalages apparaissent entre la demande de Solidarcité et ce que le partenaire propose concrètement. C’est le cas, en particulier, des formations à l’animation de personnes âgées demandées par Solidarcité à Mémoire Vivante, afin de préparer les volontaires à un chantier d’animation dans des maisons de retraire. En effet, l’option prise par cette association fut d’organiser des rencontres entre les volontaires et des personnes âgées. Mais pour la plupart, ces dernières étaient encore très dynamiques et relativement éloignées de problématiques rencontrées par les personnes âgées en maison de retraite. Par ailleurs, les animations n’ont pas eu lieu dans les maisons de retraite d’où provenaient ces personnes. Lorsque les volontaires se sont retrouvés sur le terrain, ils se sont sentis mal préparés et dépourvus parce que les personnes qu’ils ont eu à animer présentaient des difficultés plus importantes qu’ils ne l’imaginaient (alzheimer…).

Mais les animations ne se sont pas faites dans ces maisons de repos là.Absolument. Ce qui a un petit peu déçu le public des aînés qui se disait au départ : « Ils vont venir nous animer chez nous ». Donc pour deux maisons, ce sont des maisons en tout cas où il ne se passe pas grand chose et donc voilà. Mais ils ont été très heureux aussi d’avoir un retour sur les animations, sur la manière dont ça s’est passé et sur les réactions du public, sur ce qui a été, sur ce qui n’a pas été dans le cas où ils devraient continuer de riches échanges aussi avec ceux qui ont déclaré qu’ils ne travailleraient jamais avec des vieux, c’est une réalité aussiMais moi j’ai assisté à une animation qu’ils ont faite dans une maison de repos du côté d’Anderlecht. C’est vrai qu’ils avaient bien préparé les choses et qu’ils ont eu une petite déception. Effectivement, ils ont rencontré des personnes qui étaient toutes atteintes de la maladie

d’Alzheimer. Donc, la différence avec le public avec lequel ils avaient préparé était énorme et ça a nécessité une réadaptation.Mais c’est quelque chose qui leur avait été conseillée. C’est que nous on est public de maison de repos, mais un public n’en est pas un autre, ce n’est pas un groupe homogène, on est tous différents et en fonction de notre dépendance que ce soit physique ou mentale, c’est totalement différent. Donc, l’idéal c’était de rencontrer le public avec lequel on va travailler pour mettre sur pied des animations, comme « Mémoire Vivante » travaille avec son public. Mais ça s’avérait tout à fait impossible par rapport au projet de Solidarcité vu le laps de temps dont ils disposaient. Donc c’était relativement difficile à mettre en place et c’est vrai qu’ils ont eu des petites surprises. Il y a eu une rencontre pour la préparation. En fait ils n’ont pas préparé les activités avec les aînés, ils leur ont juste posé des questions pour comprendre quel était ce public-là. Donc ça a été plus découvrir le public des personnes âgées de manière à pouvoir eux, après, adapter ce qu’ils avaient pu découvrir. (Mémoire vivante)

Certains partenaires pour qui c’était la première expérience sont restés relativement attentistes dans la définition du chantier, préférant se reposer sur l’expérience de Solidarcité.

Mais en fait, moi aussi je ne me suis pas trop mouillé dans le choix des projets parce que justement je ne connaissais pas leurs compétences. Je me suis dit : « Je vais mettre trois projets où l’on ne se cassera pas la figure. Si ce n’est pas terminé, tant pis, on l’achèvera. Ce n’est pas grave. Je crois qu’une définition précise du chantier, ce n’est pas vraiment nécessaire. Mais peut-être que pour eux c’est plus utile, pour se dire : « Ben tiens, c’est là que je vais aller travailler, c’est ça qu’on va faire », que ce soit dans leur tête. Mais pour moi non. (Nos pilifs)

3.3.2. Demandes de partenaires :

La question de l’ajustement des demandes s’avère d’autant plus présente dans le cas de chantiers d’animation (avec des enfants, d’autres jeunes ou encore des personnes âgées). Dans ce cas, le chantier implique aussi des attentes de la part du (ou des) public(s) du partenaire. Il s’agit d’une donnée qui accroît encore les

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contingences du partenariat et rend sans doute plus délicate encore la préparation dans le cadre de chantiers d’animation.

Il faut dire aussi qu’un des projets des aînés quand ils disaient vouloir rencontrer des jeunes et qu’on leur disait : « d’accord rencontrer des jeunes, mais faire quoi avec des jeunes ? » , l’idée c’était : « on pourrait regarder des films ensemble ». On regarde des films et puis on fait des débats et, justement dans le cadre de ces débats, aller à la rencontre des jeunes et voir un peu comment eux voient le monde. Mais bon, l’année passée la proposition de Solidarcité était un concours vidéo. Donc ils sont rentrés dans le concours vidéo. Mais cette année les aînés sont revenus avec cette idée de regarder des films ensemble. Là, de nouveau, Solidarcité est revenu avec une autre idée : faire un projet sur la ville et réaliser aussi tout un travail sur la découverte de différents quartiers, l’histoire de différents quartiers. Mais les aînés avaient leur idée en tête c’était une vidéo et donc c’est ça qu’ils ont décidé de faire, proposer que ça se passe comme ça et ça a été accepté par Solidarcité et c’est comme ça qu’on a collaboré avec « Libération Film »2. (Mémoire vivante)

Au cours de cette année, la préparation d’un chantier d’animation a abouti à un compromis entre le partenaire et Solidarcité qui s’est relativement éloigné de la demande du public du partenaire. C’est le cas du partenariat avec la Maison en Plus. A l’instigation d’une d’entre elles, qui avait vu les films réalisés par Solidarcité dans le cadre du concours vidéo organisé par la Ligue de Santé Mentale l’année précédente, un groupe de jeunes filles désirait réaliser une vidéo dans le cadre d’un projet communautaire de rencontre avec des personnes âgées. Telle était la demande qui avait été relayée à Solidarcité par l’animatrice de ce groupe. Toutefois, le partenariat s’est quelque peu éloigné de cette demande. Cet éloignement s’est traduit, dans les faits, par le désinvestissement du groupe de jeunes filles et le partenariat s’est effectué en demi-teinte.

2 Il s’agissait donc d’un partenariat « à trois dimensions », impliquant Solidarcité, Mémoire vivante et « Libération Film ». Cette dernière association jouait en quelque sorte un rôle de conseiller, proposant tel ou tel film en fonction des thèmes que voulaient aborder les aînés et les jeunes volontaires et, en particulier les thèmes liés à la vieillesse et à la jeunesse.

On s'est rencontrés plusieurs fois, mais très rapidement les responsables de Solidarcité ont préféré que le partenariat se centre plutôt sur un travail de récolte de données et d'interviews pour retracer en quelque sorte la mémoire collective du quartier et d’en faire une exposition. Très rapidement, le groupe de jeunes filles n'a plus été intéressé parce que le projet ne répondait plus à leurs attentes; elles le trouvaient « ennuyeux ». Moi ce que j’en retirerais – c’est chaque fois la conclusion qu’on a dans le cadre de projets communautaires – c’est que si ça ne part pas des jeunes la participation ne suit pas. Et donc on répond clairement à une demande où alors on ne fait pas. Et c’est ça qui est difficile aussi de faire un projet commun et de satisfaire tout le monde. Donc est obligé de modifier mais à force de modifier, d’évoluer et de remodifier, parfois on se perd de l’objectif de base donc ça n’a plus de sens. Je crois qu’à force de modifier on a été tellement en écart avec les demandes du départ qu’il y a eu une démotivation. Je pense que si c’est à refaire, on fait le film et si on ne fait pas le film on ne fait rien, quitte à faire le film l’année d’après. Mais c’est clair que si ça ne répond pas vraiment aux intérêts des jeunes, la participation après est minime. Et donc on se perd, on perd des énergies pour rien. (Maison en plus)

3.3.3. La place aux volontaires dans la préparation des chantiers et/ou formations

La question de la détermination des demandes interroge aussi, en particulier, la participation des volontaires à la préparation des chantiers et/ou formations.

Si de façon idéale, le guide méthodologique de Solidarcité prévoit que les volontaires ont la possibilité de participer à la préparation des chantiers et formations, cette participation n’est concrètement pas évidente. Manque de temps, difficulté de prendre des décisions communes, nécessité d’accompagnement, etc, sont autant de raisons avancées par les volontaires pour expliquer ce manque d’initiative observable (cfr Parole des volontaires).

A ce sujet, les points de vue des partenaires ne sont pas univoques.

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Pour certains partenaires, il semble difficile d’envisager la préparation d’un chantier avec les jeunes volontaires et ils préfèrent en rester à la formule actuelle où la préparation se fait avec Simon, le responsable des relations avec les partenaires pour Solidarcité, ou éventuellement avec les responsables d’équipe.

Rencontrer les volontaires, décider ensemble du travail à réaliser ? Là ça va commencer à être un petit peu plus compliqué si on fait ça. (Nos Pilifs)

Toutefois, en matière de chantiers, d’autres partenaires n’excluent pas la possibilité d’impliquer les volontaires dans la préparation. Les partenaires dans le cadre de chantiers d’animation semblent plus réceptifs à cette idée, sans doute du fait de leur sensibilité et de leur expérience de l’animation de groupes. Le chantier international initié en partenariat avec Asmae s’est d’emblée mis en place dans cette optique. A ce titre, il illustre bien à la fois la possibilité d’impliquer les volontaires dans la préparation d’un chantier et les difficultés inhérentes à cet exercice, notamment en termes de nécessité d’accompagnement et aussi en termes d’organisation propre à Solidarcité (à savoir la place laissée à l’implication des volontaires face à la nécessité d’une certaine planification du calendrier de l’année).

Les contacts ont été assez intéressants. J’ai rencontré Benoît qui, dans ce cadre là, s’est dit : « Tiens, on va essayer de mettre un projet assez rapidement en route ». Et on s’est rendu compte, avec les questions, que ça doit venir des jeunes. On s’est dit qu’il fallait essayer que l’idée vienne des jeunes et pas de nouveau un programme « clef sur porte », proposé aux jeunes qui choisissent, qui mettent leur petite croix, et puis voilà. Donc par rapport à tout ce processus-là, on s’est rendu compte que la première année c’était trop tôt si on voulait vraiment un processus de construction de projet propre eux jeunes. Ca prenait beaucoup plus de temps pour les jeunes… Et aussi pour la structure dans laquelle ils étaient qui était un peu plus rigide. Enfin, de ce que moi j’ai compris, c’était un changement d’accompagnement et ce genre de choses. Enfin, la première année, ça ne correspondait pas. Donc on

s’est dit « on va attendre ». Et donc, l’année d’après, on a mis en place une sorte de partenariat par rapport à un chantier sur base de l’idée qu’on avait avant, c’est que ce soit le groupe qui soit vraiment créateur de son propre projet. Ca c’est l’idéal. On y arrive actuellement. Mais ce n’est pas toujours simple, parce qu’il y a un cadre bien obligé par rapport à leur travail, assez rigide dans le sens où ils doivent tout programmer à l’avance. C’est très difficile par moment de pouvoir laisser un espace réel de temps aux jeunes, de création de leur propre projet. (Asmae)

La participation des volontaires concerne aussi la préparation des formations. En effet, leur offrir un contenu adapté à leurs attentes, à leurs centres d’intérêt, à leurs questions et besoins actuels, devrait idéalement passer par leur participation à la conception des formations. Toutefois, là aussi, cette participation soulève une série de questions qu’expriment très clairement les animateurs du Mrax à la suite de l’expérience de cette année qui consistait à accompagner un groupe de volontaires dans la réalisation d’un film concernant la multiculturalité.

D’une part, le partenariat de cette année a effectivement laissé une place à l’expression des attentes des volontaires.

C’était les jeunes qui étaient demandeurs de ce type de journée-là dans le cadre de la préparation ou c’était quelque chose qui avait été mis sur pied avant ?Je ne suis pas sûr mais j’ai été contacté par la responsable et je crois que dans le cadre de la préparation, il y avait un cadre qu’il fallait mettre en place. Donc ils ont souhaité l’intervention du MRAX pour bien préparer le reportage en question. Vous avez alors rencontré un responsable d’équipe, Yannick et apparemment Simon.Non, je ne les ai pas rencontré avant. On a parlé par téléphone. Ce qui était intéressant c’était l’intervention avec l’équipe et Yannick m’a téléphoné pour établir la demande. Là on a rencontré l’équipe entière de volontaires avec Yannick. Et les interventions futures, on les a préparées ensemble au départ des intérêts propres du groupe.(Mrax)

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D’autre part, l’expérience de brassage qui caractérise les équipes de volontaires constitue une base particulièrement propice à nourrir une formation sur la multiculturalité à partir de leur vécu quotidien. Une formation sur ce thème peut facilement rebondir ponctuellement sur la gestion de difficultés ou de questions qui se posent au jour le jour.

Toutefois, les animateurs du Mrax se montrent soucieux d’offrir aux volontaires une formation de qualité. Or, pour ce faire, il est probable que des interventions trop ponctuelles ou trop improvisées sur base des attentes ou des questions qui se posent au quotidien, bien que nécessaires et riches, n’y suffisent pas. A cet égard, sans doute qu’une préparation préalable, sans les volontaires, plus solide, plus structurée sans toutefois être trop cadenassée, pourrait être bénéfique, voire indispensable pour envisager un véritable travail de fond.

Ce que je pense qu’on pourrait améliorer, c’est un travail au préalable avant de rencontrer les différentes équipes. Le partenariat ça avance et je pense qu’on est en train de faire ça : voir ce qu’on va travailler avec chaque groupe, préparer vraiment les modules, avoir des objectifs au préalable. On va voir si on va réussir, pour nous, à ne pas trop laisser la place à l’improvisation, savoir ce qu’on veut avec chaque groupe, quel objectif. … Peut-être pas un « programme type », mais établi à l’avance. Avoir des interventions ponctuelles, une fois deux fois par mois avec le groupe, et s’il y a des frictions par rapport aux différences culturelles dans le groupe… Je pense que c’est beaucoup mieux de préparer à l’avance pour éviter cela, et vraiment travailler dans la perspective d’une société ouverte, multiculturelle. Je pense que les interventions ponctuelles, il faut continuer à les réaliser, c’est utile. Mais prévoir le travail c’est vraiment positif. Organiser un travail sur les mentalités des gens, vraiment de déconstruire leurs préjugés, pour ça le travail ponctuel c’est pas suffisant. Il faut le faire. Mais si on travaille à l’avance, on peut éviter tout ça et construire ensemble une société différente. On le fait avec une préparation et pas dans l’improvisation. (Mrax)

4. La présentation et la présence sur les chantiers

En matière de chantiers, le guide méthodologique stipule bien que les partenaires doivent prévoir un moment d’intégration des volontaires pour présenter l’association, le public et les enjeux sous-jacents. La parole des volontaires illustre bien l’importance de ce moment dans la prise de conscience de l’utilité de leur travail.

[La présentation], ça c’est fait. Je n’y ai pas participé moi-même. Mais il y a eu une collègue, chez-nous, qui a été présenter le service. Elles ont d’ailleurs été à deux à l’époque avec la personne sourde du service, ce qui était un témoignage direct du handicap. (Le Bataclan)

Le guide méthodologique enjoint aussi les partenaires à définir une personne de référence. Là aussi, les volontaires expriment combien une présence des partenaires sur les chantiers renforce leur satisfaction et le sentiment de faire œuvre utile.

En ce qui concerne tant le moment de présentation que la présence, les partenaires sont tous bien conscients de l’importance de ces deux ingrédients et la plupart se sont prêtés de bon cœur à cette exigence.

Oui effectivement pour moi c’est important. Je connais bien ça, j’étais dans l’enseignement donc je connais un peu les jeunes. C’était important que l’accueil soit là, qu’il se sentent vraiment accueillis, reconnus. Ca je crois que c’est une donnée importante d’un chantier, d’une démarche. Et ça c’est vrai qu’ils insistent là-dessus. Et encore, avec tous les partenaires je ne sais pas. Que tout soit prêt pour les accueillir quand ils arrivent, qu’ils se sentent vraiment … oui c’est vraiment important. (Bouillon de Culture)

Toutefois, certains font part de contraintes professionnelles importantes qui ont réduit leurs possibilités. Certains estiment n’avoir pas pu se libérer autant qu’ils l’auraient souhaité. L’un deux,

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responsable de son association, estime qu’il aurait mieux valu désigner un travailleur de terrain comme référent, plutôt que lui-même, ce qui aurait accru les possibilités de présence (ce qui fut d’ailleurs le cas au Coron, où la personne référente était précisément l’ouvrier de l’association). Certains estiment aussi que les jeunes volontaires n’ont, eux-mêmes, pas toujours fait l’effort d’ouverture pour rencontrer le personnel de l’association.

De façon générale, l’accueil et la présentation ont été effectifs dans les différents partenariats, même si parfois, vu les contraintes de temps, la présentation n’a pas eu lieu en début, mais en cours de chantier.

Oui, donc il y a eu le premier contact. Malheureusement je n’ai pas pu le faire moi-même parce que j’étais pris à ce moment. Donc le premier jour on leur a expliqué ce qu’était la ferme. L’après-midi moi j’ai vu les bénévoles, je leur ai montré certains petits projets de la ferme, de techniques. Deux bénévoles semblaient être intéressés par la chose, les autres pas nécessairement. Et alors pendant tout leur séjour ici, on les voyait quand ils arrivaient. Là ou je trouve que il y avait un petit manque, c’est qu’ils prenaient vite leur repas au réfectoire auprès des travailleurs. Mais ils partaient tout aussi vite pour aller fumer leurs cigarettes. Ils se détachaient très facilement de l’équipe ici. Il n’y a pas eu beaucoup d’échange. Il y a eu un peu d’échange social un niveau du travail parce que certains travailleurs de chez-nous, un peu à la demande de Yannick, ont travaillé avec eux, ou en tout cas travaillé près d’eux. Et donc, à ce moment là, il y avait quelques échanges. Mais il n’y a pas vraiment eu un projet qui a été pris ensemble. Mais au départ, je ne le voulais pas non plus. Donc il n’y avait pas une demande ni de ma part, ni de leur part. Mais sinon à part ça, j’ai vu des moniteurs qui parlaient un peu avec eux et qui expliquaient ce qu’on faisait un peu ici. Et je crois qu’eux ont posé des questions aussi. Mais ça aurait pu être un peu plus. … Je crois que je ne ferais plus comme ça. Je me suis mis moi-même comme personne de la ferme pour prendre contact avec eux, la personne référente ; mais je ne suis pas assez libre pour le faire. Il faut quelqu’un du plus disponible. (Nos Pilifs)

5 La perception que les partenaires ont des volontaires

La perception que les partenaires ont des volontaires est particulièrement importante car, de cette perception, dépendent en partie leur positionnement à l’égard des jeunes volontaires, leurs attentes à leur égard et leur capacité d’adaptation.

5.1. Décalage entre la perception que les partenaires ont des volontaires et la réalité de ces derniers.

La première question à se poser est de savoir si les partenaires ont eu le sentiment d’un décalage entre la présentation que Solidarcité leur avait faite des jeunes volontaires et leur propre perception des volontaires. A cet égard, si la présentation de Solidarcité ne retenait que la dimension de service à la collectivité, sans attirer l’attention des partenaires sur l’hétérogénéité des équipes incluant aussi des jeunes confrontés à des problèmes sociaux et/ou personnels plus ou moins importants., il est évident que ce décalage risquerait de provoquer l’insatisfaction des partenaires quant à leurs attentes.

Certains partenaires « chantier » expriment un décalage entre l’idée qu’ils se faisaient du niveau de compétence des volontaires et ce niveau de compétence réel. Néanmoins, ce décalage n’enlève rien à leur satisfaction au regard du travail accompli. Tout au plus, ils considèrent ce décalage comme une expérience à prendre en compte dans l’éventualité de chantiers ultérieurs : meilleure préparation, choix de tâches plus adaptées, choix d’une personne de référence plus disponible et plus présente,…

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Là où l’on devrait corriger les choses c’est une meilleure préparation. Quelque part aussi je me faisais une autre idée de leurs compétences. Je pensais que la partie formation était plus importante. Je ne vais pas dire qu’ils étaient incompétents. Ce n’est pas ça. Mais je crois que techniquement il ne faut pas pousser trop loin. Donc maintenant je connais un peu le niveau, on peut leur trouver des chantiers qui conviennent mieux. Parce que la mare, malgré tout, il y a toute une partie technique. Creuser la mare c’était pas difficile. Mettre les cailloux etc non plus. Mais il y a aussi tout un aspect pratique. Donc là je connais un peu mieux le niveau de compétences des personnes et donc si on prépare mieux les choses et que je charge ici quelqu’un de la ferme de s’occuper du groupe, alors là je crois que ça ira mieux. Sans pour autant dire que c’était un échec, loin de là, mais on aurait pu faire mieux. (Nos Pilifs)

Ils avaient eu une formation mais ils avaient un peu oublié. Moi je pensais qu’ils en connaissaient plus parce qu’en fait ils confondaient les deux types de couleurs, il y avait la peinture à l’eau, style acrylique, puis les couleurs à l’huile. Ils confondaient les deux, ils ne voyaient pas la différence. Peinture à l’eau, on dilue tout et on nettoie à l’eau, et l’autre on utilise le White-Spirit, et il y en a un qui a confondu. Là je crois qu’il y a un peut-être un travail à faire. Ils ont eu une formation, ils l’ont suivie je ne sais pas comment. Mais il y a un travail à faire en début de chantier. … Quand la formation devient un peu scolaire, une fois qu’ils sont replongés dans ce contexte là, l’esprit vagabond revient automatiquement. Et si il pouvait y avoir des gens qui viennent directement sur le chantier, ce serait plus porteur, ils feraient plus attention. (Bouillon de Culture)

Toutefois, un décalage de ce type reste relativement rare puisque, dans la préparation des chantiers et formations, Solidarcité se montre très soucieux de refléter aux partenaires une image des volontaires la plus proche de la réalité. A entendre les partenaires, il semble clair que la grande majorité de ceux-ci n’ont pas été surpris à l’arrivée des volontaires.

- Certains partenaires disaient qu’ils s’attendaient à ce que les jeunes soient plus compétents mais à nouveau c’était plus par rapport à des chantiers physiques, manuels, etc. Est-ce que vous avez rencontré un décalage par rapport aux attentes que vous aviez ?

Il n’y a pas eu de décalage car je pense qu’on ne se faisait pas une idée fixe. On savait dès les départ que Solidarcité travaille avec des jeunes issus de tous milieux. … C’est autant des jeunes qui viennent de Molenbeek que de Uccle par exemple, autant des jeunes qui sont en décrochage scolaire que des jeunes qui arrêtent une activité professionnelle, qui se remettent en question. Donc par rapport à ça absolument pas. Issus de toutes les cultures aussi donc je pense qu’il n’y a pas eu de surprise, ni de ma part, ni de celle des aînés. (Mémoire Vivante)

Un partenaire exprime par contre sa surprise positive à la rencontre des volontaires. D’après lui, sans doute que certains préjugés personnels avaient établi une sorte de filtre dans sa compréhension initiale du projet.

C’est vrai que je m’y étais présenté avec certains préjugés, un a priori en disant : « Ben voilà, on les avait présentés comme des jeunes en décrochage scolaire ». Or, j’en ai rencontré qui ne l’étaient pas du tout, qui avaient bien réussi. Donc quelque part je m’étais attendu au pire et j’ai été agréablement surpris en les rencontrant. Enfin pour moi ce n’est pas une race à part, ce sont des jeunes qui s’investissent. Je pense déjà que leur démarche de s’investir comme ça pour quasiment un an dans le projet… Je suppose qu’ils sont attirés par le côté assez extraordinaire de certains projets ; mais d’un autre côté c’est tout à fait constructif comme démarche que de se donner l’occasion de vivre certaines expériences dans une vie sociale tout à fait traditionnelle. - C’est étonnant ce que tu me dis par rapport à l’image que tu t’étais faite des volontaires auparavant parce que souvent Solidarcité essaye de se défendre de cette étiquette. C’est quand ils rencontrent des partenaires chantiers qu’ils disent que ce ne sont pas des jeunes en réinsertion car pour beaucoup, le fait même de participer à Solidarcité aux yeux des partenaires ce sont des jeunes qui ont fait des conneries...Mais je ne suis pas sûr qu’on m’ait tenu un autre discours que celui que tu me tiens maintenant. En tout cas c’est ce que j’en avais retenu avant d’y aller. (Croix Rouge)

Je crois, d’ailleurs… J’ai l’impression qu’ils font une sélection sévère déjà au départ sinon je me serais attendu à plus de dérapage. (Bouillon de Culture)

Et de notre côté, l’objectif a été vraiment atteint. J’avais un peu peur au départ. Un chantier de peinture, c’est toujours un risque de travail mal

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fait, de choses sales, de gaspillage, quand on prend des gens peu expérimentés. Et visiblement ici, ils avaient une formation de base ; ils avaient une façon de travailler qui faisait qu’ils avançaient bien. (Le Bataclan)

La tâche de Solidarcité dans la présentation du profil des équipes n’est pas simple. En effet, il s’agit de dresser un portrait fidèle qui n’efface pas les difficultés de certains volontaires, tout en évitant de conforter la stigmatisation de ces jeunes qui constitue précisément une bonne part de leurs difficultés. En effet, renforcer certains stéréotypes dans le chef des partenaires pourrait avoir des conséquences fâcheuses par rapport à l’objectif de Solidarcité de permettre aux jeunes de se départir d’identités négatives prescrites et intériorisées. Il va de soi qu’un partenaire qui se montrerait trop méfiant, distant ou au contraire condescendant à l’excès, lors des chantiers ou des formations, induirait une dynamique plutôt inappropriée à ce travail identitaire.

Cette question reste d’ailleurs délicate pour certains partenaires lorsqu’ils expriment leur pudeur à l’égard des jeunes volontaires, leur difficulté à – ou leur choix de – ne pas interroger ceux-ci sur les raisons de leur engagement à Solidarcité ou sur leur vie en général. Certains partenaires préfèrent en effet se contenter d’une perception relativement nébuleuse des volontaires. Plusieurs raisons sont invoquées, telle que la crainte de paraître trop intrusif ou la volonté de « les accepter comme ils sont et quel que soit leur passé » (Le Coron).

C’est vrai que moi j’ai pas vraiment trop posé de questions aux jeunes, ce qu’ils faisaient, pourquoi ils venaient ici. Je n’ai pas posé la question. Pas qu’elle ne m’est pas venue à l’idée, mais sans doute par pudeur. Je me suis dit : « s’ils sont là c’est qu’ils ont une bonne raison d’être là ». Maintenant et aussi encore par pudeur, je ne tiens pas à rentrer dans leur vie privée, leur motivation. (Nos Pilifs)

Ce souci est louable mais il peut aussi s’accompagner de quelques effets indésirables :

- Le premier de ceux-ci est que cette pudeur peut être interprétée par les volontaires comme un manque d’intérêt ou de l’indifférence. Ou à tout le moins, il peuvent la considérer comme une méconnaissance de leur réalité par le partenaire, qui peut alors parfois se traduire par le sentiment d’être considéré comme une simple main d’œuvre à bon marché.

- Le second de ceux-ci est que, paradoxalement, en voulant éviter de rentrer dans les préjugés, en s’interdisant de « rentrer dans la vie des jeunes volontaires », certains partenaires ont une perception relativement faussée de leurs réalités et cette nébuleuse nourrit un certain nombre de préjugés qui persistent malgré tout, même s’ils restent dans le non-dit. L’un d’eux semblait d’ailleurs peu au clair avec la question de savoir si tous les jeunes étaient réellement volontaires ou si certains étaient là dans le cadre d’une sorte de travail d’intérêt général, tout en exprimant qu’il ne ressentait ni l’envie, ni le besoin de creuser cette question car, quel que soit le passé du jeune, il trouvait nécessaire de leur donner leur chance.

Même si dans l’ensemble cette forme de pudeur reste très marginale, elle semble concerner davantage les chantiers de type manuel que les chantiers de type animation ou les formations. Sans doute que les personnes de référence dans le cadre des chantiers d’animation se montrent plus à l’aise pour aborder des questions sociales et personnelles des jeunes volontaires.

Par ailleurs, lors des chantiers d’animation, il apparaît que les rencontres entre le public d’un partenaire et les jeunes de Solidarcité permettent d’aller plus loin dans la découverte mutuelle et

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permettent, de ce fait, d’affiner davantage la perception que le partenaire se fait des volontaires. A travers les échanges entre les jeunes et leur public, les partenaires « animations » semblent accéder à une connaissance plus fine des volontaires. Dans les entretiens que nous avons réalisés, ceci se traduit très concrètement dans l’aisance avec laquelle ils s’expriment sur la perception qu’ils ont des volontaires et dans la justesse de leurs propos.

Quant à connaître le projet, c’est vrai qu’on a eu d’une manière globale l’idée de ce qu’était le projet, une année sabbatique où on va donner l’occasion aux jeunes de toucher à toutes sortes de domaines professionnels, éventuellement se découvrir de nouvelles envies professionnelles. Mais c’est surtout les aînés qui posent des questions, c’est au travers des questions des aînés qu’on a des réponses à des questions qu’on ne prend pas le temps de poser. Dans les moments informels, quand, par exemple, dans le cadre d’un projet on se dit qu’on va d’abord faire un pique-nique ensemble, avant de démarrer le travail. Pendant ce pique-nique, on parle de tout et de rien. … Il y a eu des moments où des liens beaucoup plus affectifs, beaucoup plus serrés, se sont créés entre certains jeunes et certains aînés, où les jeunes se sont confiés littéralement à des aînés et leur ont demandé des conseils. En fait, c’est fort au travers des questions des aînés, qui essayent de bien se représenter des choses qu’ils n’ont jamais connues,... (Mémoire Vivante)

En ce qui concerne donc la perception que les partenaires se font des volontaires, il apparaît que, de façon marginale, 1) certains font part d’un décalage entre ce qu’ils avaient imaginé et la réalité des jeunes volontaires. 2) Certains avaient surévalué leurs compétences. 3) D’autres avaient surévalué leurs difficultés. 4)D’autres encore ont préféré, par pudeur, ne pas s’intéresser plus avant à la vie personnelle des volontaires, tablant sur cette ignorance relative pour se prémunir d’éventuels préjugés, même si cette option n’efface pas toute perception et que paradoxalement cette perception se fonde davantage sur des idées personnelles – parfois non dénuées de préconceptions, voire de stéréotypes – que sur une confrontation à la réalité. Il convient de relier ces décalages d’une part avec les propos des volontaires, lorsqu’ils s’expriment sur certaines difficultés

ressenties sur certains chantiers, et d’autre part avec les propos des responsables d’équipes, lorsqu’ils expriment devoir, sur certains chantiers, gérer ces éventuels décalages et réajuster les « images premières » des partenaires, soit en modérant parfois les attentes des partenaires au regard des compétences des volontaires, soit en insistant parfois sur la démarche positive du volontariat afin que les volontaires ne se voient réduits à leurs éventuelles difficultés sociales ou personnelles.

Il est important toutefois de souligner que, si ces décalages existent, ils restent très minoritaires. Dans l’ensemble, premièrement les partenaires n’ont pas le sentiment d’avoir ressenti de décalage et, deuxièmement, ils ont une perception très proche de la réalité des jeunes volontaires et très fidèle à la complexité de cette réalité qui, comme nous l’avons vu à plusieurs reprises, n’est ni totalement noire, ni totalement blanche.

5.2. Ce que les partenaires disent des volontaires

La perception que les partenaires ont des volontaires est, à l’image de la réalité, relativement complexe. Elle montre l’hétérogénéité des volontaires. Elle souligne à la fois les difficultés et les richesses de ces derniers.

5.2.1. Hétérogénéité des équipes de volontaires :

Les jeunes que j’ai rencontrés. La difficulté, c’est que c’est parfois des jeunes, comment dire, un peu « dilettantes », un peu pas toujours très rigoureux. […] Mais sinon, on a eu un chouette groupe. Avec des jeunes très motivés. Certains plus que d’autres, évidemment. Mais très motivés. […] J’étais très étonné d’entendre les jeunes dire : « Nous, ce qui nous plaît, c’est la diversité, de voir d’autres jeunes de notre âge qui viennent d’un peu partout ». Et de les entendre dire : « Celui-là, je ne l’aurais jamais rencontré. Maintenant on a un très bon feeling, on s’entend bien,

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on a des choses à échanger. Voilà une dimension intéressante. Au niveau du groupe ici, je n’ai pas vraiment eu cette impression d’hétérogénéité parce que j’avais vraiment l’impression qu’ils formaient un groupe avec tout ce qu’il peut y avoir de solidaire dans un groupe uni. […] Et puis quand on discute avec chacun individuellement, on se rend compte qu’il y a des réalités qui sont totalement différentes. C’est ce qui est intéressant. C’est cette diversité qui, malgré tout, forme un groupe, parce qu’ils faisaient des choses ensemble. (La Gerbe)

Les partenaires soulignent l’hétérogénéité des volontaires au sein des équipes. Cette hétérogénéité se marque dans :

- les différences de niveaux de maturité

C’est vrai il y en a dans le groupe qui étaient très mûrs et d’autres encore très gamins et donc tout ça joue. C’est vrai que les plus mûrs peuvent entraîner les autres et c’est ça qui est bien. (Bouillon de Culture)

- les différences de rythme, et notamment de rythme d’apprentissage

Avec le dernier groupe, le groupe de Yannick, par exemple le nivellement était énorme au sein du groupe. La différence de niveau est énorme. Et donc ça, par moments, ce n’est pas facile parce qu’on a envie que tout le monde soit intéressé. Mais il y en a qui attendent que j’aille plus vite et d’autres qui sont toujours au premier paragraphe et qui disent en plein milieu de la première pause : « tiens une ASBL du tiers monde, alors c’est quoi ? ». (Asmae)

- les différences de niveau scolaire

Formation scolaire. Il y a quand même,… Enfin à Solidarcité ils sont tous alphabétisés mais y en a quand même pas mal qui ont des gros retards ou lacunes et dans les groupes où on intervient traditionnellement, ce n’est pas le cas. C’est plus la bonne classe moyenne, supérieure, voire bourgeoise, où tout va bien. (Asmae)

Moi, une des différences c’est d’abord le niveau… au niveau éducatif, au niveau connaissance du secteur. La majorité des jeunes à Solidarcité, c’est : « Je viens avec quelque chose ou il faut aider les noirs quoi »,

point. Il n’y a aucun éveil ou il y a très peu d’éveil ou d’esprit critique par rapport à ça…. (Asmae)

Rappelons par ailleurs que le partenaire Croix Rouge s’attendait à pire en ce qui concerne le niveau scolaire des volontaires et qu’il exprime sa surprise lorsqu’il a découvert que certains volontaires avaient un cursus honorable et même quelques-uns une expérience universitaire.

Parallèlement aux différences de niveaux de connaissance des volontaires, certains partenaires évoquent le manque d’expérience de certains. Ce manque d’expérience se fait parfois sentir, notamment dans les formations qui veulent s’appuyer sur leur vécu. Mais souligner ce manque d’expérience relève du truisme à partir du moment où l’on considère que Solidarcité offre précisément aux jeunes volontaires la possibilité de s’expérimenter dans des domaines qu’ils ne connaissent pas. Le truisme est d’autant plus réel lorsqu’il s’agit de formations préalables destinées à préparer les volontaires avant de débarquer sur un chantier.

Bien sûr les centres d’intérêts sont différents. Quand on anime un « bosses et bobos » avec des animateurs, par exemple d’une même unité scout, c’est clair qu’on sent qu’il y a une connaissance du terrain, de l’animation. Quand on parle de certains accidents qui peuvent arriver aux enfants, ils les connaissent, ils l’ont vécu. Et là on a bien senti quand on est venu animer le « bosses et bobos » dans l’équipe de Yannick, qu’ils ont très peu cette expérience avec les enfants. Donc ils enrichissent moins de leur côté le module. Sinon je ne perçois pas de différence. Ce sont des jeunes comme les autres. (Croix Rouge)

Mais ils sont plus jeunes déjà, c’est 17/25 ans. Nous, d’habitude on n’a jamais de gens en dessous de 18 ans et ici, en moyenne, c’est 30 ans. Donc avec un public plus jeune qui a peu d’expériences c’est plus difficile de parler d’expériences. (Mission Locale de Bruxelles)

Pour les partenaires, la diversité et les différences de niveaux peuvent présenter des difficultés, en particulier en ce qui concerne

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les formations. Mais dans le même temps, elles constituent aussi une richesse et un outil sur lequel il est possible de s’appuyer, comme un moteur pour « tirer les jeunes vers le haut ».

Les partenaires soulignent aussi le brassage des volontaires en ce qui concerne leurs origines sociales ou culturelles et la richesse qui en découle.

Moi c’est ce qui m’a beaucoup plu, c’est que c’était vraiment une équipe très cosmopolite. Il y avait vraiment toutes des personnes différentes aussi bien au niveau des nationalités. Et ça depuis le début j’ai trouvé ça très riche. Nous, on travaille notamment avec des personnes d’origines marocaines. Et donc moi je trouvais ça justement riche d’être en contact avec d’autres jeunes. Il y avait aussi bien des marocains, des black et je crois même qu’il y avait un russe, enfin qui était fort proche de la culture russe. Et c’était super riche qu’il y ait tout un mélange comme ça. (Maison en plus).

Je crois que la richesse, c’est la mixité. Vraiment, je crois qu’il y a une richesse dingue. Je me souviens du premier groupe, où il y a un gars qui maintenant fait une licence en sciences, un autre gars qui avait terminé sa 2° professionnelle. A la fin, les 2 disaient : « J’ai vraiment appris beaucoup ». Ils échangent plein de choses sur la vie familiale, sur… Je me souviens un d’eux avait invité toute l’équipe parce que ses parents habitaient à la campagne et leur chantier était tout près. Les bruxellois ont découvert : « Eh, c’est là que tu habites ! ». Vraiment, c’est la découverte de l’autre C’est une richesse qui doit rester quand ils construisent les groupes. C’est dur à gérer au quotidien, mais c’est vraiment une richesse. (Mission Locale de Bruxelles)

De façon générale, la majorité des partenaires sont bien conscients de la diversité des jeunes volontaires, tant en ce qui concerne les origines sociales et culturelles, que les personnalités et les niveaux de compétence des uns et des autres.

5.2.2. Nécessité d’accompagner et de s’adapter

Pour répondre à ces différences de niveaux, les partenaires et en particulier les partenaires « formation » attirent l’attention sur la nécessité d’accompagner les volontaires et de s’adapter.

L’idée était vraiment d’accompagner le groupe dans la réalisation de son projet, c’est-à-dire de les relancer : « Ah, Christophe, au niveau vaccin, qu’est-ce qu’on doit faire ? Et bien voilà le numéro de téléphone, tu peux appeler là et tu auras les informations ». Billets d’avion, la même chose : « Il y a telle ou telle agence, c’est une agence qu’on connaît. Voilà son numéro de téléphone. Contactez-les ». Ce qu’ils n’ont pas fait, parce que temps et autre… Donc, on a pris ça en charge. C’est pas facile de trouver… Par rapport à leur propre projet aussi ce n’est pas facile pour eux. C’est quelque chose en plus et donc ça peut être lourd pour eux. Le plus difficile est de trouver un équilibre entre ce qu’eux devraient faire et ce que nous on peut aussi mettre en avant pour leur faciliter la démarche sans prendre leur place. (Asmae)

Dans la formation, je m’adapte. Ce qui est très intéressant c’est que je fais des activités que je ne ferais pas avec les jeunes. Je parle de la dette, par exemple, avec Solidarcité ; mais dans mes formations préparations au départ pour les jeunes j’en parle très peu parce que je sais que ce n’est pas le cadre pour eux à ce moment-là. Pour parler de la dette il faut quand même être accroché. Ce n’est pas facile : intérêt nominal, intérêt débiteur,... Ce n’est pas toujours simple à comprendre, mais ils accrochent parce que ça les intéresse. J’adapte. Je parle de la dette à Solidarcité. J’adapte beaucoup dans le temps de présence. Je fais beaucoup plus de pauses pour les groupes de Solidarcité, parce que je sais qu’en fonction du groupe, au bout d’une demi-heure assis à m’entendre parler, ils en ont marre. Ils se retrouvent dans un cadre scolaire et je vois bien que je ne les accroche pas. Et aussi il faut être en forme. Je sens très bien que je dois être beaucoup plus présent que dans une animation que je fais dans un cadre scolaire ou universitaire classique. Parce que si je ne les tiens pas éveillés, ce n’est pas intéressant, je vois bien qu’ils partent ailleurs. Et je fais moins d’envolées théoriques, je vais plus au but. Je ne vais pas dans les détails parce que ça ne sert à rien, ça prend trop de temps. Mais je leur laisse la possibilité de pouvoir lire ces détails-là en donnant des dossiers ou autres. Je me dis il y en a peut-être un ou deux dans le groupe qui va les lire à un moment donné. Mais voilà. Mais je sais que l’information passe, enfin je veux dire qu’il y a au moins une ou deux choses… (Asmaë)

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Déjà dans la durée, normalement dans les modules que l’on fait d’habitude, ça dure sept semaines trois jours/semaine et ce n’est pas du tout la même demande. Ici, à la Mission Locale, ce sont des demandeurs d’emplois qui se cherchent, qui ne savent pas trop ce qu’ils vont faire ; c’est clair que c’est eux qui viennent vers nous parce qu’ils ont une demande. Ici, avec Solidarcité, c’est tout à fait une autre démarche. C’est clair qu’on s’est basé sur ce qu’on faisait avant. Mais on a dû beaucoup adapter. Ce n’est pas du tout le même public. On travaillait beaucoup sur l’écrit, on donnait des exercices sur lesquels ils doivent un peu se concentrer, le bilan personnel entre autre. Le public de Solidarcité n’accroche pas du tout à ce genre d’exercices… Ben voilà, on a du s’adapter, on s’adapte encore, ce qu’on a fait cette année avec les jeunes, ce n’est pas du tout ce qu’on a fait au début. (Mission Locale de Bruxelles)

5.2.3. Du déficit de confiance de certains volontaires à la démarche positive de leur engagement

Exprimant l’hétérogénéité des volontaires au sein de Solidarcité, les partenaires sont conscients que les difficultés que les jeunes rencontrent sont diverses et plus ou moins importantes.

Parmi les difficultés vécues par les jeunes volontaires, ils soulignent en particulier la dévalorisation et le déficit de confiance de certains de ceux-ci.

Les partenaires sont très conscients du déficit de confiance et de l’identité dévalorisée dont pâtissent certain(e)s volontaires. Dans le même temps, ils soulignent les évolutions déjà perceptibles dans leur trajectoire à travers Solidarcité.

Il faut dire que j’ai travaillé avec eux pendant 1 mois et demi, pas plus que ça. Mais apparemment ce que j’ai perçu c’est qu’ils évoluaient déjà beaucoup dans le sens où c’est un groupe avec beaucoup de décrochage scolaire, qui n’avait pas envie de faire beaucoup de choses et là ils étaient capables d’organiser eux-mêmes quelque chose. C’est l’équipe elle-même qui parlait de ça ?

Oui, qu’avant ils avaient une identification en tant que des gens incapables et qu’ils étaient très dévalorisés eux-mêmes, pas dans la collectivité mais du côté individuel. Et je pense qu’à la fin ils avaient effectivement la conscience de pouvoir faire quelque chose avec l’aide et le soutien des autres mais en participant eux-mêmes dans la mise en place d’un projet concret. Donc je suis convaincu qu’il y a eu une évolution et qu’à la fin ils étaient très contents de se rendre compte par eux-mêmes qu’ils pouvaient mettre un projet en place. (Mrax)

Sinon, pour parler de l’échec , on considère toujours que c’est pas uniquement les diplômes, enfin le cursus qui est positif mais, dans chaque expérience, essayer de retirer du positif. Faire une année à l’école et l’avoir ratée, on essaiera toujours de retirer quelque chose même si ça n’a pas été sanctionné par une réussite, un diplôme et alors, on essaie aussi de voir ce qu’on appelle les compétences transversales. (Mission Locale de Bruxelles)

Il n’est pas simple de réfléchir sur soi-même et de s’exprimer lorsqu’on a une faible estime de soi. C’est bien là toute la difficulté à laquelle la plupart des jeunes volontaires sont confrontés dans l’axe « maturation personnelle ».

- Les différences avec les gens qui font un module ici à la Mission Locale, c’est qu’ils ont un autre objectif que les gens qui sont à Solidarcité. Je trouve que les volontaires ne savent pas vraiment ce que veut dire maturation personnelle, réfléchir sur moi etc. Quand ils commencent à Solidarcité, ils font des chantiers, des travaux manuels, ils font des formations à la citoyenneté et puis, ils débarquent dans une formation où on va leur parler de faire un bilan personnel. Pourquoi ? … Ils ne sont pas nécessairement prêts à travailler sur eux.- Si je compare les modules qu’on a à la Mission Locale avec Solidarcité, J’ai l’impression qu’il y a moins ce mouvement qu’on appelle co-recherche, … Là, à Solidarcité c’est vraiment difficile. Enfin certains y arrivent, mais c’est difficile d’émettre des idées ou d’avoir une réelle discussion sur l’orientation, ou les désirs de l’autre, ou de parler des compétences de l’autre… Bref ce n’est pas évident.- Je crois que c’est dû au fait que cela dure beaucoup moins longtemps, Ils sont moins mûrs. Ils ont déjà difficile de parler d’eux-mêmes ; alors parler des autres, ce n’est pas évident. Mais il y en a qui arrive à parler de manière très pertinente de l’autre et ça c’est vraiment très chouette

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mais ce n’est pas une généralité. Cette impression je l’ai eue au niveau des trois groupes même si il y a eu des variantes. Et ils sont plus dans l’attente d’un prof quelque part, même si on essaye de casser cela. Ils sont plus en attente qu’on leur dise ce qu’ils doivent faire, suite à un test ; ce qu’ils doivent faire comme métier.- Je crois aussi que pour eux ça doit être difficile par rapport aux différentes manières de procéder. Peut-être que nous on attend qu’ils soient co-chercheurs. Mais peut être qu’ils doivent suivre une formation sur la citoyenneté, où ils doivent plutôt écouter une théorie. Sur les chantiers ils doivent constamment s’adapter, se comporter différemment. Alors qu’ici le module c’est constant en deux mois ; ils sont avec les mêmes consignes. Moi je dirais que ça varie vraiment d’un groupe à l’autre. …- Souvent à Solidarcité ou avec un public plus jeune, ils nous disent souvent :« Mais pourquoi vous ne faites pas l’exercice ? ». Et souvent on est amené à faire l’exercice et ce n’est pas si facile de faire ces exercices. C’est interpellant aussi. Je me dis qu’il faut prendre le temps. Au point de vue maturation personnelle, c’est vrai que c’est un gros morceau à Solidarcité, - Je pense que c’est difficile de réfléchir sur soi. Et quand on est dans une dynamique comme Solidarcité, on va peindre un chouette local, on est dans l’action, et réfléchir c’est encore une autre histoire. (Mission Locale de Bruxelles)

Toutefois, malgré cette difficulté première à s’exprimer sur soi, à réaliser un effort réflexif, les partenaires de la Mission Locale considèrent qu’une fois cette difficulté dépassée, par une méthode adaptée, l’instauration d’un climat de confiance et l’établissement de liens avec les expériences vécues notamment lors des chantiers, les jeunes volontaires font preuve d’une maturité importante.

Moi j’en retire une impression de maturité, plus que dans d’autres groupes du même âge, et peut-être même d’intelligence chez certains. Il y a vraiment, euh…. Au bout du compte, ils arrivent vraiment à parler d’eux et on est toujours un peu étonné de la richesse qu’ils ont. Je ne sais pas si c’est dû au processus qui fait que pendant un an, ils ont pas mal de trucs qu’on ne trouve pas ailleurs. … Mais, je trouve qu’ils sont… C’est pas des cons quoi ! Vraiment pas ! (Mission Locale de Bruxelles)

A cet égard, les partenaires insistent sur les mérites et la démarche positive des volontaires à s’engager pour plusieurs mois dans un projet de volontariat.

Mais, je crois que Solidarcité, pour s’engager comme ça pendant 8 mois, ce n’est pas quelque chose de conventionnel. Il faut tout de même avoir… Tu vois. On leur demande quand même pas mal d’aspirations pour faire ça. Il y a une démarche quoi ! (Mission Locale de Bruxelles)

C’est un contrat moral mais c’est vrai qu’ils se sont engagés quelque part. C’est quand même des gens qui sont dans un circuit de décrochage. Mais en même temps ils ont beaucoup de motivations à réussir et à s’investir vers un parcours positif, ce qui n’est pas le cas de tous les jeunes. Nous on a plein de jeunes ici où l’on parlerait de volontariat et ce serait « non ». Donc je crois qu’on doit déjà être inséré dont une dynamique positive pour pouvoir s’engager dans le volontariat et y rester. … Et donc je crois que ça accroche et ça motive le jeune à rester durant l’année. Sinon, pour moi, la dynamique en elle-même de Solidarcité, le projet Solidarcité est un super projet parce que je pense qu’effectivement il y a plein de jeunes qui sont entre les deux : on arrête, on décroche et on s’engouffre ; où alors on essaye de remonter, de trouver des solutions. Et c’est vrai qu’on n’est pas toujours déterminé, on ne sait pas toujours ce que l’on veut à l’avance. Vis-à-vis de parcours galère, lourd machin moi je ne l’ai pas ressenti du tout comme ça. Pour moi c’était des jeunes qui étaient là, qui avaient envie de partager des choses, des expériences. Je pense que si on arrive au volontariat c’est que quelque part on n’est pas clair dans son parcours, on ne voit pas trop bien ce qu’on va faire. … Mais justement ça avait l’air d’être des gens qui n’avaient pas l’air d’être dans une galère, pas l’air d’être dans la déprime, qui en tout cas avaient vraiment envie de s’en sortir, même s’ils étaient dedans. Mais en tout cas ils étaient très positifs pour arriver à autre chose. (Maison en plus)

Certains partenaires se posent des questions quant au décalage entre l’engagement des volontaires et leurs absences.

Alors je n’ai pas parlé de ça avec eux, je ne connais pas les causes de leurs absences. C’est vrai qu’on se dit : « est ce qu’ils sont un peu contraints d’y aller ou pas, étant donné qu’ils se sont engagés ». Peut-être que dans les six mois ou l’année, ça évolue un peu. Il y a peut-être

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des intérêts qui font que… Ils n’ont pas été gâtés non plus au point de vue du temps météorologique. Ce n’est sûrement pas encourageant. Apparemment à l’évaluation ils ont dit qu’ils se sont bien plus ici, donc je me dit que quelque part ils étaient contents d’être ici.Mais, justement ce qu’ils ont eu, c’est qu’ils se sont retrouvés à deux où trois pour creuser et c’était lourd. D’autant plus qu’il avait plu donc c’était dans la boue qu’ils travaillaient. S’ils avaient été un peu plus nombreux ça aurait été un peu plus facile. (Nos Pilifs)

Tandis que d’autres, a contrario, s’étonnent finalement de la présence assez régulière des volontaires. C’est le cas, en particulier de la Maison en plus. Mais il est vrai que cet étonnement était sans doute renforcé par la désaffection assez massive du public propre à ce partenaire. Par contraste, la présence des volontaires de Solidarcité en prenait d’autant plus de valeur.

Moi je trouvais que ça allait, j’étais même étonnée qu’ils venaient quand même encore quasiment tous. C’est rare. Il y en a un du groupe qui, à un moment donné, a baissé un peu les bras. Mais sinon en général ils étaient tous là. Et c’était d’autant plus embêtant parce qu’en temps que travailleuse, j’avais organisé tout, il y avait le partenariat qui était mis en place et moi, chaque jour, je me retrouvais là à attendre tout le monde de mon groupe. Moi ça m’a mis fort mal à l’aise vis-à-vis du partenariat, vis-à-vis du projet, vis-à-vis de l'engagement. Mais je crois que Pascal l’a bien compris et que de toute façon on ne sait pas faire des miracles. Il y a des projets qui foirent, il y a des projets qui réussissent bien. Voilà malheureusement ça a foiré, je pense que ça peut s’expliquer par toute une série de choses. Et moi j’ai beaucoup aimé la réaction des volontaires, autant que de l’équipe Solidarcité, qui a justement été fort tolérante, toujours ouverte à la discussion et toujours présente. Et il y a un moment donné où ils en ont eu marre et ils ont été très clairs et ils ont directement énoncé les problèmes clairement : « Voilà continuer comme ça, ça ne sert à rien. On préfère arrêter que de continuer dans des circonstances pareilles ». Donc on a pu en parler très vite aussi, sans non plus me mettre mal à l’aise, parce que c’était moi la plus embarrassée dans l’histoire et Pascal disait : « ce n’est pas grave, si ça foire ici, on reprend autre chose », moi j’étais embêtée parce que je m’étais engagée avec eux. Moi j’ai été sciée.- Positivement ?

Positivement, parce qu’ils étaient vraiment… Même le dernier jour il n’y avait personne mais les jeunes de Solidarcité étaient là et on a quand même rigolé, on a eu des fous rires. (Maison en plus)

5.2.4. Les richesses des jeunes volontaires

Malgré les difficultés rencontrées par les jeunes volontaires et relevées par les partenaires, et au-delà de la dimension positive de l’engagement des volontaires soulignée par les partenaires, ces derniers évoquent une série de richesses propres aux jeunes volontaires.

Des partenaires attirent l’attention sur les capacités d’ouverture des volontaires.

Au niveau motivation propre, elle est la même que dans les autres groupes où j’interviens. Mais à Solidarcité, ils ont une capacité d’ouverture beaucoup plus grande que les autres. Sur le terrain à la fois cette année-ci et l’année dernière, le partenaire nous dit : « ils ont beaucoup moins peur », dans le sens où les groupes, les 2–3 premiers jours ils trouvent leurs repères, on les voit,… Et là ils étaient là depuis une heure et c’est tout le monde dans le quartier quoi. Et de par leur milieu, moi je me dis… Enfin X, je suis sûr qu’il est connu dans son quartier, parce que c’est comme ça qu’ils fonctionnent aussi, on rencontre des gens, on discute, on est connu dans le quartier. Ici, nous, enfin c’est moins simple. (Asmae)

Dans le cadre de formations, des partenaires signalent que les volontaires réagissent davantage et de façon plus libre que dans un cadre plus scolaire. Par ailleurs, l’interconnaissance des volontaires en équipe induit une confiance favorable à certains exercices.

Tu as vu ce qui sortait. Y a quelque chose qui sortait. Même si les autres groupes dans lesquels j’interviens ça sort aussi mais ils ont plus d’éveil, plus de sensibilité par rapport à ça. Autre différence, je trouve que ces groupes-là, moi j’ai plus de plaisir à animer parce que ça réagit beaucoup plus… comme ils sont intéressés, c’est très gai. Enfin je veux dire ils ne vont pas me laisser 5 minutes. Ils vont pas croire tout ce que je

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dis en parallèle aux autres groupes ou on a un autre statut éducatif où c’est « oui monsieur, bien monsieur ». Enfin j’exagère un peu mais c’est un peu ça. … Donc je me dis que l’adaptation, ça peut être d’abord moi aussi en termes d’explications, de clarté. Il y a aussi tout simplement la question de compréhension intellectuelle qui joue aussi donc ce n’est pas que eux ou que moi. Donc ce n’est pas que dans un sens, ça je m’en rends bien compte. Mais je fais par exemple… C’est marrant parce que je fais des choses plus dures avec ces groupes-là qu’avec d’autres groupes. Par exemple, je fais le jeu de l’argent dans la formation. Et je ne le ferai jamais avec des groupes qui ne se connaissent pas au départ, parce que c’est un jeu où ils doivent mettre de l’argent pour perdre de l’argent. Je le fais avec les parties qui se connaissent parce qu’il y a un cadre et parce qu’ils me connaissent. Ils m’ont déjà vu avant et donc il y a une confiance. Tandis que les autres groupes, ils m’ont vu une ou deux fois, ils ont vu les formateurs mais ils ne se connaissent pas du tout avant et comme c’est quelque chose qui peut, pas mal se passer, mais laisser des traces au niveau du ressenti intérieur. J’ai fait ce jeu là avec Solidarcité, mais je le fais très rarement avec d’autres groupes, parce qu’il y a le groupe structuré et parce qu’ils se connaissent et parce que je sens qu’ils sont… que j’ai plus de temps avec eux aussi. (Asmae)

Enfin, certains partenaires soulignent la participation des volontaires.

Cette équipe ça se passait très bien. Je crois qu’on a travaillé ensemble pendant trois demi-journées si je ne me trompe pas et je trouve que c’était très participatif. Tout le monde était je pense motivé. Pas tous de la même façon mais il y en avait quelques-uns qui étaient plus dedans, qui se sentaient plus concernés, qui avaient pas mal de choses à dire, je pense que ça a été utile pour faire parler le groupe. Je ne sais pas comment ça se passe ailleurs. Mais par rapport à l’identité de chacun, la notion de culture, l’identité culturelle je trouve que c’était très bien. (Mrax)

6. Le regard des partenaires sur Solidarcité et les responsables d’équipe

6.1. Le regard sur Solidarcité en généralIl me semble qu’il y a deux composantes au projet. Je pense que d’une part, ça fait partie d’une orientation de type volontariste. On sent qu’il y a derrière ça l’idée que les jeunes peuvent s’engager dans un certain nombre de choses et sont invités à le faire par le biais de ce créneau-là. […] Et à côté de ça, il y a aussi l’orientation de permettre à des jeunes qui ont moins de facilités, qui sont un peu coincés dans leur avenir, de trouver une façon de se trouver une utilité et de réenvisager un projet d’insertion. (Le Bataclan)

6.1.1. Regard très largement positif

Rien d’étonnant à ce que l’ensemble des partenaires souscrive aux objectifs de Solidarcité. On voit mal comment un partenariat pourrait exister sans cette condition première.

Je pense que c’est un très bon projet :- Il offre aux jeunes une année pleine où ils peuvent prendre part à la vie

sociale, tout en s’inscrivant hors des cadres classiques.- Il mélange les publics et ce métissage permet d’éviter les stigmatisations.- Il s’articule sur des équipes et permet le travail en groupe, la vie en

groupe.- Il vise à redonner un projet à des jeunes qui n’en ont pas, n’en n’ont plus

ou en ont trop, à des jeunes qui sont un peu perdus ou qui restent un peu flous sur l’avenir.

- Les jeunes voient un peu de tout. Alors, c’est vrai que ce n’est pas qualifiant. La formation que l’on donne, c’est plutôt une initiation à l’animation, ça ne débouche pas sur un brevet d’animateur. Mais c’est ouvrir des portes que certains auront peut-être envie de franchir et creuser plus les choses par après.

- C’est aussi maintenir les jeunes dans un rythme d’activités.

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- Et puis c’est redonner une utilité ; il n’y a rien de pire que de se sentir inutile, je crois. (CFA, paraphrasé)

- Amener les jeunes à reprendre confiance en eux

C’est reconnaître la personne où elle est. Et je pense que… Je m’avance peut-être par rapport à Solidarcité. Mais pour moi c’est reconnaître la personne là où elle est. Et c’est avec ses compétences, avec ce qu’elle peut donner qu’on l’amène à pouvoir mettre sur pieds quelque chose, qui qu’elle soit, d’où qu’elle soit. C’est le même travail que nous on effectue avec les aînés et c’est ça que je pense qui peut redonner confiance en soi à quelqu’un et qui peut permettre soit de redémarrer, soit de continuer. Solidarcité c’est plus redémarrer quelque chose au même titre que Mémoire Vivante. Et, dans la continuité, c’est leur donner l’occasion de continuer. Nous, c’est reprendre des aînés qui sont en perte d’identité, de confiance en eux et leur redonner justement ce dynamisme et cette confiance en eux qui qu’ils soient. Je pense que c’est la même démarche pour Solidarcité avec les volontaires. (Mémoire Vivante)

- Le brassage promu par Solidarcité

Le point fort c’est le brassage, je pense, culturel, intergénérationnel. Parce qu’il y a pas mal de différences entre un jeune de 18 ans et de 25 ans et que l’expérience de vie qu’ils ont est tout à fait différente et je pense que la notion de différence, ça aide vraiment à la constitution de soi. C’est sortir d’un milieu qui est homogène pour rentrer dans une équipe dynamique, hétérogène, toujours positive et c’est très bien d’inviter les gens à se construire en tant que citoyen. Cela devrait être une démarche permanente, pas uniquement à Solidarcité. Mais je constate que dans le projet Solidarcité, il y a la possibilité de se rencontrer, c’est un esprit ouvert. Je reviens avec notre idée de ne pas venir avec des réponses toutes faites, mais de proposer des alternatives et construire ensemble des alternatives vraiment un projet de construction du citoyen. (Mrax)

Surtout vers la fin, ils se connaissent vraiment bien. C’est une force de Solidarcité. L’année dernière, c’était 2-3 filles, je dirais plus intellectuelles qui captaient vraiment bien ce qu’on proposait et des plus « manuels » qui ne saisissaient pas trop ce qu’on leur proposait. Dans d’autres chantiers, c’était l’inverse, c’étaient des filles qui n’avaient jamais peint, qui n’avaient jamais fait de travaux manuels et là, c’était

les garçons qui les soutenaient. C’était vraiment génial d’avoir différents chantiers dans un même groupe, différentes manières d’aborder des choses de la vie ; parce que là, ils s’entraidaient, il n’y avait vraiment pas de jugement. Tu te souviens ? Ils étaient complètement différents, mais je trouvais qu’ils se complétaient super bien. Et parfois, nous on n’arrivait plus à expliquer. On essayait d’expliquer le plus simplement qu’on pouvait. Et quelqu’un du groupe reprenait, reformulait en disant : « Tu vois, c’est parce qu’on avait vécu ça, ça ressemble à ça… ».. Enfin., moi je trouve que c’est une richesse aussi qu’ils puissent vivre d’autres choses ensemble. Mais c’est vrai que parfois c’est dur à gérer dans un groupe quand ça ne se passe pas super bien. (Mission Locale de Bruxelles)

Moi, Solidarcité j’aime beaucoup parce que je trouve qu’à Bruxelles, il y a beaucoup trop peu de choses pour les 18-25 ans. […] On peut encore à 18-25 ans avoir besoin de certaines choses pour essayer de voir plus loin, de découvrir d'autres choses. Et je pense qu’à ce niveau-là, Solidarcité, c’est terriblement intéressant. Je pense que ça peut leur apporter énormément en termes de découverte et d’horizon. Moi, j’ai vu des jeunes à Solidarcité qui étaient vraiment très heureux de faire ce qu’ils faisaient. Et le fait de faire de l’animation leur apportait énormément. Ils posaient énormément de questions sur l’animation, sur le travail d’animateur. […] Ce qui est intéressant aussi, c’est que c’est vraiment multifacette. Juste après, je crois qu’ils faisaient quelque chose avec des personnes âgées et un peu avant ils avaient été réparer un toit, je pense, dans une asbl. (La Gerbe)

- Ouverture à des jeunes qui, sans Solidarcité, auraient eu difficilement accès à ce type d’expérience

C’est à dire que ce sera plus facile de partir avec Asmae avec un groupe comme Solidarcité. Qu’un individu issu de ce groupe vienne seul, ça c’est très clair, c’est très rare. C’est rare qu’on ait des jeunes issus de l’immigration. Si ça l’est, c’est arrivé deux fois, ce sont des filles. D’ailleurs 90% des jeunes qui partent sont des filles. La majorité sont des filles et c’est le cas dans la plupart des groupes, que ce soit ASMAE ou d’autres associations. … Il faut dire aussi que, pour toute une catégorie de jeunes, ils doivent payer leur billet d’avion, logement, nourriture sur place… Donc c’est en moyenne on va dire 1000 euros. Plus les frais de visa, les vaccins, et puis les frais de formation. Donc, si on fait un calcul global, on en est vite à 1000, 1200, 1300 euros pour un

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mois. Ce qui est peu dans l’absolu ; mais ce qui est beaucoup pour un jeune. Pour la plupart des gens qui partent, ce sont les parents qui payent entre 20 et 100%. Donc ce sont des jeunes où il y a papa et maman quoi. Et donc évidemment c’est plus difficile pour des jeunes de ce milieu-là de devoir débourser 1000 euros …. Je crois que c’est une question de priorité pour eux. S’ils ont la possibilité ils le feraient sans aucun problème ; mais comme ils… Avant, quand 2-3 jeunes venaient un jour comme ça en disant : « Voilà, je n’ai pas d’argent, comment je peux faire ? », je m’arrangeais pour quand même les faire partir sur base de ce que tout le monde pouvait payer. Je prélevais le montant qui était nécessaire. Mais ce n’est plus possible. (Asmae)

Je trouve la possibilité d’offrir un large panel d’activités et plein de formations durant un an, d’être volontaire, d’intégrer aussi une notion de solidarité, de partage… je trouve ça très riche. Et les voyages qu’ils organisent aussi, où il y a quand même beaucoup de choses qui se créent dans la relation. Je trouve ça bien. (Maison en plus)

6.1.2. Quelques questions critiques

6.1.2.1. L’après Solidarcité

Un partenaire s’interroge sur l’après Solidarcité, soulignant l’intérêt de prévoir un suivi individuel à plus long terme et regrettant le fait que Solidarcité reste une expérience unique et non reconductible.

Le fait de suivre collectivement, mais aussi individuellement, de permettre un suivi aussi individuel par la suite du projet. Ce que je trouvais dommage, c’est qu’on n’ait accès qu’une fois à Solidarcité. Donc si au bout de l’année on n’est pas encore au clair ou si quelques années après on a envie de recommencer, on ne peut pas, je crois. Et ça, c’est vrai que je trouvais dommage le fait qu’on n’ait qu’une fois sa chance et puis qu’après ce soit fini. Parce que c’est une chouette dynamique et que c’est mieux que de perdre son temps dans la rue. C’est toujours mieux d’avoir accès à un projet tel que celui-là. C’est le seul point un peu négatif que je retirerais de Solidarcité. (Maison en plus)

Il faut toutefois préciser qu’au sein même du projet Solidarcité, l’axe maturation personnelle est précisément conçu pour préparer les

jeunes volontaires à l’après-Solidarcité. Les relais établis avec la Mission Locale de Bruxelles sont bien là pour aider les volontaires au terme du projet.

- L’objectif c’est qu’on puisse accompagner les jeunes à trouver un projet après Solidarcité et en tout cas, qu’on puisse, nous, Mission Locale, servir de relais. C’est pour ça qu’au mois d’octobre, on va faire un bilan, savoir aussi quel fut l’impact de Solidarcité, les aider à voir plus clair pour l’après Solidarcité.- S’ils le désirent, la porte reste ouverte. Certains reviennent. Peu hein, il y en a un ou deux qui repassent, certains plus que d’autres.- Mais ça aussi à Solidarcité dans l’une ou l’autre circonstance c’est de pouvoir rappeler aux volontaires que pour telle ou telle chose, ils peuvent revenir à la Mission Locale et pour eux, ce n’est plus l’inconnu. (Mission Locale de Bruxelles)

6.1.2.2. Le danger de rigidité face à la nécessité de garder une certaine flexibilité

Quelques partenaires s’interrogent au regard du développement de Solidarcité. Ils soulignent le fait que le nombre croissant de volontaires, d’année en année, se traduit par une organisation et une planification croissante du projet. Bien conscients de la nécessité d’une telle structuration de Solidarcité, ils attirent néanmoins l’attention sur le risque d’une rigidité accrue qui irait à l’encontre d’une flexibilité tout aussi fondamentale pour laisser place éventuellement à l’échec ou à l’arrêt d’une formation ou d’un chantier, et surtout à la participation des volontaires au-delà de leur occupation programmée. Plus que juger unilatéralement une certaine rigidité de Solidarcité, ils expriment davantage leur conscience de la difficulté à laquelle Solidarcité est confrontée dans l’équilibre à maintenir entre structuration et créativité.

Je crois que, comme ils grandissent, ils doivent beaucoup plus prévoir et planifier. Donc il leur faut un cadre qui… Je trouve que c’est un peu plus rigide. Mais bon ils sont obligés parce que sinon ça part un peu dans tous les sens. Il y a ça et donc tout est prévu bien à l’avance. Donc on m’appelle et on me dit :« Tiens, Christophe, pour le projet ce sera trois

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jours ». Mais je ne sais même pas encore si il y aura un troisième jour, si le groupe réagit ou pas. On ne sait pas encore dire, mais on prévoit quand même et on met une date. «Tu vas les voir combien de fois ? ». Je dis : « Ca, ça dépend d’un groupe à l’autre. Il y a des groupes, je les vois 3 fois, d’autre 4 fois, d’autre 10 fois,… ». Je comprends bien que pour eux ce n’est pas facile, mais ça rigidifie beaucoup, je trouve, le processus d’accompagnement. Ca vient peut-être aussi de nous. Là je ne sais pas. Ca empêche vraiment les jeunes d’être créateur de leur propre projet. … Par rapport à ce groupe-ci aussi, cette année-ci, c’est d’autres personnes, d’autres expériences qui ont moins accroché dès le début. Enfin, ils étaient moins… … Et puis, dans la programmation, Solidarcité voulait être sûr que ça puisse fonctionner. Donc c’est très difficile de laisser la possibilité aux jeunes de trouver leur partenaire parce que ça prend du temps. Moi si en octobre je fais mes formations, enfin mes animations pour voir s’ils sont intéressés, donc deux en octobre et la troisième début novembre, en les relançant sur un certain nombre de questions (« aller à la recherche de »), il faut compter 2 mois pour qu’ils puissent rencontrer d’autres associations, d’autres partenaires. Donc après 2 mois on est en janvier. Puis faire la formation, février, mars, début avril. Donc c’est très court. Ca c’est un peu la difficulté actuellement. Mais je comprends bien. Je veux dire je comprends bien… … C’est clair que ce serait l’idéal. C’est possible mais j’ai l’impression que dans la rigidité ou dans la structuration actuelle de Solidarcité, ça devient de plus en plus dur d’avoir une flexibilité. Il y a encore un exemple cette année-ci, où le groupe qui est parti au Sénégal en fait à la base il voulait aller en Egypte. En Egypte c’était possible, et ce sera possible l’année prochaine mais fin janvier ou les 15 premiers jours ou 15 derniers jours de juin. Mais ça ne va pas dans la programmation de Solidarcité pour différentes raisons. Et ça moi je trouve ça dommage, pas spécialement par rapport à nos partenaires mais par rapport aux jeunes de Solidarcité, parce que sinon on va rester dans le cadre Sénégal. Parce qu’au moment où c’est possible pour Solidarcité, ce ne sera qu’à cette période-là et donc, pour Asmae, ce ne peut être que le Sénégal. Je trouve ça un peu dommage mais bon, je comprends bien. … Moi par rapport au projet Solidarcité, je me dis que c’est un projet qui est génial sur le fond. Mais ma crainte c’est qu’ils perdent une flexibilité qui, de ce que je ressens doit être inhérente à tout projet éducatif. Il faut pouvoir dire : « Non, ça on ne fait pas » ; « Ah c’est ça qu’ils veulent faire, mais on avait prévu ça. Bon on va leur faire faire ça quand même, même s’ils voulaient autre chose ». Je schématise, mais c’est la difficulté qu’ils

commencent à avoir. Mais ce n’est pas facile. C’est aux jeunes de faire ce qu’ils ont envie de faire et de les accompagner, d’être là comme facilitateur. Mais en même temps il faut qu’ils fassent quelque chose, parce que les financeurs demandent : « Quoi, qu’est-ce que vous faites avec ces jeunes ? ». … Oui, s’il y a un conseil, c’est qu’ils gardent l’esprit du début, c’est-à-dire quand ils étaient de l’autre côté, dans leur petite pièce partagée avec une autre association, à devoir gérer souvent à la dernière minute ; mais où il y avait beaucoup plus de créativité parce qu’ils laissaient un peu plus libres les jeunes. Enfin c’est la seule chose... Mais je sais que ce n’est pas facile. (Asmae)

En même temps, c’est la difficulté que moi je rencontre quand même de manière régulière : ou alors on ouvre les portes et les projets ils viennent et alors je crois que les choses viennent tout naturellement et les choses se passent bien. Et quand c’est tenu par un calendrier, qu’on a des attentes et des objectifs à atteindre, on ne peut pas laisser toute la spontanéité se faire. Parce qu’il y a un moment où l’on doit avoir une production à la clef et je veux dire si on attend une production, il faut pouvoir proposer et diriger et orienter. Laisser tout à fait la créativité des jeunes, ça peut rester très flou et les jeunes peuvent aussi se démotiver parce qu’il n’y a rien qui se passe. C’est très difficile de répondre clairement à une demande et de ne tenir compte que de la parole des jeunes. En tout cas dans un cadre comme Solidarcité où il y a quand même une formation, un contrat d’un an, où on leur propose un panel d’activités, c’est aussi bien de proposer. Mais peut-être que oui, pour un projet de l’année, laisser plus la créativité. Je pense que c’est toujours bien quand ça sort des gens. En même temps, je pense que c’est l’idée aussi de Solidarcité : amener les jeunes à proposer d’eux-mêmes. Donc je pense que ça se fait dans tout le processus. Le fait qu’ils proposent quelque chose permet qu’ils puissent concrétiser leur projet et je pense que s’ils étaient abandonnés, à libre cours, je ne pense pas qu’ils concrétiseraient. (Maison en plus)

6.2. Le regard sur les responsables d’équipe

A propos des responsables d’équipe, les partenaires soulignent les différents rôles qu’ils ont perçus : - cadrer,

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- coordonner, - animer, - stimuler, - motiver, - écouter, ouvrir les portes à la communication, - faire le lien entre Solidarcité et les partenaires, - faire le lien entre les volontaires et les partenaires, etc.

Moi j’ai trouvé Pascal très humble dans son travail. … Il était là en temps qu’éducateur, mais voilà on était là ensemble, pour construire des choses positives entre nous. Son écoute sa douceur, sa sensibilité, moi j’ai trouvé Pascal très bien. … Il savait remettre le cadre et être ferme quand il le fallait. …. Mais je trouvais que c’était vraiment sa qualité. Et avec tout le monde il était à l’aise aussi bien avec la fille voilée, que le marocain que la black, avec tout le monde. Il avait une aisance comme ça. Il restait calme, zen tout le temps. Je trouvais qu’il ouvrait beaucoup les portes à la communication. Moi je ne l’ai jamais vu mettre obstacle à la communication, ni avec les jeunes, ni avec moi d’ailleurs. (Maison en plus)

C’est difficile parce que j’ai pas eu beaucoup le temps. L’impression que j’avais c’est qu’elle devait un peu coordonner la demande des jeunes. Pas vraiment le style d’un prof autoritaire mais quelqu’un qui essaye d’organiser. Et ça c’est très positif. Mais je ne l’ai pas vue dans le quotidien du travail de l’équipe. … Je pense qu’elle stimulait quand il n’y avait pas de participation car c’est toujours difficile quand on commence, les gens ne sont pas habitués, surtout quand on est 8 avec un intervenant extérieur. On propose une dynamique tout à fait différente, c’est pas toujours facile parce que, nous, on invite à faire parler les gens, à ne pas seulement nous écouter. Et là je crois qu’elle a réussi à stimuler la participation des jeunes. Comme elle les connaît, elle posait des questions plus pertinentes peut-être que nous par rapport aux problèmes concrets. (Mrax)

Le premier groupe au départ on animait à deux et maintenant on anime seul avec la personne qui anime le groupe donc Kalid, Pascal ou Yannick. Parce qu’on trouvait ça plus riche aussi eux connaissent les jeunes. Parce que pour les jeunes confrontés à un intervenant extérieur, ce n’est pas toujours facile de parler de moi, je vais devoir parler de mes

qualités, de mes valeurs ou expériences. Je trouve très important d’avoir avec nous une personne qui les suit. … Quand les gens commencent un module ici, ils ne se connaissent pas, le groupe se constitue. Alors qu’à Solidarcité, le groupe existe déjà et nous on arrive comme des experts qui vont leur donner quelques exercices. Et c’est pour ça que je dirais que je souhaite vraiment travailler en collaboration avec la personne relais à Solidarcité. …J’ai plus préparé avec Kalid et toi avec Pascal. Mais on s’est vu avant la formation chaque fois, parce que le groupe il fallait plus ajuster. Enfin, en tout cas, lui il a préparé et présenté des exercices, il les a préparés chez lui. Moi je trouve ça génial. Je trouve aussi qu’ils doivent avoir de la place pour pouvoir préparer, parce qu’ils sont tout le temps sur les chantiers. Même la réunion qu’on a préparée ici, c’est de quatre à six, et lui il avait passé sa journée sur un chantier. Donc il était super crevé. Moi je suis vraiment pour euh…pour affiner pour qu’il y ait encore cette collaboration …c’est vraiment riche Et c’est clair que Kalid il a vécu Solidarcité en tant que volontaire. En tout cas, lui ça l’a vraiment fait avancer. Il est convaincant par rapport aux stagiaires, au groupe. On leur avait dit la pertinence de garder leurs feuilles et tout ça. Kalid leur a expliqué que c’était vraiment important, parce que lui il se souvenait qu’il avait perdu toutes ses feuilles. Je trouve ça vraiment chouette quoi. Et personne n’a perdu ses feuilles… (Mission Locale de Bruxelles)

A mon avis ce n’est pas toujours très simple. A mon avis il y a sûrement un rôle d’animation, animer son équipe, remotiver, relancer. Je crois que ça se passait bien à ce niveau là. Elle a aussi le rôle d’intermédiaire entre Solidarcité et l’association qui les accueillent. Pour moi ça c’est bien passé, je n’ai rien à lui reprocher, ni à personne d’ailleurs. Je suppose qu’elle a aussi un rôle au niveau des bénévoles, de pouvoir parler avec eux, échanger, écouter…Je crois que c’est important. (Nos Pilifs)

Il y a des choses dont les jeunes ne se rappellent pas, ou alors quand on a vu qu’il y avait une erreur par rapport à quelque chose, quand le groupe est réuni le midi ou avant de partir, ou le lendemain faire un rappel à ce niveau-là. Et c’est aussi un rôle de l’animateur. Il y a vraiment tout un côté pédagogique lié au chantier qu’ils doivent gérer et qui est important. C’est pas évident, moi je les admire beaucoup. C’est pas facile, j’ai géré des classes comme ça. Et là, j’étais dans un endroit, je dirais, clos. Je n’avais pas tout du matériel à trimbaler comme ça, à prévoir. Ce n’est pas évident. (Bouillon de Culture)

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Au regard des tâches multiples que les responsables d’équipe ont à assumer, un partenaire trouve que le nombre de volontaires par responsable devrait être revu à la baisse.

Ils étaient combien par animateur ? Ils étaient huit je crois.… Avec tout ce qu’il y a à gérer, c’est trop. Je leur ai dit que je trouvais ça trop. Je limiterais à cinq par animateur, pour faire vraiment un travail convenable, et pas trop stressant et de qualité. Sinon les animateurs vont s’épuiser et le contact risque de se détériorer aussi bien avec les partenaires qu’avec les jeunes et donc ça c’est une erreur pour moi. Je le répète encore mais… … C’est toujours la fin de la journée ou la fin du chantier qui est la plus dure car on doit tout mettre de côté, on doit gérer tout ça, on doit nettoyer les pinceaux, les outils et ça, ça demande de l’énergie de la part d’un animateur, il faut insister. Quand on est deux il y a au moins toujours un relais. S’il y a un conflit, s’il y a un manque de matériel d’un côté, à deux on peut gérer ça plus facilement. On a toujours un relais. Alors que tout seul… moi je ne le ferais pas avec une équipe sur un chantier. (Bouillon de Culture)

7. Les bénéfices

7.1. Les bénéfices pour les partenaires

Les partenaires « chantiers » sont généralement satisfaits du travail qui a été réalisé par les volontaires. Pour la plupart, le service rendu par les équipes de Solidarcité correspond à un réel besoin :

- Financièrement, tout d’abord, la réalisation gratuite de petites tâches manuelles par les volontaires correspond à un réel besoin de petites associations qui, de ce fait, peuvent envisager d’engager des professionnels pour réaliser des travaux plus conséquents. Ceci illustre par ailleurs le fait que le volontariat n’entre pas nécessairement en concurrence avec les

professionnels3 et qu’au contraire, dans certaines circonstances, il facilite l’engagement de professionnels qui aurait pu être inabordable en raison de capacités financières insuffisantes.

On ne peut pas tout demander aux volontaires, tout d’abord parce que le niveau de qualification est ce qu’il est. On leur fait donc réaliser des petites choses (des travaux de peinture, des aménagements de la plaine,…). Bien sûr, ce serait bien s’ils pouvaient refaire l’électricité, plafonner ou refaire le toit… Mais même les petites choses qu’ils font, c’est déjà beaucoup parce que sinon… On n’a pas les moyens de tout faire par des professionnels. Ce ne serait pas possible. Donc, il y a tout plein de petites choses qu’il faut faire autrement. Alors les petits travaux que réalisent les volontaires de Solidarcité nous permettent d’envisager des travaux plus conséquents par des professionnels. Donc ça répond vraiment à un besoin. (Le Coron, paraphrasé)

3 C’est intéressant parce qu’ils ne font pas de concurrence à d’autres. Parce que du point de vue du bénévolat, il y en a toujours qui ont peur qu’on fasse de la concurrence à d’autres. Alors je crois que si ça peut apporter quelque chose aux jeunes, alors je suis tout à fait pour. (Nos Pilifs)

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- En termes organisationnels, ensuite, l’intervention des volontaires permet de soulager les équipes des partenaires. Le coup de main de Solidarcité leur permet de vaquer à d’autres occupations essentielles, mais rendues difficilement réalisables en raison d’emplois du temps trop chargés, en particulier dans les petites associations qui ne reposent que sur un nombre réduit de travailleurs.

Pour les travaux, on a un quelqu’un ici qui est « homme à tout faire ». Mais il ne peut pas tout faire. Donc, quand les volontaires viennent, ça le libère pour d’autres choses. Pour certaines petites choses, comme on ne peut pas payer des professionnels pour tout, si les volontaires ne les avaient pas faites, on aurait dû mettre la main à la pâte pour repeindre tel ou tel truc. Mais quand on fait ça, on a moins de temps pour faire notre véritable boulot : préparer les animations, etc… (Le Coron, paraphrasé)

Une charge pas vraiment, à part pour moi qui était le référent dans le partenariat. C’est une charge dans le sens où il faut prévoir le chantier, les matériaux, comment va se dérouler le chantier… Mais à part ça non. En fait ça a soulagé votre équipe ici d’une partie du travail ?Oui (Nos Pilifs) .

Il y a eu un bénéfice en terme d’encadrement. Parce que même si ce ne sont pas des animateurs spécialisés, la plupart étaient très attentifs aux jeunes. Donc, c’était quand même une aide. (La Gerbe)

La plupart des partenaires soulignent la qualité du travail accompli par les volontaires.

Pas mal de gens à la croix rouge imaginent que le secourisme c’est leur affaire à eux et qu’il n’y a qu’eux qui maîtrise ce genre de choses. Alors une fois qu’on vient avec quelqu’un d’autre qui a un peu moins d’expérience, qui est d’une autre association ou simplement qui est jeune, parfois ça se bloque un peu. Mais j’ai expliqué tout ça lors de mes rencontres avec Solidarcité. Je crois que les jeunes volontaires l’ont bien compris parce que la plupart d’entre eux s’est réellement investi. Quand je dis « investi », j’entends par là tout ce qu’ils ont vécu en secourisme. Ils ont essayé de comprendre la différence entre ce qu’ils ont vu et ce que les enfants apprennent eux-mêmes ; et ils ont mis en œuvre ce qu’il fallait pour que cela marche, tout en sachant encore une fois que

l’investissement demandé à Liège était moins important que celui demandé au Luxembourg car il fallait construire complètement le stand. Donc j’ai été vraiment ravi de l’investissement de Solidarcité, même si je me suis bien rendu compte que les permanents ont dû palier aux absences de certains volontaires. … Mais, d’un côté, ça m’encourage si on recommence l’an prochain. Je sais que je peux compter sur Solidarcité. Et Liège et Luxembourg gardent aussi un bon souvenir de ce qu’il s’est passé. … Je n’ai eu aucun écho négatif, que du contraire. Bien content d’avoir eu un coup de main car il manquait réellement des gens. Et au Luxembourg – tu as eu l’occasion de le voir – par exemple une des qualités qui a été soulevée, c’est que les jeunes connaissaient la matière, parfois même mieux que certains véritables volontaires Croix Rouge. La matière y était, le contenu y était et puis, tu l’as vu, pas de bouchon chez-nous alors que le poste était assez complexe. Et ailleurs, il y avait un manque d’organisation. Enfin je ne sais pas très bien ce qu’il s’est passé. Et donc je crois que le dynamisme des volontaires a été fort apprécié par la Croix Rouge. (Croix Rouge)

Les partenaires « chantiers d’animation » attirent l’attention sur les bénéfices palpables pour leur propre public et inhérents à la rencontre.

Ils ont été sur place et ça a été très intéressant pour le partenaire sénégalais dans le sens où c’est la première fois qu’il y avait un groupe qui était d’un autre milieu social, que les groupes habituels qu’on envoie. (Asmae)

Le projet a été vraiment très riche, parce que tant les jeunes que les aînés ont vraiment appris à faire une réalisation ensemble, ce qui voulait dire apprendre le rythme de l’autre. Pour les aînés, redécouvrir que les jeunes c’est speedant, ça va très vite. Pour les jeunes, de découvrir que les aînés ont un rythme beaucoup plus lent. Et donc on peut le lire on peut le dire, ils l’ont vécu, ils ont dû s’adapter, beaucoup de négociations, de discussions pour arriver à prendre des décisions communes. Ca a été très riche, très chouette, tout le monde a été très content et les aînés à l’évaluation finale de dire : « on voudrait renouveler, continuer à travailler avec les jeunes ». Comme de la part de Solidarcité l’évaluation a été plus ou moins identique, on aimerait pouvoir continuer avec les aînés. (Mémoire vivante)

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Pour nous, le bénéfice en tout cas c’est d’avoir pu permettre une rencontre entre ces jeunes et nos jeunes. C’est indéniable. […] Je pense qu’ils ont vécu quelque chose de l’ordre de la rencontre et ils prenaient un plaisir particulier à discuter avec les volontaires, à essayer de comprendre ce qu’ils vivaient… C’est assez difficile de dire. Mais je sais qu’il y a un jeune qui habite tout près d’ici et qui m’en parle encore maintenant et qui me parlent encore de Franky, de Jérémy. A contrario, quand Franky et Jérémy venaient ici et que ce garçon ne venaient pas, ils s’inquiétaient aussi. Donc, il y avait vraiment quelque chose. Maintenant ce qu’ils en ont retirés, c’est assez flou et ça appartient à chacun je pense. Au niveau des filles, par exemple, elles prenaient un plaisir particulier à se mettre à part pour discuter chiffon, parce qu’elles avaient une jeune fille qui était plus grande qu’elles et qui avait l’âge de sortir, de se maquiller et qui n’était pas animatrice. Elles discutaient. En termes de rencontres, je pense qu’il y a des bénéfices non négligeables parce que, la plupart, ce sont des jeunes qui ont envie et ça se ressent. (La Gerbe)

Si a priori, on s’attend à ce que les bénéfices concernent davantage les partenaires « chantiers », certains partenaires « formations » se disent aussi bénéficier de l’expérience avec Solidarcité :

- Premièrement, les partenaires chargés de formations à la citoyenneté (ou plus largement à des problématiques sociales, culturelles, voire écologiques) considèrent les formations comme un moyen de diffuser leurs idées et de promouvoir un changement social par le biais des volontaires.

C’est dans la même logique mais c’est toujours différent. Mais la logique reste la même car je crois que l’idée dans le groupe de Solidarcité, c’est de réaliser eux-mêmes après des animations dans des maisons de quartiers etc, mais avec différents espaces publics. Là, ce qu’on constate c’est que notre travail peut avoir une résonance. C’est eux-mêmes qui vont transmettre les idées qu’on construit et l’idéal antiraciste. (Mrax)

- Deuxièmement, certains partenaires formations disent accéder, à travers Solidarcité, à un public qu’ils rencontrent trop rarement, voire jamais, et affirment en retirer de nouvelles compétences.

C’est vraiment important. Il y a l’idée que je trouve vraiment intéressante au niveau formatif, au niveau chantier. Je trouve vraiment que ça a un sens. Aussi bien un sens pour les jeunes que pour moi, formateur d’une autre association. Je veux dire, ça nous permet à nous aussi de travailler avec un public avec lequel on travaille rarement. Et avec Solidarcité, maintenant je suis appelé pour faire des animations avec d’autres associations qui travaillent de près ou de loin dans le même secteur, ce qu’on faisait peu. Et ça c’est quelque chose que j’ai toujours voulu. Donc ça je trouve vraiment que c’était quelque part un déclencheur. Je ne sais pas si c’est via Solidarcité, mais je sais que l’expérience que j’ai eue avec Solidarcité me met beaucoup plus à l’aise pour pouvoir le faire en tout cas. Ca c’est très clair. (Asmae)

Si, comme nous l’avons vu, la majorité des partenaires sont très satisfaits du travail accompli par les volontaires et sont persuadés de l’utilité de ce travail, il n’en est pas moins vrai qu’ils sont conscients des limites du service à la collectivité tenant au niveau de qualification des volontaires. Certains considèrent que la qualité du travail reste variable.

La qualité du travail, ça c’est très variable. Ca démarre bien puis c’est fatiguant, c’est salissant, après deux trois jours, ça dérape un petit peu. Donc ils faut remettre un petit peu les choses en ordre ça c’est normal. Donc là il y a un petit peu… Il faut remettre les pendules à zéro à un moment donné et puis on redémarre. Et ça on aurait peut-être dû y faire un peu plus attention, tout remettre en ordre, tout bien nettoyer, remettre les outils en place. Sinon ça dérape un peu, on perd des outils, ça traîne par-ci par-là. Mais dans le cas du chantier ici c’est vrai ils étaient un peu transbahutés, qu’ils avaient travaillé à la verrière le matin et l’après- midi ils étaient envoyés d’un côté du bâtiment et les autres de l’autre côté et ça, ça déstructure un peu le travail. C’est aussi une conséquence de ça. (Bouillon de Culture)

Il faut préciser par ailleurs que le chantier à Bouillon de Culture a été perturbé par la dégradation d’un vitrail causée par deux volontaires. L’opportunité de réparer leur a été octroyée, mais ils ne l’ont pas saisie. Ce manque de responsabilité, le peu de coopération dont ont fait part ces deux volontaires, leur entêtement à ne pas saisir les

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différentes possibilités de réparation qui leur ont été offertes, ont débouché sur une rupture du contrat qui les liait à Solidarcité. C’est au regard de cet événement qu’il faut lire les questions que se pose le partenaire à l’égard du droit à l’erreur en situation de chantier.

Je dirais que c’est dans un milieu scolaire que les erreurs sont permises. Des erreurs ce n’est pas grave ; mais pas dans un chantier. À l’école, c’est purement formatif, s’ils font des erreurs ce n’est pas grave du tout. Alors que dans un chantier on doit avoir un résultat, donc c’est différent, c’est plus compliqué, c’est plus exigeant. (Bouillon de Culture)

Il convient toutefois de spécifier que cet incident, ainsi que les constats posés quant à la qualité variable du travail et le droit à l’erreur en situation de chantier, n’ont pas empêché ce partenaire de se montrer globalement satisfait du travail fourni par les volontaires.

Ca c’est bien passé, je n’ai pas eu de remarques contraires. Ils les membres de notre équipe et notre public étaient contents que les choses avancent …. (Bouillon de Culture)

De façon générale, les bénéfices retirés par les partenaires à travers le travail des volontaires sont bien réels, malgré les limites inhérentes aux objectifs et aux publics de Solidarcité (jeunes relativement peu qualifiés, certains présentant des difficultés personnelles plus ou moins importantes,…). La satisfaction des partenaires ne se mesure pas à la taille des réalisations. Des petites choses répondent aussi à des besoins essentiels et sont d’une utilité criante pour les partenaires.

Oui il y avait surtout le problème météo, faute de temps aussi mais dû un petit peu à l’absentéisme de certains bénévoles. Il y avait des jours ou des parties de journée où ils se retrouvaient à deux or ils devaient être quatre. Donc là il y a eu quelque part un petit problème. Enfin nous aussi de notre part on a eu quelques problèmes d’organisation parce tout n’était pas vraiment prêt. Par exemple, pour la mare, je pensais avoir une bâche d’une certain dimension et puis finalement quand j’ai ouvert la bâche elle était pas de cette dimension là. Enfin c’était une première

expérience et je crois qu’ils ont fait du bon travail, même si des choses qui n’ont pas été faites et d’autres n’ont pas été terminées. (Nos Pilifs)

Par ailleurs, le regard que portent les partenaires, tant sur les volontaires que sur le projet Solidarcité, démontre combien ils sont conscients à la fois de la réalité des jeunes et des objectifs de Solidarcité. Leurs attentes et donc leurs satisfactions sont adaptées au projet. Ils savent qu’ils n’ont pas à attendre du service à la collectivité ce qu’ils pourraient attendre d’un entrepreneur ou plus généralement d’une équipe de professionnels. Ils sont bien conscients qu’en devenant partenaire dans le cadre d’un chantier, ils n’ont pas à avoir les exigences d’un « simple client », mais qu’ils s’inscrivent plus largement dans un projet à vocation sociale ou, tout simplement, qu’ils constituent aussi un terrain favorable à l’enrichissement du parcours personnel de jeunes adultes. A cet égard, les partenaires s’expriment aussi sur les bénéfices qu’ils imaginent que les volontaires ont pu retirer de l’expérience.

7.2. Les bénéfices pour les volontaires

Certains partenaires signalent qu’il n’est pas toujours simple de relever les bénéfices des volontaires à l’issue d’un chantier ou d’une formation, parce que la prise de conscience des bénéfices par les volontaires eux-mêmes est souvent décalée dans le temps. Les partenaires attirent l’attention sur le fait qu’il faut parfois du temps et d’autres expériences pour que les volontaires puissent tirer, en profondeur, les enseignements de chantiers et de formations.

C’est sûr que ce n’est pas toujours facile. Des chantiers peuvent être difficiles et certains, à l’issue de ces chantiers peuvent se focaliser sur les difficultés. Alors, parfois, ils peuvent être satisfaits d’avoir dépassé leurs limites ; parce qu’à la limite, plus c’est difficile et plus c’est satisfaisant. Mais il faut aussi se rendre compte que parfois, les bénéfices, on s’en rend compte longtemps après. Il faut parfois que le temps passe avant de

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se retrouver dans une situation où l’on peut faire appel à ce qu’on a appris. Puis il faut que ça mature. (CFA, paraphrasé).

- Moi je crois que ça laisse quand même des traces assez positives. Quand ils en parlent après à la fin de l’année c’est une des animations qui leur laisse un bon souvenir. Il y a quand même un processus de décantation qui se fait, même si au départ ils sont un peu interloqués. J’ai l’impression que ça fait son petit bonhomme de chemin quand même. J’ai quand même l’impression que ces six jours participent à leur évolution, vraiment. Ce sont des leviers qui font que ça bouge et que ça se met en place. Et ce n’est pas spécialement se raccrocher à du concret comme la réalisation d’un CV, il y a quand même des déclics qui se font. - Un des objectifs, c’est que pour eux ce soit moins flou, s’il y a eu deux ou trois déclics, s’ils ont des idées qu’ils n’avaient pas au départ, c’est déjà quelque chose de gagné. Et peut être que ça n’apparaîtra que plus tard. Peut être que pendant un an ou deux, ils vont encore passer par des petits boulots, mais s’il y a quelque chose qui reste…- Moi je dirais aussi que plus tard, s’ils reviennent parce qu’ils viennent d’arrêter une formation, parce qu’ils ont besoin de faire un CV, et qu’ils viennent frapper ici là je me dis qu’on a réussi quelque chose. (Mission Locale de Bruxelles)

Parmi les bénéfices pour les volontaires, exprimés par les partenaires, retenons : - le renforcement de la confiance en soi par le travail accompli et

l’utilité de celui-ci,- le développement personnel, une meilleure connaissance de soi à

travers le travail de groupe,- l’apprentissage de la tolérance, de la différence et de la

possibilité de mener à bien des choses ensemble même dans l’altérité,

- la remise en question de soi par la découverte de l’altérité,- l’ouverture d’esprit et l’acquisition d’aptitudes à l’apprentissage,- l’apprentissage de compétences plus techniques, de

connaissances mobilisables,- l’apprentissage de capacités d’expression,- l’acquisition d’une hygiène de vie et d’un certain réalisme.

7.2.1. Le renforcement de la confiance en soi par le travail accompli et l’utilité de celui-ci

- Même si on aborde parfois des thèmes qui leur semblent loufoques, on essaye de trouver le bon et le positif chez chacun, c’est vrai que certains jeunes croient qu’ils ne savent rien faire, qu’ils n’ont pas de qualité et on arrive à leur en trouver et même avec la réalité de ton vécu, il y a moyen de faire une formation, de réaliser un travail etc. C’est important de travailler sur le positif de chacun.- La grosse majorité ont vraiment un problème de confiance en soi.- Quand on arrive à mettre un peu de contenu dans une enveloppe qui paraît vide au départ. En fait, il y en a qui se disent qu’ils n’ont aucun contenu dans leur passé, et là on essaye de mettre un peu de contenu en terme de choses qu’ils ont quand même réalisées. Et là, Solidarcité nous aide beaucoup, par le vécu par exemple sur les chantiers ou les formations, qui sont quand même assez riches et variés. Parler de ce qu’ils ont fait avant en termes même de loisirs ou d’activités familiales. Donc, on essaye de remettre un peu de contenu. Et après ça finalement ils peuvent se dire : « Mais oui j’ai fait quelque chose de ma vie ».- C’est pour ça que le groupe est très intéressant parce qu’ils se renvoient mutuellement des actes positifs à ajouter dans leurs enveloppes respectives. Et, à travers des exercices, par exemple : « Tu t’occupes de ta petite sœur dans ta famille de huit enfants, tu le fais bien et souvent … », ça c’est du positif. Ca aide à reprendre de la confiance en soi.- Et le fait de s’exprimer devant les autres, ça c’est quelque chose qu’ils n’ont jamais fait, ça aussi ça participe à la mise en confiance : « J’ai pu parler, on m’a écouté, parce qu’on m’a répondu, on m’a renvoyé un feedback positif ». (Mission Locale de Bruxelles)

7.2.2. Le développement personnel, une meilleure connaissance de soi à travers le travail de groupe

Pour moi le point fort c’est la dynamique du groupe et ils préparent vraiment les jeunes dès le départ dans une bonne dynamique de groupe pour mieux se connaître eux-mêmes par rapport à un groupe et alors créer une dynamique à partir de là, ça c’est un des points forts vraiment. … Ce que j’ai apprécié, c’est qu’avec les équipes, on a accès au développement de la personne dans un travail de groupe. Il y a vraiment une dynamique de groupe qui est lancée avant le chantier pour mettre les

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jeunes en situation, par exemple avec des jeux de rôles et des tas de choses qui dynamisent le groupe. C’est vraiment très important et je trouve ça vraiment fondamental d’avoir une certaine cohésion dans le groupe. Ils se connaissent bien, ils se sont déjà affrontés dans des jeux ou plus agressivement peut-être. Mais voilà, ils se connaissent et ça se sentait dès le départ, c’est important quoi. (Bouillon de Culture)

Ca a été intéressant par rapport à toute la dynamique que les jeunes… Enfin la dynamique de groupe qui a été mise en avant et surtout je crois le côté découverte personnelle. Je vois en tout cas 2-3 jeunes de ce groupe-là où ça a été un révélateur, ou une prise de conscience qu’ils savent prendre les choses en mains. Enfin j’en vois 2-3 qui ont vraiment : « Wouaw, je suis fier d’avoir fait tout ça, c’est moi qui l’ai fait et j’ai pu aussi changer mes idées négatives ou mêmes positives par rapport au Sénégal ou à l’Afrique. Donc voilà. (Asmae)

7.2.3. L’apprentissage de la tolérance, de la différence et de la possibilité de mener à bien des choses ensemble même dans l’altérité

Moi je trouve que c’est quelque chose de vraiment intéressant parce qu’il y a une ouverture. Je vais dire ça remplace le service militaire en gros, enfin l’idée de base même si…c’est de mettre des gens qui ne se croiseraient pas dans la vie ou sur obligation autre et de leur faire passer un temps. Donc ça je trouve ça très riche, très important, d’autant plus dans une époque où tout est de plus en plus bien ghettoïsé. Donc je trouve ça vraiment très intéressant d’ouvrir à ça. Il faut qu’ils le gardent. Ils ont de plus en plus difficile il me semble à garder ça, d’avoir des jeunes belges d’origine belge. Ils ont de plus en plus de jeunes d’origine étrangère. On a 1 ou 2 belges et puis 6-7… Enfin c’est ce que je crois. Je ne sais pas si au niveau statistique… (Asmae)

Et bien moi je pense que c’est une découverte de l’autre, ce n’est pas propre au projet Solidarcité mais au projet intergénérationnel . C’est que dans notre société actuelle, il y a des cloisonnements qui se font …. Dans le cadre des projets intergénérationnels, donner l’occasion à ces publics de se rencontrer, c’est apprendre réellement à se connaître et à se dire qu’on peut cohabiter. Il ne faut pas qu’on soit 24h sur 24 ensemble, que chacun garde ses spécificités, le besoin de pouvoir vivre les moments qui lui sont propres mais apprendre à se connaître de sorte que l’on peut être complémentaire et qu’on peut cohabiter. Et je pense que c’est en

mettant sur place des moments de rencontre – pas les petits géraniums à Pâques, c’est pas ça – c’est réellement une rencontre à plus long terme qui permet une réalisation, qui permet des échanges, qui permet de se découvrir. Je pense que c’est très riche. J’y crois, et je pense que c’est quelque chose d’indispensable dans une société. On ne peut pas avoir des vieux, des jeunes, des adultes chacun de son côté et se dire que c’est une société qui donne une bonne qualité de vie. … C’est indispensable sinon on retombe dans les clichés. Que tout les jeunes sont… que tous les maghrébins sont… et que tous les jeunes de cette classe sociale-là sont… et c’est pareil au niveau des personnes âgées …. Et tant de la part des jeunes que de la part des aînés, c’est nécessaire de pouvoir découvrir que les jeunes ne sont pas tous pareils et que les vieux ne sont pas tous pareils. C’est important dans l’apprentissage de la tolérance, de la différence de l’autre, c’est ça qui est aussi riche chez Solidarcité, c’est d’apprendre à monter des projets avec des gens qui ne sont pas comme nous, qui ont une autre éducation, un autre mode de vie, une autre culture et apprendre à mener à bien des choses tous ensemble. Ce sont des jeunes différents, des vieux différents, des générations différentes. Tout ça mis ensemble arrive à concrétiser des projets. (Mémoire Vivante)

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7.2.4. La remise en question de soi par la découverte de l’altérité

Je trouve ça intéressant pour eux aussi d’avoir cet élément extérieur qui les remet en question. … D’abord il y a une grande différence entre le fonctionnement en tant que sphère publique et sphère privée en Belgique et au Sénégal ou en Afrique. Au Sénégal, il n’y a pas de sphère privée ou elle est minime par rapport à ici. Tout est du domaine publique. Je vais à la toilette, c’est le seul moment où je peux faire ce que je veux ; mais à partir du moment où je sors de la toilette, mon acte il ne peut pas être personnel ou c’est difficilement compréhensible… Si je sors du groupe pendant 5 minutes, dans le fonctionnement sénégalais, ça ne va pas. C’est que j’ai un problème : soit je râle contre un Sénégalais, soit je râle contre moi, soit j’ai un problème,… Donc ce n’est pas du tout facile pour n’importe quel groupe, que ce soit Solidarcité ou autre. Ce n’est pas du tout facile d’intégrer l’idée que je n’ai plus la même liberté. Et en ça je trouve ça intéressant c’est que d’une manière ou d’une autre, on se rend compte qu’il y a des normes, qu’on le veuille ou pas. Il y en a partout et ça peut être pire dans certains endroits. Enfin je ne sais pas si je m’exprime bien, mais je crois que ce genre de chose est important parce que ça fait miroir. Ca fait : « Hou là, ça fonctionne comme ça ici … » donc automatiquement, ça m’oblige à me remettre en question par rapport à : « Tiens, au fond, quelles sont les bases, sur quoi je m’appuie ici, est-ce que c’est juste, pas juste ? ». (Asmae)

Je pense que c’est un espace où on peut vraiment discuter. Montrer comment on perçoit l’autre. Là aussi on a des exercices en sous-groupe où on peut dire. Notamment des exercices sur les qualités, où on se cote : « par rapport à l’autonomie, comment je me positionne, quelle cote je me donne ; et les autres, comment je les perçois et quelle cote je leur donne ? ». Et alors on a le regard de l’autre et on se regarde le plus objectivement possible, puis argumenter. Et suite à ça on peut avoir une discussion avec quelqu’un qui se croyait super autonome, alors qu’un autre lui avait mis « – 2 » : « Alors, est-ce que tu peux m’expliquer avec un exemple concret ». Enfin, ça permet aussi de voir comment on est vu par les autres et comment on se voit. …Non seulement il y a une diversité dans le groupe ; mais ils rencontrent divers publics grâce à Solidarcité ; vraiment, ça les enrichit. (Mission Locale de Bruxelles)

7.2.5. L’ouverture d’esprit et l’acquisition d’aptitudes à l’apprentissage

Dans le cadre des formations, on n’a pas une conception des gens qui vont faire un séminaire. Pour nous c’est très important de travailler avec le savoir propre du groupe, se rendre à l’évidence qu’ils ont un savoir et qu’ils peuvent travailler avec ça. Ce n’est pas quelqu’un de l’extérieur qui va apporter la vérité mais c’est eux-mêmes qui vont apporter une alternative par rapport à la situation. Et je pense qu’on a ouvert quelques portes par rapport à la réflexion et je suis convaincu qu’il y a dans l’esprit de ces gens-là effectivement la possibilité de s’ouvrir et avoir des réflexions différentes par rapport aux réflexions qu’ils avaient auparavant. En ce qui concerne le brassage à Solidarcité, c’est plus facile de parler de multiculturalité quand il y a des horizons culturels différents. Alors, on parle concret. Le concept de culture est un concept en mouvement et c’est plus facile quand il y a des différences dans l’équipe. Enfin, je pense que c’est tout à fait positif par rapport au travail qu’on réalise. (Mrax)

7.2.6. L’apprentissage de compétences plus techniques, de connaissances mobilisables

Au niveau technique je ne sais pas s’ils apprennent des choses. Enfin ils ont une formation, de deux jours semaines, je pense, en fonction un petit peu des chantiers. Donc là je suppose qu’ils apprennent un petit peu de techniques mais pour eux même dans leur vie... (Nos Pilifs)

Je ne sais pas si je l’aurais fait moi-même en quittant les études parce que j’ai suivi diverses lignes mais j’en ai parlé autour de moi et ça intéresse les jeunes de vivre ce type d’expérience. Je pense que je n’ai pas eu beaucoup de difficultés avec les jeunes parce que le sujet les intéressait. Le secourisme, ça les touchait. Je pense à « bosses et bobos », qui s’est fait avec le troisième groupe, avec le groupe de Yannick. Et même si les jeunes avaient peu d’expérience d’animation, donc de contact avec les enfants, ils se posent quand même énormément de questions au sujet de leur propre santé. Le sujet les intéresse donc forcément, le dialogue peut se faire. C’est profitable pour tous (Croix Rouge)

7.2.7. L’apprentissage de capacités d’expression

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Les bénéfices d’un projet vidéo pour les jeunes ? C’est vrai qu’ils ne vont pas devenir cinéastes ; quoique l’un ou l’autre sont revenus nous voir par la suite. Mais la vidéo est un outil formidable dans le sens de la liberté d’expression. Ils découvrent un autre moyen de s’exprimer. Puis quand on fait un film, quand on fait un documentaires, on rencontre plein de personnes intéressantes, on discute sur des sujets. Et on réalise quelque chose. Les discussions, les réflexions débouchent sur une réalisation concrète, sur un support. Les jeunes ont la satisfaction d’avoir réalisé quelque chose. Aussi, la diffusion publique est très importante. Les petites fictions qu’on avait réalisées l’année passée, elles sont passées sur Télé-Bruxelles, par exemple. Les documentaires de cette année, on les a présentés au Botanique. C’est important la diffusion, parce que c’est elle qui fait la communication. Le retour du public, c’est en soi une évaluation. Ca permet de juger si le message est passé, si on a touché des gens. Ca permet de juger ce qu’on appelle la « portée universelle ». Et puis si le retour est positif, c’est valorisant pour tous. (CFA, paraphrasé)

7.2.8. L’acquisition d’une hygiène de vie et d’un certain réalisme. Structuration.

Si on arrive à ce qu’ils gardent une espèce d’hygiène de vie, faire un peu attention à eux, à faire ce qu’ils aiment, ce qu’ils peuvent faire et qu’ils envisagent leur vie d’une manière un peu plus réaliste… S’ils abordent la vie comme ça alors on a vraiment réussi notre coup. (Mission Locale de Bruxelles)

Je pense qu’il y a certains jeunes aussi qui trouvaient un intérêt aussi en terme de structuration. J’ai notamment discuté avec un jeune de Solidarcité qui disait : « Pour moi, Solidarcité c’est bien parce que je dois me lever le matin. Toute la semaine je dois y aller, j’ai des horaires, je dois préparer des trucs. Si je n’avais pas ça, je ne le ferais pas. Parce que je ne vais plus à l’école et donc je me lèverais à deux heures ». Donc, ça, au niveau de la structuration du temps, c’est très important. (La Gerbe)

8. Les évaluations

Même s’il convient de signaler que, pour des questions de temps ou d’organisation propres aux partenaires, certains chantiers ou formations n’ont pas vraiment fait l’objet d’une évaluation collective rassemblant le partenaire et les volontaires, de façon assez massive, la majorité des partenaires semblent satisfaits des temps d’évaluation finale.

Il y a eu une évaluation avec les volontaires. Avec Yannick et Simon aussi. On a pu avoir un échange pour voir les choses qui c’étaient bien passées ou moins bien passées. Et je crois que tout ce qui s’est dit à cette petite réunion était tout à fait juste. (Nos Pilifs)

On a eu une rencontre avec l’ensemble de l’équipe, des travailleurs et volontaires pour faire le point sur ce qui s’était passé. C’était très convivial. On a mis le point sur quelques petits dysfonctionnements, mais pas grand chose. Et visiblement, un des points forts de ce qui ressortait, c’était le contact entre nous et l’équipe de volontaires qui s’étaient sentis bien, qui avaient apprécié. (Le Bataclan)

9. Les perspectives

9.1. Reconduire le partenariat : oui, mais pas à tout prix

A la question de savoir s’ils étaient prêts à renouveler l’expérience, aucun partenaire n’a exclu cette possibilité.

Certains se montrent très enthousiastes et très demandeurs de reproduire cette expérience.

Pour l’avenir, la Croix Rouge pourrait y mettre du sien dans le sens ou par exemple à Liège on pourrait donner une place plus importante aux volontaires de Solidarcité, qu’ils ne soient pas là juste pour boucher les trous, qu’il y ait plus de créativité. Je crois aussi qu’on aurait pu faire un effort au niveau de la Croix Rouge pour proposer quelque chose plus en lien avec ce qu’ils vivaient et non pas le secourisme générique qui leur a finalement apporté quelque chose, mais qui pourrait être plus riche. Dans l’autre sens, il y a d’autres expériences qui peuvent être très

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profitables pour eux et qu’ils pourraient vivre à la Croix Rouge, notamment un module qui est animé par nos collègues du service international, qui travaillent sur les normes humanitaires …. Donc voilà aussi un thème qui peut être intéressant à exploiter. On travaille aussi le don de sang. Voilà encore un acte citoyen. Donc si les jeunes sont prêts à s’investir de leur côté, il y a de quoi faire à la Croix Rouge. Ce serait un travail de mettre tout ça en musique, mais ça peut être profitable pour eux et pour nous aussi. Pour moi l’expérience était enrichissante. … La Croix Rouge est toujours en recherche de volontaires. Donc dès l’instant où il y a des gens qui s’investissent à mener des actions, la Croix Rouge est intéressée. Et c’est bon pour elle. Donc imaginons que l’an prochain l’équipe ait envie de s’investir pour le don de sang par exemple… On manque de gens qui s’investissent à ce niveau là : peut-être organiser une collecte, faire un peu de pub lors d’un stand ou d’un événement particulier. Donc la Croix Rouge a à y gagner, c’est sûr. Je pense qu’être partenaire d’organismes comme Solidarcité peut redorer un peu l’image de la Croix Rouge. La Croix Rouge a une image je crois très fermée. Donc elle est ouverte au grand public, mais ceux qui y rentrent restent assez bien repliés sur eux-mêmes. Et donc c’est un image d’ouverture qui est positive. (Croix Rouge)

D’autres sont preneurs, mais moyennant quelques aménagements. Par exemple, pour assurer une meilleure présence auprès des volontaires, le partenaire Nos Pilifs envisage de reconduire l’expérience, mais à une autre période de l’année. La disponibilité des travailleurs de cette association serait plus grande en hiver et, pour cause, les autres périodes de l’année sont des périodes de « rush jardinier ». Toutefois, ce réaménagement ne serait pas sans conséquence puisque accueillir les volontaires en hiver exclurait toute possibilité de chantier extérieur.

Oui nous sommes prêts à reprendre ça. Mais peut-être pas à cette période là. Parce qu’on à des périodes où c’est un peu plus intense. C’est vrai que vers février mars c’est un peu plus calme donc ce serait mieux mais pas pour des chantiers extérieures. (Nos Pilifs)

D’autres enfin, sans exclure la reconduction d’un partenariat, attirent l’attention sur les risques d’une pérennisation à tout prix. Ils se

refusent à rentrer dans une logique de reproduction mécanique de chantiers d’année en année, considérant que la condition première du partenariat est de répondre à des besoins réels. Reconduire annuellement un chantier sans plus s’interroger sur son utilité risquerait de déboucher immanquablement sur une logique strictement occupationnelle qui s’éloignerait des objectifs du projet. A cet égard, les partenaires sont sur la même longueur que Solidarcité.

Ca risque de se faire, oui. Mais il faut trouver un projet. Je ne pense pas qu’on va être à courir après Solidarcité et à s’accrocher à Solidarcité. Je pense que c’était très chouette comme expérience. Je pense que ce groupe-ci l’a vécu. Mais il faudrait un projet. Mais je ne serai pas à dire : « OK, qu’est-ce qu’on va faire pour qu’on puisse travailler avec Solidarcité ». CA, je pense que ce n’est pas la bonne manière de travailler. Mais si effectivement un projet se dégage et qu’on peut y intégrer Solidarcité, pourquoi pas. Moi je suis tout à fait favorable, justement dans cette idée de rencontre. Dans la rencontre, il y a justement quelque chose de fort qui se passe et si on multiplie trop souvent l’expérience, il va y avoir un petit côté lassant, parce qu’eux changent chaque année, mais nous, notre groupe il reste, il est continu. (La Gerbe)

Je ne dis pas l’année prochaine. Il faut quelque chose de concret. Je ne pense pas non plus qu’il faut faire appel à Solidarcité comme de la main d’œuvre à bon marché. Et un truc plus d’animation, mais on risque d’être dans quelque chose de compliqué. […] Maintenant, de la part de Solidarcité, pourquoi pas, si on sait qu’un chantier ponctuel s’insère dans une formation globale, oui, peut-être. […] Et puis il faut qu’au niveau de l’organisation ça clope. Parce que la semaine, en journée, on fait du suivi individuel et ça nécessite une qualification. Par contre, dans la mesure où c’est modulable, pourquoi pas du côté de l’animation. Mais le problème, c’est que les animations, c’est surtout les week-ends ou des camps pendant les vacances. Mais il y a quand même quelque chose d’assez scolaire à Solidarcité au niveau du temps. […] Tout le monde ici serait partant pour renouveler, mais il faut trouver un projet et des moments. (Le Bataclan)

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9.2. La participation des volontaires à la préparation des chantiers et formations

Nous l’avons vu dans le point concernant la préparation des chantiers et formations, la question de la participation des volontaires à cette préparation est loin de faire l’unanimité.

Certains ne l’envisagent pas, parce que ça nécessiterait trop de temps. D’autres y pensent.

Moi dans mon idéal, ce serait de mettre les jeunes et les aînés en présence et qu’on sente qu’ils décident de ce qu’ils ont envie de faire. Parce que c’est vrai que ça peut être très difficile à gérer pour les responsables des jeunes, de pouvoir cadrer le projet, pour qu’il soit quand même quelque chose de pédagogique tout en étant divertissant. Nous c’est notre manière de fonctionner. Et je me souviens, je ne sais pas si c’était dans le cadre du projet film ou dans l’autre, mais je me souviens de deux jeunes arrivés beaucoup plus tôt que prévu, bien avant l’heure du pique-nique. Ils se sont installés et, bon, les aînés sont toujours là beaucoup plus tôt et ils leur demandent : « Et alors, qu’est-ce que vous pensez du projet ? ». Et les jeunes : « Mais on ne sait même pas ce qu’on est venu faire,… ». Et donc on peut se dire d’une part qu’ils étaient peut-être terriblement discrets. Mais on peut se dire aussi qu’ils entrent peut-être dans un projet imposé qui n’est pas spécialement leur désir et leur investissement et que peut-être justement l’investissement serait différent s’ils pouvaient eux-mêmes mettre un projet sur pied avec les aînés. … J’envisagerais plutôt cette démarche-là. Ca pourrait être beaucoup plus motivant pour les jeunes et ça pourrait être beaucoup plus représentatif de ce qu’eux ont envie de faire. Voire à la limite, que les animateurs préparent ça avec eux à l’avance pour éviter que ça prenne trop de temps parce que c’est vrai que c’est quelque chose qui prend parfois deux à trois séances, ne serait-ce que pour arriver à savoir ce qu’on va faire pendant l’année. (Mémoire vivante)

9.3. Prolonger un chantier manuel par un chantier d’animation au sein de la même association.

Les volontaires avaient émis l’idée de prolonger les chantiers manuels au sein d’associations par un chantier d’animation, afin de faciliter les rencontres des différents publics et de mieux saisir, en pratique, les enjeux sociaux sous-jacents, ce qui augmenterait encore le sentiment d’utilité du travail accompli.

A cet égard, les partenaires ne sont pas non plus unanimes.

Certains ne sont pas prêts à répondre à cette demande, en mettant en avant un problème de responsabilité et de compétences, surtout lorsque les animations portent sur une thématique qui nécessite une certaine maîtrise.

Que les volontaires participent aux animations, ici, ça me paraît difficile. Tout d’abord, animer, c’est un boulot, c’est des techniques et surtout de l’expérience, pour tenir l’attention d’un grand groupe d’enfants, pour les intéresser. Puis on travaille surtout avec des écoles, des classes. On ne peut pas faire n’importe quoi. Et puis surtout, les animations qu’on fait, c’est sur le thème des relations Nord-Sud. Ca nécessite de déjà bien connaître la question pour pouvoir en dire quelque chose. C’est particulier. C’est pas seulement animer, c’est aussi connaître le sujet. (Le Coron, paraphrasé)

Il faut préciser que jusque là, ce partenaire a été concerné exclusivement par des chantiers manuels. Sans doute n’est-il pas précisément au fait des réalisations de Solidarcité en matière d’animation ou d’accompagnement d’enfants (rallye Benjamin secouriste, accompagnement de groupes d’enfants à vélo,…). Peut-être qu’une présentation de ces réalisations, des possibilités réelles et des garanties de Solidarcité apaiserait quelques inquiétudes.

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D’autres partenaires trouvent l’idée intéressante, mais ils y opposent un principe de réalité lié au calendrier. En effet, dans bon nombre d’associations, les animations se réalisent le soir, le week-end ou encore dans les périodes de vacances. Autant de moments qui « sortent » des plages horaires prévues pour les volontaires par Solidarcité.

On l’a évoqué. Maintenant, au niveau animation, on a des animateurs qui viennent encadrer des ateliers et donc là, des volontaires pourraient s’intégrer dans l’un ou l’autre atelier, mais pas en groupe. Ce serait plutôt une intégration individuelle dans tel ou tel atelier pour renforcer l’animation. Ca c’est toujours possible pour eux. Et même éventuellement de se proposer après comme animateur. Des contacts entre les jeunes et notre public, de façon ponctuelle peuvent être possibles aussi sur des projets plus pointus, des fêtes ou des événements. (Le Bataclan)

A Bruxelles, il existe une activité un peu semblable au rallye Benjamin secouriste, mais qui se déroule en week-end. Donc tous les jeunes qui suivent des activités en section locale et non pas en école sont rassemblés une fois par an, un week-end avec des animations, avec des animateurs Croix Rouge. Donc là on aurait pu y mêler les volontaires de Solidarcité. Mais au niveau dates, ça n’allait pas...(Croix Rouge)

Enfin, certains partenaires sont prêts à envisager ce type d’articulation entre chantier manuel et animation, afin de renforcer la cohérence des chantiers et de promouvoir les rencontres et l’enrichissement mutuel de leur public et des volontaires.

J’aurais bien voulu qu’ils rencontrent des jeunes, surtout des jeunes de leur âge. C’est vrai que les petits sont passés dans les ateliers et qu’ils ont rencontrés des petits. C’était très chouette d’ailleurs. Mais qu’ils rencontrent des jeunes de leur âge qui font partie de l’association ici, ça ne c’est pas fait. Je crois que je n’ai peut-être pas été assez présent, assez derrière pour que ça se passe vraiment. Ce qui fait qu’il y a une rencontre uniquement avec les animateurs, mais les jeunes n’étaient pas là et ça c’est dommage. Là on a raté quelque chose. Ce qu’on aurait pu faire aussi c’est quand la verrerie était terminée, qu’ils puissent la voir

terminée. C’est très valorisant. Et, à ce moment là on fait une petite fête et on n’est pas pris par les chantiers. On avait prévu quelque chose et ça n’a pas pu se faire et ça a aussi joué dans la fin du chantier, ça c’est dommage. Mais c’est vrai que je ne sais pas comment ça fonctionne mais chaque année c’est d’autres équipes donc après un an ils sont relâchés dans la nature donc il faudrait pouvoir faire ça à la fin de l’année.Ou à la limite, on pourrait aussi avoir à la fois un chantier manuel et un chantier d’animation. Ce sont les jeunes qui avaient envie de ça. C’était des volontaires qui étaient demandeurs de mieux percevoir, d’essayer de mieux comprendre les enjeux, à l’intérieur des murs qu’ils avaient repeints. C’est vrai que là on aurait dû organiser ça. Mais je crois que les animateurs de Solidarcité n’ont peut être pas assez insisté là-dessus. C’est vrai que ce serait vraiment intéressant mais ça prend du temps aussi. Il faut se mettre d’accord par exemple avec les plus petits pour qu’ils puissent organiser quelque chose. On doit déjà prévoir ça presque en même temps qu’on met le chantier en route, avant même que le chantier soit en route, voir à quelle date ils viennent faire une animation. (Bouillon de Culture)

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