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18 | La Lettre du Rhumatologue N o 390 - mars 2013 MISE AU POINT Figure 1. Anatomie du tractus iliotibial. Muscle grand fessier Crête iliaque Sartorius Muscle tenseur du fascia lata Droit fémoral Muscle biceps fémoral Muscle vaste latéral Patella Bandelette iliotibiale La pathologie du tractus iliotibial Pathology of the iliotibial tract A. El Ibrahimi*, H. Mahdane*, A. El Ayoubi*, M. Shimi*, A. Elmrini* * Service de chirurgie ostéo- articulaire B4, CHU Hassan-II, Fès, Maroc. L e tractus iliotibial est une structure anatomique intéressante, qui peut être la source d’une douleur initialement attribuée à la hanche et au genou. Sa pathologie variée et parfois méconnue peut en concerner toutes les composantes anato- miques. Les patients consultent généralement pour une symptomatologie douloureuse autour du genou ou de la hanche. Le diagnostic est facile si on y pense. L’objectif de ce travail est de décrire l’anatomie et la fonction du tractus iliotibial ainsi que de mettre l’accent sur les principaux désordres cliniques. Anatomie Le tractus iliotibial est formé par l’association du fascia lata, du muscle tenseur du fascia lata (tensor fasciae femoris), du fascia du grand fessier (gluteus maximus) et de la bandelette iliotibiale nommée aussi “bandelette de Maissiat”. Au niveau proximal, le fascia lata enveloppe le muscle tenseur du fascia lata et couvre le muscle grand fessier. Le fascia de ces 2 muscles rejoint la bandelette iliotibiale juste au-dessous du grand tro- chanter, formant le tendon terminal triangulaire du “deltoïde fessier”. La bandelette iliotibiale se mobilise librement sur le grand trochanter. Au niveau distal, le tractus iliotibial se termine sur la rotule, la tête du péroné et le tubercule de Gerdy sur la tubérosité externe du tibia (figure 1) [1, 2]. Le muscle tenseur du fascia lata a son origine au niveau de l’épine iliaque antérosupérieure, en arrière de l’origine du muscle sartorius. Son innervation pro- vient du nerf fessier supérieur, qui innerve également le petit et le moyen fessier. La vascularisation est assurée par un vaisseau unique, qui provient d’une branche ascendante de l’artère circonflexe posté- rieure. Le muscle grand fessier est un large muscle qui s’insère sur le tiers postérieur de l’aile iliaque et se termine en bas sur le tractus iliotibial et sur la face postéro-externe du grand trochanter. Il est innervé par le nerf fessier inférieur et vascularisé par l’artère fes- sière supérieure et inférieure ainsi que par la première branche perforante de l’artère fémorale profonde. Fonctions du tractus iliotibial Au niveau de la hanche La fonction du muscle tenseur du fascia lata dépend de la position de la hanche, mais il n’est pas considéré comme un muscle puissant. Les fibres antérieures

La pathologie du tractus iliotibial - Edimark · La pathologie du tractus iliotibial Pathology of the iliotibial tract A. El Ibrahimi*, H. Mahdane*, A. El Ayoubi*, M. Shimi*, A. Elmrini*

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Page 1: La pathologie du tractus iliotibial - Edimark · La pathologie du tractus iliotibial Pathology of the iliotibial tract A. El Ibrahimi*, H. Mahdane*, A. El Ayoubi*, M. Shimi*, A. Elmrini*

18 | La Lettre du Rhumatologue • No 390 - mars 2013

MISE AU POINT

Figure 1. Anatomie du tractus iliotibial.

Muscle grand fessier

Crête iliaque

Sartorius

Muscle tenseur du fascia lata

Droit fémoral

Muscle biceps fémoral Muscle vaste latéral

Patella

Bandelette iliotibiale

La pathologie du tractus iliotibialPathology of the i l iotibial tract

A. El Ibrahimi*, H. Mahdane*, A. El Ayoubi*, M. Shimi*, A. Elmrini*

* S e r v i c e d e c h i r u rg i e o s t é o -articulaire B4, CHU Hassan-II, Fès, Maroc.

Le tractus iliotibial est une structure anatomique intéressante, qui peut être la source d’une douleur initialement attribuée à la hanche et

au genou. Sa pathologie variée et parfois méconnue peut en concerner toutes les composantes anato-miques. Les patients consultent généralement pour une symptomatologie douloureuse autour du genou ou de la hanche. Le diagnostic est facile si on y pense. L’objectif de ce travail est de décrire l’anatomie et la fonction du tractus iliotibial ainsi que de mettre l’accent sur les principaux désordres cliniques.

Anatomie

Le tractus iliotibial est formé par l’association du fascia lata, du muscle tenseur du fascia lata (tensor fasciae femoris), du fascia du grand fessier (gluteus maximus) et de la bandelette iliotibiale nommée aussi “bandelette de Maissiat”.Au niveau proximal, le fascia lata enveloppe le muscle tenseur du fascia lata et couvre le muscle grand fessier. Le fascia de ces 2 muscles rejoint la bandelette iliotibiale juste au-dessous du grand tro-chanter, formant le tendon terminal triangulaire du “deltoïde fessier”. La bandelette iliotibiale se mobilise librement sur le grand trochanter. Au niveau distal, le tractus iliotibial se termine sur la rotule, la tête du péroné et le tubercule de Gerdy sur la tubérosité externe du tibia (fi gure 1) [1, 2].Le muscle tenseur du fascia lata a son origine au niveau de l’épine iliaque antérosupérieure, en arrière de l’origine du muscle sartorius. Son innervation pro-vient du nerf fessier supérieur, qui innerve également le petit et le moyen fessier. La vascularisation est assurée par un vaisseau unique, qui provient d’une branche ascendante de l’artère circonfl exe posté-rieure. Le muscle grand fessier est un large muscle

qui s’insère sur le tiers postérieur de l’aile iliaque et se termine en bas sur le tractus iliotibial et sur la face postéro-externe du grand trochanter. Il est innervé par le nerf fessier inférieur et vascularisé par l’artère fes-sière supérieure et inférieure ainsi que par la première branche perforante de l’artère fémorale profonde.

Fonctions du tractus iliotibial

Au niveau de la hanche

La fonction du muscle tenseur du fascia lata dépend de la position de la hanche, mais il n’est pas considéré comme un muscle puissant. Les fi bres antérieures

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Points forts » La pathologie du tractus iliotibial est variée et est parfois méconnue. » Toutes les composantes anatomiques de cette structure peuvent être concernées. » Le motif de consultation est généralement une douleur autour du genou ou de la hanche. Le diagnostic

est facile si on y pense. » Le traitement se doit d’être symptomatique et préventif initialement. En cas d’échec, le traitement

chirurgical s’impose.

Mots-clés Tractus iliotibialBursite trochantérienneRessaut de la hancheSyndrome de friction du genou

Highlights » The iliotibial tract pathology

is varied and sometimes unknown. » All components of this

anatomical structure may be involved. » The reason for consultation is

usually pain around the knee or hip. The diagnosis is easy if you think about it. » Treatment should be symp-

tomatic and preventive initially. If unsuccessful, surgical treat-ment is required.

KeywordsIliotibial tract

Trochanteric bursitis

Snapping hip

Friction syndrome of the knee

fléchissent la hanche, les fibres postérieures assurent la rotation interne et l’abduction de la hanche. Le grand fessier est principalement extenseur et rota-teur externe de la hanche. Selon la position de cette dernière, il peut être abducteur ou adducteur.La portion proximale du grand fessier, qui met en tension la bandelette de Maissiat, est essentielle-ment abductrice de hanche.En cas de contraction équilibrée entre le muscle tenseur du fascia lata et le grand fessier, la traction sur le tendon terminal du deltoïde fessier s’effectue dans l’axe longitudinal. Il devient abducteur pur. Il joue un rôle important dans l’équilibre transversal du bassin, lors de l’appui monopodal.

Action au niveau du genou

Lors des mouvements de flexion/extension du genou, la bandelette de Maissiat balaie le compartiment externe du genou. Entre 0 et 30° de flexion, elle est en avant du sommet du condyle externe. Le muscle tenseur du fascia lata est alors extenseur du genou. Au-delà de 30° de flexion, elle se retrouve en arrière du sommet du condyle externe et devient fléchisseur et rotateur externe du genou. La bandelette de Maissiat joue éga-lement un rôle dans la stabilité transversale du genou. Elle fait partie des formations antéro-externes qui s’opposent, avec le ligament latéral externe, au varus.

La pathologie du tractus iliotibialAutour de la hanche

◆ Les bursites trochantériennesLe tractus iliotibial se déplace librement sur le grand trochanter ; une tension accrue de ce dernier peut aggraver une bursite douloureuse existante. La bourse, souvent décrite comme trochantérienne, est la bourse superficielle du muscle grand fessier située entre le grand fessier-fascia lata et le plan du moyen fessier. Des études anatomiques révèlent qu’au moins 2 autres bourses sont associées à chacun des tendons des muscles moyen et petit fessiers. Chacune de ces bourses séreuses peut être une source de douleur locale.

Le diagnostic de bursite peut être confirmé après injection d’un anesthésique local qui fait disparaître la douleur, et devant des radiographies normales. Le traitement habituel comprend des anti-inflam-matoires non stéroïdiens (AINS) par voie orale, le glaçage et l’infiltration de corticoïdes. La bursite trochantérienne récurrente ou persistante doit être évaluée par IRM pour permettre un diagnostic étio-logique plus précis. Quelques cas de bursite réfrac-taire ont été traités chirurgicalement. Slawski et Howard (3) rapportent d’excellents résultats après traitement chirurgical des bursites trochantériennes réfractaires faisant suite à une durée minimale de 1 an de traitement médical. La chirurgie consistait en une fente longitudinale du tractus et en l’exci-sion de la bourse. Dunbar et Craig (4) ont rapporté des résultats similaires dans une série analogue en utilisant un allongement en Z de la bandelette avec excision de la bourse. Une autre méthode consiste à enlever une tranche du grand trochanter, ce qui réduit la pression du tractus. Cette technique s’est révélée satisfaisante chez les patients présentant des symptômes après échec d’une chirurgie sur les tissus mous (5).

Le ressaut externe de la hanche

Le ressaut externe de la hanche est un accrochage du tractus sur le relief formé par le grand trochanter lors des mouvements actifs de la hanche. La bande-lette iliotibiale, en arrière du trochanter en exten-sion, saute brutalement lors de la flexion active de la hanche, surtout si celle-ci s’accompagne d’une adduction qui en augmente la tension et inver-sement. Les patients signalent souvent que leur hanche peut se déboîter. Le ressaut peut être observé dans les suites d’un trau-matisme direct de la face latérale de la hanche ayant occasionné une fracture trochantérienne, un héma-tome, une bursite ou une fibrose, ou encore dans les suites d’un geste chirurgical : ostéotomie fémorale, fermeture sous tension après prélèvement du fascia lata pour une ligamentoplastie du genou. En dehors de ces causes acquises, l’étiopathogénie demeure incertaine. Des causes squelettiques ont été incriminées : une coxa vara avec une saillie

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La pathologie du tractus iliotibial MISE AU POINT

relative anormale du trochanter, une différence de longueur des membres inférieurs, des anomalies de la statique rachidienne ou pelvienne, ou des ano-malies d’axe des membres inférieurs ou des pieds. Des causes musculaires pourraient exister aussi, notamment une insertion anormalement étendue du grand fessier sur le bord postérieur de la bande-lette iliotibiale, à l’origine d’une dysharmonie dans la balance musculaire. La symptomatologie comporte le ressaut décrit et reproduit par le patient. Elle est parfois accompa-gnée de douleurs, soit brutales lors du ressaut, soit chroniques avec, dans certains cas, une irradiation à la face latérale de la cuisse.L’examen physique permet d’observer un ressaut visible et palpable lors des mouvements actifs de la hanche. Le patient sait parfaitement le reproduire. En revanche, en passif, on ne le déclenche pratique-ment jamais. La douleur provoquée à la palpation locale fait penser à une bursopathie associée. Une radiographie standard à la recherche d’une ano-malie locale ou d’une coxopathie est indispensable. L’échographie peut montrer un épaississement de la bandelette et l’existence d’une bursopathie. Le traitement de première intention est médical et se compose de soins rééducatifs notamment, avec étirement de la bandelette iliotibiale, et de l’utilisation des AINS. Le traitement chirurgical des ressauts externes réfractaires comprend une plastie en Z de la bandelette iliotibiale faite au niveau du grand trochanter, avec de prévisibles bons résultats (6).

La paralysie du tenseur du fascia lata

Müller-Vahl a rapporté, en 1985, un seul cas de para-lysie isolée et complète du muscle du tenseur fascia lata avec une incapacité fonctionnelle minime (7).

Le syndrome de loge chronique du tenseur du fascia lata

En 1983, Rydholm et al. ont rapporté le cas de 2 patients atteints du syndrome de loge chronique du tenseur du fascia lata. Ces patients se plaignaient de douleurs à l’effort et en position assise ainsi que d’une tuméfaction en regard du muscle. La tomo-densitométrie a montré une augmentation de la masse musculaire, et les mesures de pression étaient très élevées. L’évolution était favorable après fascio-tomie (8).

La déhiscence du tractus iliotibial

Elle a été signalée après arthroplastie totale de la hanche mais peut se produire après d’autres chirur-gies autour de la hanche. Les patients présentent une douleur intense de la cuisse, sont dans l’impossibilité de se coucher sur le côté atteint, et ont un orifice palpable et manifeste de la bandelette iliotibiale nécessitant une réparation chirurgicale (9).

La contracture de la bandelette iliotibiale de Maissiat

La contracture de la bandelette iliotibiale de Maissiat peut être observée dans les séquelles d’une polio-myélite ou dans les suites d’un traumatisme ou d’une chirurgie de la hanche. Elle peut aussi être idiopa-thique. Elle affecte le plus souvent les femmes d’âge moyen (30-50 ans) et est généralement unilatérale. Les contractures sont fréquemment accompagnées de douleurs au niveau de la fesse et de la cuisse. L’examen physique met en évidence une douleur de la bandelette de Maissiat sans preuve objective de radiculopathie. Cette douleur s’accroît avec l’adduc-tion membre étendu et un test d’Ober, qui révèle la contracture : le sujet est en décubitus latéral sur le côté non testé, le genou fléchi. Le praticien place une contre-prise sur la crête iliaque homolatérale, à la hanche testée. Il amène la cuisse (avec genou fléchi à 90°) en abduction puis en extension jusqu’à l’alignement avec le tronc afin de placer la bande-lette iliotibiale en dehors du grand trochanter. Tout en gardant l’extension, on laisse la pesanteur mettre la cuisse en adduction vers la table. Le test est consi-déré comme positif si le membre inférieur testé ne peut être mis en adduction, et ce, proportionnelle-ment à l’intensité de la contracture (figure 2). Un nouveau test décrit par Gautam et Anand (10) est effectué en décubitus ventral, le genou fléchi à 90° et la hanche en extension et en abduction. L’incapacité d’adduction de la cuisse dans cette position et en bloquant le pelvis témoigne d’une contracture de la bandelette de Maissiat. L’avantage de ce test est qu’il élimine la flexion de la hanche, ce qui le rend plus fiable que le test d’Ober. Dans une revue de la littérature, Bhave et al. rapportent que, après une prothèse totale de hanche, 15 patients sur 67 (22 %) ont eu une contracture de la bandelette de Maissiat, conduisant les patients à croire en un allongement du membre qui avait reçu la prothèse (11). De bons résultats ont été observés après un programme de rééducation bien adapté. Les contractures réfrac-

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MISE AU POINT

Figure 3. Test de Noble.

Figure 2. Test d’Ober.

taires de la bandelette iliotibiale peuvent être trai-tées chirurgicalement. Les techniques chirurgicales qui ont été signalées comprennent soit une libéra-tion allant jusqu’au-dessus du condyle fémoral (pro-cédure de Yount), soit une plastie en Z au niveau du grand trochanter ou bien une plicature de la partie postérieure de la bandelette vers l’avant afin d’éviter tout conflit avec le grand trochanter (12, 13).

Autour du genou : le syndrome de friction iliotibialC’est la traduction clinique d’un conflit de la bande-lette iliotibiale avec le sommet du condyle externe rencontré chez les cyclistes et les coureurs de fond. Les hommes sont plus touchés que les femmes. On peut l’expliquer par la prédominance masculine lors de la pratique sportive. D’autres explications sont avancées. Les femmes sont hyperlaxes et pré-sentent plutôt un morphotype en genu valgum. Leur condyle externe est moins proéminent. Enfin, la pré-sence de graisse sous-cutanée diminue le risque de conflit entre la bandelette iliotibiale et le condyle externe (14-17). Une douleur de la face externe du genou, lors de la pratique sportive, est le motif de consultation. Elle est de survenue progressive. L’interrogatoire ne retrouve pas la notion de traumatisme récent. En revanche, il y a un changement des habitudes de la pratique sportive : augmentation brutale du kilométrage, modification de surface. La douleur peut être d’intensité variable mais impose le plus souvent l’arrêt de l’activité. Elle cède au repos, peut cependant se réveiller lors de la marche sur terrain vallonné ou lors de la montée et de la descente d’un escalier. La reprise sportive au bout de quelques jours s’accompagne de la récidive de la douleur. Elle survient dans les mêmes conditions au bout d’un nombre de kilomètres relativement constant pour le même individu.L’examen physique peut révéler un crépitement au niveau du condyle externe ou au-dessus du tubercule de Gerdy. Deux tests cliniques permettent de faire le diagnostic :

➤ le test de Noble : le sujet est allongé sur la table d’examen, genou fléchi à 90°. On exerce une pression digitale au niveau du sommet du condyle externe, 2 à 3 cm au-dessus de l’interligne articulaire. On effectue alors une extension passive du genou en maintenant le tibia en varus et en rotation interne. Vers 30° de flexion, une douleur vive apparaît, ce qui permet d’affirmer le diagnostic (figure 3) ;

➤ le test de Renne : ce test consiste à demander au patient de réaliser, en appui monopodal, des mouve-ments de flexion/extension du genou pour reproduire la symptomatologie douloureuse (figure 4, p. 22). Éventuellement, un test à la xylocaïne, en induisant des signes à l’examen clinique, confirmera le diag-nostic. À distance du dernier entraînement sportif, l’examen clinique peut se révéler normal. Il faut alors demander au patient de revenir dans les suites immé-diates de l’activité responsable de la douleur car le bilan radiographique est normal.L’IRM, qui n’est pas indispensable, montre une dimi-nution du signal en T1 et une augmentation en T2 au niveau de la bandelette iliotibiale, dans la zone adjacente au condyle externe (18, 19). Devant une douleur du compartiment externe du genou, le diagnostic différentiel se pose avec une ten-dinite du biceps ou du poplité, une lésion méniscale ou capsuloligamentaire externe, une atteinte de la péronéotibiale supérieure, une fracture de fatigue du col du péroné, une lésion chondrale du compartiment

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La pathologie du tractus iliotibial MISE AU POINT

Figure 4. Test de Renne.

externe de la fémorotibiale ou de la fémoropatellaire, une douleur projetée : coxopathie, sciatique tron-quée. Un examen clinique rigoureux, complété par une imagerie adéquate si nécessaire (radiographie, arthrographie, scintigraphie), permet d’établir le diagnostic de la lésion. Le traitement consiste en premier lieu à éliminer les signes à l’examen clinique. Le repos est indispensable et peut suffire. L’infiltra-tion de dérivés stéroïdiens est proposée dans les formes hyperalgiques ou en cas de bursite. L’utili-sation d’AINS per os est peu recommandée. On peut leur préférer les anti-inflammatoires non stéroïdiens

ou stéroïdiens en application locale. La cryothérapie est utile. La physiothérapie peut être proposée.En second lieu, le traitement est préventif afin d’éviter les récidives. Son objectif est de lutter contre les facteurs favorisant le conflit. Un bilan morphostatique est alors nécessaire, ainsi qu’un bilan podologique statique, voire dynamique. Des séances d’auto étirement de la bandelette de Maissiat sont préconisées, de même que le remplacement de chaussures de sport usagées ou encore une modi-fication du réglage des pédaliers, afin d’éviter une sollicitation en rotation interne du segment jambier, et de la selle, qui doit être abaissée afin de limiter l’angle d’extension du genou. Le traitement chirur-gical est indiqué après échec prolongé d’un traite-ment conservateur bien mené et chez des patients motivés. Différentes techniques sont proposées :

➤ une section transversale des fibres postérieures de la bandelette iliotibiale au niveau de la zone de conflit d’une largeur de 2 cm (20). La section de la bandelette peut être effectuée par voie percutanée sous anesthésie locale sur un genou fléchi à 90°, mais le taux de reprise chirurgicale est important ;

➤ une excision chirurgicale de la zone de conflit. Elle peut se faire d’une manière semi-ovalaire, avec 2 cm de rayon (21) ;

➤ une plastie d’allongement en Z. Cette tech-nique ne déstabilise pas le compartiment externe du genou, comme on aurait pu le craindre.La rééducation est immédiate et la reprise des acti-vités sportives peut se faire de manière progressive.

Conclusion

Le tractus iliotibial peut être la source d’une douleur initialement attribuée à la hanche et au genou. L’appré ciation de son anatomie, de sa fonction et de ses symptômes doit conduire à une amélioration du diagnostic et de la gestion thérapeutique. Le trai-tement se doit d’être symptomatique et préventif, initialement. En cas d’échec, le traitement chirurgical s’impose. ■

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Références bibliographiques

Retrouvez l’intégralité des références bibliographiques sur www.edimark.fr

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MISE AU POINT

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Références bibliographiques

La pathologie du tractus iliotibialPathology of the i l iotibial tract

A. El Ibrahimi, H. Mahdane, A. El Ayoubi, M. Shimi, A. Elmrini