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La Recherche au Cahier n° 4 Capital immatériel et Systèmes d’Information La Recherche au CIGREF

La Recherche au Cahier n° 4 - Cigref, réussir le numérique · Mieux comprendre le capital immatériel La valorisation du capital immatériel Capital immatériel et système d’information

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La Rechercheau

Cahier n° 4Capital immatériel

etSystèmes d’Information

La Recherche au CIGREF

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Table des matières

ÉditoLe CIGREFAvant-Propos

Le langage de la valeur des actifs immatériels - SI : Entre « grammaire » et « photographie »

QuestionnementModéliser pour comprendreMesurer pour expliciter les visions collectives et développer le signalingLe Management des Ressources Immmatérielles (MRI)Valoriser les actifs immatériels : entre « Grammaire » et « Photographie »Les actifs immatériels -SI : Un poste d'investissement majeurOù en sont les DSI dans le pilotage de leurs actifs immatériels-SILes barrières les plus pertinentes dans l'explicitation de la performanceet de la valeur des actifs immatériels - SILes éléments importants pour le pilotage de la performance de la DSILe niveau de maturité des entreprises dans le traitement de leurs actifsimmatériels - SIConclusion : Quoi faire ?

Capital immatériel et systèmes d’information : premières explorations théoriques

IntroductionMieux comprendre le capital immatérielLa valorisation du capital immatérielCapital immatériel et système d’informationConclusionBibliographie

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1011121313141517

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La Recherche au CIGREF

Cahier n° 4 3

L'immatériel est devenu un enjeumajeur pour nos entreprises et l'ensemble de nos économies etsociétés. La transformation socio-économique profonde de nosmodes de production, marquéenotamment par la tertiarisation desactivités, l'augmentation du rythmede l'innovation, l'usage généralisédes TIC, et le déplacement deslieux de création de valeur, appelleà une transformation radicale denos modes de pensée et d'action.En effet, les nouveaux modèlesd'affaires placent l'immatériel dansses différentes composantes - systèmes d'information, processusorganisationnels, R&D, innovationau sens large, marques, réputation,etc. au cœur des processus decréation de valeur, tant aux plansde l'entreprise que macroécono-mique. C'est le message principalde l'agenda de Lisbonne, ainsi queplus récemment du rapport Levy-Jouyet.

Face à la nouvelle géoéconomiqueinternationale, nos entreprises setrouvent désormais dans l'obligationde faire du capital immatériel unélément central dans leurs modesde réflexion et d'action. Or, on ne lesouligne pas assez, les systèmesd'information constituent une com-posante essentielle dudit capital - de l'ordre de 40% selon les statis-tiques américaines.

C'est en prenant conscience de cesenjeux que Le CIGREF a porté un grand intérêt à ce sujet qu'il anaturellement inscrit à son agendade recherche, en continuité avecCIGREF 2005, dont l'ambition étaitde faire du CIGREF «… une plate-

forme de gestion des connaissances,sur l'ensemble des thèmes liés auSI…», et en conformité avecCIGREF 2010, qui, comme nous lesavons, va plus loin en affirmant«…combien le SI d'une entrepriseest un patrimoine important et spécifique pour l'entreprise ». C'estainsi que, outre des actions deprototypage auprès de certains deses membres, le CIGREF a choisid'approfondir ce thème au plan académique en finançant une thèsedans le cadre de son programmede recherche, et dont le thème central porte sur la contribution des actifs immatériels du SI à lacréation d'un avantage compétitifpour l'entreprise.

Ce cahier de recherche constitueun premier livrable de ce travail : uncadrage théorique du sujet à traversune revue de littérature sur le capitalimmatériel et les SI. Ce travail seraprolongé par une phase d'évaluationconcrète, qui porte sur le managementdes actifs immatériels dans le cadrede la gouvernance des systèmesd'information. Nous attendons avecintérêt ce prochain livrable, qui certainement nous permettra devoir sous un jour nouveau les condi-tions de la gouvernance de nos systèmes d'information. Mais d'icilà, je vous invite à lire ce premiercahier de recherche, qui présentedans un style accessible à tous, l'état de l'art des débats au sein dela communauté académique autourd'une question éminemment opéra-tionnelle : comment tirer parti desimportants investis alloués par lesentreprises à leurs systèmesd'information ?

Edito

DidierLambertPrésident

Paris, septembre 2008

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La Recherche au CIGREF

Cahier n° 4 5

Le CIGREF

Une finalitéambitieuse :« Promouvoir l'usage des systèmesd'informationcomme facteur de création de valeur et source d’innovation pour l'entreprise »

Représentativité- Association Loi1901- créée en 1970- 127 très grandesentreprises- 90 % des entrepri-ses du CAC 40(hors fournisseurs)- 120 000 professionnels de l'informatiqueet des télécom-munications- plus de 22milliards d'eurosde budget informatique et télécom-munications- le tiers du budgetinformatique ettélécommunica-tions de l'ensemble des entreprisesfrançaises

Créée en 1970, l''Association CIGREFa pour mission de «Promouvoir l'usagedes systèmes d'information commefacteur de création de valeur et sourced'innovation pour l'Entreprise».

Elle a pour objet de :1. Rassembler les grandes entreprisesutilisatrices de systèmes d'information 2. Accompagner et valoriser lesresponsables de systèmes d'informationdans l'exercice de leur métier, 3. Développer une vision à long termede l'impact des systèmes et technologiesde l'information sur l'entreprise,l'économie et la société.

Les membres

Les membres actifsLes membres actifs sont les personnesmorales de droit privé ou de droit public(administrations, organismes publicsou autres), utilisatrices de systèmesd'information, intéressées par les butspoursuivis par l'Association.

Les membres associésLes membres associés sont des personnes morales de droit privé ou dedroit public (administrations, organismespublics ou autres) qui souhaitent participer à certaines activités ou travaux de l'association.

CIGREF 2010

La performance de toute organisationest nulle si les fonctions assurées par les différents acteurs ne sont pascoordonnées autour d'un «projet commun».Seule une «vision partagée» :

- procure à l'organisation une identitéforte, qui marque son action collectiveet qui la distingue de toute autre, - implique de la part de ses membresun accord sur la représentation desbuts à atteindre, - constitue une communauté d'intérêtssur laquelle pourra se fonder une réelledémarche stratégique.

Tel est le but de CIGREF 2010 : « actualiser le projet associatif duCIGREF».

Une vocation affirmée

Dans le domaine des Systèmesd'Information, le CIGREF est et resteraune association de grandes entreprisesdont les DSI (qui les représentent),souhaitent :

- appartenir à un réseau indépendant, - développer une intelligence collectivedes meilleures pratiques d'aujourd'huiet des visions prospectives- promouvoir une parole collective.

Une ambition élargie

A partir des acquis de CIGREF 2005,l'ambition s'élargit autour des 5 axessuivants :

1- Promouvoir l'usage des Systèmesd'Information comme facteur de création de valeur et source d'innovationpour l'entreprise.2 - Ouvrir le réseau à d'autres grandesorganisations : du secteur public, aux filiales françaises de groupesinternationaux.3 - Développer au sein du CIGREF ladimension européenne et internatio-nale, par l'engagement auprèsd'EuroCio, qui vise à renforcer lescoopérations et les échanges.4 - Optimiser le développement derelations avec les entreprises innovantes,le capital risque, la Recherche, lesacteurs de la formation.5 - Renforcer sa présence sur lesgrands sujets liés à la Société del'Information.

Une organisation interne renforcée

- Encourager la participation des DSIau fonctionnement du CIGREF et renforcer le réseau- Associer les directions générales de nos entreprises, développer ladimension métiers- Développer la convivialité au sein duréseau

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Des valeurs toujours d'actualité….Indépendance,loyauté, partage,convivialité, exigence de qualité, imagination,réalisme et plaisir… telles sont les valeurs quepartagent ensemble lesentreprises membres duCIGREF

Le Cigref, association de grandesentreprises, met gratuitement

l’ensemble de ses travaux à la disposition de tous.

Document téléchargeable sur :www.cigref.fr

Une stratégie articulée autourde trois métiers

1 - Privilégier l'intensité de la relationentre les entreprises membres

La nature de l'implication des membresrésulte de la volonté individuelle de leurDSI à contribuer à une œuvre collective.Dès lors, la mesure de la performanceCIGREF s'apprécie non pas aux nombredes réunions qui sont organisées maisbien à « l'intensité de la relation » que cesactivités génère entre les participants.

2 - Accroître le rayonnement duCIGREF sur ses environnements

La force d'une organisation réside danssa capacité à transmettre ses valeursaux différents acteurs de son environ-nement afin de les convaincre et lesrassembler pour bâtir un écosystèmefavorable aux membres qu'elle sert.

L'écosystème informatique

Le CIGREF a la conviction que la chaînede valeur entre les entreprises utilisatri-ces et les fournisseurs résulte d'un nou-veau type de relation basée sur l'interdé-pendance des acteurs. Ces dernierssont donc étroitement associés dans lesprocessus de création de valeur et d'in-novation.

Société de l'Information

Le CIGREF est une « organisationcitoyenne » et développe des liens avecles acteurs influents de la Société del'Information afin de permettre à l'entre-prise d'être un acteur de la société del'information.

Entreprises

Interface entre la société de l'informationet ses membres, le CIGREF exerce sonmétier d'influence sur l'entreprise à tra-vers l'étude de thèmes transverses liés àla société de l'information, environne-ment auquel l'entreprise appartient.

3 - Anticiper les futurs possiblespour la fonction SI

Le CIGREF contribue à une intelligencecollective par et pour ses membresautour de la fonction système d'informa-tion. Essence même du Club, les échan-ges d'expériences, de réflexions, dequestionnement sont des enrichisse-ments croisés, féconds pour chacun etpour la communauté.

Les travaux du CIGREF seront articulésautour de trois domaines stratégiquesqui correspondent aux trois grandespréoccupations des DSI ;

- La DSI au service des Métiers et dela Direction Générale- La performance durable des S.I.- Le management et l'animation de laFonction S.I.

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La Recherche au CIGREF

Avant-propos

Cahier n°3 7

Les « Cahiers de Recherche duCIGREF » présentent l'état des travaux impulsés dans le cadre de la mission de l'association :

« Promouvoir l'usage des Systèmesd'Information comme facteur decréation de valeur et sourced'innovation pour l'entreprise ».

Ces travaux trouvent leur fondementdans les statuts de l'association :

«…Développer une vision à longterme de l'impact des systèmes ettechnologies de l'information surl'entreprise, l'économie et la sociétéafin, par exemple de :

a) Etudier les impacts et anticiperles besoins des grandes entreprisesen matière de technologies del'information.

b) Engager et défendre auprèsdes pouvoirs publics et autresinstances concernées, des actionsd'innovations et travaux derecherche.

c) Développer la coopération avecles administrations et la coordinationavec les organisations internatio-nales…».

Ces lignes forces ont engendré lelancement, en 2004, d'un programmede recherche dont le thème générique est « la création de valeurpar le système d'information », etdont l'animation, jusqu'en 2007, estassurée par trois jeunes doctorantssous contrat Cifre*. (voir sur le sitewww.cigref.fr les 3 cahiers précédents)

En 2008, le CIGREF a souhaitéprolonger cette première expérienceenrichissante en retenant pourthème de recherche :

« Capital immatériel et systèmesd'information : Premières explora-tions théoriques »

Les « Cahiers de Recherche duCIGREF » développent ainsi lesrésultats de nos travaux. Ils ne selimitent pas à un simple outil de diagnostic. Ils recensent égalementles leviers d'amélioration et les bonnes pratiques qui permettront auxéquipes de direction des entreprisesde progresser dans la gouvernancede la fonction informatique etd'augmenter ainsi la valeur créée àl'aide des systèmes d'information.

Notre objectif est clairement de fairede la science et de la recherche unlevier de contribution des entreprisesmembres à l'entrée de la Francedans la société de l'information.

C'est la raison pour laquelle cesprogrammes sont conduits sur leprincipe de la recherche-action. Ilsimpliquent les DSI et les groupes detravail du CIGREF.

Ce cahier N°4, consacré « auSystème d'Information et CapitalImmatériel » conforte l'engagementpris de publier tous les ans uncompte rendu détaillé des travauxainsi réalisés, afin de faire bénéficierde leur éclairage, non seulementles entreprises membres, mais également la communauté informatiquetoute entière.

Jean-FrançoisPépinDélégué Géné[email protected]

Les cahiersprécédents

sont accessibles

par tous sur le site

www.cigref.fr

* Convention Industrielle de Formation par la Recherche (CIFRE)

Paris, Octobre 2008

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Si l'on considère que l'incertitude - ou tout au moins le sentiment d'incertitude - la concurrence et laréduction de l'espace-temps se sontgénéralisés au cours des dix dernières années, alors une visiondynamique de la performance organisationnelle devrait être leprincipal objet de réflexion et d'actionpour les dirigeants. En d'autres termes, dans une économie et unesociété dématérialisée, l'immatérialiténous invite à repositionner la perfor-mance organisationnelle dansl'espace et le temps.

De ce point de vue, je suggèred'examiner la gestion des actifs

immatériels, notamment de systèmesd'information (SI), à partir d'une perspective dynamique et en spirale,autour de quatre thèmes qui nedevraient pas être considérés defaçon linéaire mais plutôt en inter-action (Figure 1) :

- Le questionnement sur l'immatérieldans les entreprises (I) ;

- La modélisation pour comprendreet construire ensemble (II) ;

- La mesure pour expliciter desvision collectives et le signaling(III) ;

- Le management transversal (IV).

La Recherche au CIGREF

Le langage de la valeur des actifsimmatériels - SI : entre « grammaire »et « photographie »

Cahier n° 4 9

AhmedBounfour

Professeur,Université

Paris-Sud 11Titulaire de la

ChaireEuropéenne

deManagement

de l'Immatérielahmed.bounfour

@u-psud.fr

Source : A. Bounfour, The Management of Intangibles, The Organisation's MostValuable Assets, Routledge, Londres et NY (2003)

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Le questionnement autour desactifs immatériels dans une entrepriseet une DSI concerne deux questions :celle du « Pourquoi » (the « Why »)et celle du « Quoi » (the « What »).

S'agissant de la première, onretiendra pour l'essentiel la fin duparadigme linéaire manufacturier,et l'importance désormais reconnuedes immatériels dans la performanceorganisationnelle. Plusieurs théorieset travaux économétriques ontdémontré ce point, et s'agissant des investissements en systèmesd'information, ceux-ci constituentdésormais une composante essentiellede l'investissement de l'entreprise.

En ce qui concerne la deuxièmequestion - le « quoi », nous nouscontenterons de souligner ici quetoutes les fonctions organisation-nelles sont concernées, et qu'ilconvient de souligner que l'irruptiondes immatériels dans le champ dumanagement pose de redoutablesproblèmes pour la réflexion etl'action.

L'immatérialité pose un problèmede mesure, pour deux raisons enparticulier: l'importance croissante

du capital humain pour le dévelop-pement de la performance, et auniveau plus analytique, le fait queles actifs immatériels sont de natureduale, du fait qu'ils constituent à lafois des inputs et des outputs.Mais, on le sait, Dans la pratique,les hommes sont souvent traitéscomme une « ressource paradoxale1» :Les discours de la plupart des dirigeants soulignent leur importance,alors que, dans la pratique, ils sontutilisés comme variable d'ajustementau premier retournement deconjoncture.

L'importance du capital humainnous invite nécessairement àréévaluer les outils de managementde l'organisation, en d'autres termes, à développer une visiondynamique de la valeur du capitalimmatériel. Par vision dynamique,nous devons comprendre ici l'inté-gration des différentes sources dela création et de manifestation de lavaleur dudit capital, de sorte à lesrendre compréhensibles par le plusgrand nombre, et, plus généralement,à mieux rendre acceptable ce quej'ai appelé « l'ordre implicite » dansles organisations.

Questionnements

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1 Ahmed Bounfour, Le Management des Ressources Immatérielles, Maîtriser les nouveaux leviers de l'avantagecompétitif, Dunod.

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Il s'agit ici de répondre à la questiondu « comment ».

- Comment approcher les imma-tériels dans le nouveau contexteorganisationnel ?

- Comment procéder à leur éva-luation ?

- Et comment procéder au reportinginterne et externe ?

Nous le savons, plusieurs approchesont été proposées durant les quinzedernières années, et plusieurs perspectives peuvent être considérées :la perspective comptable, la perspectivestratégique et la perspective analytiquedes statisticiens.

Nous ne sommes pas dans un videconceptuel, mais plutôt dans unesituation de patchwork. Mais on peutd'ores et déjà souligner l'existenced'un consensus sur la nécessitéd'approcher la question de la performance des organisations demanière dynamique, autrement enconsidérant, à ce stade, comme

acquis, d'une part le caractèreextrêmement transitoire et fragiledes avantages concurrentiels, etd'autre part, la multiplicité des espacesd'asymétrie d'information (la crisefinancière actuelle en constitue laparfaite illustration : le banqueselles même ne connaissent pas demanière exhaustive et crédibleleurs niveaux d'engagement dansles subprimes).

Dans ce nouveau contexte, lamodélisation de la performanceorganisationnelle devient un construitanalytique devant satisfaire unedouble contrainte : d'une part, expliciter l'idiosyncrasie organisa-tionnelle - autrement dit, le caractèreintrinsèquement spécifique de chaqueentreprise et organisation ; et d'autrepart, développer un langage com-mun, permettant un dialogue et unecomparaison interentreprises.

C'est toute la dialectique de la « grammaire » et de la « photographie ».J'y reviendrai.

La Recherche au CIGREF

Modéliser pour comprendre

Cahier n° 4 11

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Dans son livre, Corporate Longitude,Edvinsson (2002) recommandel'importance d'élargir la manière dontla performance organisationnelleest perçue, en particulier par lescomptables (Edvinsson, 2002). Untel argument suggère que le bilann'est plus utile pour mesurer lesrésultats financiers des entrepriseset la performance.

Sémantiquement, il convient de distinguer entre la mesure et l'évaluation. La mesure est unmoyen de l'enregistrement destransactions concernant des itemsspécifiques (par exemple des inves-tissements en logiciels ou R & D),alors que l'évaluation est uneappréciation idiosyncrasique de lavaleur, par exemple dans une perspective de transaction (Quelleest la valeur de mon patrimoineapplicatif dans le cas d'externalisationou de fusions de DSI ?). Celaimplique surtout un jugement devaleur sur les outputs de l'entreprise.Une similarité avec les marchésfinanciers peut être ici établie ici :l'offre et la demande pour lesactions cotées dépendent principa-lement des croyances opérateursquant aux revenus futurs. Le prix de l'action dépend du rapport decroyances communes des opérateurset aussi, naturellement, du climatéconomique général.

L'activation : est-ce le véritableproblème?

Plusieurs chercheurs et des analystesconsidèrent que l'une des principales

questions relatives aux immatérielsest de nature comptable, et concerneleur non inscription au bilan. Un telargument est discutable, surtoutdans une économie dominée par la connaissance, les activités deservice… et la furtivité.

De nombreux analystes ont faitvaloir que la plupart des actifsimmatériels doivent maintenant êtreactivés, en tenant compte du faitque, dans la plupart des cas, lesvaleurs du marché des entreprisesdépassent largement leur valeurcomptable. Cette question est eneffet discutable, pour deux raisonsau moins: le problème de trouver desméthodes permettant d'attribuerdes valeurs à des items spécifiques(souvent volatiles), le fait que lesactifs immatériels sont souvent nonséparables, et enfin le fait que les investissements dans les actifsimmatériels peuvent être considéréscomme endogènes à la plupart dessecteurs. Cet argument est souventsous-estimé. En fait, étant donnéque la plupart des dépenses sontdésormais de nature immatérielle,pourquoi ne pas considérer que leprincipal problème réside plus dansl'identification et la catégorisationdes actifs immatériels, que dans leuractivation. Cet argument pourraitalors nous inciter à considérer que lesenjeux analytiques et d'évaluationse situent davantage du côté ducompte de résultat que du bilan.

Mesurer pour expliciter les visionscollectives et développer le signaling

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Le problème de la divulgation(dislosure)

En effet, pourquoi ne pas considé-rer les immatériels comme desinvestissements endogènes auxéconomies complexes ? Le problèmedevient alors davantage un problèmede reporting interne et externe,qu'un problème d'activation, strictosensu. Dans son excellent livre deSunk Costs and Market Structure,

de John Sutton a démontré quedans plusieurs secteurs, certainstypes de dépenses - ici en l'occurrenceles dépenses de publicité - sontdevenus endogènes au fonctionnementde ces industries. Par conséquent, pourquoi ne pasenvisager que le principal problèmeest plus dans l'identification, la caté-gorisation des investissements, dansune perspective de reporting interneet externe ?

Les immatériels constituent un puissant levier de management, etdonc de construction d'un senscommun. Ils permettent de clarifierla question du capital humain et sonstatut dans l'organisation - ou toutau moins de la considérer, d'établirune singularité organisationnelle, et

de re-forger l'identité de l'entrepriseet de l'organisation considérée.

In fine, elle permet d'expliciter la valeurautour d'indice de performance, etde valorisation en Euros. C'est toutl'objet de l'approche IC-dVAL®déployée par plusieurs DSI.

La Recherche au CIGREF

Cahier n° 4 13

Le Management des RessourcesImmmatérielles (MRI)

L'émergence de l'économie de l'im-matériel appelle au développementd'un nouveau langage de la valeurarticulant une dimension grammaticale -la nouvelle grammaire de valeur - à desaspects photographie - la photogra-phie de la valeur, telle qu'elle peutêtre établie par les instrumentscomptables, tels que le Bilan. Par grammaire, j'entends, la nécessitépour les entreprises et les organisa-tions de développer un langagecentré sur les fondamentaux de leursmodèles économiques et sociaux,et sur la façon de les articuler demanière singulière, car nous sommesdans une économie de la singularité,pour reprendre le titre du stimulantouvrage de Lucien Karpik. La singularité des entreprises est

multiforme et seuls les managerssont réellement en mesure de l'expliciter, à travers une nouvellegrammaire de la valeur centrée surles immatériels. En complément dulangage grammatical, qui va aufond des choses, les dirigeants ontbesoin de répondre à des contraintesde photographie.

C'est le langage de ce que j'aiappelé la communauté du jugement(les analystes financiers notam-ment). La photographie se traduitpar des données et des indices articulés à un certain momentdonné, pour fixer la valeur, maisn'en constitue pas le fondement.Mais le dirigeant doit maîtriser à lafois le langage de la grammaire etcelui de la photographie.

Valoriser les actifs immatériels : entre« Grammaire » et « Photographie »

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Comme je viens de l'indiquer, lessystèmes d'information, à l'exempled'autres ressources immatériellesdes entreprises, sont soumis à defortes contraintes d'explicitation - etde mesure - de la valeur créée. Cepoint doit être particulièrement souligné, si l'on considère le poidsdes systèmes d'information au senslarge, dans les investissementsimmatériels des entreprises, eux-mêmes constituant désormais unecomposante dominante de l'inves-tissement global des entreprises,comme en atteste l'évolution desinvestissements immatériels auxUSA , sur longue période (Figure 2).

Si l'on extrapole les données améri-caines, le volume concerné par la

nécessité d'explicitation de la valeurau niveau mondial se situerait entre2 à 4% du PIB mondial, soit entre830 Mds et 1620 Mds de $ d'investissements. C'est dire l'importance cesenjeux, et l'urgence nécessitépour les entreprises et leurs DSI,notamment en Europe, de déve-lopper et déployer un langage dela valeur articulant « grammaire »et « photographie ».

C'est tout l'intérêt des actions deprototypage entreprises par leCIGREF, dans le cadre du Cerclede l'immatériel, et qu'il convient degénéraliser.

Les actifs immatériels - SI : Un posted'investissement majeur

14

Source : données primaires, Corrado C, Hutten, C, Sichel, D. (2006)

Evolution de l'investissement immatériel aux USA (1959-2003) Mds de $, valeurs annuelles moyennes

L’investissementimmatériellié au SI

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On le voit : les systèmes d'informationsont d'autant plus concernés par lanécessité d'explicitation de la valeurqu'ils créent que ceux-ci constituentl'un des principaux postes d'inves-tissement des entreprises2. Comptetenu de ces enjeux, il est importantd'évaluer le niveau de maturité desentreprises françaises, relativementau pilotage de leurs actifs immatériels- SI. C'est tout l'intérêt de l'enquêteconduite fin décembre 2007/ débutjanvier 2008 auprès des DSI membresdu CIGREF, dans le cadre des activités du Cercle de l'Immatériel.

Considérons ses résultats, sur labase du traitement d'une trentainede questionnaires retournés,comportant chacun une dizaine dequestions.

Quatre thèmes seront présentés ici.

1- Le Niveau d'implication desinterlocuteurs de la DSI dans le Pilotage stratégique de la performance

On le voit ici, les directions généraleset les équipes internes des DSIinterrogées sont naturellementimpliquées dans le pilotage de laperformance de la DSI ; en revanche,plus on va vers les parties prenan-tes externes (analystes financiers,agences de notation) ou les fonc-tions de soutien de type DRH, plusl'implication est faible , voire inexis-tante. On remarquera par ailleurs ,une plutôt bonne implication de ladirection financière.

La Recherche au CIGREF

Où en sont les DSI dans le pilotagede leurs actifs immatériels - SI

Cahier n° 4 15

2 Pour une présentation générale des actifs immatériels -SI et de leur articulation à la problématique de la valeuret de la performance, voir : A. Bounfour, G. Epinette, Valeur et Performance des SI : une nouvelle approche ducapital immatériel de l'entreprise, Dunod, 2006

Figure 3 : Le niveau d'implication des interlocuteurs de la DSI

Votre Direction générale

Vos équipes internes

Vos Directions métiers

Votre Direction financière

Votre Corporate

Vos Auditeurs internesexperts comptables

Votre DRH

Les Analystes financiers

Les Agences de notation

0% 20% 40% 60% 80% 100%

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La question des barrières estimportante. Compte tenu desenjeux soulignés plus haut, pourquoiles DSI n'arrivent-elles pas à expliciterla valeur qu'elles créent ?

L'ensemble des critères proposéssont peu ou prou pertinents à différentsdegrés. On retiendra particulièrementla question de la recherche d'unlangage commun.

Les barrières les plus pertinentesdans l'explicitation de la performanceet de la valeur des actifs immatériels - SI

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Figure 4 : Les barrières à l'explicitation de la performance et de la valeur

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Ici encore, nous retrouvons l'im-portance de la détermination d'unlangage commun tant interne aux

DSI qu'à destination des partiesprenantes externes.

La Recherche au CIGREF

Les éléments importants pour le pilotage de la performance de la DSI

Cahier n° 4 17

Figure 5 : Les éléments les plus importants pour le pilotage de la performance

Détermination d'un langage commun

Détermination d'un langage commun

à destination de la communauté financière

de la valeur à la communauté des DSIAlignement de mes règles comptables

avec les normes IFRS

Explicitation de la valeur des SI

Pilotage stratégique de monpatrimoine applicatif

Evaluation financière de la valeur

Maîtrise de mes livrables

Maîtrise de mes livrables

Maîtrise des processus

Maîtrise des processus

L'évaluation et l'anticipation

Maîtrise des coûts informatiques

des compétences

orientés metiers

et de leur valeur

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Le niveau de maturité des entreprisesdans le traitement de leurs actifsimmatériels - SI

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Si les investissements immatérielsSI sont importants aux plan micro etmacroéconomiques, il est importantde considérer le niveau de maturitédes entreprises en termes de« reconnaissance » de ces ditsactifs, comparativement à d'autresactifs structurels (Brevets, marques,dessins et modèles). Les réponses

à ce niveau sont claires :

les actifs structurels SI - en l'occurrence ici le patrimoineapplicatif - sont encore loin d'êtreconsidérés par les entreprisesinterrogées, au même niveau queles autres composantes du capital structurel.

Figure 6. Le niveau de maturité des entreprises relativement au traitement deleur actifs immatériels - SI

Compte tenu des enjeux, et desinitiatives prises par ailleurs enFrance et au plan international, ilest important pour les entreprises etles DSI de travailler à la productionarticulée du langage commun,esquissé dans ce papier. Une telle

démarche est à l'évidence, en ligneavec les actions entreprises par leCIGREF autour du Cercle deL'immatériel et qui visent à renforcerles capacités des membres tant entermes d'intelligence, d'appartenanceque d'influence.

Conclusion : Quoi faire ?

Technologie Savoir faire

Logiciels patrimoine applicatif

Dessins modèles

Marques

Brevets

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La Recherche au CIGREF

Cahier n° 4 19

Imen MISSAOUI

Chargée de programme CIGREFDoctoranteCIFRE*Université de Paris Sud 11

Master 2 de recherche: Economie et Gestion de l'Information et des RéseauxUniversité de Paris Sud 11

Maîtrise en Science de Gestion à l'EcoleSupérieure de Commerce (ESC) Tunis

[email protected]

CIGREF21, avenue de Messine75 008 Paris

Résumé

L'étude du rôle du capital immatériel dans la créationde valeur fait l'objet de plusieurs recherches académiques et opérationnelles. Dans le cadre deces recherches, plusieurs approches et méthodesont émergé, au cours de ces dernières années,pour mettre en évidence ce rôle. Au niveau de l'entreprise, l'étude de la relation entre le capitalimmatériel et les systèmes d'information passentpar des approches de management et de valorisationdu SI. Ces approches place alors la DSI comme uncentre de création de valeur vers les directionsmétiers.

A ce niveau plusieurs questions se posent : quellessont les principales caractéristiques du capitalimmatériel ? Quelles sont les différents modèles devalorisation de ce capital ? et comment s'articule,dans ce cadre la relation entre le capital immatérielet les systèmes d'information au niveau del'entreprise ?

Mots clés :capital immatériel, valorisation, systèmes d'information,performance.

Capital immatériel et systèmes d'information :premières explorationsthéoriques

* Convention Industrielle de Formation par la Recherche (CIFRE)

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Introduction

Mieux comprendre le Capital immatériel (CI)

Eléments de définition du CI

Quelques taxonomies : principaux modèles du CI dans l'entreprise

l'approche stratégique dans le management du CI dans l'entreprise

La valorisation du CI

Emergence de différents modèles de valorisation du CI

Les principales méthodes de mesure du CI

- Les méthodes d'évaluation prenant en compte le CI

- CI et la Balanced Scorecard (BSC) : deux méthodes complémentaires

- Skandia : la première expérience de valorisation du CI

- Pourquoi l'évaluation des actifs immatériels n'est-elle pas trèsrépandue ?

Quelques modèles internationaux récents

CI et Systèmes d'information (SI)

Performance et création de valeur par les SI : revue de littérature

L'approche CI dans la détermination de la performance et de lacréation de valeur par les SI

Rôle de l'alignement stratégique des SI dans l'approche CI

Conclusion

Sommaire

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Le capital immatériel est devenu unélément important dans l'évaluationde la performance des entreprises.En effet, les théories économiqueset managériales ont mis en évidencele fait que les actifs immatériels (les connaissances, les systèmesd'information, les processus organi-sationnels, les relations avec lesparties prenantes de l'entreprise, la marque, réputation…) soientdevenus centraux dans la compéti-tivité des firmes. Thomas Stewart(1991), ancien éditeur de Fortune,et actuel Rédacteur en chef deHarvard Business Review, affirmeque « pour l'entreprise américaine,le capital immatériel est devenul'actif le plus important et peut deve-nir sa principale arme concurrentiel-le. Le défi est de l'identifier et desavoir le manager.1».L'un des facteurs majeurs quiexplique la montée en puissance del'immatériel est l'essor des Technologiesde l'Information et de la Communication(TIC) et des processus organisa-tionnels liés, dont l'usage a facilitél'accès et le partage de l'information.En effet, les entreprises sont face àun enjeu majeur : comment identifierl'information pertinente pour latransformer en connaissances /actifs utiles aux utilisateurs finals,ainsi qu'à l'ensemble de l'entreprise.A l'ère de l'économie et de la sociétéde l'immatériel, la manipulation del'information et sa valorisation tousazimuts sont devenus centrauxdans la construction de l'avantageconcurrentiel des entreprises. Ceci doit être d'autant plus souli-gné, que nous assistons à une tertiarisation des activités, ainsi queplus généralement à une grandetransformation des liens sociaux.

D'où le rôle clé des systèmes d'information au sens large. Cettemise en perspective globale a bienété soulignée par plusieurs rapportsrécents, qui ont appelé à raisonnerdésormais en termes d'économie del'immatériel et de la connaissance :

Au niveau européen, tel est lemessage clé de l'Agenda de Lisbonne2010 ;

Au plan national, la publicationdu rapport « Economie de l'im-matériel » (Lévy, Jouyet, 2006)et, plus récemment, par l'adoptionde la Loi de Modernisation del'Economie prévoyant le dévelop-pement de l'économie de l'immatériel(entrée en vigueur prévue pour2009), attestent de l'importancede cette perspective.

Ce cahier de recherche ne visenaturellement pas à évaluer lafaisabilité des grandes politiquesmacroéconomiques ou sociétalesrelativement à l'immatériel, maisà considérer ses fondements théo-riques, au plan microéconomique,ceci à travers une première revue dela littérature. Nous aurons l'occasion,dans une étape ultérieure, de considérerses implications opérationnellespour les DSI.

Ce document est structuré en troisparties. Dans une première partie,nous allons définir le capital immatérielainsi que son mode de manage-ment dans l'entreprise. Dans unedeuxième partie, nous nous intéres-serons aux problématiques liées àla valorisation du capital immatériel.Enfin, la troisième partie seraconsacrée à l'étude de la relationentre SI et formation du capitalimmatériel, objet central de notrerecherche.

La Recherche au CIGREF

Introduction

Cahier n° 4 21

1 Intellectual capital is becoming corporate America's most valuable asset and can be its sharpest competitiveweapon. The challenge is to find what you have -and use it Fortune magazine le 03/06/1991

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Eléments de définition du capitalimmatériel

La définition de la notion de capitalimmatériel est une première étapenécessaire, préalablement à touteévaluation de la contribution duditcapital à la formation de l'avantageconcurrentiel des entreprises. Soulignonsle d'emblée : il n'y pas de définitionunanime du capital immatériel, commeen atteste la coexistence de plusieursappellations tant dans le champ dela recherche que de la pratiquemanagérial : actif immatériel, capitalintellectuel, actif intangible, actifinvisible, patrimoine immatériel,patrimoine spécifique, ressourcesrares, sont autant d'expressions uti-lisées dans la littérature...

Il s'agit là d'une première difficulté,qu'i l convient de considérersérieusement dans une perspectiveanalytique. Pour illustrer cesdifficultés, nous allons considérertrois définitions qui nous apparaissentdifférentes dans leurs constructions,mais que nous allons mobiliserdans la perspective de la propositiond'une taxonomie commune.

Une première définition est proposéepar Caspar et Afriat (1988), qui ontadopté une démarche additive endécrivant les différents types d'investissements immatériels etidentifient, de la sorte, sept catégoriesde dépenses :- Les dépenses en recherche etdéveloppement ;

- Les dépenses de formation ;

- Les dépenses de marketing ;

- Les dépenses en organisation eten participation ;

- Les dépenses dans les processusde production ;

- Les dépenses dans les systèmesd'information ;

- Les dépenses stratégiques.

Une deuxième définition est présentéepar Soulié et Roux (1992) qui ontaxé leur analyse sur le mode deconstitution des actifs immatériels,qu'ils ont déclinés en deux catégories :

- Les actifs de rareté, qui permettentà leurs détenteurs soit d'être lesseuls à pouvoir réaliser et commer-cialiser une production déterminée(rente absolue), soit de pouvoir lefaire avec des coûts moindres queceux de leurs concurrents (renterelative) ;

- Les actifs de connaissance oud'expérience se répartissent entrois composantes : savoir, savoir-être, faire-savoir. Une telle distinctionpeut être difficile à appliquer, dansla pratique, la frontière n'étant pastoujours très nettement tracée entreces trois différentes classes d'actifsde connaissance étroitement liées.

Une troisième définition est celleproposée par la CommissionEuropéenne (2003). Celle-ci indiqueque le capital immatériel peut êtredivisé en trois sous-catégories : - La propriété intellectuelle ;

- Le capital immatériel identifiablede manière séparée ;

- Le capital immatériel identifiablede manière non-séparée.

Mieux comprendre le Capital Immatériel

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Ces trois définitions/typologiesn'excluent pas l'existence d'unebase commune dans la définition ducapital immatériel2. Cette convergencese traduit par le fait que ces définitionsintègrent une dimension cognitive -les connaissances (savoir-faire) quise caractérisent par une absencede substance physique et surtout parleur rôle clé dans la création derichesse, tant au plan microéconomiqueque macroéconomique.

A dire vrai cette première difficultésémantique doit être renvoyée auxdisciplines d'origine des analysteset chercheurs. C'est la raison pourlaquelle Bounfour, dans son ouvrage« Le Management des RessourcesImmatérielles » (1998), a considéréque cinq perspectives doivent êtreretenues pour la définition du capitalimmatériel :

1- L'approche « tout immatériel »,

aux termes de laquelle tout dansune entreprise est ou tend àdevenir immatériel ;

2- L'approche par les services,qui a notamment mis en avant laspécificité des services et leursconditions de production, autourdu concept de « servuction » misen avant dans les années 1980par Eiglier et Langeard, ou plusrécemment de la constellation devaleur, proposée par Ramirez etNormann (1998) ;

3- L'approche analytique, princi-palement proposée par les officesstatistiques, qui se sont proposésde mettre en évidence l'importancede l'investissement immatériel enFrance (à travers les travaux del'INSEE ou du SESSI), en Europe(Eurostat, Offices de statistiquesdanois, finlandais notamment) ouaux USA (à travers les travaux duBEA) ;

La Recherche au CIGREF

Cahier n° 4 23

Propriété intellectuelleCapital immatériel

identifiable de manière séparée

« Goodwill » : Capitalimmatériel identifiable de

manière non-séparée

Exemples : actifs immatériels protégés par des droits de propriété (brevets,marques, design, copyright, droits sur les films…)

Exemples : systèmes d'information,réseaux, structures et procédures administratives,connaissances techniqueset de marché, capitalhumain (si celui-ci est présent sous forme codifiée), marque, des actifsimmatériels incorporés dans lecapital équipement, logicielproduit en interne, dessins.

Exemples : investissement intangibleprésent « originellement »dans les organisations,expertise en termes demanagement, positiongéographique, monopole,niche de marché

Définition et sous-catégories du capital immatériel

Source : Commission européenne, 2003, page 18

2 Dans son rapport « Sept jours pour comprendre le capital immatériel » (2006), le CIGREF prend en comptel'ensemble de ces éléments, et propose une définition du capital immatériel, similaire à celle retenue par lacomptabilité générale - IAS 38 - à savoir « l'ensemble des actifs non monétaires et sans substances physiquesdétenus par l'entreprise en vue de son utilisation pour la production ou la fourniture de biens et de services ».

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4- L'approche comptable etfinancière, qui pose le problèmeprincipalement en termes d'acti-vation : comment passer de ladépense immatérielle à l'actifimmatériel. Or, on le sait, desconditions restrictives ont étéposées, et la comptabilité demeureextrêmement récalcitrante à l'en-droit des immatériels générés eninterne. D'où les déséquilibresintroduits par les normes IFRS,qui autorisent les activations tousazimuts pour les actifs immatérielsrésultant de la croissance externe,mais interdisent pratiquement untelle démarche pour la croissanceorganique ;

5- L'approche stratégique, quiinclut trois courants importants :la théorie des ressources et sasœur jumelle, la théorie descapacités dynamiques ; la théorieévolutionniste, et l'approche capitalimmatériel à proprement parler.

Ces cinq perspectives, doivent êtregardées à l'esprit, dès lors que sepose la question de l'évaluation des actifs immatériels dans lesorganisations. En fonction de laperspective mise en avant, desréponses différenciées seront pro-posées par les chercheurs et lesanalystes. Mais s'agissant de lamodélisation du capital immatérieldans les entreprises, celle-ci, entant que pratique, a principalement étéentreprise à l'initiative de praticiens/gourous, qui ont proposé un certainnombre de modèles, principalementdurant la décennie 1990 : on citeraici les noms de Sveiby, Edvinsson,Roos et Roos, Stewart, parallèle-ment , à des travaux conduits par lemonde académique , aux USA (Lev,Brynjolfsson, Teece notamment), enEurope (Bounfour, Mouritsen, Bonno)et en Asie (Itami, Nonaka, Konnonotamment).

Retenons donc la pluralité desapproches, et considérons plus précisément dans la section suivantecertains des modèles proposés parles experts de l'immatériel.

Quelques taxonomies : principauxmodèles du CI dans l'entreprise

Les approches praticiennes du« Capital Immatériel » ont émergédurant les années 1990, proposéespour l'essentiel par des experts despays nordiques. (Brooking, 1996 ;Edvisson et Malone, 1997 ; Stewart,1997 ; Sveiby, 1997…).

Dans les années 1980, Karl-EricSveiby a proposé une premièrerépartition du Capital Immatériel.D'après cet auteur, les actifs imma-tériels de l'entreprise peuvent secomposer de trois types : le capitalhumain, le capital structurel et lecapital social.

Le Capital Humain représente lestalents, les compétences et la créativité de l'ensemble des salariésd'une entreprise : il s'agit de l'ensembledes connaissances collectives del'entreprise ;

Le Capital Structurel représenteles systèmes de propriété intellec-tuelle et les processus de l'entreprise ;

Le Capital Social représente lavaleur générée dans les relationsde l'entreprise avec ses clients, et lamarque.

Stewart (1997) ainsi que LeifEdvinsson et Malone (1997), se sontinspirés de cette décomposition ducapital immatériel, en considérantque l'individu et la connaissancequ'il produit forment le capitalintellectuel. Aux termes de cetteapproche, le capital immatériel peutse décomposer en capital humainet capital structurel, lesquels, pour

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ces auteurs, renvoient à deuxnotions qu'il est fondamental de distinguer. Ils insistent sur l'importancedu capital humain dans la réalisationde la compétitivité des entreprises.Le capital structurel, quant à lui,correspond à l'utilisation du savoiret de l'information, et à leur diffusionaux niveaux interne et externe del'entreprise. Pour pouvoir utiliser lecapital structurel, il faut disposer desystèmes d'information, de réseaux,d'infrastructures, de bases de données, d'informations sur le marché et sur la concurrence, etc.Stewart (1991) considère que lecapital structurel est « un emballage »qui enveloppe le capital humain, etqui va lui permettre d'être utilisé afinde créer de la valeur pour l'entreprise.

Le capital structurel se divise encapital organisationnel et en capitalclient.

- Le capital client réside dans lavaleur des relations qu'entretientl'entreprise avec ses partenaireset/ou ses mandants ;- Le capital organisationnel se sub-divise en capital innovation et capitalprocess :

Le capital innovation inclut lesbrevets, la propriété intellectuelleau sens large, les droits légaux etles secrets commerciaux ;

Le capital process correspondaux processus et méthodes detravail, et aux solutions techniques.

La distinction d'Edvinsson et Malone(1997), présentée ci-dessus, est laplus utilisée pour décrire le capitalimmatériel. Ces différentes compo-santes du capital immatériel secomplètent et sont toujours en inter-action (Edvinsson et Malone, 1997).

C'est ce que souligne par ailleursStewart (1997), lorsqu'il affirme quele capital immatériel d'une entreprisen'est pas formé d'un certain nombrede capitaux isolés (structurel, client, ethumain), mais résulte de l'interactionentre ces différentes composantes.

La Recherche au CIGREF

Cahier n° 4 25

Figure 1 : Représentation du capital immatériel dans une entreprise

Source : Edvinsson, Malone (1997, p52.)

Capital immatériel

Capital structurelCapital humain

Capital clientCapital organisationnel

Capital innovationCapital process

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Sveiby (2000) quant à lui, classe lesactifs immatériels en trois catégories :

La compétence des collaborateurs :c'est la capacité des collaborateursà agir dans différentes situationspour créer de la valeur. En effet, lesentreprises de savoir (dont l'outil deproduction est la matière grise)dépendent avant tout de leursemployés, seuls à pouvoir agir, etqui deviennent tout à la fois lesresponsables des machines et lesmachines elles-mêmes ;

La composante interne comprendles brevets, les concepts, lesmodes de fonctionnement ainsi quel'organisation administrative etinformatique de l'entreprise. Ceséléments sont crées par lesemployés et habituellement détenuspar l'entreprise. Cette composante,ainsi que celle liée aux compétencesdes collaborateurs, constituent l'organisation, c'est-à-dire l'interactiondes employés entre eux et son effetsur l'environnement ;

La composante externe comprendles relations avec les clients et lesfournisseurs. Elle recouvre égalementles noms des produits, les marquesdéposées et la réputation ou l'imagede l'entreprise. La valeur de cesactifs se trouve principalement dansla façon dont l'entreprise gère sesrelations avec ses clients. Cettevaleur est donc incertaine, fragile,dans la mesure où la réputationd'une entreprise et la nature desrelations qu'elle entretient avec sesclients peuvent se modifier dans letemps.

Des recherches plus récentes sesont focalisées sur la nature mêmede ces actifs immatériels. PourBounfour (2003), l'un des critèresles plus importants pour analyser

les actifs immatériels, dans le cadrede l'économie de la connaissanceet ses modes organisationnels liés,réside dans l'étude de leur niveaud'autonomie / dépendance par rapportau savoir tacite des collaborateurs.En effet, Bounfour (2003) distinguedeux catégories de ressourcesimmatérielles dans l'entreprise :

- Les ressources immatériellesautonomes, qui se subdivisent endeux sous groupes :

Les ressources pour lesquelles ilexiste un marché secondaire immédiat,telles que les marques, les brevets,les logiciels standards;

Les ressources pour lesquelles iln'existe pas de marché secondaireimmédiat, telles que la réputation etles méthodes spécifiques au business.

- Les ressources immatériellesdépendantes, qui couvrent troissous groupes :

L'innovation, par exemple lesinvestissements en innovation etles compétences ;

Les ressources organisationnelleset informationnelles, par exempleles processus, les structures et lesroutines ;

Les ressources liées au marketinget à la distribution, telles que lemanagement des relations clients.

Cette taxonomie a été notammentadoptée dans le cadre du projeteuropéen RICARDIS3, en particulierdans la perspective de reporting surle capital immatériel par les PMEfortement intensives en connais-sance, en considérant par ailleurs laquestion de la maîtrise des actifscomplémentaires, dans tout processusde reporting.

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3 Reporting Intellectual Capital to Augment Research, Development and Innovation in SMEs. Rapport de la commission européenne. Juin 2006. http://www.avcr.cz/data/vav/vav-eu/2006-2977_web1.pdf

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L'approche stratégique dans lemanagement du CI dans l'entreprise

Parallèlement aux premières appro-ches du capital immatériel, de natureplutôt pragmatique, différentesapproches, de nature plus acadé-mique, s'inscrivant dans le champ dela stratégie (théorie des ressourcesprincipalement), ont été proposéesdurant la décennie 1990. Cesapproches se sont focalisées sur lesactifs immatériels des entreprises entant que levier principal de créationd'avantages concurrentiels. Ellesprennent en compte le fait que lesdifférences de performance intra-sectorielles sont plus importantesque les différences de performanceintersectorielles, ce qui est une rupture fondamentale par rapport àl'approche classique de l'avantageconcurrentiel jusque là dominante,développée autour des travaux dePorter. Selon ces théories, ces différences sont à attribuer auxdivers types de combinaisons desressources - principalement imma-térielles - développées par lesentreprises. Le développement del'approche stratégique inclut différentscadres d'analyse qui insistent surl'importance des ressources imma-térielles en tant que levier d'avantagesconcurrentiels (Bounfour, 2008, 2003).Nous présentons dans cette sectioncertains des éléments constitutifsde ces principales approches.

Jusqu'aux années 1980, les théoriesdu management cherchaient àcomprendre l'avantage concurrentieldans l'environnement externe desfirmes. Ces théories étaient en phaseavec l'économie néoclassique,puisqu'elles considéraient que lesressources étaient réparties d'unemanière homogène entre les industries,ce qui facilitait l'accès à ces ressources par les firmes enconcurrence.

Ainsi le rôle du management étaitde chercher à combiner les produitset les marchés en fonction du pouvoirde négociation des fournisseurs,des clients, des barrières à l'entrée, etde la concurrence. Les économistesindustriels, notamment Porter en1980, cherchaient à expliquer l'avantage concurrentiel des firmespar les facteurs externes liés auxstructures de marché. Ainsi, Porteridentifie les cinq forces principalesqui déterminent la capacité de l'entreprise à être compétitive sur lemarché (rapports de forces avec lesclients, fournisseurs, les nouveauxentrants, les produits de substitutionainsi qu'avec les concurrentsdirects).

A partir de la fin des années 1980essentiellement, la théorie des ressources a remis en cause lepoint de vue développé ci-dessus, enreprenant certains des argumentsdéveloppés par Penrose (1959).Cet auteur était en effet le premier àproposer une ébauche de ce qui est devenu plus tard la théorie desressources, qui considère la firmecomme un ensemble de ressourcesproductives, essentiellement imma-térielles. Ces ressources sontcontrôlées et allouées par le mana-gement de l'organisation. En sebasant sur certains éléments apportéspar Penrose, les partisans de lathéorie des ressources (Grant,1991 ; Roehl, 1987 ; Itami, 1989)considèrent que l'avantage concur-rentiel ne découle pas uniquementdes différentes combinaisonsproduits / marchés dans l'industrie.Au contraire, cet avantage estattribuable en grande partie aux différentes ressources organisation-nelles (Wenerfelt, 1984 ; Dierickx etCool ; 1989) et aux connaissancesde l'organisation (Nelson et Winter,1982).

La Recherche au CIGREF

Cahier n° 4 27

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Ce qui suppose que la ressourcesoit hétérogène (elle n'est pasactuellement possédée par d'autresentreprises) et immobile (difficultéde son obtention par les concur-rents) (Mata, Fuerst et Barney, 1995 ;Rivard, Raymond et Verreault,2006). Selon Mata, Fuerst etBarney (1995), les compétencessont parmi les ressources qui vérifient les conditions requises del'approche par les ressources.

Itami et Roehl (1987) ont été parmiles premiers à se référer aux imma-tériels comme actifs (invisibleassets), qu'ils considèrent commela ressource essentielle dans lesprocessus de production des firmes. Ces actifs se basent sur l'information et la connaissance etpeuvent inclure la marque (le résultatde l'information de la firme vers l'environnement), la qualité destechnologies (les flux d'informationde l'environnement vers la firme), la circulation et le partage de l'information à l'intérieur de la firme.

Barney (1991) a proposé des critèrespour déterminer les types de ressources qui seraient susceptiblesde fournir un avantage compétitif.En effet ces ressources doiventcréer de la valeur pour le client et doivent aussi être rares. Les ressources qui semblent vérifier cescritères sont les actifs immatériels(Roos G. et Roos J.1997), connussous différentes appellations dansla littérature telles que : la capacitéd'absorption (Cohen et Levinthal,1990) et le cœur de compétence(Prahalad et Hamel, 1990).

La capacité d'absorption

La capacité d'absorption est définiecomme « l'aptitude à reconnaître la

valeur de l'information nouvelle, àl'assimiler, et à l'appliquer à des finscommerciales » (Cohen et Levinthal,1990, p.128). Il s'agit d'un ensemblede routines et de processus organi-sationnels par lesquels l'entrepriseou le système acquiert, assimile,transforme et exploite la connais-sance pour produire une capacitéorganisationnelle dynamique (Zahraet George, 2002). Le concept decapacité d'absorption s'insère dans lecadre de l'approche des ressourcesdynamiques qui postule que lepotentiel interne de l'entreprisedétermine l'obtention d'avantagescompétitifs à travers le développementd'une capacité pour faire face auxchangements de l'environnement.

Le cœur de compétence

L'application du concept du « cœurde compétence » introduit parPrahalad et Hamel en 1990, peutêtre considéré comme une sourced'avantages concurrentiels. En effet,ces auteurs expliquent dans un article paru dans la HarvardBusiness Review que « le cœur decompétence est un domaine d'expertise qui résulte de l'harmoni-sation de technologies et d'une activité professionnelle complexe ».Autrement dit, le « cœur de compé-tence » correspond au savoir-faire del'entreprise, par lequel elle acquiertson avantage concurrentiel. SelonPrahalad et Hamel, le « cœur decompétence » comporte trois carac-téristiques :

il offre la possibilité d'accéder àdifférents marchés ;

il apporte une vraie contributionpour le client ;

il est difficilement imitable par lesconcurrents.

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d'enrichir les composants clés duCI par le knowledge management ;

d'établir un reporting interne etexterne de la performance.

L'ensemble de ses travaux (Marr,Gupta, Pike, et Ross (2003)) mettentl'accent sur l'importance desconnaissances individuelles etorganisationnelles pour la perfor-mance des entreprises (Savage,(1990) ; Von Krogh, Roos, Slocum ;(1994)). Ceci explique pourquoi deplus en plus d'entreprises se fixentcomme objectif de développer leursactifs liés aux connaissances(Senge, 1990) ;

L'importance du rôle stratégiquedes connaissances mène leschercheurs et les professionnels àdéfinir des concepts, des approches,et des méthodes pour pouvoir identifieret manager le capital immatériel. Lespratiques du Knowledge Managementreprésentent des moyens qui per-mettent aux organisations de mainteniret de développer les actifs liés auxconnaissances dans l'organisation.

Cette première partie a permis demieux cerner la notion de capitalimmatériel, à partir d'une premièrerevue de ses définitions, de ses différentes composantes ainsi quedes principaux courants théoriquespermettant de l'approcher. La sectionsuivante aborde la question de lavalorisation de ce capital.

Le cœur de compétence est unapprentissage collective dansl'organisation, plus spécifiquementcomment coordonner différentesactivités de production et intégrermultiples flots de technologies. Laréelle source d'avantage concurrentielpour l'entreprise se trouve dans lacapacité du management à proposerun ensemble de technologies et decompétences qui vont permettreaux métiers de l'entreprise de s'adapter rapidement dans uncontexte de changement (Prahaladet Hamel, 1990 ; 1994).

Ces deux concepts sont centrés surl'importance de l'information et de laconnaissance comme ressourcestratégique de l'entreprise (Grant,1997; Von Krogh et Grand, 2002;Grant, 1996; Roos and Roos, 1997;Spender, 1996). D'autres chercheursse sont basés sur cette approchestratégique pour proposer un modèle demanagement des actifs immatérielsdans l'entreprise. En effet Marr,Gupta, Pike, et Ross (2003) décriventun ensemble d'étapes pour managerle capital immatériel. Il s'agit :

D'identifier les facteurs clés quipermettent de piloter la performancede la stratégie des organisations ;

de visualiser les modes de créationde valeur des composants clés du CI ;

de mesurer la performance et enparticulier les dynamiques de trans-formation ;

La Recherche au CIGREF

Cahier n° 4 29

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Emergence des différents modèlesde valorisation du CI

Les premiers efforts pour mesurerles actifs immatériels ont été initiésdans les années 1960 avec les travaux de Schultz (1961), Becker(1964) et Likert (1967). Ces auteursse sont intéressés à la manièredont les investissements en capitalhumain affectent la croissance deséconomies nationales. Likert (1967)était convaincu par le fait que lafirme accorderait plus d'importanceà son capital humain lorsque lesmanagers seraient plus conscientsdes montants de leurs investissementsdans ce capital. Cependant, lesméthodes comptables de mesuredu capital humain ont reculé suite àl'apparition progressive de nouveauxefforts pour reconnaitre la valeurnon financière de ces actifs, en particulier la reconnaissance dessavoir-faire des membres de l'orga-nisation. Hermanson (1964), Flamholtz(1974) et Fitz-enz (1984) ont déve-loppé des modèles qui visaient àcalculer les différents coûts dansl'organisation, tels que la valeur des ressources humaines afin d'avoirun management efficace dans l'organisation (Will, 2008).

A la fin des années 1980, différentesapproches se sont développéesautour du management de laperformance dans les organisations,celles-ci se limitant uniquement auxindicateurs financiers. Ce n'estqu'avec l'apparition de la BalancedScorecard (BSC) (Norton et Kaplan,1996) que l'intégration des indicateursnon financiers s'est développée.Edvinsson et Malone (1997) ainsique Sveiby (1997, 2002) ontinfluencé le développement desméthodes des tableaux de bord

prospectifs (la méthode de la BSCen fait partie) durant les années1990, pour mesurer les composantesdu capital immatériel. Ces deuxchercheurs ont développé deuxmodèles différents (le « Navigateurde Skandia » par Edvinsson etMalone 1997 et le « Moniteur desactifs immatériels » par Sveiby 2002),pour mesurer les composantes desactifs immatériels en se basant surdes indicateurs financiers et enmettant en valeur les indicateursnon financiers. D'autres chercheursont développé des modèles d'éva-luation du capital immatériel, telsque le ratio valeur marché « Tobin'q »(Tobin 1969), la valeur des immatérielstraduite en indices (Stewart, 1997)le « Intangibles Scoreboard » (Gu,Lev 2001) et l'approche IC-dVAL®(Bounfour, 2000). Toutes ces approchesont pour objectif, en tout ou en partie,de quantifier les actifs immatériels del'organisation en termes financiers.

Les principales méthodes de mesures

Méthodes d'évaluation prenant encompte le capital immatériel

Il existe quatre approches qui prennenten compte, de manière plus oumoins importante, le capital imma-tériel, et qui sont une extension desmodèles de classification suggéréspar Luthy (1998) et Williams (2000) :

Les méthodes d'évaluation directesdu capital immatériel (DIC) : cesméthodes estiment la valeur desactifs immatériels à travers l'identifi-cation des différentes composantesde ces mêmes actifs. Une fois cescomposantes identifiées, elles peuventêtre évaluées directement soit indi-viduellement, soit avec un coefficientagrégé.

La valorisation du capital immatériel

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Les méthodes DIC et SC, quant àelles, fournissent une représentationcompréhensible de l'état de l'entre-prise. Elles peuvent être appliquéespour les différents niveaux d'activitéde l'entreprise. Ces méthodes sontconsidérées plus rapides et plusprécises que les méthodes financières.Leur principal inconvénient résidedans le fait que les indicateurs sontcontextuels et doivent être person-nalisés à chaque entreprise etchaque objectif, en risquant de rendre la comparaison difficile. Lefait que ces méthodes soient récentespeut également rendre leur accep-tabilité, de la part des managers,plus difficile.

Les méthodes qui se basent sur lestableaux de bord (Score Cardmethods) sont plus nombreuses.Parmi ces méthodes, l'on trouve laBalanced Scorecard (Kaplan etNorton, 1992, 1996) qui permet de mesurer la performance desentreprises. Ces chercheurs sesont intéressés aux aspects straté-giques de l'entreprise à travers laBSC comme outil de management,dont l'objectif est de permettre auxmanagers de mettre en œuvre lastratégie en utilisant des indicateursfinanciers et non-financiers. Nortonet Kaplan (1996) se basent sur desindicateurs de performance couvrantquatre perspectives majeures dansl'entreprise :

la perspective financière (quefaut-il apporter aux actionnaires?) ;

la perspective client (que faut-ilapporter aux clients ?) ;

la perspective des processusinternes (quels sont les processusessentiels à la satisfaction desactionnaires et des clients ?) ;

la perspective d'apprentissageorganisationnelle (comment piloterle changement et l'organisation ?).

Les méthodes de capitalisationmarchande (MCM) : il s'agit decalculer la différence entre la valeurde marché (ou capitalisation boursière)et la valeur des actions détenuespar ses actionnaires comme étantla valeur du capital immatériel del'entreprise.

Les méthodes de retours suractifs (ROA) : la différence entre lavaleur de retour sur actifs de l'entre-prise et celui de la moyenne de sonsecteur d'activité est multipliée parla moyenne des actifs matériels del'entreprise pour calculer un gainannuel moyen dû aux immatériels.En divisant ce gain annuel moyenpar le coût moyen du capital de l'entreprise ou un taux d'intérêt, onpeut estimer la valeur des actifsimmatériels.

Les méthodes de Scorecards (SC) :les différentes composantes ducapital immatériel sont identifiées etdes indicateurs / des indices sontcréés et rapportés (reporting) dansun tableau de bord, ou sous formegraphique. Les méthodes desScorecards sont similaires auxméthodes DIC, mis à part qu'aucuneévaluation monétaire n'est proposée.Chacune de ces méthodes comporte,à l'évidence, des avantages, maiségalement des inconvénients(Sveiby, 2001).

Les méthodes qui offrent des valeurs(MCM et ROA) sont utilisées pourles situations de fusions-acquisitionset d'évaluation de marché. Ellessont utilisées également pour lacomparaison entre des firmes opérant dans la même industrie.Ces méthodes permettent d'illustrerla valeur financière des actifs imma-tériels et de l'interpréter via desexperts. Un des inconvénients estle fait de transformer l'ensembledes actifs de l'entreprise en valeurmonétaire, au risque de limiterl'analyse faite de l'entreprise.

La Recherche au CIGREF

Cahier n° 4 31

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Ces indicateurs sont déterminés enfonction des objectifs stratégiquesde l'entreprise. Pour Kaplan etNorton, la réussite de la mise enœuvre de la stratégie au service dela performance de l'entreprisedépend de la qualité du managementet des perspectives bien définies.

Par la suite, les auteurs ont amélioréleur démarche, notamment endéveloppant la problématique de la causalité grâce à la carte stratégique. En effet, une carte stratégique est un diagramme detype « cause à effet », présentantles relations entre différents objectifsstratégiques selon les quatre perspectives (financière, client, processus, et apprentissage). Lacarte stratégique est la clé de laméthode Balanced Scorecard. Ellepermet de « matérialiser » le passagede l'expression de la stratégie à lacréation de valeur proprement dite.

Selon les auteurs, la carte stratégiqueest un outil indispensable pour :

Clarifier la stratégie et faciliter lacommunication auprès de chaqueemployé ;

Identifier les processus clés dusuccès de la mise en œuvre straté-gique ;

« Aligner » les investissementshumains, technologiques et organi-sationnels afin qu'ils œuvrent dansle sens de la stratégie ;

Mettre en lumière les écarts demise en œuvre de la stratégie etainsi en faciliter la correction.

Capital immatériel et BalancedScorecard : Des méthodes complé-mentaires

La Balanced Scorecard et lesdémarches capital immatériel permettent de représenter la perfor-mance du système de managementde l'entreprise. Ce sont deuxdémarches complémentaires pourexpliciter la performance. Certainschercheurs (Bontis, 1999 ; Petty etGuthrie (2000)) considèrent que laBalanced Scorecard peut être uneapproche intégratrice du CapitalImmatériel. D'autres auteurs (Mouritsen,Larsen et Bukh ; 2005) se sont inté-ressés à étudier les différencesentre ces deux approches, en sefocalisant sur la manière dont lecapital immatériel et la BSC vontcontribuer à la performance dumanagement de l'organisation.

Le tableau ci-après présente lesfacteurs différenciant les deuxapproches.

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Comme nous l'avons souligné, laBSC et le capital immatériel permettentd'expliciter la performance de l'entreprise en se basant sur desindicateurs financiers et non financiers.Ces indicateurs sont construits enfonction des objectifs fixés. La fixationde ces objectifs se fait selon deuxperspectives différentes.

Premièrement, la stratégie del'avantage concurrentiel se concentresur les clients comme un premierélément pour créer de la valeur ;c'est le cas de la BSC (Mouritsen,Larsen et Bukh, 2005).

Deuxièmement, la stratégie de lacompétence se focalise sur lescapacités et les compétences dontdispose l'entreprise ; c'est le cas ducapital immatériel. Dans le cas de laBSC, les indicateurs sont construitsd'une manière cohérente dans unestructure successive de cause àeffet (logique de chaîne de valeur,voir tableau ci-dessus). Par contrepour le capital immatériel, les indicateurs sont construits autourd'un ensemble de compétences etde capacités.

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Balanced Scorecard ApprochesCapital Immatériel

Le développement de l'organisation

La stratégie de l'avantage concurrentieldépend des relations externes avecle marché.-la croissance et le profitaugmentent en fonction du position-nement sur le marché et est plusimportant que la production. Celle-cidoit changer constamment en fonctiondes exigences du marché.

Les compétences sont très importantespour réaliser la croissance interne.Celle-ci est pilotée par les ressources,les capacités et les expériences collectives des personnes. Le potentielde production est plus important quele marché.

La modélisation de l'organisation

L'organisation est une chaîne devaleur (c'est un modèle inputs / out-puts). Cette chaîne est divisée enplusieurs composantes : finances,clients, processus internes croissanceet apprentissage. Les indicateursindividuels sont déployés successi-vement pour les clients, puis les processus internes, enfin pour l'apprentissage et d la croissance.Cette chaîne crée des résultatsfinanciers.

L'organisation est un ensemble deressources constituées de : capacités,de compétences et de connaissances.Ces ressources sont complémentaires,en interaction continue et dépendantes.

L'origine de la compétitivité de l'organisation

La compétitivité est basée sur lepositionnement sur le marché en dirigeant la chaîne de valeur vers leclient.

La compétitivité est basée sur lescapacités, les compétences internesqui sont encastrées dans l'entrepriseet qui permettent de fournir des produitsinnovants

Tableau 2 : Différences entre les modèles BSC et les démarches Capital immatériel

Source : Mouritsen, Larsen et Bukh (2005, p14)

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Skandia : la première expérience devalorisation du CI

Skandia AFS (une filiale du grouped'assurances Skandia) a choisi dese différencier en mesurant cesactifs immatériels. L'expérience deSkandia AFS, sous la direction de LeifEdvinsson (1997), qui s'est prolongéepour l'ensemble du groupe d'assu-rance suédois, constitue l'exemplele plus connu et le plus abouti demise en place d'un tableau de bordstratégique centré sur le capitalimmatériel et son management. Cetaboutissement s'incarne dans lenavigateur, tableau de bord stratégiquedu capital immatériel pour la directionde Skandia et pour ses partenaires.

En effet, en 1990, Leif Edvinsson aété nommé Vice Président, en chargedu Capital immatériel de Skandia.Sa mission était de définir lameilleure approche de description

du capital immatériel. La démarcheproposée par Edvinsson est fondéesur des concepts proposés parSveiby (1998, 1989). Edvinsson a faitévoluer ces concepts en intégrantcertaines idées du tableau de bordprospectif (Norton et Kaplan, 1997).Pour visualiser les interactionsentre les différentes composantesdu capital immatériel, Edvinsson amis en place un outil spécifiqueappelé « Navigator ». Cet outil estcomposé de cinq dimensions decréation de la valeur : la capacitéfinancière, les relations avec lesclients, les processus organisationnels,les ressources humaines et ledéveloppement / renouvellement.Le « Navigator » est un outil de planification, de management et desuivi qui prend en compte les éléments du passé au travers de lacomptabilité traditionnelle, maisanticipe également le futur de l'organisation.

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Figure 2 : Navigateur de Skandia

Source : Christophe Germain et Stéphane Trébucq (2004 : p39)

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Pour s'adapter à la révolution desTIC et à la nouvelle économie desréseaux, Edvinsson (1997) pense queles organisations doivent améliorerleurs outils de mesure du managementde la performance. C'est pourrépondre à ce besoin que Skandiaa mis en place le « Navigator ».Selon Stewart (1991), les méthodestraditionnelles de comptabilité peuventcréer des distorsions dans lesrésultats car il est toujours possible demanipuler des chiffres en fonctionde ce qu'une organisation veutmontrer ou cacher.

Pourquoi l'évaluation des actifsimmatériels n'est-elle pas trèsrépandue ?

Dans son livre « La nouvelle richessedes entreprises », Sveiby (2000)expose trois raisons parmi d'autresexpliquant pourquoi les démarchesde valorisation du capital immatérielsont peu répandues :

De nombreux managers pensentque ce type d'évaluation est sansintérêt pour l'entreprise : ils consi-dèrent que l'évaluation financièreest suffisante ;

Certaines entreprises ne veulentpas publier certaines informationssur leurs clients, sur leurs compé-tences, ni préciser qui sont leursconcurrents ou quelle est leurimage interne ou externe…

Les entreprises manquent de modèlesthéoriques universels adéquats pource type d'évaluation : les systèmes decomptabilité ne sont pas suffisantspour cette évaluation, ce qui rend lesindicateurs difficiles à développer.

Quelques démarches internationalesrécentes

La plupart de ces modèles ont faitl'objet de publications en particulierdans la revue internationale Journalof Intellectual Capital (Bounfour,2006), mais aussi dans des rapportsrécents tels que le rapport RICARDIS(2006).

Le modèle autrichien : Ce modèlea été développé par le centre derecherche autrichien (ARC). Cemodèle orienté vers les activités deR&D, combine les objectifs, le capitalintellectuel, les processus deconnaissance et les résultats intan-gibles. Le processus d'acquisition,d'application, et d'exploitation desconnaissances commence par ladéfinition des objectifs spécifiques à la connaissance dérivant de lastratégie de l'organisation. En effetces objectifs représentent le cadredans le quel le capital immatériel vaêtre valorisé. Le capital immatérielest composé de : capital structurel,capital humain, et capital relationnel.Ces ressources immatérielles sontdes inputs pour le processus deproduction de connaissances lequelse trouve dans les différents projetsde l'organisation, par exemple dansle cas d'une entreprise intensive enconnaissances, le projet peut êtreune recherche appliquée ou desservices.

Pour appliquer ce modèle desentreprises doivent formuler leursobjectifs organisationnels d'unemanière explicite.

La Recherche au CIGREF

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Le modèle danois : ce modèlerenvoie à l'effort le plus importanten matière de reporting des actifsimmatériels, entrepris à ce jour(Bounfour, 2006). Ce modèle centré surles connaissances organisationnelles,est structuré en quatre modulesreprésentant le management desconnaissances d'une organisation :

- Le récit de la connaissance(Knowledge narrative) : ce moduleprésente les objectifs et les ambitionsde la firme pour créer de la valeurpour ses clients et les connais-sances nécessaires pour accomplirces objectifs.

- Les défis du management : ils'agit de présenter les défis per-manents quand au rôle desconnaissances dans le modèleéconomique de l'entreprise

- Les efforts : ce sont les initiativespour produire, développer lesconnaissances,

- Les indicateurs : ce sont lesmécanismes du pilotage et dudéveloppement de l'ensemble desconnaissances de l'entreprise.

Le modèle suédois : ce modèle estaxé sur le rating du capital immatériel.Ce modèle est développé par unesociété de conseil « IntellectualCapital Sweden ». il est représentésous la forme de trois modules :

- L'efficience : la valeur d'efficiencedu capital immatériel qui permetde créer de la valeur ;

- Le risque : la menace potentiellepouvant peser sur la valeurd'efficience, en liaison avec laprobabilité du risque futur ;

- Le renouvellement et le déve-loppement : l'effort de renouveler etde développer la valeur d'efficience.

Ce modèle s'intéresse aux troiscomposantes du capital immatériel :le capital structurel, le capital

humain et le capital relationnel. Cecadre d'analyse est inspiré dumodèle de Sveiby et d'Edvinsson, ilest basé sur une structuration ducapital immatériel autour de quatremodules : la formule d'affaires, l'or-ganisation, le capital humain et lesrelations. Le rating lié au capitalimmatériel a été développé depuisles années 1997 et a été testéempiriquement par 250 entreprises.

Le modèle japonais : les pouvoirspublics japonais sont conscients dela nécessité de mettre en place unprogramme autour de la valorisa-tion des actifs immatériels depuistrois ans. C'est dans ce cadre quele gouvernement japonais a mis enplace une stratégie basée sur l'im-matériel dans le but de renforcer lacompétitivité des entreprises de cepays. Parmi les indicateurs retenusdans le cadre du programme japonais :

- Le management et le leadership- La sélection et la concentration - La création de connaissance etl'innovation - La collaboration et l'organisationau travail- Le risque management et lagouvernance- Coexistence dans la société

MERITUM : le projet européenMERITUM a été développé par ungroupe de chercheurs européens,appartenant principalement à la discipline comptable. Ce projet présente un cadre commun d'identi-fication, de mesure et des actifsimmatériels.L'objectif de ce programme est,d'une part, d'aider les entreprises àdévelopper des capacités et d'identifier,mesurer et manager leurs actifsimmatériels pour augmenter leurefficience et donc leur performancefinancière.

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Et d'autres part de fournir desconseils qui permettent à l'entreprised'avoir plus de visibilité sur cesactifs immatériels ainsi que surleurs capacités à créer de la valeur.Ceci permettrait aux fournisseursd'estimer la rentabilité future et lesrisques associés à différentesopportunités d'investissement.Dans cette partie nous avons présenté l'ensemble des modèles devalorisation des actifs immatériels.

Retenons que la multitude de cesmodèles met en évidence l'intérêtporté par les entreprises et les Etatspour la valorisation du capitalimmatériel.

Dans la partie qui suit nous nousfocaliserons sur le système d'infor-mation, une composante centraledu capital immatériel, et dont safonction dépend en grande partiedu business modèle de l'entreprise.

S'interroger sur la nature et l'impor-tance des actifs immatériels d'uneentreprise revient à poser la questionde leur contribution à la performancede celle-ci. En effet, si l'on considèreque les actifs immatériels constituentune part désormais dominante del'ensemble des actifs d'une entreprise,alors la performance de celle-ci esten étroite relation avec la qualité deleur gestion.

En appliquant cette idée au niveaudu capital structurel, nous notonsque ce capital correspond à l'utilisationdu savoir et de l'information, et àleur diffusion aux niveaux interne etexterne de l'entreprise. Ainsi pourpouvoir utiliser le capital structurel,il faut disposer de systèmes d'infor-mation (réseaux, infrastructures,bases de données, informations surle marché et sur la concurrence)(Stewart, 1991 ; Edvinsson et Malone,1997). Nous pensons donc qu'étudierle capital structurel revient à étudierla qualité des SI dans l'entreprise.Analyser la qualité des SI en tantque ressource immatérielle revientà s'interroger sur leur contribution àla performance et à la création devaleur de l'entreprise. Cette suppo-sition constitue le point de départ etl'objet principal de notre recherche.

Il nous semble intéressant, à ceniveau, de faire la distinction entrela performance et la création devaleur des SI, qui sont deux notionscomplémentaires malgré leurs différences (Bounfour, 2006).

La performance peut être liée à l'efficience de la fonction SI : le SIdoit permettre d'assurer unemeilleure allocation des ressources,de mieux faire les choses. La performance peut être aussi attribuée à l'étude de l'évolutiond'un ou plusieurs indicateurs de laDSI dans le temps.

La notion de la valeur est souventassociée, en économie, à l'existen-ce d'un marché dans lequel s'effec-tuent des transactions (ventes /achats). Au niveau des SI, la valeurpeut être déterminée selon deuxperceptives (Bounfour, 2006). D'unepart, à travers l'externalisation des SIpour réduire les coûts de la DSI etpermettre à l'entreprise de seconcentrer sur son cœur de métier.D'autre part, à travers la notion d'alignement stratégique des SI (oude la DSI) sur les directions métiersde l'entreprise.

La Recherche au CIGREF

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Capital immatériel et système d'information

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En effet, la faible capacité desmanagers à optimiser la valeurcréée à partir des SI peut être expli-quée par l'absence d'alignement duSI avec la stratégie globale de l'entreprise (Henderson et Venkatraman,1999).Performance et création de valeurpar les SI : revue de littératureLa distinction entre les technologiesde l'information (TI) et les systèmesd'information (SI) n'est pas toujoursévidente puisque celle-ci dépendsouvent, en tous cas pour lesDirecteurs des Systèmes d'Information(DSI), du contexte sémantique etconceptuel dans lequel ils sesituent. Il convient alors de clarifier

la distinction entre ces deuxconcepts qui sont souvent liés.D'une manière générale, les TIincluent les équipements, lesréseaux de communications et lesbases de données et les logiciels liés.Les SI comportent la dimension d'usage, mais aussi une dimensionmanagériale (Bounfour, 2006), incluantles processus organisationnels, lestableaux de bord, les modes d'alignement avec les métiers.La littérature se rapportant à la performance et à la création devaleur par les SI est abondante.Nous avons donc tenté de synthétiserl'ensemble des cadres théoriquesprésentés par Bounfour (2006)dans le tableau suivant.

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Contribution à la productivité

Approche concurrentielle

Approche du surplus duconsommateur

Approche organisationnelle

Approche capitalimmatériel

Objectifs

- l'investissementd'un euro additionnel dansles TI génère-t-ilun revenu netpositif - la maîtrise descoûts informatiques esttrès importante - la contributiondes TI à la productivité s'insère dans lecadre de paradoxe deSolow (1987)4

- dans quellemesure les TIpermettent-ellesà l'entreprise de réaliser unavantageconcurrentiel ?

- dans quellemesure lesinvestissementsen TI créent-ellesune valeur effective pour les consomma-teurs ?

- s'intéresse à étudier l'impactdes investisse-ments en TI surl'organisation et les processusde travail- valorise le capital organisationnelcomme source de création devaleur

- s'insère dans lecadre de la théoriedes ressources et descapacités dyna-miques et leurs rap-ports à la stratégie del'entreprise5

- l'importance ducaractère stratégiquede l'information- l'organisation doitconcilier entre les exi-gences de son envi-ronnement externe etses ressources inter-nes, ceci est dans lebut de déterminer lesoptions stratégiquesde celle-ci. -analyse de l'entreprisede point de vue deses ressources plutôtque de ses produits.

Principauxauteurs

Hitt etBrynjolfsson(199) ; Berndt,(1991) ; Dewanet Minn (1997) ;Mukhopadhay et Cooper (1993)

Weill (1992) ;Dos Santos,Pfeffer et Mauer(1993) ;Brynjolfsson, Hittet Yang (2000)

Hitt etBrynjolfsson(1996).

Soh et Markus(1995)Weill(1992) ;Sambamurthy et Zmud (1994)

Itami (1987); Penrose(1959); Dierickx etcool (1989); Barney(1991), Bounfour(1998, 2003,2006);Edvinsson , Malone(1997), Lev (2001),Mouritsen (1999).

Tableau 2 : Principaux approches théoriques sur la relation entre la création de valeur (et/ou performance) et les Systèmes d'Information

4 Celui-ci a affirmé qu'il voyait les ordinateurs partout (dans l'organisation) sauf dans les statistiques de productivité. 5 Ces deux théories forgent une nouvelle vision de la performance des entreprises. En effet, celles-ci peuventréaliser un avantage concurrentiel en combinant leurs ressources essentiellement immatérielles (Penrose, 1959 ;Wenerfelt, 1984). Parmi ces ressources les marques, les connaissances et technologies internes.

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Approche capital immatériel et SI

L'approche par le capital immatérielmet en avant le rôle stratégique desSI pour la réalisation d'un avantageconcurrentiel de l'entreprise, puisquela performance et la fiabilité du système d'information apparaissentcomme une variable déterminantedans la mise en œuvre et dans laréussite de la stratégie globale de lafirme.

En effet, Itami (1987), considèreque les actifs immatériels ont unimpact important sur la stratégie dela firme. Selon lui, ce fait est justifiépar au moins trois raisons : « ils sontdifficiles à accumuler, ils sont capablesd'usages multiples, ils constituent àla fois des inputs et des outputs auxactivités de l'entreprise » (Itami,1987). Nous pouvons représenter laconception du processus de trans-formation de ressources dans l'entreprise d'Itami comme suit :

Selon Itami, l'information en tantqu'actif immatériel a un caractèredual. En effet, cet actif immatérieldoit être considéré à la fois commeun input et un output indispensablepour effectuer des choix straté-giques au sein des organisations.L'information est considérée ainsicomme une source de création devaleur et un actif à caractère straté-gique pour l'entreprise, d'où l'intérêtpour l'entreprise de développer dessystèmes d'information straté-giques (Bounfour 1998, 2006). Ledéveloppement de tels SI, nousamène à considérer la question deleur alignement avec la stratégieglobale de l'entreprise.

Alignement stratégique des SI

Les travaux académiques ont montréque la création de valeur par le SIdépend forcément de l'alignementstratégique de celui-ci avec lesobjectifs de l'entreprise (Andersonet Venkatraman 1993). D'ailleurs,l'un des résultats de l'enquête du

CIGREF (réalisée en décembre2007 auprès des DSI des entreprisesmembres du CIGREF) montre qu'une DSI qui créée de la valeurest une DSI dont les objectifs s'alignent avec ceux des directionsmétiers de l'entreprise.

La prise en compte du rôle du SIdans la stratégie de l'entreprise aémergé dans les années 1980. Eneffet, Mc Farlan, McKenney etPyburn (1982 et 1983) ont étéparmi les premiers à montrer quecertaines entreprises utilisaientleurs SI de telle manière qu'ellesavaient un impact sur leur stratégie.D'autres auteurs (Cash-Konsynski1985) ont analysé les impacts du SIsur la stratégie, le secteur, laconcurrence et les relations avecles parties prenantes de l'entreprise(Fimbel, 2008). C'est dans ce cadreque le management stratégique(Porter et Millar, 1985 ; Wiseman,1985) considère que la mise enplace de systèmes d'informationstratégiques permet à l'entreprise

La Recherche au CIGREF

Cahier n° 4 39

Figure 4 : Processus de transformation des ressources dans l'entreprise

Inputs : ressources FinancièresInformationsPhysiquesHumaines

EntreprisesOutputs: ressourcesFinancièresInformations

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de réaliser un avantage concurren-tiel et donc de créer de la valeurpour l'entreprise (Bounfour, 2006).

Les travaux d'Anderson et Venkatraman(1993) sur l'alignement stratégiqueSI sont les plus connus au niveauacadémique. En effet, ces cher-cheurs définissent l'alignementcomme « un ensemble de mises enrelation toutes à double sens entrequatre concepts : la stratégie del'entreprise, la stratégie SI, les processus organisationnels et métierset l'infrastructure SI ». C'est lemodèle de l'alignement stratégiquequi se décline en deux composantescomplémentaires : (1) une compo-sante externe, ou « fit stratégique »,qui consiste à harmoniser les choixdes activités stratégiques de l'entre-prise et les choix en matière dedéploiement technologique ; et (2)une composante interne, ou « inté-gration fonctionnelle », qui consisteà assurer la cohérence entreles processus organisationnels etl'infrastructure SI.

Pour étudier la relation entre l'alignement stratégique SI et la performance de l'organisation dansle cadre du modèle présenté pard'Anderson et Venkatraman (1993),plusieurs recherches (Bergeron,Raymond et Rivard, 2004) se sontfocalisées uniquement sur lacomposante externe. Ainsi selonCIGREF (2002), par exemple, l'ali-gnement stratégique des TI/SI peutêtre défini comme étant une démarchevisant à faire coïncider la stratégieTI/SI avec la stratégie de l'entreprise.Cette démarche repose sur deuxconditions préalables :- La compréhension et l'intégrationde la stratégie de l'entreprise par lafonction SI dans son ensemble.

- La prise en compte des contrainteset des opportunités de l'informatiquedans la stratégie de l'entreprise.

D'autre part, certaines recherchesse sont intéressées à identifier lesdifférentes composantes de l'alignementstratégique, ainsi Weil et Broadbent(1998) ont présenté quatre compo-santes de l'alignement des SI :

- le contexte stratégique : les pro-duits, le marché, les investisse-ments et les clients.

- l'environnement : les opportunités,les menaces, et les contraintesréglementaires.

- la stratégie du SI : le rôle du SI,les services délivrés et les standardsqui en découlent.

- le portefeuille applicatif : l'ensembledes investissements en technologiesde l'information incluant les personnesdévouées pour fournir des servicesTI centralisés, décentralisés, ouexternalisés.

D'après ces chercheurs, la réalisationd'un alignement stable entre cesquatre composantes n'est pas toujours vérifiée à cause du chan-gement constant du contexte straté-gique et du portefeuille applicatif quinécessite des investissements etde l'expertise importants pour ledévelopper. L'alignement s'inscritdans une vision dynamique ; ce quisignifie que le changement d'une deses composantes implique néces-sairement un changement dans laconfiguration des autres composantes.

Sur le plan théorique, un consensusse dégage pour considérer l'aligne-ment stratégique comme une conditionnécessaire à l'atteinte de la perfor-mance de l'entreprise par les SI(Luftman et McLean, 2004). Enrevanche, les travaux empiriques quien opérationnalisent les concepts eten affinent les mesures font encoredéfaut (Jouirou et Kalika, 2004 ;Kefi et Kalika, 2005).

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Ce cahier de recherche représenteun état de l'art de la littérature sur lecapital immatériel, ses modes demanagement et les méthodes deson reporting. Nous notons que lalittérature est abondante sur la relationentre SI et performance/création devaleur pour l'entreprise. En revanche,la question liée au capital immatérielet systèmes d'information est faiblementtraitée ou traitée de manière implicite.En France, plusieurs initiatives sesont intéressées récemment à cettequestion. Le CIGREF considère laquestion de l'immatériel à partir destravaux d'un cercle ad hoc : LeCercle de l'immatériel, créé en2007. Celui-ci a pour ambition defavoriser les pratiques de Benchmarkinget de reporting du SI entre les grandesentreprises françaises. Au niveauacadémique, la création de la chai-re de management de l'immatériel àl'Université de Paris Sud 11, a pourambition de renforcer les recherchessur le capital immatériel d'une manièregénérale et en particulier sa mise enperspective avec les systèmes d'information.

La démarche capital immatérielplace le SI comme une ressourceimmatérielle et stratégique à lacréation de valeur pour l'entreprise.Dans ce sens, la valeur du systèmed'information est une valeur d'usageliée à une dimension managérialedu système informatique de la DSI.La fonction système d'informationdevient alors, en plus de son rôle desupport informatique au service desdirections métiers, un centre decréation de valeur pour l'entreprise.On parle alors de la valeur d'usage

du SI qui est mise à profit par lesdirections métiers. Ceci implique lamise en place d'un langage communet d'une communication entre lesdirections métiers, la direction infor-matique et la direction générale,pour contribuer concrètement à lacréation de valeur. La gouvernancedes systèmes d'information permetde mettre en lumière cette créationde valeur et de se pencher sur desquestions liées au pilotage de lastratégie, de la gestion des compé-tences, de la gestion des risques etde la performance/la création devaleur du SI.

Le système d'information est unélément clé de la chaîne et du système de valeur de l'entreprise :c'est un actif stratégique. Partant dece constat, une question centrale sepose : Comment la gouvernancedes systèmes d'information permet-elle d'être approchée à partir de laperspective proposée dans ce texte :celle de la valorisation du capitalimmatériel. Autrement dit, quellessont les conditions de formation, devalorisation et plus généralement demanagement des actifs immatérielsdu système d'information, et commentceux-ci peuvent être approchés, àpartir d'une problématique de la gouvernance ? C'est la questioncentrale de notre recherche.

Le prochain cahier se proposerad'apporter des éléments de réponseà cette question en se basant surun cadre analytique ad hoc, et unepremière analyse du travail empiriqueplanifié pour l'année 2008-2009.

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Conclusion

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