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1 LA PYRAMIDE DE ARCHIE B. CARROLL A L’EPREUVE DU JEU DES ACTEURS FRANCOPHONES Quelles sont les parties prenantes et quelles sont leurs différentes représentations en matière de Responsabilité Sociale des Entreprises ? Inventaire Internet réalisé en 2008 sur 313 sites francophones. Christian BOURION - Sybil PERSSON Université Nancy 2 Cahier de Recherche n°2008-13 CEREFIGE Université Nancy 2 13 rue Maréchal Ney 54000 Nancy France Téléphone : 03 54 50 35 80 Fax : 03 54 50 35 81 [email protected] www.univ-nancy2.fr/CEREFIGE n° ISSN 1760 – 4893

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LA PYRAMIDE DE ARCHIE B. CARROLL A L’EPREUVE DU

JEU DES ACTEURS FRANCOPHONES

Quelles sont les parties prenantes et quelles sont leurs différentes représentations en matière de

Responsabilité Sociale des Entreprises ? Inventaire Internet réalisé en 2008 sur 313 sites

francophones.

Christian BOURION - Sybil PERSSON

Université Nancy 2

Cahier de Recherche n°2008-13

CEREFIGE Université Nancy 2 13 rue Maréchal Ney

54000 Nancy France

Téléphone : 03 54 50 35 80 Fax : 03 54 50 35 81 [email protected]

www.univ-nancy2.fr/CEREFIGE

n° ISSN 1760 – 4893

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Article LA PYRAMIDE DE ARCHIE B. CARROLL A L’EPREUVE DU JEU DES ACTEURS FRANCOPHONES

Quelles sont les parties prenantes et quelles sont leurs différentes représentations en matière de Responsabilité Sociale des Entreprises ? Inventaire Internet réalisé en 2008 sur 313 sites francophones. Christian Bourion ; Sybil Persson

Résumé Afin d’actualiser la connaissance des débats susceptibles d’impacter la régulation opérée sous l’égide de la Responsabilité Sociale des Entreprises, l’étude établit un bilan 2008 des Parties prenantes francophones en présence. Après avoir rappelé le modèle de Carroll qui établit une hiérarchie des différentes représentations en matière de Corporate Social Responsability, la recherche explore la toile internet pour retenir 313 sites qui permettent d’identifier et de catégoriser les acteurs en présence à partir de la teneur RSE de leur discours. Il apparait qu’au terme d’une évolution tardive et hésitante, la Corporate Ethical Responsability tend à s’imposer comme la représentation majoritaire en France. Si la RSE volontaire (Soft Law) semble la plus légitime en Europe, la discussion menée met en évidence les visions divergentes qui subsistent (orientation People vs Profit) mais aussi les nouveaux conflits d’intérêt en vue (orientation People vs Planet) entretenant et réanimant de possibles clivages idéologiques entre Parties prenantes en France. Abstract

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Plan 1. La dynamique de la Corporate Social Responsibility

1.1. Le modèle de Carroll (1991) 1.2. Le diagramme de Schwartz et Carroll (2003) 1.3. Modélisation de l’évolution de la RSE 2. Exploration des sites francophones

2.1. Constitution et qualification du corpus de données 2.2. Classification : des sites aux Parties prenantes

2.2.1. Des sites aux acteurs institutionnels 2.2.2. Des acteurs aux parties prenantes via les représentations

2.3. Les parties prenantes à l’aune de la pyramide de Caroll 2.3.1. La Corporate Legal Responsibility 2.3.2. La Corporate Ethical Responsibility 2.3.3. La Corporate Philanthropic Responsibility

3. Discussion, limites et perspectives 3.1. Les modalités d’agrégation des résultats en question

3.2. Les divergences sémantiques : social vs sociétal, obligatoire vs volontaire, responsabilité vs opportunité

3.3. Les conflits de priorité au sein de la définition dominante 3.3.1. Le conflit entre « Profit » et « People » 3.3.2. Le conflit entre « Profit » et « Planet » 3.3.3. Le conflit entre « People » et « Planet » Conclusion

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Texte intégral

1. Sur un horizon aux couleurs de la triple bottom line avec les trois P : Profit, People, Planet (Elkington, 1998), la Responsabilité sociale des entreprises (RSE) se détache comme une figure marquante qui fait couler beaucoup d’encre des deux côtés de l’Atlantique. Selon la définition européenne, la RSE suppose «l'intégration volontaire par les entreprises de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec leurs parties prenantes1». Pour autant, même si cette définition tend à faire référence, la RSE est loin d’être un concept abouti : « C’est, au contraire, un processus en cours, dont l’évolution dépendra du jeu des acteurs » (Bodet et Lamarche, 2007, 3).

2. Intégrer effectivement le jeu des acteurs institutionnels en matière de

RSE suppose un ancrage empirique délicat : il s’agit de n’écarter aucune communauté a priori tout en définissant un espace réaliste d’investigation. Il s’agit par ailleurs de tenir compte du fait que la RSE gagne sa légitimité sur la base des discours en vigueur. Il s’agit enfin de d’appréhender les diverses représentations en présence susceptibles ensemble d’expliciter les dialectiques en jeu. Utiliser la toile internet francophone à l’aide de la boussole RSE pour réaliser un inventaire 2008 des discours qui structurent le champ semble alors un pari méthodologique pertinent dans le cadre d’une approche empirique exploratoire. Cette démarche trouve sa justification dans le fait que ce sont les différentes conceptualisations institutionnelles en présence qui, au-delà de leurs divergences mêmes, sont susceptibles de forger de concert un processus global de régulation à l’échelle macro-sociale (Desjeux, 2004). La régulation en œuvre est alors pensée comme une macro-conversation postmoderne susceptible de varier de la cacophonie à la symphonie sous réserve d’une orchestration ad hoc, qu’il importera encore d’identifier.

3. Pour pénétrer l’univers discursif RSE à partir d’une ligne théorique

directrice non idéologique a priori (Perez et al., 2005) et qui appréhende les processus en œuvre sur le terrain même, la recherche procède en trois temps. Elle s’appuie en première partie sur le modèle anglo-saxon défini par A. B. Carroll qui tend à faire référence. La Corporate Social Responsability (CSR) est alors appréhendée comme une construction évolutive issue du jeu des acteurs. Dans la deuxième partie, la recherche explore, au sein de 313 sites, les discours émis par les acteurs institutionnels qu’elle identifie en tant que parties prenantes au débat RSE à partir de leurs représentations en la matière. Dans la troisième partie, la discussion menée met en évidence les visions divergentes qui subsistent (orientation People vs Profit) mais aussi les nouveaux conflits d’intérêt en vue (orientation People vs Planet) entretenant et réanimant de possibles clivages idéologique entre Parties prenantes en France.

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1. La dynamique de la Corporate Social Responsability 4. Archie B Carroll figure l’auteur le plus représentatif du courant Business

and Society ou courant contractuel sociétal qui considère l’interrelation entre entreprise et société sous forme de contrat social (1979). En 1991, l’auteur constate que la RSE évoluerait d’étape en étape en suivant un ordre précis susceptible d’être d’appréhendé par une lecture pyramidale (Figure 1). Puis, en 2003, il publie, avec Schwartz, un modèle prédictif concernant la dynamique de la pyramide.

1.1. Les étages de la pyramide de Carroll2 (1991)

Figure 1 : La pyramide de la RSE selon Archie B. Carroll (1991)

5. Le premier étage de la pyramide de Carroll RSE est d’obédience économique. La Corporate Economic Responsability est ainsi définie3 :

“It is important… • to perform in a manner consistent with maximizing earnings per share • to be committed to being as profitable as possible • to maintain a strong competitive position • to maintain a high level of operating efficiency • that a successful firm be defined as one that is consistently profitable”.

Dans cette première représentation de la RSE, l’entreprise est responsable de la maximisation du bénéfice par action, elle vise d’abord la rentabilité, elle doit maintenir une forte position concurrentielle et un niveau élevé d'efficacité dans son exploitation.

6. Le deuxième étage de la pyramide est d’obédience juridique. La Corporate Legal Responsability est ainsi définie:

“ It is important… • To perform in a manner consistent with expectations of government and

law • To comply with various federal, state, and local regulations • To be a law-abiding corporate citizen • That a successful firm be defined as one that fulfills its legal obligations • To provide goods and services that at least meet minimal legal

requirements”. Dans cette deuxième représentation de la RSE, l’entreprise doit agir d'une manière compatible avec les attentes de l’Etat et du droit. Elle se conforme aux règlements nationaux et aux régulations locales, elle doit respecter la loi, elle doit se comporter en entreprise citoyenne, fournir des biens et des services conformes aux réglementations en vigueur.

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7. Le troisième étage de la pyramide est d’obédience éthique. La Corporate Ethical Responsability est ainsi définie : “It is important…

• to perform in a manner consistent with expectations of societal mores and ethical norms

• to recognize and respect new or evolving ethical moral norms adopted by society.

• to prevent ethical norms from being compromised in order to achieve corporate goals.

• that good corporate citizenship be defined as doing what is expected morally or ethically.

• to recognize that corporate integrity and ethical behaviour go beyond mere compliance with laws and regulations”. Dans cette troisième représentation, l’entreprise agit volontairement de façon a être compatible avec les attentes de la société, des moeurs et des normes éthiques ; elle reconnaît et respecte l'évolution des normes morales adoptées par la société, notamment pour atteindre ses objectifs, de façon à faire ce que l'on attend, moralement et éthiquement et d’aller au-delà de la simple application des lois et règlements.

8. Enfin, la dernière représentation est d’obédience philanthropique La Corporate Philantropic Responsability est ainsi définie: “It is important…

• to perform in a manner consistent with the philanthropic and charitable expectations of societ.

• to assist the fine and performing arts • that managers and employees participate in voluntary and charitable

activities within their local communities • to provide assistance to private and public educational institutions • to assist voluntarily those projects that enhance a community’s quality

of life”. Dans cette dernière représentation, l’entreprise fait en sorte d’agir d'une manière compatible avec les attentes de la société, elle fait en sorte d’aider les œuvres sociales et caritatives, ainsi que les arts. Elle fait en sorte que le personnel participe à des activités caritatives au sein de leurs communautés locales, elle fournit une assistance aux établissements d'enseignement et aide les projets de mise en valeur de la communauté concernant la qualité de la vie.

9. Une précision d’ordre méthodologique s’impose non seulement pour respecter la nature évolutive du modèle de Carroll au delà de sa représentation iconographique mais aussi pour pouvoir le confronter à la réalité francophone. Par convention, une pyramide est supportée par sa base qui la fonde et figure son premier stade de développement pour permettre ensuite l’adjonction des différents étages. Pour autant, il ne faut pas perdre de vue que la surface de chaque échelon est proportionnelle au volume des données de l’échelon en question. Dans la mesure où ces volumes se modifient, le schéma est dynamique et se déforme au fur et à mesure de son développement. L’échelon dominant s’élève (Figure 2). Les échelons inférieurs se réduisent tandis que les échelons supérieurs s’accroissent, jusqu’à ce que la pyramide s’inverse.

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Figure 2 : les différentes étapes de la Corporate Social Responsability

La dynamique du modèle, à savoir comment le jeu des acteurs permet de prédire le passage d’un échelon à l’autre, est expliquée par le diagramme de Schwartz et Carroll (2003).

1.2. Le diagramme de Schwartz et Carroll

10. Le modèle de Schwartz et Carroll utilise un diagramme de Wenn pour rendre compte de l’aspect dynamique qui explique le passage d’un mode de régulation au suivant. Le diagramme intègre les trois normes que les acteurs prennent (ou ne prennent pas) en considération dans leur jeu et qui déterminent la légitimité de leurs actions : l’économique, le juridique et l’éthique. Les auteurs expliquent que les jeux d’acteurs sont d’autant plus fragiles et contestés qu’ils ne bénéficient que d’une légitimité partielle. En revanche, ils sont d’autant plus admis qu’ils bénéficient d’une légitimité aboutie, constituée des apports des trois types de légitimité (figure 3).

Figure 3 : la dynamique d’évolution de la légitimité

d’après Schwartz & Carroll (2003)

11. Les jeux d’acteurs peuvent bénéficier d’un seul type de légitimité. • Surface A : jeux d’acteurs légitimes uniquement vis-à-vis de l’éthique. • Surface B : jeux d’acteurs légitimes vis-à-vis de l’économique. • Surface C : jeux d’acteurs légitimes uniquement vis-à-vis de la loi.

Approuvés sur un seul terrain, ces jeux d’acteurs sont susceptibles d’être contestés sur les deux autres terrains. En conséquence, ils se développent difficilement s’ils ne se mettent pas aux normes au moins d’un des deux autres domaines.

12. D’autres jeux d’acteurs bénéficient d’une double légitimité. • Surface D : jeux d’acteurs satisfaisant les critères éthique et juridique. • Surface E : jeux d’acteurs satisfaisant les critères éthique et économique.

F

A

Legal Domain

Economic Domain

C

Ethical Domain

B

G

D E

Corporate Economic Responsability

Corporate Legal Responsability

Corporate Ethical Opportunities

Corporate Philanthropic Opportunities

Etat 1 Etat 2 Etat 3 Etat 4

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• Surface F : jeux d’acteurs satisfaisant les critères juridique et économique Approuvés sur deux terrains, ces jeux d’acteurs ne sont susceptibles d’être contestés que sur le troisième terrain. S’ils acquièrent la troisième forme de légitimité, il n’y aura plus d’entrave à leur développement, ils pourront se développer facilement et devenir quasiment inattaquables.

13. Enfin les jeux d’acteurs qui bénéficient d’une triple légitimité s’avèrent les plus « durables » :

• Surface G : les actions situées à l’intersection des domaines éthique, juridique et économique constituent de véritables opportunités. Plus les jeux d’acteurs bénéficient d’une légitimité élargie, plus la société escalade rapidement les différents échelons de la pyramide.

1.3. Modélisation de l’évolution de la RSE

Figure 4 : la dynamique de la Corporate Social Responsability d’après Schwartz & Carroll (2003)

Intervention de la loi

pour réguler l’éntreprise

Intervention de l’éthique pour réguler l’entreprise

Etape 1

Passage de

l’étape 1 à

l’étape 2

Etape 2

Etape 3

Passage de

l’étape 2 à

l’étape 3

Absence d’intervention :

l’entreprise devient

philanthropique

Passage de

l’étape 3 à

l’étape 4

Etape 4

L’entreprise est une entité pilotée par

l’argent

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14. A l’origine, le modèle est soumis à la seule Corporate Economic Responsability. L’intervention du législateur rend obligatoire toute une série d’actions et le mode régulateur s’édifie sous l’égide de la Corporate Legal Responsability.

15. La législation se développe accentuant son effet de contrainte sur les entreprises dont certaines tentent de s’abstraire avec plus ou moins de succès. Quand ces entreprises au comportement jugé délictueux se font épingler, de véritables scandales relayés par les media sont susceptibles d’émerger. Intervient alors un nouveau jeu régulateur, sous couvert d’éthique, assorti des classements sur le comportement des entreprises, ces classements tendant de plus en plus à s’appuyer sur les agences de notation et les labels de qualité destinés à distinguer « le bon grain de l’ivraie ». Cette nouvelle logique fait émerger des opportunités neuves et le modèle régulateur s’instaure sous l’égide de la Corporate Ethical Responsability.

16. Enfin au stade de la Corporate Philantropic Responsibility, les conduites deviennent naturellement empathiques, sans recherche de contreparties financières.

17. Un processus de régulation ne fonctionne correctement que s’il est légitime aux yeux d’une majorité de parties prenantes dans le grand jeu de la régulation. Y interviennent bien sûr les acteurs historiques issus d’un premier cercle de type economico-légal, mais aussi des observateurs devenus actifs parce qu’ils prennent leur place sur la grande scène médiatique de la légitimité. Ces observateurs deviennent joueurs dans la mesure où leurs opinions s’agrègent, constituant progressivement un deuxième cercle qu’il importe de qualifier mais qui enserre le premier d’autant plus rapidement qu’il est relayé par des supports technologiques de plus en plus performants.

2. Exploration des sites francophones

18. Une étude de nature exploratoire est menée pour appréhender ce grand jeu de la régulation sur une base empirique large et actuelle. Les observateurs d’hier sont devenus joueurs aujourd’hui. Ils rejoignent les autres acteurs historiques et se constituent à leur tour en tant en parties prenantes.

19. Cette étude vise le recensement des représentations collectives en œuvre

dialectique sur la toile internet francophone. Travailler sur la toile permet d’investiguer sur un terrain empirique en phase avec les évolutions constatées en première partie. Pour autant le recensement envisagé ne peut être ni exhaustif ni systématique dans une démarche qualitative de type exploratoire. Mais il peut prendre une place légitime et pertinente en acceptant la difficulté qui consiste à travailler à la fois sur des connaissances ordinaires et savantes, produites par des acteurs divers dans un espace à géométrie variable mais doté d’une unité culturelle, ici francophone (d’Iribarne, 1993).

20. La recherche conduite se situe alors au cœur de ces deux notions clés que sont majorité et diversité au grand jeu de la RSE quand elle combine plusieurs ordres4 de légitimité et qu’elle s’ouvre à un grand nombre de joueurs.

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2.1. Constitution et qualification du corpus de données

21. La collecte de données Internet utilise le moteur de recherche Google à

l’aide de mots clés. Le tableau 1 fait le point sur le nombre d’occurrences comptabilisées en juin 2008.

Tableau 1 : les occurrences RSE sur le Web en juin 2008

Mot clé utilisé Nombre d’occurrences « CSR » 15 400 000 .« Corporate Social Responsibility » 4 430 000 .« RSE » 4 720 000 .« Responsabilité sociale des entreprises » 88 000 .« Responsabilité sociétale des entreprises » 20 500 .

22. Le travail d’investigation emprunte in fine la terminologie « Responsabilité sociale des entreprises » qui en tant que clé d’accès semble la plus aboutie dans l’espace francophone. Une liste de sites est dressée jusqu’au seuil de saturation permettant d’identifier 313 individus-sites qui sont susceptibles de faire émerger les parties prenantes dans la rhétorique RSE via les acteurs s’affichant sur la toile : des institutions mondiales aux gouvernements nationaux, des entreprises aux syndicats et aux ONG, des universités aux Grandes écoles, des centres de ressources aux laboratoires de recherche auxquels il faut ajouter les institutions créées autour des processus de notation, de certification et les observatoires..

2.2. Classification : des sites aux Parties prenantes

23. L’enjeu est de sérier les acteurs émergeant des 313 sites de façon à disposer d’une information à la fois agrégée et sensée. Il convient de préserver la richesse des différentes catégories de parties prenantes susceptibles d’émerger à terme au travers des représentations associées en matière de RSE. Il sera alors possible de confronter les résultats issus de ce travail progressif de classification à la pyramide de Caroll.

2.2.1. Des sites aux acteurs

24. Une première étape consiste à catégoriser les acteurs institutionnels qui émergent des 313 sites collectés. Le tableau 2 dresse une première liste au regard du nombre de sites concernés. Ainsi la première catégorie « Associations et fondations » regroupe 27 sites, tandis que la dernière catégorie, la « La voix des PME en Europe » ne comprend qu’un seul site, même si cette voix représente par ailleurs des millions d’entreprises. De plus cette première liste d’acteurs intègre une classification opérée par le site de la CGT entre les entreprises du CAC 40.

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Tableau 2 : le nombre des Partie Prenantes par catégorie5

Classes Nb

re

Classes N

bre

Associations et fondations 27 Les « Leaders » du CAC 40 8 Chercheurs 23 Grandes écoles 7

Revues 23 Centres de recherche 7 Universités 21 Sites liés à l’emploi /formation 7

Diverses sociétés privées 21 Agences de notation 6 Bibliothèques, réseaux, etc. 19 Les politiques 6

Les « autres sociétés » du CAC 40 18 Journaux académiques 5 Centres de ressources, portails 18 Coopératives 5

Organismes représentatifs 16 Les « Francs-tireurs » du CAC 40 3 Banques et assurances 14 Les « Petits malins » du CAC 40 4

L’église et sa doctrine sociétale 13 Les « Rien à cirer » du CAC 40 2 Sociétés de conseil en RSE 14 Organismes fédérateurs 2

Organismes nationaux 11 La Conf. Mondiale du Travail 1 Enquêtes 10 La Conf. canadienne des évêques 1

Organismes européens 9 Hyacinthe Dubreuil 1 Organismes supranationaux 9 Marcel Barbu 1

Syndicats 9 La voix des PME en Europe 1 Chambres de commerce 8 Divers 10

25. Dès à présent, il importe de souligner l’hétérogénéité des acteurs

institutionnels au delà des entreprises elles-mêmes. Les associations, les chercheurs, les revues et les universités sont susceptibles de se constituer en communauté académique ou en groupe de pression prenant une place incontestable dans le débat RSE. A noter en fin de tableau ceux qui font figure de « précurseurs » parce qu’ils se sont exprimés en faveur de la RSE, bien avant que le terme n’existe et bien avant que les media n’en parlent : Hyacinthe Dubreuil et Marcel Barbu.

26. Une deuxième liste d’acteurs peut également être proposée à partir de l’audience moyenne des sites associés (Girard, 2008). En effet la fréquentation des sites par les internautes est très variable6. Le tableau 3 classe les acteurs sur la base d’un taux moyen de fréquentation de leurs sites. Dans le tiercé de tête figurent l’Observatoire de la RSE, le syndicat CGT qui se détache nettement des autres syndicats et les agences de notation alors que l’Eglise prend place en queue de classement. On peut aussi constater la faible audience a priori des Centres de recherche, des Fédérations, des « Politiques » et de la Confédération Mondiale du Travail.

Tableau 3 : liste des acteurs d’après le taux de fréquentation des sites

Les acteurs disposant d’un site En ligne où il est question de la RSE, classés par

ordre décroissant de fréquentation

Ran

g

mo

yen

de

fréq

uen

tati

on

d

es s

ites Audience

relative des sites les uns par rapport aux autres

L’observatoire de la RSE (ORSE) 2/313 Site de la CGT 37/313

Agences de notation 56/313 Autres sociétés 87/313

Elevée

Centres de ressources 110/313 Grandes écoles 120/313

Revues 125/313 Organisations européennes 135/313

Banques et assurances 136/313 Organismes des grandes entreprises 136/294

Sociétés de conseil en RSE 136/313 Associations et fondations 138/313

Moyenne Organismes nationaux 146/313

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2.2.2. Des acteurs aux parties prenantes via les représentations

Au-delà de ces listes ordonnées, un travail d’agrégation est nécessaire pour appréhender les représentations véhiculées par les discours des acteurs institutionnels sur la toile. Le tableau 4 propose une synthèse.

Tableau 4 : liste des acteurs d’après leurs représentations

Catégories d’acteurs

Qui développent une représentation de la RSE N

bre

de

site

s

Les représentations

Développées sur la RSE

Les groupes de pression 44 Dt les syndicats 09 Dt la Confédération Mondiale du Travail 01

La RSE volontaire affaiblit les syndicats et contribue à privatiser le droit ; elle

constitue une forme de dérégulation.

Dt la conf canadienne des évêques cathos 01 L’industrie minière canad. se conduit mal Dt les associations et fondations 27 Dt les politiques 06

La RSE perçue comme un outil pour passer de l’éphémère au durable

Les précurseurs 20 Dt l’église et sa doctrine sociétale 13 Dt Hyacinthe Dubreuil 01 Dt Marcel Barbu 01 Dt les coopératives 05

La RSE concerne des initiatives individuelles éclairées d’individus d’avant garde, souvent décalés, souvent croyants

convaincus qui cherchent à mettre en synergie leur croyance.

Les hésitants 09 Dt “La voix des PME en Europe” 01 Dt les chambres de commerce 08

Les hésitants se déclarent en faveur de la voie volontaire laissée à l’initiative de

chacun.

Les volontaires 51 Dt les banques et assurances 14 Dt les autres sociétés 21 Dt les organismes représentatifs 16

La RSE, une « cause marketing » pour maintenir son « capital réputation » face aux risques médiatiques croissants, issus

de divers dérèglements.

Agences notation, conseils en RSE 20 Dt les agences de notation 06 Dt les sociétés de conseil en RSE 14

La RSE, un marché captif très rentable. Les agences de notation constituent de très

bons outils à la main des syndicats

Les pouvoirs politiques 29 Dt les organismes nationaux 11 Dt les organismes européens 09 Dt les organismes supranationaux 09

La RSE, un moyen de soulager les Etats providences dont les budgets sont à bout de souffle et aussi de faire oublier que les

Etats sont les principaux pollueurs

Les organismes du savoir 51 Dt les grandes écoles 07 Dt les universités 21 Dt les chercheurs 23 Les Centres de ressources 82 Dt les journaux académiques 5 Dt les sites liés à l’emploi ou la formation 7 Dt les enquêtes 10 Dt les Centres de ressources, portails… 18 Dt les Bibliothèques, réseaux, etc. 19 Dt les Revues 23 Divers 8

La RSE, un champ de recherche,

d’enseignement et de formation, un moyen de construire sa carrière en devenant un

spécialiste du champ, une source de création de chaires spécialisées,

un système d’information très consulté, Un moyen d’obtenir des budgets et des

subventions, un champ riche et pertinent pour produire des thèses et des articles,

etc.

Les syndicats 159/313 Les précurseurs 160/313 Les coopératives 160/313

Organismes liés à l’emploi ou la formation 170/313 Universités 175/313

Organismes internationaux 181/313 Les chambres de commerce 184/313

UA PME “La voix des PME en Europe” 185/313 Agence de presse spécialisée EPICE 195/313

Centres de recherche 197/313 Les politiques 200/313

Faible

Organismes du type fédération 210/313 Enquêtes menées sur la RSE 213/313

Confédération Mondiale du Travail 227/313 L’église 313/313

Nulle

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Il apparait, au risque de la caricature, un double débat dialectique qui traverse l’ensemble des discours tenus par les acteurs et qui les constituent d’autant plus sûrement en parties prenantes que ces acteurs institutionnels se positionnent clairement sur le registre d’une RSE volontaire (Soft Law) versus une RSE obligatoire (Hard Law).

Tableau 5 : La double dialectique des PP en matière de RSE

2.3. Les parties prenantes à l’aune de la pyramide de Caroll Si la dimension dialectique qui anime actuellement les débats sur la

nature de la RSE semble bien établie et relativement rationnelle, il importe de comprendre comment les positions évoluent dans le temps et font œuvre de régulation au sein de l’espace sociétal. Pour cela, une illustration est proposée à partir de morceaux choisis en suivant la progression des dimensions établies par Caroll.

2.3.1. La régulation par la Corporate Legal Responsibility

27. En France, la Corporate Legal Responsibility (Hard Law) est soutenue par les parties prenantes traditionnellement défavorables aux entreprises et traditionnellement favorables à l’emprise du contrôle de l’Etat sur les acteurs économiques. Sur ce versant 44 sites sont comptabilisés ; ils sont majoritairement portés par les syndicats et les ONG.

28. En 2004, la Confédération Mondiale du Travail (CMT) exprime un point

de vue syndical radical dans une étude portant sur la RSE et les codes de conduites : «Depuis plusieurs années, le monde des employeurs, en connivence avec certains gouvernements, a tout fait pour déréguler et flexibiliser la sphère économique et sociale7 ». « [la RSE volontaire vise à] affaiblir, sinon supprimer, le droit législatif et contractuel, à affaiblir, sinon supprimer, le rôle régulateur et arbitral des pouvoirs publics nationaux et internationaux, à choisir les partenaires qui conviennent et à écarter les autres, à esquiver de véritables avancées en matière de justiciabilité des droits humains8».

29. 10 sites émanant d’autres syndicats présentent des propos plus nuancés.

Naturellement orientés People, les institutions syndicales semblent avoir été prises au dépourvu par la soudaineté et l’ampleur du débat autour de la RSE. Ainsi, avant de se rallier à la forme obligatoire (Hard Law), les syndicats affichent d’abord des attitudes de retrait vis à vis de la RSE qui transparaissent à travers différents argumentaires.

30. Tout d’abord, les démarches philanthropiques (orientées Planet) peuvent

être l’objet de critiques dans la mesure où les dons concernés auraient pu

Contre

Pour

La RSE

obligatoire

La RSE

volontaire

Les entreprises PME, CCI

Les coopératives La communauté

européenne

Les entreprises PME, CCI

Les coopératives La communauté

européenne

Les syndicats Les ONG

Les syndicats Les ONG

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être dévolus aux salariés (People). Le vol inaugural de l’Airbus A 310 dont le produit est reversé à des associations caritatives est à ce titre exemplaire. Par ailleurs le transfert de la responsabilité sociétale aux entreprises peut constituer un recul pour les acteurs syndicaux qui pourraient se voir dépassés sur le terrain des luttes sociales où ils sont traditionnellement installés. De plus, la sincérité des entreprises, quant elles se constituent en promoteurs de la RSE, est mise en doute par les acteurs syndicaux.

31. Pour autant, la voie de la RSE, dans la mesure où elle est imposée et

contrôlée par l’Etat, conserve la faveur de la majorité des syndicats. Elle est présentée comme un terrain positif d’intervention légal, sociétal et citoyen. La RSE est alors susceptible de fournir de nouveaux thèmes aptes à renouveler les luttes sociales.

32. 27 sites concernent des associations et des ONG. Les sites des ONG sont

principalement orientés « Planet ». Ils adhèrent aux positions « People » des syndicats adoptant la préférence pour la RSE légale et obligatoire. Cependant les ONG se démarquent par une attitude beaucoup plus exigeante sur le plan « Planet » : elles font appel à la responsabilité des consommateurs en tant que personne, ainsi qu’à la responsabilité des Etats. Elles mettent en ligne des bilans de pollutions qui démontrent que la seule action des entreprises, même obligatoire, est vouée à l’échec. La proposition pour une convention internationale sur la Responsabilité Sociétale des Entreprises9 évoquée à Johannesburg, résume cette position.

• « Déclarer que le droit à un environnement sain et à des conditions de travail respectables, prime sur le droit du commerce.

• Imposer des obligations sociales et environnementales très concrètes : respect du droit syndical, salaire minimum, promotion des productions propres, substitution des productions dangereuses, recyclage des matières, gestion responsable des déchets …

• Bannir les pratiques de « double standard ». • Garantir la réparation des dommages aux personnes et à

l’environnement. • Instaurer des mécanismes de contrôle et de sanction, par exemple en

interdisant l’accès des entreprises peu regardantes aux dispositifs d’assurance des risques d’investissement.

• Obliger les multinationales à payer leur dette écologique vis à vis des pays du Sud.

• Renforcer la justice sociale et environnementale pour les communautés menacées au Nord comme au Sud »

33. La régulation envisagée sous l’égide de la Corporate Legal

Responsibility présente des limites en raison de sa dimension nationale. Dans la mesure où elle n’est pas mise en place, simultanément dans tous les Etats du globe. la Corporate Legal Responsibility confère un avantage concurrentiel aux pays qui ne l’imposent pas, tandis qu’elle affaiblit l’économie des pays qui l’imposent. Il n’existe pas à ce jour d’entité supranationale suffisamment établie pour imposer la Corporate Legal Responsibility à toutes les multinationales et à tous les Etats.

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34. Le 15 mai 2001 la France vote la loi sur les Nouvelles Régulations Economiques. Les NRE, en rendant obligatoire le Reporting pour les entreprises du CAC 40, les soumettent de facto à la pression des Ranking, notamment ceux présentés sur le site de la CGT : en d’autres termes, l’Etat s’engage dans la voie de la Corporate Ethical Responsability. Le 22 mars 2006, la Commission de l’Union Européenne officialise sa position de 2001 et arbitre pour la conception volontaire de la Corporate Ethical Responsability qui est défendue par les milieux d’affaires. Plusieurs raisons ont guidé ce choix, mais deux d’entre elles sont déterminantes au niveau international : tout d’abord, les sanctions ex post ne fournissent pas de traitement post catastrophe, ensuite les plus grands fauteurs de troubles seraient des Etats eux-mêmes et il est difficile de leur confier une responsabilité qu’ils sont réputés transgresser de leur propre initiative.

35. En septembre 2007, l’association Robin des Bois présente son rapport

sur la gestion des déchets, post catastrophe : faute de moyens, de nombreux sites sont laissés en l’état ou ne sont pas entretenus ; ils pollueront pendant des siècles. Certains risquent d’exploser (déchets, barrages). Ce sont les ONG qui dénoncent la délinquance des Etats

36. Ainsi, les pollutions les plus graves seraient produites par les Etats eux-

mêmes. La thèse est d’abord développée en ligne sur les sites des ONG qui présentent de nombreux exemples. Les plus emblématiques concernent l’Etat Russe, notamment la gestion de Minatom10 : abandon de déchets nucléaires dans le site de Mayak en 1954 ; 600 à 800 enfouissements de déchets radioactifs autour de Tchernobyl en 1986 (l’enfouissement connu sous le nom de « tranchée de la forêt rousse », est le plus souvent référencé) ; rejet de déchets radioactifs dans la baie Andreeva en 1997.

37. En 2007, les ONG s’insurgent car Minatom accepte 20 milliards de $US

pour stocker en Russie les déchets générés par les centrales nucléaires d’autres pays. « Le projet prévoit l’importation de 160.000 tonnes de matériel radioactif éteint et utilisé dans les cinquante dernières années ». Les ONG se scandalisent que la Russie soit encore admise à répondre à des appels d’offre internationaux pour la gestion des déchets nucléaires, car ses sites de stockage se trouvent dans une situation désastreuse qui risque d’empirer en cas d’accroissement des déchets stockés… elles mettent en garde contre un risque d’échauffement excessif suivi d’une explosion des déchets liquides séparés du plutonium et de l’uranium, leurs infrastructures étant tellement vieillies…

38. Le 28 mars 2007, la position développée par les ONG, est reprise par les

Nations Unies avec le rapport Ruggie. John Ruggie, professeur à Harvard est le représentant spécial du Secrétaire général des Nations unies pour la question des droits de l'homme des sociétés transnationales et autres entreprises. Il produit un rapport11 qui officialise que les plus grands délinquants sociétaux se recrutent bien parmi les Etats et les entreprises d’Etat. La collusion opérée entre l’Etat Patron et l’Etat Nation contribue à amoindrir les processus de régulation : le rapport précise que certains d’entre eux qui disposent de forces juridiques et répressives, n’hésitent pas à procéder à l’interdiction des contrôles, voire

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aux meurtres de journalistes d’investigation. “Evidence suggests that firms operating in only one country and state-owned companies often are worse offenders than their highly visible private sector transnational counterparts”. Faut-il alors faire appel à la Corporate Ethical Responsability ?

2.3.2. La régulation par la Corporate Ethical Responsability

39. 129 sites issus des entreprises, des CCI, des coopératives, des organismes représentatifs des PME militent contre le processus obligatoire (Hard Law) et pour le processus volontaire (Soft Law). En 2008, les cause-related marketing se multiplient sur les grandes chaînes. L’hypothèse est que les « mieux disant environnementaux », bénéficieront d’opportunités en termes de profit car certains facteurs transforment leurs images de marques. « Quand vous achetez nos produits, nous faisons un don aux refuges de France, nous plantons un arbre dans le désert, nous finançons un vaccin, etc. ».

40. Ce mode déférentiel de régulation intervient ex ante ou ex post. Ex ante, les adhésions volontaires à la Corporate Ethical Responsability émergent sous l’influence de facteurs qui font de l’éthique une opportunité de nouvelles performances économiques sous l’égide de différentes pressions : les dérèglements climatiques, le pouvoir médiatique et l’opinion publique, les apports de l’investissement socialement responsable quant il impacte la renommée des entreprises

41. La conscience des dérèglements climatiques transparaît sur la toile au travers des discours alarmistes sur la couche d’ozone, la désertification, la déforestation, l’effet de serre, la fonte de la banquise, les pluies acides, l’obscurcissement planétaire, les tsunamis, les tornades, les tremblements de terre… Le développement du thème sur la toile est aussi le produit d’une peur endémique qui active les besoins de sécurité des Nations. Par exemple, les académies des sciences s’expriment ainsi : « Nous adjurons toutes les nations d’entreprendre rapidement des actions pour réduire les causes du changement climatique et pour s'adapter à ses effets et de s'assurer que cette question est incluse dans toutes les stratégies pertinentes nationales et internationales. En tant qu'Académies nationales des sciences, nous nous engageons à travailler avec les gouvernements pour aider à développer et à mettre en œuvre la réponse nationale et internationale au défi du changement climatique12».

42. Face à cette prise de conscience massive des risques planétaires, le non engagement tend à devenir une faute éthique caractérisée. Si certaines entreprises maintiennent des comportements d’indifférence vis-à-vis de la survie de la planète, l’Investissement Socialement Responsable (ISR) défini par l’article 116 des lois NRE devient un facteur clé dans la quête de financement des entreprises. En effet, pour accéder à l’éligibilité, les entreprises doivent présenter des certificats, des labels, pratiquer des codes de conduites, respecter des chartes ou remettre des Reporting pour obtenir leurs certifications.

43. En adhérant visiblement à la Corporate Ethical Responsability, l’entreprise qui se soumet aux demandes d’une agence de notation, pense généralement se prémunir contre d’éventuels mouvements sociaux ou d’opinions. Pourtant les engagements sociétaux peuvent provoquer

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un effet Boomerang. Il suffit qu’une société ayant pris des engagements, fasse l’objet de révélations accusatrices et circonstanciées. Prise en flagrant délit de non respect de ses engagements, l’a société voit le cours de ses actions s’effondrer (Ahold, Arthur Andersen, Enron, Parmalat, Tyco, Xerox, Worldcom).

44. S’appuyant sur les rapports rendus obligatoires par la loi sur les NRE, la CGT a mis en place depuis 2003 une démarche de classement avec le concours du Groupe Alpha Etudes. Cette publicité inattendue prend au dépourvu les entreprises du CAC 40 qui effectuent un ajustement déférentiel rapide. Si le rapport de 2003 fait apparaître des comportements d’évitement (figure 5) de la part d’entreprises qui ne « jouent pas le jeu », celui de 2006 parait beaucoup plus lisse (figure 6).

Figure 5: comportement des

entreprises vis-à-vis de la loi : étude de 2003

Figure 6 : comportement des entreprises vis-à-vis de la loi :

étude de 200613

45. La Corporate Ethical Responsability présente pourtant des limites. Si elle paraît avantageuse pour les entreprises, elle l’est moins pour certains salariés dans l’exercice de leur fonction. Ceux-ci sont tenus d’adopter les comportements ad hoc pour éviter toute dérive comportementale susceptible de constituer une imposture aux yeux de la loi, des media et/ou de l’opinion publique. Par exemple, le 28 janvier 2008 la France entière est le témoin sidéré de ce qui arrive à un professeur anonyme qui administre une claque à un élève suite à une insulte. L’enseignant est interpellé à son domicile, gardé à vue 23 heures, mis en accusation pour «violence aggravée sur mineur» ce qui lui fait encourir jusqu’à cinq ans de prison. S’établit alors une couverture médiatique nationale, des dizaines de milliers de lettres de soutien sont envoyées. La phrase clé « claque à un élève » est utilisée plus de 1000 fois sur la toile et des centaines de messages sont enregistrés sur le site de France info.

2.3.3. La régulation par la Corporate Philanthropic Responsability

46. Au sommet de la pyramide de Caroll règne la Corporate Social Responsability. Cette version diffère des précédentes sur deux points : d’une part, l’entreprise consent à une absence de contrepartie ; d’autre part, l’action envisagée ne fait l’objet d’aucun contrôle ex post. Voici quelques exemples présents sur la toile et illustrant cette étape que les plus grands groupes choisissent de franchir :

• AIR BUS met aux enchères les places pour le premier vol de l’A 380 : deux billets de prestige sont vendus 100 000 $. La société récolte 1,3 milliard de dollars de recettes qu’elle reverse à des oeuvres caritatives (24 octobre 2007).

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• AMERICAN EXPRESS finance la restauration de la Statue de la Liberté en versant 0,01$ pour chaque transaction effectuée à l'aide de ses cartes bancaires (1983).

• Le GROUPE BANQUE POPULAIRE s'engage pour le recrutement, l'insertion professionnelle et le maintien dans l'emploi des personnes en situation de handicap (18 mars 2008).

• CARREFOUR s’engage pour le respect des droits de l’homme et établit un partenariat avec la Fédération Internationale des Droits de l’Homme (FIDH).

• CASINO s’associe à Amnesty, rédige une charte d’éthique, met en place une feuille de route : gestion des déchets, réduction des impacts du transport, fluides frigorigènes, performance environnementale des produits, maîtrise des risques environnementaux, relations sociales, développements des compétences, santé, sécurité et son site renseigne les internautes sur l’état d’avancement de chaque dossier (2003).

• DANOME imagine la création d’un Comité de Responsabilité Sociale

(Danone Way) (2001). • ETHIAS, un groupement de quatre assurances mutuelles distinctes, met

en place, un Comité d'Ethique et un plan pluriannuel de responsabilité sociétale.

• LAFARGE devient le premier partenaire du World Wildlife Fund (WWF) en Chine.

• SUEZ groupe industriel franco-belge est leader mondial dans les domaines de l'énergie (électricité et gaz) et de l'environnement (eau et propreté). Le PDG du groupe revendique le statut de précurseur (2005).

• SCOTIA qui a versé, plus de 42 millions de dollars en dons et a parrainé de nombreuses organisations caritatives au Canada et à l'étranger, principalement dans les secteurs de l'éducation, de la santé, des services sociaux, des arts et de la culture (2006).

• SONY encourage les 17 000 salariés de toutes ses filiales à choisir un jour par an le “Sony Global Volunteer Day” réservé au travail pour la communauté.

• VAL VERT TRI, Centre de Tri de la collecte sélective dans la Vienne, organise ces postes de travail sur la « qualité de la vie » (20 mai 2008).

3. Discussion, limites et perspectives 47. La recherche conduite cerne la vaste conversation actuelle des parties

prenantes en matière de RSE dans l’espace francophone à partir des représentations véhiculées par les acteurs institutionnels qui se doivent d’être présents et réactifs sur la toile internet.

48. Travailler sur des discours pour établir des représentations demande à

intégrer différentes limites inhérentes à la nature même de la recherche qui agrège des connaissances non certifiées, des savoirs communs, des informations non vérifiées, mais toutes bien présentes sur la toile. Par ailleurs les résultats obtenus dépendent en partie des critères d’agrégation utilisés. De plus il convient de souligner des divergences d’appellations qui affectent les définitions adoptées et leur contenu sémantique. Enfin, même quand les Parties prenantes se rallient à une vision commune de la RSE, il demeure de puissants conflits d’intérêts au

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sein du jeu des acteurs, entre People, Planet et Profit, conflits qui risquent de faire évoluer la régulation en œuvre.

3.1. Les modalités d’agrégation des résultats en question

L’enquête utilise une unité d’analyse qui est le site internet soit 313 sites. L’unité de sens (partie prenante) se distingue de l’unité d’analyse dans la mesure où si un site ne peut correspondre strictement à un acteur, voire parfois à une partie prenante, le poids des parties prenantes ne peut se jauger strictement à partir d’un nombre de sites dédiés. L’effectif des sites d’une catégorie donnée constitue pourtant un indicateur d’activité, d’autant plus pertinent que le critère d’audience relative est intégré : les chiffres fournis méritent d’être considérés dans une perspective relative à visée comparative, venant nourrir les différents étages de la Pyramide de Caroll (Tableau 6).

49. Par ailleurs un site donné peut représenter de nombreux acteurs, c’est le

cas du site La voix des PME. Au sein de l’Union Européenne, 99,8 % des 20 millions d’entreprises recensées, emploient moins de 250 personnes et 93 % sont des entreprises de moins de 10 personnes1. Les PME ne sont pourtant pratiquement pas présentes parmi les sites qui s’expriment directement sur la RSE. En revanche, l’Union Européenne de l’Artisanat et des PME (UEAPME) qui réunit 84 organisations membres, déclare représenter 11 millions de PME employant 50 millions de personnes dans toute l'Europe. L’UEAPME ne laisse aucun doute quant à sa position contre la Corporate Legal Responsability. Elle se déclare pour la Corporate Ethical Responsability, notamment par l’organisme qu’elle gère, « La voix des PME en Europe » qui publie à Bruxelles, le 14 novembre 2003, un communiqué de presse sans ambiguïté aucune : « Les PME européennes déconseillent vivement aux autorités publiques d’ajouter des règlements contraignants ».

50. Par ailleurs la Commission Européenne, qui a monté des programmes de

formation des PME en plusieurs langues, confirme que les PME restent pour l’instant réservées par rapport au thème de la RSE.

51. L’enquête ayant procédé par mot clé, l’industrie de la connaissance qui

travaille sur le thème RSE a pu être largement consultée, bénéficiant dès lors d’une possible sur représentation (133 sites sur 313). Faudrait-il ne pas classer l’industrie de la connaissance dans la mesure où la RSE est simplement un des thèmes en son sein ? Cette éventualité peut être envisagée (Colonne 2 du tableau 6). A contrario, il apparait clairement à la lecture de certains sites que la RSE constitue une réelle opportunité institutionnelle pour les acteurs concernés, non seulement en termes de recherche (publication d’articles, création de revues spécialisées, sujet de thèse) mais également en termes de financement, de budget, de création de chaire… La RSE constitue dès lors un thème porteur au sein de l’industrie de la connaissance pour les acteurs institutionnels qui s’engagent dans le débat pour y faire entendre leur voix. Il semble donc légitime de classer l’industrie de la connaissance dans la Corporate Ethical Responsability (CER), dont le poids relatif monte à 77 % (colonne 3).

1 La RSE dans la PME, Novethic, www.novethic.fr/novethic/site/article

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52. Si les PME sont sous-représentées et l’industrie de la connaissance sur

représentée, il importe également de prendre en compte le poids des Précurseurs où sont agrégés des sites de coopératives et des acteurs d’obédience religieuse. De par leur action volontariste, ces acteurs peuvent émerger au titre de la Corporate Ethical Responsability (colonne 4) ou de la Corporate Philantropic Responsability (colonne 5).

53. Le tableau 9 offre un récapitulatif des résultats de la recherche conduite

en intégrant la dimension relative des valeurs qui y apparaissent. En tout état de cause, quelle que soit la méthode de classification retenue, la Corporate Ethical Opportunities (CEO) constitue la représentation dominante (60 à 84 %) face à la Corporate Legal Responsability (CLR) qui demeure minoritaire (14 à 28 %).

Tableau 6 : la Corporate Ethical Responsability constitue la représentation dominante quels que soient les critères retenus

Parties prenantes

Valeurs absolues en nb de sites

Valeurs relatives

Colonne 1 Colonne 2 Colonne 3 Colonne 4 Colonne 5 C. Philantropic R. 7 4 % 2 % 2 % 9 %

C. Ethical R. 109 68 % 77 % 84 % 77 % C. Legal R. 44 28 % 14 % 14 % 14 %

Les précurseurs 20 Non classé 6 % Classé en CER Classé en CPR Ind. Connaissances IC 133 Non classé Classé en CER

Total 313 100 % 100 % 100 % 100 %

54. L’hypothèse faible (colonne 2) en matière de dominance de la Corporate

Ethical Responsability est obtenue en ne classant que 160 sites, c'est-à-dire en laissant de côté ceux relatifs aux parties prenantes qui prêtent à contestation éventuelle. La RSE rassemble alors 28 points en faveur de l’obligation légale (Hard Law), et 68 points en faveur d’une démarche volontariste (Soft Law). 4 points seulement en faveur d’une RSE sur un mode philanthropique.

55. L’hypothèse haute (colonne 4), quant à elle, est obtenue en classant la

totalité des 313 sites. 14 points seulement en faveur de l’obligation légale contre 84 points pour la démarche volontariste et 2 points pour la version philanthropique.

Figure 7 : la RSE en France, en 2008, suivant la pyramide de Carroll

(hypothèse basse)

56. Aucun acteur ne se prononce en faveur d’une RSE à dimension strictement économique, semblant laisser loin en arrière les positions

28 %

68%

4

Corporate Economic Responsibility

Corporate Legal Responsibility

Corporate Philantropic Responsability

Corporate Ethical Responsability

0 %

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prises antérieurement par le Prix Nobel d’économie 1976. Milton Friedman (1970) développe, dans un article du New York Times Magazine sa position en matière de Corporate Economic Responsability. Si le chef d’entreprise doit effectivement respecter ses obligations sociales légales, il doit s’abstenir d’actions volontaires qui constitueraient de facto une sorte d’abus de biens sociaux ou d’abus de confiance envers les shareholders. Deux arguments majeurs sont développés: d’une part, la RSE serait en fait une sorte de cheval de Troie de l’économie socialiste “This is the basic reason why the doctrine of "social responsibility" involves the acceptance of the socialist view that political mechanisms, not market mechanisms, are the appropriate way to determine the allocation of scarce resources to alternative uses". D’autre part, la responsabilité sociale n’incomberait pas à l’entreprise qui est un centre de profit, mais à l’individu qui affecte comme il veut, ses propres deniers. "Of course, the corporate executive is also a person in his own right. As a person, he may have many other responsibilities that he recognizes or assumes voluntarily-to his family, his conscience, his feelings of charity, his church, his clubs, his city, his country”

3.2. Les divergences sémantiques

Pour désigner le phénomène étudié, les sites de langue française utilisent généralement un seul sigle, RSE, avec deux traductions possibles Responsabilité Sociale ou Sociétale des Entreprises. Au vu de la définition fournie par le livre vert de la commission européenne en 2001 la RSE mériterait un ancrage sémantique francophone autour du qualificatif sociétal plutôt que social. Il n’en demeure pas moins que « sociale » est employée beaucoup plus souvent (tableau 1) contribuant derechef à une représentation réductrice de la notion laissant sous le boisseau l’orientation Planet au profit de l’orientation People.

57. Par ailleurs la RSE fait l’objet de débat quant au dosage juridique entre

Hard Law et Soft Law. Syndicats et ONG souhaitent un processus imposé par la loi. A la lecture de certains sites la position prise par la Commission Européenne est ressentie comme un revers idéologique. En effet, l’hypothèse de ces parties prenantes est que la RSE ne détient aucune légitimité au regard des critères économiques et que sa légitimité éthique ne sera pas suffisante pour qu’elle s’impose. D’où la préconisation au recours à une RSE obligatoire.

58. A l’inverse, les Etats, la Commission Européenne, les grandes

entreprises, les CCI et les coopératives, s’engagent pour une RSE volontaire. Leur hypothèse (figure 3, surface E) est que la RSE a une légitimité économique et éthique et qu’elle n’a pas besoin de l’obligation juridique pour s’imposer.

59. La distinction faite par Carroll, entre responsabilité (Hard Law) et

opportunité (Soft Law) apparaît fondamentale à la lumière de l’examen des 313 sites et des jeux d’acteurs développés. Le choix du terme « responsabilité » sous entend une soumission au domaine juridique qui assujettit les entreprises à des lois qu’elles ne considèrent pas forcément comme légitimes. En revanche le terme « opportunité » est connoté Business ouvrant la porte sur de nouveaux territoires qu’il s’agit de

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conquérir. Dans le premier cas (Hard Law) les syndicats disposeraient d’un nouveau levier institutionnel pour développer les luttes sociales. Dans le second (Soft Law), c’est la négociation qui devient l’instrument central. La Confédération Mondiale du Travail insiste sur l’inégalité des pouvoirs entre acteurs qui fausse alors le jeu de la négociation, en faveur des entreprises.

3.3. Les conflits de priorité au sein de la définition « dominante »

La Triple Bottom Line rappelée en introduction met sur le même plan, le profit, les personnes et l’habitabilité de la planète, augurant de possible conflits entre les critères énoncés.

Figure 8 : les trois nœuds conflictuels liés à la définition RSE

60. Le conflit Profit-People est illustré par la préférence donnée aux

engagements People qui rapportent et aux désengagements People qui ne rapportent pas. Par exemple en 2008, IKEA représente 34 pays, 220 magasins, 453 millions de visiteurs et 104 000 collaborateurs. En Grande-Bretagne, IKEA propose pour sa maison préfabriquée, de donner la priorité aux ménages à faibles revenus et conclut un partenariat avec une association spécialisée dans le logement social. Mais, en France, au même moment, elle est condamnée à verser 450 000 Euros aux syndicats pour avoir ouvert un magasin trois dimanches de suite.

61. Certaines Parties prenantes mettent en relief le conflit entre Profit et Planet, notamment quand elles militent en faveur d’une RSE obligatoire. Elles soulignent que dans l’état actuel, notamment dans l’industrie chimique et dans les pays émergeants, il demeure souvent moins coûteux de payer les amendes ou d’indemniser les victimes ex post, que de modifier ses processus de fabrication et ses rejets ex ante. Ces acteurs soulignent aussi que le volontarisme repose sur des labels et des certifications qui ne sont pas toujours respectés : par exemple, le label Responsible Care® des industries chimiques est un des plus contestés : la contestation se fonde sur des exemples concrets…

62. « Montedison EniChem arbore le label Responsible Care®. Pourtant,

Montedison EniChem situé en bordure de la lagune, pollue Venise depuis des années : la société accepte une conciliation financière au bénéfice des 257 malades et des 116 personnes décédées, mais à aucun moment elle ne s’engage volontairement à dépolluer ses activités, puisque la loi ne l’oblige pas »

.

Y

People V Planet U

Profit T

Z

W X

Nœud conflictuel

Nœud conflictuel

Nœud conflictuel

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63. « L’explosion de l’usine de pesticides Union Carbide à Bhopal (Inde) en décembre 1984 est considérée comme une des plus grandes catastrophes industrielles de tous les temps. 3500 à 8000 personnes meurent dans leur sommeil. Plus de 20.000 décèdent par la suite (exposition au poison). Il y a plus de 250 000 blessés. 150.000 survivants souffrent de maux chroniques et ne peuvent plus travailler. Et cela continue car l’Union Carbide a abandonné l’usine en y laissant de grosses quantités de poisons. DOW Chemicals a absorbé Union Carbide. DOW Chemicals, pourtant promotrice du Responsible Care®, considère que ces faits antérieurs ne lui sont pas imputables et refuse d’engager les travaux nécessaire à la dépollution du site14».

64. Le conflit de fond People contre Planet émerge également des sites.

Alors que les luttes sociales ont permis de satisfaire des préoccupations sociales (People), la multiplication des catastrophes industrielles et climatiques risquent de reléguer au second plan le combat corporatif, voire de le faire passer dans l’opinion publique, pour un combat égoïste face aux préoccupations planétaires.

65. Lors d’une des grèves de la SNCF de l’automne 2007, pour la première

fois dans l’histoire des relations industrielles, la radio publique française d’information a annoncé une évaluation, faite par EcoAct, se basant sur les facteurs d’émissions de la méthode Bilan carbone de l’Ademe qui indique que chaque jour de grève où les usagers utilisent leur voiture personnelle pour effectuer le trajet domicile – travail, au lieu d’utiliser les transports ferroviaires en IDF, génère environ 45 fois plus d’équivalent CO2 dans l’atmosphère qu’un jour normal. les milliers de tonnes d’émissions supplémentaires de CO2 sont supportés par la communauté mondiale alors que la grève défend les intérêts d’une catégorie particulière d’agents15.

66. Le 24 octobre 2007, Air Bus met aux enchères les places du premier vol

de l’A 380. Deux billets de prestige sont vendus 100 000 $, la société récolte 1,3 milliard de dollars qu’elle reverse à des oeuvres caritatives, ce qui provoque les protestations des salariés qui considèrent que cet argent aurait dû leur être reversé.

67. Concernant les dégazages volontaires quotidiens liés aux transports

pétroliers : sur 423 pollutions détectées en 2007, 62 navires furent identifiés et 39 poursuites entamées. Les interrogatoires ont permis d’identifier la source du phénomène : les capitaines dégazent en pleine mer pour recevoir une prime qui accroît considérablement leur revenu16…

68. La société Trafigura qui avait affrété le Probo Koala refuse la

décontamination qu'elle juge trop coûteuse. Elle fait appel à la société Tommy, (agréée depuis le 12 juillet 2006) et commence en août 2007 l’épandage des « eaux usées » dans une dizaine de décharges autour d'Abidjan. Leurs émanations des « eaux usées » tuent 7 personnes, font 35 blessés graves et intoxiquent 23000 personnes prises de vomissements et de troubles respiratoires17.

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Conclusion

69. La recherche a inventorie 313 sites qui recueillent les discours de millions d’acteurs et expose les postures des principales parties prenantes au sein des débats RSE. Quatre représentations de la RSE ont pu être diversement mises en évidence à la lueur de la pyramide de Caroll. Aucune Partie prenante engagée en matière de RSE ne se réfère explicitement aujourd’hui à la stricte orientation économique (Corporate Economic Responsability) pourtant affichée dans les années 70 par Friedman entre autres. La deuxième représentation principalement portée par les organisations non marchandes (syndicats, ONG) appelle la contrainte établie juridiquement par la loi en faveur de la Corporate Legal Responsability. Les deux autres représentations que sont la Corporate Ethical vs Philantropic Responsibility principalement par les organisations marchandes considèrent que les entreprises sauront saisir les opportunités que constitue un engagement volontaire en matière de RSE, sans que la distinction ne s’opère clairement

70. Si on tient compte que la Corporate Philantropic Responsability ne fait

qu’émerger pour l’instant, l’évolution en matière de régulation se résume en un conflit entre la forme obligatoire (Hard Law) et la forme volontaire (Soft Law) de la RSE apportant en quelque sorte un nouvelle rhétorique au débat entre organisations marchandes ou non marchandes avec les idéologies associées (Perez et al, 2005). Les partisans de la première s’appuient sur le développement du rôle de l’Etat et représentent l4 à 28 % des Parties prenantes issues des 313 sites où les entreprises sont absentes. Les partisans de la Corporate Ethical Responsability quant à eux s’appuient sur le développement du rôle de l’Entreprise, qui, de centre profit, devra devenir un centre de vie ; ils représentent de 68 à 84 % des Parties prenantes des 313 sites, sans qu’aucun syndicat ou ONG ne soutienne cette orientation.

Figure 9 : les acteurs et le type de régulation qu’ils défendent

Qui prend en charge la régulation sociétale ?

… des valeurs Valeurs matérielles morales

La réussite est principalement fondée sur…

Op

port

uni

ties

Res

po

nsi

bilit

y

Milton Friedman

Précurseurs Eglise

Paternalisme Coopérateurs

Syndicats ONG Etat

français

Comm. Europ. PME GE CCI

Corporate Ethical

Opportunities

Corporate Legal

Responsability

Corporate Philantropic

Opportunities

Corporate Philantropic

Responsability

Corporate Economic

Responsability

Quelques Grands Groupes

d’avant garde

Axe chronologique

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71. L’église a d’abord tenté la mise en place d’un processus de régulation fondé sur les consciences. L’Etat a ensuite tenté sa mise en place en s’appuyant sur des contraintes juridique et pénale. On demande aujourd’hui, aux entreprises de prendre en charge le processus et de se réguler elles mêmes, volontairement.

72. Ce qui a été réalisé à l’initiative des consciences, notamment au sein

d’usines providences ou d’associations, s’est avéré anecdotique et la prise en charge par les administrations publiques a engendré des dépenses publiques sans précédent, alors que les problèmes subsistaient sur les deux plans (People & Planet).

73. Au niveau européen, la commission arbitre en faveur des entreprises,

puis au niveau mondial, c’est finalement le rapport18 de John Ruggie, professeur à Harvard, représentant spécial du Secrétaire général des Nations unies qui argumente cet arbitrage en officialisant la thèse suivant laquelle les plus grands délinquants sociétaux se recrutent parmi les Etats et les entreprises d’Etat : il est difficile de leur confier une responsabilité qu’ils ne respectent pas.

74. Il en résulte que la tentative actuelle de mise en place d’un processus

amont intégré à l’entreprise, n’est plus guère idéologique, mais plutôt un pis aller pragmatique pour faire face à l’habitabilité de la planète qui continue de se dégrader. Reste à voir si les entreprises réagiront suffisamment rapidement pour faire cesser la progression des détériorations climatiques et environnementales au niveau mondial ?

Tableau 12 : les différents acteurs chargés de la régulation

Immaturité

Pas de soumission

Marché Loi du profit

Libé

ralis

me

p

ate

rna

lism

e

P

rovi

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ialis

me

A

lter

libé

ralis

me

Pa

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Lo

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L

oi in

tern

e

Religion Loi divine

Loi juridique

Loi médiatique

Culpabilité

Etat providence

Media

Soumission forcée

Soumission consentie

Ve

rs l’

age

adul

te d

e l’

éco

nom

ie

Entreprise responsable

Sens du devoir

Soumission à soi-même

Maturité

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Bibliographie

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BODET, C., et LAMARCHE, T., 2007, « La Responsabilité sociale des entreprises comme innovation institutionnelle. Une lecture régulationniste », Revue de la régulation, n°1, juin 2007, Varia, http://regulation.revues.org/document1283.html.

CARROLL, A. B., 1979, A three-dimensional conceptual model of corporate performance. Academy of Management Journal. Vol. 4, No 4. 497 - 505

CARROLL, A. B., 1991, The pyramid of corporate social responsibility: toward the moral management of organizational stakeholders. Business Horizons, 34(4), 39-48. http://www.cbe.wwu.edu/dunn/rprnts.pyramidofcsr.pdf

DESJEUX D. (2004), Les sciences sociales, PUF, Que sais-je ? D’ IRIBRANE P. (1993), La logique de l’honneur Gestion des entreprises

et traditions nationales, Seuil ELKINGTON, J., 1998, Cannibals with Forks: the Triple Bottom Line of 21st Century Business, New Society Publishers.

FRIEDMAN, M., 1970, The Social Responsibility of Business Is to Increase its Profits, New York Times, September 13, p. 11.

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LATOUR, B., 2006, Changer de société - refaire de la sociologie, La Découverte, Paris.

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REYNAUD, J-D., 1997, Les Règles du jeu : L'action collective et la régulation sociale, Armand Colin, Paris.

SAVITZ , A., 2006, The Triple Bottom Line: How Today's Best-Run Companies are Achieving Economic, Social and Environmental Success and How You Can Too, Jossey-Bass.

SCHWARTZ, M., S.; CARROLL, A., B., 2003, Corporate Social Responsibility: A Three-Domain Approach. Business Ethics Quarterly, 13 (4), 503 - 530.

STRAUSS, A., & CORBIN, J., 2004, Les fondements de la recherche qualitative. Techniques et procédures de développement de la théorie enracinée, Res Socialis, Academic Press Fribourg, 343 p.

Acteurs dont les sites ont fait partie de l’enquête (Dans cette liste, ne figure pas l’industrie de la connaissance). Accor, ACFAS McGill, Action Conso, Actualités News Environnement, ADEME, ADECCO, Adminet Archives ouvertes, AFCAP, Agir Ici, Alliance, ALTER business news, Altermondes (Revue), Alternatives Economiques, Altius Fortius, Amis de la Terre (les), Amnesty international, American Express, ANACT, AI CSRR, AIR BUS, APROVA 84, ATTAC, Banque mondiale, Business PME, B2 Europe-Bretagne,

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British Telecom, Casino, Canadian Business for Social Responsibility, Cairn CRDD, Car France, Carrefour, CCARH/SHRM, CCFD, CDH NU, CCI région centre, CCI commerce international, CEDAC, Centre Info, Cercle de coopération des ONG, CFDT, CFIE, CGT, chinatoday.com.cn, CICR, Commission européenne entreprise et industrie, Commission des communautés européennes, Comité européen des fabricants de sucre, Comité des régions, CMT, Conseil de l’Europe, Consensus communication CFIE, Conseil canadien des normes, Conseil de la publicité, Corerating, Conference Board du Canada, CRID, Croissance Verte, CSCTUAC, FSI, Confédération européenne des syndicats, CES, CSRWire, Danone, Dialogic Fleishman-Hillard, DIDD, EcobaseEcosociale, EconPaper, Entreprises Territoires et Développement, ENTERWeb, EPICES, Ethique sur étiquette, Ethos, Espace Rinorécos, ESTER, Ethias, Euractiv, Eurocommerce, EUROCOOP, Europa, Euro info Center, Europe, Etat de Genève, Equiterre, Fédération européenne de l’actionnariat salarié, FEDEREC, Finlande, FNSA, FNADE, FO Cadres, Forum pour l'Investissement Responsable, Forum citoyen pour la RSE, France Diplomatie, GEIDE, Grantstream, Global Unions, Greenpeace, HSBC, Humanité (L’), H-Urban Faciliware, IBM France, ICDES, Industrie chimique européenne, Initial, initiative (L’), INNOVEST, International Coopérative Alliance (ICA), Inter Consulaire, Institut de l’entreprise, Ires, ISR-INFO VIGEO, JO de l’Union européenne, Journal de la haute horlogerie, Kaliop.Com, KPMG, Lafarge, La Fédération internationale des droits de l’homme, La Poste, La voix des entreprises de Paris et de la petite couronne, La voix des PME en Europe, Lever, Les affaires.com, Le peuple, Levi Straus, Le Parlement européen, Le site des coopératives, Les Verts, LDH, L'Oréal, MARSCEE, MAZARS, Mediaterre, Melchior, Novethic, Novethic études, OIT, One, ORESYS-Ethifinance, Organisation Internationale des employeurs, ORSE, PCN, PEFC, PEF info, Personnance, Prevent, PLEON, PostSosialDialog.org, Previnfo, QHSE, Radio Praha, Renault, RENTOKIL, Ré-So.net, RHDS, RIODD, Ritimo, RN Can, Robin des Bois, Royal Dutch/Shell Group, Royal Mail, RSE-et-PED.info, Secours Catholique, Scop entreprise, Scotia (Banque), Sherpa (Association), Sommet d'Evian 2003, Standard Concil of Canada, Syndex, Sony, Suez, Telindus, Transparency International, Tripalium CSR, UCCFE, UEAPME, UNESCO, UJJEF.COM, Union Européenne de l’Artisanat et des PME, Volonteer, World Wildlife Fund.

Notes et sitographie

1 Livre vert publié par la Commission en 2001: «Promouvoir un cadre européen pour la responsabilité sociale des entreprises», COM (2001) 366 Final. http://ec.europa.eu/enterprise/csr/index_fr.htm

2 Archie B. CARROLL, A., B., The Pyramid of Corporate Social Responsibility: Toward the Moral. Management of Organizational Stakeholders, Business Horizons, July-August 1991.

3 http://www-rohan.sdsu.edu/faculty/dunnweb/rprnts.pyramidofcsr.pdf 4 « Ordre » s’entend au sens pascalien du terme

5 Exemple de lecture du tableau 2 : la catégorie «associations et fondations » comprend le plus grand nombre d’associations et de fondations, tandis que la catégorie « La voix des PME en Europe » ne comprend qu’une seule organisation, même si elle en représente des millions.

6 Notons que l’indice dont nous avons connaissance concerne les visiteurs de toutes les pages du site et non exclusivement les visiteurs des pages écrites sur la RSE.

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7 227 http://www.cmt-

wcl.org/cmt/ewcm.nsf/0/9505f70a46796b08c1256eb300542781/$file/brochrse-fr.pdf?openelement

8 http://www.cmt-wcl.org/cmt/ewcm.nsf/0/9505f70a46796b08c1256eb300542781/$file/brochrse-fr.pdf?openelement

9 http://www.greenpeace.org/raw/content/france/press/reports/entreprises-totalement-respo.pdf

10 http://www.lfm.ru/article.php3?id_article=53 11 http://www.business-humanrights.org/Documents/SRSG-report-Human-Rights-

Council-19-Feb-2007.pdf 12 Déclaration commune des Académies des sciences sur la réponse globale au

changement climatique (Traduction française du texte "Joint sciences academies' statement : Global response to climate change") http://www.vierurale.com/Humeur/Src/Academies.pdf

13http://www.cgt.fr/internet/html/rubrique/?id_parent=2817&aff_docref=1&aff_ensavoirplus=1

14 http://www.greenpeace.org/france/campaigns/mondialisation-et-environnemen/rsee/

15 http://www.metrofrance.com/fr/article/2007/11/15/11/1231-37/index.xml 16 http://www.quid.fr/2007/Environnement/Accidents/1 17 http://leruisseau.iguane.org/spip.php?article1095 18 http://www.business-humanrights.org/Documents/SRSG-report-Human-Rights-

Council-19-Feb-2007.pdf