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La publicité dans les collections patrimoniales de la Ville d’Evreux (1850-1920)

La publicité dans les collections patrimoniales de la … · 2012-08-10 · crieurs de rue pour lire des avis vantant les marchandises. Il faut cependant attendre, en France, la

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La publicité dans les collections patrimoniales de la Ville d’Evreux (1850-1920)

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« Au bon marché ! »

La publicité aujourd’hui est présente partout, elle occupe une place essentielle de l’espace urbain, influence nos modes de pensée, alimente notre mémoire collective et reflète les tendances économiques, culturelles et artistiques des sociétés. Définie au sens large comme l’ensemble des moyens de communication destinés à faire connaître un bien, un produit ou un service dans le but d’inciter le public à l’acquérir, elle s’est imposée comme une composante essentielle de notre environnement.

Cette pratique n’est pas nouvelle. Dès l’Antiquité, les commerçants utilisent l’affichage extérieur (enseignes peintes ou gravées). Au Moyen Âge, on recourt aux crieurs de rue pour lire des avis vantant les marchandises. Il faut cependant attendre, en France, la seconde partie du XIXe siècle pour que naisse, dans un contexte de mutations économiques importantes, la publicité au sens moderne du terme. Au début du XXe siècle, les messages publicitaires prolifèrent déjà et en 1912, dans son ouvrage intitulé Comment il faut faire de la publicité ? Jules Arren écrit : « Ceux mêmes qui se croient imperméables ont dans la tête cent noms que la publicité y a mis, chaque jour ils suivent des courants de mode que la publicité a créés. »

Support de l’éphémère par excellence, la publicité est cependant présente dans les collections patrimoniales de la ville. Rarement conservée pour elle-même – document à but mercantile considéré comme indigne -, elle apparaît souvent par hasard, intégrée aux colonnes des journaux ou au verso des programmes de spectacles... Le propos de cette exposition n’est donc pas ici de présenter une synthèse exhaustive de l’histoire de la publicité. Les collections municipales n’y suffiraient pas. Il s’agit plutôt d’inviter le visiteur à découvrir des fonds peu connus ou à en redécouvrir d’autres, sous un jour nouveau.

Pour cette raison, c’est un cheminement par type de support publicitaire qui est ici proposé, de la presse périodique aux chromolithographies en passant par les affiches de spectacles ou encore les sachets de commerçants. Quant à la période traitée (1850-1920), elle correspond à la naissance des premières formes de publicité moderne et s’est imposée d’elle-même au vu de la richesse des collections des Archives et de la Bibliothèque pour ces années. A travers le prisme de ces supports publicitaires, c’est une période charnière de l’histoire économique et commerciale de la Ville d’Evreux qui se dessine.

La publicité dans les collections patrimoniales de la ville

d’Évreux (1850-1920)

Prêtons-nous encore attention aux innombrables sollicitations publicitaires qui nous entourent ? Les affiches de 3 x 4 m à la sortie de nos agglomérations, les pleines pages dans nos hebdomadaires, les spots radio et télé, les bannières publicitaires en ligne envahissent notre environnement quotidien… Omniprésente, la publicité contemporaine vise à s’accaparer tous nos désirs, à investir les moindres recoins de nos vies privées.Mais il fut une époque où la publicité avait une ambition et des moyens moins démesurés, quand elle s’appelait encore la « réclame ». C’est cette période de l’histoire de la publicité que le Fonds patrimonial des Bibliothèques et les Archives municipales d’Évreux abordent dans l’exposition « Au bon marché ! ». Celle ci tente, au travers d’une présentation des différents supports conservés dans les collections patrimoniales, de poser quelques jalons du développement de la publicité à Evreux dans le contexte plus général de l’industrialisation française de la seconde moitié du XIXe siècle. L’ambition est modeste : vous proposer, en cette période de fêtes de fin d’année, particulièrement propice aux sollicitations publicitaires, de jouer le jeu des différences entre les formes les plus contemporaines de la publicité et quelques témoignages de ses débuts dans notre ville. Je vous souhaite une agréable visite.

Le Maire d’Évreux,Président du Grand Évreux Agglomération

Michel ChampredonVice-président du Département de l’Eure

SommaireHistoire(s) de réclame(s) p. 3

« Approchez, Messieurs - Dames ! » p. 4

« Des produits de premier choix ! » p. 6

Les « chromos » p. 8

« A l’affiche ! » p. 10

« Du côté des petites annonces » p. 12

Pages jaunes, pages roses p. 14

« Demandez le programme ! » p. 16

Boîte à outils ! p. 18

Pour en savoir + ! p. 19

«En couverture : Vue de la rue de la Harpe, vers 1900 (AME, 5 Fi 1481) »

Histoire(s) de réclame(s)

Publicité pour le pain d’épice d’Évreux / A. Carré, vers 1900 (BME, Est-d 212).

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Médium entre le domaine privé de la boutique et l’espace public qu’est la rue, les devantures des magasins deviennent à la fin du XIXe siècle une projection à l’extérieur de l’activité commerciale. Tout l’espace disponible en façade du magasin est exploité afin de présenter des supports de messages à vocation publicitaire : vitrine, murs, coffrages, portes, grilles, volets roulants et enseignes. Celles-ci, en bois ou en métal, sont un élément central de

décoration. Cet ensemble doit attirer le regard, inciter le client potentiel à franchir le seuil de la boutique. Pour cela, l’exposition des produits proposés est également indispensable.

Les commerçants inventent de nouvelles formes de publicité et utilisent de nombreux matériaux et supports. Favorisant cette éclosion, le recul de l’analphabétisme autorise la présentation du nom du commerçant, de la nature de l’activité et des produits proposés.C’est la période du formidable essor de la ville, attirante car là se trouvent les grands magasins, les lumières, le travail, les possibles. Un nouveau mode de vie accompagne ces évolutions, avec les rues animées, éclairées au gaz, le choix des produits, des spectacles….

Les individus sont progressivement cernés par l’appel à la consommation. Le citadin qui est en train de naître évolue dans une ville qui change très rapidement. Il devient consommateur de produits en renouvellement permanent. Les loisirs commencent à occuper son esprit, du moins pour les plus fortunés : invention des bains de mer, entretien physique et gymnastique, excursions diverses.

Comme dans toutes les villes importantes, les rues du centre d’Évreux se remplissent d’enseignes de tailles diverses, de noms de commerçants, de produits de toute nature. Les rues les plus fréquentées – rues de la Harpe, Chartraine, du Docteur Oursel – offrent désormais le spectacle permanent de leurs boutiques colorées aux devantures copieusement garnies.

« Approchez, Messieurs - Dames ! »

Carte postale publicitaire pour La Maison de Paris, vers 1905 (AME, 5 Fi 1022)

Boutiques rue Chartraine, vers 1910 (AME, 5 Fi 1730)

Au Sans Pareil (angle des actuelles rues Chartraine et du Dr Oursel), en juin 1913 (AME, 5 Fi 2641)

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Des produits de premier choix !

La seconde moitié du XIXe siècle voit se réaliser la métamorphose du monde connu. C’est l’avènement de l’âge de la machine, du fer et de l’acier, l’âge des usines, des voies ferrées, de l’explosion urbaine … Mesuré de manière encore plus précise par la montre dont l’usage se répand très rapidement, le temps devient celui de la production. Elle rythme désormais la vie de millions de citadins.

Entre 1850 et 1930, la population d’Évreux a pratiquement doublé, passant de 12000 à 20000 habitants. Dans les domaines de l’industrie et du commerce, son essor est remarquable. La présence de plusieurs régiments, le développement du chemin de fer, la croissance des usines métallurgiques (usines de Navarre) et des fabriques de coutil (Malatiré et Lecoeur) contribuent fortement à la prospérité générale. De nombreux petits commerces animent la ville. On compte ainsi vers 1900 : 85 épiciers, 17 marchands de fruits et légumes, 13 boulangers, 27 blanchisseuses-repasseuses, 21 bouchers, 12 charcutiers, 22 cordonniers- bottiers, 40 couturières, 12 marchands de charbon, 9 marchands de bois de chauffage, 10 horlogers-bijoutiers, 14 modistes, 7 bourreliers-selliers, 8 marchands et loueurs de bicyclettes, etc…

Ces différents acteurs du développement local souhaitent renforcer leur prestige auprès de leurs clients et de la population, notamment par l’affirmation d’une identité visuelle forte. Factures à en-têtes et sachets distribués à la clientèle par les commerçants afin de transporter les produits participent à la fabrication de cette nouvelle image. Richement illustrés - sur les factures, les dessins représentant les établissements sont souvent très fidèles - ces documents représentent un témoignage précieux de la diversité de l’activité économique à Evreux.

En-tête d’une facture du magasin « Au grand Rabais », 1875 (AME)

En-tête de facture du magasin « Au grand Saint-Taurin », vers 1897 (AME)

Sachet pour produits alimentaires à l’enseigne de l’épicerie Brival, n°9 rue Chartraine, vers 1905 (AME)

Sachet pour produits alimentaires à l’enseigne de l’épicerie L. Hédou, 31 rue Joséphine à Evreux,

vers 1920 (AME)

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Les « chromos »

A partir de 1850, dans un contexte de forte concurrence, il devient essentiel pour les in-dustriels d’imposer leurs marques. En effet, la clientèle doit pouvoir identifier les produits, les négociants … De nouveaux objets publi-citaires apparaissent dans les grandes villes, diffusés massivement par les commerçants. Parmi ces « cadeaux », les petites images connues sous le nom de chromolithographies ont été particulièrement prisées.

Le terme de chromolithographie est à l’origine celui choisi par Godefroy Engelmann pour désigner son procédé d’impression lithographique en couleur. Cette technique permettant la création et la reproduction d’un dessin tracé à l’encre ou au crayon sur une pierre calcaire fut exploitée dans le domaine de la publicité (affiches, cartes commerciales, catalogues, etc.), notamment, entre 1850 et 1939, pour la confection de petites images distribuées dans les commerces afin de fidéliser la clientèle. Ces images ont aujourd’hui conservé le nom de leur procédé de fabrication.

Différentes chaque semaine, souvent conçues comme des séries à suivre, ces images ont notamment attiré les enfants qui les conservaient en album. Au recto, l’illustration n’est pas toujours directement liée à une marque ou à un commerçant. Le nom, l’adresse et la spécialité de ce dernier n’apparaissent parfois qu’au verso. Les thématiques abordées sont extrêmement variées : géographie (cartes des départements français), littérature (Fables de la Fontaine), histoire (saga des rois de France)… dans un but tantôt pédagogique tantôt humoristique (saynètes de la vie quotidienne dont les acteurs sont souvent des enfants). La couleur or particulièrement attractive pour le jeune public est très utilisée.

Les chromolithographies sont bien représentées dans les collections patrimoniales de la Ville grâce à un album d’une centaine de planches, provenant d’un legs probablement fait à la bibliothèque dans les années 1920 par Armand Bénet.

Série de chromolithographies distribuées par le magasin Au grand Saint-Taurin, vers 1890. L’annonce publicitaire figure au verso (AME).

Série de chromolithographies reproduisant des scènes de l’Opérette « La Tzigane »,à l’enseigne de Léon Delafosse, vers 1900 (AME).

Chromolithographie pour le magasin « Au Dé d’Argent », vers 1890 (AME)

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« A l’affiche ! »

La France a été l’un des berceaux de l’affiche. Les comédiens sont parmi les premiers à utiliser l’image pour attirer les spectateurs.Au début du XIXe siècle, la lithographie, procédé de reproduction de dessins gravés sur une pierre calcaire, constitue une invention décisive, autorisant l’apparition de la couleur et la multiplication des tirages.

L’affiche se développe surtout sous la Monarchie de Juillet (1830-1848). Sa forme a évolué : il ne s’agit plus d’une simple vignette sur fond typographié mais d’une planche entière. Afin de répondre aux demandes des industriels, les techniques ne cessent de se perfectionner. La fin du XIXe siècle correspond à l’âge d’or de l’affiche. Le père de l’affiche moderne est Jules Chéret (1836-1932) : il développe de nouvelles techniques et joue un rôle capital dans le changement de l’esthétique de ce médium. L’affiche devient à la mode : les collectionneurs se multiplient et le marché est florissant. Enfin, les lois évoluant en fonction des besoins des classes dirigeantes - la bourgeoisie industrielle pour la fin du XIXe siècle -, l’affichage est libéralisé : la loi du 29 juillet 1881 retire aux municipalités tout droit réglementaire et propose la liberté absolue de l’affichage. C’est alors une véritable explosion de mots et de couleurs sur les murs des villes.

La municipalité d’Evreux n’est pas en reste : les affiches pour des foires commerciales, des manifestations culturelles ou sportives se multiplient.

Pendant la 1ère Guerre Mondiale, les affiches servent essentiellement à soutenir l’effort de guerre. Les recherches afin d’améliorer l’impact des affiches se poursuivent. L’objectif est d’atteindre l’expression graphique de l’idée. Jean CARLU (1900-1997), un des plus grands affichistes de la première moitié du XXe siècle, écrit : « l’affiche est un moyen de propagande destiné à associer un nom à une image, il est donc nécessaire de réduire son rôle à cette seule ambition ».

Affiche de la grande Cavalcade de bienfaisance du 5 mai 1907 à Evreux (AME, 2 Q 13)

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Du côté des petites annonces !

Grâce aux progrès techniques tels l’apparition de la rotative en 1845 ou le développement des moyens de transport et de communication, la presse connaît un essor considérable au cours du XIXe siècle. Le tirage global des quotidiens augmente de manière exponentielle : à Paris, on passe de 36 000 tirages en 1800 à 200 000 en 1863 et 5,5 millions en 1914. Parallèlement, au cours de la seconde moitié du siècle, la libéralisation de la presse - lois du 11 mai 1868 puis du 29 juillet 1881 définissant les libertés et responsabilités de la presse française - contribue à la prolifération du nombre de titres. En 1867, on compte 21 quotidiens à Paris, 57 en province. En 1880, ces chiffres ont triplé (60 titres pour Paris, 190 en province).

La concurrence est rude. Les directeurs de publications élaborent de nouvelles stratégies, pour élargir leur lectorat. Dès 1836, Emile de Girardin révolutionne le paysage de la presse française en proposant de vendre les pages de son quotidien la Presse pour y insérer des messages publicitaires. Cette initiative repose sur un calcul simple : les frais de fabrication des journaux restant à l’époque élevés, les quotidiens se vendent chers. Pour espérer conquérir de nouveaux publics, il faut donc réduire le coût des journaux à la vente. Malgré de nombreux détracteurs, l’initiative de Girardin fait des adeptes et la publicité devient un élément déterminant de l’économie de la presse. En 1896, elle fournit 37% des recettes du Figaro. Elle peut prendre plusieurs formes : petites annonces, affiches annonces voire publicité rédactionnelle qui sous l’apparence d’un article informatif vante les mérites de tel ou tel produit.

Une course aux annonceurs s’engage. Les journaux doivent en permanence accroître et fidéliser leur lectorat pour être attractifs. La pratique de la publication du roman en feuilletons qu’illustrent des auteurs tels

Alexandre Dumas (La Comtesse de Salisbury, 1836) ou Eugène Sue (Les mystères de Paris, 1842) répond à cette préoccupation et se généralise dès la mi-XIXe siècle. Des cadeaux sont offerts aux fidèles, des numéros gratuits aux nouveaux abonnés…Dans le département de l’Eure, les journaux développent des pratiques similaires. Vers 1900, les annonces publicitaires occupent plus du quart des journaux les plus diffusés, tels la Dépêche normande ou le Courrier de l’Eure. Les affiches de manifestations sont publiées en suppléments, le Journal d’Evreux distribue des calendriers…

Petites annonces de la Dépêche normande, 4 novembre 1919 (BME, Collection Régnier)

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Pages jaunes, pages roses

Support spécifique, en marge de la presse périodique classique, les almanachs méritent d’être traités à part. Ces calendriers enrichis de renseignements divers tels des conseils culinaires ou agricoles constituent un classique de la littérature de colportage. Particulièrement prisés par la population, ils sont un vecteur important de la diffusion publicitaire.

Pour le département de l’Eure, l’Almanach-annuaire paraît chaque année à partir de 1842. Il se compose d’un calendrier (éphémérides, durée du jour, phases de la lune…) et propose pour chaque mois la liste des foires, les travaux agricoles à réaliser et quelques indispensables conseils d’économie domestique, de la guérison des panaris aux moyens de chasser les fourmis. Suivent la liste des administrations et organisations départementales, une liste des communes de l’Eure, une « Revue » de l’année précédente, des conseils d’agriculture, des « petits problèmes » et autres « balivernes ». Un logogriphe (voir page « Boite à outils ! ») conclut traditionnellement cette publication. Peu à peu, la vocation d’annuaire prend le pas sur celle d’almanach : dans les années 1870 une liste des principaux commerçants et industriels des chefs lieux d’arrondissements classés par ville et par activité, puis une liste des habitants s’y ajoutent.

Dès sa création, l’Almanach comporte des annonces commerciales. D’abord placées en fin d’ouvrage sur un papier de couleur jaune qui permet de les distinguer du reste du texte, les pages d’annonces sont peu à peu intégrées dans le corps de la publication. Les tarifs pour l’année 1905 s’échelonnent de 20 F. pour un quart de page à 100 F. pour une double page. Cet apport financier constitue une recette non négligeable et il faut attirer les annonceurs : « l’almanach-annuaire est […] lu par les habitants de toute notre contrée ; c’est à ce titre que les Annonces qu’il contient sont de la plus grande nécessité pour tenir en éveil la clientèle et se faire connaître de tous », précise l’édition de 1898.

Dans ces annonces, le message publicitaire passe surtout par le texte, souvent lapidaire : nom et adresse du commerçant, liste des produits en vente, éventuellement modalités pratiques et échantillons de prix. Peu de publicités sont imagées, seules les grandes enseignes ébroïciennes ont les moyens de le faire. L’illustration, lorsqu’elle existe, est essentiellement documentaire : coupe ou devanture d’un grand magasin, produit-phare de tel industriel... Le travail esthétique porte donc essentiellement sur la composition typographique (variations de la police et de la taille des caractères, changement de casses, etc.).

Page de titre de l’Almanach-annuaire pour l’année 1879 (BME)

Annonce de l’Almanach-Annuaire pour l’année 1881 :

« Au Grand Rabais ». (BME)

Annonces de l’Almanach-Annuaire pour l’année 1897 : Jacquelin, Bertaud, etc. (BME)

Annonce de l’Almanach-Annuaire pour l’année

1898 : « Compagnie des moteurs Niel ». (BME)Annonce de l’Almanach-Annuaire pour l’année

1874 : « A la Belle Fermière ». (BME)

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Demandez le programme !

La vie culturelle et sociale à Evreux durant la Belle Epoque fut particulièrement dense. Cette activité est largement illustrée dans les collections patrimoniales par les nombreux programmes de fêtes et spectacles qui y sont conservés. L’observation de ces documents dans le contexte d’une étude sur les pratiques publicitaires présente un intérêt double. Le prospectus, outil de promotion d’un spectacle, d’un concert… devient à son tour outil de diffusion pour d’autres annonceurs. Dans cette perspective, le programme constitue une sorte de mise en abîme de la communication publicitaire.

Si ces supports sont, par nature, éphémères, ils connaissent cependant une large diffusion et offrent aux commerçants locaux - voire aux grandes enseignes nationales, selon l’ampleur de l’événement - l’occasion de toucher un large public. De même que pour la presse, ce recours à l’annonce publicitaire est évidemment motivé par des raisons financières. Il n’est pas cantonné à un type d’événement particulier. Cette pratique est adoptée tant pour les programmes de concerts et spectacles – en particulier spectacles à but caritatif - que pour ceux des fêtes sportives et autres courses hippiques.

Les annonces publicitaires ne sont en général pas ou peu en rapport avec l’événement concerné. Ainsi, le programme des courses hippiques d’Evreux vers 1910 accueille aussi bien les annonces commerciales de «l’hôtellerie du grand Cerf » que celles des vêtements « Gueudet » en passant par la boulangerie-pâtisserie « Roux » et la plomberie « Renel ». Seuls des programmes de spectacles à diffusion nationale ou d’expositions très spécialisées se permettent de proposer des annonces publicitaires ciblant un public précis : ainsi les programmes des Tournées Baret font la part belle aux cosmétiques, tandis que le catalogue officiel de l’exposition canine de 1903 privilégie les équipements et soins vétérinaires.

La plupart de ces annonces sont semblables à celles publiées dans la presse ou les almanachs et se limitent à un texte bref, tout à fait standard. Progressivement, certains commerçants s’efforcent d’adapter le discours de leur publicité au contexte de l’événement. Ainsi, sur les tracts de la fête aérienne de 1921, un « Avis du ciel » est adressé aux « habitants de la terre et en particulier ceux d’Evreux » pour vanter les mérites des chaussures vendues à « la Mule d’Or ». Le recours à l’image reste extrêmement rare pour des raisons de coût d’impression. Les publicités Gueudet et Martin font ainsi exception.

1ère et 4ème de couverture du programme des fêtes du 29 Mai 1910. (BME, G XXXII (37))

Publicité pour la Maison Martin. 4ème de couverture du programme des fêtes d’Evreux, 1913 (BME, collection Guillemare)

Annonces en pages centrales d’un programme du théâtre d’Evreux, 1903 (AME, 2 R 73)

Publicité pour la Maison Gueudet. 4ème de couverture du programme des courses hippiques de 1908 (BME, collection Guillemare)

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Boîte à outils ! Pour en savoir plus !

La Pub avant 1940 : Quelques repères chronologiques

Fin du XIIe siècle : Organisation du « criage » en corporation. Les crieurs diffusent les ordonnances royales, les enterrements puis, à partir de 1415, les annonces de marchandises

XVe siècle : Débuts de l’imprimerie. Apparition de l’affichette1633 : Théophraste Renaudot crée La Feuille du bureau d’adresses,

ancêtre des petites annonces1789 : Liberté de la presse1824 : Une loi institue la protection du nom commercial1836 : Emile de Girardin propose d’insérer dans son journal La Presse

des annonces commerciales1845 : A Paris, Charles Duveyrier fonde la Société Générale des

Annonces, première structure collectant et gérant les annonces publicitaires pour les journaux

1857 : Loi réglementant la marque de fabrique1867 : Jules Chéret crée sa première affiche1880 : A partir de cette date et jusqu’en 1900, développement de

l’affichomanie1881 : Loi sur la liberté d’affichage1891 : Première affiche de Toulouse-Lautrec pour le Moulin Rouge1898 : Création du Bibendum Michelin par O’Galop1918 : Le Petit écho de la mode propose à ses lecteurs des bons de

réductions pour l’achat de nouveaux produits1928 : Premiers spots publicitaires diffusés à la radio1927 : Création de l’agence Publicis1937 : L’Exposition Universelle dédie pour la première fois un Pavillon

à la Publicité

Mots-clés

Affichomanie : Entre 1880 et 1900, on assiste à un fort engouement pour les affiches publicitaires sur lesquelles se ruent nombre de collectionneurs. L’écrivain Octave Uzanne donne à ce phénomène le nom d’affichomanie

Chromolithographie : Lithographie en couleurLithographie : Mise au point en Allemagne par Aloys Senefelder vers 1796-

1797, la lithographie est une technique d’impression dite « à plat », d’un tracé exécuté à l’encre ou au crayon sur une pierre calcaire. Ce procédé permet la reproduction d’une image à de multiples exemplaires

Logogriphe : Enigme consistant à deviner un mot à partir d’autres, composés des mêmes lettres

Rotative : Presse permettant d’imprimer en continu

OuvragesAMIOT Jack et GRIGNON François. Dans les rues d’Evreux à la Belle Epoque. Le Neubourg : imprimerie André, 1996

BEAUFRETON Jean-Patrick et Archives Municipales d’Evreux. Evreux. Saint-Cyr-sur-Loire : Editions Alan Sutton, 2004

Sous la dir. de Bernard BODINIER. L’Eure de la Préhistoire à nos jours. Saint Jean d’Angély : Jean-Michel Bordessoules, 2001

GALLO Max. L’affiche, miroir de l’histoire. Paris : Robert Laffont, 1973

LAGNEAU Gérard. La sociologie de la publicité. Paris : Presse Universitaire de France. Coll. Que sais-je ? n°1678, 1988

LAVENU Cécile. Boutiques d’hier et d’aujourd’hui : entre architecture et décors. Rouen : Communauté d’agglomération, s.d. Coll. Histoire(s) d’agglo, n°31

PINCAS Stéphane et LOISEAU Marc. Une histoire de la publicité. Paris :Taschen, 2008

Publicité, quelle histoire ?, in Le Temps des médias, n°2, printemps 2004

WEILL Alain. L’affiche française. Paris : Presse Universitaire de France. Coll. Que sais-je ? n°153, 1982

Site internetwww.lesartsdecoratifs.fr/fr/03museepublicite/index.htmSite du Musée de la Publicité, rubrique Expositions, La Belle époque de la Publicité (1850-1920) et 250 ans de Pub

Archives municipales d’EvreuxSquare Georges Brassens27000 Evreux - 02 32 78 85 [email protected] du lundi au vendredi de 9h à 12h et de 13h30 à 17h

Fonds patrimonial des bibliothèques9, rue de l’Horloge27000 EVREUX - 02 32 78 85 [email protected] Ouvert les mardi, mercredi, vendredi de 14h à 18h et le samedi de 10h à 12h puis de 14h à 17h.

Ville d’Évreux - Direction des Affaires CulturellesPlace du Général de Gaulle - 27000 EVREUX

www.evreux.fr

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