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La place des femmes dans la sphère publique en France sous la V e République : femmes de présidents de la république, femmes fonctionnaires, femmes politiques

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La place des femmes dans lasphère publique en France sousla Ve République : femmes deprésidents de la république,femmes fonctionnaires, femmespolitiquesLaurence FradinPublished online: 20 May 2008.

To cite this article: Laurence Fradin (2008) La place des femmes dans la sphèrepublique en France sous la Ve République : femmes de présidents de la république,femmes fonctionnaires, femmes politiques, Contemporary French and FrancophoneStudies, 12:2, 213-220, DOI: 10.1080/17409290802058071

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Contemporary French and Francophone StudiesVol. 12, No. 2, April 2008, pp. 213–220

LA PLACE DES FEMMES DANS LA SPHERE

PUBLIQUE EN FRANCE SOUS LA Ve

REPUBLIQUE : FEMMES DE PRESIDENTS

DE LA REPUBLIQUE, FEMMES

FONCTIONNAIRES, FEMMES POLITIQUES

Laurence Fradin

La place accrue des femmes francaises dans la sphere publique sous la Ve

Republique peut etre illustree aisement de trois facons.D’abord, par le changement de l’image de la femme du president de la

Republique : en 1958, la femme du fondateur de la Ve Republique, Madame deGaulle, « tante Yvonne », est discrete et quasi invisible. En 2007–2008, lamediatisation de la place de la femme du president de la Republique, que ce soitCecilia Sarkozy ou Carla Bruni-Sarkozy, est demontree a la fois par la place dechoix qui lui est faite dans la presse, par l’ancien metier, tres mediatique, de cesdeux femmes (mannequins), et par l’appellation qui leur est donnee, pour lapremiere fois en France : celle de premiere dame.

Ensuite par le fait que la France a eu, pour la premiere fois en 2007, unecandidate presente au 2e tour de l’election presidentielle : Segolene Royal.

Enfin par l’evolution du nombre de femmes au Gouvernement. Au debut dela Ve Republique, il y a cinquante ans, une seule femme etait secretaire d’Etat,avec le portefeuille des questions sociales en Algerie et de l’evolution du droitmusulman. A l’arrivee de M. Sarkozy a la presidence de la republique, en 2007,7 ministres sur 16 sont des femmes,1 certaines a des portefeuilles clefs : MmeAlliot-Marie a l’Interieur – apres avoir occupe la Defense dans le Gouvernement

ISSN 1740-9292 (print)/ISSN 1740-9306 (online)/08/020213–8 � 2008 Taylor & Francis

DOI: 10.1080/17409290802058071

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anterieur – Mme Lagarde a l’economie, aux finances et a l’emploi, Mme Dati ala Justice.

Nous avons donc bien des raisons de nous interesser a trois categories defemmes (femmes fonctionnaires, femmes politiques, femmes de president de larepublique), a priori heterogenes mais ayant un point commun : ces troiscategories exercent, a des degres divers, un role public; elles constituent doncun miroir grossissant, non seulement de l’evolution de la place des femmes enFrance, mais aussi de la societe francaise tout entiere, de ses modes defonctionnement et d’une certaine conception de la chose publique. C’est donc atravers ce prisme des femmes dans la sphere publique que l’on essaiera dedegager cinq caracteristiques de la societe francaise.

L’emergence ancienne d’un discours philosophique etpolitique francais sur l’egalite entre femmes et hommes, maisune France en retard par rapport a des pays comparablesdans la place faite aux femmes

Des la Revolution a la fin du 18e siecle, une declaration des droits de la femmeet de la citoyenne a existe, redigee par Olympe de Gouges, femme de lettres etfemme politique. Cette declaration prevoyait dans son article 1 que « la femmenaıt libre et demeure egale a l’homme en droits », notamment en matierepolitique. Olympe de Gouges avait ecrit « la femme a le droit de monter al’echafaud ; elle devrait avoir aussi le droit de monter a la tribune » ; elle amalheureusement pris cette maxime « a la lettre » puisqu’elle a ete guillotineepour raisons politiques, en 1793, sous la terreur instauree par Robespierre.

Au XXe siecle, en 1949, Simone de Beauvoir a eu un role majeur dans lareflexion sur la place des femmes, lancant notamment la formule celebre « onne naıt pas femme on le devient » par laquelle la feminite est affirmee commeun fait de societe, historique et pas naturel.

Ces reflexions, a la fois philosophiques et politiques, n’ont pas empeche leretard de la France dans la parite hommes/femmes.

Un premier exemple est donne par le droit de vote des femmes. Il a eteinstaure aux Etats-Unis en 1919 ; mais ce droit a ete cree en France seulement parune ordonnance du 21 avril 1944 (« les femmes sont electrices et eligibles dansles memes conditions que les hommes ») et mis en place effectivement en 1945.Dans l’Europe des quinze, dix pays avaient instaure le droit de vote des femmesavant la France (certains des le debut du XXe siecle – Finlande, Danemark,Autriche, Royaume Uni), quatre apres elle (le plus tardif etant le Portugal en1976). En outre, il a fallu attendre la fin des annees soixante en France pour quece droit de vote soit exerce de facon effective et massive par les femmes.

Un second exemple est donne par le fait que la France a connu une seuleexperience de premier ministre feminin (Edith Cresson). Cette experience est

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tardive : 1991 (alors que Mme Thatcher a ete premier ministre en 1979) ; elle aete courte, moins d’un an, quand celle de Mme Thatcher a dure 11 ans. Labrievete de cette experience n’est pas liee au fait que Mme Cresson soit unefemme ; mais Mme Cresson a neanmoins effectivement souffert a ce posted’etre une femme. En outre, le fait que la seule experience francaise d’unpremier ministre femme se soit terminee au bout de peu de temps a ete percucomme l’impossibilite pour l’opinion publique d’accepter une femme commepremier ministre.

Un troisieme exemple est donne par la faible part des femmes auParlement. La France, sur 25 membres de l’Union europeenne en 2006, est21eme par le pourcentage de femmes au Parlement (13,9%). Les pays mieuxclasses sont souvent ceux de l’Europe du Nord mais surtout ceux ou le scrutinest proportionnel. La Suede est classee 1e (45,3% de femmes). Mais certainspays latins sont bien classes (Espagne : plus de 30% de femmes).

Des lois ont cherche a combler ce retard et a developper les mandatselectoraux des femmes en France, notamment la loi du 28 juin 1999 (sur l’egalacces des femmes et des hommes aux mandats electoraux et aux fonctionselectives) et la loi du 6 juin 2000 sur la parite en politique. Cette seconde loiimpose aux partis et aux groupements politiques de presenter 50% de candidatsdes deux sexes, a 2% pres. A defaut, des penalites financieres sont appliquees.Mais cette loi n’a pas eu l’effet escompte : les partis politiques disposant demoyens importants de financement preferant . . . payer les penalites financieresplutot que d’appliquer la parite.

Les avancees relatives aux droits des femmes dansla vie publique se font souvent par la voie juridiqueou institutionnelle

C’est par exemple la constitution de 1958 elle-meme qui a ete modifiee en 1999pour prevoir que « la loi favorise l’egal acces des femmes et des hommes aumandats electoraux et aux fonctions electives » et que « les partis doiventcontribuer a la mise en œuvre » de ce principe. Les avancees en faveur des femmesse font le plus souvent par l’adoption de lois, la creation de commissions. Oncitera par exemple la creation de l’observatoire de la parite hommes/femmes,par decret en 1995, la creation d’un departement ministeriel charge de lacondition feminine mais souvent joint a d’autres competences les plus diverses :vie quotidienne (!), emploi, solidarite, formation professionnelle. Ces moyensjuridiques sont, certes, la preuve de la volonte du pays d’affirmerinstitutionnellement la place des femmes; mais elles sont aussi la preuvequ’on est oblige de passer par un dispositif institutionnel, non « naturel », pourfaire bouger les choses.

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Un decalage entre la place des femmes dans l’ensemble de lafonction publique et leur place reduite dans les postes aresponsabilites

Les femmes representent 56% de la fonction publique de l’Etat, mais seulement22% des eleves de l’Ecole nationale d’administration (ENA), ecole chargee deformer les hauts fonctionnaires, ouverte aux femmes des sa creation en 1946.

Dans l’Education nationale, les femmes enseignantes sont tres nombreuses;il n’y a en revanche que 12 femmes presidentes d’universites sur 94. Dansd’autres secteurs, des situations des femmes sont similaires : sur 106 prefets, il ya seulement six femmes ; 21 ambassadeurs sur 179 ; 26 directeurs d’admin-istration centrale sur 185. Il faut dire toutefois que ce faible nombre de femmesdoit etre compare au nombre, lui aussi faible, de femmes dans le potentiel denominations possibles. La France n’a pas choisi de mettre en place des quotasdans la fonction publique, mais plutot de favoriser, a merite egal, l’acces desfemmes aux postes de decision.

Les facteurs a l’origine de cette situation sont pour certains, communs a laFrance et a d’autres pays : facteurs educatifs et socio-culturels (les femmes nesont pas eduquees dans la perspective d’assumer des postes a hauteresponsabilite); modes d’organisation et de management dans les lieux dedecision qui sont peu adaptes aux contraintes des femmes (les contrainteshoraires, les deplacements, nombreux dans les postes de direction de la hautefonction publique, sont peu favorables a l’exercice des charges de famille); causesliees aux comportements des femmes elles memes (les femmes ont integre le faitqu’elles ne seraient pas faites pour exercer des professions de haut niveau).

On peut aussi voir des causes francaises a la faiblesse relative de la place desfemmes dans la haute fonction publique : une certaine misogynie . . . sans doutelatine que l’on retrouve ailleurs, comme par exemple en litterature. LouiseLabe, poete du 16e siecle, etait longtemps consideree comme un ecrivainimaginaire sous lequel se cachaient divers poetes; elle n’avait ainsi pas d’identiteet pas d’identite feminine. Au 19e siecle, George Sand, ecrivain ( je n’ose dire «ecrivaine » tant le mot est laid en francais) a ecrit ses premieres œuvres sous lenom ambigu de J. Sand (son mari s’appelait Jules Sandeau) et le nom de GeorgeSand est un pseudonyme . . . masculin.

Le reflet du peu de place faite aux femmes dans les postes a responsabilitedans la fonction publique est la faible feminisation des noms de fonctions : oncontinue a dire « une femme prefet » (et non prefete), « une femmeambassadeur » (il est vrai que le mot ambassadrice designe la femme del’ambassadeur), souvent « une femme directeur d’administration centrale ». Unrecent rapport sur la feminisation des noms a meme constate que l’on disaitd’une femme qu’elle etait « conseiller a la Cour de cassation », mais qu’onfeminisait plus facilement les noms d’une juridiction de niveau inferieur(« conseillere a la Cour d’appel »). Les fonctions de directeur general ou

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secretaire general sont aussi rarement feminisees. Il est vrai que la languefrancaise est assez misogyne : dans un domaine qui ne se rapporte pas a lafonction publique, mais a une activite ou la France excelle, la haute couture, ondit de Coco Chanel qu’elle est couturier ou grand couturier, noms masculins;mais la femme dont le metier est de coudre, sans faire de la haute couture . . . estune couturiere . . .

Un exemple de l’evolution de la place des femmes dans la haute fonctionpublique peut etre donne avec la Cour des comptes. La Cour des comptes estl’institution superieure de controle francaise, comme le GAO (GovernmentAccountability Office) l’est pour les Etats-Unis ou le NAO (National AuditOffice) pour le Royaume Uni. Sa specificite, qu’elle partage avec d’autres paysgeneralement latins, est d’etre une juridiction, composee donc essentiellementde magistrats. La Cour des comptes juge, par des arrets, les comptes publics.Mais sa principale tache aujourd’hui est double : certifier les comptes de l’Etat ;evaluer les politiques publiques, tache consideree comme « moderne » mais dejapresente lorsque Napoleon, creant la Cour des comptes il y a tout juste deuxcents ans, lui a demande de s’assurer du « bon emploi des fonds publics ».

La Cour des comptes, a la fois parce que c’est un des « grands corps » de lafonction publique,2 une institution financiere et une juridiction, est restee treslongtemps un univers exclusivement masculin . . . malgre les robes de magistratsque portent ses membres. L’arrivee des femmes a des postes de responsabilites ausein de la Cour des comptes a ete tardive : premiere femme presidente en 2006.

Mais il y a une feminisation importante aujourd’hui dans les differents grades :trois femmes sont presidentes de chambre sur huit postes (mais sur les troisfemmes presidentes de chambre, deux sont a la tete de chambres qui controlentun secteur . . .« considere comme » feminin : les affaires sociales et la sante) ; 25%de femmes dans les conseillers maıtres ; 41% dans les conseillers referendaires.

La tentative de feminisation des noms des grades de magistrats n’a pasvraiment abouti a la Cour. Ou plutot, curieusement, la feminisation a ete adopteepour le premier des grades de magistrats (on dit une « auditrice » a la Cour descomptes) mais pas pour les grades superieurs (on ne dit que tres peu « conseillerereferendaire », on ne dit que peu « conseillere maıtre ». . . et jamais « conseilleremaıtresse », en raison, sans doute du sens ambigu de ce mot en francais . . .). Lafeminisation importante des presidents de chambre, toute recente, dont on vientde parler, a neanmoins fait que l’on parle couramment de presidente de chambre.

La France connaıt des mouvements de « stop and go » dans laplace qu’elle accorde aux femmes : une successiond’avancees et de reculs

En ce qui concerne la place des femmes au Gouvernement, les principalesdates favorables aux nominations feminines sont 1936 (Front populaire),

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le lendemain de la 2e guerre mondiale (1946), l’arrivee au pouvoir de M.Giscard d’Estaing (1974), la presidence de M. Mitterrand (1981),le Gouvernement Juppe (1995), la feminisation lors de la presidence deM. Sarkozy, evoquee supra (2007). Mais ces avancees sont suivies de reculs.Le recul le plus marquant est celui du Gouvernement Juppe de 1995, quicomprenait douze femmes sur quarante-trois ministres. Mais cetteexperience a ete courte : le nombre de femmes a ete ramene a quatretres vite. Les femmes nommees puis demises rapidement de leurs fonctionsont, de facon misogyne, ete appelee les « jupettes », jeu de mots surJuppe et jupe !

Autre exemple d’avancees suivies de recul, le cas de l’Ecole nationaled’administration (ENA), ou le pourcentage de femmes a baisse ces dernieresannees, passant de 36%, a 25% et a 22%. Parmi les raisons qui expliqueraientcette baisse du nombre de femmes : l’installation de l’ecole a Strasbourg, alorsqu’elle etait a Paris, complique la vie familiale des eleves qui sont aussi souventmeres de famille avec un conjoint travaillant a Paris ; les stages obligatoires del’ecole impliquent, bien qu’ils puissent etre faits dans une ville proche dudomicile, une mobilite geographique que les femmes ne peuvent pas toujoursfaire si elles ont des enfants.

Dernier exemple d’avancee et de recul, l’instauration par la loi du 10 juillet2000 du scrutin proportionnel avec obligation stricte de parite aux electionssenatoriales dans les departements ayant au moins trois senateurs. Cette loi a eudes effets positifs (pres de 25% de femmes elues en 2004) mais l’obligation deparite a ete supprimee ensuite. En revanche on note une progression tresimportante de la place des femmes francaises dans les assemblees regionales etlocales (conseils regionaux – regions ; conseils generaux – departements ; etconseils municipaux – communes). Cette evolution est due pour partie au modede scrutin (proportionnel) et pour partie aux mesures sur la parite hommes/femmes. Elle s’est traduite par une forte proportion des femmes dans lesconseils regionaux (pres de 48%), dans les conseils municipaux (33%) et uneprogression du pourcentage de femmes maires (10,9% de maires alors qu’il n’yen avait presque aucune en 1973).

Une triple mediatisation des femmes a l’occasion del’election presidentielle de 2007

Une femme presidente ?

La France sous la Ve Republique a eu des femmes candidates a l’electionpresidentielle. Elles ont marque l‘opinion, notamment parce qu’elles avaientune identite politique et une identite feminine, bien marquees. Elles venaientd’horizons politiques tres divers : Arlette Laguiller, candidate « lutte ouvriere »

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six fois entre 1974 et 2007 ; Marie-France Garaud, candidate de droite en 1981 ;Dominique Voynet, candidate ecologiste en 1995 ; Marie-Georges Buffet,candidate communiste en 2007. Mais ces candidatures n’etaient pas de naturea pouvoir gagner l’election presidentielle.

Le grand changement date de 2007 puisque une candidate socialiste,Segolene Royal, est pour la premiere fois au second tour de l’electionpresidentielle et donc en position d’etre elue. Cette candidate a beaucoup misen avant pendant la campagne sa specificite feminine, que ce soit sur un planphysique (candidate photogenique et jolie femme, attention portee auxvetements et a leur symbolique) ou sur le plan des centres d’interets affiches,censes etre feminins (attention particuliere portee a un handicape physique dansune emission televisee, colere pendant un debat avec Nicolas Sarkozy sur lasituation d’une femme policiere agressee a sa sortie du travail, allusions a sesmaternites). On peut se demander si cette feminisation accentuee de sacandidature ne l’a pas desservie : l’electeur francais peut voter pour une femmemais pas necessairement parce que c’est une femme.

La question de la deontologie applicable aux journalistes politiques femmesd’hommes politiques

L’annee 2007, annee d’election presidentielle, a pose le probleme des liensentre femmes journalistes et hommes politiques : deontologiquement, unejournaliste peut elle commenter a la television ou a la radio l’action politique deson mari ou du parti de celui-ci ? Cette question de deontologie est d’autantplus aigue que l’on assiste a la mediatisation accrue de la vie politique. Danscertains de ces cas, la femme a abandonne provisoirement ses fonctions dejournaliste pendant la campagne de son mari.

D’une femme de president effacee a une « premiere dame » mediatisee

En France, il n’y avait pas, jusqu’en 2007, d’appellation particuliere pour lafemme de president de la Republique, appelee « premiere dame » par la pressedepuis la presidence de M. Sarkozy, comme une sorte d’« americanisation » dela fonction. L’epouse du president n’a en France ni statut ni fonction officielle.Mais les femmes de presidents sous la Ve Republique ont eu parfois uneinfluence, et en tout cas une image bien identifiee dans l’opinion publique. Unedes raisons tient peut-etre a ce que ces femmes ont un role public pendant uneduree longue puisque le mandat presidentiel etait de sept ans jusqu’a la loiconstitutionnelle de 2000, passe ensuite a cinq ans. Mme Mitterrand a ete ainsi« mediatisee » pendant quatorze ans et Mme Chirac pendant douze ans.

Meme la discretion de Mme de Gaulle etait un message en soi, sur lapreeminence du mari, sur l’importance des valeurs domestiques dans la societedes annees 50-60. Mme Pompidou a ensuite induit un premier changement

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d’image : celle d’une femme reconnue pour ses connaissances artistiques etculturelles, son gout pour l’art moderne, en prolongement de la creation parson mari du musee Beaubourg. Avec Mme Giscard d’Estaing a ete faite unetentative, sans suite, pour la rendre presente a cote de son mari dans uneinterview televisee. Mme Mitterrand, elle, a continue son engagement politiqueactif pendant la presidence. Mme Chirac avait un engagement politique local(elue en Correze) et a mene des operations liees aux enfants et aux jeunes(operation « pieces jaunes » pour l’aide aux enfants hospitalises, creation de la« maison des adolescents » pour les jeunes en difficulte psychologique). AvecCecilia Sarkozy, on a commence a voir une fonction quasi officielle de lapremiere dame, puisque celle-ci est intervenue aupres du colonel Kadhafi, d’unefacon qui a ete appreciee diversement en France pour faire liberer les infirmieresbulgares detenues en Libye. Carla Bruni-Sarkozy, elle, a fait l’objet d’unesurexposition mediatique, nouvelle en France, liee tant a sa personnalite, a sesanciens metiers de mannequin puis de chanteuse, et a la conception tresmediatique que son mari a de sa fonction de president de la republique.Cinquante ans de Ve Republique et un monde separent Yvonne de Gaulle etCarla Bruni-Sarkozy !

Notes

1 Mais seulement 4 femmes « secretaires d’Etat » sur 17 (donc, si on totaliseles ministres et les secretaires d’Etat, 11 femmes sur 33).

2 En France, les grands corps de l’Etat sont des corps de hauts fonctionnairesdont les membres, generalement recrutes apres une grande ecole, du typeEcole nationale d’administration (ENA) ou Ecole polytechnique, sont appelesa exercer de grandes responsabilites au sein de la fonction publique d’Etat.

Laurence Fradin, a graduate of the Ecole Normale Superieure and of the Ecole

Nationale d’Administration, is Conseiller maıtre at the Cour des comptes, the French

National Audit Office.

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