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Journées d'études « Savoirs « citoyens » et démocratie participative dans la question urbaine » des 6 et 7 février 2009. Hicham Mouloudi. Travail en cours, merci de ne pas citer sans l'autorisation de l'auteur. La participation des citoyens dans la production des grands projets urbains au Maroc: cas des projets d’aménagement de la vallée du Bouregreg et de la Corniche de Rabat 1 INTRODUCTION A l’instar de plusieurs villes marocaines, Rabat connaît actuellement de profondes transformations économiques et sociales qui ne peuvent manquer d’affecter sa morphologie et son organisation spatiale. Ces transformations résultent d’un nouveau contexte politique et socio-économique national, marqué par le lancement de plusieurs projets définis au plan national. Parmi ces projets, l’approbation du Schéma National d’Aménagement du Territoire (SNAT) a confirmé que l’avenir du Maroc se jouerait principalement dans les villes et la Vision 2010 2 a érigé le tourisme en priorité nationale. A Rabat, le projet d’aménagement des berges de la vallée du Bouregreg 3 et celui de la Corniche de Rabat 4 font partie des opérations d’envergure programmées dans ces cadres (Voir Figure ci-dessous). Le but de ces deux projets est de renforcer l’image et la compétitivité de la ville de Rabat, à l’instar de ces homologues méditerranéennes (CARRIERE J-P., 2002), par la revalorisation urbaine de zones dégradées mais présentant de grandes potentialités urbaines et environnementales. L’analyse effectuée dans le cadre de cette recherche 5 a montré qu’afin d’éviter de subir une nouvelle situation de fait accompli, les habitants des deux villes concernés par ces projets, ont entrepris plusieurs initiatives dont la production de savoirs citoyens en est l’illustration la plus marquante. Principalement techniques, ces savoirs, plus ou moins diffusés, ont contribué sinon à reconsidérer certaines décisions urbaines, du moins à mettre en œuvre des actions sur le terrain. Toutefois, nous estimons qu’actuellement au Maroc, et particulièrement à Rabat, ce type de savoir citoyen est nécessaire, mais pas du tout suffisant eu égard aux enjeux de ces grands projets urbains. La présente contribution a pour objet de rendre compte des différents savoirs citoyens produits à travers la restitution de leur nature, du mode de leur diffusion et des suites qui leur ont été données. 1 Nous tenons à remercier vivement tous les représentants des entités citées dans cette contribution qui ont bien voulu mettre à notre disposition toute la documentation nécessaire à l’élaboration de cette recherche. 2 La Vision 2010 est une stratégie de développement touristique volontariste qui s’appuie sur une vision à long terme confortée par un contrat-programme chiffré et détaillé. Afin de réarticuler le tissu économique national sur d’autres régions que celles faisant partie de l’axe Kénitra-Rabat-Casablanca, la Vision 2010 a prévu l’élaboration du Plan Azur. Ce projet vise la création de six nouvelles stations touristiques intégrées sur six sites prioritaires, à savoir : Saïdia (Berkane), Lixus (Larache), Mazagan (El Haouzia, El Jadida), Mogador (Essaouira), Taghazout (Agadir) et Plage Blanche (Guélmim). 3 Le projet d’aménagement des berges de la vallée du Bouregreg s’étend sur une superficie totale de 6000 ha. 4 Le projet d’aménagement de la Corniche de Rabat est prévu sur une superficie de 330 ha. 5 Cette contribution est issue de travaux de recherches conduits dans un double cadre : 1- une thèse de géographie en cours, dirigée par Pierre Signoles (équipe EMAM, UMR 6173 CITERES, CNRS et Université de Tours) en collaboration avec Taoufik Agoumy (Université Mohamed V, Rabat), et intitulée : « Les projets urbains des fronts d’eau de Rabat : systèmes d’action et stratégies d’acteurs ». 2- un mémoire pour accéder au grade d’architecte en chef, dirigé par Aziz Iraki (Institut National d’Aménagement et d’Urbanisme, Rabat) et soutenu le 7 novembre 2007 au ministère de l’Habitat, de l’Urbanisme et de l’Aménagement de l’espace (Maroc) sous le titre : « Enjeux et acteurs du projet d’aménagement de la Corniche de Rabat ». 1

La participation des citoyens dans la production des ... · au patrimoine, à l’urbanisme et à l’environnement particulièrement dans la ville de Sal ... wilaya de Rabat-Salé,

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Journées d'études « Savoirs « citoyens » et démocratie participative dans la question urbaine » des 6 et 7 février 2009. Hicham Mouloudi. Travail en cours, merci de ne pas citer sans l'autorisation de l'auteur.

La participation des citoyens dans la production des grands projets urbains au Maroc:

cas des projets d’aménagement de la vallée du Bouregreg et de la Corniche de Rabat1

INTRODUCTION

A l’instar de plusieurs villes marocaines, Rabat connaît actuellement de profondes transformations économiques et sociales qui ne peuvent manquer d’affecter sa morphologie et son organisation spatiale. Ces transformations résultent d’un nouveau contexte politique et socio-économique national, marqué par le lancement de plusieurs projets définis au plan national. Parmi ces projets, l’approbation du Schéma National d’Aménagement du Territoire (SNAT) a confirmé que l’avenir du Maroc se jouerait principalement dans les villes et la Vision 20102 a érigé le tourisme en priorité nationale. A Rabat, le projet d’aménagement des berges de la vallée du Bouregreg3 et celui de la Corniche de Rabat4 font partie des opérations d’envergure programmées dans ces cadres (Voir Figure ci-dessous). Le but de ces deux projets est de renforcer l’image et la compétitivité de la ville de Rabat, à l’instar de ces homologues méditerranéennes (CARRIERE J-P., 2002), par la revalorisation urbaine de zones dégradées mais présentant de grandes potentialités urbaines et environnementales.

L’analyse effectuée dans le cadre de cette recherche5 a montré qu’afin d’éviter de subir une nouvelle situation de fait accompli, les habitants des deux villes concernés par ces projets, ont entrepris plusieurs initiatives dont la production de savoirs citoyens en est l’illustration la plus marquante. Principalement techniques, ces savoirs, plus ou moins diffusés, ont contribué sinon à reconsidérer certaines décisions urbaines, du moins à mettre en œuvre des actions sur le terrain. Toutefois, nous estimons qu’actuellement au Maroc, et particulièrement à Rabat, ce type de savoir citoyen est nécessaire, mais pas du tout suffisant eu égard aux enjeux de ces grands projets urbains.

La présente contribution a pour objet de rendre compte des différents savoirs citoyens produits à travers la restitution de leur nature, du mode de leur diffusion et des suites qui leur ont été données.

1 Nous tenons à remercier vivement tous les représentants des entités citées dans cette contribution qui ont bien voulu mettre à notre disposition toute la documentation nécessaire à l’élaboration de cette recherche. 2La Vision 2010 est une stratégie de développement touristique volontariste qui s’appuie sur une vision à long terme confortée par un contrat-programme chiffré et détaillé. Afin de réarticuler le tissu économique national sur d’autres régions que celles faisant partie de l’axe Kénitra-Rabat-Casablanca, la Vision 2010 a prévu l’élaboration du Plan Azur. Ce projet vise la création de six nouvelles stations touristiques intégrées sur six sites prioritaires, à savoir : Saïdia (Berkane), Lixus (Larache), Mazagan (El Haouzia, El Jadida), Mogador (Essaouira), Taghazout (Agadir) et Plage Blanche (Guélmim).

3 Le projet d’aménagement des berges de la vallée du Bouregreg s’étend sur une superficie totale de 6000 ha.4 Le projet d’aménagement de la Corniche de Rabat est prévu sur une superficie de 330 ha.5 Cette contribution est issue de travaux de recherches conduits dans un double cadre : 1- une thèse de géographie en cours, dirigée par Pierre Signoles (équipe EMAM, UMR 6173 CITERES, CNRS et Université de Tours) en collaboration avec Taoufik Agoumy (Université Mohamed V, Rabat), et intitulée : « Les projets urbains des fronts d’eau de Rabat : systèmes d’action et stratégies d’acteurs ». 2- un mémoire pour accéder au grade d’architecte en chef, dirigé par Aziz Iraki (Institut National d’Aménagement et d’Urbanisme, Rabat) et soutenu le 7 novembre 2007 au ministère de l’Habitat, de l’Urbanisme et de l’Aménagement de l’espace (Maroc) sous le titre : « Enjeux et acteurs du projet d’aménagement de la Corniche de Rabat ».

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I- L’association Bouregreg et la production d’un savoir citoyen collectif lui rehaussant au rôle d’acteur incontournable dans les questions urbaines concernant la ville de Salé

Depuis sa création en 1986, l’Association Bouregreg (ABR)6 s’est intéressée aux aspects liés au patrimoine, à l’urbanisme et à l’environnement particulièrement dans la ville de Salé7. Grâce aux différentes commissions8animées par une équipe pluridisciplinaire, l’ABR a produit plusieurs dossiers techniques, organisé plusieurs manifestations culturelles et rencontres scientifiques dans la perspective de contribuer à la sensibilisation de la population et à la prise de décision des pouvoirs publics. En tant qu’acteur de taille9 de la société civile, l’ABR prône un « rôle d’émancipation du citoyen qui participe à l’évolution de son environnement et qui se mobilise de façon responsable et désintéressée »10. Sur le terrain, ce rôle a été concrétisé par la réalisation de plusieurs actions en partenariat avec la wilaya de Rabat-Salé, la préfecture de Salé, les départements ministériels et les communes concernées sur des questions urbaines concernant principalement la ville de Salé d’une part ; et par l’organisation de rencontres scientifiques ciblant ses aspects problématiques liés plus précisément à l’aménagement de la vallée du Bouregreg. L’ABR a également participé aux travaux de la convention sur la dépollution et l’aménagement de la vallée du Bouregreg11

et aux travaux liés à la réalisation du Plan de référence de la vallée du Bouregreg12. A partir de 2000, l’association a entrepris des efforts de prospection et de sensibilisation d’investisseurs pour des projets situés sur la rive droite de la vallée.

A- L’ouvrage : « Etudes et hypothèses pour la requalification de la médina de Salé » : un exercice pédagogique parachevé par la constitution d’une banque de donnée inédite13

Ce travail a été effectué en 1987 par une équipe pluridisciplinaire 14 dans le cadre d’un partenariat entre l’Association Bouregreg, l’Institut Universitaire d’Architecture de Venise, la

6 L’’Association Bouregreg est une « Organisation Non Gouvernementale reconnue d’Utilité Publique par le décret n° 280201 du 4 Chaâbane 1408 (8 avril 1988) et dotée du Statut d’Observateur auprès de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle ». Son président fondateur est feu Mohamed AOUAD, ex-conseiller du Roi. Le président de l’association est Zine El Abidine ALAOUI, ancien chargé de mission au cabinet royal et le président-délégué de l’association est Noureddine CHEMAOU, chargé de mission au protocole royal. 7 A l’instar de son homologue l’Association Ribat Al Fath pour le Développement Durable, créée la même année avec le même statut et qui s’intéresse pratiquement aux mêmes questions urbaines au niveau de la ville de Rabat..8 L’association comprend 7 commissions : 1- La commission culturelle, 2-La commission sociale 3- La commission économique, 4- La commission du sport et de la jeunesse, 5- La commission de l’information et publication, 6- La commission de l’urbanisme et de l’environnement, 7- La commission de la santé.9 Le président fondateur de l’association du Bouregreg qui reproupe plusieurs grandes personalités originaires de la ville de Salé, depuis la création jusqu’à sa mort en ,,,,,, est le conseiller du Roi Mohamed Aouad,10 Extrait du discours du président fondateur de l’association à l’occasion de l’ouverture de la table ronde de 2002.11 Initiés en 1997 par le ministère de l’Equipement et le Secrétariat d’Etat à l’Environnement dans le cadre de la campagne « Villes propres ».

12 Le Plan de Référence de la vallée du Bouregreg a été réalisé en 1998-1999 à l’initiative de l’Agence urbaine de Rabat-Salé par l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme de la Région de l’Ile de France (IAURIF). 13 Cette étude architecturale contient 287 pages au format A3 sous forme de textes (rédigés en langue française et italienne), croquis, plans, coupes, axonométries.14 Composée essentiellement d’étudiants en fin d’études en architecture d’origines diverses (Italie, Saint-Dominique et Angola) et d’enseignants d’architecture italiens avec la collaboration d’administrateurs et de techniciens locaux.

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préfecture et la municipalité de Salé dans la perspective de combler le déficit existant en matière de définition de stratégie d’intervention sur les centres historiques. En mettant en place un « Laboratoire d’Analyse et d’Aménagement Urbain » sur les problèmes de la revalorisation de la médina de Salé, ce groupe de travail s’est fixé pour objectif de produire « un matériau d’aide à la gestion et à la décision, tant pour le tissu intra-muros que pour les abords immédiats ». Le but est d’opérer un recentrage de la place de la médina de Salé par rapport à la ville de Salé. Cette étude a consisté à réaliser un ensemble d’enquêtes et propositions visant des interventions sur le terrain qui consistent à restaurer certains éléments de la structure urbaine de la médina de Salé tels que les remparts, les portes, les espaces ouverts, les grandes demeures et les fondouks détériorés15.

Même s’il n’y a pas eu d’inventaire systématique des problèmes que vit la médina de Salé, les réflexions ont porté sur plusieurs aspects allant de l’identification de certaines actions spécifiques touchant le cadre physique jusqu’à la proposition de mise en place d’une structure permanente in situ de suivi et de mise en œuvre des différents projets. Ces projets concernent la restructuration des abords et accès de la médina, la valorisation du paysage et l’aménagement des espaces libres, la réhabilitation et la réaffectation des foundouks ainsi que la sauvegarde et la réutilisation des grandes demeures. La structure de suivi et de mise en œuvre16 est un « atelier de réhabilitation et de revalorisation de la médina » qui devait assurer 4 fonctions principales : une fonction d’étude et de connaissance (inventaires, lancement d’études et enquêtes spécifiques, …), une fonction de gestion administrative et technique (instruction des dossiers d’autorisation, assistance technique, …), une fonction de formation et d’animation du marché de travail (en matière de savoir-faire en construction, restauration, réhabilitation et décoration) et une fonction d’animation culturelle et sociale (sensibilisation, information, vulgarisation).

Ce travail limité essentiellement aux espaces et équipements publics socio-culturels et de loisirs sans s’attaquer de front à l’épineux problème de la réhabilitation, sinon à travers la gestion et l’assistance technique quotidiennes, a permis tout de même de recueillir une bonne partie de l’information et des données qui peut être utilisée par les gestionnaires. Les propositions faites constituent plus des tests de faisabilité qui permettent aux pouvoirs publics, aux particuliers ou aux fondations (Habous, Zaouias) de se référer et d’entreprendre des opérations17.

Les responsables de ce travail ont d’ailleurs reconnu les limites de cette initiative en précisant que les hypothèses formulées doivent être évaluées davantage pour leur valeur méthodologique et pour les critères adoptés que pour les choix spécifiques d’aménagement. Elles prétendent constituer, surtout, un point de départ et une base pour des approfondissements qui, dans le futur, seront nécessaires18.

En tout état de cause, du matériau est fourni à la ville sur lequel elle peut s’appuyer pour conseiller, guider, défendre ou contrecarrer les futures propositions. Ce travail n’a pas, toutefois, pas fait l’objet d’une large diffusion.

15Voir le sommaire de l’’étude en annexe n°116 C’est le monument historique de la médina de Salé baptisé Borj Bab Sebta qui devait abriter cet atelier.17 M. BALBO, D. PINI, et M. F. ZNIBER, Quelle stratégie d’approche pour la médina de Salé ?, in Actes du colloque international organisé à Salé du 6 au 9 octobre 1988 sur le thème : « La réhabilitation des cités anciennes », Ed. Wallada, Casablanca, 1990, p 56-57.

18 Extrait du préambule de l’ouvrage : « Etudes et hypothèses pour la requalification de la médina de Salé », p V.4

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B- Le colloque sur « la réhabilitation des cités anciennes » : l’occasion de tirer les enseignements d’expériences similaires

Dans la continuité du travail réalisé en 1987, un colloque international a été organisé à Salé du 6 au 9 octobre 1988 sur le thème : « La réhabilitation des cités anciennes » par l’Association Bouregreg en partenariat avec l’Institut Universitaire d’Architecture de Venise et plusieurs départements ministériels concernés par la sauvegarde de la médina de Salé au niveau national19.

A travers la présentation d’expériences menées dans d’autres contextes, le colloque visait un double objectif :

• Mieux connaître les stratégies grâce à un certain nombre de cas choisis pour proximité géographique et/ou culturelle ;

• Aborder des aspects opérationnels au travers du fonctionnement des ateliers de réhabilitation déjà opérationnels.

Pour atteindre ces objectifs, le colloque a été centré sur deux niveaux de réflexion :

• Les approches analytiques et méthodologiques et les choix d’options ;

• Les structures permanentes de gestion, suivi et animation d’opérations de réhabilitation.

C’est ainsi que plusieurs spécialistes ont exposé le bilan des expériences menées dans des cités anciennes en Italie (Ferrara), en Espagne (Madrid, Gijon, Valence, Salamanque et Barcelone), en Syrie (Alep), en Mozambique (Maputo), en Algérie (Alger), en Tunisie (Tunis), au Portugal (Guimaraës) et au Maroc (Salé)20.

En préparation de ce colloque, plusieurs « forum de discussion » ont réuni parfois plus de 200 personnes par jour, dont des élus, architectes, ingénieurs, universitaires, étudiants et citoyens concernés.

Les actes de ce colloque ont été publiés21 et mis en vente au public sachant qu’une centaine d’exemplaire a été distribuée gratuitement aux représentants de certaines administrations (wilaya, municipalité de Salé ; Ministère de la Culture, …).

C- La table ronde de 2002 ou la mise en public d’un savoir citoyen lié aux problématiques d’aménagement de la vallée du Bouregreg

Organisée par l’Association Bouregreg à Salé22 le 9 mars 2002 sur le thème « Réflexion citoyenne sur l’avenir de la vallée du Bouregreg », une « table ronde » a rassemblé plusieurs représentants des départements ministériels concernés par l’aménagement de la vallée du

19 Il s’agit du Conseil Municipal et de la Préfecture de Salé, de la Direction de l’urbanisme, des Ministères de la Culture, de l’Habitat, de l’Artisanat et des Affaires Sociales, des Habous et Affaires Islamiques et les Ministère du Tourisme.20 Voir la liste des interventions en annexe n° 2.21 Publication réalisée par l’association Bouregreg avec l’aide du Ministère des Affaires Etrangères Italien et de l’Institut Culturel Italien à Rabat. 22 Cette table ronde a été tenue à Bab Fès, une salle de conférence relevant de la préfecture de Salé Al Médina.

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Bouregreg23, des experts internationaux24, des académiciens, des professionnels et des citoyens « ordinaires » de l’agglomération de Rabat-Salé. Cette manifestation dont les interventions25 ont été réparties suivant deux approches diagnostique et prospective, a été l’occasion pour le public de prendre connaissance des problématiques liées à l’aménagement de ce territoire stratégique de l’agglomération26.

A cet effet, les interventions ont permis de dresser, dans un premier temps, un état des lieux focalisé sur les aspects institutionnel, historique, écologique et urbanistique liés à l’aménagement et au développement de la vallée du Bouregreg ; et de visualiser, dans un deuxième temps, les vocations futures préconisées par les différents schémas d’aménagement existants.

Un riche et long débat a suivi les interventions, particulièrement celles se rapportant à l’approche prospective du projet. En effet, outre les demandes de précision concernant certains aspects techniques (le degré de salinité, d’envasement et d’ensablement de la vallée, l’emprise du Train à Grande Vitesse Maghrébin qui traverserait la vallée, le problème de pollution), le débat a été l’occasion pour les participants de soulever plusieurs questions concernant aussi bien l’aménagement de cette vallée que le développement de l’ensemble de l’agglomération de Rabat-Salé. Ces questions ont trait notamment au rôle d’intégration que le projet devrait jouer entre ces deux villes, aux problématiques du foncier, de l’environnement et du financement, à la dimension paysagère et à la flexibilité requise pour ce type de projets, au contenu de la vision à adopter et au type de vocation à proposer, au dispositif institutionnel à mettre en place, aux aspects liés à la préservation du patrimoine culturel et à la réhabilitation de l’habitat insalubre, aux actions prioritaires et aux modalités de leur mise en œuvre ainsi qu’aux enseignements à tirer des expériences étrangères similaires.

Au terme de ce débat, une synthèse a permis de restituer les priorités à satisfaire (centrées principalement sur la préservation de la qualité du site), les vocations et orientations d’aménagement (en s’inspirant des projets existants tout en autorisant des propositions novatrices et structurantes) ainsi que quelques approches à adopter sur les plans politique (nécessité d’une instance de gouvernance), technique (un opérateur qui veille sur la conformation des réalisation avec la stratégie retenue), urbanistique (un plan à long terme mis en œuvre de manière lourde et dynamique) et foncier (encouragement de l’initiative privé).

D- Le colloque sur « Les remparts de l’estuaire du Bouregreg » ou l’occasion de tirer la sonnette d’alarme

Organisé en partenariat entre l’Association Bouregreg, l’association Ribat Al Fath pour le Développement Durable et le Ministère de la Culture dans le cadre du programme « Rabat :

23 Outre une représentation à haut niveau des départements ministériels concernés, de hauts responsables ont assisté à cette table ronde tels que le Conseiller du Roi, Abdelaziz Meziane Belfkih, le Directeur Général des Collectivités Locales, Mohamed Brahimi, le Directeur Général des ACFCC du ministère de la l’Intérieur, Mohamed Saad Hassar et le Gouverneur de Salé Al Médina, Mohamed Assila. 24 Dont Hervé Dupont, le Secrétaire général du Groupe Central des Grands Projets d’Urbanisme en France et Robert Chastel, auteur de l’ouvrage « Vingt siècles de la vallée du Bouregreg ».25 Voir la liste des interventions en annexe n°326 Les Actes de cette table ronde ont été publiés par l’association Bouregreg, Edition Fédala, Mohammedia, 2002 et adressés à tous les acteurs concernés.

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capitale de la culture arabe », un colloque27 a été tenu le 18 et 19 octobre 2003 dans les villes de Rabat28 et Salé29 avec la participation d’intervenants représentant l‘Egypte, la Palestine et l’Espagne30. L’objectif de ce colloque réside dans la valorisation du patrimoine et le développement de la culture au niveau local. Il a fait l’objet d’une large discussion des problèmes des remparts sur le plan urbain (rigidité de l’approche adoptée jusque-là par les acteurs concernés) et technique (réhabilitation avec des matériaux nouveaux ou authentiques).

Au cours de son intervention, un membre de l’Association Bouregreg a souligné, à juste titre, que « les projets [culturels proposés] ne sont pas appropriés de manière sérieuse, de manière massive, de manière lourde par les populations … parce que les centres d’intérêt, les préoccupations de ces populations ne sont pas aujourd’hui priorité tournées vers la culture ; ils vont vers les besoins primaires, c'est-à-dire loger correctement, se nourrir, envoyer leurs enfants à l’école… il faut intégrer dans les médinas des équipements publics, des zones de loisirs, c'est-à-dire qui permettent à cette population de sentir qu’un effort est fait en sa direction pour améliorer ses conditions de vie et à partir de ce moment-là, le retour se fera et il y aura donc plus de facilités à intervenir sur les médinas »31. D’après cet intervenant, l’atelier proposé en 1988 (mais qui n’a jamais vu le jour) est l’une des solutions préconisées pour remédier à cette situation : « c’est un lieu qui peut avoir des chances d’obtention de l’adhésion des populations locales que nous n’avons pas aujourd’hui et l’ensemble des projets qui se font, sont des projets d’une minorité d’intervenants, d’élites »32

Concernant les difficultés institutionnelles et financières, force est de constater que les savoirs faire et les compétences e matière de réhabilitation sont rares à tous les niveaux : paysagiste, artistique, juridique et technique 33, d’autant plus qu’un mètre de rempart nécessite plus de 3000 DH pour le réhabiliter34.

A l’issue de ce colloque, une convention de partenariat a été signée entre l’Association Bouregreg, l’Association Ribat Al Fath pour le Développement Durable, le Ministère de la Culture, la Commune urbaine de Rabat et la Commune urbaine de Salé. Cette convention vise la protection et la préservation des remparts, des borjs, portes historiques et des berges de la vallée du Bouregreg.

E- Les chantiers du Bouregreg : plateformes de discussion ou simples réunions d’information ?

Organisés par l’Association Bouregreg en partenariat avec l’Agence d’aménagement de la vallée du Bouregreg, ces rencontres tenues au siège de l’association Bouregreg, ont été

27 Les actes de ce colloque ont été publiés en 2006 à Rabat aux éditions Dar Al Manahil.

28 Dans la salle de conférence Dar Lamrini à Rabat.29 Dans la salle Bab Fès à Salé.30 Les quatre langues ont été utilisées dans les exposés (l’arabe, le français, l’anglais et l’espagnol). Voir la liste des interventions en annexe n°,,,,,,31 M. F. ZNIBER, Culture et développement local, In Actes du colloque organisé à Rabat-Salé du 18-19 octobre 2003 sur « Les remparts de l’estuaire du Bouregreg », Ed. Dar Al Manahil, Rabat, 2006, p 90.

32 Idem.33 Ibidem, p 92.34 Mohamed Achaàri, (Ministre de la Culture) In Actes du colloque organisé à Rabat-Salé du 18-19 octobre 2003 sur « Les remparts de l’estuaire du Bouregreg », Ed. Dar Al Manahil, Rabat, 2006, p 10.

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l’occasion de réunir un public pluridisciplinaire35 pour débattre sur certaines questions se rapportant à l’aménagement et au développement de la vallée du Bouregreg.

Chaque rencontre prévoit une présentation détaillée par les responsables de l’Agence et/ou des bureaux d’études associés suivie d’un débat sur plusieurs aspects, notamment les choix techniques, les partis urbanistiques et architecturaux, les impacts économiques et sociaux prévisibles... A la fin de la séance, une sortie sur le terrain est proposée aux participants.

D’après les notes de présentation adressées à tous les acteurs concernés, la première rencontre36 qui a porté sur la problématique liée à l’assainissement du Bouregreg, avait pour objectif d’étudier les options techniques et financières qui ont rendu possible la fermeture de la décharge de l’Oulja et celles qui sont prévues pour fermer la décharge d’Akreuch.

La navigabilité du Bouregreg37 est le thème de la seconde rencontre qui a tenté d’examiner les options techniques devant rendre le Bouregreg de nouveau navigable. Les travaux prévus pour minimiser l’ensablement du fleuve (redimensionnement des jetées, digues…) ont été examinés à la lumière des résultats des modèles physique et numérique développés à cet effet.

La troisième rencontre consacrée au projet de Tramway de Rabat - Salé38 s’est focalisée sur les modalités de sa mise en œuvre (élargissement des trottoirs, aménagement de places, plantation de milliers de végétaux, installation de mobiliers urbains, création de pistes cyclables, rénovation de façades...).

Le Projet du Tunnel des Oudayas a été présenté dans le cadre de la quatrième rencontre39

qui visait la discussion des réponses apportées à trois défis : technique (le tunnel passe en partie sous les bâtiments historiques dont le maintien, sans risque d’endommagement, a nécessité une technique inédite de soutènement, non dépourvue de tout risque, et passionnante du point de vue de l’ingénieur ), urbanistique (l’aménagement de la Place souk laghzel, rendu possible grâce au tunnel, doit restituer la continuité historique entre l’ancienne Médina et la Kasba des Oudayas ) et patrimonial (la « rentabilisation » d’un tel investissement ne peut être envisagée que si des efforts similaires sont consentis pour la valorisation proprement dite de la Kasba des Oudayas, des vestiges archéologiques récemment découverts, ainsi que de la partie de la médina environnante)

Le thème de la cinquième rencontre40 est intitulé : « Projet Bouregreg- médina de Salé : quelles articulations ? ». L’objectif principal de cette rencontre est de discuter les différentes possibilités pour réussir cette articulation en faisant en sorte : i) que les nouveaux projets urbains mitoyens de la médina ne tournent pas le dos à cette dernière ; ii) que les nouvelles activités et fonctions qui y sont prévues invitent non seulement à visiter ce centre historique, mais incitent les futurs acquéreurs de boutiques, de galeries, de restaurants, de maisons d’hôtes à créer des activités similaires dans la médina ; iii) que soit encouragée l’installation

35 Les listes de présence contiennent diverses catégories d’acteurs : des universitaires (enseignants et chercheurs en géographie, économie et histoire), des fonctionnaires (administrateurs, diplomates, infirmiers), des professions libérales (architectes, ingénieurs, médecins, pharmaciens, journalistes, peintres, photographes, entrepreneurs, commerçants), des militants associatifs (membres de l’association Bouregreg et d’autres associations de la ville de Salé) ainsi que des représentants d’organismes internationaux (PNUD, UNESCO). 36 164 personnes ont participé à cette rencontre tenue le samedi 24 juin 2006. 37 Cette rencontre tenue le samedi 16 septembre 2006, a connu la participation de 72 personnes.38 44 personnes ont participé à cette rencontre tenue le samedi 7 avril 2007.39 Cette rencontre tenue le samedi 1er décembre 2007, a connu la participation de 80 personnes.40 A titre exceptionnel, cette rencontre a été tenue le 4 juin 2008 à la salle de la préfecture de Salé, alors que toutes les autres rencontres se sont déroulées au siège de l’Association Bouregreg.

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d’ateliers d'artistes, d'architectes et de lieux de formation artistique et artisanale ; iv) que l’envie soit donnée à des ménages à hauts revenus pour s’y établir en tant que résidents…41

F- Des modes de diffusion diversifiés

Outre le rôle joué par la presse aussi bien écrite qu’audio-visuelle, l’Association Bouregreg a assuré une large diffusion de ses travaux par la publication de 3 numéros42 de son bulletin d’information interne bilingue (arabe et français) baptisé « Les échos du Bouregreg » ainsi que 16 numéros de sa revue « Bouregreg » qui s’intéresse à tous les domaines de la vie sociale à Salé, y compris les questions urbaines.

G- Des suites en deçà des aspirations de la population

Force est de constater qu’en dépit de certaines réalisations, le nombre des propositions qui ont pu se concrétiser sur le terrain n’est pas à la hauteur des efforts déployés en matière de réflexions et d’études surtout en ce qui concerne la médina de Salé.

Parmi les travaux réalisés, il y a lieu de citer : le réaménagement et de restauration de certains secteurs de la médina de Salé43, les travaux de plantations de flancs44 et les travaux d’infrastructure45.

Malgré toutes les études et colloques dédiés à ce territoire stratégique, la situation intramuros se dégrade de plus en plus et l’atelier de conseil et d’assistance technique précité n’est pas encore mis en place.

II- Des savoirs citoyens en riposte à des décisions législatives et réglementaires

Dans une note intitulée « Point de vue sur la loi relative à l’aménagement et à l’investissement au Bouregreg »46 dressée par l’avocat Abdelwahed Ben Messaoud47, l’auteur présente une lecture critique de l’approche adoptée pour l’aménagement de la vallée du Bouregreg d’un point de vue juridique. Les observations exposées dans cette note se répartissent en quatre thématiques principales48 :

41 Cf. Note de présentation de la 5ème rencontre..42 Le premier numéro a été publié au mois d’avril 2000, le second au mois de juillet 2001 et le troisième au mois d’octobre 2002.43 Ces travaux ont été entrepris dans le cadre du « Projet de revalorisation de la médina de Salé » initié à la fin des années 80 en partenariat avec la wilaya de Rabat-Salé, la préfecture de Salé, le ministère de l’Intérieur et le ministère de la Culture. Ils ont concerné le réaménagement de Bab Fès, de dégagements et de jardins dont celui de Dar Al Baroud d’une superficie de 2 hectares et la restauration de la porte mérinide du XIIIe siècle Bab Lamrissa ainsi que des maisons Zouaoui et Belkadi au même titre que la reconversion de « Dar A Qadi » à un centre culturel en partenariat avec les Ministères de la Justice et de la Culture.

44 Initiés en 1989 dans le cadre de l’opération « Flancs verts » visant la lutte contre l’érosion et l’amélioration du paysage.

45 Initiés en 1991 en partenariat avec la préfecture de Salé et les communes concernées, ces travaux ont concernés la réalisation de l’assainissement liquide, de la voirie et de l’éclairage publique des principales avenues de Kariat Ouled Moussa à Hay Inbiat en passant par Tabriquet et la médina de Salé.

46 Cette note de 27 pages rédigée en arabe le 27 septembre 2008 a été adressée à l’hebdomadaire « Al Ousboue» (La semaine) qui l’a scindé en plusieurs parties dont des extraits ont été publiés, au fur et à mesure, dans la rubrique « Point de vue ». 47 Abdelwahed Ben Messaoud est membre du Syndicat des Avocats au Maroc.48 Nous avons tenu à rester fidèle aux propos de l’auteur dans la traduction des observations contenues dans sa note.

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A- Position de la justice administrative sur les affaires relatives à la procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique

• La loi sur l’expropriation n’accorde pas le droit aux citoyens d’ester en justice au sujet de l’opportunité et le bien-fondé de l’utilité publique, mais uniquement à propos du montant de l’indemnisation liée au dédommagement.

• La lecture des numéros du Bulletin Officiel depuis sa création en 1912 montre que la moitié des propriétés privées ont été assujetties à la procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique avec des montants d’indemnisation dérisoires49.

• Cette situation s’est relativement améliorée récemment : exemple du jugement du tribunal administratif qui a permis en 1996 de réviser le montant de l’indemnisation de 20 à 400 DH/m2 accordé à la société Hay Allah par l’Agence Nationale de lutte contre l’Habitat Insalubre pour expropriation en vue de réaliser un lotissement à Azrou (Province de Meknès).

B- Point de vue sur la loi n°16-04 relative à l’aménagement et à la mise en valeur de la vallée du Bouregreg

• Cette loi n’a pas été précédée d’une lettre introductive précisant l’exposé des motifs et la nature de l’intérêt général à favoriser. Elle n’a pas été étudiée par la commission judiciaire et législative du Parlement ; de même l’avis du Conseil Constitutionnel dont la vocation est de statuer sur la compatibilité du contenu de la loi avec celui de la Constitution n’a pas été requis.

• La loi a été adoptée sans tenir compte de la situation de milliers de personnes qui se sont installées sur les berges de la vallée du Bouregreg depuis déjà des siècles.

C- La position de la législation islamique par rapport au respect du droit à la propriété et les possibilités d’expropriation existantes

• A l’instar des autres religions monothéistes, l’Islam respecte le droit à la propriété des individus. Les ouvrages spécialisés (théologie) qui se sont penchés sur cette question, ont conclu que l’expropriation n’est permise qu’en cas de nécessité absolue : c'est-à-dire en cas de passage de voie de communication ou d’édification et d’extension de lieux de culte (mosquées).

• Le recours à l’expropriation a été introduit au Maroc dans le cadre du traité d’Algésiras du 7 avril 1906 (article 113). Il a été institutionnalisé à l’époque du protectorat par l’arrêté du 1er novembre 1912.

• Dans la loi marocaine sur l’expropriation, il n’y a aucune mention de la nature de l’indemnisation comme c’est le cas par exemple en France où l’article 545 de la loi sur

49D’après maître Ben Messaoud, ce pourcentage représente le quart de la superficie urbanisable du pays qui a fait l’objet d’expropriation avec des indemnisations dérisoires et dont une partie a été réattribuée à des « chanceux » comme c’est le cas pour la côte de Harhoura-Témara où les montants d’indemnisations proclamés en 1972 oscillaient entre 0,20 et 1 DH/m2.

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l’expropriation stipule que le montant de l’expropriation doit être juste et son versement s’opérer avant l’éviction des lieux.

• Le fait d’interdire aux citoyens le droit de remettre en cause le bien-fondé de l’utilité publique proclamée, présente un danger car cette approche tend à mépriser et sous-estimer le citoyen exproprié considéré comme « mineur », incapable de saisir l’importance de l’utilité publique et ses raisons d’être. Il doit donc se soumettre voire s’incliner totalement avec, toutefois, le droit d’ester en justice pour réviser à la hausse le montant de l’indemnisation. Cette approche remet également en cause le rôle du système judiciaire dans la protection des droits des citoyens par le contrôle de l’opportunité et de la légitimité de l’expropriation.

• Les recommandations du colloque d’avril 1998 organisé par la Cour Suprême marocaine et la Cour de Cassation française accordant un rôle crucial au juge pour contrôler les tenants et aboutissants de la procédure d’expropriation, sont toujours d’actualité.

• Dans le projet d’aménagement de la vallée du Bouregreg, l’expropriation va porter préjudice aux ayants droit séculaires dont la source de revenu principale provient de la culture de fruits et légumes de la zone d’Al Oulja et le long des berges de la vallée.

• Parmi les inconvénients fâcheux de l’expropriation figure celui de la différence excessive entre les montants de l’expertise initiale et les prix du marché : si le montant de l’indemnisation des ayants droit s’aligne sur celui de cession des terrains des sociétés de promotion immobilière il explose littéralement une fois mis sur le marché par lesdites sociétés. Cette pratique permet de spolier les biens des « petits » propriétaires pour les verser dans les « poches des riches » et des grandes sociétés de promotion immobilière. Constats qui ont conduit certains observateurs à émettre l’hypothèse que la procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique au Maroc pourrait porter atteinte à l’intérêt général dont l’objet réside dans la préservation de la paix sociale et la promotion des initiatives individuelles.

D- A propos de la création de l’Agence pour l’aménagement de la vallée du Bouregreg

• Maître Ben Messaoud avance que la lecture des prérogatives dévolues à l’Agence pour l’aménagement de la vallée du Bouregreg par la loi n°16-04 précitée, montre que cette loi, outrepassant l’esprit et la lettre de la Constitution marocaine, a ignoré plusieurs textes juridiques en vigueur et notamment ceux régissant le Contrat des Engagements et des Dépenses, l’immatriculation foncière, l’expropriation pour cause d’utilité publique et la loi relative à l’urbanisme.

• Après avoir cité plusieurs exemples, il conclue que cette loi n’est pas constitutionnelle et que si les citoyens avaient le droit de récuser la constitutionalité des lois, le Conseil Constitutionnel aurait été saisi d’une multitude de plaintes équivalente au nombre très conséquent des propriétaires expropriés ou menacés par une mesure d’expropriation.

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E- Vers une large diffusion de la note 50

Cette note a été adressée à l’Instance Nationale de Protection des Biens Publics au Maroc (INPBPM) qui mène actuellement une campagne de sensibilisation de l’opinion publique contre l’approche adoptée dans l’aménagement de la vallée du Bouregreg. A cet effet, l’INPBPM a mis en place un Comité de Coordination pour lutter contre les Dédommagements causés par l’Expropriation des Terrains dans la Wilaya de Rabat-Salé-Zemmour-Zaër51. Constitué principalement des membres de l’INPBPM, ce Comité a, jusqu’à présent, organisé 2 sit-in et publié 8 communiqués de presse.

III- Quand les savoirs citoyens contribuent à remettre en cause une « grande » décision urbaine52

Les stratégies des acteurs quant au choix du site d’implantation de la Station de Pré-traitement des Eaux Usées (SPEU), qui n’avaient pas été prévues par les initiateurs du projet (CROZIER M. et FRIEDBERG E., 1977), revêtent un intérêt particulier. Les hésitations, controverses et conflits que ce choix a suscités témoignent bien en effet de certains des enjeux de cet aménagement, en même temps qu’elles illustrent les difficultés éprouvées par les responsables politiques, municipaux et de l’aménagement à définir des modes de gouvernance adaptés à de grands projets urbains et surtout l’importance des savoirs citoyens dans le processus de prise de décision. Ainsi, les arguments purement techniques qui, dans un premier temps, ont conduit à proposer que le projet de SPEU soit déplacé de son site initial (le Champ de tir) vers le site de Hay Al Fath, ont rapidement suscité un vif mécontentement d’un certain nombre de riverains, qui se sont organisés dans un collectif d’associations et ont entrepris de mobiliser les populations résidentes. Ce collectif, qui regroupe de nombreuses personnalités du monde syndical et politique, a fait le choix de ne s’interdire aucune forme d’expression et de revendication (notes techniques, sit-in, pétitions, communiqués, articles de presse, intrusion dans la salle de réunion du conseil communal, questions au Parlement, etc.). Les savoirs citoyens mobilisés dans les différentes étapes du processus de revendication, qui a duré plus de trois ans, ont permis à ce collectif de s’ériger en acteur incontournable et ce d’autant que, après l’assentiment donné par les élus et les autorités locales, il devrait désormais être consulté au sujet du site d’implantation de la SPEU dont le choix définitif n’a pas encore été arrêté.

Il y a lieu de souligner d’emblée que la station de pré-traitement a été prévue au départ sur un terrain au niveau du site dénommé « champ de tir ». Pour des raisons foncières53, le site

50 Les recherches (entretiens et collecte de la documentation) concernant cette partie, sont en cours.51 Actuellement (situation de décembre 2008), 17 associations et amicales de quartier sont représentées dans ce Comité : 1-l’association Sidi Hmida pour le développement humain, 2-l’amicale Hassania des propriétaires de la commune de Hssaine, 3-le comité des quartiers riverains à Sidi Ben Acher et Bab Chaàfa, 4-l’association des habitants du Mellah de Rabat, 5- l’association des jeunes d’Oulad Sbita à Bouknadel, 6-l’association Joudour pour le développement des terrains de la collectivité ethnique de Jbahna à Sehoul, 7-l’association Guich Oudaya de Rabat-Témara, 8-l’association de développement et coopération de Kariat, 9-l’amicale des habitants du quartier Rmel, 10-l’amicale des habitants du quartier Kardouna, 11-le comité local des propriétaires d’Al Oulja, 12-l’association marocaine de la culture et du développement, 13-l’amicale Assalam du douar Akkou, 14-l’association des agriculteurs d’Al Hawzia à Al Oulja de Rabat, 15-l’association des agriculteurs d’Oum Azza, 16-l’association Espace Oudayas 2010, 17-l’association Aïn Bribri.52 Cette partie est issue de mon article intitulé : « L’aménagement de la Corniche de Rabat face au défi de l’environnement et du développement durable : quand la société civile prend le devant de la scène publique », en cours de publication dans la revue Les Cahiers d’EMAM, éditée par l’Université François-Rabelais de Tour.53 Le terrain appelé champ de tir est la propriété de l’Agence de Logements et d’Equipements Militaires comme il est indiqué dans la Figure ci-jointe.

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d’implantation de la station a été déplacé en face du quartier de Hay Al Fath sur un terrain domanial (Voir Figure ci-dessous).Bien que le projet de la station prévoit la réalisation d’un ouvrage compact, fermé et semi enterré, cette décision a suscité le mécontentement des riverains et, par la suite, la mobilisation des habitants de ce quartier et de ceux des quartiers avoisinants.

A- La constitution d’une force d’opposition unique malgré les préoccupations différentes des associations qui composent le collectif ;Ce conflit a opposé la REDAL54 à un collectif d’associations baptisé : Comité de Coordination pour le Suivi de la Réalisation de la Station de Prétraitement des Eaux Usées (CCSRSPEU).

La création de ce collectif remonte au 8 décembre 2003. Ce jour-là, plusieurs associations de quartiers et syndics de résidence se sont réunis pour réagir face au déplacement envisagé du site d’implantation de la SPEU. Ces associations et syndics peuvent être ventilés en trois catégories :

1. Des syndicats de résidents et associations référant au territoire dont ils portent le même nom55.

2. Des collectifs d’association et de syndics créés pour unifier des structures existantes et pour lutter contre des problèmes précis56.

3. Des associations référant aux fonctions qu’elles assument57.

Le fait que les résidents du quartier Hay Al Fath qui constituent l’épine dorsale de ces collectifs, n’appartiennent pas aux catégories sociales les plus marginalisées de la population rbatie, a favorisé un tel foisonnement d’associations. C’est ainsi que le Comité de Coordination pour le Suivi de la Réalisation de la Station de Prétraitement des Eaux Usées comprend, en plus des membres associatifs très actifs58, des leaders politiques59, des syndicalistes et des cadres de différentes spécialités (ingénieurs, médecins, « environnementalistes », etc.), ainsi que certains membres très actifs du REMADEV60.

Grâce à cette équipe très expérimentée épaulée par des élus de l’ex-commune de Yacoub Al Mansour et de la ville de Rabat, le Collectif s’est rapidement imposé comme l’opposant unique, fédérant ses membres autour d’un message commun : « Oui à la Station de Pré-traitement des Eaux Usées, mais loin des habitations ». Il est devenu, de ce fait, le principal interlocuteur de la REDAL dans le conflit qui l’a opposée aux associations.

54 Régie multiservice (eau, électricité, assainissement)55 Parmi ces structures, on trouve : « Le Syndic Mimosas 2». « L’Amicale la Corniche », « Assafae Habitat », « Al Majd », « El Wifak (Amal 6) », « L’Association Al Boustane Al Akhdar », « L’Amicale Al Mountalak » et « La Ceinture Verte ». Pilotés par des cadres moyens ou supérieurs résidents sur-place, propriétaires d’appartement ou de villa et gérant parfois des budgets importants, ces syndicats et associations ont réussi à assurer la continuité de leurs travaux.

56 Il s’agit de « La Fédération Al Mountazah » et du « Réseau Marocain pour la Promotion et le Développement des Espaces 57 Comme c’est le cas de « L’Association Amal pour l’Amitié et la Prévoyance des Jeunes »

58 Parmi lesquels on trouve notamment le vice-président de l’Association Marocaine des Droits de l’Homme.59 Principalement des membres du Parti pour le Progrès et le Socialisme (PPS).60 En l’occurrence la médecin généraliste coordinatrice du REMADEV et son vice-président, directeur pédagogique d’un établissement scolaire à Hay Al Fath baptisé « Al Awaïl ».

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B- Le positionnement du Collectif en tant qu’expert grâce à l’argumentaire développé et aux propositions contenues dans les différentes notes qu’il a réalisées

Pour défendre leur cause auprès des autorités compétentes, les acteurs de la contestation ont élaboré plusieurs documents (notes techniques, lettres de protestation, etc.) qui restituent l’ensemble de leurs préoccupations. La première note technique est intitulée : « Eau et assainissement : station de traitement des eaux usées de Rabat. Véritable conscience citoyenne »61 et la seconde est intitulée : « Concours d’idées pour l’aménagement de la Corniche de Rabat »62.

Les principaux arguments présentés dans ces notes ont trait aux préjudices qui pourraient résulter de l’implantation de la SPEU sur :

• La santé des habitants des cités la Corniche, Hay Al Fath, Al Mountazah, El Menzeh, Al Mountalak, Al Massira et de tous les quartiers avoisinants ;

• La qualité de l’environnement de la région côtière ;• La valeur vénale des résidences qui serait incontestablement dévalorisée ;• Les projets d’investissements touristiques prévus dans le cadre de l’aménagement de

la Corniche de Rabat.

En effet, ces notes, adressées à tous les acteurs qui figurent dans l’encadré ci-dessus, analysent différents aspects liés à l’implantation d’une SPEU à Hay Al Fath en apportant des précisions d’ordre juridique (nécessité de l’application de la loi sur les études d’impact sur l’environnement), d’ordre environnemental (risque de pollution olfactive, sonore, visuelle, marine), d’ordre humain et social (problèmes de santé et de circulation), d’ordre économique (impact sur le foncier et sur la réussite du projet de la Corniche). Ces notes demandent également aux instances compétentes de procéder à une analyse profonde du problème aussi bien dans son aspect scientifique et technique que dans son aspect humain et social afin de concevoir la station de traitement des eaux usées dans le cadre d’un projet d’aménagement intégré. Celui-ci devrait s’effectuer en concertation avec les partenaires concernés (Ministère de l’Aménagement du Territoire, de l’Eau et de l’Environnement, Ministère de l’Agriculture, Ministère de l’Intérieur, de l’Equipement, le Conseil de la Ville de Rabat, l’Office National de l’Eau Potable, …).

61 Il s’agit d’une note de 8 pages rédigée en langue française.62 C’est une note de 5 pages rédigée également en langue française.

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Destinataires des notes techniques et lettres de protestation du Comité de

coordination

• Le Premier Ministre• Le Ministre de l’Intérieur• Le Ministre de l’Aménagement du

Territoire, de l’Eau et de l’Environnement• Le Secrétaire d’Etat chargé de

l’Environnement• Le Wali de la Région de Rabat-Salé-

Zemmour- Zaër• Le Président du Conseil de la Ville de

Rabat • Le Directeur Général de la REDAL• La Princesse Lalla Hasnae, Présidente de

la Fondation Mohamed VI pour la Protection de l’Environnement

• Le Président de l’Arrondissement de Yacoub Al Mansour.

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C- Le recours à des vecteurs multiples d’expression et de revendication couvrant aussi bien les sphères technique, publique que politique. Les membres du Collectif ont défini avec soin leurs modalités d’action aussi bien formelles (Comité National des Etudes d’Impact, pétitions, rencontres avec les responsables, …) qu’informelles (sit-in, pression auprès des élus, …). Leur but consistait à opérer une pression sur les décideurs, y compris les élus, pour les inciter à se positionner pour ou contre le projet de localisation de la SPEU ; et ce, en jouant respectivement sur plusieurs registres, conçus comme complémentaires à savoir : la sphère technique, la sphère du débat public et la sphère politique. Ces modes d’expression et de revendication sont les suivants:

• Au plan technique, le Collectif a entamé sa campagne par la transmission des notes techniques sus-mentionnées et en participant à des réunions de concertation avec les acteurs décisionnels63. Au cours de ces rencontres, il a exprimé clairement son opposition au site choisi pour la future localisation de la SPEU tout en proposant une solution alternative qui consiste à implanter la SPEU au milieu de la ceinture verte avec, éventuellement, un traitement au lieu du prétraitement. En outre, le préjudice que pourrait causer cette station au projet d’aménagement de la Corniche de Rabat a été constamment soulevé par les membres du Collectif.

• La mise sur la place publique du débat afférent au déplacement de la SPEU a permis à ce Collectif de réunir 368 signatures au bas d’une pétition émanant plus particulièrement des habitants – de fait, de leurs représentants - des cités suivantes : la Corniche, Hay Al Fath, Hay El Menzeh, Al Mountalak, Al Massira et des quartiers avoisinants. 10 Marocains résidents à l’Etranger y ont également apposé leurs signatures.

• Pour informer la population de l’avancement des discussions engagées au sujet de l’emplacement de la SPEU, le Collectif a publié plusieurs communiqués de presse. Ceux-ci, réalisés en deux langues (arabe et français), dressent à chaque fois le bilan des négociations tout en rappelant les impacts prévus de l’implantation de la station proposée par la REDAL sur le site de Hay Al Fath64.

• Pour couronner cette campagne de sensibilisation et, surtout, attirer l’attention de la presse locale, nationale voire internationale, le Comité de Coordination pour la réalisation de la STEU a organisé un sit-in sur le site objet du litige65 le dimanche 27 juin 2004 de 10 heures du matin à 13 heures. Pour le préparer, un appel avait été lancé dans les journaux66. En outre, plusieurs convocations et un bulletin d’informations67 contenant certaines données techniques sur ce type de station, accompagnés d’une présentation de la position des habitants et de leur Comité, ont été distribués aux habitants des quartiers concernés. Ce sit-in, placé sous le mot

63 Il s’agit des personnalités suivantes : un responsable de la REDAL, le Wali de la région de Rabat-Salé-Zemmour-Zaër, les membres du Comité National des Etudes d’Impact et le Secrétaire Général du Ministère de l’Aménagement du Territoire, de l’Eau et de l’Environnement.

64 Cf. Communiqués du 8 décembre 2003, du 26 octobre 2004 et du 7 octobre 2005.65 La manifestation a été organisée à l’intersection entre la Route Côtière et l’Avenue Al Fath.66 Il s’agit particulièrement des quotidiens Al Bayane et Bayane Al Yaoum.67 Les membres du Comité de Coordination avancent le chiffre de 5 000 exemplaires pour le tirage de ce bulletin d’informations.

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d’ordre : « Oui à la station de pré-traitement, mais loin des habitations » a bénéficié d’une large couverture médiatique. En effet, outre les deux chaînes nationales de télévision (RTM et 2M), plusieurs quotidiens ont rapporté l’événement68.

• Au plan politique, le Collectif a saisi par écrit le Parlement et la Chambre des Conseillers69 grâce aux questions qu’il a fait poser par des députés du Parti du Progrès et du Socialisme (PPS). En outre, à l’occasion de la session du Conseil de la Ville de Rabat, tenue au mois d’octobre 2004, il a pris l’initiative de marquer la présence des habitants sur les lieux de la session. Les participants à cette manifestation ont hissé des banderoles rappelant leurs revendications, tout en distribuant un communiqué actualisé aux conseillers de la Ville et aux journalistes présents. En outre, des représentants du Collectif ont réussi à assister à la séance, au cours de laquelle les conseillers communaux qui en étaient membres ont demandé l’inscription du problème de la station de traitement des eaux usées à l’ordre du jour. Face au refus du Président du Conseil de la Ville, le président du Comité de Coordination a pris la parole, en dépit du règlement qui interdit toute intervention du public lors des sessions du Conseil, pour protester contre ce refus, réclamer un débat démocratique et inviter le Président du Conseil de la Ville à donner suite aux différentes demandes d’audience formulées par ledit Comité, et restées jusqu’alors obstinément sans réponse. A la reprise de la séance – celle-ci ayant été suspendue à cause du tumulte ayant suivi l’intervention du président du Collectif -, le Président du Conseil de la Ville a finalement accepté de fixer une date précise pour recevoir une délégation du Comité ; il a en outre évoqué la possibilité de prévoir une séance extraordinaire du Conseil de la Ville, qui serait consacrée à la discussion de la question du site d’installation de la SPEU70. Cette intrusion peut ainsi être considérée comme un coup stratégique71 puisqu‘elle a constitué un moment charnière dans la trajectoire de ce mouvement de protestation. En effet, bien que ladite séance extraordinaire du Conseil de la Ville n’ait pas eu lieu, la délégation du Comité a été effectivement reçue par le maire de Rabat le 4 novembre 2004 (6 jours plus tard) et a, surtout, participé aux travaux de la commission mise en place pour effectuer des sorties sur les lieux en vue d’étudier les propositions aussi bien de la REDAL que du Collectif.

68 Il s’agit notamment des quotidiens « Le Matin du Sahara », « Assabah », « Bayane Al Yaoum », de l’hebdomadaire « Al Moustakil » et de la revue « Construire ». 69 La Constitution marocaine a prévu deux chambres de représentants de la population : un Parlement dont les membres sont élus par suffrage direct et une Chambre de Conseillers dont les membres sont élus par suffrage indirect.70 Informations recueillies lors de nos entretiens auprès des membres du Comité de coordination71 Ce que Schelling appelle un coup stratégique est « une action visant à influencer le choix de l’adversaire en faveur de soi-même, en jouant sur l’attente de ce dernier face au choix que l’on fera ». Cf. Schelling T. C., 1986, éd. Orig. 1960, Stratégie du conflit, Paris PUF, p. 198.

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CONCLUSION

Les savoirs citoyens qui se rapportent aux grands projets urbains en cours de réalisation à Rabat peuvent être classés en trois catégories :

1. Des savoirs techniques collectifs reconnus et diffusés dans le cadre de séminaires thématiques organisés en partenariat avec les acteurs concernés,

2. Des savoirs techniques diffusés dans la presse à titre individuel et détachés du processus de prise de décision.

3. Des savoirs techniques collectifs non reconnus, diffusés dans le cadre de campagne de mobilisation de la population aboutissant à la remise en cause de décision urbaine,

Ces trois types de savoirs citoyens sont nécessaires pour une véritable gouvernance urbaine, mais demeurent insuffisants si l’on veut aboutir à des réalisations concrètes. Certes, les projets réalisés à Salé et la décision de déplacer la station de prétraitement des eaux usées sont dus aux savoirs citoyens et à la mobilisation des habitants qui ont fait preuve de compétences indéniables (BERRY-CHIKHAOUI I., DEBOULET A., 2000). Mais, sans doute, doivent-ils tout autant, sinon plus, à d’autres raisons. Les réseaux sociaux dont disposent plusieurs membres de l’Association Bouregreg et du Comité de Coordination, qui appartiennent à plusieurs groupes à la fois (administrations, associations, syndicats, partis politiques) et qui agissent donc dans de multiples systèmes interactifs, démultiplient leurs capacités d’action. Ce sont ces réseaux, entre autres, qui ont permis aux opposants du site d’implantation de la station de prétraitement des eaux usées de gagner le soutien des élus et de l’autorité locale et à l’Association Bouregreg de trouver les financements nécessaires aux projets réalisés dans la ville de Salé. .

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ANNEXE N °1

Sommaire de l’ouvrage intitulé : « Etudes et hypothèses pour la requalification de la médina de Salé » réalisé en 1987

Première partie

• Introduction

• La médian et la ville

• Les principes directeurs

Deuxième partie

• Bab El Mellah, Bab Fès et leurs abords

• Le cimetière Sidi Ben Achir

• Les fondouks

• Les grandes demeures

• L’enquête : les fondouks

• L’enquête : les grandes demeures

Références bibliographiques

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ANNEXE N °2

Liste des interventions au colloque international organisé au mois d’octobre 1988 sur le thème : « la réhabilitation des cités anciennes »

1. Discours d’ouverture prononcé par Mohamed AOUAD, Président fondateur de l’association Bouregreg.

2. Exposé introductif sur les objectifs et attentes du colloque, par Mohamed Fawzi ZNIBER, Président de la Commission Urbanisme de l’association Bouregreg.

3. Les préalables à la réhabilitation des centres historiques dans les pays arabes : une personnalité, une structure, une volonté, par le Professeur Mohamed NACIRI,

4. Quelle stratégie d’approche pour la médina de Salé ?, par M. BALBO, D. PINI, et M. F. ZNIBER.

5. Réhabilitation du patrimoine historique et perspective d’emploi : le cas de l’enceinte de Ferrara en Italie, par M. David MANTOVANI, Vice-Maire de Ferrara.

6. Politique et mesures de récupération des centres historiques en Espagne : les expériences de Madrid, Gijon, Valence, Salamanque et Barcelone, par Francisco POL.

7. Evolution d’une politique de réhabilitation : le cas d’Alep, par Stefano BIANCA.

8. L’entretien du patrimoine, approches et techniques nouvelles pour la cas de Maputo, par Giovanni FERRACUTI et Stefano PIETROGRANDE.

9. Réhabilitation de la Casbah d’Alger : vingt ans d’expériences, par Rachid Sidi BOUMEDIANE.

10. Le concept d’espace historique et la problématique de réhabilitation : étude de cas sur la médina de Tunis, par Jalal ABDELKAFI.

11. L’intervention municipale dans la ville historique : le cas de Guimaraës au Portugal, par le Professeur Nüno PORTAS.

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ANNEXE N °3

Liste des interventions à la table ronde de mars 2002 sur le thème « Réflexion citoyenne sur l’avenir de la vallée du Bouregreg »

1. Allocution d’ouverture, par Mohamed Aouad, Président fondateur de l’association Bouregreg

2. « Présentation des objectifs de la table ronde », par Mohamed Fawzi Zniber pour le comité d’organisation :

3. « Les réponses institutionnelles aux grands projets d’aménagement dans le monde », par Hervé Dupont, Secrétaire général du Groupe Central des Grands Projets d’Urbanisme en France :

Approche diagnostique : Président de séance : Professeur Mohamed Naciri, Modérateurs : Najiba Alami et Saïd Naji

Thème I : Etat des lieux (Panel constitué de l’Agence urbaine, des départements de l’environnement, des affaires culturelles, des eaux et forêts et de l’agriculture)

4. « Note introductive », par Saïd Naji pour la commission environnement de l’association Bouregreg :

5. « Caractéristiques naturelles du site du Bouregreg », par Hamid Krichi, chef du département des études à l’Agence urbaine de Rabat-Salé :

6. « Le tissu urbain de la vallée du ribat El-Fath de ses origines jusqu’au XXème siècle », par Mohamed Es-Semmar, archéologue :

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7. « Histoire contemporaine de l’occupation de la vallée », par Robert Chastel :

8. « La vallée du Bouregreg : la vision du département des eaux et forêts », par Noureddine Amirat, Direction des eaux et forêts :

9. « Projets de mise en valeur en bour de Sehoul », par El Mahdi Arrifi, chef de service Semi-Evaluation, Administration du Génie Rural, Ministère de l’Agriculture :

10. « Projet d’aménagement hydro-agricole du périmètre Grou (Oulja de Rabat-Salé) », par El Mahdi Arrifi, chef de service Semi-Evaluation, Administration du Génie Rural, Ministère de l’Agriculture :

Thème II : Les infrastructures de la vallée (Panel constitué de l’Agence urbaine, du département de l’Equipement, de la Wilaya de Rabat-Salé, de l’ONCF, de l’ONEP et de la REDAL)

11. « Les infrastructures de base de la vallée du Bouregreg », par Abdelmalek Bentaouhit, Directeur Régional de l’Equipement :

12. « Projet de train à grande vitesse », par Moha Khaddour, Directeur de la Maintenance et des Installations Fixes, ONCF :

13. « Dépollution de l’Oued Bouregreg », par M. Chouini, Directeur à la REDAL :

14. « L’ONEP et la vallée du Bouregreg », par M. Dehhou, Directeur Régional de l’ONEP :

Thème III : Etat de l’environnement de la vallée (Panel constitué des départements de l’Environnement, de la Santé, de l’Equipement, de la Wilaya, de l’Agence urbaine, de la Direction des Régies et des Eaux et Forêts)

15. « La gestion des déchets solides dans la vallée du Bouregreg : les cas des deux décharges de l’Oulja et de Akreuch », par Leïla Benjelloun, Wilaya de Rabat-Salé :

16. « Dépollution : suivi et contrôle », par Ahmed Kawni, Ministère de l’Intérieur :

17. « Vallée du Bouregreg : un site des exceptions et des convoitises », par Ahmed Chihab, chef de service des Sites, Département de l’Environnement :

18. « Diapositives sur le site des exceptions et des convoitises », par Ahmed Chihab, chef de service des Sites, Département de l’Environnement :

19. « La circulation et les transports dans la vallée », par Hassan Bentaleb, membre du comité d’organisation :

DEBAT

Approche prospective : Président de séance : Abdesslam Aboudrar, Modérateurs : Ahmed Hajji, Mekki Zouaoui et Amine Nejjar

Thème IV : les aspects institutionnels et financiers des grands projets

20. «Réflexion sur les différentes possibilités de gestion de la vallée », par Hervé ,,,

Thème V : Les vocations du site

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21. « Essai de synthèse sur les vocations futures dans les études existantes sur la vallée du Bouregreg », par Younes El Kasmi, chef de Division des Etudes Générales, Agence urbaine de Rabat-Salé :

22. « Diaporama sur les formes d’occupation actuelles », par Zniber

DEBAT

ALLOCUTION DE SYNTHESE

ANNEXE N °4

Liste des interventions au colloque du 18-19 octobre sur

« Les remparts de l’estuaire du Bouregreg »

Séance d’ouverture

1. Allocution de présentation du colloque, par Mostapha Al Jawhari

2. Allocution du Ministre de la Culture Mohamed Achaàri

3. Allocution du Président fondateur de l’association Bouregreg Mohamed Aouad,

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4. Allocution du Président de l’association Ribat Al fath pour le développement durable Abdelkarim Bennani

1ère séance : Les remparts : des études historiques et patrimoniales

5. Les remparts des berges du Bouregreg : un système de sécurité renforcé ,,,, ?, par Abdelaziz Benabdellah

6. Le système de défense autour de l’ancienne ville de Salé (Chellah), par Ammar Akraz

7. Les remparts almoravides et almohades de la Casbah des Oudayas, par Al Arbi Rbati

8. Les remparts de la ville de Ribat Al Fath de l’époque almohade jusqu’au XIXe siècle, par Mohamed Semmar

2ème séance : L’organisation de l’espace intramuros

9. L’organisation

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