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GUIDE JURIDIQUE DE L’ENTREPRISE Traite ´ the ´orique et pratique 2 e e ´dition Titre XII – Livre 119.4 La responsabilite ´ pe ´nale dans l’entreprise Adrien MASSET Avocat au barreau de Verviers Professeur a ` l’Universite ´ de Lie `ge – 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_VOOR", p. 1, 20 September 2006, 09:44 —

La responsabilite´ pe´nale dans l’entreprise · B. L’abus de confiance et l’abus de biens sociaux 52 1. L’abus de confiance 52 ... Infractions voisines 61 D. Les infractions

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GUIDE JURIDIQUE DE L’ENTREPRISE

Traite theorique et pratique

2e edition

Titre XII – Livre 119.4

La responsabilite penale

dans l’entreprise

Adrien MASSET

Avocat au barreau de Verviers

Professeur a l’Universite de Liege

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_VOOR", p. 1, 20 September 2006, 09:44 —

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_VOOR", p. 2, 20 September 2006, 09:44 —

Table des matieres

INTRODUCTION 9

010. Criminalite d’affaires 9

020. Code penal des affaires 9

030. Inflation penale et depenalisation 9

040. Droit penal des affaires et procedure penale 10

050. La delinquance internationale en droit penal des affaires 10

060. Plan du livre 11

CHAPITRE 1. QUI, DANS L’ENTREPRISE, EST PENALEMENT

RESPONSABLE? – L’IMPORTANCE DE LA LOI DU

4 MAI 1999 INSTAURANT LA RESPONSABILITE

PENALE DES PERSONNES MORALES 12

070. Entreprise individuelle ou societaire 12

080. Entreprise individuelle 12

090. Entreprise societaire 12

091. Le regime de la responsabilite penale dans l’entreprise societaire avant

cette loi du 4 mai 1999 – Apercu historique 13

092. Les problemes de droit penal general poses par l’ancienne theorie de la

responsabilite penale des personnes morales 14

093. Les remedes legaux apportes avant 1999 et maintenus apres 1999, pour

reduire l’incidence de la non-responsabilite penale des personnes

morales: responsabilite civile des amendes, amendes administratives et

transactions administratives 15

100. La loi du 4 mai 1999 instaurant la responsabilite penale des personnes

morales: les raisons et les etapes du changement 17

110. Le principe de la responsabilite penale des personnes morales:

un principe presque general 18

115. Le principe de la responsabilite penale des personnes morales:

la personne morale est punissable, tantot seule, tantot avec la personne

physique 20

120. Le regime des sanctions penales applicables aux personnes

morales declarees coupables 24

130. Les dispositions de procedure penale propres a la repression des

infractions commises par les personnes morales 27

140. Le probleme classique et epineux de l’application de la loi nouvelle

dans le temps 30

CHAPITRE 2. UNE SANCTION REDOUTABLE:

L’INTERDICTION PROFESSIONNELLE 32

150. Arrete royal no 22 du 24 octobre 1934 adouci par la loi du 2 juin 1998 32

160. Les interdictions d’administrer, de gerer et de surveiller une societe

commerciale 32

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_TABMAT", p. 3, 20 September 2006, 10:12 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 3

170. L’interdiction d’exercer une activite commerciale 33

180. L’effet des condamnations prononcees a l’etranger 34

185. L’effet dans le temps des interdictions ayant sorti leurs effets avant la

loi du 2 juin 1998 34

CHAPITRE 3. LES PRINCIPALES INFRACTIONS APPLICABLES

AUX ENTREPRISES 35

190. Plan 35

SECTION 1. LES INFRACTIONS PREVUES PAR LE CODE PENAL 35

§ 1. LES DISPOSITIONS PROPRES A L’ENTREPRISE 35

200. Applications 35

§ 2. LES REGLES RELATIVES A LA CONFISCATION SPECIALE ET

AU BLANCHIMENT 38

210. La confiscation speciale 38

213. L’infraction de blanchiment: notion 42

214. L’objet de l’infraction de blanchiment 43

215. Elements constitutifs de l’infraction 44

216. Caracteristiques de l’infraction 45

217. Presentation de la loi instaurant le regime preventif de blanchiment 46

§ 3. DISPOSITIONS GENERALES APPLICABLES NOTAMMENT AUX

ENTREPRISES 47

220. Introduction 47

A. Les faux en ecritures 48

230. Le cadre legal 48

240. Elements constitutifs du faux en ecritures 48

250. Cas d’application 50

260. La peine 51

270. Usage de faux 51

280. Prescription 51

B. L’abus de confiance et l’abus de biens sociaux 52

1. L’abus de confiance 52

290. Le cadre legal 52

300. Elements constitutifs de l’abus de confiance 52

310. Cas d’application 54

320. La peine 54

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_TABMAT", p. 4, 20 September 2006, 10:12 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

4 – Livre 119.4 Kluwer

330. Infractions voisines 54

2. L’abus de biens sociaux 54

333. Le cadre legal 54

335. Elements constitutifs de l’abus de biens sociaux 55

337. Repression de l’infraction 57

C. L’escroquerie 57

340. Le cadre legal 57

350. Elements constitutifs de l’escroquerie 57

360. Cas d’application 59

370. La tentative d’escroquerie – Les peines 61

380. Infractions voisines 61

D. Les infractions liees a l’etat de faillite 62

381. Disparition des infractions de banqueroute mais maintien du droit penal

de la faillite 62

382. Auteurs des infractions liees a l’etat de faillite 62

383. Faut-il un etat de faillite? 63

384. Infractions visees par l’article 489 du Code penal 64

385. Infractions visees par l’article 489bis du Code penal 64

386. Infractions visees par l’article 489ter du Code penal 65

387. Infractions visees par les articles 489quinquies et sexies du Code penal:

infractions commises par des tiers 66

388. Les peines 67

389. Addendum: Les dispositions penales de la loi du 17 juillet 1997 relative

au concordat judiciaire 67

SECTION 2. LES INFRACTIONS PREVUES PAR LES LOIS

PARTICULIERES 67

§ 1. INTRODUCTION 67

390. L’inflation legislative 67

§ 2. LOIS PARTICULIERES EN MATIERE ECONOMIQUE ET

FINANCIERE 68

400. Plan 68

A. La repression du travail frauduleux 68

410. Raison d’etre 68

420. Elements constitutifs du travail frauduleux 69

430. Cas particuliers et exceptions 70

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_TABMAT", p. 5, 20 September 2006, 14:21 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 5

B. La repression de la fraude fiscale 70

440. Introduction 70

450. Les sanctions administratives 71

460. Fraude fiscale et choix de la voie la moins imposee 72

470. La mesure generale anti-abus de droit 73

480. Les sanctions penales 73

485. Paiement des droits eludes et solidarite fiscale 75

490. La charte du contribuable 76

500. La fraude communautaire 77

C. Les infractions a la reglementation comptable 78

510. Champ d’application 78

520. Les petites entreprises 79

530. Les moyennes et grandes entreprises en route vers les petites societes et

les autres societes 79

540. Le regime des moyennes et grandes entreprises en route vers les petites

societes et les autres societes 80

550. Le regime des petites entreprises 81

560. Les personnes responsables 81

570. Les sanctions 82

580. La responsabilite penale des professionnels du controle comptable 82

D. Les infractions a la reglementation des prix 82

590. Ubiquite de la reglementation des prix 82

600. Les differents regimes de prix 83

610. Les sanctions penales 83

620. Le pouvoir de transiger de l’administration 84

630. Le pouvoir de transiger du parquet 84

640. Les mesures provisoires 84

E. Les pratiques du commerce 84

650. L’action en cessation 84

660. Les sanctions penales 85

670. Les pratiques du commerce directement sanctionnees penalement 86

680. Les actes accomplis de mauvaise foi 86

690. La violation des prescriptions judiciaires 86

700. Le commercial tient le criminel en etat 86

F. Le droit penal de l’environnement 87

710. Le cadre legal 87

711. La pollution de l’atmosphere 88

712. La pollution des eaux 89

713. La lutte contre le bruit 91

714. La lutte contre la pollution par les dechets 91

G. Le droit penal des activites reglementees 92

720. Les dispositions legales 92

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_TABMAT", p. 6, 20 September 2006, 10:12 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

6 – Livre 119.4 Kluwer

H. Le droit penal de la consommation 93

730. Les dispositions legales 93

740. La loi du 12 juin 1991 relative au credit a la consommation 94

I. Le delit d’initie 95

750. Le cadre legal 95

751. Qu’est-ce qu’un initie? 96

752. Qu’est-ce qu’une information privilegiee? 96

753. Quels sont les instruments financiers vises? 97

754. Quels sont les comportements prohibes? 97

755. Quelles sont les sanctions? 98

756. Intervention de la CBFA 98

760 a 860. Reserves 98

J. Le droit penal social 98

870. Les dispositions legales 98

SECTION 3. LE DROIT PENAL DES SOCIETES 100

880. Presentation generale 100

890. Provocation a l’achat de titres de societes par des moyens frauduleux 101

900. La violation des regles d’information et de publicite 102

910. La distribution de dividendes ou de tantiemes fictifs 103

920. La distribution illicite d’un acompte sur dividende 103

930. La reduction delictueuse de capital social 104

940. Les faux dans les comptes annuels 104

BIBLIOGRAPHIE 107

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_TABMAT", p. 7, 29 September 2006, 09:43 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 7

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_TABMAT", p. 8, 20 September 2006, 10:12 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

8 – Livre 119.4 Kluwer

Introduction 1

010 Criminalite d’affaires

La responsabilite penale de l’entreprise touche a la matiere du droit penal des affaires,

a la matiere du droit penal economique, a la matiere de la delinquance en col blanc ou

encore a la matiere de l’intervention du droit penal dans la vie des affaires.

Les entreprises, ni plus ni moins que les autres activites humaines et economiques,

versent parfois dans la delinquance.

La delinquance economique souleve des questions juridiques, criminologiques,

sociales et ethiques.

Les questions juridiques concernent notamment l’application des principes gene-

raux du droit penal, par exemple la mise en œuvre de l’imputabilite morale ou de l’etat

de necessite.

Les questions criminologiques mettent specialement en exergue ce qui est commu-

nement appele le chiffre noir, a savoir la delinquance non apparente, non decouverte,

non repertoriee.

Les questions sociales insistent sur les repercussions economiques et sociales qui

frappent les tiers, specialement les travailleurs, touches, indirectement mais parfois

plus durement que les dirigeants indelicats, par les sanctions penales prononcees

contre les entreprises.

Les questions ethiques s’interrogent sur la necessite de l’intervention du droit penal

a l’encontre des entreprises.

020 Code penal des affaires

Il n’existe pas en droit belge de Code penal des affaires, qui regrouperait les

infractions sanctionnant ce que l’on qualifierait de delinquance des affaires.

Le contenu de ce droit penal des affaires est au contraire eclate dans diverses

sources: le Code penal pour les infractions classiques, et des lois les plus variees pour

des infractions les plus variees. Ces dernieres lois ne comportent, souvent, que l’une

ou l’autre disposition penale agrementant d’une touche repressive des reglementations

plus techniques les unes que les autres.

Une autre difficulte serait de delimiter ce champ du droit penal des affaires, sur la

definition duquel personne ne s’accorde 2.

030 Inflation penale et depenalisation

L’adage ‘Nul n’est cense ignorer la loi (penale en l’espece)’ trouve en droit penal des

affaires une acuite remarquable. C’est un truisme que de se lamenter actuellement sur

la croissance exponentielle des reglementations touchant a la vie des affaires assorties,

de-ci de-la, de sanctions penales.

Les polices, specialisees ou non, et le parquet disposent d’un arsenal legislatif et

reglementaire impressionnant pour faire respecter le principe de la loyaute dans la vie

1. La version initiale de ‘La responsabilite penale de l’entreprise’, a ete redigee par Mr.P. Troisfontaines. La presente version est, pour l’essentiel, mise a jour au 1er avril 2006.

2. Th. Afschrift et V.A. De Brauwere,Manuel de droit penal financier, Editions Kluwer, 2001, 599 p.;J. Spreutels, F. Roggen, E. Roger France, Droit penal des affaires, Bruylant, 2005, 1230 p.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 9, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 9

des affaires. Certains auteurs ne manquent pas de s’interroger sur le manque d’effec-

tivite de ce droit penal des affaires.

La depenalisation du droit des affaires doit aussi retenir l’attention: il s’agit de

preferer a la sanction penale d’autres modalites de contrainte dites mieux adaptees a la

vie des affaires: sanctions civiles, sanctions commerciales, sanctions administratives 1.

040 Droit penal des affaires et procedure penale

La procedure penale de droit commun trouve evidemment a s’appliquer dans le cadre

de la repression des infractions commises dans la vie des affaires 2. De nombreuses

lois particulieres interessant le droit penal des affaires prevoient cependant d’impor-

tantes derogations a ce droit commun de la procedure penale: ainsi, des organes de

recherche specialises sont rendus competents pour verifier l’application correcte de la

legislation; des pouvoirs de recherche exceptionnels sont attribues a ces polices

specialisees (regles specifiques pour les perquisitions, saisies, redaction des proces-

verbaux, ...); les possibilites d’extinction de l’action publique par l’effet de la

transaction sont developpees; le delit d’entrave a l’exercice des controles est mis en

exergue; ...

Au detour de l’une ou l’autre legislation envisagee, nous evoquerons certaines de

ces particularites 3.

050 La delinquance internationale en droit penal des affaires

L’internationalisation des relations commerciales et economiques, l’ouverture sur des

marches nouveaux precedemment peu accessibles, la mise en place progressive d’une

structure economique europeenne favorable a ce developpement international des

affaires et l’importance des enjeux financiers concernes, ont ete autant d’elements

propices a l’apparition voire a l’acceleration d’une delinquance transnationale des

affaires.

L’imagination des delinquants a profite de l’abolition de ces frontieres: les legis-

lations penales nationales et internationales ont eu a reagir, d’une part en adoptant des

regles specifiques en matiere de competence judiciaire internationale, d’autre part en

completant leur arsenal repressif sous l’impulsion reguliere de conventions interna-

1. Sur la depenalisation du droit des affaires, voy. specialement A. De Nauw, Les metamorphoses

administratives du droit penal de l’entreprise, Gand, Mys & Breesch, 1994, 190 p.; Comp. la loi du13 mai 1999 relative aux sanctions administratives dans les communes, inserant un article 119bis dansla nouvelle loi communale et un article 601ter dans le Code judiciaire; sur cette loi, voy., A. Masset,‘Les santions administratives dans les communes: en route vers le droit communal arme’, J.T., 2001,pp. 833-838 et Adm. Publ., 2002, pp. 12-23 (version completee), ainsi que ‘De vraies santionsadministratives ou des sanctions penales camouflees?, Reflexions en droit interne belge’, Rev. Fac.Dr. Liege, 2005, pp. 441-466.

2. Sur la procedure penale de droit commun, voy. M. Franchimont, A. Jacobs et A.Masset,Manuel de

procedure penale, Larcier, Coll. Fac. Droit Liege, 2006; H.D. Bosly et D. Vandermeersch,Procedure penale, La Charte, 2005; R.P.D.B., t. IX Compl., v8 Procedure penale, 2005.

3. Sur ces particularites, voy. notamment H.D. Bosly, ‘Mise en œuvre des poursuites et pouvoirsd’investigation dans l’entreprise’, Le risque penal dans la gestion des entreprises, Actes du41e Seminaire de la Commission Droit et Vie des Affaires de l’Universite de Liege, E. Story-Scientia,1992, pp. 179-195. J. Spreutels, ‘La poursuite des infractions en droit penal des affaires’ etD. Matray, ‘Punir le dirigeant ou proteger l’entreprise’, Le droit des affaires en evolution – L’en-

treprise face au droit penal, Bruylant, 1995, pp. 239 a 259 et pp. 261 a 310.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 10, 29 September 2006, 09:45 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

10 – Livre 119.4 Kluwer

tionales en matiere penale, enfin en developpant des collaborations policieres et

judiciaires 1.

060 Plan du livre

Apres cette breve introduction, la matiere peut etre examinee en 4 chapitres:

– Chapitre 1. Qui, dans l’entreprise, est penalement responsable?

– Chapitre 2. L’interdiction professionnelle en tant que peine a redouter.

– Chapitre 3. Les infractions du Code penal appliquees a la vie des affaires.

– Chapitre 4. Les infractions des lois particulieres appliquees a la vie des affaires.

1. Sur le sujet, voy. J.-P. Spreutels, ‘Les infractions internationales – Developpements recents du droitpenal international des affaires’, Le risque penal dans la gestion des entreprises, Actes du41e Seminaire de la Commission Droit et Vie des Affaires de l’Universite de Liege, E. Story-Scientia,1992, pp. 109-147; J.A.E. Vervaele, La fraude communautaire et le droit penal europeen des affaires,P.U.F., 1994, 436 p.; D. Robert, La justice ou le chaos, Editions Stock, 1996, 349 p., portant ‘l’appelde Geneve’; A. Bernardi, ‘Vers une europeanisation du droit penal des affaires? – Limites etperspectives d’un ius commune criminale’, Rev. dr. pen., 1997, pp. 405 a 457. Centre d’etudes pourl’application du droit communautaire en matiere penale et financiere, Le corpus Iuris au regard du droitbelge, les premiers pas vers un necessaire espace judiciaire europeen, Fac. Dr. U. Lg., ed. Bruylant etMaklu, 2000, 206 p.; M.Delmas-Marty, Corpus iuris portant dispositions penales pour la protectiondes interets financiers de l’Union Europeenne, ed. Economica, Paris, 1997, 179 p. C. Van De

Wijngaert, Droit penal et Communautes europeennes, Rev. dr. pen., 1982, pp. 837 a 862; sur l’arretdu 27 octobre 1991, voy. G. Stessens, R.W., 1993-1994, pp. 137 a 153; J. Vervaele, ‘Competences enmatiere de sanctions administratives de et dans l’Union Europeenne - Vers un systeme de sanctionsadministratives europeennes?’, Rev. dr. pen., 1994, pp. 933 a 975. G. De Kerckhove etA. Weyenbergh, Vers un espace judiciaire penal europeen, ed. U.L.B., 2000, 372 p. M. Jaeger,‘Les rapports entre le droit communautaire et le droit penal: l’institution d’une communaute de droit’,Rev. dr. pen., 2004, p. 1099-1044; L. Moreillon et A. Willi-Jayet, Cooperation judiciaire penale

dans l’Union europeenne, Bruylant, 2005, 746 p.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 11, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 11

Chapitre 1. Qui, dans l’entreprise,est penalement responsable? –L’importance de la loi du4 mai 1999 instaurant laresponsabilite penale despersonnes morales

070 Entreprise individuelle ou societaire

L’exercice d’une entreprise peut revetir deux formes distinctes: l’entreprise est tantot

individuelle, tantot societaire; l’individu exerce son activite en personne physique

dans la premiere hypothese; dans la seconde hypothese, l’entreprise a pris la forme

d’une societe commerciale, personne morale dotee de la personnalite juridique.

080 Entreprise individuelle

Depuis toujours, le droit penal belge a ete concu pour les individus; le principe de la

responsabilite penale individuelle est affirme, tout comme le principe de la personna-

lite de la peine.

Appliques au droit penal des affaires, ces principes ne posent pas de difficultes pour

l’entreprise individuelle: l’entrepreneur qui exerce individuellement ses activites doit

evidemment repondre personnellement des infractions penales commises par son

entreprise, c’est-a-dire par lui-meme.

Ainsi, encourra personnellement la sanction penale, le commercant qui s’installe en

personne physique sans etre inscrit au registre du commerce 1 ou qui exerce une

activite reglementee sans disposer des connaissances de gestion de base et/ou de la

competence professionnelle. 2

090 Entreprise societaire

L’exercice d’une activite sous le couvert d’une societe, societe commerciale ou

societe civile a forme commerciale, quelle qu’en soit la forme (SPRL, SPRLU, SA,

SNC, SC, ...), a pour effet de conferer la personnalite juridique a cette entreprise

societaire: celle-ci, en tant que telle, dispose de droits et de devoirs; l’obligation de

respecter la loi penale pese sur la societe, personne morale.

Le droit penal va-t-il des lors pouvoir venir sanctionner la societe, personne morale,

qui a viole la loi penale? La societe, en tant que telle, peut-elle etre l’auteur de

l’infraction penale?

Le droit penal belge, apres plus de 130 annees de fidelite au principe de l’irres-

1. Art. 4 et 44bis des lois relatives au registre du commerce, coordonnees le 20 juill. 1964: ‘Est puni d’uneamende de 26 a 10.000 euros, celui qui exerce une activite commerciale pour laquelle elle n’a pasinforme le greffe du tribunal de commerce conformement a l’article 22bis ou pour laquelle lesrenseignements fournis sont inexacts’. Adde les art. 62 et 63 de la loi du 16 janv. 2003 portant creationd’une Banque-carrefour des Entreprises, modernisation du registre du commerce, creation de guichets-entreprises agrees et portant diverses dispositions.

2. Art. 16, § 1er de la loi-programme du 10 fevr. 1998 pour la promotion de l’entreprise independante.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 12, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

12 – Livre 119.4 Kluwer

ponsabilite penale des societes, a bouleverse cette question en adoptant la loi du 4 mai

1999 instaurant la responsabilite penale des personnes morales; cette loi a ete publiee

au Moniteur belge le 22 juin 1999 et est en vigueur depuis le 2 juillet 1999.

Pour montrer l’ampleur du changement ainsi legalement realise et parce que

plusieurs dossiers judiciaires concernent encore des faits anterieurs a la nouvelle

loi, il n’est pas inutile, dans un premier temps, d’exposer l’essentiel du regime de la

responsabilite penale dans l’entreprise societaire avant cette loi du 4 mai 1999.

091 Le regime de la responsabilite penale dans l’entreprise societaire avant cette loi

du 4 mai 1999 – Apercu historique

La responsabilite penale des personnes morales, entreprises societaires pour ce qui

nous concerne, a connu diverses evolutions en droit penal belge et a suscite l’interet

d’une doctrine abondante 1.

En un premier temps, la jurisprudence belge avait adopte le principe ‘societas

delinquere non potest’: seule une personne physique, a l’exclusion d’une societe, peut

commettre une infraction; en consequence, ce sont les personnes physiques par

l’intermediaire desquelles la societe a agi, qui sont, dans la realite des choses, les

auteurs des infractions commises et qui en sont penalement responsables.

En un deuxieme temps, la jurisprudence belge avait adopte le principe ‘societas

delinquere potest, sed puniri non potest’: la societe peut commettre une infrac-

tion, mais ne peut pas encourir de peine 2, celle-ci venant frapper les personnes

physiques par l’intermediaire desquelles elle a agi; cette solution etait celle qui

predominait en droit belge en matiere d’imputabilite judiciaire jusqu’a l’adoption

de la loi du 4 mai 1999.

L’imputabilite judiciaire, c’est-a-dire realisee par le juge au depart des elements

concrets de la cause parmi lesquels interviennent les statuts, situation de droit, et ce

qui a ete vecu concretement dans la societe, situation de fait, designait donc la

personne physique, organe de droit ou de fait ou prepose, qui avait commis l’acte

prohibe par la loi ou s’etait abstenu de faire ce que la loi imposait; la responsabilite

penale de cette personne physique poursuivie comme organe, de droit ou de fait, d’une

1. Pour les etudes les plus recentes sur cette question avant la reforme, voy. F. Van Remoortere, ‘Laquestion de la responsabilite penale des personnes morales en droit de l’environnement’, Rev. dr.pen., 1991, pp. 311-337; A. De Nauw, ‘La delinquance des personnes morales et l’attribution del’infraction a une personne physique par le juge’, note sous Cass., 23 mai 1990, R.C.J.B., 1992, pp. 552-572; F. Tulkens et M.Van de Kerchove, Introduction au droit penal, E. Story-Scientia, 3e ed., 1997,p. 320-328, F.Deruyck, ‘Pour quand la responsabilite penale des personnes morales en droit belge?’,J.T., 1997, pp. 697 et s.; M. Faure et D. Rouf, ‘Naar een wettelijke formulering van de strafrechte-lijkheid van de rechtspersoon’, R.W., 1995-1996, pp. 417 et s.; O. Ralet, ‘Responsabilites desdirigeants de societes’, Bull. ass., 1996, p. 733 et s.; F. Deruyck, De rechtspersoon in het strafrecht,Mys & Breesch, 1996; D.Matray, ‘Punir le dirigeant ou proteger l’entreprise’, Le droit des affaires enevolution – L’entreprise face au droit penal, Bruylant, 1995, pp. 261 a 310; J.-P. Bours, ‘Laresponsabilite penale des entreprises’, L’entreprise en difficulte, Actes C.D.V.A., 17 avril 1997,Actualites du droit, 1997, pp. 461 a 480; O.Ralet, Responsabilites des dirigeants de societes, Larcier,1996, pp. 267 a 279; pour une etude de droit compare recente, voir G. Stessens, Corporate criminalliability : a comparative perspective, Internat. & Comp. Law Quaterly, 1994, vol. 43, pp. 493 a 520;W. Cassiers, ‘La responsabilite penale des personnes morales: une solution en trompe-l’œil?, Rev. dr.pen., pp. 823-859. A.B.J.E., Les societes bientot punissables - Quel impact sur la vie des entreprises?,ed. Bruylant, 1999.

2. P. ex., Corr. Bruxelles, 14 janv. 1986, J.T., 1986, p. 396 et Rev. dr. pen., 1986, p. 629; Cass., 19 mars1991, Pas., 1991, I, p. 664; L. Francois, ‘Implications du delinquere sed non puniri potest’,Melanges

offerts a R. Legros, U.L.B., 1985, pp. 189-204; adde, A. De Nauw, ‘Le vouloir propre de la personnemorale et l’action civile resultant d’une infraction’, note sous Cass., 19 oct. 1992, R.C.J.B., 1995,pp. 229 a 258; Corr. Bruxelles, 20 mars 1998, J.L.M.B., 1998, p. 870 (aff. Renault Vilvorde); Cass.,23 dec. 1998, Rev. dr. pen., 1999, p. 393 (aff. Agusta-Dassault).

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 13, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 13

personne morale a laquelle etait imputee un fait punissable, devait etre demontree de

maniere concrete: de la sorte, il a pu etre juge que lorsque le dossier ne revelait pas les

comportements individuels qui seraient delictueux, on ne pouvait pas se referer a une

responsabilite collective qui resulterait de la participation a des deliberations litigieu-

ses du conseil d’administration si les decisions n’y avaient pas ete unanimes et si les

proces-verbaux n’individualisaient pas en quel sens les prevenus avaient vote 1.

Le legislateur avait parfois resolu la difficulte de la determination concrete de la

personne physique penalement responsable au sein des entreprises: la loi designait

elle-meme cette personne physique.

L’imputabilite legale de l’infraction pouvait etre illustree par les exemples suivants:

– en vertu de l’article 11 de l’arrete royal du 23 octobre 1978 relatif a la tenue des

documents sociaux, sont punis d’un emprisonnement et/ou d’une amende precises

l’employeur, ses preposes ou mandataires qui n’etablissent pas les documents adequats;

– en vertu de l’article 81, 1o, de la loi du 4 aout 1996 relative au bien-etre des

travailleurs lors de l’execution de leur travail, sont punis d’un emprisonnement

et/ou d’une amende precises, l’employeur, ses mandataires ou preposes qui ne

respectent pas les dispositions legales;

– en vertu de l’article 16 de la loi du 17 juillet 1975 relative a la comptabilite et aux

comptes annuels des entreprises, sont punis d’une amende de 50 a 10.000 euros. les

commercants, personnes physiques et les administrateurs, gerants, directeurs ou fondes

de pouvoirs de personnes morales qui contreviennent a certaines obligations legales 2;

– en vertu de l’ancien article 205 des lois sur les societes commerciales, coordonnees

le 30 novembre 1935, sont punis d’une amende de 50 a 10.000 euros. les gerants ou

les administrateurs qui auront distribue des dividendes fictifs 3.

092 Les problemes de droit penal general poses par l’ancienne theorie de la respon-

sabilite penale des personnes morales

Dans la mesure ou ces differentes legislations rendaient applicables aux infractions

qu’elles sanctionnaient les articles du Code penal consacres aux principes generaux du

droit penal (application du livre 1er C.P.), les personnes physiques poursuivies pour les

infractions commises par la personne morale, etaient evidemment en droit de faire valoir

les causes de non-imputabilite, de non-culpabilite et les causes de justification classiques:

contrainte, erreur ou ignorance invincible, force majeure, etat de necessite, ... 4.

Ainsi, le chef d’entreprise devait etre autorise a avancer des causes de justification

et a contester l’imputabilite s’il avait fait appel a un professionnel de la comptabilite et

si aucune faute personnelle, suivant le critere de l’homme normalement raisonnable et

prudent, ne pouvait lui etre reprochee, a lui, dirigeant 5.

1. Bruxelles, 24 avril 1985, Pas., 1985, II, p. 109 et Rev. prat. soc., 1986, p. 153; Cass., 9 oct. 1984, Pas.,1985, I, p. 194.

2. L’article 16 de la loi du 17 juillet 1975 a ete partiellement remplace pour ce qui concerne les societespar les articles 126 et 171 C. soc. suite a la codification de cette matiere par la loi du 7 mai 1999 - voy.infra, no 510 et s.

3. L’article 205 L.C.S.C. a ete remplace, sans alteration de sa teneur, par les articles 348 C. soc. pour lesSPRL, 388 pour les SC, et 649 pour les SA, suite a la codification de cette matiere par la loi du 7 mai1999.

4. Voy. les exemples d’application de ces causes de justification et d’excuse dans le cadre des infractions ala legislation relative au respect des conventions collectives de travail, D. Delooz-Lamers, ‘Conven-tions collectives de travail’, Qualifications et jurisprudence penales, Lois speciales, La Charte, 1993,pp. 4-6. Adde, N. Denies et N. Basecqz, ‘Droit de l’environnement et droit economique et social:reflexion sur l’element moral dans les lois et reglements particuliers’, Rev. dr. pen., 1994, pp. 473 a 508.

5. P. Troisfontaines, ‘La responsabilite des dirigeants d’entreprise: aspects du droit comptable’, Ann.Dr., 1983, p. 57; Cass., 13 fevr. 1967, Pas., 1967, I, p. 722; R. Elst, ‘Chronique de jurisprudence –Documents sociaux – Responsabilite penale des secretariats agrees’, Rev. b. sec. soc., 1975, p. 242.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 14, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

14 – Livre 119.4 Kluwer

Ces principes n’occultaient pas l’idee que la personne qui, selon les statuts, etait la

gerante de la societe demeurait penalement punissable lorsqu’elle s’abstenait d’exer-

cer a l’egard de son mandataire son pouvoir de surveillance 1.

Par application des memes principes generaux, d’autres personnes que celles desi-

gnees comme auteurs par la loi, pouvaient etre poursuivies en qualite de coauteurs ou

complices, des lors que, sciemment et volontairement, elles avaient apporte une aide

indispensable ou utile a la realisation de l’infraction; ainsi, etait poursuivi comme

complice de banqueroute simple, le banquier qui, en connaissance de cause, avait

octroye au failli une distribution abusive de credit a un taux excessif 2; de meme, etait

complice d’une infraction celui qui donnait, non pas un simple conseil, mais une

instruction utile a la perpetration de cette infraction 3, ce qui donnait toute la mesure

des dangers de l’activite des professionnels du conseil tels les notaires, les avocats, ou

les experts-comptables et fiscaux.

Dans un domaine proche, la jurisprudence n’autorisait la delegation partielle de

pouvoirs, elisive de responsabilite penale dans le chef de l’auteur legal de l’infraction,

que si le subordonne auquel etaient confiees la direction et la surveillance des services

dans lesquels l’acte delictueux avait ete commis, etait pourvu de la competence et de

l’autorite necessaires pour veiller effectivement a l’observation de la loi 4.

093 Les remedes legaux apportes avant 1999 et maintenus apres 1999, pour reduire

l’incidence de la non-responsabilite penale des personnes morales: responsabilite

civile des amendes, amendes administratives et transactions administratives

Face a l’impossibilite d’atteindre directement les societes pour les infractions commi-

ses par leurs representants, organes de droit ou de fait ou preposes, le legislateur, bien

avant la loi du 4 mai 1999, avait deja a de nombreuses reprises consacre un regime qui

atteignait, de facto, ces societes.

Ainsi, la loi penale avait parfois prevu outre les sanctions penales d’emprisonne-

ment et d’amende contre la personne physique par laquelle la societe avait agi, des

sanctions complementaires affectant directement la societe.

Il en etait notamment ainsi avec:

– la responsabilite civile des amendes: les lois particulieres declarent tres souvent les

societes civilement responsables des amendes prononcees contre les personnes

physiques condamnees; ainsi l’article 109 de la loi du 14 juillet 1991 sur les

pratiques du commerce et sur l’information et la protection du consommateur de-

clare les societes et associations ayant la personnalite civile civilement responsa-

bles des condamnations aux dommages-interets, amendes, frais, confiscations,

restitutions et sanctions pecuniaires quelconques prononcees pour infraction aux

dispositions de la loi contre leurs organes ou preposes;

– l’affichage du jugement de condamnation a l’exterieur ou a l’interieur des eta-

blissements du contrevenant, ou la publication de ce jugement aux frais du

1. Corr. Charleroi, 4 janv. 1995, Rev. dr. pen., 1995, p. 876.2. A. Zenner, ‘La responsabilite du donneur de credit en cas de faillite d’un client debiteur’, Rev. Banq.,

1974, pp. 733-736; Cass. fr. (crim.), 18 mai 1976, D., 1976, cah. 1, pp. 32-33.3. Cass., 29 oct. 1973, Pas., 1974, I, p. 221 et concl. P. Mahaux.4. J. Constant, Precis de droit penal, Les principes generaux, Liege, 6e ed., 1975, pp. 105-107, no 73;

Cass., 7 oct. 1994, J.T.T., 1996, p. 81; E.Roger-France, ‘La delegation de pouvoirs en droit penal oucomment prevenir le risque penal dans l’entreprise’, J.T., 2000, pp. 257-264. P. Waeterinckx, ‘Laresponsabilite penale, un risque maıtrisable pour l’entreprise ? La delegation de pouvoirs en droitpenal’, Rev. dr. pen., 2003, p. 425 et s.; J. Spreutels, F. Roggen, E. Roger France, Droit penal desaffaires, Bruylant, 2005, pp. 88-111.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 15, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 15

contrevenant par la voie des journaux, est rendue possible, par exemple, par

l’article 459 du Code des impots sur les revenus;

– la confiscation des benefices illicites realises a la faveur de l’infraction; cette

sanction est rendue facultative, par exemple, par l’article 108 de la loi precitee du

14 juillet 1991;

– la fermeture de l’etablissement peut parfois etre prononcee par le tribunal; cette

fermeture ne peut pas exceder un an dans le cas prevu par l’article 9, § 5, de

l’arrete-loi du 22 janvier 1945 sur la reglementation economique et les prix;

– l’injonction de faire avec ou sans astreinte; celle-ci se rencontre notamment dans

l’article 41 de la loi du 10 juin 2006 sur la protection de la concurrence econo-

mique, qui permet au Conseil de la concurrence d’infliger une astreinte a l’en-

treprise qui ne respecterait pas l’ordre de retablissement de la concurrence

effective.

– le mecanisme des amendes administratives et le paiement de transactions adminis-

tratives: ce double mecanisme, meme s’il est un peu en marge de l’aspect penal des

infractions au sein des entreprises, doit neanmoins etre percu egalement comme un

moyen de faire supporter par la societe elle-meme le poids de la sanction en cas de

transgression des normes; la plus importante disposition legale concernant les

amendes administratives reside dans la loi du 30 juin 1971 relative aux amendes

administratives applicables en cas d’infraction a certaines lois sociales et qui

peuvent etre infligees par le ministre de l’emploi et du travail en cas de certaines

violations de droit penal social; cette legislation a servi de texte de reference pour

de nombreuses legislations ulterieures; le mecanisme ainsi mis au point a cepen-

dant subi la censure de la Cour d’arbitrage qui a conclu a la violation du principe

constitutionnel d’egalite dans la mesure ou le tribunal du travail ne pouvait pas

reduire l’amende au-dessous du minimum legal, alors que, pour une meme

infraction a une loi permettant l’application de l’article 85 du Code penal, le

tribunal correctionnel pouvait infliger une amende inferieure au minimum legal

s’il existait des circonstances attenuantes 1; fort de cette lecon, le legislateur belge a

modifie la loi 2; la Cour d’arbitrage a encore ete a la base de diverses modifications

legales dans ce domaine du droit social 3; mentionnons encore, pour illustrer le

mecanisme des amendes administratives, la loi du 10 juin 2006 sur la protection de

la concurrence economique 4, ainsi que la loi du 11 janvier 1993 relative a la

1. C.A. 14 juill. 1997, Rev. dr. pen., 1997, p. 1238; F. Lagasse, ‘Amendes administratives, droit penalgeneral et Cour d’arbitrage – Considerations sur les arrets rendus le 14 juillet 1997 par la Courd’arbitrage’, J.T.T., 1997, p. 353 et s. C.A., 30 juin 1999, arret n8 76/1999, M.B., 24 nov. 1999, J.T.,1999, 768, note O. Michiels, et J.T.T. 1999, 449, note F. Lagasse, ‘Amendes administratives,circonstances attenuantes et Cour d’arbitrage’.

2. Art. 76 L. du 13 fevr. 1998, inserant art. 1ter dans L. du 30 juin 1971. Cette disposition n’a pas etecensuree par C.A., 30 juin 1999, M.B., 24 nov. 1999.

3. F. Lagasse,Manuel de droit penal social, Larcier, 2003, pp. 123-150. C.A., 16 juin 2004, arret n8 105/2004, M.B., 5 oct. 2004, J.T.T., 2004, p. 497, note F. Lagasse et V. Marchand. Art. 145 de la loi-programme du 27 dec. 2004 et art. 22 de la loi du 27 dec. 2004 portant des dispositions diverses,M.B.,31 dec. 2004.

4. M. Waelbroeck et J. Bouckaert, ‘La loi sur la protection de la concurrence economique’, J.T., 1992,pp. 281-297; P. De Vroede, De wet tot bescherming van de economische mededeling, Gand, Mys &Breesch, 1997, 410 p. P. de Wolf, ‘Les sanctions aux infractions commises en droit de la concurrenceeconomique’, Ing.-Cons., 2003, pp. 60-82. M. Beeuwsaert, ‘Programme d’amendes dans le cadre de laloi sur la protection de la concurrence economique’, R.D.C., 2004, pp. 936-938.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 16, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

16 – Livre 119.4 Kluwer

prevention de l’utilisation du systeme financier aux fins du blanchiment de

capitaux 1; le mecanisme de la transaction administrative peut etre illustre par

l’article 263 de la loi generale sur les douanes et accises et par les dispositions

legales prises sur cette base, point central de la lutte en Belgique contre les

operations de fraude a l’Union europeenne en matiere notamment de politique

agricole commune 2, ou encore par les dispositions de la loi du 14 juillet 1991 sur

les pratiques du commerce et sur l’information et la protection du consommateur 3.

100 La loi du 4 mai 1999 instaurant la responsabilite penale des personnes morales:

les raisons et les etapes du changement

La Belgique etait encore un des rares pays europeens 4 a ne pas connaıtre le principe de

la responsabilite penale des personnes morales; un concert tres important de voix,

specialement internationales, s’etait eleve de maniere de plus en plus pressante en

faveur de l’adoption de ce regime egalement en droit belge: nombreux etaient les

avertissements emanant de divers organismes internationaux, dont le Conseil de

l’Europe, et nombreuses etaient les recommandations emanant de commissions

d’enquetes parlementaires belges qui insistaient sur la nocivite croissante et specifique

de la delinquance des personnes morales et sur les ecueils d’une intervention penale

classique en ce domaine 5.

C’est a dessein et en reponse a des objections doctrinales que le legislateur belge a

opte pour un regime de responsabilite penale des personnes morales et non pour un

1. J. Thony, ‘Les mecanismes de traitement de l’information financiere en matiere de blanchiment del’argent’, Rev. dr. pen., 1996, pp. 1031-1062; G.Nejman, ‘La loi du 11 janvier 1993 sur le blanchimentet la repression de la fraude fiscale’, in X, La nouvelle legislation bancaire belge – Yearbook 1994,Gand, Mys & Breesch, 1994, pp. 105-110. J.-P. Spreutels et P. deMuelenaere (s.l.d.), La cellule detraitement des informations financieres et la prevention du blanchiment de capitaux en Belgique,

Bruxelles, Bruylant, 2003.2. C. Van den Wyngaert, ‘E.E.G.-fraude en strafrecht: waarom komen er zo weinig fraudegevallen

voor de strafrechter?’, in Liber amicorum Jules D’Haenens, Gand, Mys & Breesch, 1993, pp. 333-354;J. Messine et F. Bultot, Les instruments juridiques belges de lutte contre la fraude aux interets

financiers des Communautes europeennes, ed. Centre d’etude pour l’application du droit communau-taire en matiere penale et financiere, Bruxelles, Bruylant, 1998, 325 p.; D.Merckx, ‘Transactie inzakedouane en accijnzen’, note sous Anvers, 24 dec. 1978, R.W., 1988-1989, pp. 96-97. P. Doelle, ‘De lacreation de l’Office europeen de la lutte antifraude (OLAF) – Vers une possible communautarisation dela protection penale des interets financiers communautaires’, R.P.D.B., 2001, p. 801 et s. F. Dester-beck, ‘De toegevoegde waarde van OLAF. Enkele beschouwingen over de bewijswaarde van OLAF-verslagen in het strafonderzoek en voor de strafrechtsmachten in Belgie’, R.W., 2005-2006, pp. 801-813.

3. P. De Vroede, ‘De wet op de handelspraktijken – Van depenalisatie naar administratiefrechtelijkerechtshandhaving’, in Liber amicorum Marc Chatel, Kluwer, 1991, pp. 131-152; J. Fagnart, ‘Bou-tiquiers et consommateurs: meme combat?’, in X, Les pratiques du commerce – Premier bilan et

perspectives d’application de la loi du 14 juillet 1991, ed. Fac. dr. Univ. Libre Bruxelles, Bruylant,1994, pp. 5-26.

4. Pour un examen de droit compare, voy. ‘Collectif, La responsabilite penale dans l’entreprise – vers unespace europeen unifie?’, Rev. sc. crim., 1997, p. 253 et s., no 2; S. Geeroms, ‘De toerekening van hetmisdrijf aan de rechtspersoon – een rechtsvergelijkende analyse’, Panopticon, 1997, p. 421 et s.;M. Faure et K. Schwarz, De strafrechtelijke en civielrechtelijke aansprakelijkheid van de rechts-

persoon en zijn bestuurders, Interscientia, 1998, 283 p.; Association Capitant, La responsabilite –

aspects nouveaux, (Journees panameennes), dont le rapport general de R. Roth sur La responsabilite

penale des personnes morales, et les rapports de Belgique, Bresil, Canada, Colombie, France, Italie,Luxembourg et Pays-Bas, L.G.D.J., 1999, tome L, 821 p.

5. Sur ces raisons, voy. notamment F. Deruyck, ‘Pour quand la responsabilite penale des personnesmorales en droit penal belge?’, J.T., 1997, pp. 697-704; Chr. Hennau, G. Schamps et J. Verhaegen,‘Indispensable responsabilite de l’entreprise, inacceptable culpabilite collective – A propos de l’avant-projet de loi belge relative a la responsabilite penale des personnes morales’, J.T., 1998, pp. 561-570,prolonge par Y. Hannequart, ‘La responsabilite penale des personnes morales: punir l’etre collectifou corriger ses deficiences?’, J.T., 1999, pp. 281-283. Adde, p. ex., le rapport de la Commissiond’enquete parlementaire du Senat sur la criminalite organisee.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 17, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 17

regime de mesures de surete : les redacteurs de la loi ont concu la personne morale

comme une realite sociale qui peut commettre une faute penale propre et doit donc

aussi pouvoir etre tenue responsable sur le plan penal, en telle sorte qu’il n’est pas

recouru au modele-fiction, selon lequel la personne morale est purement consideree

comme une collectivite de personnes physiques individuelles.

110 Le principe de la responsabilite penale des personnes morales: un principe

presque general 1, 2

Le regime nouveau consacre par la loi du 4 mai 1999 a tout d’abord valeur de principe

general des lors qu’il est affirme pour toutes les matieres penales, sans distinction

entre le droit penal commun, le droit penal fiscal, le droit penal de l’environnement, le

droit penal social, ou d’autres subdivisions du droit penal particulier: l’affirmation du

principe de la responsabilite penale des personnes morales est en effet inscrite dans un

nouvel article 5 du Code penal, ce qui, par l’effet de l’article 100 du Code penal, rend

ce principe applicable a toutes les infractions penales. Il n’y aurait, pour tenir ce

principe general en echec, que le recours a des dispositions contraires dans les lois et

reglements particuliers, technique non encore utilisee par des lois et reglements

particuliers depuis la publication de la loi du 4 mai 1999 auMoniteur belge du 22 juin

1999.

Le regime nouveau a par ailleurs valeur de principe general renforce puisque, par le

recours au mecanisme de l’assimilation, il est declare applicable a des groupements

qui ne constituent pas, sur le plan juridique, des personnes morales, c’est-a-dire qui ne

disposent pas de la personnalite juridique au plan civil (mais qui beneficient de la sorte

d’une «personnalite juridique penale») ni par consequent de patrimoine propre: de

maniere limitative, l’article 5 du Code penal, pour son objet, assimile aux personnes

morales les groupements suivants: les associations momentanees, les associations en

participation, les societes a objet commercial qui n’ont pas depose les extraits de

certains actes au greffe du tribunal de commerce, les societes commerciales en

formation et les societes civiles qui n’ont pas pris la forme d’une societe commerciale;

cette assimilation est presentee dans l’expose des motifs comme justifiee par le souci

1. Pour un commentaire de la loi nouvelle, voy., parmi les auteurs francophones: A. Masset, ‘La loi du4 mai 1999 instaurant la responsabilite penale des personnes morales: une extension du filet penalmodalisee’, J.T., 1999, pp. 653-660; F.Deruyck, ‘La loi du 4 mai 1999 sur la responsabilite penale despersonnes morales’, R.D.C., 1999, p. 653 et s.; J.Messinne, ‘Propos provisoires sur un texte curieux: laloi du 4 mai 1999 instituant la responsabilite des personnes morales’, Rev. dr. pen., 2000, pp. 637-659;F. Kefer, ‘La responsabilite penale de la personne morale: une reponse de plus a la delinquanced’entreprise’, in C.U.P., vol. 37, fevr. 2000, Le point sur le droit penal, pp. 7-40; Ch. Vanderlinden,‘La loi instaurant la responsabilite penale des personnes morales et le droit penal social’, Rev. dr. pen.,2000, pp. 660-688. M. Burton, ‘Le point sur la responsabilite penale des personnes morales’, inActualites de droit penal et de procedure penale (I), Liege, Commission Universite-Palais, CUP, dec.2003, vol. 67, pp. 217-264. M. Nihoul (s.l.d.), La responsabilite penale des personnes morales en

Belgique – une evaluation de la loi du 4 mai 1999 apres cinq annees d’application, La Charte, 2004,429 p.; J. Spreutels, F. Roggen, E. Roger France, Droit penal des affaires, Bruylant, 2005, pp. 51-87.

2. Pour un commentaire de la loi nouvelle, voy., parmi les auteurs neerlandophones: Ph. Traest, ‘De wetvan 4 mei 1999, tot invoering van de strafrechtelijke verantwoordelijkheid van rechtspersonen’, T.R.V.,1999, pp. 451-489; H. Van Bavel, ‘De wet van 4 mei 1999, tot invoering van de strafrechtelijkeverantwoordelijkheid van rechtspersonen’, A.J.T., 1999-2000, pp. 209-226; A. De Nauw etF. Deruyck, ‘De strafrechtelijke verantwoordelijkheid van rechtspersonen,’ R.W., 1999-2000,pp. 897-914. S. VanDyck, ‘De (privaatrechtelijke) rechtspersoon als strafbare dader van een misdrijf’,T. Straf., 2001, p. 227 et s. P. Waeterinckx, ‘De strafrechtelijke verantwoordelijkheid van derectoscope, een karaıte analyse van enkele capita selecta uit de eerste rechtspraak’, in Strafrecht van

nu en straks, Die Keure, 2003, pp. 181-269. M. Faure et P. Waeterinckx, ‘De strafrechtelijkeverantwoordelijkheid van de rechtspersoon: een blik op de rechtspraak en enkele knelpunten uit depraktijk’, T. Straf., 2004, p. 318 et s.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 18, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

18 – Livre 119.4 Kluwer

d’eviter une discrimination entre entites economiques selon la forme juridique

qu’elles auraient adoptee. Il est a observer que cette assimilation n’embrasse pas les

associations sans but lucratif en formation (les associations sans but lucratif consti-

tuees sont evidemment concernees), ni certaines associations de fait comme les

syndicats ou les partis politiques; l’expose des motifs precise que son objectif, par

le recours a la technique de l’assimilation, a d’abord ete d’eviter des discriminations

entre des entites qui presentent des activites essentiellement economiques; ce motif,

pour reel qu’il puisse etre, est cependant en porte a faux avec la reconnaissance de la

responsabilite penale des associations sans but lucratif dont la grande majorite n’ont,

de fait, qu’une activite economique tout a fait reduite pour ne pas dire nulle 1.

Le regime nouveau a par contre valeur de principe general relatif puisque, par le

recours au mecanisme de l’exclusion, il est declare inapplicable a certaines personnes

morales de droit public: sont expressement exclues du champ d’application de l’article

5 du Code penal «l’Etat federal, les regions, les communautes, les provinces, l’agglo-

meration bruxelloise, les communes, les zones pluricommunales, les organes territo-

riaux intracommunaux 2, la Commission communautaire francaise, la Commission

communautaire flamande, la Commission communautaire commune et les centres

publics d’aide sociale»: l’expose des motifs du projet de loi exclut ces entites pour le

motif 3 qu’elles disposent d’un organe directement elu selon des regles democrati-

ques 4; les autres personnes morales de droit public, par exemple les entreprises

publiques autonomes, ne repondent en effet pas a cette particularite; le motif avance

pour exclure tous les centres publics d’aide sociale est plus particulier: seule une

dizaine de ces institutions dispose egalement d’un organe directement elu selon des

regles democratiques et cette categorie devait des lors etre exemptee du principe; tous

les C.P.A.S. beneficient cependant de ce regime d’exemption, car il a ete estime

qu’introduire une discrimination au detriment des C.P.A.S. non elus directement,

aurait constitue une discrimination inacceptable 5.

Les entites et groupements qui ne se voient pas ainsi reconnaıtre cette «personnalite

juridique penale» ne peuvent etre inquietees penalement en tant que telles: la

responsabilite penale sera approchee par le recours a la technique classique de

1. Sur cette question, voy. Commission Droit et Vie des Affaires, Univ. Liege, Actes du colloque des20-21 mars 1985, Les A.S.B.L.: evaluation critique d’un succes, Gand, Story-Scientia, 1985, 556 p.

2. Ces institutions sont prevues par l’article 41 de la Constitution.3. Il a ete juge par la Cour d’arbitrage, dans un arret n8 128/2002 du 10 juill. 2002, M.B., 13 nov. 2002,

que la difference de traitement entre personnes morales selon qu’elles disposent d’un organe demo-cratiquement elu ou non repose sur un critere objectif et que, partant, cette disposition ne violait pas lesart. 10 et 11 de la Constitution.

4. Les bourgmestres et echevins communaux sont donc exclus du champ d’application de la loi du 4 mai1999; pour un cas d’application, voy. notamment, Cass., 3 mars 1999, Rev. dr. pen., 1999, p. 1197; ceregime discriminatoire a cependant ete adouci pour les mandataires communaux par l’effet d’une loi du4 mai 1999 egalement (M.B., 28 juill. 1999) relative a la responsabilite civile et penale des bourgmes-tres, echevins et membres de la deputation permanente; sur cette loi, voy. A.Masset, ‘La loi du 4 mai1999 relative a la responsabilite civile et penale des bourgmestres, echevins et membres de ladeputation permanente’, in C.U.P., vol. 37, fevr. 2000, Le point sur le droit penal, pp. 249-267. Addela loi du 10 fevrier 2003 relative a la responsabilite des et pour les membres du personnel au service despersonnes publiques, M.B., 27 fevr. 2003, et les commentaires de cette loi par: L. Kerzmann, ‘La loidu 10 fevier 2003 relative a la responsabilite des agents des services publics’, R.G.A.R., 2004, p. 13877;par S. Covenaeker, ‘De nieuwe wet van 10 februari 2003 betreffende de aansprakelijkheid van en voorpersoneelsleden in dienst van openbare rechtspersonen’, R.G.D.C., 2003, p. 476 et s.; et par J. DeStaercke, C.D.P.K., 2003, p. 183-195. Adde, C.A., 12 janv. 2005, J.L.M.B., 2005, p. 595, obs.concluant a une absence de violation des art. 10 et 11 de la Constitution a propos de cette exclusion;comp. M. Nihoul, ‘L’immunite penale des collectivites publiques est-elle «constitutionnellementcorrecte»’ ?, Rev. dr. pen., 2003, pp. 799-839.

5. Il s’agit des C.P.A.S. vises a l’article 17bis de la loi organique du 8 juillet 1976, a savoir les C.P.A.S.des communes de la peripherie bruxelloise, de Comines et de Fourons.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 19, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 19

recherche de la responsabilite penale individuelle des personnes physiques composant

ces entites et groupements.

Enfin, le rapport parlementaire precise laconiquement que «il n’est pas explicite

que le changement de forme de la personne morale (par fusion, scission, absorption ou

changement de forme juridique) n’a en tant que tel pas d’influence sur la responsa-

bilite. Cela decoule cependant automatiquement des regles du droit des societes» 1.

Ph. Hamer

2

estime que, en dehors de ces hypotheses de fraude retenues par

l’article 20, alinea 2, du titre preliminaire du Code de procedure penale, la nouvelle

entite creee a la suite de la fusion ou de la scission ne ‘continue’ pas la personne

morale disparue et n’est plus tenue sur le plan penal des infractions eventuellement

commises par cette derniere avant l’operation de restructuration, contrairement aux

principes applicables a la responsabilite civile; il ajoute que cette solution ne trouvera

pas a s’appliquer en matiere de transfert de branche ou d’universalite car il n’y a pas de

disparition de la personne morale cedante; il poursuit en precisant qu’en cas de cession

de parts, la personnalite juridique de la societe cedante n’est pas affectee, seul

l’actionnariat se trouvant modifie, en telle sorte que la personne morale pourra etre

poursuivie ou condamnee pour des infractions commises avant la cession d’actions:

cet auteur attire des lors l’attention sur le soin particulier a mettre dans la redaction des

conventions de cession. Ajoutons qu’une societe en faillite peut etre poursuivie

penalement 3.

115 Le principe de la responsabilite penale des personnes morales: la personne

morale est punissable, tantot seule, tantot avec la personne physique

Le champ d’application de l’article 5 C.P.

‘Toute personne morale est penalement responsable des infractions qui sont intrinse-

quement liees a la realisation de son objet, ou a la defense de ses interets, ou de celles

dont les faits concrets demontrent qu’elles ont ete commises pour son compte’.

‘Lorsque la responsabilite de la personne morale est engagee exclusivement en

raison de l’intervention d’une personne physique identifiee, seule la personne qui a

commis la faute la plus grave peut etre condamnee. Si la personne physique identifiee

a commis la faute sciemment et volontairement, elle peut etre condamnee en meme

temps que la personne morale responsable’.

On ne dira jamais assez combien ce regime est alambique et inutilement

complique 4.

L’imputabilite materielle

Le regime nouveau de la responsabilite penale institue par la loi du 4 mai 1999 ne

trouve a s’appliquer que dans les hypotheses enumerees par la loi et qui concretisent

1. Rapport fait au nom de la Commission de la justice du Senat par Madame Jeanmoye, Doc. parl., Sen.,no 1217/6, p. 3; notons que l’article 13, alinea 2 de la loi nouvelle permet le maintien de l’exercice del’action publique dans ces hypotheses si cette transformation de la societe a eu pour but d’echapper a larepression – Doc. parl., Ch. repr., no 2093/5, pp. 38-39.

2. Ph. Hamer, ‘Incidence d’operations particulieres sur la responsabilite penale des personnes morales:constitution et dissolution de la societe, scission, cession de parts, de branche d’activite ou d’univer-salite’, in La responsabilite des personnes morales: punir plus ou punir mieux les entreprises?, Journeed’etude organisee par Skyroom Events, Bruxelles, 28 sept. 1999, 11 p., spec. pp. 4-6.

3. Corr. Gand, 28 janv. 2003, J.D.S.C. 2004, p. 334, note P. Lambrecht et V. Bosly, T.M.R. 2003, p.314.

4. M. Nihoul (s.l.d.), La responsabilite penale des personnes morales en Belgique – une evaluation de laloi du 4 mai 1999 apres cinq annees d’application, La Charte, 2004, pp. 17-164. Cette etude secomplete d’une analyse statistique du Service de la politique criminelle portant sur les jugements enapplication de la loi, pp. 275-306.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 20, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

20 – Livre 119.4 Kluwer

des lors le critere de l’imputabilite materielle de l’infraction 1 dans le chef de la

personne morale.

Ces hypotheses d’imputation materielle sont au nombre de trois, a savoir:

. lorsque les infractions en cause sont intrinsequement 2 liees a la realisation de

l’objet de la personne morale, ou

. lorsque les infractions en cause sont intrinsequement liees a la defense de ses

interets, ou

. lorsque les faits concrets demontrent que les infractions en question ont ete

commises pour le compte de la personne morale

Il peut s’en deduire que la responsabilite penale des personnes physiques concernees

est seule en cause dans les situations ou ces personnes physiques en lien avec la

personne morale n’ont fait que profiter du cadre juridique ou materiel de la personne

morale pour commettre des infractions dans leur interet ou pour leur compte; tel serait

le cas du dirigeant d’entreprise qui, par l’utilisation de la structure de la societe,

realiserait a son seul profit une escroquerie; il ne s’agissait pas pour la loi nouvelle

d’instaurer une responsabilite penale objective dans le chef de la personne morale

pour le seul motif que l’infraction aurait ete commise en son sein.

L’imputabilite morale

L’imputabilite morale de l’infraction dans le chef d’une personne morale a toujours

pose probleme aux penalistes.

En ce qui concerne l’article, 5 alinea 1er C.P., l’expose des motifs du projet de loi

enseigne: ‘Le projet n’explicite pas le mode d’imputation des faits a la personne

morale. Il a ete considere qu’il s’agit d’une question de fait qui doit etre laissee a

l’appreciation du juge. Il devra etre etabli soit que la realisation de l’infraction decoule

d’une decision intentionnelle prise au sein de la personne morale, soit qu’elle resulte,

par un lien de causalite determine, d’une negligence au sein de la personne morale. On

vise par exemple l’hypothese ou une organisation interne deficiente de la personne

morale, des mesures de securite insuffisantes ou des restrictions budgetaires derai-

sonnables ont cree les conditions qui ont permis la realisation de l’infraction; le juge se

basera cependant sur l’attitude des organes au sein de la personne morale, y compris

les organes de fait, qui ne peuvent pas necessairement etre identifies comme personnes

physiques; la responsabilite penale de la personne morale peut aussi etre la conse-

quence de faits materiels commis par certains de ses preposes ou mandataires’.

Ces precisions peuvent paraıtre contradictoires en ce que, pour apprecier l’element

moral requis dans le chef de la personne morale, la loi donne pour seul guide au juge la

reference a l’attitude d’une serie de personnes physiques rattachees de pres ou de loin

a ladite personne morale.

L’expose des motifs precise encore: ‘Elles (= les instances dirigeantes) doivent

alors au moins avoir eu connaissance de l’intention de commettre l’infraction et y

avoir consenti ou bien avoir incite elles-memes a la commission de l’infraction. Dans

le cas d’infractions non intentionnelles, il devra etre demontre qu’elles ont eu

connaissance du risque de realisation de l’infraction et ont neglige de prendre les

mesures pour eviter celle-ci. Si la loi requiert un dol general ou special comme

element constitutif, il sera necessaire d’etablir que celui-ci est egalement present dans

le chef des instances dirigeantes’.

1. Ph. Deruyck, R.D.C., o.c., p. 654.2. ‘Intrinsequement’ est a comprendre par opposition a ‘occasionnellement’, selon Chambre, Doc. parl.

no 2093/5, p. 26; ce terme renforce l’idee du lien de l’infraction avec la personne morale et tente ainside preciser le caractere exceptionnel de cette responsabilite penale.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 21, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 21

Cumul ou non des responsabilites penales

L’article 5, alinea 2, C.P.

L’article 5 alinea 2 devrait permettre de faire un sort a la question du concours ou du

cumul des responsabilites penales de la personne morale et d’une ou de plusieurs

personnes physiques identifiees, pour une meme infraction, cumul qui s’opposerait au

principe de subsidiarite de la responsabilite penale de la personne morale par rapport a

celle de la personne physique.

Observons en preambule une contradiction in terminis puisque les regles du cumul

prennent place, selon l’expression meme de la loi, lorsque la responsabilite penale de

la personne morale est engagee exclusivement en raison de l’intervention d’une

personne physique identifiee: ‘cumul’ et ‘exclusivement’ sont evidemment antinomi-

ques et le legislateur aurait pu se dispenser de ce genre de bourdes.

Il est a preciser que l’absence d’identification concrete d’une personne physique, ce

qui exclura toute possibilite de cumul, peut se presenter dans les hypotheses d’in-

fractions ayant eu recours au mecanisme deja explique de l’imputation legale 1, ou

dans les hypotheses ou les infractions se concretisent dans des decisions emanant d’un

organe collegial, ou lorsque les faits sont tels 2.

Les travaux preparatoires sont contradictoires en ce qu’il n’est pas possible de

determiner le champ d’application des hypotheses de cumul ou d’absence de cumul: la

divergence d’opinions entre les auteurs de doctrine 3 a ete tranchee par la jurispru-

dence et par un arret de la Cour de cassation 4.

En substance, il n’importe pas de savoir si l’element moral requis par le texte penal

est a situer dans les infractions volontaires ou involontaires ou reglementaires; le seul

critere qui importe est de s’arreter aux faits et d’examiner comment la personne

physique d’une part, la personne morale d’autre part ont agi en scrutant l’etat d’esprit

concret de chacune des personnes au moment de l’infraction; si les faits demontrent

1. L’expose des motifs, pp. 5-6, en reponse a une critique emise par le Conseil d’Etat, indique quel’adoption du projet de loi imposera, a terme, l’examen de l’opportunite de la suppression deslegislations qui ont eu recours aux mecanismes de l’imputation legale ou conventionnelle, afin d’eviterdes contradictions entre les principes poses par le projet et ceux repris dans ces legislations; il estprecise que cet examen devra aussi concerner le mecanisme de la responsabilite civile des personnesmorales pour le paiement des amendes prononcees a charge des organes de la personne morale, et lemecanisme des sanctions administratives; ces questions ont egalement ete debattues au Parlement, voy.Senat, Doc. parl., no 1217/6, p. 19 et 29-30, et rencontrees, pour la premiere par l’adoption del’art. 50bis nouveau du Code penal, pour la seconde par le principe non bis in idem d’apres les diresdu ministre de la Justice (Chambre, Doc. parl., no 2093/5, p. 3). Cette imputabilite legale paraıt avoirete abrogee implicitement, voy. M. Nihoul (s.l.d.), La responsabilite penale des personnes morales enBelgique – une evaluation de la loi du 4 mai 1999 apres cinq annees d’application, La Charte, 2004, pp.76-85.

2. Senat, Doc. parl., no 1217/6, p. 9: ‘Comment prouve-t-on le dol special sans aboutir materiellementchez une personne physique? Le ministre affirme que, dans la plupart des cas, les personnes physiquesseront identifiees. On peut cependant imaginer, au sein d’une organisation, un recours systematique ades faux, sans pouvoir identifier la personne qui a materiellement ecrit le document. Par les circon-stances de fait (multiplication des faux dans le temps et le nombre), le juge peut etre convaincu qu’ils’agit d’une pratique de la personne morale meme. Il n’est pas necessaire de constater que tellepersonne identifiee a materiellement etabli le document en question’.

3. Sur l’expose de cette controverse et sa formulation in abstracto v. in concreto, voy. Ph. Traest, T.R.V.,o.c., pp. 466-469.

4. Cass., 4 mars 2003, J.L.M.B., 2004, p. 24, concl. av. gen. M. De Swaef, dans une hypothesed’infraction reglementaire de degats causes au revetement routier par surcharge d’un moyen detransport (violation de l’art. 56 du decret flamand du 19 dec. 1998 contenant diverses mesuresd’accompagnement du budget 1999). Il est a noter que cet article, interprete en ce sens qu’il etablitune presomption irrefragable d’endommagement du revetement routier, viole les art. 10 et 11 de laConstitution, combines avec l’art. 6.2 CEDH et avec l’art. 14.2 PIDCP, mais qu’il ne viole pas cesarticles s’il est interprete en ce sens qu’il n’etablit pas une presomption irrefragable, selon C.A., n8 81/2003, 11 juin 2003, M.B., 7 nov. 2003.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 22, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

22 – Livre 119.4 Kluwer

qu’elles ont agi l’une et l’autre sciemment et volontairement, le cumul est alors

possible; par contre, si les faits demontrent qu’elles n’ont pas agi l’une et l’autre

sciemment et volontairement, seule la personne qui a commis la faute la plus grave est

condamnee.

Si l’infraction traduit un comportement intentionnel ou volontaire (par exemple,

une infraction de corruption), tant la personne morale que la personne physique

peuvent 1 etre condamnees conjointement, par application des regles du cumul des

responsabilites (le cumul est donc possible). Par contre, si l’infraction traduit un

comportement non intentionnel ou involontaire (par exemple, une infraction d’homi-

cide involontaire commise sur un chantier ou un ouvrier d’usine a trouve la mort a la

suite de l’utilisation d’un materiel defectueux parce que non entretenu), seule sera

condamnee la personne, morale ou 2 physique, qui a commis la faute la plus grave 3

dans un travail d’appreciation des fautes respectives 4 qui est abandonne a la sagesse

des juges 5, en telle sorte que le cumul est exclu dans ce cas.

En resume, si le dossier revele des comportements intentionnels, le cumul des

responsabilites de la personne physique et de la personne morale est possible, alors

qu’il est interdit si le dossier revele des comportements non-intentionnels 6.

Le non-cumul des amendes dans le chef du civilement responsable

Dans le cadre d’un autre cumul, a savoir le cumul des responsabilites penale et civile

pour autrui, c’est de maniere apparemment opportune 7 que l’article 50bis nouveau du

Code penal porte que ‘nul ne peut etre tenu civilement responsable du paiement d’une

1. Il a ete juge par la Cour d’arbitrage, dans l’arret precite du 10 juill. 2002, que le pouvoir d’appreciationainsi attribue au juge n’est pas plus large que celui dont il dispose de maniere generale en matierepenale, en telle sorte qu’il n’y a pas atteinte discriminatoire au principe de legalite des incriminations.

2. C.A., 5 mai 2004, J.L.M.B., 2004, p. 1748, obs. L. Bihain.3. La cause d’excuse absolutoire ainsi instituee par la loi nouvelle a ete jugee ne s’appliquer qu’aux

infractions commises apres l’entree en vigueur de la loi, par Cass., 3 oct. 2000, J.L.M.B., 2001, p. 408,obs. L. Bihain, et Rev. dr. pen., 2001, p. 865, conclusions ministere public M. De Swaef, et A.J.T.,2000-2001, p. 493, note H. Van Bavel, alors que certaines juridictions de fond avaient decide en senscontraire a la lumiere de l’article 2, alinea 2 du Code penal (Anvers, 22 juin 2000, A.J.T., 2000-2001, p.327; comp. note B. Spriet sub Cass., 14 janv. 2000, T. Strafr., 2000, p. 222): la Cour de cassation ainvoque l’objectif poursuivi par la nouvelle disposition legale pour fonder sa solution. M. Nihoul,‘Contre l’abrogation implicite en matiere de responsabilite penale des personnes morales au nom de lasecurite juridique’, C.D.P.K., 2004, pp. 1-62. La Cour a confirme cette jurisprudence par Cass., 26 fevr.2002, Rev. dr. pen., 2003, p. 1065, A.J.T., 2001-2002, liv. 38, 1005, note H. Van Bavel, et R.W., 2002-2003, liv. 4, 134, concl. M. De Swaef, en justifiant egalement cette solution par rapport aux art. 7 de laConvention europeenne des droits de l’homme et 15, § 1er, du Pacte international relatif aux droitscivils et politiques (voy. le rapport de la Cour de cassation, 2002, pp. 94-95). Dans le meme sens, Cass.,11 dec. 2002, J.T., 2003, p. 547. Adde, C.A., 9 avril et 2 juill. 2003, arrets nos 42/2003 et 99/2003,M.B.,28 juill. 2003 et 17 nov. 2003, qui tranchent que l’art. 5, al. 2, C.P. ne viole pas les art. 10 et 11 de laConstitution en tant qu’il ne s’applique pas aux faits commis avant son entree en vigueur.

4. L’art. 5, al. 2, C.P., ne trouve a s’appliquer que si la personne morale et la personne physiquepoursuivies le sont pour le meme fait infractionnel; Cass., 10 mars 2004, n8 P.03.1233.F, sur le siteinternet de la Cour.

5. Par l’arret precite du 10 juill. 2002, la Cour d’arbitrage a estime que le large pouvoir d’appreciationainsi attribue au juge n’etait pas discriminatoire et que la disposition ne violait pas l’exigence deprevisibilite a laquelle doit satisfaire toute disposition penale.

6. Voy. pour un exemple particulier Corr. Bruxelles, 8 dec. 2004, Chron. D.S. 2005, 460, note P.Brasseur: ‘En cas d’homicide involontaire, toute faute, meme legere, constitue un defaut de pre-

voyance ou de precaution au sens de l’article 418 du Code penal. C’est le cas, par exemple, du

harcelement qui depasse la simple tracasserie et qui ne peut etre considere comme une reaction

normale a un eventuel dysfonctionnement de la victime.

Lorsqu’un delit non intentionnel est la consequence directe de fautes intentionnelles commises par des

personnes physiques dont une personne morale est responsable et que ces fautes sont en rapport avec

l’execution des taches par ces personnes physiques, la personne morale ne peut invoquer le decumul de

la responsabilite penale prevu a l’article 5 alinea 2 du Code penal.’7. Senat, Doc. parl. no 1217/6, p. 30: ‘Le ministre rappelle qu’il s’agit d’eviter le cumul de la responsa-

bilite civile pour une peine, avec la peine elle-meme.’

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 23, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 23

amende a laquelle une autre personne est condamnee, s’il est condamne pour les

memes faits’.

Cette disposition a cependant perdu de vue d’une part que les dispositions du livre

Ier du C.P. sont, par l’effet de l’article 100 C.P. ou par une disposition speciale,

applicables a toutes les legislations particulieres, sauf exceptions, et d’autre part que

bon nombre de legislations particulieres, par exemple le Code d’impots sur les

revenus, declarent, par une disposition speciale, les personnes morales civilement

responsables du paiement des amendes prononcees contre les personnes physiques de

l’entreprise 1: cette omission du legislateur a pour effet de priver d’utilite cet

article 50bis C.P. et ne met donc pas l’entreprise, elle-meme condamnee a une

amende, a l’abri de sa responsabilite civile pour le paiement de l’amende prononcee

contre son dirigeant ou son prepose lui-meme condamne a une amende 2.

La situation de la victime en l’absence de cumul

Il a ete juge a plusieurs reprises que la personne, physique ou morale, qui beneficie de

la cause d’excuse inscrite dans l’article 5 du Code penal, reste cependant tenue des

consequences civiles envers la victime 3.

120 Le regime des sanctions penales applicables aux personnes morales declarees

coupables

De maniere resumee, il peut etre precise que les sanctions penales pouvant venir

frapper une personne morale reconnue coupable, sont les suivantes, telles qu’elles

apparaissent dans le nouvel article 7bis du Code penal 4:

1. L’amende

La peine de privation de liberte etant evidemment inconcevable pour sanctionner une

personne morale, l’amende devient la peine principale applicable a toutes les infrac-

tions commises par les personnes morales.

L’idee de base, traduite dans le nouvel article 41bis du Code penal, est de retenir un

systeme de conversion des peines privatives de liberte applicables aux personnes

physiques, en peines d’amende a appliquer aux personnes morales.

Le droit penal belge reste construit sur une classification tripartite des infractions

(crimes-delits-contraventions) par reference a la gravite de la peine (de privation de

liberte essentiellement, d’amende accessoirement) attachee a toute incrimination.

Des lors, lorsque l’incrimination porte, pour les personnes physiques, une peine

correctionnelle ou criminelle privative de liberte et/ou une amende correctionnelle ou

criminelle, l’amende applicable a la personne morale sera une amende minimale de

500 euros multiplies par le nombre de mois 5 correspondant au minimum de la peine

privative de liberte (avec un strict minimum ne pouvant etre inferieur au minimum de

l’amende prevue par la loi pour sanctionner une personne physique du chef de cette

infraction), et dont le maximum s’eleve a 2.000 euros multiplie par le nombre de mois

correspondant au maximum de la peine privative de liberte (ce maximum ne peut etre

1. Voy. p. ex. les art. 457 et 458 , al. 2, C.I.R.2. Ph. Traest, T.R.V., o.c., pp. 469-471.3. C. trav. Anvers, 12 juin 2002, Chron. dr. soc., 2003, p. 97; Corr. Liege, 28 mars 2003, J.L.M.B., 2003,

p. 1331, et T. Straf., 2004, p. 187, note S. Van Dyck.4. M. Nihoul (s.l.d.), La responsabilite penale des personnes morales en Belgique – une evaluation de la

loi du 4 mai 1999 apres cinq annees d’application, La Charte, 2004, pp. 165-241.5. Le legislateur a perdu de vue que de nombreuses reglementations de droit penal des affaires portent,

comme peine minimum d’emprisonnement, une peine de 8 jours, pour laquelle il n’existe donc aucunsysteme de conversion; dans ce cas, il nous paraıt que la peine d’amende doit s’etablir au minimum dela peine d’amende correctionnelle, soit 26 F.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 24, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

24 – Livre 119.4 Kluwer

inferieur au double du maximum de l’amende prevue par la loi pour sanctionner une

personne physique du chef de cette infraction); en ce qui concerne la peine criminelle

de reclusion a perpetuite, elle est convertie, pour les personnes morales, en une

amende de 240.000 a 720.000 euros, ce qui, compte tenu de la loi du 5 mars 1952

(modifiee par L. du 7 fevr. 2003: coefficient multiplicateur de 5,5) relative aux

decimes additionnels sur les amendes penales 1, porte cette amende en realite a un

total compris entre 1.320.000 et 3.960.000 euros.

L’exemple d’une infraction de corruption active de fonctionnaires peut servir a

illustrer ce mecanisme de conversion: la personne physique coupable de cette

infraction encourt, selon les articles 252 et 247 du Code penal, un emprisonnement

correctionnel de trois mois a trois ans et une amende de 100 a 3.000 euros; la personne

morale encourra donc une peine principale d’amende correctionnelle dont le mini-

mum sera de 5006 3 = 1.500 euros (qui, de fait, n’est pas inferieur a 100 euros), et

dont le maximum sera de 20006 36 = 72.000 euros (qui, de fait, n’est pas inferieur a

6.000 euros); la personne morale encourt donc une amende de 1.500 a 72.000 euros

portes, par le jeu des decimes additionnels, a une fourchette comprise entre 8.250 et

396.000 euros.

Lorsque la peine prevue par la loi est seulement une amende correctionnelle ou

criminelle, aucune conversion n’est necessaire puisque la loi precise que l’amende

pouvant frapper la personne morale est la meme que l’amende pouvant frapper une

personne physique pour le meme fait.

Lorsque la peine prevue par la loi est une peine principale de privation de liberte et/

ou d’amende de police, l’amende pouvant venir frapper la personne morale est une

amende de 25 a 250 euros (a savoir, avec l’effet multiplicateur, de 137,50 et

1.375 euros).

L’article 41bis, § 2 nouveau du Code penal signifie que les principes generaux du

droit penal compris dans les articles 1 a 100bis du Code penal trouvent a s’appliquer

pour cette peine principale d’amende; cette consideration implique notamment la

possibilite de reduction de la peine d’amende par l’effet de la reconnaissance des

circonstances attenuantes. Il a ete precise que la conversion en question devait etre

effectuee avant d’appliquer les majorations ou diminutions liees aux circonstances

attenuantes, tentative, recidive, concours, participation... 2.

Par l’effet de l’article 21 de la loi du 4 mai 1999 emportant insertion d’un article

18bis dans la loi du 29 juin 1964 concernant la suspension, le sursis et la probation, le

meme mecanisme de conversion de la peine privative de liberte pour les personnes

physiques en peine d’amende pour les personnes morales, est integre pour permettre a

ces dernieres de beneficier egalement de ces mesures de faveur; il peut etre pense,

comme exemple de mesure de sursis probatoire, a l’obligation de realiser dans un delai

determine des investissements dans des amenagements de securite au sein de l’en-

treprise condamnee pour homicide involontaire ou de presenter une nouvelle organi-

sation interne de nature a mettre fin a un climat deletere precedent. Observons que le

recours a ces mesures probatoires pourrait permettre de satisfaire les auteurs de

doctrine qui appelaient de leurs vœux un regime, non de sanctions penales, mais bien

de mesures de surete.

1. Le jeu des decimes additionnels a ete confirme par le ministre de la Justice – Doc. parl., Sen., no 1217/6, p. 27. Par l’effet de l’entree en vigueur de l’euro, les amendes exprimees en francs sont converties eneuros et le coefficient multiplicateur des decimes additionnels est a present porte a 5,5.

2. Voy. les amendements no 16 et 17, Doc. parl., Sen., no 1217/6, pp. 27-28. Ce systeme de conversionavant application des principes generaux est impraticable, en telle sorte que le seul systeme satisfaisantdoit etre le systeme inverse: appliquer par exemple d’abord les circonstances attenuantes puis convertirla privation de liberte obtenue en amende; en ce sens, voy. J. Messinne, Rev. dr. pen., o.c., p. 648 etPh. Traest, T.G.R., o.c., p. 473.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 25, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 25

L’article 21ter du titre preliminaire du code de procedure penale, introduit par la loi

du 30 juin 2000 (M.B., 2 dec. 2000), vaut egalement pour les personnes morales: en

cas de depassement, par les poursuites penales, du delai raisonnable, le juge peut

prononcer la condamnation par une simple declaration de culpabilite ou prononcer une

peine inferieure a la peine minimale prevue par la loi.

2. La confiscation speciale

Cette peine accessoire importante s’inscrit dans la reforme du droit belge qui avait

deja complete la matiere de la confiscation pour, par application des articles 42 a 43ter

du Code penal, etendre cette mesure a la confiscation des avantages patrimoniaux tires

directement de l’infraction, la confiscation des biens et valeurs qui ont ete substitues a

ces avantages et la confiscation des revenus de ces avantages investis 1.

Le nouvel article 7bis du Code penal interdit cependant la confiscation des choses

formant l’objet de l’infraction et des choses qui ont servi ou qui ont ete destinees a

commettre l’infraction quand ces choses s’identifient a des biens appartenant a la

personne morale de droit public condamnee et declares civilement insaisissables 2.

3. La dissolution

La dissolution de la personne morale condamnee peut etre decidee par le juge lorsque

la personne morale a ete intentionnellement creee afin d’exercer les activites punissa-

bles pour lesquelles elle est condamnee ou lorsque son objet a ete intentionnellement

detourne afin d’exercer de telles activites.

On peut imaginer que cette sanction ne devrait etre prononcee dans cette derniere

hypothese que si le detournement d’objet de la personne morale est repete et

systematique, plutot que resultant d’un fait isole ou d’une serie isolee de faits 3.

Cette dissolution ne peut cependant pas etre prononcee a l’egard des personnes

morales de droit public condamnees, mais pourrait frapper des personnes morales de

droit prive, souvent des A.S.B.L., qui exercent une mission de service public comme

par exemple des asbl agreees dans le domaine de l’accueil des enfants.

L’article 35 C.P. precise que, lorsqu’il decide la dissolution, le juge renvoie 4 la

cause devant la juridiction competente pour connaıtre de la liquidation de la personne

morale: l’exemple-type peut concerner les societes ecrans ou les societes ‘coquilles

vides’ dans le cadre de carrousels TVA; l’interet de poursuites penales peut alors peut-

etre resider dans la peine de confiscation.

1. Sur cette modification de la legislation en matiere de confiscation realisee par l’introduction en droitbelge de l’incrimination de blanchiment (ou recel elargi), voy. J. Messinne, ‘La loi du 17 juillet 1990modifiant les articles 42, 43 et 505 du Code penal et inserant un article 43bis dans ce meme Code’, J.T.,1991, pp. 484-493; J. Pardon, ‘Le blanchiment d’argent et la lutte contre la criminalite axee sur leprofit’, Rev. dr. pen., 1992, pp. 741-757; A. Masset, L’infraction de blanchiment, Formationpermanente C.U.P., Liege, vol. VII, 1996, pp. 291-313.

2. Cette notion renvoie en realite a l’article 1412bis du Code judiciaire. C. Nyssens, ‘Le principe del’immunite d’execution des pouvoirs publics assoupli par le legislateur’, R.R.D., 1994, pp. 299-311;A. Stranart et P.Goffaux, ‘L’immunite d’execution des personnes publiques et l’article 1412bis duCode judiciaire’, J.T., 1995, pp. 437-447; adde Bruxelles 19 nov. 1997, R.W., 1997-1998, 1290:‘Lorsque l’administration n’a pas fait la declaration visee a l’art. 1412bis C. jud., une saisie peut etrepratiquee sur les biens qui ne sont manifestement pas utiles pour la continuite du service public. Ainsidonc une saisie peut etre pratiquee sur le prix du suite a la vente d’un aerodrome desaffecte parce quel’administration ne declare pas que le produit de cette vente doit recevoir une destination urgentedeterminee’.

3. Les discussions parlementaires semblent limiter l’hypothese a la personne morale qui, des l’origine, adeveloppe ces activites illicites – Doc. parl., Sen., no 1217/6, p. 6: ‘Seules les personnes morales qui sesont placees dans l’illegalite des leur creation pourront donc etre dissoutes en vertu de cette disposi-tion’; contra, Doc. parl., Ch., no 2093/5, pp. 32-33.

4. Sur la periode d’hiatus entre ces deux evenements, voy. Ch. Vanderlinden, Rev. dr. pen., o.c.,pp. 673-674.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 26, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

26 – Livre 119.4 Kluwer

4. L’interdiction d’exercer une activite relevant de l’objet social

Cette interdiction, temporaire ou definitive, ne pourra etre prononcee que dans les cas

prevus par la loi, ce qui demandera des modifications legislatives ulterieures 1; celles-

ci pourraient par exemple prevoir une interdiction definitive en cas de recidive; ces

legislations ulterieures devront preciser la sanction encourue en cas de non-respect de

cette interdiction.

L’expose des motifs du projet precise que, normalement, seront interdites par le

juge les activites a l’occasion ou dans le cadre desquelles l’infraction par laquelle la

personne morale a ete condamnee, a ete commise; on pense par exemple a une

interdiction de se porter candidat a l’attribution de marches publics venant frapper

une personne morale faisant l’objet d’une condamnation du chef de corruption ou de

faux en ecritures dans une procedure d’attribution.

Le prononce de cette interdiction ne peut cependant porter sur des activites qui

relevent d’une mission de service public.

5. La fermeture

Cette fermeture, temporaire ou definitive, d’un ou de plusieurs etablissements de la

personne morale condamnee, ne pourra etre prononcee que dans les cas prevus par la

loi, ce qui demandera des modifications legislatives ulterieures.

Le prononce de cette fermeture ne peut cependant frapper des etablissements ou

sont exercees des activites qui relevent d’une mission de service public.

Le legislateur n’a pas adopte une sanction intermediaire qui aurait consiste, comme

dans d’autres pays, a prevoir l’envoi d’un administrateur special dans l’entreprise aux

fins d’y faire effectuer, aux frais de l’entreprise condamnee, les mesures necessaires

au respect de la legislation transgressee 2.

6. La publication ou la diffusion de la decision

Cette peine, principale ou accessoire 3, de publication ou de diffusion de la decision de

condamnation aux frais de la personne morale condamnee, ne pourra etre prononcee

que dans les cas prevus par la loi, ce qui demandera des modifications legislatives

ulterieures.

130 Les dispositions de procedure penale propres a la repression des infractions

commises par les personnes morales

La nouvelle loi retient l’attention sur le plan de la procedure penale a propos de

quelques particularites.

1. La representation en justice de la personne morale poursuivie penalement

L’article 18 de la loi precise que la personne morale comparaıt, en qualite de prevenu,

en personne, ce qui renvoie ainsi aux regles statutaires de la personne morale, ou se

fait representer par un avocat.

L’article 12 de la loi precise que lorsque des poursuites pour les memes faits ou

pour des faits connexes sont engagees a l’encontre d’une meme personne physique en

1. Il se deduit du rejet de l’amendement no 3 du depute Lozie que ces precisions legislatives a venir nesont pas de nature a differer l’entree en vigueur de l’ensemble de la loi du 4 mai 1999 – Doc. parl., Ch.,no 2093/5, pp. 34-35.

2. L’amendement no 6 presente en ce sens a ete rejete – Doc. parl., Sen., no 1217/2, pp. 1-2 et no 1217/6,p. 26.

3. Doc. parl., Sen., no 1217/6, pp. 25-26: ‘Le ministre explique que l’on part de l’idee que la publicationpeut etre une peine principale, qui revet un caractere autonome et qui ne peut etre prononcee que dansles cas prevus par la loi. La vision qui preside a la proposition lui paraıt correcte et correspondre a larealite sociale. Il s’agit d’une sanction specifique’.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 27, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 27

sa double qualite de representant de la personne morale contre laquelle s’exerce

l’action publique et de personne physique identifiee, c’est-a-dire dans les hypotheses

de cumul des responsabilites, le tribunal designe un mandataire ad hoc pour repre-

senter la personne morale 1.

La question se pose de savoir quels organes de decision de la personne morale ce

mandataire ad hoc va pouvoir rencontrer pour organiser utilement la defense penale de

la personne morale, lorsque, precisement, le seul organe de decision est lui-meme

poursuivi en qualite de personne physique.

Observons encore que cette disposition de representation par un mandataire ad hoc

n’est prevue que sur designation, d’office ou sur requete, par le tribunal competent

pour connaıtre de l’action publique: les droits de la defense propres a la personne

morale ne sont donc organises de cette maniere qu’au stade du jugement, alors que les

reformes recentes demontrent l’importance d’une defense penale des les stades de

l’information et de l’instruction; cette lacune penalisera gravement la defense penale

propre de la personne morale 2.

2. L’exercice de l’action publique en depit de la dissolution de la personne morale

Il est a craindre qu’une personne morale poursuivie penalement entre en liquidation

volontaire pour, par la cloture de la liquidation, aboutir a sa «mort» et echapper ainsi

aux poursuites; la nouvelle loi precise que l’action publique subsiste dans cette

hypothese ou le but est ainsi d’echapper aux poursuites; une meme survivance penale

est prevue lorsque la personne morale a ete inculpee par le juge d’instruction avant la

perte de la personnalite juridique.

Qui supportera effectivement les peines prononcees, des lors que, par hypothese, la

personne morale etant dissoute, elle n’est plus proprietaire du moindre bien: selon les

travaux preparatoires, il appartient aux liquidateurs, sous leur responsabilite, de veiller

a ce que cette obligation au paiement de l’amende soit respectee 3. La loi nouvelle

prevoit certes que l’action civile peut etre exercee contre l’inculpe et contre ses ayants

droit, mais d’une part cette disposition ne concerne que l’action civile et non pas la

peine d’amende par exemple, et d’autre part il est permis de s’interroger sur l’identite

des ayants droit d’une personne morale.

La loi nouvelle precise encore que la perte de la personnalite juridique de la

personne morale condamnee n’eteint pas la peine.

3. La competence territoriale des autorites judiciaires

Le critere permettant de determiner les autorites judiciaires territorialement compe-

tentes etant traditionnellement le lieu ou l’infraction a ete commise, le lieu de

residence de l’inculpe ou le lieu ou il a ete trouve, la loi nouvelle ajoute, pour les

personnes morales, le lieu du siege social ou du siege d’exploitation de cette personne

morale.

1. M. Nihoul (s.l.d.), La responsabilite penale des personnes morales en Belgique – une evaluation de laloi du 4 mai 1999 apres cinq annees d’application, La Charte, 2004, pp. 335-363.

2. L’affirmation presentee en Commission de la justice de la Chambre par le representant du ministreselon laquelle le tribunal competent peut designer un mandataire ad hoc avant l’audience si cela s’averenecessaire, releve plus de la methode Coue que de la demonstration juridique – Doc. parl., Ch. repr.,no 2093/5, pp. 37-38. A suivre ce raisonnement, ce serait donc a la cour d’assises de designer unadministrateur ad hoc dans une affaire de faux en ecritures toujours a l’instruction et, donc, non encorecorrectionnalisee. La pratique de certains juges d’instruction de designer eux-memes cet adminis-trateur, pour realiste et commode qu’elle soit, n’en demeure pas moins totalement contraire au texteclair de la loi, en l’espece l’article 2bis du titre preliminaire du code de procedure penale; en faveur decette solution pratique, voy. Ph. Traest, T.G.R., o.c., p. 483.

3. Doc. parl., Ch. repr., no 2093/5, pp. 36-40.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 28, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

28 – Livre 119.4 Kluwer

4. Les mesures provisoires

Puisque le juge d’instruction peut intervenir par le biais de la detention preventive

envers les personnes physiques contre lesquelles il existe des indices serieux de

culpabilite d’un crime ou d’un delit punissable d’un emprisonnement superieur ou

egal a une annee, la loi nouvelle a voulu permettre la prise de mesures provisoires

conservatoires a l’encontre des personnes morales.

Le nouvel article 91 du Code d’instruction criminelle permet ainsi au juge

d’instruction, en cas de constatation d’indices serieux de culpabilite de toute infraction

(sans exigence d’un seuil de gravite) dans le chef d’une personne morale, cumulee a la

constatation de circonstances particulieres (non autrement precisees que par le

recours a la necessite de la mesure provisoire envisagee – sic), de prendre trois types

de mesures provisoires:

– soit la suspension de toute procedure de dissolution ou de liquidation de la

personne morale,

– soit l’interdiction de transactions patrimoniales specifiques susceptibles d’entraı-

ner l’insolvabilite de la personne morale,

– soit le depot d’un cautionnement.

Observons que ce regime de mesures provisoires est reserve au juge d’instruction, ce

qui en interdit l’application au stade de l’information menee par le procureur du Roi;

ce dernier devra necessairement, s’il souhaite voir ces mesures provisoires ordonnees,

requerir une instruction sans pouvoir recourir a la mini-instruction de l’arti-

cle 28septies du Code d’instruction criminelle 1.

L’esprit de ces mesures provisoires apparaıt donc clairement comme la mise en

place d’un dispositif judiciaire permettant d’assurer l’effectivite de la condamnation

penale qui pourrait intervenir, specialement le recouvrement de l’amende et la mise en

œuvre de la confiscation speciale; l’article 35bis du meme code est adequatement

rappele: il concerne la saisie immobiliere conservatoire en matiere penale 2 et il

complete les mesures deja connues de saisies de droit commun telles qu’organisees

par les articles 35 et 89 du Code d’instruction criminelle.

Si la legislation relative a la detention preventive des personnes physiques prevoit

un eventail de recours judiciaires et de controles periodiques, ces recours sont a

trouver, contre ces mesures provisoires concernant les personnes morales, dans le

refere penal de l’article 61quater du Code d’instruction criminelle 3.

La loi a cependant omis d’assurer la publicite de ces mesures provisoires afin d’en

avertir les tiers, en dehors des mesures de publicite de l’article 35bis C.I.C. pour les

1. Les mesures provisoires supposent en effet qu’une instruction soit ouverte, alors que la mini-instructionne peut pas s’appliquer lorsque l’instruction des faits est ouverte.

2. Sur cette mesure conservatoire, voir D. Vandermeersch, ‘La loi du 20 mai 1997 sur la cooperationinternationale en ce qui concerne l’execution de saisies et de confiscations – L’introduction en droitbelge de la saisie immobiliere penale’, Rev. dr. pen., 1997, pp. 691-704; C.Meunier, ‘Du neuf dans lespouvoirs de saisie penale par le juge d’instruction et dans les possibilites de confiscation penale’, notesous Corr. Arlon, 6 sept. 1996, J.L.M.B., 1997, pp. 1447-1461; C.Meunier, ‘Le recours contre la saisieconservatoire penale a l’aube de l’entree en vigueur du refere penal’, note sous Liege (mis. acc.), 28 mai1998, J.L.M.B., 1998, pp. 1174-1177, cette derniere decision, approuvee par l’annotateur, precisant que‘la saisie immobiliere conservatoire n’est pas legale en ce qu’elle concerne des biens acquis anterieu-rement a la periode infractionnelle’.

3. Article introduit par L. du 12 mars 1998 relative a l’amelioration de la procedure penale au stade del’information et de l’instruction; sur cette reforme, voir M. Franchimont e.a., ‘La loi belge du12 mars 1998 relative a l’amelioration de la procedure penale au stade de l’information et del’instruction’, Dossiers de la Rev. dr. pen., no 3, Bruxelles, La Charte, 1998, 135 p.; X, La loi du

12 mars 1998 reformant la procedure penale, ed. Collection scientif. Fac. Dr. Liege, C.U.P., 1998,411 p. L’article 28sexies C.I.C. n’a pas a etre mentionne puisque cet article organise le refere penal dansle cadre de l’information et que nous avons observe que les mesures provisoires nouvelles n’etaient pasde la competence du procureur du Roi.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 29, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 29

biens immeubles; ainsi, l’interdiction de certaines transactions n’est en rien portee a la

connaissance des tiers qui contracteraient de bonne foi.

Bien plus, la loi n’a pas plus enonce les sanctions qui viendraient frapper le non-

respect de ces mesures provisoires: ni l’article 507 ni l’article 507bis C.P. ne

paraissent pouvoir s’appliquer.

5. Le casier judiciaire des personnes morales

La loi nouvelle a egalement prevu l’inscription des condamnations prononcees contre

les personnes morales, dans une espece de casier judiciaire des personnes morales tenu

au greffe de la juridiction ou les statuts de cette personne morale avaient ete deposes.

La loi a donc rendu ces condamnations publiques alors que le casier judiciaire d’une

personne physique n’est pas accessible de la sorte.

La loi n’a pas prevu l’inscription au ‘casier judiciaire’ des personnes morales des

differentes transactions administratives qui fleurissent pourtant dans le droit penal des

affaires.

140 Le probleme classique et epineux de l’application de la loi nouvelle dans le temps

Qui dit loi nouvelle dit evidemment probleme d’application de cette loi nouvelle dans

le temps: ce probleme, pourtant si classique, n’a, pas plus ici qu’ailleurs, fait l’objet de

debats parlementaires.

Les articles 12 a 20 de la loi, ci-avant examines au rang des dispositions speciales

de procedure penale, trouvent application immediate, en ce compris des lors aux

procedures en cours, puisqu’il s’agit de dispositions de procedure visees par l’article 3

du Code judiciaire.

La question est par contre plus delicate en ce qui concerne les dispositions de fond,

c’est-a-dire celles qui enoncent le principe d’une responsabilite penale, qui enoncent une

peine ou qui organisent un regime de repression: il s’agit en l’espece des articles 2 a 11 et

21 de la loi nouvelle qui integrent ou modifient des dispositions dans le Code penal et qui

completent la loi du 29 juin 1964 concernant la suspension, le sursis et la probation.

A ce titre, il est manifeste, sur la foi de l’article 2 alinea 1er du Code penal, que les

personnes morales ne pourront voir leur responsabilite penale recherchee que pour les

faits posterieurs au 1er juillet 1999.

Mais que penser de la personne physique actuellement poursuivie penalement

(c’est-a-dire non encore condamnee de maniere definitive) pour des faits anterieurs

au 2 juillet 1999 en sa qualite d’organe de droit ou de fait ou de prepose tenu, par

application de la theorie jurisprudentielle de l’imputabilite judiciaire (decrite supra –

voir rubrique 091), pour penalement responsable des infractions commises par une

societe commerciale, c’est-a-dire pour des infractions intrinsequement liees a la

realisation de l’objet ou a la defense des interets de la personne morale ou pour des

infractions dont les faits concrets demontrent qu’elles ont ete commises pour le

compte de cette personne morale?

Ce dirigeant poursuivi penalement voit en effet dans la loi nouvelle une loi penale

plus douce puisque celle-ci autorise, dans certaines hypotheses, a ne retenir que la

responsabilite penale de la personne morale de maniere exclusive par rapport a la

responsabilite penale du dirigeant lui-meme. Ces hypotheses tombent alors dans le

champ d’application de l’article 2, alinea 2 du Code penal et le dirigeant poursuivi

penalement est alors fonde a reclamer son acquittement au benefice de cette nouveaute

legislative.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 30, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

30 – Livre 119.4 Kluwer

La Cour de cassation 1 a convenu que la loi nouvelle introduisait une cause nouvelle

d’exemption de peine qui s’identifie a une loi penale plus douce, en principe des lors

retroactive, sous l’angle de l’article 2, alinea 2 C.P. Cependant, la Cour de cassation a

ecarte cette retroactivite: la retroactivite de la loi nouvelle plus douce est tenue en

echec quand le but de la loi nouvelle est indiscutable, or, en l’espece, la loi nouvelle

n’a pas voulu etendre cette nouvelle cause d’exemption de peine a des faits commis

avant l’entree en vigueur de la loi nouvelle.

1. Cass., 3 oct. 2000, Rev. dr. pen., 2001, p. 865, concl. av. gen. de Swaef. Cass., 26 fevr. 2002, Pas.,2002, n8 209, et jurisprudence constante.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 31, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 31

Chapitre 2. Une sanction redoutable:l’interdiction professionnelle 1

150 Arrete royal no 22 du 24 octobre 1934 adouci par la loi du 2 juin 1998

L’arrete royal no 22 du 24 octobre 1934 «portant interdiction a certains condamnes et

aux faillis d’exercer certaines fonctions, professions ou activites et conferant aux

tribunaux de commerce la faculte de prononcer de telles interdictions», est d’une

importance souvent meconnue en pratique.

Cet arrete royal a pour objectif d’assainir la vie des affaires en en ecartant les

personnes condamnees pour certaines infractions ou ayant ete declarees en faillite.

L’arrete royal prevoyait deux types d’interdictions professionnelles: les interdic-

tions de plein droit et les interdictions facultatives.

Sous l’influence de deux arrets prononces les 27 mai et 15 juillet 1998 par la Cour

d’arbitrage 2 qui concluaient a la violation du principe d’egalite, l’arrete royal no 22 a

subi une modification radicale quant a son regime.

En effet, il faut a present tenir compte de la loi du 2 juin 1998 3 modifiant l’arrete

royal no 22 du 24 octobre 1934; l’intitule de cet arrete royal est d’ailleurs modifie

puisqu’il est a present «relatif a l’interdiction judiciaire faite a certains condamnes et

faillis d’exercer certaines fonctions, professions ou activites».

La modification essentielle reside dans la disparition des interdictions profession-

nelles automatiques, toutes ces interdictions etant dorenavant facultatives et, des lors,

ne pouvant resulter que d’une mention speciale dans le jugement de condamnation;

par ailleurs, ces interdictions deviennent temporaires puisqu’elles ne peuvent etre

prononcees que pour un terme de 3 a 10 annees; cependant, elles peuvent maintenant

etre prononcees dans un nombre plus important d’hypotheses puisqu’a disparue

l’exigence tenant au seuil de la peine prononcee (ce seuil etait de 3 mois).

Cette interdiction est a considerer comme constituant une peine 4.

160 Les interdictions d’administrer, de gerer et de surveiller une societe commerciale

Le texte de l’article 1 permet au tribunal repressif, sans prejudice des interdictions

edictees par des dispositions particulieres, de prononcer a charge du condamne

l’interdiction d’exercer, personnellement ou par interposition de personne, les fonc-

tions d’administrateur, de commissaire ou de gerant dans une societe par actions, une

societe privee a responsabilite limitee ou une societe cooperative, de meme que des

fonctions conferant le pouvoir d’engager l’une de ces societes ou les fonctions de

prepose a la gestion d’une succursale belge d’une societe etrangere, ou la profession

d’agent de change ou d’agent de change correspondant.

La violation de cette interdiction est sanctionnee penalement par application de

1. J. Spreutels, F. Roggen, E. Roger France, Droit penal des affaires, Bruylant, 2005, pp. 149-173.2. Arrets nos 57/98 et 87/98, M.B., 3 sept. 1998 et 21 aout 1998, Rev. dr. pen., 1998, p. 923, note

H.D. Bosly.3. M.B., 22 aout 1998. G.A. Dal, ‘Les interdictions professionnelles’, J.T., 2001, pp. 769-775.4. Cass., 2 juin 1999, J.L.M.B., 1999, pp. 1368 et 1380, note M. Neve et L. Bihain. Cass., 17 mai 2005,

Rev. dr. pen., 2006, p. 111 et T. Strafr., 2006, p. 13, concl. M.P.; Cass., 20 sept. 2005, T. Strafr., 2006, p.16, note.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 32, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

32 – Livre 119.4 Kluwer

l’article 4 du meme arrete royal; en fonction du libelle de l’article 1, l’exercice de ces

activites interdites sous le couvert d’hommes de paille, est egalement reprime.

Pour l’essentiel, cet article 1er permet donc la mise a l’ecart du condamne de

l’administration, de la gestion et de la surveillance d’une societe, sans aller jusqu’a lui

interdire une activite commerciale exercee en tant que commercant personne phy-

sique.

Cette condamnation protegeant de la sorte les societes ne peut etre prononcee par le

tribunal repressif que si la personne ainsi interdite est condamnee, avec ou sans sursis

(«meme conditionnellement» dit le texte), en tant qu’auteur ou complice d’une des

infractions ou d’une tentative des infractions enumerees limitativement, et parmi

lesquelles on retrouve, pour l’essentiel, le faux en ecritures, l’usage de faux, la

corruption, le vol, l’abus de confiance, l’abus de biens sociaux, l’escroquerie, le recel,

le blanchiment, les infractions liees a l’etat de faillite, l’emission de cheque sans

provision, le delit d’initie, les infractions aux legislations fiscales: il s’agit, sans

surprise, des infractions protegeant la loyaute dans les affaires. A la difference de

l’ancien texte, l’arrete royal de 1934 modifie en 1998, permet le prononce de cette

interdiction, que la peine principale soit ou non une peine d’emprisonnement ou

qu’elle soit uniquement une peine d’amende, et que la peine d’emprisonnement

prononcee soit ou non au-dela d’un certain minimum (3 mois dans l’ancienne

legislation).

Cette condamnation ne peut, par ailleurs, autre nouveaute, n’etre prononcee que

pour un terme compris entre 3 et 10 ans 1.

Ce mecanisme d’interdiction base sur une liste exhaustive d’infractions frappe

egalement, de maniere cette fois automatique, le failli non rehabilite, selon l’article 3

du meme arrete royal. La Cour d’arbitrage a precise que cette interdiction automatique

et a duree illimitee etait inconstitutionnelle, alors que cette interdiction resisterait a

cette inconstitutionnalite si elle etait lue, par reference a l’article 1er, comme n’etant

pas automatique et comme etant limitee dans le temps 2. Precisons que l’article 110 de

la loi sur les faillites porte que le failli declare excusable est repute rehabilite; le failli

declare excusable n’est plus, des ce moment, frappe d’interdiction.

170 L’interdiction d’exercer une activite commerciale

L’article 1bis de l’arrete royal modifie fait preuve d’une plus grande severite puisqu’il

permet au tribunal repressif d’interdire au condamne, pendant un terme compris entre

3 et 10 ans, d’exercer une activite commerciale, personnellement ou par interposition

de personne, entendons ainsi, d’exercer en tant que commercant personne physique.

Cette severite accrue, facultative cependant, ne peut concerner que les condamnes,

avec ou sans sursis, en qualite d’auteur ou de complice du chef d’une infraction liee a

l’etat de faillite (art. 489, 489bis et 489ter C.P.) ou d’abus de biens sociaux

(art. 492bis).

L’article 4 de l’arrete royal sanctionne la violation de l’interdiction prononcee sur la

base de l’article 1bis.

L’article 3 de l’arrete royal n’etend pas l’interdiction au failli non rehabilite, mais il

faut en l’espece tenir compte de la portee de l’article 3bis qui permet au tribunal de

commerce qui a declare la faillite, et non au tribunal repressif, de prononcer semblable

1. L’article 3bis, § 2, de l’arrete royal n8 22 du 24 oct. 1934 relatif a l’interdiction judiciaire faite a certainscondamnes et aux faillis d’exercer certaines fonctions, professions ou activites, insere par la loi du4 aout 1978 de reorientation economique, ne viole pas l’article 23 de la Constitution. C.A., n8 160/2004,M.B., 3 dec. 2004.

2. C.A., 21 juin 2000, M.B., 22 aout 2000.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 33, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 33

interdiction contre le failli en cas de faute grave et caracterisee 1 de ce dernier en

relation causale avec la faillite; tombent sous le meme regime les administrateurs et

gerants, de fait ou de droit, d’une societe commerciale declaree en etat de faillite, et

ayant commis la meme faute; ces derniers peuvent en outre se voir interdire toute

activite dirigeante dans une societe.

180 L’effet des condamnations prononcees a l’etranger

L’article 2 de l’arrete royal modifie permet, sous des conditions strictes enoncees par

l’article lui-meme, de faire sortir en Belgique les effets d’une condamnation pro-

noncee a l’etranger quant aux interdictions dont il est ici question.

Pour l’hypothese inverse, a savoir l’effet a l’etranger d’une interdiction prononcee

en Belgique, il faut evidemment se referer a ce droit etranger et verifier s’il donne

effet, dans son ordre juridique, a la condamnation belge; ces dispositions relevent

aussi de conventions internationales de droit penal international.

185 L’effet dans le temps des interdictions ayant sorti leurs effets avant la loi du 2 juin

1998

L’article 6 de la loi du 2 juin 1998 porte que l’interdiction prononcee a l’encontre

d’une personne, en vertu des articles 1, 1bis et 2 de l’arrete royal de 1934, avant

l’entree en vigueur de la presente loi (c’est-a-dire avant le 1 septembre 1998),

continue de produire ses effets apres cette entree en vigueur jusqu’a ce que soit expire

un delai de 10 ans a compter du jour de la condamnation qui a donne lieu a

l’interdiction 2.

Le regime transitoire issu de la modification legislative de 1998 a pose probleme

pour les condamnations prononcees apres l’entree en vigueur de la loi, du chef de

violation des interdictions de plein droit intervenues avant l’entree en vigueur de la

loi 3.

Sur un plan pratique encore plus important, il est a noter que, apres un double

revirement de jurisprudence, la Cour de cassation estime que l’interdiction profes-

sionnelle desormais facultative ne peut pas venir frapper des faits anterieurs a l’entree

en vigueur de la loi de 1998 4.

1. C.A., n8 160/2004, 20 oct. 2004, M.B., 3 dec. 2004.Pour des illustrations de ces notions, voy. J.Spreutels, F. Roggen, E. Roger France, o.c., pp. 163-165.

2. C.A., 21 juin 2000, M.B., 22 aout 2000: le caractere illimite dans le temps est tenu en echec par lapossibilite de rehabilitation en telle sorte que l’interdiction professionnelle n’est plus anti-constitu-tionnelle.

3. Cass., 18 mai 1999, Pas., p. 290; Cass., 2 oct. 2002, Rev. dr. pen., 2003, p. 409. Gand, 23 sept. 1998,A.J.T., 1998-1999, p. 924.

4. Cass., 20 sept. 2005, T. Strafr., 2006, p. 16, note, s’ecartant de Cass., 14 mai 2002, Rev. dr. pen., 2003,p. 903, pour revenir ainsi a l’enseignement de Cass., 2 juin 1999, J.L.M.B., 1999, p. 1380.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 34, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

34 – Livre 119.4 Kluwer

Chapitre 3. Les principales infractionsapplicables aux entreprises

190 Plan

Le domaine des infractions susceptibles d’etre commises par une entreprise est tres

vaste. L’on peut, schematiquement, distinguer les infractions prevues par le Code

penal, celles instaurees par les lois particulieres parmi lesquelles les dispositions

penales du droit des societes commerciales revetent une importance telle qu’elles

justifient une section distincte.

SECTION 1. LES INFRACTIONS PREVUES PAR LECODE PENAL

§ 1. Les dispositions propres a l’entreprise

200 Applications

Le Code penal contient peu de dispositions specifiques a l’entreprise. La plupart

d’entre elles, elaborees en 1867, sont devenues totalement anachroniques et leur

application, dans la pratique, est extremement rare. Citons, a titre d’exemple, les

articles 292 a 298 (crimes et delits des fournisseurs) ainsi que les articles 311 a 314

(infractions relatives a l’industrie, au commerce et aux encheres publiques). Compte

tenu de l’evolution economique et sociale ainsi que de la proliferation des lois

particulieres, ces textes relevent desormais, pour la plupart, de l’archeologie penale 1.

D’autres, neanmoins, meritent encore l’attention. Ainsi:

1. L’article 191 qui reprime l’usurpation du nom industriel et la mise en circulation

d’objets marques de noms supposes ou alteres 2. La fraude doit avoir pour but de

tromper sur la provenance du produit, c’est-a-dire sur la personnalite du fabricant.

Ainsi le fait pour un industriel de commercialiser les detergents qu’il fabrique en

utilisant un emballage indiquant la marque «X», appartenant a une firme concur-

rente. Signalons ici que les marques de fabrique et de commerce sont protegees non

par l’article 191 du Code penal mais par la loi du 1er avril 1879 dont l’article 8 punit

notamment la contrefacon de marque et l’usage frauduleux d’une marque contre-

faite 3. De meme, il faut se referer aux articles 80 et 81 de la loi du 30 juin 1994

1. Pour un commentaire de ces dispositions, voy. A.Marchal et J.-P. Jaspar,Droit criminel, t. II, 1976,pp. 121 a 140 et 343 a 397.

2. L’usurpation du nom ‘Moet et Chandon’ tombe sous le coup de l’art. 191 (Cass., 5 juin 1876, Pas.,1876, I, p. 302). Il a de meme ete juge que le fabricant belge qui avait imprime sur des paquets decigarettes, les mots ‘Administration des Contributions indirectes’ a usurpe le nom sous lequel estconnue la regie francaise fabriquant des tabacs (Cass., 28 dec. 1876, Pas., 1877, I, p. 54).

3. Voy. Gand, 9 mars 1973, R.W., 1973-1974, 601 et la note de A. Vandeplas. E. Cornu, ‘Lacontrefacon: etat des lieux a la lumiere de la jurisprudence belge recente (1997-2000)’, Ing.-Cons.2000, pp. 3-26. B. Michaux, ‘Recours a la procedure penale’, in X., Combattre les atteintes a la

propriete intellectuelle, Bruylant, 2004, pp. 137-161.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 35, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 35

pour les contrefacons portant atteinte aux droits d’auteurs et aux droits voisins,

modifiee par la loi du 22 mai 2005 1.

2. Les articles 246 a 253 qui repriment la corruption de fonctionnaires prennent une

importance nouvelle au fur et a mesure de l’interessement de l’Etat au secteur

economique 2; le Code penal distingue le delit de corruption passive par lequel un

fonctionnaire se laisse corrompre, du delit de corruption active par lequel un

particulier corrompt un fonctionnaire; notre Code penal a profondement ete

remanie dans cette matiere par l’effet de la loi du 10 fevrier 1999 relative a la

repression de la corruption: non seulement les elements constitutifs de l’infraction

de corruption sont modifies, par une reecriture des articles 246 a 253 du Code penal

(la simple sollicitation ou la simple proposition suffit desormais a constituer

l’infraction de corruption, et l’existence d’un pacte prealable, c’est-a-dire d’une

entente concertee entre corrupteur et corrompu, n’est plus exigee), mais encore la

corruption de fonctionnaires internationaux ou d’un Etat etranger est incriminee,

tout comme est enfin assuree la repression du trafic d’influence (art. 247, § 4) et de

la corruption privee (art. 504bis et 504ter)3; cette derniere infraction est radicale-

ment nouvelle en droit penal belge puisqu’elle y incrimine la corruption dans le

secteur prive des entreprises; la corruption privee protege en realite l’entreprise,

puisque les hypotheses incriminees sont celles ou un employe, un prepose, un

administrateur, un gerant ou un mandataire d’une personne physique ou morale

accepte d’adopter, a l’insu et sans autorisation de son employeur, de son mandant,

de son conseil d’administration ou de son assemblee generale, un comportement

determine moyennant promesse d’une remuneration ou d’un avantage quelconque;

la corruption privee sera passive si l’avantage est sollicite par l’administrateur, le

gerant, le prepose ou le mandataire, et sera active si c’est une de ces personnes qui

est sollicitee par un tiers dont la qualite est indifferente; le paiement de commis-

sions occultes a un representant d’une entreprise ne sera donc reprehensible que si

ce paiement intervient a l’insu et sans l’autorisation des responsables societaires de

la personne qui recoit ces commissions, et la reception de ces commissions ne sera

reprehensible dans le chef de ce representant de l’entreprise que si cette perception

se fait a l’insu et sans l’autorisation des responsables societaires de ce representant;

on peut donc percevoir que l’exemple cite a profusion dans les travaux prepara-

1. F. De Visscher et B. Michaux, Precis du droit d’auteur et des droits voisins, Bruxelles, Bruylant,2000, nos 668-688. X., ‘La nouvelle loi sur le droit d’auteur’, A.M., 2005, pp. 475-573. F. De Visscheret B. Michaux, ‘Le droit d’auteur et les droits voisins desormais dans l’environnement numerique: laloi du 22 mai 2005 ne laisse-t-elle pas un chantier ouvert ?’, J.T., 2006, pp. 133-144. L. Van Bunnen,‘Droit d’auteur et droits voisins, dessins et modeles. Examen de jurisprudence (2001 a2005)’, R.C.J.B., 2005, pp. 131-199. A. Berenboom, Le nouveau droit d’auteur et les droits voisins,Larcier, 2005, 512 p. Adde, en matiere de protection des programmes informatiques, la loi du 30 juin1994.

2. A. Van den Bulck, ‘Infractions commises par les fonctionnaires publics’, Qualifications et juris-

prudence penales, La Charte, 1994, pp. 17-31; A.DeNauw, Initiation au droit penal special, E. Story-Scientia, 1987, pp. 83-93; P.Delahaye, ‘Le trafic d’influence’, Rev. dr. pen., 1946-1947, pp. 377-405;Cass., 5 avril 1996, Rev. dr. pen., 1996, pp. 634 et s.; Bruxelles, 17 juin 1994, Rev. dr. pen., 1996,p. 1014, note M.A. Beernaert; Corr. Liege, 5 janv. 1995, J.L.M.B., 1996, p. 607.

3. Sur ces nouvelles dispositions, voy. S. Evrard, ‘La loi du 10 fevrier 1999 relative a la repression de lacorruption’, J.T., 1999, p. 337 et s.; D. Flore ‘L’incrimination de la corruption’, in Les dossiers de la

Rev. dr. pen., no 4, 1999, 179 p.; L. Bihain, ‘Le point sur quelques sujets d’actualite en droit penal desaffaires’, C.U.P., vol. 37, fevr. 2000, in Le point sur le droit penal, pp. 47-62. J. Windey, ‘Corruptionprivee’, R.D.C., 2000, p. 464 et s.; A. De Nauw, Omkoping van openbare ambtenaren en private

omkoping, et W. Goossens, ‘Privaatrechtelijke aspecten van private omkoping - de strafbaarstellingvan omkoping van buitenlandse ambtenaren’, in ‘Ondernemingsstrafrecht’, Die Keure, 1999, pp. 41-56et 57-112; Ph. Quertainmont’, ‘La corruption dans les affaires publiques. Elements d’analyse etperspectives de repression a la lumiere de la nouvelle loi du 10 fevr. 1999’, in Melanges P. Van

Ommeslaghe, Bruylant, 2000, pp. 1023-1050.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 36, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

36 – Livre 119.4 Kluwer

toires, a savoir celui des delegues de firmes pharmaceutiques qui gratifient le

personnel medical, est errone: cet exemple ne peut illustrer une corruption privee

active que si les cadeaux faits par les delegues de ces firmes sont recus par le

personnel medical a l’insu et sans l’autorisation des responsables de ce personnel

medical 1.

3. L’article 309 qui reprime la divulgation mechante des secrets de fabrication 2. Ce

texte – qui touche a l’espionnage economique, scientifique et industriel – est de

nature a condamner des delinquants de type tres divers 3.

Ce texte est par ailleurs d’une application rare a l’egard des administrateurs de

societes anonymes, qui ne sont d’ailleurs pas non plus consideres comme tenus par

le secret professionnel de l’article 458 du Code penal mais uniquement par une

obligation civile de discretion 4.

4. L’article 314 qui incrimine les entraves a la liberte des encheres, modifie par la loi

du 24 decembre 1993 relative aux marches publics et a certains marches de

travaux, de fournitures et de services.

5. L’article 494 qui reprime l’usure dans des conditions assez strictes impliquant

notamment le caractere habituel de l’abus 5.

6. L’article 498 qui reprime la tromperie sur l’identite de la chose vendue, ‘en livrant

frauduleusement une chose autre que l’objet determine sur lequel a porte la

transaction’ ainsi que la tromperie sur la nature ou l’origine de la chose vendue,

‘en vendant ou en livrant une chose semblable en apparence a celle que l’acheteur a

achetee ou a cru acheter’. Exemples: tromperies

. sur l’identite: automobile vendue comme construite en 1986 alors qu’en realite,

elle l’a ete en 1984 6; dans ce secteur economique qui a pose quelques

problemes, le legislateur est intervenu en adoptant la loi du 12 mars 2000

reprimant certaines fraudes relatives au kilometrage des vehicules: la violation

des obligations inscrites dans la loi est sanctionnee penalement (art. 7) 7.

. sur la nature: cravates vendues sous l’etiquette ‘all wool’ (pure laine) alors

qu’elles sont fabriquees avec des tissus contenant 57% de fibre de rayonne 8;

. sur l’origine: statue vendue publiquement en tolerant qu’il soit annonce au

catalogue qu’il s’agit d’une œuvre primordiale de l’art belge du XIVe siecle,

bien que le vendeur ait ete avise du defaut d’authentification de cet objet 9.

7. L’article 500 qui reprime la falsification des denrees alimentaires ainsi que la

vente et l’exposition en vente de ces marchandises sachant qu’elles sont falsifiees.

8. L’article 509bis qui reprime l’emission d’un cheque postal ou d’un virement postal

1. Cette pratique est cependant susceptible d’etre condamnee par une autre disposition penale, a savoirl’article 10 de la loi du 25 mars 1964 sur les medicaments.

2. Voy. A. Marchal et J.-P. Jaspar, o.c., pp. 301 a 343.3. Cass., 26 juin 1975, J.T., 1975, p. 638.4. B. Feron et J. Meunier ‘La ‘‘double casquette’’ de l’administrateur de societe anonyme’ J.T., 2000,

p. 696. P. Lambert, Le secret professionnel, Bruylant, 2005, nos 449 et 450, qui ecrit que l’adminis-trateur de societe n’est pas tenu au secret professionnel, sauf dans le cadre de l’article 30 de la loi du20 septembre 1948 portant organisation de l’economie, et dans le cadre du delit d’initie.

5. J. Spreutels, F. Roggen, E. Roger France, Droit penal des affaires, Bruylant, 2005, pp. 410-417.6. Liege, 18 oct. 1961, J.L., 1962-1963, p. 2.7. Cette loi sera abrogee lorsque entrera en vigueur la loi du 11 juin 2004 reprimant la fraude relative au

kilometrage des vehicules, elle-meme completee par les arretes royaux des 21 fevr. 2005 et 4 mai 2006.8. Cass., 17 oct. 1949, Pas., 1950, I, p. 82.9. Bruxelles, 1er mars 1939, Pas., 1939, II, p. 101. Bruxelles, 19 janv. 1998, J.L.M.B., 1999, p. 240

(tableaux avec fausses signatures).

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 37, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 37

sans provision doit etre lu en combinaison avec l’article 61 de la loi du 1er mars

1961 qui sanctionne l’emission de tous les autres cheques sans provision 1.

9. Les articles 504quater, 550bis et 55ter, introduits par la loi du 28 novembre 2000

relative a la criminalite informatique, qui repriment la fraude informatique et les

infractions contre la confidentialite, l’integrite et la disponibilite des systemes

informatiques et des donnees informatiques, au-dela de l’article 210bis qui incri-

mine le faux en informatique 2.

§ 2. Les regles relatives a la confiscation speciale et aublanchiment

210 La confiscation speciale

Les lois des 17 juillet 1990, 7 avril 1995 et 19 decembre 2002 tendent a renforcer les

moyens dont dispose notre systeme repressif en vue de lutter contre certaines formes

de criminalite, organisees (comme la mafia) ou non, qui ont pour objectif la realisation

d’un profit d’ordre pecuniaire 3. On songe notamment au trafic de stupefiants, mais le

libelle des nouveaux articles du Code penal est a ce point large que toutes les

infractions sont concernees des lors qu’elles peuvent generer des profits. Elles rendent

desormais possible la confiscation des profits realises grace aux infractions et erigent

en delit toutes les operations ayant pour but de reconvertir et de gerer des profits

illicites. Les articles 42, 43, 43bis, 43ter et 43quater (en matiere de confiscation) et

505 du Code penal (en matiere de recel) sont d’une importance certaine.

En droit penal belge, la confiscation n’est jamais une peine principale et ne peut

donc etre qu’une peine accessoire 4.

La confiscation, en tant que peine, releve du pouvoir de condamnation du juge du

1. A. Winants, ‘Cheque sans provision’, Qualifications et jurisprudence penales, La Charte, 1987,pp. 1-8; A. De Nauw, o.c., pp. 392-399; Cass., 6 dec. 1995, J.L.M.B., 1996, p. 1275. J. Spreutels, F.Roggen, E. Roger France, Droit penal des affaires, Bruylant, 2005, pp. 559-570.

2. C. Meunier, ‘La loi du 28 novembre 2000 relative a la criminalite informatique ou le droit penal et laprocedure penale a l’ere numerique’, Rev. dr. pen., 2001, p. 611 et s. S. Evrard, ‘La loi du28 novembre 2000 relative a la criminalite informatique’, J.T., 2001, p. 241 et s. Th. Afschrift etV.A. De Brauwere, Manuel de droit penal financier, Kluwer, 2001, pp. 543-568. J. Spreutels, F.Roggen, E. Roger France, Droit penal des affaires, Bruylant, 2005, pp. 524-558, citent quelquesdecisions inedites de jurisprudence. Cass., 6 mai 2003, Pas., 2003, p. 915 et R.A.B.G., 2004, p. 367,note Y. Van Den Berge. Bruxelles, 12 fevr. 2004, Rev. dr. pen., 2004, p. 748. Corr. Hasselt, 21 janv.2004, Limb. Rechtsl., 2005, p. 133. Corr. Eupen, 15 dec. 2003, R.D.T.I., 2004, p. 61, note O. Leroux.

3. Voy. J. Messinne, ‘La loi du 17 juillet 1990 modifiant les articles 42, 43, et 505 du Code penal etinserant un article 43bis dans ce meme Code’, J.T., 1991, pp. 489 a 493; G. Jakhian, ‘L’infraction deblanchiment et la peine de confiscation en droit belge’, Rev. dr. pen., 1991, pp. 765 a 788; J. Pardon,‘Le blanchiment de l’argent et la lutte contre la criminalite axee sur le profit’, Rev. dr. pen., 1992,pp. 740 a 757; A. Jonckheere, ‘Le blanchiment du produit des infractions’,Dossier du J.T., no 9, 1995,157 p.; G. Stessens, De nationale en internationale bestrijding van het witwassen, Intersentia, 1997,650 p.; A. De Nauw, ‘De voordeelsontneming, eerste evaluatie van de rechtspraak en van de wet’,Liber Amicorum J. Vanderveeren, Bruylant, 1997, pp. 37 a 54; A. Masset, L’infraction de blan-

chiment, Formation permanente CUP, Droit penal, vol. VII, 8 mars 1996, Liege, pp. 291 a 313;J.F. Thony, ‘Les mecanismes de traitement de l’information financiere en matiere de blanchiment del’argent’, Rev. dr. pen. 1996, pp. 1031 et s. C. Meunier, ‘Actualites en matiere de blanchiment, deconfiscation et de saisies penales’, in C.U.P., Formation permanente, Le point sur le droit penal,vol. 37, fevr. 2000, pp. 113-144. Th. Afschrift et V.A. De Brauwere, Manuel de droit penal

financier, Kluwer, 2001, pp. 309-340. A. Masset, ‘Les saisies et confiscations en matiere penalefacilitees. La repression accrue du blanchiment’, in Actualites de droit penal et de procedure penale,Liege, Formation permanente C.U.P., vol. 67, dec. 2003, pp. 141-216. D. Vandermeersch, B.Dejemeppe, E. Francis, M. Rozie, O. Klees, G. Vermeulen, Saisie et confiscation des profits du

crime, Anvers, Maklu, 2004, 330 p. J. Spreutels, F. Roggen, E. Roger France, Droit penal desaffaires, Bruylant, 2005, pp. 123-148 et 452-496.

4. Civ. Bruges, 29 janv. 2001, R.W., 2002-2003, p. 789.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 38, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

38 – Livre 119.4 Kluwer

fond, alors que la saisie penale, mesure provisoire visant a garder certains biens sous la

main de la justice, a une nature essentiellement provisoire, peut porter sur des biens

autres que ceux susceptibles de confiscation et peut etre decidee tantot par un juge

d’instruction, tantot en dehors de l’intervention d’un juge, par exemple a l’initiative du

procureur du Roi ou d’un agent ou officier de police judiciaire 1 2.

La confiscation ne peut etre prononcee que comme suite a un crime, ou a un delit

intentionnel 3, realise ou tente, mais ne peut pas, sauf disposition legale speciale, etre

prononcee en cas de contravention.

La confiscation speciale peut porter sur diverses choses:

1) les choses qui forment l’objet de l’infraction, quand la propriete de ces choses

appartient au condamne; l’article 42, 18 du Code penal designe ainsi ‘le corps dudelit’, l’objet a l’egard duquel l’infraction est materiellement commise; sont ainsi

vises le mobilier incendie, l’arme a feu de defense portee sans permis, les

stupefiants vendus, la carte d’identite falsifiee, la videocassette contraire aux

bonnes mœurs, ... mais non la chose volee 4; cette confiscation speciale est

obligatoire pour les crimes et les delits, selon l’article 43 du Code penal;

2) les choses qui ont servi ou qui ont ete destinees a commettre l’infraction, quand la

propriete de ces choses appartient au condamne (art. 42, 18 C.P.); cette confisca-tion speciale est obligatoire pour les crimes et les delits, selon l’article 43 du

Code penal; cette confiscation speciale concerne, par exemple, la fausse cle ou le

1. Sur la matiere de la saisie en matiere penale, regie par les articles 35, 35bis, 89, 28sexies et61quater C.I.C., voy. notamment C. Meunier, ‘Du neuf dans les pouvoirs de saisie penale par le juged’instruction et dans les possibilites de confiscation penale’, J.L.M.B., 1997, pp. 1456 et s.; C. Meu-

nier, ‘La saisie penale par equivalent: chronique d’une mort annoncee’, J.L.M.B., 1999, p. 1218;D. Vandermeersch, ‘La loi du 20 mai 1997 sur la cooperation internationale en ce qui concernel’execution de saisies et de confiscations – l’introduction en droit belge de la saisie immobilierepenale’, Rev. dr. pen., 1997, pp. 691 et s. M.A. Beernaert, ‘La loi du 19 decembre 2002 portantextension des possibilites de saisie et de confiscation en matiere penale’, Rev. dr. pen., 2003, pp. 567-568. C. Caliman, ‘La loi du 19 decembre 2002 portant extension des possibilites de saisie et deconfiscation en matiere penale, Custodes, 2003, pp. 69-104. A. Masset, ‘Les saisies et les confiscationsen matiere penale facilitees, in Actualites de droit penal et de procedure penale (I), Liege, CommissionUniversite-Palais, CUP, dec. 2003, vol. 67, p. 141 et s. D. Vandermeersch, ‘La saisie en matierepenale’, in Saisie et confiscation des profits du crime, Maklu, 2004, pp. 21-92. A. Masset, ‘Le droit dela faillite confronte aux saisies et confiscations en matiere penale’, in Droit de la faillite: actualites

2005, Actes du colloque du 6 oct. 2005, Jeune Barreau Liege, 2005, pp. 114-141.2. Adde la loi du 26 mars 2003 (M.B., 2 mai 2003) portant creation d’un Organe Central pour la Saisie et

la Confiscation et portant des dispositions sur la gestion a valeur des biens saisis et sur l’execution decertaines sanctions patrimoniales.

3. Cass., 18 dec. 1984, Pas., 1985, I, p. 489; Cass., 20 sept. 1988, Pas., 1989, I, p. 69 et R.W., 1988-1989,1128, obs. A. Vandeplas, ‘Verbeurdverklaring en onopzettelijke misdrijven’: cette jurisprudence sefonde sur le libelle de l’article 42 du Code penal dont les termes ‘servi, destinees, commettre’impliquent necessairement l’idee d’une volonte criminelle effective. Adde A. Masset, ‘La peine deconfiscation limitee aux infractions volontaires: le fruit du dogmatisme ?’, in Liber amicorum Jean du

Jardin, Kluwer, 2001, pp. 49-59.4. Cass., 9 nov. 1999, Pas., 1999, I, p. 596 selon lequel l’art. 42, 18 C.P. entend par ‘choses formant l’objet

de l’infraction’, l’objet a l’egard duquel l’infraction est materiellement commise, et non l’objet quel’auteur a frauduleusement soustrait, acquis, detourne ou recele du fait de l’infraction.; il ne vise deslors pas le vehicule detourne par un failli au prejudice des creanciers de la masse faillie. En matiered’organisation frauduleuse d’insolvabilite (art. 490bis C.P.), il a ete juge que l’objet de cette infractionest l’etat d’insolvabilite resultant des actes ou des abstentions frauduleux et non pas les biens et lesobjets detruits, soustraits ou dissimules. P.E. Trousse, Les Novelles de droit penal, T. I, vol. 1, nos 862,865, 874, 1562 et 1568, precise au contraire que les choses volees, bien que formant l’objet del’infraction, ne peuvent pas etre confisquees car, au moment de l’infraction, elles n’appartiennentpas au condamne. En toute hypothese, le tribunal, meme d’office, en ordonne la restitution a la victime,sur la base de l’article 44 du Code penal. Voy. E. Dirix, ‘De verbeurdverklaring met toewijzing aan debenadeelde’, in Liber amicorum A. Vandeplas, Gand, Mys et Breesch, 1994, p. 185 et s.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 39, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 39

tournevis ayant servi pour le vol d’une voiture, concerne la cagoule dont l’auteur

d’un hold-up s’est servi pour camoufler son visage;

3) les choses produites par l’infraction (art. 42, 28 C.P.): cette confiscation peut

intervenir meme si la chose ainsi confisquee n’appartient pas au condamne; cette

confiscation speciale est obligatoire pour les crimes et les delits, selon l’article 43

du Code penal; elle interviendra, par exemple, pour les recettes provenant de

l’exploitation illicite d’un jeu de hasard;

4) les avantages patrimoniaux tires directement de l’infraction, les biens et valeurs

qui leur ont ete substitues et les revenus de ces avantages investis

(art. 42, 38 C.P.) 1; en ce qui concerne l’exigence de la propriete de ces biens

dans le chef de la personne condamnee, l’article 43bis du Code penal precise que

si ces choses ne peuvent etre trouvees dans le patrimoine du condamne, la

confiscation par equivalent peut intervenir, ce qui suppose une evaluation de

ces avantages par le juge qui ordonne des lors la confiscation de sommes d’argent

equivalentes; cette confiscation speciale est facultative et ne peut etre prononcee

que sur requisitions ecrites du ministere public; elle vient par exemple frapper

l’argent tire d’un trafic d’armes, ou les recettes d’un restaurant finance par les

revenus tires de ce commerce illicite de trafic d’armes, et meme l’economie

d’impots realisee a la faveur d’une infraction 2;

5) les avantages patrimoniaux, les biens et valeurs qui leur ont ete substitues et les

revenus de ces avantages investis qui sont trouves dans le patrimoine d’une

personne ou en sa possession, ou leur equivalent, et qui proviennent ou sont

supposes provenir d’infractions qui sont identiques a celle qui a entraıne la

condamnation et du chef desquelles il n’est meme pas requis que l’interesse ait

ete reconnu coupable; cette extension de confiscation speciale facultative n’est

permise que lorsque la condamnation a ete prononcee du chef d’infractions

enumerees par l’article 43quater, § 1er C.P., a savoir des infractions d’une

veritable gravite ou des infractions commises dans le cadre d’organisations

criminelles 3; cette extension n’est possible que pour les avantages patrimoniaux

provenant d’infractions identiques supposees commises dans une periode pre-

cedant de 5 annees l’inculpation; l’interesse concerne par cette demande de

confiscation peut rapporter la preuve que les avantages patrimoniaux qu’il a

acquis durant cette periode de 5 annees ont une origine licite; cette innovation

introduit une repartition de la charge de la preuve entre le prevenu et le ministere

1. La confiscation liee a l’infraction de blanchiment pose difficulte; voy. Cass., 14 janv. 2004, Rev. dr.pen., 2004, p. 508, et J.T., 2004, p. 499, note D. Vandermeersch, et les concl. av. gen. Loop sur le siteinternet de la Cour de cassation, et T. Strafr., 2004, p. 167, note G. Stessens. O. Klees, ‘Quelquesreflexions a propos du regime de la confiscation applicable a l’infraction de blanchiment’, in Saisie et

confiscation des profits du crime, Maklu, 2004, pp. 223-262. C. Rome, ‘Commentaire de l’arret du14 janvier 2004’, site internet de l’Office central des saisies et des confiscations, www.confiscaid.be.Cet arret rejette le pourvoi dirige contre Bruxelles, 30 juin 2003, Rev. dr. pen., 2004, p. 517. Cass.,11 janv. 2005, T. Strafr., 2005, p. 297, note E. Francis.

2. Cass., 22 oct. 2003, Rev. dr. pen., 2004, p. 277, concl. av. gen. Spreutels, J.T., 2004, p. 354, concl.M.P. et obs. E. Boigelot, J.L.M.B., 2004, p. 336, obs. F. Roggen, et R.D.C., 2004, p. 199, note O.Creplet. M. Rozie, ‘Fiscale fraude in relatie tot verbeurdverklaring’, in Saisie et confiscation des

profits du crime, Maklu, 2004, pp. 215-222.3. Cette enumeration issue de la loi du 19 dec. 2002 portant extension des possibilites de saisie et de

confiscation en matiere penale, M.B., 14 fevr. 2003, a deja ete modifiee par l’art. 2 de la loi du 5 aout2003 relative aux violations graves du droit international humanitaire.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 40, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

40 – Livre 119.4 Kluwer

public, de meme qu’elle permet la confiscation de biens qui ne sont pas en lien

direct avec l’infraction sanctionnee 1.

La confiscation peut porter sur des choses se trouvant a l’etranger 2.

Les regles de la confiscation ainsi enoncees sont parfois assouplies dans le cadre de

legislations particulieres 3.

La confiscation est une peine accessoire qui s’applique egalement aux personnes

morales condamnees 4.

La peine de confiscation ne fait pas double emploi avec les pretentions de la victime

de l’infraction qui s’est constituee partie civile. L’article 43bis, alinea 3, du Code

penal prevoit la restitution a la partie civile des choses confisquees qui lui appartien-

nent 5; si la victime ne s’est pas constituee partie civile ou si un tiers pretend a quelque

droit envers les biens confisques, la loi a organise un systeme procedural pour

permettre a ces personnes de faire valoir leurs droits 6.

1. Art. 43quater C.P. introduit par la loi du 19 dec. 2002 portant extension des possibilites de saisie et deconfiscation en matiere penale, M.B., 14 fevr. 2003; M.A. Beernaert, ‘La loi du 19 decembre 2002portant extension des possibilites de saisie et de confiscation en matiere penale’, Rev. dr. pen., 2003,pp. 567-568. C. Caliman, ‘La loi du 19 decembre 2002 portant extension des possibilites de saisie et deconfiscation en matiere penale’, Custodes, 2003, pp. 69-104. F. Deruyck, ‘De wet van 19 december2002 tot uibreiding van de mogelijkheden tot inbeslagneming en verbeurdverklaring in strafzaken’, inStrafrecht van nu en straks, Die Keure, 2003, p. 89-110. G. Stessens et Ph. Traest, ‘Meer moge-lijkheden tot inbeslagneming en verbeurdverklaring in strafzaken’, R.W., 2004, p. 1041 et s.

2. Art. 43ter C.P. Cette confiscation est facilitee par l’intervention de l’Organe central pour la saisie et laconfiscation, cree par les lois des 19 et 26 mars 2003 (M.B., 2 mai 2003).

3. Voir par exemple l’art. 4, § 6 de la loi du 24 fevr. 1921, modifiee par la loi du 9 juill. 1975 et la loi du3 mai 2003, concernant le trafic des substances veneneuses, soporifiques, stupefiantes, psychotropes,desinfectantes ou antiseptiques et des substances pouvant servir a la fabrication illicite de substancesstupefiantes et psychotropes, qui autorise la confiscation des vehicules, instruments ou choses qui ontservi ou ont ete destinees a commettre les infractions a cette loi ou qui en ont fait l’objet, meme s’ils nesont pas la propriete du condamne. Voir egalement l’art. 253 du Code penal en matiere de corruption,applique dans le cadre de l’affaire Agusta-Dassault, in Cass., 23 dec. 1998, Rev. dr. pen., 1999, pp. 393et s., specialement pp. 456-457 (cet article a ete abroge par la loi du 10 fevr. 1999 relative a larepression de la corruption). Voir aussi l’art. 77bis, § 5, de la loi modifiee du 15 dec. 1980 permettant laconfiscation des biens immeubles donnes abusivement en location a des personnes en situation illegale,meme s’ils appartiennent en copropriete a des tiers, selon Corr. Gand, 5 janv. 2004, N.J.W., 2004, p.204.

4. Sous la reserve de l’art. 7bis du Code penal qui interdit la confiscation des choses formant l’objet del’infraction et des choses qui ont servi ou qui ont ete destinees a commettre l’infraction, quand ceschoses s’identifient a des biens appartenant a la personne morale de droit public condamnee et declarescivilement insaisissables; cette derniere notion renvoie a l’art. 1412bis du Code judiciaire; sur ce sujet,voy. A. Stranart et P. Goffiaux, ‘L’immunite d’execution des personnes publiques et l’arti-cle 1412bis du Code judiciaire’, J.T., 1995, pp. 437-447.

5. Ces biens restitues appartiennent a la partie civile et echappent au concours des creanciers (nonhypothecaires) du condamne: Civ. Bruxelles, j. sais., 29 nov. 2004, J.L.M.B., 2005, p. 835.

6. Ces droits peuvent etre avances par le mecanisme de l’intervention (Cass., 17 juill. 1995, Pas., 1995, p.733), ou par le recours a la procedure mise sur pied par l’arrete royal du 9 aout 1991 reglant le delai (90jours) et les modalites du recours des tiers pretendant un droit sur une chose confisquee; pour un casd’application, voy. Civ. Turnhout, 28 mars 2002, R.G.D.C., 2003, p. 126, ainsi que Anvers, ch. misesacc., 31 mars 2000, T . Strafr., 2002, p. 263, note P. Arnou; un indivisaire nous paraıt pouvoir etreconsidere comme un tiers (comp. Cass., 10 fevr. 1999, R. Cass., 1999, p. 342, note G. Stessens) Adde,le nouvel art. 5ter du titre preliminaire du Code de procedure penale, introduit par la loi du 19 dec.2002, M.B., 14 fevr. 2003, qui impose que soit averti de la date d’audience tout tiers interesse (voy.M.A. Beernaert, ‘La loi du 19 decembre 2002 portant extension des possibilites de saisie et deconfiscation en matiere penale’, Rev. dr. pen., 2003, pp. 567-568, ainsi que C. Caliman, ‘La loi du19 decembre 2002 portant extension des possibilites de saisie et de confiscation en matiere penale’,Custodes, 2003, pp. 69-104).

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 41, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 41

213 L’infraction de blanchiment: notion

L’infraction de blanchiment a ete integree dans le Code penal sous la forme d’un recel

elargi: l’article 505 du Code penal ainsi modifie a permis d’incriminer le recyclage de

l’argent sale en sanctionnant d’un emprisonnement de 15 jours a 5 ans et/ou d’une

amende de 26 a 100.000 euros «ceux qui auront achete, recu en echange ou a titre

gratuit, possede, garde ou gere des choses visees a l’article 42, 3o, alors qu’ils en

connaissaient ou devaient en connaıtre l’origine» (art. 505, 2o, C.P.) 1; sont egalement

sanctionnes «ceux qui auront converti ou transfere des choses visees a l’article 42, 3o,

dans le but de dissimuler ou de deguiser leur origine illicite ou d’aider toute personne

qui est impliquee dans la realisation de l’infraction d’ou proviennent ces choses, a

echapper aux consequences juridiques de ces actes» (art. 505, 3o, C.P.); sont encore

punissables «ceux qui auront dissimule ou deguise la nature, l’origine, l’emplacement,

la disposition, le mouvement ou la propriete des choses visees a l’article 42, 3o, alors

qu’ils en connaissaient ou devaient en connaıtre l’origine» (art. 505, 4o, C.P.); la

tentative de ces infractions est a present punissable. Sont ici particulierement visees

les institutions financieres ou toutes autres entreprises qui recoivent et gerent des

fonds acquis par des voies illicites par leurs clients, lorsque ces institutions ou

entreprises connaissaient ou devaient connaıtre cette origine illicite.

Le delit de ‘blanchiment’ a ete introduit dans le Code penal belge par une loi du

17 juillet 1990, completee par la loi du 7 avril 1995.

Le blanchiment peut etre defini comme toute operation qui a pour but de reconvertir

et de gerer des profits illicites. 2

Le souci premier fut de permettre la confiscation des produits de l’infraction, qu’ils

se trouvent dans le patrimoine du delinquant, soit en nature, soit sous forme de biens

de substitution, voire meme qu’ils ne s’y trouvent plus, grace a une confiscation par

equivalent. L’intention premiere etait donc d’adapter le regime des confiscations a la

realite de la criminalite organisee.

Le texte legal a ete modifie car le legislateur a opte pour une ‘criminalisation

complete’ du blanchiment de capitaux, permettant d’assurer une meilleure finalite des

poursuites.

En effet, au-dela de la reception de capitaux dans le systeme financier, l’incrimina-

tion penalise aussi leur injection.

Aux avantages primaires vises dans la definition initiale du blanchiment, le

legislateur a ajoute les avantages patrimoniaux secondaires et les revenus de ces

avantages.

Au bout du compte, la definition du blanchiment presente un caractere ‘hybride’

puisque l’infraction est principalement decrite par rapport a son objet, vise a l’article

1. Pour un cas d’application, voy. Corr. Anvers, 14 avril 1994, R.W., 1994-1995, p. 508, note G. Stessens,‘Over het witwassen van druggelden’ et T.R.V., 1994, p. 285, note F. Hellemans; Corr. Anvers, 23fevr. 1993, T.R.V., 1994, p. 195, note; Corr. Anvers, 14 avril 1996, R.W., 1996, p. 659. Sur l’elementmoral de l’infraction, voir specifiquement J. Verhaegen, ‘Dol et faute lourde en droit penal’, in Liberamicorum M. Chatel, Anvers, Kluwer Editions Juridiques Belgique, 1991, pp. 457 et 458; Corr.Malines, 24 sept. 1999, Rev. banque, 1999, p. 450.

2. A. Masset, ‘L’infraction de blanchiment’, in Droit penal, Liege, Formation permanente CUP, 1996,VII, p. 305, ainsi que in Seminaire I.F.E., Blanchiment, Bruxelles, 17-19 sept. 2003; Th. Afschrift etV.A. De Brauwere,Manuel de droit penal financier, Kluwer, 2001, pp. 309-340; J.P. Spreutels et P.deMuelenaere, La cellule de traitement des informations financieres et la prevention du blanchimentde capitaux en Belgique, Bruylant, 2003, 326 p.; P. Monville, ‘Blanchiment’, in Postal Memorialis,Kluwer, 2003, 20 p.; J. Spreutels, F. Roggen, E. Roger France, Droit penal des affaires, Bruylant,2005, pp. 452-478; V. De Langhe, R. Van Hecke, et G. Vetcour, ‘Witwassen’, in Aspecten van

Europees formeel strafrecht, Anvers, Maklu, 2002, pp. 227-300; G. Stessens, Money laundering – A

New International Law Enforcement Model, Cambridge Univ. Press, 2000, 460 p.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 42, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

42 – Livre 119.4 Kluwer

42, 38 du Code penal, soit les avantages patrimoniaux tires directement de l’infraction,

les biens et valeurs qui leur ont ete substitues et les revenus de ces avantages investis.

Enfin la loi du 11 janvier 1993, modifiee en 2004, relative a la prevention de

l’utilisation du systeme financier aux fins de blanchiment de capitaux, donne du

blanchiment une definition differente, ce qui ne va pas sans creer de nouvelles

difficultes.

214 L’objet de l’infraction de blanchiment

Ainsi qu’il vient d’etre souligne ci-dessus, l’objet de l’infraction de blanchiment n’est

pas decrit a l’article 505 du Code penal mais bien a l’article 42, 38 qui traite de la

confiscation.

Trois categories d’objets entrent en ligne de compte, comme pouvant faire l’objet

d’une operation de blanchiment: les avantages primaires, les avantages secondaires et

enfin les revenus de ces avantages.

1. Les avantages patrimoniaux primaires

Il s’agit de tous les biens et valeurs que l’auteur d’une infraction a obtenu comme

revenu, de meme que la contre-valeur du profit et des charges obtenus illicitement.

2. Les avantages patrimoniaux secondaires

A cote des biens qui sont tires directement de l’infraction, le legislateur a voulu viser

la possession d’actifs qui sont obtenus en lieu et place des avantages patrimoniaux

primaires.

Si l’auteur des faits se dessaisit des objets tires de l’infraction, il semblait indique

d’inclure dans le champ d’application de l’infraction de blanchiment, les avantages de

substitution. Un exemple frequemment evoque est celui de biens acquis grace a des

fonds d’origine illicite.

3. Les revenus

Enfin, a cote des avantages directs et indirects tires de l’infraction, sont vises les

revenus que ces biens procurent, soit les interets, dividendes, loyers immobiliers,

participations beneficiaires et autres profits de toute nature.

4. Conclusion sous forme d’exemple 1

La distinction entre ces differentes categories peut etre aisement comprise a l’aide

d’un exemple:

– L’obtention du capital d’une assurance vie par le meurtrier de l’assure est

punissable car il entre en possession d’avantages patrimoniaux qui proviennent

directement de l’infraction.

– Si l’auteur affecte ces capitaux a l’achat d’autres biens, ces operations peuvent etre

egalement poursuivies comme blanchiment d’avantages patrimoniaux secondaires.

– Si l’auteur choisit d’investir ces capitaux dans un fonds de placement, les revenus

de cet investissement sont consideres comme des revenus de ces avantages investis,

et pourront egalement donner matiere a poursuites.

1. P. Monville, o.c., p. 4.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 43, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 43

215 Elements constitutifs de l’infraction

1. L’element materiel

Dans sa version initiale, l’incrimination de blanchiment ne visait qu’un seul type de

comportement: le fait d’acheter, recevoir, echanger, posseder, garder ou gerer les

choses visees a l’article 505, alinea 1er, 28 du Code penal.

En 1995, le legislateur a complete le texte en ajoutant d’autres comportements

infractionnels, soit la conversion ou le transfert des choses visees a l’article 42, 38 duCode penal et la dissimulation ou le deguisement de la nature, l’origine, l’emplace-

ment, la disposition, le mouvement ou la propriete des choses visees a l’article 42, 38du Code penal: la pratique enseigne que le blanchiment passe alors par le recours a des

hommes de paille ou a des societes ecrans dans des paradis fiscaux ou dans des pays

dont l’opacite des institutions financieres est erigee en systeme.

2. L’element moral

L’element moral de l’infraction varie selon l’acte envisage:

– En ce qui concerne les actes prevus a l’article 505, 28 et 48 du Code penal:

La connaissance de l’origine illicite des profits est necessaire et suffisante pour

justifier une condamnation du chef de blanchiment. En fait, l’element moral du

blanchiment est libelle de maniere identique a celui du recel. L’article 505, 28 et 48du Code penal exige donc que l’auteur du comportement connaissait ou devait

connaıtre l’origine des choses visees a l’article 42, 38 du Code penal.

La notion ‘devait en connaıtre l’origine’ doit etre comprise comme suit: en

retenant ces termes, le legislateur n’a pas entendu introduire une presomption

legale mais il appartient au ministere public d’apporter la preuve que l’agent

connaissait l’origine delictueuse des fonds. A defaut, la preuve de ce que celui-

ci devait en connaıtre l’origine illicite devra etre rapportee. Le juge devra apprecier

cette connaissance en tenant compte de l’ensemble des circonstances de fait, au

moment ou l’infraction a ete commise (et non a posteriori) et en tenant compte du

profil de l’auteur 1 et des elements qui etaient susceptibles d’eveiller ses soup-

cons 2. De maniere classique, on se referera au comportement d’un agent norma-

lement prudent et diligent, place dans les memes circonstances.

– En ce qui concerne les actes prevus a l’article 505, 38 du Code penal, les choses sepresentent de maniere un peu differente:

a) d’une part, l’incrimination ne fait pas reference a la distinction ‘connaissait ou

devait en connaıtre’ l’origine illicite. Des lors, la connaissance de l’origine

illicite des biens devra etre etablie 3.

b) d’autre part une exigence complementaire a ete introduite par la loi du 7 avril

1995, a savoir que la conversation ou le transfert des choses illicites ait ete

realise dans le but de dissimuler ou de deguiser leur origine illicite ou d’aider

1. Voir pour une enumeration des caracteristiques ‘intuitu personae’: Th. Afschrift et V.A. DeBrauwere, Manuel de droit penal financier, 2001, p. 320 (soit par exemple son experience, saprofession, l’existence d’antecedents judiciaires).

2. Voir pour une liste des circonstances rendant la transaction suspecte, Th. Afschrift et V.A. DeBrauwere, o.c., p. 321 (la personnalite du cocontractant, le caractere secret de l’operation, l’absencede facture,...).

3. M. Morris, ‘Impots, argent noir et blanchiment’, R.G.F., 1998, p. 417.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 44, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

44 – Livre 119.4 Kluwer

toute personne qui est impliquee dans la realisation de l’infraction d’ou

proviennent ces choses, a echapper aux consequences juridiques de ses actes 1.

216 Caracteristiques de l’infraction

1. Delit instantane, delit continu...

Il ne fait aucun doute qu’a l’origine, l’infraction prevue a l’article 505, 28 du Code

penal etait une infraction instantanee. Toutefois, la Cour de cassation a decide que le

caractere instantane du delit de blanchiment n’empechait pas sa realisation chaque

fois que l’auteur accomplit, a l’egard des biens ou valeurs dont il connaissait ou devait

connaıtre l’origine delictueuse, un des actes decrits par la loi 2.

En ce qui concerne les comportements vises a l’article 505, 38 et 505, 48 du Code

penal, le legislateur a tenu a preciser qu’il s’agit desormais d’un delit continu 3.

2. La tentative de blanchiment est-elle punissable?

A l’origine, par reference au regime applicable au recel, la tentative de blanchiment

n’etait pas punissable.

Depuis la loi du 7 avril 1995, les choses ont change et la tentative de blanchiment

est devenue punissable en droit belge 4. Cette orientation a ete justifiee par la

legislateur par reference a la loi du 11 janvier 1993 qui fait obligation a la cellule

de traitement financier de denoncer au parquet une tentative de blanchiment, alors que

jusqu’alors elle n’etait pas punissable 5.

3. Blanchiment d’argent et fraude fiscale

L’auteur d’une fraude fiscale est-il susceptible d’etre poursuivi du chef d’infraction a

l’article 505, 28 du Code penal dans la mesure ou la fraude fiscale n’a pas pour

vocation de procurer un avantage patrimonial quelconque a son auteur mais bien de

soustraire de sa base taxable certains revenus. Par un arret de principe, la Cour de

cassation a repondu positivement a cette question et a tranche que l’evitement d’un

impot constitue un avantage patrimonial au sens de l’article 42, 38 du Code penal 6.

Par ailleurs, il n’est pas conteste que des que la fraude fiscale genere un avantage

patrimonial quelconque (sous la forme, par exemple, de remboursement de precompte

ou de versements anticipes en matiere de contributions directes ou de recuperation

d’une T.V.A. indue dans le cadre d’un carrousel T.V.A.), les conditions d’application

des articles 505, 28 et 42, 38 du Code penal sont evidemment reunies.

4. Auteur de l’infraction de base et auteur du recel

La repression du blanchiment n’est pas limitee au blanchiment de l’argent issu du

trafic de stupefiants ou de certaines infractions: le libelle general de l’incrimination

impose de considerer que l’argent sale ainsi blanchi peut provenir de toute activite

illicite, que celle-ci s’identifie a un crime, un delit ou une contravention.

Il demeure qu’il a ete juge que l’auteur de l’infraction de base ne pouvait pas etre

1. A. Masset, o.c., p. 307. Gand, 25 mai 2004, T. Strafr., 2005, p. 474, note J. Rozie.2. Cass., 21 juin 2000, Pas., 2000, I, p. 387.3. Doc. parl., Senat, Expose des motifs, 1994-1995, n8 1323/1, p. 9.4. Article 505, alinea 3.5. Doc. parl., Senat, Expose des motifs, 1994-1995, n8 1323/1, p. 10.6. Cass., 22 oct. 2003, J.T., 2004, p. 354, Rev. dr. pen., 2004, p. 277, chacune avec les concl. av. gen.

Spreutels, J.L.M.B., 2004, p. 336, obs. F. Roggen, Rev. dr. commercial, 2004, p. 199, note O.Creplet, et T. Straf., 2004, p. 167, obs. G. Stessens. Corr. Hasselt, 7 janv. 2004, F.J.F., 2005, p. 649.Corr. Bruxelles, 26 fevr. 2004, F.J.F., 2005, p. 115; T.F.R. 2004, p. 873.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 45, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 45

poursuivi pour le blanchiment vise a l’article 505, 28 de l’argent issu de cette

infraction de base; par contre, il pourrait l’etre du chef de blanchiment pour les

comportements vises a l’article 505, 38 et 48 1.

217 Presentation de la loi instaurant le regime preventif de blanchiment

La loi du 11 janvier 1993 organise un regime preventif et non plus repressif du

blanchiment 2.

La liste des personnes concernees par les obligations decoulant de ce regime n’a fait

que croıtre.

L’article 2 enumere l’ensemble des professionnels du secteur financier, au sens

large du terme 3.

L’article 2bis a etendu les obligations initialement formulees a l’attention des

professionnels du secteur non financier qui sont susceptibles de se trouver confrontes

a des operations de blanchiment de capitaux: il s’agit des notaires 4, huissiers de

justice, reviseurs d’entreprise 5, experts-comptables, et exploitants de casinos, et, des

avocats depuis la modification legislative et l’introduction de l’article 2ter, en vigueur

depuis le 1er fevrier 2004.

La notion de blanchiment est definie a l’article 3, § 1er, de la loi, l’origine illicite des

biens etant limitee a une serie, deja tres longue, d’infractions, a la difference du nouvel

article 505 du Code penal redige en des termes generaux: terrorisme, criminalite

organisee, trafic illicite de stupefiants, trafic illicite d’armes, de biens et de mar-

chandises, trafic de main-d’œuvre clandestine, trafic d’etres humains ou exploitation

de la prostitution, infractions en matiere d’hormones animales, trafic illicite d’orga-

nes, fraude au prejudice des interets financiers de l’Union europeenne, fraude fiscale

grave et organisee, complexe ou internationale, corruption de fonctionnaires publics,

delit boursier, escroquerie financiere, prise d’otages, vol, extorsion, banqueroute

frauduleuse.

Les exigences prevues par la loi sont au nombre de cinq:

– obligation d’identification du client;

– obligation de conservation des donnees pendant 5 annees;

– obligation de denonciation des soupcons ou des certitudes de blanchiment, aupres

de la Cellule de Traitement des Informations Financieres (CTIF) 6, ou, pour les

avocats, aupres du batonnier;

– obligation de formation du personnel a la detection des operations de blanchiment;

– obligation de designation, au sein de chaque organisme, d’un ‘Monsieur blan-

chiment’.

1. Cass., 8 mai 2002, Pas., p. 1117; Rev. dr. pen., 2002, p. 965; J.T., 2003, p. 25.2. A. De Nauw, ‘De strafrechterlijke aspecten van de wet van 11 januari 1993 tot voorkoming van het

gebruik van het financieel stelstel voor het witwassen van geld’, in Om deze redenen, Liber Amicorum

Armand Vandeplas, 194, p. 133 et s. J. Spreutels, F. Roggen, E. Roger France, Droit penal desaffaires, Bruylant, 2005, pp. 478-496.

3. Sont concernes la Banque nationale de Belgique, les etablissements de credit, les entreprises d’assu-rances, les societes de bourse, conseillers en placement et gestionnaires de fortune, mais egalement lesentreprises physiques ou morales qui emettent des cartes de credit, les agents immobiliers, lesentreprises de gardiennage, les entreprises de location-financement,... et, depuis l’arrete royal du 1er

mai 2006, egalement les societes de gestion d’organismes de placement collectif.4. J.L. Van Boxtael, ‘Blanchiment de capitaux dans les actes notaries: quelques reflexions sur la

limitation des paiements en especes’, Rev. not. belge, 2004, p. 315 et s.5. A. Kilesse et J.C. Delepiere (s.l.d.), La lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme,

Serie Audit accountancy tax, La Charte, 2005, 263 p.6. M. Morris, ‘Impots, argent noir et blanchiment’, R.G.F., 1998, p. 423; R. Devloo, ‘De meldingsplicht

bij fraude na de wet van 10 augustus 1998’, R.W. 1998-1999, p. 1199.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 46, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

46 – Livre 119.4 Kluwer

Les autorites de controle ou de tutelle des organismes financiers ont le pouvoir de

leur infliger une amende administrative d’un montant ne pouvant etre inferieur a 250

euros et ne pouvant exceder 1.250.000 euros en cas de non-respect des obligations

prevues aux articles 4 a 19 et 24 de la loi.

La reforme legislative du 12 janvier 2004 1 a reussi, pour l’essentiel:

– d’une part a inclure les avocats dans la liste des professions tenues de respecter les

obligations nees du controle preventif 2;

– d’autre part, a prevoir l’obligation de declaration pesant sur les professions

concernees en cas de soupcon simple et non plus uniquement en cas de soupcon

renforce;

– et enfin, a interdire a tous les commercants de percevoir en especes le prix de vente

d’articles dont la valeur atteint 15.000 euros.

L’article 2ter de la loi precise que les obligations ne pesent sur les avocats que

lorsqu’ils assistent un client dans la preparation ou la realisation de transactions

concernant certaines activites financieres enumerees ou lorsqu’ils agissent au nom

de leur client dans une transaction financiere ou immobiliere; les declarations de

soupcons doivent etre faites aupres du batonnier de l’Ordre et non aupres de la CTIF.

Il se concoit que, parmi les cinq obligations pesant sur les destinataires de la loi,

l’obligation de denonciation met particulierement a mal la profession d’avocat: cette

obligation est a l’origine d’une question prejudicielle posee par la Cour d’arbitrage,

saisie d’un recours en annulation, a la Cour de justice des Communautes europeen-

nes 3.

§ 3. Dispositions generales applicables notamment aux entreprises

220 Introduction

A cote de ces textes epars, le Code penal contient des dispositions d’ordre general

qui peuvent aussi s’appliquer aux entreprises. C’est ainsi que des exploitants de

salles de cinema ont ete poursuivis – et en fin de compte acquittes – pour outrage aux

mœurs (art. 383) suite a la projection d’un film estime licencieux, ‘Le miracle de

l’amour’ 4. De meme, les articles 418 a 420 du Code qui repriment l’homicide et les

lesions corporelles involontaires sont souvent invoques: en cas d’accidents du travail,

ou de catastrophes survenant dans une entreprise industrielle ou commerciale 5.

Mais les dispositions les plus marquantes et les plus regulierement mises en œuvre

sont celles relatives:

1. aux faux en ecritures;

2. a l’abus de confiance;

3. a l’escroquerie.

Ces trois infractions constituent en quelque sorte le trepied de tout le droit penal des

1. Loi du 12 janv. 2004, M.B., 23 janv. 2004.2. G.A. Dal et J. Stevens, ‘Les avocats et la prevention du blanchiment des capitaux: une dangereuse

derive’, J.T., 2004, p. 485 et s., ainsi que R.W., 2003-2004, pp. 1441-1457. A. Masset, ‘Devoir deconseil de l’avocat et blanchiment’, in Deontologie – les honoraires – le devoir de conseil, Actes de lajournee d’etude du 20 mai 2005, Jeune Barreau de Liege, 2005, pp. 163-194.

3. C.A., n8 126/2005, 13 juill. 2005, J.L.M.B., 2005, p. 1182, note J. Debry, et J.T., 2005, p. 787, note.4. Bruxelles, 29 juin 1970, Rev. dr. pen., 1970-1971, pp. 254 et s.5. Y. Hannequart, ‘Imputabilite penale et dommages survenus aux personnes et aux biens a l’occasion

des activites de l’entreprise’, Rev. dr. pen., 1968-1969, pp. 409 et s. Voir egalement H.D. Bosly, Lessanctions en droit penal social belge, E. Story-Scientia, 1979, pp. 33 a 53.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 47, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 47

affaires. On les rencontre en effet dans pratiquement chaque dossier relevant de ce

type de criminalite.

A. LES FAUX EN ECRITURES

230 Le cadre legal 1

L’article 196 du Code penal punit ceux qui auront commis un faux en ecritures

authentiques et publiques et toutes personnes qui auront commis un faux en ecritures

de commerce, de banque ou en ecritures privees, soit par fausses signatures, soit par

contrefacon ou alteration d’ecritures ou de signatures, soit par fabrication de conven-

tions, dispositions, obligations ou decharges, ou par leur insertion apres coup dans les

actes, soit par addition ou alteration de clauses, de declarations ou de faits que ces

actes avaient pour objet de recevoir et de constater.

L’article 197 du Code penal punit celui qui aura fait usage de l’acte faux ou de la

piece fausse comme s’il etait l’auteur du faux.

A ces dispositions generales (les plus frequemment mises en œuvre lors des pour-

suites penales), s’ajoutent des infractions specifiques concernant notamment:

– les faux commis par les fonctionnaires ou les officiers publics (art. 194 et 195

C.P.);

– les faux commis dans les passeports, ports d’armes, livrets, feuilles de route et

certificats (art. 198 a 210 C.P.);

– les faux reprimes par les lois particulieres comme les faux dans les comptes annuels

(voir no 940 de ce livre), les faux en matiere fiscale (voir no 480 de ce livre), les

faux en informatique (voir ci-apres).

240 Elements constitutifs du faux en ecritures

a. L’alteration de la verite

Tout faux en ecritures est un mensonge; ce mensonge peut affecter soit la materialite

meme de l’ecrit (grattage, surcharge): c’est le faux materiel, soit les enonciations de

l’ecrit sans que, dans sa materialite, celui-ci soit falsifie: c’est le faux intellectuel, qui

porte sur le contenu, la substance de l’acte. Le faux intellectuel peut se realiser par

omission (p. ex.: le commercant qui s’abstient d’indiquer sa qualite d’ancien failli

dans une demande d’immatriculation au registre du commerce) ou par commission

(p. ex.: faire etat en comptabilite de frais generaux fictifs). L’alteration de la verite

peut notamment se realiser par simulation 2 qui consiste en un deguisement de la

verite accompli de concert par les parties dans le but de masquer un acte en faisant

croire en un autre acte: il s’agit soit de faire croire a l’existence d’une convention qui

n’existe pas, soit de dissimuler la nature veritable d’une convention ou de certaines

1. Sur cette matiere, voir M. Rigaux et P.E. Trousse, Les crimes et delits du Code penal, Les Novelles,t. III, 1957. J. Spreutels, F. Roggen, E. Roger France, Droit penal des affaires, Bruylant, 2005, pp.201-255. Pour un releve de la jurisprudence, voir A. Masset, ‘Faux en ecritures et usages de faux’,Qualifications et jurisprudence penales, Bruxelles, La Charte, 2004 (mis a jour), 36 p.

2. Cass., 23 oct. 1961, Pas., 1962, I, p. 207; L.Matray, ‘Simulation de droit prive et faux criminel’, Rev.dr. pen., 1968-1969, pp. 581 a 624; P.E. Trousse, ‘La simulation en droit prive et le faux criminel’,Rev. dr. pen., 1968-1969, pp. 625 a 651; F. Roggen, ‘La responsabilite a base documentaire en droitpenal’, Rev. dr. U.L.B, 1992, pp. 175 a 192; Cass., 16 juin 1999, Rev. dr. pen., 2000, p. 81, etconclusions ministere public.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 48, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

48 – Livre 119.4 Kluwer

des conditions qui y sont constatees. C’est le cas notamment des factures fictives 1 et

des societes fictives 2.

b. L’intention frauduleuse ou le dessein de nuire (art. 193)

L’intention frauduleuse se definit comme etant le but de se procurer a soi-meme ou a

autrui un avantage illicite quelconque 3: dissimuler ses revenus reels, toucher indu-

ment une indemnite d’assurance 4, couvrir un transport illicite d’alcool, recevoir des

honoraires non legitimement merites...

Le dessein de nuire consiste en la volonte de porter atteinte a la consideration

d’autrui: par exemple, fabriquer un ecrit faux dans le but de faire condamner un tiers.

Le coauteur ou le complice ne doit avoir ete mu que par un dol general, sans

exigence du dol special requis pour l’auteur 5.

c. La possibilite d’un prejudice

Si l’alteration de la verite ne peut engendrer aucun prejudice materiel ou moral pour

qui que ce soit, elle ne constitue alors pas un faux punissable. Le but du legislateur est

la protection de la confiance obligee dans les ecrits. La lesion de cette confiance

constitue un prejudice: ainsi, quand un faux est commis dans un acte authentique, le

prejudice resulte automatiquement de l’atteinte portee a la foi publique. Il suffit que le

prejudice soit possible, il ne faut pas qu’il ait ete reellement cause: c’est la raison pour

laquelle la loi reprime le faux independamment de son usage 6.

Le prejudice peut etre materiel ou moral. Ainsi, constitue un faux et un usage de

faux le fait pour un gerant de societe, convoque devant le service des enquetes

commerciales, de soumettre au juge enqueteur une situation comptable contenant

des mentions inexactes. La possibilite de prejudice resulte de la conviction du juge

induit en erreur par la sincerite apparente de l’acte.

d. La realisation du faux dans l’un des ecrits et selon l’un des moyens prevus par

la loi

Les termes de la loi sont tres generaux: l’ecriture peut etre imprimee, manuscrite,

dactylographiee, photocopiee, ou informatique 7. ‘Le minimum exige est que l’ecri-

ture soit l’expression d’une idee, la reproduction de paroles, de mots, de chiffres’ 8.

1. Cass., 21 dec. 1959, Pas., 1960, I, p. 477; Cass., 26 sept. 1966, Pas., 1967, I, p. 89; Cass., 16 nov. 1964,Pas., 1965, I, p. 269; Cass., 28 nov. 1978, Pas., 1979, I, p. 357; Cass., 5 avril 1996, Rev. dr. pen., 1996,p. 634; Cass., 5 fevr. 1997, Larc. Cass., 1997, pp. 197, 200 et 203.

2. Cass., 6 fevr. 1979, Pas., 1979, I, p. 641; Corr. Bruxelles, 19 dec. 1980, Rev. prat. soc., 1981, p. 53;Liege, 12 mai 1989, Pas., 1990, II, p. 17.

3. Cass., 22 fevr. 1977, Pas., 1977, I, p. 659; Cass., 15 juin 1982, Pas., 1982, I, p. 1194; Cass., 13 sept.1994, Pas., 1994, I, p. 718. Il a ete juge que le faux en ecritures etait punissable meme s’il etait commisuniquement dans le but de procurer a son auteur la preuve de faits contestes: Cass., 9 fevr. 1982, Pas.,1982, I, p. 721; Cass., 26 janv. 1996, Larc. Cass., 1996, no 272. M. Rigaux et P.E. Trousse, o.c.,no 240, assimilent a l’intention frauduleuse la recherche d’un avantage que l’on n’aurait pas pu obtenirou que l’on aurait obtenu plus malaisement.

4. Cass. (2e ch.), 21 juin 2005, RG P.05.0073.N, sur le site http://www.cass.be.5. Cass. (2e ch.), 10 mai 2005, RG P.05.0122.N, sur le site http://www.cass.be.6. Cass. (2e ch.), 20 sept. 2005, RG P.05.0268.N, sur le site http://www.cass.be.7. Liege, 26 fevr. 1992, J.L.M.B., 1992, p. 1346. Pour un faux en ecritures par falsification des indications

portees sur un disque tachygraphe, voir Pol. Hasselt, 7 dec. 1988, J.J.P., 1989, p. 347; Bruxelles ch.mises acc., 7 fevr. 2000, Rev. dr. pen., 2000, p. 865 (falsification de codes barres). La loi du28 novembre 2000 relative a la criminalite informatique, M.B., 3 fevrier 2001; C. Meunier, ‘La loirelative a la criminalite informatique’, in C.U.P., Formation permanente, Le droit des nouvelles

technologies, fevr. 2001, pp. 35-160; cette loi insere un article 210bis, dans le Code penal pourreprimer le faux et l’usage de faux en informatique; voy. O. Leroux, ‘Le faux informatique’, J.T.,2004, p. 509 et s.

8. A. Marchal et J.-P. Jaspar, o.c., t. I, no 387. F. Willio, ‘Het begrip ‘beschermd geschrift’ inartikelen 193 e. v. Sw.’, R.W., 1995-1996, p. 793 et s. Bruxelles, ch. mises acc., 7 fevr. 2000, Rev. dr.pen., 2000, p. 865 (falsification de codes barres).

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 49, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 49

Tel n’est pas le cas des ecritures musicales 1, des empreintes digitales 2. La falsifica-

tion de plans, par exemple, pour obtenir un permis de batir, donne ouverture a une

jurisprudence controversee.

La protection s’etend a l’ensemble des ecritures:

– authentiques et publiques: les actes judiciaires (jugements, proces-verbaux dresses

par des officiers de police judiciaire), les actes administratifs (registre du

commerce, declaration en douane, registres du conservateur des hypotheques),

les actes des officiers publics (notaires, huissiers);

– de commerce et de banques: polices d’assurance et declarations de sinistres,

bordereaux, requetes en concordat judiciaire, livres de commerce, actes de socie-

tes, titres de transport, cheques, traites, indication du titulaire d’un compte

bancaire 3 etc.;

– privees, lorsque celles-ci sont de nature a produire des effets juridiques, ou peuvent

faire preuve dans une certaine mesure, les tiers etant tenus envers ces documents

par une certaine confiance obligee; ainsi, des mentions fausses portees sur un

document de licenciement C4 4; ainsi, une fausse facture peut constituer un faux en

ecritures lorsqu’elle est produite frauduleusement envers les tiers, mais non point

lorsqu’elle est adressee au client qui peut en verifier l’exactitude 5.

250 Cas d’application

Les actes de societe, qu’ils soient publics ou sous signature privee, rentrent dans la

categorie des ecrits proteges: ils ont, en effet, pour but de fournir differentes informa-

tions et de constater la realite des conditions exigees par les lois sur les societes

commerciales. Les exemples de faux en ecritures dans ce domaine sont nombreux:

– l’article 30, 17o, des L.C.S.C.6 impose que l’acte de societe indique les charges

hypothecaires ou les nantissements grevant les biens apportes. Si l’acte constitutif

constate faussement que les apports sont quittes et libres de toute charge, ceux qui

ont, avec une intention frauduleuse ou a dessein de nuire, fait cette constatation

sont coupables de faux;

– l’intervention d’hommes de paille est egalement souvent poursuivie. Les compa-

rants a la fondation de la societe n’ont aucune intention de s’engager personnelle-

ment: ces hommes de paille agissent dans l’interet d’une seule personne, fondateur

ou tiers, qui leur fournit l’argent necessaire, gerera l’affaire pour son propre compte

et a son seul profit. Cette situation se rencontre notamment dans les cas suivants

. un failli ne disposant plus du moindre credit aupres de ses fournisseurs obtient

de comparses de comparaıtre a l’acte de constitution dans le but de pouvoir ainsi

continuer son activite sous le couvert d’une societe de facade;

1. Bruxelles, 12 juill. 1945, J.T., 1945, p. 515. Dans la matiere artistique, les faux peuvent tomber sous lecoup des articles 80 et 81 de la loi du 30 juin 1994 pour les contrefacons portant atteinte aux droitsd’auteur et aux droits voisins.

2. Cass. fr., 15 mai 1934, D., 1934, I, 113.3. Corr. Liege, 17 sept. 2003, J.L.M.B., 2003, p. 1542, et Liege, 15 oct. 2004, Journ. Proc., 2004, n8 483,

p. 24.4. Corr. Verviers, 12 sept. 1991, Orientations, 1991, no 10, pp. 224 et s., note A.Masset ‘Preavis antidate

et autres faux en ecritures dans des documents sociaux’.5. Cass., 5 oct. 1982, Pas., 1983, I, p. 167; Liege, 22 mars 1988, J.L.M.B, 1989, p. 518; Cass., 25 oct.

1988, J.L.M.B., 1989, p. 1001; Cass., 20 avril 1988, Pas., 1988, I, p. 982; Corr. Bruxelles, 19 mars1992, Rev. dr. pen., 1992, p. 807, note H.D. Bosly; Cass., 15 juin 1994, Bull., 1994, no 309; Bruxelles,14 dec. 1994, J.L.M.B., 1995, p. 210. Cass., 5 avril 2004, Rev. dr. pen., 2004, p. 1076 et J.T., 2004, p.29. Cass. (2e ch.), 13 sept. 2005, RG P.05.0372.N, sur le site http://www.cass.be.

6. L’article 30, 17o L.C.S.C. a ete remplace, sans alteration de sa teneur, par l’article 453, al. 1er 11o C. soc.suite a la codification de cette matiere par la loi du 7 mai 1999.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 50, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

50 – Livre 119.4 Kluwer

. une personne constitue fictivement une societe dans le seul but de faire obstacle

a l’execution de decisions judiciaires en matiere de pensions alimentaires et

d’organiser de la sorte son insolvabilite (art. 490bis C.P.) ou dans le but de

contourner une interdiction professionnelle qui la frappe.

Ainsi est entache de faux l’acte constitutif d’une SA dont il est etabli que les

comparants agissaient par pure complaisance et que leurs souscriptions – faites avec

des fonds qui ne leur appartenaient pas – etaient fictives 1.

Constitue de meme un faux en ecritures l’acte d’augmentation de capital d’une SA,

contenant l’affirmation sciemment fausse que certains comparants sont actionnaires et

qu’ils souscrivent aux nouvelles actions 2.

La cour d’appel d’Anvers 3 a estime qu’etait fictif l’apport d’un fonds de commerce

dont le passif excede l’actif: commet des lors un faux en ecritures, celui qui dans l’acte

constitutif presente un tel apport comme effectif.

La cour d’appel de Bruxelles 4 a estime que peut constituer un faux intellectuel le

fait de sous-evaluer les apports en nature: en l’espece le faux avait ete etabli dans le

but d’eviter un supplement de droits d’enregistrement qu’aurait entraıne l’evaluation

exacte de l’avoir social.

260 La peine

Le faussaire et l’auteur de l’usage de faux sont en principe punis de la reclusion (c’est-

a-dire d’un emprisonnement de 5 a 10 ans) et d’une amende de 26 a 2.000 euros. Dans

la pratique, ces crimes sont toujours ‘correctionnalises’ et sanctionnes par un em-

prisonnement d’un mois a cinq ans et par une amende de 26 a 2.000 euros.

270 Usage de faux

L’usage, c’est tout moyen permettant de tirer un profit d’ecritures fausses ou falsifiees,

meme si le but a atteindre n’est pas realise. L’usage de faux requiert un fait d’usage, un

faux en ecritures, une intention frauduleuse ou un dessein de nuire et un prejudice, reel

ou possible. Ainsi, il y a usage de faux bilan quand les administrateurs le deposent a la

Banque nationale, le soumettent a des creanciers ou a des investisseurs, etablissent des

bilans ulterieurs sur base du faux bilan primitif 5. Ainsi constitue un usage de faux le

fait d’administrer une societe anonyme fictive 6. Ainsi, commet un usage de faux la

partie qui fait deposer des conclusions devant un tribunal de commerce en fondant sa

demande sur des documents qualifies ulterieurement de faux 7.

280 Prescription

Une jurisprudence constante considere ‘qu’a l’egard de l’auteur, le faux et l’usage de

faux constituent une seule et meme infraction, l’usage en pareil cas n’etant que la

continuation du faux; qu’il s’ensuit que la prescription ne commence a courir pour

l’ensemble de l’infraction qu’a partir du dernier acte d’usage; qu’il y a usage du faux,

meme sans fait nouveau de l’auteur du faux et sans intervention iterative de sa part,

1. Bruxelles, 3 mars 1965, J.T., 1965, p. 387.2. Bruxelles, 10 nov. 1971, Rev. prat. soc., 1973, p. 141.3. Anvers, 13 sept. 1976, Rev. prat. soc., 1976, p. 131.4. Bruxelles, 16 mars 1966, Rev. prat. soc., 1966, p. 196.5. Cass., 1er fevr. 1984, Pas., 1984, I, p. 617.6. Cass., 6 fevr. 1979, Pas., 1979, I, p. 641.7. Corr. Bruxelles, 3 mai 1989, J.T., 1991, p. 33; Cass., 13 mars 1996, Rev. dr. pen., 1996, p. 755.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 51, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 51

tant que le but qu’il visait n’est pas entierement atteint et tant que l’acte initial qui lui

est reproche continue de produire a son profit, sans qu’il s’y oppose, l’effet utile qu’il

en attendait’ 1.

B. L’ABUS DE CONFIANCE ET L’ABUS DE BIENS SOCIAUX

1. L’abus de confiance

290 Le cadre legal 2

L’article 491 du Code penal punit quiconque aura frauduleusement soit detourne, soit

dissipe au prejudice d’autrui, des effets, deniers, marchandises, billets, quittances,

ecrits de toute nature contenant ou operant obligation ou decharge et qui lui avaient ete

remis a la condition de les rendre ou d’en faire un usage ou un emploi determine.

300 Elements constitutifs de l’abus de confiance

a. L’intention frauduleuse

La fraude distingue l’abus de confiance de la simple inexecution d’un contrat. La

fraude consiste en la volonte de se procurer a soi-meme ou a autrui un benefice illicite

quelconque. Elle peut notamment resulter de la circonstance qu’au moment du

detournement, le prevenu ne pouvait ignorer, en raison du desordre de ses affaires,

qu’il serait incapable de rembourser ce qu’il se faisait remettre 3.

La restitution des choses detournees n’est pas elisive de l’infraction. L’element

moral de l’infraction peut exister au moment de la remise de la chose ou naıtre

ulterieurement lorsque le prevenu retient la chose et l’utilise a des fins personnelles 4.

Les creances que celui a qui est impute un abus de confiance peut faire valoir contre

celui qui lui a remis une chose, a condition d’en faire un usage determine, n’excluent

pas necessairement qu’il puisse frauduleusement detourner ou dissiper cette chose 5.

b. Un detournement ou une dissipation

L’un et l’autre de ces actes revelent la volonte de se conduire comme seul proprietaire

de l’objet: le detournement consiste en un acte d’appropriation directe (refus de

restituer), la dissipation en un acte de disposition (vendre, mettre en gage). La

dissipation implique donc necessairement un detournement. L’usage abusif d’une

chose remise a titre de depot ou de gage ne constitue pas un detournement ou une

dissipation: le depositaire d’une automobile qui l’emploie a son usage personnel 6, la

femme qui porte des bijoux qui lui ont ete remis en gage ne commettent pas d’abus de

confiance. En revanche, commet un abus de confiance l’employe qui emporte, au

1. Cass., 5 oct. 1982, Pas., 1983, I, p. 167; Corr. Bruxelles, 3 mai 1989, J.T., 1991, p. 33; Liege, 24 mars1995, J.L.M.B., 1995, p. 835. Cass., 15 nov. 2001, Pas., 2001, n8 384. Sur cette matiere, voy. A.Masset, o.c., pp. 28-32. Adde C.A. n8 199/2005, 21 dec. 2005 (question prejudicielle) http://www.ar-bitrage.be (9 janv. 2006); Adde C.A., n8 199/2005, 21 dec. 2005, M.B., 13 fevr. 2006, qui avalise cettejurisprudence. Pour une critique de cette jurisprudence, voy. A. Masset, ‘Reflexions a propos de laprescription de l’action publique, specialement dans le domaine des infractions de faux en ecriture’,Rev. fac. dr. Liege, 2006, p. 231 et s.

2. Sur cette matiere, voy. R. Charles, R.P.D.B., Compl. III, vo Abus de confiance, 1969; J. Spreutels,F. Roggen, E. Roger France, Droit penal des affaires, Bruylant, 2005, pp. 322-345. R. Dezeure,‘Abus de confiance’, Qualifications et jurisprudence penales, Bruxelles, La Charte, 1992, pp. 1 a 29.

3. Cass., 16 avril 1934, Pas., 1934, I, p. 244; Cass., 18 mars 1940, Pas., 1940, I, p. 94.4. Cass., 3 oct. 1966, Pas., 1967, I, p. 136; Cass., 5 janv. 1988, Pas., 1988, I, p. 534.5. Cass., 21 oct. 1980, Pas., 1981, I, p. 220. Cass., 6 sept. 1995, Rev. dr. pen., 1996, p. 334.6. Cass., 28 janv. 1999, Bull. ass., 2000, p. 267.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 52, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

52 – Livre 119.4 Kluwer

moment ou il quitte le service d’une entreprise, un livre de comptes qui lui avait ete

confie et dont l’intention est de tirer profit des annotations contenues dans ce livre 1.

Le delit d’abus de confiance requiert une remise translative de la possession

precaire de l’objet a l’auteur par son proprietaire ou par un tiers agissant pour son

compte. Si la retention frauduleuse ou l’usage abusif, secret et prejudiciable d’un actif

social peuvent constituer, le cas echeant, un abus de biens sociaux, ils ne peuvent, en

revanche, constituer un delit d’abus de confiance lorsque l’auteur, n’ayant pas ete mis

en possession des biens, n’a pu se les approprier 2.

L’usage abusif des biens appartenant a une societe est cependant a present reprime

par le droit belge (voir nos 333 a 337 de ce livre).

c. Au prejudice d’autrui

Le prejudice existe des qu’il est realise ou possible. La restitution tardive ne fait pas

disparaıtre le delit. Ainsi, a ete condamne pour detournement celui qui avait dispose

frauduleusement de certains titres pour cautionner l’engagement d’un tiers, encore que

ces titres aient ete restitues dans la suite. Le prejudice existait par suite de l’affectation

de ces titres au cautionnement du tiers 3.

d. Objets de l’abus de confiance

L’enumeration des biens susceptibles d’etre detournes ou dissipes est interpretee de

facon large par la jurisprudence qui considere qu’il s’agit de toute chose mobiliere

pouvant faire l’objet d’un echange ou d’un commerce: fiches de renseignements

commerciaux, effets de commerce, cheques, actions ou obligations de societes, courant

electrique...

L’infraction peut porter sur des choses fongibles (c.-a-d. interchangeables): dans ce

cas, le delit n’existe qu’a partir du moment ou l’auteur s’est mis dans la situation de ne

pouvoir soit rendre ce qui lui avait ete remis, soit en faire l’emploi auquel il etait tenu 4

(p. ex.: l’agent d’assurances ayant utilise a des fins personnelles le montant de primes

encaissees pour compte de la compagnie).

e. Les objets doivent avoir ete remis a l’auteur de l’infraction a la condition de les

rendre ou d’en faire un usage ou un emploi determine

La remise doit etre volontaire, spontanee et etre ‘translative de la possession precaire

de la chose’, c’est-a-dire que la remise est faite avec l’obligation pour le possesseur de

restituer l’objet ou d’en faire un usage determine; sont ainsi translatifs de la possession

precaire les contrats de depot, de mandat, de louage, de gage, de pret a usage. Puisque

l’abus de confiance est une infraction contre la propriete, il ne peut pas y avoir

detournement lorsque le prevenu est devenu proprietaire par la remise 5: a defaut de

preuve de toute stipulation contraire entre parties, c’est en propriete que sont transmis

les acomptes verses a celui qui s’est engage a effectuer un travail en execution d’un

contrat d’entreprise 6.

1. Cass., 11 juill. 1938, Pas., 1938, I, p. 266.2. Cass., 9 fevr. 2005, J.L.M.B., 2005, p. 524, J.T., 2005, p. 236, Rev. dr. pen., 2005, p. 550 et DAOR,

2005, p. 169.3. Cass., 22 juin 1903, Pas., 1903, I, p. 309; Bruxelles, 24 mars 2000, J.T., 2000, p. 580.4. Cass., 19 dec. 1972, Pas., 1973, I, p. 392.5. Pour l’exemple d’un pret de consommation, exclusif d’abus de confiance, voy. Cass., 3 oct. 2003, Rev.

dr. pen., 2004, p. 396.6. Bruxelles, 17 janv. 1979, J.T., 1979, p. 527; Corr. Liege, 30 avril 1979, J.L., 1979-1980, p. 428, obs.;

Bruxelles, 27 fevr. 1997, J.L.M.B., 1997, p. 1442; Corr. Tournai, 24 nov. 1998, J.L.M.B., 2000, p. 1143;Cass., 8 sept. 1998, Bull., 1998, 391.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 53, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 53

310 Cas d’application

Est coupable d’abus de confiance:

– Le notaire ou l’avocat qui affecte a des fins personnelles des fonds recus d’un tiers

pour compte de son client.

– L’administrateur, le gerant ou l’associe d’une societe qui affecte a des fins autres

que celles qui leur etaient destinees des biens sociaux confies a sa gestion 1.

Cette decision se fonde sur la qualite de mandataire de l’organe social, lequel,

aux termes de l’article 62, alinea 1er, des L.C.S.C.2est rendu responsable confor-

mement au droit commun, de l’execution du mandat qu’il a recu et des fautes

commises dans sa gestion. Il en va de meme des prelevements abusifs operes dans

la caisse sociale 3. Ces deux hypotheses, ayant donne lieu a condamnation d’une

maniere critiquable, doivent a present etre apprehendees par l’incrimination d’abus

de biens sociaux dont il sera question ci-apres.

– En cas de vente a temperament avec clause de reserve de propriete, la loi du 12 juin

1991 (art. 46) impose que le contrat reproduise le texte de l’article 491 du Code

penal, sans quoi la clause est reputee non ecrite. Commet un abus de confiance celui

qui cede l’objet d’une convention dans laquelle est mentionnee semblable cause.

320 La peine

L’article 491 du Code penal punit l’auteur de l’abus de confiance d’un emprisonne-

ment d’un mois a cinq ans et d’une amende de 26 a 500 euros.

330 Infractions voisines

Le legislateur a prevu des textes particuliers relatifs notamment:

– aux detournements commis par un fonctionnaire ou un officier public (art. 240 C.P.);

– a l’utilisation, par des professionnels du secteur, d’instruments financiers apparte-

nant aux clients. L’article 148, § 3, de la loi du 6 avril 1995 relative aux marches

secondaires, au statut des entreprises d’investissement et a leur controle, aux

intermediaires et conseillers en placement, qualifient coupables d’abus de

confiance et les sanctionnent des peines prevues par l’article 491 du Code penal,

ceux qui, agissant au nom d’un intermediaire vise a l’article 2, mettent en report ou

utilisent d’une maniere quelconque au profit de cet intermediaire, a leur profit

personnel ou au profit de tiers, des instruments financiers appartenant a un client,

sans l’autorisation ecrite de celui-ci;

– a l’alienation frauduleuse ou au deplacement des elements d’un fonds de commercemis

en gage. L’article 8 de la loi du 25 octobre 1919 dispose: ‘celui qui a donne son fonds

de commerce en gage est, par le fait meme de son nantissement, constitue gardien des

elements du gage. L’alienation frauduleuse ou le deplacement frauduleux de tout ou

partie de ses elements est passible des peines prevues par l’article 491 du Code penal’.

2. L’abus de biens sociaux

333 Le cadre legal

L’article 492bis du Code penal a ete introduit par la loi du 8 aout 1997 sur les faillites.

1. Bruxelles, 23 janv. 1981, Pas., 1981, II, p. 36.2. L’article 62, alinea 1er L.C.S.C. a ete remplace, sans alteration de sa teneur, par l’article 527 C. soc.

suite a la codification de cette matiere par la loi du 7 mai 1999.3. R.P.D.B., Compl. III, vo Abus de confiance, no 67.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 54, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

54 – Livre 119.4 Kluwer

335 Elements constitutifs de l’abus de biens sociaux

Cet article frappe d’un emprisonnement d’un mois a cinq ans et d’une amende de

100 a 500.000 euros ‘les dirigeants de droit ou de fait des societes commerciales et

civiles ainsi que des associations sans but lucratif qui, avec une intention frauduleuse

et a des fins personnelles, directement ou indirectement, ont fait des biens ou du credit

de la personne morale un usage qu’ils savaient significativement prejudiciable aux

interets patrimoniaux de celle-ci et a ceux de ses creanciers ou associes’ 1.

a. Les auteurs de l’infraction

Cette infraction ne peut etre commise que par certaines personnes, a savoir les

dirigeants de droit ou de fait des societes commerciales et civiles ainsi que des

associations sans but lucratif.

La jurisprudence devra donc rechercher la personne qui, en fait, gere la societe,

qu’elle soit ou non un organe.

Cette fonction de direction, de droit ou de fait, au sein de l’entreprise exclut les

membres du personnel, employes et ouvriers, quoique ceux-ci pourraient etre inquie-

tes en qualite de co-auteurs ou de complices, selon les termes generaux de la

repression de la participation.

De meme, aucune qualite particuliere n’est requise pour incriminer des personnes

du chef de recel d’abus de biens sociaux, sur base de l’article 505 Code penal.

b. L’usage des biens ou du credit social

L’acte materiel doit etre un usage des biens ou du credit de la societe 2.

Les biens sociaux, non autrement definis, visent tout autant les actifs mobiliers

qu’immobiliers, corporels ou incorporels.

Le credit de la societe pourrait etre defini comme la reputation de la societe en

raison de son capital, de la nature de ses affaires et de la bonne marche de l’entreprise .

c. Un usage significativement prejudiciable aux interets patrimoniaux de la per-

sonne morale et a ceux de ses creanciers ou associes

L’adjonction de l’adverbe ‘significativement’ tend evidemment a restreindre le champ

d’application de cette nouvelle incrimination mais pose, en realite plus de problemes

qu’il n’en resout: les travaux preparatoires precisent que cet adverbe permet d’eviter

que des vetilles ne fassent l’objet de poursuites, ce qui mettrait a l’abri l’adminis-

trateur qui se serait rendu aux frais de la societe dans un restaurant trois etoiles

quelques semaines avant la faillite, ou qui aurait telephone deux fois a son epouse aux

frais de la societe ou qui aurait fait dactylographier par la secretaire de l’entreprise le

travail de fin d’etudes de son fils.

Cependant, si l’on doit envisager des criteres objectifs, quels seront ces criteres a

1. Sur cette incrimination, voir les commentaires de E. Roger France, ‘La repression des abus de bienssociaux: le nouvel article 492bis du Code penal’, J.T., 1996, p. 533 et s.; A. De Nauw, ‘Misbruik vande goederen of van het credit van de rechtspersoon’, R.W., 1997-1998, p. 521 et s.; O. Caprasse, ‘Laresponsabilite civile et penale des dirigeants d’entreprise en difficulte’, La faillite et le concordat en

droit positif belge apres la reforme de 1997, C.D.V.A., Universite de Liege, 1998, pp. 328-348;I. Verougstraete, Manuel de la faillite et du concordat, Kluwer, 1998, pp. 572-582; F. Roggen,‘L’incrimination nouvelle d’abus de biens sociaux en droit belge’, Rev. dr. U.L.B., 1997, pp. 121-142.J. Bihain ‘Le point sur quelques sujets d’actualites en droit penal des affaires, in C.U.P., Formationpermanent, Le point sur le droit penal, vol. 37, fevr. 2000, pp. 83-102. J. Spreutels, F. Roggen, E.Roger-France, Droit penal des affaires, Bruylant, 2005, pp. 346-376.

2. Ex.: la surete donnee par une societe pour cautionner la dette de l’ami personnel d’un dirigeant, oul’octroi d’un pret sans interet ou l’omission volontaire de reclamer des factures echues d’un montantimportant; Cass., 17 mars, 1999, J.T., 1999, p. 447, note F. Roggen; Cass., 19 mai 1999, J.T., 1999.p. 645. Cass., 9 fevr. 2005, J.L.M.B., 2005, p. 524, J.T., 2005, p. 236, Rev. dr. pen., 2005, p. 550 etDAOR, 2005, p. 169.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 55, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 55

prendre en consideration: chiffre d’affaires, benefices, taille de l’entreprise, ...? La

Cour d’arbitrage n’a pas considere que l’emploi de cet adverbe violait le principe de la

legalite du droit penal 1.

Il est exige par le texte penal que l’usage soit prejudiciable non seulement a l’interet

patrimonial de la societe mais egalement a celui des creanciers et associes de cette

societe, ce qui est une exigence cumulative qui s’ecarte donc du simple usage

contraire a l’interet social.

Il demeure que le juge, pour apprecier cet element constitutif de l’infraction, devra

se placer au jour de l’operation et non au jour ou cette operation a produit ses resultats.

Selon certains, face a des groupes de societes, il n’y aurait pas d’abus de biens

sociaux lorsque les transferts de biens entre societes d’un meme groupe seraient

justifies par un interet commun reel qui n’impliquerait pas de violation des droits et

des interets particuliers d’une des societes de l’ensemble 2.

d. Element moral triple

L’element moral de l’infraction doit consister en une intention frauduleuse dans le

chef du dirigeant qui doit avoir realise l’usage a des fins personnelles, et en

connaissance que cet usage etait significativement prejudiciable.

Cette combinaison de conditions renforce l’exigence d’un element moral tout a fait

particulier.

L’intention frauduleuse est definie classiquement comme l’intention de se procurer

a soi-meme ou a autrui un avantage illicite; cette intention frauduleuse sera d’autant

plus facilement demontree que l’usage a ete realise de maniere cachee, ce qui n’exclut

cependant pas l’application de cette disposition lorsque l’usage incrimine a

ete declare, comptabilise voire meme approuve par l’assemblee generale; les faits

d’attribution d’une remuneration elevee ou d’avantages en nature importants ou du

maintien d’un compte courant debiteur eleve pendant une longue periode seront a

apprecier a l’aune de cet element moral.

L’exigence d’un usage realise a des fins personnelles directement ou indirectement

embrasse le comportement abusif d’un administrateur agissant dans un but pecuniaire

ou materiel, professionnel ou moral, au service d’une reputation personnelle ou

familiale, soit pour lui-meme soit par personne interposee.

L’exigence de la realisation d’un interet personnel posera difficulte a l’instar de la

jurisprudence de la Cour de cassation francaise qui suit une evolution erratique dans le

domaine: la haute juridiction francaise a rendu des decisions contradictoires pour

qualifier ou non d’abusif l’usage des biens d’une societe effectue dans un but illicite: il

s’agissait tantot de l’hypothese d’utilisation de fonds sociaux pour realiser une

corruption par le recours a des pots-de-vin, tantot de l’hypothese de constitution d’une

caisse noire pour remunerer des travailleurs clandestins 3. Cet element moral pose

egalement le probleme de l’application de la nouvelle infraction aux operations

intervenant au sein d’un groupe de societes, dont il a deja ete question, puisque

l’interet du groupe peut parfois etre different de l’interet de chacune des societes

composant le groupe.

L’exigence de la connaissance par l’auteur du caractere significativement prejudi-

ciable de l’usage renforce la volonte du legislateur de contenir l’incrimination dans

des limites strictes.

1. C.A., n8 40/2006, 15 mars 2006, publie sur le site http://www.arbitrage.be.2. E.Cusas et J.-P.Renard, Le nouveau droit du concordat et de la faillite, Lois actuelles, Kluwer, 1997,

pp. 190 et 191. Bruxelles (11e ch.), 29 juin 1999, J.D.S.C., 2002 (abrege), 370, note E. Pottier, A.Coibion.

3. Pour une synthese de cette jurisprudence, voir O. Caprasse, o.c., p. 339, note 175 et les referencescitees; adde, Cass. crim., 27 oct. 1997, Sem. jurid., J.C.P., 1998, no 6, pp. 241 et s., et note M. Pralus.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 56, 29 September 2006, 09:47 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

56 – Livre 119.4 Kluwer

337 Repression de l’infraction

Le libelle de l’incrimination doit faire considerer celle-ci comme etant une infraction

instantanee, s’agissant de la repression d’un usage frauduleux et non pas d’une

retention frauduleuse. L’infraction est ainsi consommee lorsque tous les elements

constitutifs sont reunis et la prescription commence a courir a partir de ce moment.

La tentative d’abus de biens sociaux n’est pas sanctionnee, a defaut de texte legal.

L’amende portee par le texte peut atteindre 500.000 euros, soit, par le jeu

des decimes additionnels, un total de 500.0006200 ou 2.750.000 euros.

L’infraction d’abus de biens sociaux est a present susceptible de donner lieu a

application des interdictions professionnelles mentionnees dans l’arrete royal no 22 du

24 octobre 1934 tel que modifie par la loi du 2 juin 1998.

C. L’ESCROQUERIE

340 Le cadre legal 1

L’article 496 du Code penal punit ‘quiconque, dans le but de s’approprier une chose

appartenant a autrui, se sera fait remettre ou delivrer des fonds, meubles, obligations,

quittances, decharges, soit en faisant usage de faux noms ou de fausses qualites, soit en

employant des manœuvres frauduleuses pour persuader l’existence de fausses entre-

prises, d’un pouvoir ou d’un credit imaginaire, pour faire naıtre l’esperance ou la

crainte d’un succes, d’un accident ou de tout autre evenement ou pour abuser

autrement de la confiance ou de la credulite’.

350 Elements constitutifs de l’escroquerie

a. L’intention de s’approprier le bien d’autrui

L’element moral de l’escroquerie consiste dans le but de s’approprier une chose

appartenant a autrui 2.

L’infraction suppose qu’on se fasse remettre une chose pour s’en servir et en

disposer comme le ferait le proprietaire lui-meme.

Une controverse existe quant a la possibilite de retenir le delit d’escroquerie lorsque

le prevenu a entendu obtenir de la victime, non la propriete de la chose

escroquee, mais uniquement la detention ou l’usage de cette chose 3. Par contre, il

importe peu que le prevenu ait vise un avantage pour un tiers plutot que pour lui-

meme.

b. La remise ou la delivrance de certains objets

Pour qu’il y ait escroquerie, il est necessaire que l’auteur soit parvenu a se faire

remettre ou delivrer effectivement les objets. La tentative d’escroquerie est desormais

punissable 4; il est evidemment possible que la manœuvre – qui n’a pas entraıne de

remise – constitue une infraction en tant que telle: usage de faux, cheque sans

provision, port public de faux noms, etc...

La remise peut se faire de maniere indirecte, par exemple par virement a un compte.

Elle doit avoir lieu au prejudice de quelqu’un: est ainsi constitutive d’escroquerie

1. Sur cette matiere, voy. P. Sasserath, R.P.D.B., Compl. IV, vo Escroquerie, 1972. J. Spreutels, F.Roggen, E. Roger-France, Droit penal des affaires, Bruylant, 2005, pp. 376-406. Pour un releve dela jurisprudence, voir P.L. Bodson et D. Bernard, ‘L’escroquerie’, Qualifications et jurisprudencepenales, Bruxelles, La Charte, 1994, pp. 1 a 18.

2. Cass., 25 janv. 1984, Pas., 1984, I, p. 565.3. A. De Nauw, Initiation au droit penal special, E. Story-Scientia, 1987, pp. 356 et 357.4. Voy. no 370 de ce livre.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 57, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 57

l’action de se faire remettre par l’Institut belgo-luxembourgeois du change, en

produisant de fausses attestations, un certificat de bonne provenance de titres etran-

gers. Le prejudice consiste dans le trouble apporte a l’economie de la reglementation

que l’Institut a pour mission de sauvegarder 1.

Il n’est pas necessaire que la somme escroquee ait ete remise a l’escroc par la

victime elle-meme, ni que cette remise ait ete faite en mains propres de l’escroc 2.

Tous les objets ayant une valeur materielle ou morale qui appartiennent au

patrimoine d’autrui, a l’exception des immeubles, sont proteges par le texte legal 3.

c. Provoquee par des moyens frauduleux

Les moyens frauduleux qui, selon l’article 496, peuvent servir a commettre l’escro-

querie, sont de deux types: d’une part, l’usage de faux noms ou de fausses qualites,

d’autre part, l’emploi de manœuvres frauduleuses.

Chacun de ces moyens frauduleux doit etre determinant de la remise et donc

anterieur a la remise: ce sont ces moyens qui doivent avoir conduit la victime a

remettre la chose escroquee 4.

La question de savoir si des actes posterieurs a la remise peuvent entrer en ligne de

compte appelle une reponse nuancee. Il n’y a pas d’escroquerie lorsque toutes les

manœuvres sont posterieures a la remise de la chose 5. Par exemple l’inexecution d’un

contrat de construction posterieurement a la remise de l’acompte ne peut etre

consideree comme une escroquerie puisqu’il n’y a pas eu de manœuvres ayant

determine la conclusion du contrat. Par contre, des manœuvres posterieures a la

remise peuvent, en connexite avec d’autres, etre determinantes de l’escroquerie

lorsqu’elles ont eu pour objet de convaincre la victime de la sincerite des actes

accomplis 6.

Le simple mensonge portant sur le nom ou sur une qualite suffit pour caracteriser

l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualite, lorsque cet usage a ete determinant de

la remise 7; il importe peu que le faux nom utilise est un nom imaginaire plutot que le

nom d’un tiers; la qualite protegee par le texte legal porte objectivement sur les

attributs juridiques d’une personne (etat civil, capacite, titres, profession), ou sub-

jectivement (toutes les particularites personnelles qui peuvent determiner une remise:

qualite de proprietaire d’un immeuble, qualite de commercant en timbres, qualite de

nouvel exploitant d’une firme, qualite de creancier, ...: cette pure casuistique donne

au mot qualite un sens presque infini) 8; l’abus d’une qualite vraie peut constituer

l’usage d’une fausse qualite 9.

Par contre, le simple mensonge ne suffit pas pour caracteriser les manœuvres

frauduleuses visees par le texte legal; par manœuvres frauduleuses, on entend tous

les moyens employes pour surprendre la confiance d’une personne, la mise en scene

1. Cass., 3 mars 1952, Pas., 1952, I, p. 397.2. Cass., 22 mai 1922, Pas., 1922, I, p. 317; Cass., 30 juin 1975, Pas., 1975, I, p. 1057.3. A. De Nauw, o.c., p. 359.4. Cass., 25 oct. 1983, Pas., 1984, I, p. 198. Les manœuvres posterieures a la remise des fonds sont parfois

prises en consideration: voir Cass., 17 fevr. 1988, Pas., 1988, I, p. 713 et Mons, 28 juin 1989, J.L.M.B.,1991, p. 1168; Cass., 15 avril 1997, Rev. dr. pen.. 1998, 236. Comp. Corr. Bruxelles, 19 mars 1992,Rev. dr. pen., 1992, p. 807.

5. Corr. Bruxelles, 19 mars 1992, Rev. dr. pen., 1992, p. 807.6. Cass., 15 avril 1997, Rev. dr. pen., 1998, p. 236; Mons, 28 juin 1989, J.L.M.B., 1991, p. 1168; Cass., 17

fevr. 1988, Pas., 1988, I, p. 713.7. Cass., 6 fevrier 2001, R.W., 2001, p. 416, note A. Vandeplas.8. P. Sasserath, o.c., nos 82 a 96 (23). Est coupable d’escroquerie par usage d’une fausse qualite,

l’editeur de revues periodiques qui provoque la souscription de contrats de publicite en faisant prendresystematiquement par ses demarcheurs la fausse qualite de fonctionnaire d’un service public ou dedelegue d’une œuvre charitable: Bruxelles, 10 janv. 1973, Pas., 1973, II, p. 72.

9. P. Sasserath, o.c., no 96 (23).

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 58, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

58 – Livre 119.4 Kluwer

ayant pour but et comme resultat de tromper autrui. Elles doivent avoir ete employees

en vue d’atteindre un des buts determines par le texte legal. Il est admis que la

manœuvre frauduleuse peut etre constituee par un ensemble de faits dont chacun n’est

qu’un element de la manœuvre et ne doit pas reunir tous les caracteres de celle-ci 1. Un

simple mensonge ne suffit pas: les manœuvres doivent revetir une forme positive et

exterieure qui les rende visibles et tangibles 2: ainsi les allegations mensongeres faites

par un emprunteur sur sa solvabilite ne constituent pas des manœuvres; mais si elles

sont accompagnees de documents qui leur conferent un certain credit (p. ex., une

fausse situation comptable), elles deviennent punissables 3. L’usage de faux en

ecritures constitue l’une des formes les plus frequentes de manœuvres frauduleuses.

360 Cas d’application

Constitue un exemple classique de mise en scene aboutissant a l’escroquerie, le

procede utilise par les ‘carambouilleurs’: ‘Il consiste a faire croire a l’existence d’une

entreprise commerciale pour se faire livrer des marchandises a credit. A cet effet,

l’escroc organise le simulacre d’un veritable etablissement, loue des bureaux, engage

des employes, fait imprimer des prospectus, etc. au nom de cette pretendue firme ou

societe. A l’echeance, les creanciers ne trouvent que des locaux abandonnes et des

debiteurs insolvables lorsqu’il ne sont pas en fuite’ 4.

La remise d’un cheque sans provision peut constituer une manœuvre frauduleuse,

meme si le tireur n’utilise aucun artifice tendant a persuader le beneficiaire de la

realite du credit dont il se prevaut abusivement 5 et meme si le cheque est remis au

propre banquier du tireur 6.

Peut constituer une manœuvre frauduleuse de nature a faire croire a un credit

imaginaire, le fait d’emettre, afin de se faire remettre des marchandises, des lettres de

change dont on sait que ni la societe dont on est le gerant ni soi-meme ne pourront les

payer a l’echeance 7.

Commet une escroquerie ‘celui qui, par des annonces publiees dans divers jour-

naux, promet des prets avantageux, alors qu’il ne possede pas de capitaux et n’est en

rapport avec aucun groupe de capitalistes capables de faire face aux demandes de

prets, et se fait ainsi remettre des sommes d’argent en remuneration de services qu’il

sait ne pas pouvoir rendre’ 8.

Se rend de meme ‘coupable de manœuvres frauduleuses constituees par des

1. Cass., 20 janv. 1969, Pas., 1969, I, p. 459; Cass., 7 fevr. 1990, Pas., 1990, I, p. 664.2. Bruxelles, 27 fevr. 1997, J.L.M.B., 1997, p. 1442: ‘La seule inaction ne peut etre une manœuvre

frauduleuse car il faut un fait positif de la part de l’escroc; cette manœuvre ne pourrait etre constitueepar des reticences, par la dissimulation de la verite a la victime ou par le fait d’omettre de lui reveler desfaits qui l’auraient amenee, si elle les avait connus, a ne pas consentir’; Cass., 22 sept. 1999, J.T., 2000,p. 51.

3. Cass., 4 mars 1997, Larc. Cass., 1997, p. 196; Liege, 11 avril 1984, J.L., 1984, p. 266: la dissimulation al’egard d’organismes de credit de l’existence d’emprunts anterieurs et la substitution de personnes, lesemprunteurs nommement designes n’etant pas les reels emprunteurs et n’etant que des prete-noms,demontrent l’existence de l’intention frauduleuse et des manœuvres constitutives de l’escroquerie.

4. P. Sasserath, o.c., no 119.5. Cass., 4 nov. 1974, J.T., 1975, p. 27 et obs. et Rev. dr. pen., 1974-1975, p. 747, note H.D. Bosly. Corr.

Liege, 22 mars 1982, J.L., 1982, p. 319; Corr. Bruxelles, 29 avril 1971, J.T., 1973, p. 237, noteJ. Messinne. Par contre, user abusivement d’une carte de credit au-dela des limites contractuellesn’est pas constitutif d’infraction s’il n’est pas etabli que le prevenu a use de manœuvres frauduleusespour se faire delivrer la carte ou l’utiliser apres sa revocation: Liege, 13 nov. 1985, J.L., 1986, pp. 230,et etude d’A. Masset, ‘Utilisation frauduleuse et abusive des cartes de paiement et de credit’, J.T.,1987, pp. 137 a 142.

6. Bruxelles, 11 juin 1975, J.T., 1975, p. 508. Cass., 13 mai 2003, T. Strafr., 2004, p. 282.7. Cass., 15 mars 1988, Pas., 1988, I, p. 849. Comp. art. 509 et 509ter C.P.8. Cass. fr., 5 janv. 1938, D., 1938, 133; Bruxelles, 10 avril 1975, Pas., 1976, II, p. 15.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 59, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 59

allegations mensongeres accompagnees d’une mise en scene, l’individu qui, pour

obtenir en sa qualite pretendue de ‘manager’ la signature de contrats artistiques,

imposait aux signataires des obligations tres lourdes, avait pretendu avoir un bureau

a Paris alors que c’etait faux, et pour appuyer son allegation avait convoque ses futures

victimes, les avait soumises a des seances d’audition, a des prises de vue destinees,

selon lui, a la publicite’ 1.

Est une manœuvre constitutive d’escroquerie le fait de vendre a temperament une

machine a un acheteur qui n’a pas le desir d’acheter, en faisant miroiter a ses yeux les

benefices illusoires de l’operation 2.

Il a ete juge que se rend coupable d’escroquerie, celui qui conclut un achat dans le

seul but de prendre possession des biens sans en acquitter le prix 3.

Le fait d’offrir des produits a des prix tres eleves, mais avec l’argument que la vente

a lieu au profit des handicapes, constitue une escroquerie lorsque 2% seulement du

prix de vente sont adresses a des œuvres philanthropiques 4.

L’utilisation abusive des cartes de credit est egalement constitutive d’escroquerie

dans certaines circonstances, ce qui peut entrer en concours avec le faux et la fraude

informatiques reprimes par les articles 210bis et 504quater du Code penal.

Les systemes de ‘vente en chaıne’ et de ‘vente en boule de neige’ peuvent

egalement constituer une escroquerie 5.

Le domaine de la vente de vehicules d’occasion est un lieu d’excellence pour les

escroqueries, specialement par le faits de fraude operee sur les compteurs kilome-

triques 6.

La tricherie au jeu tombe sous le coup de l’article 496 du Code penal parce qu’elle

suppose des manœuvres frauduleuses qui abusent de la confiance ou de la credulite du

joueur.

Constitue une escroquerie le fait de se faire remettre, sous le couvert de pretendus

contrats de pret, des sommes d’argent par un certain nombre de personnes, alors que

des l’origine, l’intention de rembourser ces sommes est inexistante 7, ou le fait pour

une personne affectee au transport d’eleves d’etablir des factures portant en compte

plus de kilometres qu’il n’en a ete parcouru, afin d’obtenir des sommes auxquelles elle

n’avait pas droit.

L’imagination des escrocs est a ce point fertile que le lecteur consultera utilement la

longue liste des types courants d’escroquerie, etablie par les meilleurs auteurs 8.

Sur le plan de l’indemnisation de la victime dont l’imprudence ou la credulite sont

souvent surprenantes, il importe de preciser que la Cour de cassation assure une

1. Cass., 13 juin 1966, Pas., 1966, I, p. 1309, cite in R.P.D.B., no 119 (52); Liege, 25 juin 1997, Chron.D.S., 1998, p. 135 (escroquerie envers des candidats a l’emploi).

2. Bruxelles, 5 fevr. 1964, Pas., 1964, II, p. 214. Corr. Arlon, 29 juin 1959, J.L., 1959-1960, p. 3. Pour unexemple d’escroquerie par publicite depassant les limites tolerees dans l’exageration publicitaire, voirCorr. Nivelles, 2 dec. 1972, J.T., 1973, p. 113.

3. Cass., 12 nov. 1917, Pas., 1918, I, p. 127; Bruxelles, 30 juin 1971, Pas., 1972, II, p. 98; Anvers,24 dec. 1992, R.W., 1992-1993, p. 1200, note.

4. Anvers, 11 mai 1984, R.W., 1984-1985, col. 2558. Cette pratique est egalement incriminee parl’art. 105 loi 14 juill. 1991 sur les pratiques du commerce et sur l’information et la protection duconsommateur.

5. Voy. les precisions et references citees par A. De Nauw, o.c., p. 367, note 363; Liege, 7 nov. 1996,J.L.M.B., 1997, p. 528. Cette pratique est egalement incriminee par l’article 105 de la loi du 14 juillet1991 sur les pratiques du commerce et sur l’information et la protection du consommateur. Il en est dememe pour les jeux pyramide: Anvers, 27 juin 2000, Limb. Rechtsl., 2000, p. 408.

6. Outre, l’art. 498 du Code penal reprimant la tromperie, il peut encore etre fait reference a la loi du11 juin 2004 reprimant la fraude relative au kilometrage des vehicules. A. Vandeplas, ‘Over hetbedrog met de kilometerstand van voertuigen’, in Liber Amicorum Jean du Jardin, Kluwer, 2001, p.289.

7. Cass., 4 nov. 1986, Pas., 1986, I, p. 1248.8. R. Sasserath, o.c., nos 109 a 119 (59).

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 60, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

60 – Livre 119.4 Kluwer

indemnisation complete de cette victime a charge du condamne, par le recours au

principe general du droit ‘fraus omnia corrumpit’ 1.

370 La tentative d’escroquerie – Les peines

L’escroc est punissable d’un emprisonnement d’un mois a cinq ans et d’une amende

de 26 a 3.000 euros. Depuis la loi du 16 juin 1993, la tentative d’escroquerie constitue

desormais elle aussi un delit (sanctionne par une peine de prison de huit jours a trois

ans et d’une amende de 26 a 2.000 euros). Cette innovation doit en principe permettre

une repression plus efficace de certaines formes de criminalite avant qu’elles ne

causent un prejudice effectif a leur victime. Exemple: la mise en vente par publicite

dans les journaux de biens immobiliers ou de valeurs qui par la suite s’averent fictifs.

380 Infractions voisines

Le legislateur a prevu des textes particuliers relatifs notamment:

– a la provocation a l’achat de titres de societes par des moyens frauduleux (art. 202

L.C.S.C. 2);

– aux operations sur valeurs mobilieres ou instruments financiers a des conditions

usuraires. L’article 148, § 1er, de la loi du 6 avril 1995 dispose: ‘Sont consideres

comme coupables d’escroquerie et punis des peines prevues par l’article 496 du

Code penal, ceux qui, abusant de la faiblesse ou de l’ignorance d’autrui, procedent

a des transactions sur instruments financiers a un prix ou a des conditions mani-

festement hors de proportion avec la valeur reelle de ces instruments’;

– a l’abus d’effets de commerce (art. 509 C.P.);

– a la perception illegale de subventions, indemnites et allocations qui sont, en tout

ou en partie, a charge de l’Etat, d’une autre personne morale de droit public, de la

Communaute europeenne ou d’une autre organisation internationale ou qui est, en

tout ou en partie, composee de deniers publics; l’arrete royal du 31 mai 1933

modifie par la loi du 7 juin 1994 impose en effet des declarations sinceres et

completes dans les demandes tendant a obtenir ces interventions; des peines sont

edictees pour sanctionner la declaration sciemment incomplete ou inexacte et la

perception illegale de ces interventions. Dans cet ordre d’idees, l’article 175.1o.b.

de l’arrete royal du 25 novembre 1991 portant reglementation du chomage

sanctionne l’employeur, son prepose ou son mandataire qui fait des declarations

inexactes ou incompletes qui peuvent donner lieu au paiement d’allocations

auxquelles le travailleur ne peut pretendre, ou qui concernent le licenciement, le

chomage temporaire ou l’occupation a temps partiel;

– a certaines fraudes relatives au kilometrage des vehicules (art. 7 de la loi du

12 mars 2000 3).

1. Cass., 6 nov. 2002, J.L.M.B., 2003, p. 819 et J.T., 2003, p. 579, et note J. Kirkpatrick, pp. 573-579.2. L’article 202 L.C.S.C. a ete remplace, sans alteration de sa teneur, par les articles 348 C. soc. pour les

SPRL, 388 pour les SC, et 649 pour les SA, suite a la codification de cette matiere par la loi du 7 mai1999 - voy. infra, no 890.

3. Cette loi sera abrogee lorsque entrera en vigueur la loi du 11 juin 2004 reprimant la fraude relative aukilometrage des vehicules, elle-meme completee par les arretes royaux des 21 fevr. 2005 et 4 mai 2006.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 61, 29 September 2006, 09:51 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 61

D. LES INFRACTIONS LIEES A L’ETAT DE FAILLITE

381 Disparition des infractions de banqueroute mais maintien du droit penal de la

faillite

Les articles 489 et 490 du Code penal erigeaient en crime la banqueroute frauduleuse

et en delit la banqueroute simple; les elements constitutifs de ces incriminations

residaient dans les articles 573 a 585 de la loi du 18 avril 1851 sur les faillites.

La loi du 8 aout 1997 sur les faillites a abroge l’ensemble de ces dispositions, a

abroge le terme meme de ‘banqueroute’ pour lui preferer l’expression ‘infractions

liees a l’etat de faillite’, et a introduit une nouvelle section dans le Chapitre 2 du

Titre IX du Livre II du Code penal consacre aux «infractions liees a l’etat de faillite»,

section composee des articles 489 a 490bis du Code penal.

Cette nouvelle legislation range l’ensemble des infractions liees a l’etat de faillite

dans la categorie des delits et reprend, pour l’essentiel, les memes elements constitu-

tifs que ceux qui caracterisaient les infractions de banqueroute 1.

382 Auteurs des infractions liees a l’etat de faillite

Sous l’ancienne legislation, seules les personnes revetues de la qualite de commercant

pouvaient etre poursuivies comme banqueroutiers; la jurisprudence avait etendu

l’hypothese aux dirigeants d’une societe faillie, bien qu’ils ne soient ni commercants

ni personnellement faillis.

Les nouveaux articles 489, 489bis et 489ter du Code penal consacrent cette

jurisprudence en identifiant les auteurs de ces infractions aux commercants et aux

dirigeants, de droit ou de fait, des societes commerciales en etat de faillite; il en resulte

donc que l’organe d’une societe faillie peut etre declaree coupable d’infractions liees a

l’etat de faillite lorsqu’il a commis les faits en qualite d’organe et relativement a la

gestion de la societe, puisque la responsabilite penale de l’infraction commise par une

personne morale pese sur les personnes physiques par lesquelles elle a agi, le juge

penal devant rechercher l’auteur punissable dans la realite des choses, quelle que soit

la situation juridique de cette personne physique a l’egard de la personne morale 2.

1. Pour des commentaires relatifs a l’ancienne legislation, toujours d’actualite lorsqu’il y a identite deselements constitutifs voir A. Van den Bulck, ‘Banqueroute’, Qualifications et jurisprudence penales,La Charte, 1994, pp. 1 a 19; J.P. Spreutels et J. Messinne, ‘Considerations sur la banqueroute’,L’entreprise en difficulte, Bruxelles, Ed. Jeune Barreau, 1981, pp. 331 a 365; J.L. Duplat, ‘Aspectsnouveaux du droit de la banqueroute’, L’evolution recente du droit commercial et economique, Ed.Jeune Barreau, Bruxelles, 1978, p. 377 et s.; A. De Nauw, Initiation au droit penal special, E. Story-Scientia, 1987, pp. 331 a 339; O. Ralet, Responsabilites des dirigeants de societes, Larcier, 1996,pp. 314 a 320.Sur la nouvelle legislation, voir pour les commentaires, O. Caprasse, o.c., pp. 320 a 327; O. Cusas etJ.-P. Renard, o.c., pp. 191 a 195; Y. Dumon, ‘La faillite et le concordat judiciaire – la reforme de1997’, J.T., 1997, pp. 807 a 809; I. Verougstraete, Manuel de la faillite et du concordat, Kluwer,2003. Adde le no special de la Rev. dr. pen. consacre au theme Le nouveau droit penal belge de lafaillite, in Rev. dr. pen., 1998, pp. 379-483. L. Bihain, ‘Le point sur quelques sujets d’actualites endroit penal des affaires’, in C.U.P., Formation permanente, Le point sur le droit penal, vol. 37, fevr.2000, pp. 63-82. Ph. Traest, ‘Misdrijven die verband houden met de staat van het faillissement’, inOndernemingsstrafrecht, Die Keure, 1999, pp. 5-39. Th. Afschrift et V.A. De Brauwere,Manuel de

droit penal financier, Kluwer, 2001, pp. 405-458. J.F. Goffin, Responsabilites des dirigeants de

societes, Larcier, 2004, pp. 425-432. J. Spreutels, F. Roggen, E. Roger France, Droit penal desaffaires, Bruylant, 2005, pp. 1111-1174. Sur une question d’application de la loi dans le temps, voy.Mons, 23 fevr. 1999, Rev. dr. pen., 1999, p. 1058 et 24 fevr. 1999, Rev. dr. pen., 1999, p. 1213.

2. Cass., 18 dec. 1978, J.T., 1979, p. 407; Cass., 1er oct. 1973, Pas., 1974, I, p. 94.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 62, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

62 – Livre 119.4 Kluwer

383 Faut-il un etat de faillite?

Les conditions de la faillite sont a present celles de l’article 2 de la loi du 8 aout 1997

sur les faillites, a savoir une cessation des payements de maniere persistante et un

ebranlement du credit; la jurisprudence ancienne est transposable dans la nouvelle

legislation, sous la precision que la cessation des payements doit a present etre

persistante.

L’autonomie du droit penal par rapport au droit de la faillite, constante sous

l’empire de l’ancienne legislation, a ete amenagee par la nouvelle legislation:

a. Sous l’empire de l’ancienne legislation, l’action publique du chef de banque-

route etait independante, en ce qui concerne la date de la survenance de la faillite, de

toute declaration de faillite prononcee par le tribunal de commerce; le juge penal fixait

librement l’epoque a laquelle il estimait reunies les conditions de la faillite, sans etre

tenu par les precisions resultant du jugement commercial, ou par un jugement estimant

qu’il n’y avait pas etat de faillite, par l’absence de declaration de faillite ou par un

jugement d’homologation de concordat; a l’inverse, le tribunal de commerce n’etait

pas lie par un acquittement ou une condamnation de banqueroute; le tribunal de

commerce n’avait pas a surseoir a statuer en raison d’une action penale en cours.

Le nouvel article 489quater apporte une breche importante au principe de l’auto-

nomie du droit penal de la faillite en precisant: ‘l’etat de faillite ne pourra neanmoins

pas etre conteste devant le juge penal si cet etat a fait l’objet d’une decision du tribunal

de commerce ou de la cour d’appel, passee en force de chose jugee, au terme d’une

procedure a laquelle le prevenu a ete partie, soit a titre personnel, soit en tant que

representant de la societe faillie’; cette breche, inseree pour limiter les hypotheses

de decisions contradictoires, doit cependant etre limitee aux cas qu’elle vise

strictement: ainsi, dans l’hypothese visee, ce ne sera que l’etat de faillite declaree

qui ne pourra etre remis en cause, le juge penal restant toujours competent pour fixer,

d’un point de vue penal, la date de la cessation des payements et pour apprecier par

exemple l’element moral de l’infraction; l’hypothese de l’absence de jugement ou

d’arret declaratif de faillite doit etre etendu a l’hypothese d’une faillite rapportee 1; la

reserve introduite par le nouvel article 489quater portant sur la participation du

prevenu aux debats consacres a l’etat de faillite devant les juridictions commerciales,

repond au souci de garantir les droits de la defense et protege, par exemple,

l’administrateur d’une societe qui serait poursuivi penalement pour infractions liees

a l’etat de faillite de ladite societe et qui n’aurait pas ete partie dans la procedure

commerciale de faillite parce que, par exemple, il n’etait plus administrateur a ce

moment-la. Le prevenu qui a fait defaut devant le tribunal de commerce a ete juge

avoir ete partie a la procedure. 2

b. Les faits qui constituent le delit d’infraction liee a l’etat de faillite ne peuvent

etre commis qu’apres la reunion des conditions legales de la faillite, constates par le

juge repressif: si les faits sont anterieurs, l’infraction n’est pas encore realisee mais

peut etre apprehendee sous le couvert d’une autre incrimination, par exemple l’abus de

confiance, ou l’abus de biens sociaux ou l’organisation frauduleuse d’insolvabilite 3.

1. Cass., 15 juin 1999, Bull., 1999, p. 868.2. Bruxelles, 23 avril 2003, J.L.M.B., 2004, p. 84.3. O. Caprasse, o.c., p. 323, note 111; O. Cusas et J.-P. Renard, o.c., p. 195; Y. Dumon, o.c., p. 808;

I. Verougstraete, o.c., pp. 553-554; cette solution s’ecarte de l’ancienne jurisprudence qui permettaitau juge repressif de retenir des faits infractionnels meme anterieurs a la periode suspecte du droitcommercial. Adde le nouveau libelle de l’art. 64sexies des lois sur les societes commerciales qui imposeaux commissaires de denoncer les faits graves et concordants susceptibles de compromettre lacontinuite de l’entreprise.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 63, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 63

384 Infractions visees par l’article 489 du Code penal

L’article 489 du Code penal reproduit deux hypotheses de l’ancienne banqueroute

simple facultative, a savoir:

a. Article 489, 1o: avoir contracte, au profit de tiers, sans contrepartie suffisante,

des engagements trop considerables eu egard a la situation financiere de l’entreprise: il

s’agit du correspondant de l’ancien article 574, 1o, du Code de commerce; ce sont, par

exemple, les cautionnements donnes pour des dettes de tiers sans contrepartie ou sans

justes motifs de confiance dans la solvabilite du debiteur garanti.

b. Article 489, 2o: avoir, sans empechement legitime, omis d’executer les obliga-

tions prescrites par l’article 53 sur les faillites: il s’agit du correspondant de l’ancien

article 574, 5o, du Code de commerce; les obligations en question concernent celle de

se rendre a toutes les convocations du juge-commissaire ou du curateur, celle de

fournir au juge-commissaire et au curateur tous les renseignements requis et celle

d’aviser le curateur de tout changement d’adresse.

L’element moral requis par cette incrimination est le dol general.

385 Infractions visees par l’article 489bis du Code penal

L’article 489bis du Code penal reproduit, et parfois amenage, certaines hypotheses de

l’ancienne banqueroute simple, en incriminant les hypotheses suivantes:

a. Article 489bis, 1o: avoir, dans l’intention de retarder la declaration de faillite,

fait des achats pour revendre au-dessous du cours ou s’etre livre a des emprunts,

circulations d’effets et autres moyens ruineux de se procurer des fonds: il s’agit du

correspondant de l’ancien article 573, 3o, du Code de commerce; le texte est

exemplatif et sanctionne tout procede ruineux auquel aura recours le prevenu anime

du dol special precise par le texte, a savoir l’intention de retarder la declaration de

faillite; le recours excessif au credit, meme a un taux normal, peut constituer

l’infraction; dans ce cas, le bailleur de credit pourrait etre poursuivi comme complice

s’il a participe sciemment a cet objectif; les moyens utilises a d’autres fins ne sont pas

constitutifs du delit: la vente a perte peut etre decidee pour d’autres motifs legitimes.

b. Article 489bis, 2o: avoir suppose des depenses ou des pertes ou n’avoir pu

justifier de l’existence ou de l’emploi de tout ou partie de l’actif tel qu’il apparaıt des

documents et livres comptables a la date de cessation de paiement et de tous biens de

quelque nature que ce soit obtenus posterieurement: il s’agit du correspondant de

l’ancien article 573, 4o, du Code de commerce, les modifications apportees ne

rencontrant qu’un souci de clarte; l’infraction suppose un inventaire; a defaut de

celui-ci, le fait pourrait etre constitutif d’un detournement ou d’une dissimulation

d’actif incrimines par l’article 489ter, 1o, nouveau du Code penal, et constituer une

infraction a la loi du 17 juillet 1975 relative a la comptabilite et aux comptes annuels

des entreprises; ce texte ne requiert pas de dol special.

c. Article 489bis, 3o: avoir, dans l’intention de retarder la declaration de faillite, paye

ou favorise un creancier au prejudice de la masse: ce nouvel article fait reference a

l’ancien article 573, 5o, du Code de commerce mais s’en ecarte fondamentalement en

exigeant cette fois un dol tout a fait special, a savoir l’intention de retarder la declaration

de faillite, ce qui sous-tend la consequence d’aggravation du passif et l’atteinte aux

interets des creanciers; il importe peu que ce paiement soit nul ou annulable sur base des

dispositions de la loi sur les faillites ou qu’il ait ete recu par un creancier ignorant l’etat

de faillite du debiteur; le delit exige un prejudice cause a la masse 1; le paiement fait a un

1. Cass., 15 oct. 1985, J.T., 1986, p. 291.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 64, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

64 – Livre 119.4 Kluwer

creancier privilegie est licite, de meme que celui fait pour la conservation d’un element

actif (des frais de remise en etat par exemple) tandis que le paiement d’une livraison

future peut etre critiquable 1; la faveur a un creancier est frequemment la reprise par le

fournisseur avec l’accord du debiteur, de marchandises vendues, mais impayees, et ne

constituera l’infraction qu’a la condition de rencontrer l’exigence du dol special;

l’expose des motifs precise que le comportement incrimine n’est a prendre en consi-

deration qu’a partir de la date de cessation des paiements 2.

d. Article 489bis, 4o: avoir, dans l’intention de retarder la declaration de faillite,

omis de faire l’aveu de la faillite dans le delai prescrit par l’article 9 de la loi sur les

faillites, ou avoir sciemment omis de fournir, a l’occasion de l’aveu de la faillite, les

renseignements exiges par l’article 10 de la meme loi, ou avoir sciemment fourni des

renseignements inexacts a l’occasion de l’aveu de la faillite ou ulterieurement aux

demandes adressees par le juge-commissaire ou par le curateur: le nouvel article est le

correspondant de l’ancien article 574, 4o, du Code de commerce, sous la reserve que le

defaut d’aveu de faillite n’est incrimine a present que si le prevenu poursuivait une

intention de retarder la declaration de faillite; ce dol tout a fait special est evidemment

essentiel 3 et rend la nouvelle disposition plus favorable au prevenu 4; par ailleurs, le

delai resultant de la nouvelle loi sur les faillites pour faire l’aveu de la faillite est a

present d’un mois, et non plus de trois jours comme precedemment; l’introduction de

ce dol special devrait avoir pour effet de reduire les poursuites de ce chef, l’ancienne

disposition etant la plus frequemment appliquee dans le droit penal de la faillite; le

delai d’un mois court a dater de la cessation des paiements dont le moment est arrete

de maniere independante par le juge penal.

386 Infractions visees par l’article 489ter du Code penal

L’article 489ter du Code penal traduit quelques anciennes hypotheses de banqueroute

frauduleuse, sous la reserve qu’il s’agit a present de delits et non plus de crimes.

L’exigence d’un dol special, a savoir l’intention frauduleuse ou le dessein de nuire,

est maintenue; il avait ete juge que cette intention pouvait resulter d’un desordre de la

comptabilite si considerable qu’il ne pouvait etre que frauduleux 5.

Comme les articles 489 a 490 nouveaux du Code penal, l’article 489ter nouveau ne

sanctionne que les faits qui resultent de l’etat de faillite; des lors, les faits qui se

produiraient avant que cet etat ne soit constate, pourraient etre poursuivis du chef

d’une autre prevention, telle par exemple l’organisation frauduleuse d’insolvabilite,

l’abus de confiance ou encore l’abus de biens sociaux sur pied du nouvel article 492bis

du Code penal 6.

a. Article 489ter, 1o: avoir detourne ou dissimule une partie de l’actif: il s’agit du

correspondant de l’ancien article 577, 2o, du Code de commerce; l’infraction consiste

en la disparition d’une partie de l’actif sans contrepartie economique; il en est ainsi

pour la destruction volontaire de biens, la cession de l’actif a une societe creee a cette

1. Cass., 21 janv. 2003, publie sur le site internet de la Cour, http://www.cass.be.2. Doc. parl., Chambre, no 631/1, 1991-1992, p. 44.3. Cass., 9 juin 1999, Bull., 1999, p. 817.4. Cass., 4 janv. 2000, Bull., 2000, p. 10, et J.D.S.C., 2001, p. 259, note M.A. Delvaux; P. Traest,

‘Aangifte van faillissement vroeger en nu. Het nieuwe artikel 489bis Sw. en de terugwerkende krachtvan de mildere strafwet’, T. Strafr. 2002, pp. 86-88, note sous Cass., 3 oct. 2000; l’arret est aussi publiein Bull., 2000, p. 1447.

5. Cass., 28 avril 1981, Pas., 1981, I, p. 984; l’intention frauduleuse, a savoir celle de se procurer a soi-meme ou a autrui un benefice illicite, peut exister meme en l’absence de toute volonte de causer unprejudice au creancier.

6. Y. Dumon, o.c., p. 808.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 65, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 65

fin par le failli, les ventes au noir, des prelevements anormaux, meme au titre de

remuneration, dans les fonds de l’entreprise 1, l’impossibilite de justifier la discor-

dance entre l’actif actuel et l’actif du dernier inventaire 2; le detournement ou la

dissimulation doivent etre commis au prejudice de la masse des creanciers et non de

certains d’entre eux seulement 3.

b. Article 489ter, 2o: avoir soustrait, en tout ou en partie, des livres ou documents

comptables: il s’agit du correspondant de l’ancien article 577, 1o, in initio du Code de

commerce; le droit comptable vise a permettre aux tiers la connaissance de la situation

de leur debiteur, la faute etant de les mettre frauduleusement dans l’impossibilite de

disposer d’une information sincere.

S’agissant a present de delits et non plus de crimes, il etait necessaire qu’une

precision particuliere incrimine la tentative de ces delits, ce qui est prevu dans ce

meme article 489ter.

Certaines hypotheses anciennes de banqueroute frauduleuse ont disparu du nouveau

Code penal, notamment l’alteration frauduleuse des livres et documents comptables et

la reconnaissance frauduleuse de dettes fictives, ces hypotheses restant evidemment

visees par les dispositions des articles 193 et suivants du Code penal relatives a la

repression des faux en ecriture 4, en telle sorte que certaines redondances d’incrimi-

nations ont ete supprimees.

387 Infractions visees par les articles 489quinquies et sexies du Code penal: infrac-

tions commises par des tiers

L’article 489quinquies est le correspondant de l’ancien article 575 du Code de

commerce en ce qu’il incrimine les infractions commises par des tiers et non par le

failli; le dol special est requis et precise; les faits incrimines supposent l’existence d’un

jugement ou d’un arret declaratif de faillite prealable

L’article 489quinquies concerne d’abord les tiers qui, dans l’interet du commercant

ou d’une societe commerciale declares faillis, ont soustrait, dissimule ou recele tout ou

partie de l’actif; il incrimine ensuite celui qui a presente dans la faillite et affirme, soit

en son nom soit par interposition de personnes, des creances supposees ou exagerees.

L’intention frauduleuse est exigee.

L’article 489sexies nouveau du Code penal incrimine le curateur qui s’est rendu

coupable de malversation dans sa gestion, comme le faisait l’ancien article 575, 4o, du

Code de commerce 5.

Les tiers peuvent donc etre les auteurs d’une infraction principale aux articles

489quinquies et sexies, mais peuvent egalement etre inquietes au titre de la participa-

tion, en qualite de co-auteur ou de complice, a des infractions principales commises

par les commercants en etat de faillite ou par les dirigeants des societes commerciales

en etat de faillite. Les principes generaux de la participation s’appliquent evidemment

aux articles 489 a 490 nouveaux du Code penal; rappelons que le co-auteur ou le

complice est susceptible d’etre poursuivi alors qu’il n’a pas agi lui-meme dans une

1. Corr. Bruxelles, 31 oct. 1980, J.T., 1981, p. 274; Bruxelles, 14 dec. 1994, J.L.M.B., 1995, p. 210; cetteincrimination entrera parfois en concours avec le nouvel article 492bis du Code penal reprimant l’abusde biens sociaux; voy. no 330 de ce livre.

2. Cass., 13 mars 1973, Pas., 1973, I, p. 661 et critiques par J.-P. Spreutels; J. Messinne, ‘Conside-rations sur la banqueroute’, L’entreprise en difficulte, Bruxelles, Ed. Jeune Barreau, 1981, p. 357.

3. Cass., 20 nov. 1973, Pas., 1974, I, p. 309; Cass., 19 nov. 1997, Rev. dr. pen., 1998, p. 574.4. Gand, 4 janv. 1999, TWVR, 1999, p. 113.5. Cass., 9 dec. 1987, Rev. dr. pen., 1988, p. 445 et conclusions min. publ. et obs. J. Sace;

L. Huybrechts, ‘Ontrouw in het beheer (en andere misdrijven) van de faillissementscurator’,Panopticon, 1993, pp. 208 a 222.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 66, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

66 – Livre 119.4 Kluwer

intention frauduleuse, le dol requis dans le chef du participant etant le dol general, a

savoir l’action commise sciemment et volontairement, meme si l’intention fraudu-

leuse est requise dans le chef de l’auteur 1.

388 Les peines

Les articles 489 a 490 nouveaux du Code penal erigent ces faits infractionnels en

delits; le detournement d’actif incrimine par l’article 489ter, 1o, nouveau du Code

penal autorise ainsi une peine d’emprisonnement d’un mois a cinq annees, et une

amende de 100 F a 500.000 F (6200); la peine venant frapper le curateur coupable de

malversation dans sa gestion est du meme montant.

L’article 490 nouveau du Code penal prevoit la publication obligatoire des deci-

sions de condamnation a une peine d’emprisonnement prononcee sur base des

articles 489bis et 489ter du Code penal, dans le seul Moniteur belge, et non plus

par voie de presse, ce qui comportait une connotation infamante qui n’est plus

adequate de nos jours 2.

Les interdictions professionnelles organisees par l’arrete royal no 22 du 24 octobre

1934 sont maintenues dans les hypotheses d’infraction aux articles 489, 489bis et

489ter du Code penal.

389 Addendum: Les dispositions penales de la loi du 17 juillet 1997 relative au

concordat judiciaire

La nouvelle legislation relative au concordat judiciaire comporte deux dispositions de

nature penale, a savoir les articles 46 et 47, sanctionnant le debiteur qui, de maniere

generique, a trompe sur la situation reelle de son entreprise en difficulte 3, et de

maniere generique egalement, incrimine les personnes, autres que les debiteurs, qui

ont frauduleusement truque des operations concordataires.

SECTION 2. LES INFRACTIONS PREVUES PAR LES LOISPARTICULIERES

§ 1. Introduction

390 L’inflation legislative

Selon un rapport presente au Parlement en 1978, il existait a cette epoque 1056 lois

speciales en vigueur comportant des dispositions penales, alors qu’en 1944, il n’y en

avait ‘que’ 389. Il est certain que, depuis lors, ce chiffre s’est encore considerablement

1. Cass., 22 mars 1994, Bull., 1994, no 139.2. Doc. parl., Chambre, sess. extr., 1991-1992, 631/1, p. 48. Cass., 28 mai 1997, J.T., 1997, p. 840:

la publication ne doit pas etre ordonnee lorsque le prononce de la condamnation a ete suspendu.3. Le nouvel article 46 de la loi reprend des hypotheses qui se retrouvaient deja dans l’article 40 de

l’ancienne loi coordonnee de 1946, en y ajoutant un 4e fait punissable consistant en un delit d’omis-sion, a savoir, avoir fait ou laisser faire sciemment au tribunal ou au commissaire au sursis desdeclarations inexactes ou incompletes sur l’etat des affaires ou sur les perspectives de reorganisation;I. Verougstraete, o.c., p. 183.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 67, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 67

accru. La plupart de ces textes relevent du droit economique, social et financier au sens

large et interessent des lors l’entreprise. Comme le souligne H. Bosly 1 ‘le recours au

droit penal afin de garantir l’application des lois economiques et sociales est devenu l’une

des constantes de la politique legislative contemporaine. Pareil phenomene provoque

evidemment une ‘inflation’ du droit penal. Cette situation est regrettable dans la mesure

ou le droit penal doit demeurer un droit exceptionnel. Dans la pratique, l’observation

merite toutefois d’etre nuancee, car cette ‘inflation’ se presente davantage comme un

risque que comme une realite, car elle est fonction de la mesure plus ou moins grande

dans laquelle ce droit penal des lois particulieres est effectivement applique’.

Il est evidemment hors de question d’envisager dans le cadre de cet ouvrage toutes

ces dispositions. Nous nous limiterons a commenter succinctement celles qui sont le

plus souvent mises en œuvre devant les tribunaux correctionnels et a citer ensuite les

plus caracteristiques.

§ 2. Lois particulieres en matiere economique et financiere

400 Plan

Nous examinerons specialement:

1. la repression du travail frauduleux;

2. la repression de la fraude fiscale;

3. les infractions a la reglementation comptable;

4. les infractions a la reglementation des prix;

5. les pratiques du commerce;

6. le droit penal et l’environnement;

7. le droit penal des activites reglementees;

8. le droit penal de la consommation;

9. le delit d’initie;

10. le droit penal social.

A. LA REPRESSION DU TRAVAIL FRAUDULEUX

410 Raison d’etre

La loi du 6 juillet 1976 sur la repression du travail frauduleux a caractere commercial

ou artisanal 2 a pour objectif de lutter contre un phenomene – le travail dit ‘au noir’ –

qui a pris dans notre pays, particulierement dans le domaine de la construction, une

ampleur certaine 3.

Elle prevoit deux infractions distinctes:

– le fait de se livrer a un travail frauduleux;

– le fait d’avoir recours aux services d’un travailleur frauduleux (art. 1).

1. ‘Contribution du droit penal social et economique a la renovation de la politique criminelle’, Dange-rosite et Justice penale, collection Deviance et Societe, Bibl. de la Fac. de droit de Louvain, t. XIV;D. Matray, ‘L’emprise du droit penal dans la vie des affaires – Punir le dirigeant ou protegerl’entreprise?’, Le risque penal dans la gestion des entreprises, Actes du 41e Seminaire de la Commis-sion Droit et Vie des Affaires de l’Universite de Liege, E. Story-Scientia, 1992, pp. 9 a 50.

2. Cette loi ne concerne donc que le travail frauduleux a caractere commercial ou artisanal, dont l’objectifest de proteger le travail independant: il s’agit ainsi de distinguer cette loi d’autres dispositions legalesconcernant avant tout le travail non declare effectue dans le cadre d’un lien de subordination; sur cedernier, voir notamment la loi du 23 mars 1994 portant certaines mesures sur le plan du droit du travailcontre le travail au noir et no 870 de ce livre.

3. Pour une appreciation critique de cette loi, voy. A. Racine, ‘Les lois contraignantes dans la societecontemporaine’, Liber Amicorum Herman Beckaert, pp. 320 et s. X., ‘Travail au noir et fraude: unemenace pour l’Etat-providence en Belgique et en Europe’, Rev. b. sec. soc. 2003, pp. 683-1047.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 68, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

68 – Livre 119.4 Kluwer

Chacune de ces infractions est sanctionnee d’un emprisonnement de 8 jours a un mois

et d’une amende de 100 a 1.000 euros ou d’une de ces peines 1.

420 Elements constitutifs du travail frauduleux

L’article 2, § 1er, de la loi definit ce qu’il faut entendre par ‘travail frauduleux’: il s’agit

de: ‘tout travail pouvant faire l’objet d’une profession relevant de l’artisanat, du

commerce ou de l’industrie, effectue en dehors de tout lien de subordination, par une

personne physique ou morale qui, soit n’est pas immatriculee au registre du commerce

ou de l’artisanat, soit viole les prescrits legaux en matiere d’autorisation, d’assujettisse-

ment ou d’immatriculation, relatifs a l’exercice de cette profession pour autant que ce

travail, soit par son importance et son caractere technique, soit par sa frequence, soit par

l’usage d’un materiel ou d’un outillage, presente un caractere professionnel specifique’.

De cette definition, relevons les elements suivants:

a. ‘Tout travail’. Pour tomber sous le coup de la loi, il n’est pas necessaire de se

livrer a une activite, ce qui suppose une certaine permanence et une certaine

continuite: une seule prestation isolee suffit. Peu importe egalement son caractere

lucratif ou benevole.

b. ‘Relevant de l’artisanat, du commerce ou de l’industrie, effectue en dehors de

tout lien de subordination’. Soucieux de proteger les petites et moyennes

entreprises, c’est-a-dire les travailleurs independants, le legislateur a exclu les

prestations effectuees dans le cadre du contrat de travail; ainsi: la femme d’ouvrage

non declaree ou le macon pensionne employe dans une entreprise de construction

ne peuvent etre poursuivis sur base de la loi du 6 juillet 1976.

c. ‘Par une personne physique ou morale’

– soit non immatriculee au registre du commerce ou de l’artisanat. Les articles 4

et 44 des lois coordonnees le 20 juillet 1964 relatives au registre du commerce

imposent a toute personne physique ou morale qui se propose d’exercer une

activite commerciale de demander au prealable son immatriculation au registre

du commerce, sous peine d’une amende de 26 a 10.000 euros 2.

– soit en violant les prescrits legaux en matiere d’autorisation, d’assujettissement

ou d’immatriculation relatifs a l’exercice de cette profession. Est ici concernee

la loi du 15 decembre 1970 sur l’exercice des activites professionnelles dans les

petites et moyennes entreprises du commerce et de l’artisanat dont les articles 5

et 14 sanctionnent d’une amende de 100 a 1 000 euros et/ou d’un emprisonne-

ment de 8 jours a 6 mois quiconque exerce une activite professionnelle

reglementee sans etre titulaire de l’attestation constatant la realisation, dans

son chef, des conditions portant sur les connaissances de gestion et les connais-

sances professionnelles. Une quarantaine de professions font a l’heure actuelle

l’objet d’un arrete royal de reglementation 3.

d. Pour autant que ce travail, soit par son importance et son caractere technique, soit

par sa frequence, soit par l’usage d’un materiel ou d’un outillage, presente un

1. Voy. p. ex. Cass., 10 janv. 1994, R.D.C., 1994, p. 423.2. Voy. egal. art. 2 et 31 loi 18 mars 1965 sur le registre de l’artisanat.3. Blanchisseur, boucher-charcutier, boulanger-patissier, carrossier-reparateur, coiffeur, entrepreneur

carreleur, de maconnerie et de beton, marbrier, menuisier-charpentier, de peinture, plafonneur-cimen-tier, entrepreneur de pompes funebres, estheticienne, tailleur de pierres, garagiste-reparateur, instal-lateur de chauffage central, installateur electricien, installateur sanitaire et de plomberie, negociant envehicules d’occasion, photographe, restaurateur ou traiteur, etc. Cette loi du 15 decembre 1970 a eteabrogee et remplacee par la loi-programme du 10 fevrier 1998 pour la promotion de l’entrepriseindependante: l’article 16, § 1er de cette loi-programme prevoit une amende de 250 a 10.000 euros.R. Gambini et J. Tyberghien, ‘L’acces a la profession apres la loi-programme du 10 fevrier 1998’, inC.D.V.A., Dirigeant d’entreprise = un statut complex aux multiples visages, Bruylant, 2000.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 69, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 69

caractere professionnel specifique. Les travaux preparatoires 1 illustrent par quelques

exemples cette derniere condition: peindre une piece d’une maison est un travail

important, peindre une porte ne l’est pas; equilibrer les roues d’une automobile

implique l’usage d’un materiel et d’un outillage, contrairement au placement de roues

ou au remplacement de bougies... La definition legale du travail frauduleux ne doit

donc pas etre confondue avec ce qu’on appelle communement le travail «au noir»,

cette expression designant le travail non declare au fisc et/ou a la securite sociale.

430 Cas particuliers et exceptions

L’article 2, § 2, repute ‘toujours’ frauduleux le travail accompli par une personne

physique ou morale qui ne satisfait pas aux conditions qui viennent d’etre examinees

lorsque:

a. le travail est preste suite au recours a la publicite visant a la prospection de la

clientele;

b. le travail qui, par les conditions particulierement avantageuses de prix auxquelles il

est offert, par l’annonce de la non-application de la T.V.A. ou autres arguments

similaires, est revelateur de son caractere frauduleux.

Sont en revanche exclus du champ d’application de la loi:

– les travaux de sauvetage et autres travaux urgents qui doivent etre executes sans

retard afin d’eviter des accidents imminents (art. 2, § 1);

– les travaux a usage personnel effectues dans le cadre familial pour des parents ou

allies jusqu’au deuxieme degre;

– les travaux qu’une personne physique fait exercer par son conjoint ou par des

parents ou allies jusqu’au quatrieme degre, pour autant que ces travaux concernent

la construction, la transformation ou l’assainissement d’habitations sociales ou de

logements y assimiles;

– les travaux accomplis par des organisations socioculturelles reconnues par le Roi,

pour autant que ces travaux rentrent dans le cadre de l’objet de ces organisations

(art. 3).

B. LA REPRESSION DE LA FRAUDE FISCALE

440 Introduction

La loi du 10 fevrier 1981 a opere la refonte complete des dispositions repressives de

l’ensemble des codes fiscaux 2 3, a la seule exception de la matiere des douanes et

accises 4 qui a conserve son autonomie. La fraude fiscale – dont l’ampleur exacte et le

combat qu’elle necessite restent chez nous des sujets tres controverses 5 – concerne

bien entendu tous les citoyens, mais elle est de nature a toucher plus particulierement

1. Doc. parl., Senat, 1974-1975, no 2, p. 13.2. Art. 449 a 463 C.I.R.; 73 a 74 C.T.V.A.; 207 C.T.A.T.; 206 a 207 C. enreg.; 133 C. succ.; 67 et s.

C. timbre. Pour la facilite de l’expose, nous nous limiterons a la matiere des impots sur les revenus.3. L. Huybrechts, ‘Fiscaal strafrecht’, A.P.R., Kluwer, 2002, 317 p.; Th. Afschrift et V.A. De

Brauwere,Manuel de droit penal financier, Kluwer, 2001, pp. 227-308; J.F. Goffin, Responsabilitesdes dirigeants de societes, Larcier, 2004, pp. 390-393; G. Rapaille et G. Steffens, Fraude fiscale etfaux fiscal, Qualifications et jurisprudence penales, La Charte, 2005 (mis a jour), 51 p.; J. Spreutels,F. Roggen, E. Roger France, Droit penal des affaires, Bruylant, 2005, pp. 731-871.

4. R. Van Camp, ‘Hoe bijzonder is het bijzonder strafrecht inzake douane en accijnzen?’, R.W., 1985-1986, pp. 833 a 868; C.A., 6 avril, 21 juin et 13 juillet 2000, M.B., 11 mai, 24 aout et 6 sept. 2000.

5. Voy. a titre d’exemple, J. de Longueville, ‘La fraude fiscale’, Reflexions offertes a Paul Sibille,Bruylant, 1981, pp. 411 a 424, ou le rapport de Monsieur G. Geens fait au nom de la Commission desFinances du Senat sur les Journees d’etudes consacrees a la fraude fiscale,Doc. parl., 872 (1993-1994),ou L. Simonet, ‘La fraude fiscale ou le devoir d’opposition’, J.T., 1985, pp. 657 a 665.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 70, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

70 – Livre 119.4 Kluwer

l’entreprise ou les possibilites – et les tentations – d’echapper a l’impot sont plus

grandes et se manifestent sur une echelle plus vaste. Le legislateur a fait preuve de

realisme en assurant une impunite fiscale et penale aux contribuables qui se sont

inscrits dans le cadre de la D.L.U. (declaration liberatoire unique) 1.

450 Les sanctions administratives

Avant d’aborder les sanctions penales proprement dites, il convient de mentionner

l’existence des sanctions administratives lesquelles, a la difference des premieres, ne

sont pas prononcees par le pouvoir judiciaire mais par l’administration 2. Leur

application quotidienne 3 en souligne toute l’importance. En matiere d’impots sur

les revenus, les sanctions administratives sont de trois ordres:

a. Les accroissements d’impots: l’article 444 du C.I.R. dispose ‘qu’en cas d’absence

de declaration ou de declaration incomplete ou inexacte, les impots dus sur la

portion des revenus non declares sont majores d’un accroissement d’impot fixe

d’apres la nature et la gravite de l’infraction, selon une echelle dont les graduations

sont fixees par le Roi et allant de 10 a 200% des impots dus sur la portion des

revenus non declares. En l’absence de mauvaise foi, il peut etre renonce au

minimum de 10% d’accroissement. Le total des impots dus sur la portion des

revenus non declares et de l’accroissement d’impot ne peut depasser le montant des

revenus non declares. L’accroissement ne s’applique que si les revenus

non declares atteignent 620 euros’. Les articles 225 a 229 de l’arrete royal

d’execution du 7 aout 1993 fixent la tarification selon l’echelle prevue par la loi.

Les auteurs 4 soulignent le caractere de peine de l’accroissement d’impot: la

1. Loi du 31 dec. 2003 instaurant une declaration liberation unique; J.P. Bours et X. Thiebaut, ‘La loi du31 decembre 2003 instaurant une declaration liberatoire unique’, J.T., 2004, pp. 630-643; D. VanHeuven et S. Logie, ‘De fiscale amnestiewet. En wat als het misloopt ? Een standpunt’, NjW, 2004,pp. 470-484; D. Garabedian (s.l.d.), La D.L.U., Rapports de la journee de recyclage organisee parl’ULB le 4 oct. 2004, Bruylant, 2004, 256 p. M. Eloy, ‘Une D.L.U. bis’, R.G.F. 2005, liv. 11, pp. 1-2.La loi-programme du 27 dec. 2005, en ses art. 121 et suiv., a encore permis le mecanisme sous le nomde declaration-regularisation; M. Maus, ‘Tweede zit voor de fiscale amnestie-bis? De voor- en nadelenvan de nieuwe regeling rond de fiscale regularisatie’, A.F.T., 2006, liv. 4, pp. 3-27.

2. Adde l’arret no 32/99 du 17 mars 1999 de la Cour d’arbitrage,M.B., 19 juin 1999, a propos de la legalitedes amendes infligees en matiere de droits de succession et J.L.M.B., 1999, p. 537.

3. Pour des exemples pratiques, voy. J.M. Nicolas, ‘Les sanctions administratives et penales en matiered’impots sur les revenus’, J.D.F., 1988, pp. 256 a 307.

4. J.-P. Spreutels et J.Messinne, ‘Questions speciales de droit penal, infractions fiscales’, L’entreprise endifficulte, Ed. Jeune Barreau de Bruxelles, 1981, p. 385. Cette solution conditionne l’application desgaranties inscrites dans l’art. 6 Convention europeenne des droits de l’homme. Voy. aussi Cour eur. D.H.,24 fevr. 1994, aff. Bendenoun c./ France, J.D.F., 1994, pp. 41 a 61, obs., ainsi que Cour eur. D.H., 22 fevr.1996, aff. Putz/Autriche, Rev. dr. pen., 1997, p. 924, note S.VanDrooghenbroeck; R.Verstraeten,‘Actualia van fiscaal strafrecht’, inOndernemingsstrafrecht, Die Keure, 1999, pp. 229-260. Cass., 5 fevr.1999, J.L.M.B., 1999, p. 537, note A. Demoulin, et Bull., 1999, 148; R.W., 1998-1999, p. 1352, note;J.D.F., 1999, p. 201, note M.B.; R. Cass., 2000, p. 213, note I. Van DeWoestijne; Cass., 25 mai 1999,Bull., 1999, p. 739; J.D.F., 1999, p. 321, noteM.B.C.A., n8 22/99,M.B., 30 avril 1999; J.L.M.B., 1999, p.532; J.T., 1999, p. 445. C.A., n8 32/99, 17 mars 1999,M.B., 19 juin 1999; F.J.F., 1999, p. 299, note; J.T.,1999, p. 766;R.W., 2000-2001, p. 104. C.A., n8 48/2001, 18 avril 2001,M.B., 19 juin 2001;Act. dr., 2001,p. 950, note B. Maquet; F.J.F., 2002, p. 334, note;R.W., 2001-2002, p. 1060. J. Put, ‘Bis, sed non idem:een denkoefening over de toepassing van het non bis in idem-beginsel op de cumulatie van administratieveen strafsancties’, R.W., 2001-2002, pp. 937-949. Adde V. Sepulchre, ‘Le controle juridictionnel desamendes fiscales’,R.G.C.F., 2003, liv. 2, pp. 5-25; Anvers (8e ch.), 8 juin 2000,Chron. D.S., 2002, p. 193.Adde A. Alen, ‘Naar een betere rechtsbescherming inzake administratieve geldboeten na de koerswij-ziging van het Hof van cassatie in zijn arresten van 5 februari 1999’, R.W., 1999-2000, pp. 630-638; S.Nudelholc et J. Kirkpatrick, ‘Le controle judiciaire des amendes fiscales et le principe de propor-tionnalite’,R.C.J.B., 2002, p. 573. La Cour europeenne des droits de l’homme a, par arret du 4mars 2004,condamne la Belgique, dans une affaire Silvester’s Horeca Service, parce que la Cour de cassationconcevait de maniere trop etroite le recours de pleine juridiction: Cour eur. D.H., 4 mars 2004, n8 47650/99, publie sur le site internet de la Cour, http://www.echr.coe.int.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 71, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 71

sanction est graduee selon la ‘gravite de l’infraction’, le Ministre dispose d’un

pouvoir de remise, etc.

b. Les amendes administratives: l’article 445 du C.I.R. autorise l’administration a

appliquer pour toute infraction aux dispositions du Code ainsi que des arretes pris

pour son execution, une amende de 50 a 1.250 euros.

c. La perte du droit de representer les contribuables: les articles 446 a 448 du

C.I.R. organisent, en la qualifiant de ‘sanction administrative’, une mesure parti-

culierement intimidante: la perte du droit de representer les contribuables. L’article

446 du C.I.R. dispose que ‘le Ministre des Finances peut, par arrete motive, refuser

pour une periode qui n’excede pas cinq ans, de reconnaıtre a toute personne le droit

de representer des contribuables en qualite de mandataire, sauf si cette personne est

soumise a une discipline professionnelle legalement organisee ou si elle exerce son

mandat en vertu de la loi ou d’une decision judiciaire’. Cette mesure peut frapper

les personnes physiques ou les organes de personnes morales et s’applique

notamment aux conseillers fiscaux, mais pas aux avocats, ni aux curateurs.

L’article 447 du C.I.R. organise la procedure aux termes de laquelle le Ministre

des Finances arrete sa decision qui doit etre motivee et peut etre soumise a la

censure du Conseil d’Etat. Elle est publiee au Moniteur 1.

460 Fraude fiscale et choix de la voie la moins imposee

Dans un arret d’une grande clarte 2, la Cour de cassation a confirme la liceite du choix

par le contribuable de la voie la moins imposee dans les termes suivants: ‘qu’il n’y a ni

simulation prohibee a l’egard du fisc ni, partant, fraude fiscale lorsque, en vue de

beneficier d’un regime fiscal plus favorable, les parties, usant de la liberte des

conventions, sans toutefois violer aucune obligation legale, etablissent des actes dont

elles acceptent toutes les consequences, meme si ces actes sont accomplis a seule fin

de reduire la charge fiscale’.

Elle condamne ainsi definitivement la theorie, soutenue frequemment par l’admi-

nistration depuis l’arret, egalement rendu a propos de la deduction de pertes suite a une

absorption, du 7 decembre 1979 (Pas., 1980, I, p. 446) selon laquelle il y aurait

simulation lorsque les actes poses par les parties ne correspondent pas a la realite

economique, meme lorsque les contribuables ont accepte toutes les consequences

civiles des actes souscrits.

Alors que la fraude fiscale (condamnable penalement) implique une violation de la

loi aux fins d’echapper a l’impot ou d’en reduire la charge, l’evasion fiscale (non

condamnable penalement), suppose, quant a elle, que le contribuable, tout en agissant

en vue d’eluder en tout ou en partie l’impot, n’enfreint pas la loi fiscale 3.

Ainsi, les baux ecrits d’immeubles sont obligatoirement enregistrables et soumis a

un droit proportionnel alors que le bail verbal d’immeubles n’est pas soumis au droit

d’enregistrement. Le bailleur et le locataire peuvent parfaitement convenir de

conclure un bail verbal pour eviter l’application du droit.

1. Voy. un exemple de publication de pareille sanction, M.B., 15 oct. 1994, p. 26.205.2. Cass., 22 mars 1990, J.L.M.B., 1990, pp. 700 a 705 et la note de F.D.3. J.Kirkpatrick et autres, L’entreprise et le choix de la voie la moins imposee en droit fiscal belge, Ed.

Jeune Barreau, Bruxelles, 1988, 269 p.; J. Kirkpatrick et O. Neirynck, ‘La repression penale de lafraude fiscale depuis les reformes de 1986 et de 1992’, Rev. dr. ULB, 1997, pp. 143-164.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 72, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

72 – Livre 119.4 Kluwer

470 La mesure generale anti-abus de droit

N’est pas opposable a l’administration des contributions directes, la qualification

juridique donnee par les parties a un acte ainsi qu’a des actes distincts realisant une

meme operation, lorsque l’administration constate par presomption ou par d’autres

moyens de preuve vises a l’article 340 du C.I.R. que cette qualification a pour but

d’eviter l’impot, a moins que le contribuable ne prouve que cette qualification reponde

a des besoins legitimes de caractere financier ou economique (art. 344, § 1er, C.I.R.

introduit par l’art. 16 loi 22 juill. 1993). Cette importante disposition fait exception

au principe du choix licite de la voie la moins imposee. L’inopposabilite qu’elle

institue porte sur la seule qualification juridique du ou des actes et non sur ceux-ci 1.

L’article 345, § 1er, 5o, du C.I.R. permet au contribuable de demander a la

commission des accords fiscaux prealables un accord quant au fait que ‘la qualifica-

tion juridique repond bien a des besoins legitimes de caractere financier ou econo-

mique’.

480 Les sanctions penales

Les sanctions penales principales

a. Texte d’incrimination generale. Article 449 du C.I.R.

‘Sans prejudice des sanctions administratives, sera puni d’un emprisonnement de huit

jours a deux ans et d’une amende de 250 a 12.500 euros 2 ou de l’une de ces peines

seulement, celui qui, dans une intention frauduleuse ou a dessein de nuire, contre-

viendra aux dispositions du present code ou des arretes pris pour son execution’.

L’element materiel – violation d’une disposition du C.I.R. ou de ses arretes

d’execution – ouvre un champ d’application considerable a cette infraction; le tribunal

doit preciser les dispositions legales ou reglementaires auxquels l’auteur a contrevenu

ou a eu l’intention de contrevenir 3. Les anciens textes se limitaient a enumerer et a

specifier les dispositions du Code dont la violation etait sanctionnee penalement.

Quant a l’element moral, l’infraction n’existe que si l’auteur a agi ‘dans une

intention frauduleuse ou a dessein de nuire’ 4, notion que nous avons deja rencontree

(voir a propos des faux en ecritures, no 230 de ce livre. Elle est plus large que la seule

intention ‘d’eluder l’impot ou de permettre a un tiers d’y echapper’ qui figurait dans

les textes anciens 5). Par contre, si d’autres intentions frauduleuses apparaissent (par

exemple, escroquer l’Etat, par exemple l’Administration de la T.V.A. 6, ou des

1. Th. Afschrift et A. Rayet, ‘La loi du 22 juillet 1993 et l’evitement licite de l’impot’, J.T., 1993,pp. 833 a 840; Th.Afschrift, L’evitement licite de l’impot et la realite juridique, Larcier, 1994, 373 p.

2. L’amende n’est pas, ainsi que le decide l’art. 457, § 2, C.I.R., augmentee par les decimes additionnels.3. Cass., 14 fevr. 2001, J.T., 2001, p. 539 et Rev. dr. pen., 2001, p. 875.4. Cass., 24 avril 2001, F.J.F., 2001, p. 677; Pas., 2001, p. 675; T. Strafr., 2002, p. 261. Corr. Hasselt, 28

nov. 2001, Limb. Rechtsl., 2002, p. 136, note S. Van Dyck.5. Intention frauduleuse ou dessein de nuire: il s’agit du dol special, dit le rapport a la Chambre (Doc.

parl., Chambre, sess. 1980-1981, no 737-3, p. 7) qui a ete suggere par la commission d’etude de larepression penale de la fraude fiscale en vue de faciliter la repression penale de ces infractions.L’intention frauduleuse et le dessein de nuire sont des notions suffisamment larges pour englobern’importe quelle intention delictueuse poursuivie par le contrevenant. Elles sont au surplus suffisam-ment connues par la doctrine et la jurisprudence pour eviter toute controverse au sujet de leurapplication. Voir egal. sur ce sujet, Doc. parl., Senat, sess. 1980-1981, no 566-2, annexe I. Cependant,les lois en matiere de douanes et accises punissent, en regle, la simple violation des reglements,abstraction faite de l’intention du contrevenant, sans prejudice de la force majeure ou de l’erreurinvincible (Cass., 11 fevr. 1997, Larc. Cass., 1997, p. 152; comp. Bruxelles, 26 mars 1997, J.D.F.,1997, p. 172).

6. Sur les societes de ‘taxis’ (fausses factures) et les carrousels T.V.A., voy. J. Spreutels, F. Roggen, E.Roger France, Droit penal des affaires, Bruylant, 2005, pp. 864-868.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 73, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 73

donneurs de credit), le juge penal retiendra l’application des textes penaux qui portent

la peine la plus forte 1.

b. Faux en ecritures et faux certificats. Article 450 du C.I.R.

L’article 450, alinea 1er punit ‘d’un emprisonnement d’un mois a cinq ans et d’une

amende de 250 a 12.500 euros ou de l’une de ces peines seulement, celui qui, en vue

de commettre une des infractions visees a l’article 449, aura commis un faux en

ecritures publiques, de commerce ou privees, ou qui aura fait usage d’un tel faux’.

C’est le faux en vue d’eluder l’impot dont le texte tres large, englobe tous les faux en

ecritures, y compris les faux dans les comptes annuels des societes.

L’article 450, alinea 2, du C.I.R. punit d’un emprisonnement de huit jours a deux ans

et d’une amende de 250 a 12.500 euros ‘celui qui, sciemment etablira un faux certificat

pouvant compromettre les interets du tresor ou fera usage de pareil certificat’.

c. Faux temoignage. Article 451 du C.I.R.

L’article 451 du C.I.R. punit, conformement aux dispositions des articles 220 a 224 du

Code penal, ‘celui qui fera un faux temoignage, l’interprete ou l’expert qui fera une

fausse declaration, celui qui subornera un ou plusieurs temoins, experts ou interpretes

dans l’un des cas d’enquete autorises par les articles 322, 325 et 374 du C.I.R.’.

d. Entrave au controle. Article 452 du C.I.R.

Cette disposition sanctionne le defaut de comparaıtre ou le refus de temoigner dans les

enquetes dont il vient d’etre question.

e. Violation du secret professionnel. Article 453 du C.I.R.

Cette disposition sanctionne la violation du secret professionnel par les personnes

mentionnees a l’article 337 du meme Code, a savoir tous ceux qui interviennent a

quelque titre que ce soit dans l’application de la loi fiscale ou ont acces aux bureaux du

fisc ainsi que les agents des services administratifs de l’Etat, y compris les greffes et

les parquets auxquels l’administration fiscale communique des renseignements.

Les sanctions penales accessoires

a. Interdiction particuliere. Article 454 du C.I.R.

L’article 421 du C.I.R. permet de contraindre certains contribuables dont la valeur des

biens en Belgique est insuffisante pour couvrir le montant de leurs obligations fiscales

d’une annee, a fournir une garantie reelle ou une caution personnelle. Si cette surete

1. Cass., 18 juin 2003, F.J.F., 2003, p. 762; T.F.R., 2003, liv. 252, p. 1078, note A. Buggenhout et J.Speecke. Adde F. Roggen, ‘Faux fiscal – faux penal – usage – prescription’, in Droit penal des

affaires, Bruxelles, Ed. Jeune Barreau, 1991, pp. 49 a 82; G. Steffens, ‘Examen de quelques problemesactuels de droit penal fiscal’, Rev. dr. pen., 1988, pp. 306 a 307, estime que des que l’intentioncaracterisant le faux ne se limite pas a la fraude fiscale, il faut envisager de retenir egalementl’infraction correspondante du Code penal; voir en ce sens, Corr. Bruxelles, 4 mars 1992, J.L.M.B.,1993, p. 30. Adde J. Kirkpatrick et O. Neyrinck, ‘La repression penale de la fraude fiscale depuis lesreformes de 1986 et de 1992’, Rev. dr. ULB, vol. 15, 1997-1, p. 147; B. Spriet, ‘Samenloop tussengemeenrechtelijke misdrijven en misdrijven uit het bijzonder ondernemingsstrafrecht (bv. sociaal,fiscaal of economisch strafrecht) of lex specialis/lex generalis-regel’, in Ondernermingsstrafrecht, DieKeure, 1999, pp. 203-224.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 74, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

74 – Livre 119.4 Kluwer

n’est pas constituee dans le delai imparti et si des poursuites penales sont intentees

pour violation de l’article 421, le juge peut interdire a ce contribuable d’exercer son

activite professionnelle jusqu’a ce qu’il se soit mis en regle 1. Le juge peut egalement

ordonner la fermeture de l’etablissement exploite en Belgique par ce contribuable.

b. Interdiction de l’exercice de certaines professions 2

L’article 455, § 1er, du C.I.R. prevoit que le juge peut, en le condamnant du chef de

l’une des infractions visees aux articles 449 a 453, prononcer en outre une interdiction

d’exercer sa profession pour une duree de trois mois a cinq ans a l’egard:

– du conseiller fiscal;

– de l’agent d’affaires;

– de l’expert en matiere fiscale ou comptable;

– du titulaire de toute autre profession qui a pour objet de tenir ou d’aider a tenir les

ecritures comptables, que ce soit pour compte propre ou comme dirigeant, comme

membre ou comme employe de societe, association, groupement ou entreprise

quelconque;

– ou plus generalement de celui dont la profession consiste a conseiller ou a aider un

ou plusieurs contribuables dans l’execution des obligations definies par la loi

fiscale.

Il s’agit d’une peine accessoire car elle ne peut etre prononcee qu’en cas de

condamnation du chef d’une infraction principale. Elle est egalement facultative:

‘le jugement pourra’...

c. Fermeture d’etablissement

Le meme article 455 du C.I.R. prevoit que le juge peut, en outre, a l’egard des

titulaires des memes professions, ‘en motivant sa decision sur ce fait, ordonner la

fermeture, pour une duree de trois mois a cinq ans, des etablissements de la societe,

association, groupement ou entreprise dont le condamne est dirigeant ou employe’.

d. Violation des mesures d’interdiction ou de fermeture

L’article 456 du C.I.R. punit d’un emprisonnement de huit jours a deux ans et d’une

amende de 250 a 12.500 euros ou de l’une de ces peines seulement celui qui,

directement ou indirectement, enfreint l’interdiction ou la fermeture prononcee en

vertu des articles 454 et 455 du C.I.R.

485 Paiement des droits eludes et solidarite fiscale

La condamnation penale est accompagnee d’une condamnation au paiement des droits

fiscaux eludes: il a ete decide que l’action de l’administration tendant au paiement des

droits eludes ne decoule pas de l’infraction, mais trouve directement son fondement

1. Voy. p. ex., Cass., 16 sept. 1987, Rev. dr. pen., 1988, p. 74.2. Voy. J.P. Spreutels, ‘Les conseils fiscaux et la repression penale de la fraude fiscale’, J.D.F., 1981,

pp. 321 et s.; P. Troisfontaines, ‘La responsabilite penale des conseils fiscaux’, Acta Falconis,Faculteit Rechtsgeleerdheid, K.U.Leuven, 1983/5, pp. 147-166; R.Verstraeten, ‘Actualia van fiscaalstrafrecht’, in Ondernemingsstrafrecht, Die Keure, 1999, pp. 229-260. Th. Afschrift, ‘La responsa-bilite personnelle des conseillers professionnels des contribuables’, J.D.F., 2002, pp. 5-31. L’interdic-tion professionnelle prevue par l’art. 455, § 1er, 18 C.I.R. 1992 est prononcee a l’encontre de lapersonne physique exercant la profession de conseiller fiscal, que ce soit pour son propre compte ou entant que dirigeant ou employe d’une quelconque societe, association, groupement ou entreprise: Cass.,24 avril 2001, F.J.F., 2001, p. 601 et Pas., 2001, p. 673.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 75, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 75

dans la loi qui impose le paiement des droits; cette action civile, quoiqu’etant

incidente a l’action publique, est independante de celle-ci 1.

Une autre disposition, dans le prolongement de la precedente, est egalement d’une

importance considerable; l’article 458 C.I.R. (ou 73sexiesC.T.V.A.) prevoit en effet la

‘solidarite fiscale’, pour le paiement des impots eludes, entre tous les auteurs ou

complices d’infraction aux articles 449 a 452 2.

Cette mesure de solidarite s’applique d’office sans que le juge penal doive la

prononcer 3.

490 La charte du contribuable

La loi du 4 aout 1986 – modifiee par celle du 28 decembre 1992 – instaure de

nouvelles regles relatives a la ‘securite juridique du contribuable’ 4:

1. L’infraction fiscale est traitee de la meme maniere qu’un delit de droit commun.

Ainsi, le juge peut-il ne prononcer qu’une peine d’emprisonnement ou d’amende

ou ces deux peines simultanement. De meme, la suspension du prononce de la

condamnation et l’application du sursis – y compris pour les amendes – sont depuis

lors possibles.

2. Les fonctionnaires des administrations fiscales, repondant depuis la loi du 23 mars

1999 a un regime harmonise entre les administrations fiscales, ne peuvent denoncer

au procureur du Roi les infractions a la loi fiscale sans autorisation du directeur

regional dont ils dependent 5. L’article 29, alinea 2, du Code d’instruction crimi-

nelle a pour objectif ‘d’eviter les disparites dans les poursuites resultant de

denonciations par des agents du fisc sans respecter des criteres uniformes pour

tous les contribuables’ 6.

3. Lorsque le parquet veut engager des poursuites pour des delits fiscaux dont il a

connaissance autrement que par une plainte ou une denonciation de l’administra-

tion, il peut (et non doit) demander l’avis du directeur regional competent. Le

1. Cass., 13 janv. 1999, Larc. cass., 1999, no 2, 34. Comp. Cass., 8 sept. 1999, J.L.M.B., 2000, p. 312, noteF.Roggen: ‘Les dispositions du code des impots sur les revenus qui prolongent les delais d’impositionen cas de fraude et en cas d’action judiciaire dirigee contre le redevable ou contre un tiers excluent que

l’Etat puisse, apres l’expiration de ces delais d’ordre public, obtenir par voie d’une action civile

exercee devant la juridiction repressive, la condamnation de la personne qui remplit les conditions

legales de debition de l’impot, au paiement de celui-ci, meme a titre de reparation du dommage qui

resulterait de l’absence d’enrolement dans le delai legal’. Cass., 4 fevr. 2003, sur le site de la Cour:cette regle ne viole pas le principe ‘non bis in idem’.

2. Cass., 11 oct. 1996, Pas., 1996, I, 975: ‘Le fonctionnaire charge du recouvrement de la taxe, des

interets, des amendes fiscales et des accessoires, peut decerner une contrainte non seulement contre le

redevable mais egalement contre les personnes solidairement tenues au paiement de l’impot elude,

ensuite de leur condamnation en tant qu’auteur d’une infraction fiscale, meme si le juge penal n’a pas

expressement prononce la solidarite.’3. Cass., 15 oct. 2002, F.J.F., 2003, p. 237, et T. Strafr., 2004, p. 122, note J. Rozie. Corr. Gand, 27 oct.

2000, T.F.R., 2001, 442, note S. Huyghe.4. Sur cette matiere, voy. P. Troisfontaines, ‘La loi du 4 aout 1986 et la repression penale de la fraude

fiscale’, Ann. Dr. Lg., 1986, no 7, p. 552 et s.; P.Goeminne, ‘Reflexions relatives a la securite juridiquedu contribuable’, Rev. dr. pen., 1988, p. 843 et s.; F.DeMot, Fiscaal strafprocesrecht, Kluwer, 1988,252 p.; P. Lambeau, Elements de procedure penale en matiere fiscale au regard des dispositions

introduites par la loi du 4 aout 1986; R. Forestini, Fiscalite approfondie des societes, De Boeck,1989, pp. 221 a 262; G. Steffens, ‘Cinq ans d’application de la charte du contribuable’, Act. dr., 1993/2, p. 485 et s.

5. Cette autorisation n’est soumise a aucune forme ou regle speciale de preuve, selon Cass., 18 avril 1994,Bull., 1994, no 186; Cass., 28 janv. 1997, Larc. Cass., 1997, p. 104. Cette autorisation ne concerne pasla denonciation d’infractions de droit commun, mais si les recherches debouchent sur des infractionsfiscales: Cass. (2e ch.) 22 juin 2004, RG P.04.0397.N, sur le site http://www.cass.be.

6. Doc. parl., Senat, 1985-1986, no 310-2, 2o, p. 5; Adde le rapport d’activites 2000 de la Cour decassation, pp. 142-146, consacre au theme de l’interdiction de cooperation en matiere fiscale. O. VanOudenhove, ‘Possibilites actuelles de collaboration entre les autorites judiciaires et les services depolice d’une part, et les fonctionnaires des administrations fiscales d’autre part, lors du traitement desaffaires penales’, J.D.F., 1998, p. 193 et s.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 76, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

76 – Livre 119.4 Kluwer

procureur du Roi joint, a sa demande d’avis, les elements de fait dont il dispose. Le

directeur regional doit, dans les quatre mois de sa reception, repondre a cette

demande. La demande d’avis ne suspend pas l’action publique (art. 461 C.I.R.) 1.

L’article 460, § 1er, prevoyant que l’action publique est exercee par le parquet,

est maintenu: cela signifie qu’il apprecie seul l’opportunite d’entamer ou non des

poursuites quel que soit l’avis, s’il est sollicite, rendu par le directeur.

4. Le juge auquel est soumis le dossier penal du contribuable etait tenu de surseoir a

statuer:

– si la dette d’impot est contestee devant une autre autorite judiciaire ou adminis-

trative;

– et s’il estime que la solution de cette contestation paraıt de nature a exercer une

influence sur l’action publique (art. 462 C.I.R.) 2.

Au cours de cette periode d’attente, la prescription de l’action publique est

suspendue.

Cette surseance a ete supprimee par la loi du 15 mars 19993.

5. Les fonctionnaires de l’administration fiscale ne peuvent plus jouer de role actif

(comme participer aux perquisitions, aux descentes sur les lieux ou aux inter-

rogatoires du juge d’instruction). Ces actes leur sont devenus interdits. Dans la

procedure penale relative a un contribuable, ils ne peuvent ‘sous peine de nullite de

l’acte de procedure... etre entendus que comme temoins’ (art. 463, al. 1er, C.I.R.).

Ont par contre la qualite d’officier de police judiciaire auxiliaire du procureur du

Roi les fonctionnaires detaches aupres du parquet en vertu de l’article 71 de la loi

du 28 decembre 1992. Cet article prevoit la mise a la disposition du procureur du

Roi ou de l’auditeur du travail de fonctionnaires aux fins d’assister ces magistrats

dans l’exercice de leurs missions 4.

6. Des postes de substituts specialises en matiere fiscale ont ete crees (art. 151, al. 4,

C. jud.). Ces magistrats ont la particularite de pouvoir exercer leurs fonctions

specialisees dans tous les tribunaux dependant du ressort de la cour d’appel ou ils

ont ete nommes.

500 La fraude communautaire

La fraude commise au prejudice des interets financiers de l’Union europeenne 5 peut

prendre des formes tres diverses, mais touche regulierement a la matiere fiscale au

sens large: irregularites en matiere de T.V.A. 6, obtention indue de subventions

1. Cass., 23 fevr. 1999, Bull., 1999, 271; Cass., 28 janv. 1997, Pas., 1997, I, 120.2. Corr. Bruxelles, 29 juin 1988, J.T., 1989, p. 47; Anvers (ch. m. acc.), 29 mai 1990, F.J.F., 1990, p. 339;

Bruxelles, 12 oct. 1990, J.T., 1990, p. 478; Bruxelles, 13 fevr. 1992, Rev. dr. pen., 1993, p. 104;Bruxelles, 25 juin 1993, J.D.F., 1993, p. 249, obs; C.Dauby, ‘Qu’en est-il des questions prejudiciellesen procedure penale fiscale? En particulier dans le cadre de l’article 462 C.I.R., 1992’ Act. dr. 1998,p. 93 et s.

3. Anvers, 23 juin 1999, Act. dr., 1999, p. 723, note L. Orban.4. Adde l’arrete royal du 22 dec. 2000, M.B., 29 dec. 2000, pour ces modalites d’assistance.5. Sur cette matiere, voy. F. Tulkens, C. Van den Wyngaert et I. Verougstraete, La protection

juridique des interets financiers des Communautes europeennes, Anvers, Maklu, 1992, 289 p.; C. Vanden Wyngaert, ‘E.E.G.-fraude en strafrecht: waarom komen er zo weinig fraudegevallen voor destrafrechter?’, Liber amicorum J. D’Haenens, 1993, pp. 333 a 354; L. Huybrechts, Th. Marchan-

dise et F. Tulkens, La lutte contre la fraude communautaire dans la pratique, Bruylant, 1993, 244 p.;J.A.E. Vervaele, La fraude communautaire et le droit penal des affaires, Paris, P.U.F., 1994, 436 p.;P.DeKoster, ‘La lutte contre les fraudes aux interets financiers des Communautes europeennes’, Rev.dr. U.L.B., 1997, pp. 7-85. J.Messinne et F. Bultot, Les instruments juridiques belges de lutte contrela fraude aux interets financiers des Communautes europeennes, ed. Bruylant-Maklu, 1998.

6. Art. 70 a 74bis C.T.V.A. L. Moreillon et A. Willi-Jayet, Cooperation judiciaire penale dans

l’Union europeenne, Bruxelles, Bruylant, 2005, 745 p.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 77, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 77

allouees sous la forme de primes ou d’incitations 1, moyens tendant a eluder les taxes a

l’importation et a obtenir un remboursement indu a l’exportation 2; ce dernier type de

fraude a principalement trait a des manipulations au sujet de la qualite, de la quantite

et de la composition de la marchandise, a la designation du pays de destination ou

d’origine ou a des simulations d’exportation une fois qu’ont ete obtenus les montants

compensateurs en faisant appel a un reseau de connivence 3. La repression de ces

pratiques frauduleuses s’appuie egalement sur les dispositions penales sanctionnant le

faux et l’usage de faux en ecritures, l’escroquerie, ...

C. LES INFRACTIONS A LA REGLEMENTATION COMPTABLE

510 Champ d’application

Par la loi du 17 juillet 1975, le legislateur a mis en place une reglementation generale

de la tenue de la comptabilite des entreprises et des modes d’elaboration et de

presentation de leurs comptes annuels. L’article 17 de cette loi prevoit des sanctions

penales:

– d’une part a l’egard des dirigeants d’entreprises en cas de manquements a

certaines obligations comptables (art. 17, al. 1er et 2);

– d’autre part a l’egard des professionnels de la comptabilite et du controle 4.

La loi du 7 mai 1999 contenant le Code des societes, publiee au M.B., du 6 aout 1999

entree en vigueur le 6 fevrier 2001, a assure une refonte de la reglementation

comptable en tant que cette derniere s’applique aux societes: dorenavant, les dis-

positions comptables se trouveront d’une part dans le Code des societes, pour

s’appliquer aux societes, d’autre part dans la loi du 17 juillet 1975 et ses arretes

royaux pour les autres entreprises’ ‘non societaires’ 5 Par ailleurs, par l’effet de cette

meme codification, l’article 17 de la loi du 17 juillet 1975 relative a la comptabilite et

aux comptes annuels des entreprises devient l’article 16 de la loi relative a la

comptabilite des entreprises.

Le droit penal comptable ne peut echapper a la vigilance du chef d’entreprise: il

faut savoir que les infractions en cette matiere sont parmi celles qui donnent le plus

souvent lieu a des poursuites repressives. ‘Ceci s’explique par l’importance primor-

1. A.R. 31 mai 1933 modifie par loi 7 juin 1994, relatif a la perception illegale de subventions, indemniteset allocations qui sont, en tout ou en partie, a charge de l’Etat, d’une autre personne morale de droitpublic, de la Communaute europeenne ou d’une autre organisation internationale ou qui est, en tout ouen partie, composee de deniers publics.

2. Art. 220 a 285 loi generale 18 juill. 1977 sur les douanes et accises, constituant le droit penal douanier.3. A. De Nauw, Les metamorphoses administratives du droit penal de l’entreprise, Gand, Mys &

Breesch, 1994, pp. 155 a 163.4. Sur cette matiere, voy. P. Troisfontaines, Les dispositions penales de la loi du 17 juillet 1975 relative

a la comptabilite et aux comptes annuels des entreprises, recyclage C.U.P., La Charte, 1985, pp. 76 a111; F. Deruyck, ‘De strafbepalingen in de wet van 17 juli 1975 m.b.t. de boekhouding en dejaarrekening van ondernemingen’, Liber amicorum P. De Vroede, Kluwer RechtswetenschappenBelgie, 1994, pp. 607 a 630. D. Matray, ‘Punir le dirigeant ou proteger l’entreprise’, Le droit des

affaires en evolution, Bruylant, 1995, pp. 261 a 310. J.F. Goffin, Responsabilites des dirigeants desocietes, Larcier, 2004, pp. 384-390.

5. M.DeWolf, ‘Le droit comptable des societes’, in Centre J. Renauld, (U.C.L.),’ Le nouveau code dessocietes, actes d’une journee d’etudes du 24 nov. 1999, Bruylant, 1999, pp. 311-329; G. Keutgen etPh. Lambrecht, ‘La dimension des societes – Emprunts au droit comptable et au droit financier’, ibid.,p. 211 et s.; M.A.Delvaux et M.Coipel, ‘Le code des societes’, J.T., 2000, pp. 546 a 548, no 5 a 8, quiinsistent notamment sur la consequence de cette codification du droit comptable quant a un elargisse-ment des hypotheses de responsabilite civile des administrateurs, gerants et commissaires. M.A.Delvaux, ‘Sanctions des violations du droit comptable durant la vie de la societe en dehors de toutehypothese de faillite’, J.D.S.C., 2000, p. 316. Voy. egalement infra, no 880 et s. concernant le nouveaudroit penal des societes. Adde la loi du 23 janvier 2001 modifiant le Code des societes, M.B., 6 fevr.2001 et l’arrete royal du 30 janv. 2001 portant execution du Code des societes, M.B., 6 fevr. 2001.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 78, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

78 – Livre 119.4 Kluwer

diale que revetent la comptabilite et les comptes annuels dans l’image que la societe

donne d’elle-meme a ses fournisseurs, a ses banquiers, a ses clients, a son personnel, a

ses actionnaires et aussi a l’administration fiscale ou au service des enquetes

commerciales des tribunaux de commerce’ 1.

L’etendue et les conditions de mise en œuvre de la responsabilite des dirigeants

d’entreprise varient selon qu’il s’agit de dirigeants de petites entreprises ou de

dirigeants de moyennes et grandes entreprises. Il importe donc de definir, au prealable,

ces notions.

520 Les petites entreprises

Ce sont les commercants, personnes physiques ou societes en nom collectif ou en

commandite simple dont le chiffre d’affaires hors T.V.A. du dernier exercice ne

depasse pas 20 millions de F. (art. 5).

Ces entreprises ont la faculte d’opter pour le regime de comptabilite simplifiee

prevu par l’article 5, alinea 2. Les SA, SPRL, et societes cooperatives, quelle que soit

leur taille, sont exclues de ce regime de comptabilite.

Ce regime des petites entreprises subsiste dans l’article 5 de la loi du 17 juillet 1975

modifiee par la loi du 7 mai 1999, et l’arrete royal du 12 septembre 1983 portant

execution de cette disposition, subsiste telle quelle apres la codification du droit des

societes.

530 Les moyennes et grandes entreprises en route vers les petites societes et les autres

societes

L’article 12 de la loi du 17 juillet 1975 relative a la comptabilite et aux comptes

annuels des entreprises a ete abroge par la loi du 7 mai 1999 contenant le Code des

societes. Il n’est cependant pas sans interet, dans un premier temps, de rappeler la

definition de cette distinction.

Les moyennes entreprises: ce sont les entreprises qui, quelle que soit leur forme

juridique, ne depassent pas plus d’une des limites suivantes (art. 12, § 2):

– nombre de travailleurs occupes, en moyenne annuelle, 50;

– chiffre d’affaires annuel, hors T.V.A., 200 millions de F.;

– total du bilan, 100 millions de F.;

sauf si le nombre des travailleurs occupes en moyenne annuelle depasse 100, auquel

cas elles sont considerees comme grandes entreprises quel que soit leur chiffre

d’affaires ou le total du bilan.

Les entreprises moyennes sont soumises aux memes obligations comptables que les

grandes entreprises a la seule difference que leurs comptes annuels peuvent etre

etablis, presentes et publies selon un schema abrege.

Les grandes entreprises: ce sont celles qui depassent les limites fixees par l’article

12, § 2, enumerees ci-dessus.

L’abrogation de cet article 12 de la loi du 17 juillet 1975 a entraıne l’adoption d’un

article 15 dans le Code des societes qui donne naissance a une nouvelle entite, ‘la

petite societe’, par opposition aux grandes entreprises ou plutot aux autres societes;

est une petite societe celle qui, dotee de la personnalite juridique, tout en n’employant

pas plus de 100 travailleurs, ne depasse pas, pour le dernier exercice cloture, plus

d’une des trois limites suivantes: 50 travailleurs occupes en moyenne annuelle;

1. J.-M. Debacker et O. Ralet, Responsabilites des dirigeants de societes, Duculot, 1984, p. 174,no 131.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 79, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 79

200 millions hors T.V.A. de chiffre d’affaire annuel; 100 millions de total du bilan; si

une societe n’est pas une petite societe, ni une petite entreprise, elle est une autre

societe ou societe soumise au regime comptable ‘normal’. Ces petites societes

peuvent, en conformite avec l’article 93 C. soc., etablir leurs comptes annuels selon

un schema abrege fixe par le Roi.

540 Le regime des moyennes et grandes entreprises en route vers les petites societes et

les autres societes

L’article 16, alinea 1er, de la loi du 17 juillet 1975 modifiee par la loi du 7 mai 1999,

punit les commercants, personnes physiques, et les administrateurs, gerants, directeurs

ou fondes de pouvoirs de personnes morales qui ne relevent pas du regime des petites

entreprises de l’article 5 de cette loi du 17 juillet 1975, et qui contreviennent aux regles

et obligations comptables suivantes:

a. l’obligation de tenir une comptabilite appropriee a la nature et a l’etendue des

activites de l’entreprise (art. 2);

b. l’obligation de tenir une comptabilite complete (art. 3, al. 1er);

c. l’obligation de tenir une comptabilite appropriee pour les associations momenta-

nees ou en participation (art. 3, al. 3);

d. les regles imposees pour la tenue de la comptabilite (art. 4) (comptabilite en partie

double, livres obligatoires, methodes d’enregistrement comptable, etablissement

d’un plan comptable approprie qui reponde aux exigences du plan comptable

minimum normalise);

e. les regles concernant les pieces justificatives de toute ecriture comptable (art. 6);

f. l’obligation d’etablir une fois l’an au moins un inventaire complet des avoirs et

droits de toute nature de l’entreprise, de ses dettes, obligations et engagements de

toute nature relatif a son activite et des moyens propres qui y sont affectes, en

respectant les regles d’evaluation inscrites aux articles 15 a 36 de l’arrete royal du

8 octobre 1976 (art. 7 devenu art. 9);

g. les regles concernant la forme et le contenu des comptes annuels (bilan, compte de

resultats et annexe) (art. 7 et A.R. 8 oct. 1976);

h. les regles relatives a la tenue et a la conservation des livres (art. 8 et 9 devenus art.

7 et 8);

i. les regles relatives au depot et a la publication des comptes annuels (art. 10 devenu

art. 97 C. soc.) 1;

j. les dispositions de l’arrete royal du 6 mars 1990 relatif aux comptes consolides pris

en execution de l’article 11 de la loi autorisant le Roi a imposer aux entreprises

qu’Il determine, l’etablissement, le controle et la publicite de «comptes consoli-

des». Cet article 11 a cede sa place a l’obligation de consolidation des comptes

inscrite dans les art. 116, 117, 122, 123, 145 et 149 C. soc.

L’article 126, § 1er, alinea 1er, 1o, 2o et alinea 2 C. soc. sanctionne de la meme peine

que celle prevue par l’article 16 de la loi du 17 juillet 1975, les dirigeants de societes

1. Pour l’essentiel, ces regles relevent du droit des societes qui prevoit pour les SA (art. 80 L.C.S.C.

devenu 98 C. soc.), les SCA (art. 107 L.C.S.C. devenu 657 C. soc.), les SPRL (art. 137 L.C.S.C. devenu98 C. soc.) et les SC (art. 158 L.C.S.C. devenu 98 C. soc.), l’obligation de deposer les comptes annuels ala Banque nationale de Belgique dans les trente jours de leur approbation par l’assemblee generale. Laviolation de ces dispositions est sanctionnee penalement par les art. 201, 4o et 204, 2o, L.C.S.C.renumerotes dans le nouveau Code des societes (voy. infra, no 900). Voy. a ce propos, Corr. Gand,15 avril 1994, T.R.V., 1994, p. 342, note Wyckaert, ‘Het wanbedrijf van niet-neerlegging derjaarrekening’.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 80, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

80 – Livre 119.4 Kluwer

qui contreviennent aux dispositions du Code des societes relatives aux comptes

annuels et a leurs arretes d’execution.

550 Le regime des petites entreprises

Il a deja ete precise que le regime des petites entreprises subsistait apres la codification

du droit des societes par la loi du 7 mai 1999, sous la reserve que l’article 17 de la loi

du 17 juillet 1975 est desormais l’article 16.

Les dirigeants d’une petite entreprise ne sont sanctionnes penalement pour avoir

meconnu leurs obligations comptables que si l’entreprise a ete declaree en faillite

(art. 17, al. 2 devenu art. 16, al. 2).

Cette condition de declaration de faillite par le tribunal de commerce constitue la

difference essentielle avec le regime des dirigeants de moyennes et grandes entre-

prises. Contrairement a ces derniers, les dirigeants de petites entreprises ne peuvent

pas etre poursuivis penalement pour violation des obligations comptables durant la vie

economique de l’entreprise, sous reserve de la repression penale via les dispositions

du Code de la T.V.A. 1. Cette difference est surprenante car c’est souvent au sein des

petites entreprises que l’on constate les lacunes comptables les plus graves.

Les obligations comptables sanctionnees penalement sont evidemment beaucoup

moins nombreuses pour les petites entreprises que pour les moyennes et les grandes

entreprises. Il s’agit essentiellement:

1. de l’obligation de tenir trois journaux: livre de tresorerie ou livre journal financier,

livre des achats et livre des ventes (art. 5);

2. de l’obligation d’etablir un inventaire et des comptes annuels (art. 7 devenu art. 9);

3. des regles de forme auxquelles la comptabilite doit satisfaire (art. 6, 8, 9 devenus

art. 6, 7, 8 et art. 4 a 9 A.R. 12 sept. 1983): pieces justificatives, regles relatives a la

tenue et a la conservation des journaux et livres comptables.

560 Les personnes responsables

Selon l’article 16, alinea 1er de la loi du 17 juillet 1975, les auteurs penalement

responsables sont ‘les commercants, personnes physiques, et les administrateurs,

gerants, directeurs ou fondes de pouvoirs de personnes morales’. Les articles deja

mentionnes du Code des societes, specialement l’article 126, sanctionnent pour leur

part ‘les administrateurs, gerants, directeurs ou mandataires de societes’. Seules les

personnes ayant ces qualites pourront donc etre condamnees, a condition bien entendu

qu’une faute personnelle puisse leur etre reprochee 2.

1. Selon l’article 14 A.R. no 1 du 29 decembre 1992 relatif aux mesures tendant a assurer le paiement de lataxe sur la valeur ajoutee, tout assujetti a la T.V.A. doit tenir une comptabilite suffisamment detailleepour permettre l’application de la taxe et le controle de la perception exacte de celle-ci; la violation deces obligations comptables, imposees dans une optique certes fiscale, est sanctionnee penalement parl’article 73 C.T.V.A. qui porte une peine d’emprisonnement de 8 jours a 2 ans et/ou une amende de 250a 12.500 euros. pour celui qui a meconnu la loi dans une intention frauduleuse ou a dessein de nuire.

2. Corr. Bruxelles, 26 juin 1980, cite par J.-P. Spreutels et J. Messinne, ‘Questions speciales de droitpenal’, L’entreprise en difficulte, Ed. Jeune Barreau de Bruxelles, 1981, p. 346; Bruxelles, 28 juin 1993,J.T., 1993, p. 782. Bruxelles, 23 dec. 1987, Rev. prat. soc., 1988, p. 53; Corr. Bruxelles, 5 nov. 1987,Rev. prat. soc., 1987, p. 70; Corr. Bruxelles, 29 fevr. 1996, Rev. dr. pen., 1996, p. 1148. Bruxelles,28 juin 1993, J.T., 1993, p. 782: ‘S’il est vrai que l’obligation legale de la tenue de la comptabilite pesesur le dirigeant de l’entreprise qui ne peut s’en liberer en endossant cette obligation au comptable qu’ils’est choisi a cette fin, il n’en demeure pas moins que l’infraction a l’article 17 de la loi du 17 juillet1975 sur la comptabilite des entreprises doit avoir ete commise sciemment, ce qui suppose laconnaissance effective de l’irregularite des comptes ou l’ignorance inexcusable de cette irregularite’.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 81, 2 October 2006, 15:41 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 81

D’autres personnes, tel un expert-comptable independant, peuvent aussi etre

sanctionnees comme coauteurs ou complices de l’infraction: selon l’alinea 4 de

l’article 16 de la loi du 17 juillet 1975 et l’article 17 C. soc., les regles relatives a

la participation sont en effet applicables aux infractions comptables.

570 Les sanctions

Les infractions prevues sont punies d’une amende de 50 a 10.000 euros si l’auteur a

agi ‘sciemment’; la loi prevoit un emprisonnement d’un mois a un an et une amende

de 50 a 10.000 euros (ou l’une de ces peines) si l’auteur a agi ‘avec une intention

frauduleuse’ 1.

580 La responsabilite penale des professionnels du controle comptable

Les articles 16, alinea 3 de la loi du 17 juillet 1975 et 171, § 2 C. soc., punissent ceux

qui, en qualite de commissaire, de commissaire-reviseur ou d’expert independant, ont

atteste ou approuve des comptes, des comptes annuels, des bilans et des comptes de

resultats ou des comptes consolides, lorsque les dispositions enumerees a l’alinea 1er

n’ont pas ete respectees. Le professionnel pourra etre sanctionne penalement non

seulement s’il savait que des dispositions legales n’avaient pas ete respectees mais

egalement s’il n’a pas accompli «les diligences normales», pour s’assurer qu’elles

avaient ete respectees. Ce qui est donc reprime ici, n’est pas le fait d’avoir enfreint les

prescriptions de la loi comptable, mais le fait d’avoir – par son attestation ou son

approbation – donne foi a une comptabilite irreguliere 2.

Les sanctions sont les memes que pour les dirigeants d’entreprise:

– amende de 50 a 10.000 euros si le professionnel a agi sciemment ou a commis une

negligence professionnelle;

– emprisonnement d’un mois a un an et/ou une amende de 50 a 10.000 euros s’il y a

intention frauduleuse.

D. LES INFRACTIONS A LA REGLEMENTATION DES PRIX

590 Ubiquite de la reglementation des prix

La loi du 30 juillet 1971 sur la reglementation economique et les prix, modifiant

l’arrete-loi du 22 janvier 1945, revet une importance pratique considerable parce qu’il

n’existe pratiquement plus, a l’heure actuelle, de secteur commercial ou industriel

echappant aux prescriptions qu’elle edicte 3.

1. J.-P. Bours, ‘Droit penal comptable – Le poids d’un adverbe’, L’Echo, 10 mars 1992, p. 8.2. Comp. Corr. Neufchateau, 26 janv. 1995 et Liege, 25 janv. 1996, Rev. prat. soc., 1997, pp. 177 et s. et

note A. Benoit-Moury et N. Thirion, ‘La responsabilite penale du reviseur d’entreprises: epee deDamocles ou tigre de papier?’: ‘Se rend coupable de faux, le commissaire qui certifie les comptesannuels d’une societe, alors qu’il a connaissance de l’existence d’une comptabilite parallele au sein decelle-ci’; L. Dupont et S. Van Dyck, ‘Quelques perspectives quant a la responsabilite penale dureviseur d’entreprises’, in X., La responsabilite civile, penale et disciplinaire du reviseur d’entreprises,Actes d’une journee d’etude organisee le 13 mars 2002 par l’IRE, la Faculte de Droit et la Faculted’Economie de l’Universite de Louvain, campus de Courtrai, Serie ‘Droit et Entreprise’, n8 6, Bruges,La Charte, 2003, pp. 29-93. Adde, l’arrete royal du 23 decembre 1997 portant approbation du Code dedeontologie de l’Institut professionnel des comptables (M.B., 29 janv. 1998).

3. Sur cette matiere, voy. les publications de R. Andersen, notamment: La reglementation des prix en

Belgique, Larcier, 1977; ‘Les sanctions en matiere de reglementation du prix’, Droit des consomma-teurs, Fac. Univ., Saint-Louis, 1982, p. 291; ‘La reglementation publique des prix – Etat actuel de laquestion’, R.D.C., 1989, p. 299; Cass., 25 nov. 1997, Pas., 1997, I, p. 1270. J. Spreutels, F. Roggen,E. Roger France, Droit penal des affaires, Bruylant, 2005, pp. 981-1001.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 82, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

82 – Livre 119.4 Kluwer

600 Les differents regimes de prix

La loi organise quatre regimes de prix differents, soit:

1. Le prix normal: l’article 1er, § 2, de la loi interdit de pratiquer des prix superieurs

aux prix normaux. C’est aux tribunaux d’apprecier le caractere anormal du prix, la

loi ne fixant que quelques criteres, soit les benefices realises, l’etat du marche et les

frais d’exploitation, tels que les frais de production, de fabrication, de mise en

œuvre et de transport.

2. Le prix maximum: l’article 1er, § 1er, erige en infraction le fait de pratiquer un prix

superieur a celui fixe par arrete ministeriel. De tres nombreux secteurs du commerce

des produits courants et notamment des denrees alimentaires sont concernes par cette

disposition. Le prix maximum peut etre fixe, soit pour tout le territoire du Royaume,

soit pour certaines parties de ce territoire (art. 2, § 1er), soit meme pour les produits

emanant d’une seule entreprise. Enfin, le Ministre peut, au lieu de fixer un prix

maximum, fixer un benefice maximum: il determine alors la limite du benefice que

peut prelever le vendeur ou l’intermediaire (art. 2, § 2).

3. La declaration de hausse de prix: pris en execution de l’article 2, § 4, de la loi du

30 juillet 1971, l’arrete ministeriel du 20 avril 1993 impose a toute entreprise dont

le chiffre d’affaires depasse 300 millions hors T.V.A. de notifier au service des prix

toute modification de ses prix de vente: il s’agit d’une declaration et non d’une

autorisation; ce meme arrete soumet par contre a une procedure d’autorisation

ministerielle de hausse de prix toute entreprise de certains secteurs (produits

petroliers, traitement des dechets, homes pour personnes agees, gaz, electricite,

eau, voitures, ...).

4. Le contrat-programme: l’article 1er, § 3, de la loi instaure un systeme de prix

negocies entre le Ministre des Affaires economiques et les entreprises individuelles

ou groupees. Il est notamment d’application dans le secteur des produits petroliers.

610 Les sanctions penales

Ces sanctions sont a la fois tres nombreuses et extremement rigoureuses. Leur role est

percu comme etant essentiellement preventif.

1. La peine d’emprisonnement et d’amende (art. 9, § 1er)

Le contrevenant a la reglementation des prix est passible d’une amende de 100 euros a

un million d’euros et/ou d’un emprisonnement d’un mois a cinq ans. En cas de

recidive, l’amende et l’emprisonnement sont doubles et doivent etre prononces

ensemble.

2. La confiscation (art. 9, § 2)

Les conditions de mise en œuvre de cette sanction sont largement derogatoires au droit

commun, puisque la confiscation peut etre prononcee meme si l’objet de l’infraction

est la propriete d’un tiers.

3. L’attribution au Tresor (art. 9, § 3)

Le juge peut condamner le contrevenant a payer une somme correspondant au

benefice indument realise ou a la hausse illicite des prix; cette somme peut etre

recouvree a charge des heritiers, ce qui constitue une exception notoire au principe de

la personnalite des peines.

4. Les interdictions professionnelles (art. 9, § 5)

Deux mesures d’interdiction peuvent etre prononcees:

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 83, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 83

– la fermeture d’etablissement, pour une duree n’excedant pas un an et ce, meme si

l’etablissement est exploite par un tiers;

– l’interdiction ou la restriction, temporaire ou definitive, a charge du condamne,

d’exercer la profession dans l’exercice de laquelle l’infraction a ete commise.

5. La publicite de la condamnation (art. 9, § 6)

Le juge peut ordonner la publication de la condamnation, aux frais du condamne,

integralement ou par extrait, soit par affichage soit par tout autre moyen, tel que le film

ou la radio.

620 Le pouvoir de transiger de l’administration

L’article 11bis de la loi permet aux fonctionnaires du ministere des Affaires econo-

miques (dans la pratique, il s’agit le plus souvent des agents de l’Inspection generale

economique) de fixer une somme dont le paiement entraıne l’extinction de l’action

publique, c’est-a-dire les poursuites exercees par le parquet. Le contrevenant peut

refuser cette procedure – organisee par l’arrete royal du 10 octobre 1983 – auquel cas

le ministere public recouvre l’integralite de ses prerogatives.

630 Le pouvoir de transiger du parquet

L’article 11, § 1er, permet au procureur du Roi de proposer au prevenu une transaction

dont le paiement lui evitera les poursuites. Cette transaction peut revetir diverses

modalites: payer le montant du benefice indument realise ou la somme correspondant a

la hausse illicite des prix, abandonner les objets saisis susceptibles d’etre confisques, etc.

640 Les mesures provisoires

Il s’agit de mesures qui sont prises a l’endroit d’une personne prevenue d’avoir

enfreint la reglementation des prix, en attendant que les juridictions se soient

prononcees sur sa culpabilite. Deux mesures sont possibles:

1. La fermeture de l’etablissement: elle peut etre ordonnee soit par le procureur du

Roi ou le juge d’instruction (art. 11, § 2), soit par le ministre des Affaires

economiques (art. 2, § 3): elle ne peut dans ce cas exceder 5 jours et fait l’objet

d’un controle judiciaire.

2. La mise en vente des biens saisis: tant les agents verbalisants (art. 7, § 1er, 7o) que

le Procureur du Roi (art. 11, § 3) peuvent ordonner, a tout moment de la procedure,

la vente des biens saisis.

E. LES PRATIQUES DU COMMERCE

650 L’action en cessation

La loi du 14 juillet 1991 1 sur les pratiques du commerce et sur l’information et la

protection du consommateur generalise l’action en cessation – de nature purement civile

– qui a connu un remarquable succes sous l’empire de la loi defunte du 14 juillet 1971.

Le president du tribunal de commerce a le pouvoir de constater l’existence et

d’ordonner la cessation de tout acte, meme penalement reprime, constituant une

1. Sur cette matiere, voy. Les pratiques du commerce et la protection et l’information du consommateur

depuis la loi du 14 juillet 1991, Ed. Jeune Barreau de Bruxelles, 1991. J. Spreutels, F. Roggen, E.Roger France, Droit penal des affaires, Bruylant, 2005, pp. 1001-1023.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 84, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

84 – Livre 119.4 Kluwer

infraction aux dispositions de la loi (art. 95). L’action en cessation n’est donc plus

limitee aux hypotheses qui etaient auparavant enumerees a l’article 55.

Son domaine de predilection est de mettre fin aux actes contraires aux usages

honnetes en matiere commerciale qui portent ou peuvent porter atteinte aux interets

professionnels d’un ou de plusieurs autres vendeurs (art. 93) ou – principale innovation

de la loi du 14 juillet 1991 – aux interets d’un ou de plusieurs consommateurs (art. 94) 1.

L’article 97 de la loi elargit l’action en cessation a une quinzaine d’infractions a d’autres

legislations dont le non-respect etait deja de nature a etre considere, sous l’empire de

l’ancien article 54bis, comme contraire aux usages honnetes en matiere commerciale.

Citons notamment:

– l’exercice d’une activite commerciale ou artisanale sans etre immatricule preala-

blement au registre du commerce ou de l’artisanat;

– le non-respect des dispositions legales et reglementaires relatives a la tenue des

documents sociaux et a l’application de la taxe sur la valeur ajoutee;

– l’occupation de travailleurs sans etre inscrit a l’Office national de securite sociale,

sans avoir introduit les declarations requises ou sans payer les cotisations, les

augmentations de cotisation ou interets moratoires;

– l’occupation de travailleurs et l’utilisation de travailleurs en infraction a la re-

glementation du travail temporaire, du travail interimaire et de la mise de travail-

leurs a la disposition d’utilisateurs;

– le non-respect des conventions collectives de travail rendues obligatoires;

– l’obstacle a la surveillance exercee en vertu des lois relatives au registre du

commerce, au registre de l’artisanat et a la tenue des documents sociaux;

– le non-respect des dispositions legales et reglementaires en matiere de publicite2.

– le non-respect de la reglementation en matiere d’occupation de main-d’œuvre de

nationalite etrangere;

– le non-respect de la reglementation en matiere de label ecologique;

– l’exercice d’une activite professionnelle independante sans les autorisations requi-

ses;

– le non-respect de la reglementation sur la fermeture obligatoire du soir.

660 Les sanctions penales

S’il est vrai que la loi sur les pratiques du commerce temoigne du souci de depenalisa-

tion, c’est-a-dire de recourir a des sanctions autres que penales pour assurer le respect

des regles qu’elle edicte 3, il convient, toutefois, de ne pas perdre de vue qu’elle

comporte un volet repressif important. Les articles 102 a 110 renforcent meme les

sanctions penales, dont on peut pourtant douter de l’efficacite, en raison notamment de

l’insuffisance des moyens de l’Inspection generale economique 4.

Trois categories d’infractions sont prevues: nous y reviendrons aux nos 670 a 690 de

ce livre.

1. L’arrete royal du 5 dec. 2000, M.B., 3 janv. 2001 rend applicables aux instruments financiers et auxtitres et valeurs certaines dispositions de la loi du 14 juillet 1991.

2. La matiere de la publicite a ete partiellement revue suite a l’entree en vigueur de la loi du 25 mai 1999:cette loi autorise partiellement la publicite comparative (voy. l’art. 23bis nouveau de la loi du 14 juill.1991).

3. F. Deruyck, ‘Naar een verdere depenalisatie in de Handelspraktijkenwet?’, note sous Corr. Gand,11 avril 1990, D.C.C.R., 1990-1991, pp. 546 a 554; A.De Nauw, Les metamorphoses administrativesdu droit penal de l’entreprise, Mys & Breesch, 1994, pp. 91 a 92. Voy. A.R. 27 avril 1993 relatif aureglement transactionnel des infractions a la loi 14 juill. 1991.

4. Voy. J.-L. Fagnart, ‘Le projet de loi sur les pratiques du commerce et sur l’information et laprotection du consommateur’, R.D.C., 1991, no 65, p. 294.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 85, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 85

670 Les pratiques du commerce directement sanctionnees penalement

Mentionnons essentiellement:

1. l’article 102, 1o et 2o, qui punit d’une amende de 250 a 10.000 euros, toute

violation des regles relatives a l’indication des prix 1 (art. 2 a 6) et des quantites

(art. 8 a 12) ainsi qu’a la denomination, a la composition et a l’etiquetage des

produits et services (art. 13 a 15);

2. l’article 105 qui punit d’un emprisonnement d’un mois a cinq ans et/ou d’une

amende de 26 a 20.000 euros ceux qui commettent une infraction:

a. a l’article 84 prohibant les ventes en chaıne, dont le mecanisme s’apparente a

l’escroquerie. Il consiste ‘a etablir un reseau de vendeurs professionnels ou non,

dont chacun espere un avantage quelconque resultant plus de l’elargissement de

ce reseau que de la vente de produits au consommateur’. Basee sur un procede a

progression geometrique, cette pratique est interdite tant a ses organisateurs

qu’a ceux qui y participent en connaissance de cause. Y est assimilee la vente en

‘boule de neige’ 2 qui ‘consiste a offrir au consommateur des produits en lui

faisant esperer qu’il les obtiendra soit a titre gratuit, soit contre remise d’une

somme inferieure a leur valeur reelle, sous la condition de placer aupres de tiers,

contre paiement, des bons, coupons, ou autres titres analogues ou de recueillir

des adhesions ou souscriptions’ (art. 84, al. 2);

b. a l’article 85 prohibant l’offre en vente ou la vente en faisant abusivement etat

d’actions philanthropiques, humanitaires, ou de nature a eveiller la generosite

du consommateur 3.

680 Les actes accomplis de mauvaise foi

L’article 103 sanctionne d’une amende de 500 a 20.000 euros ceux qui, de mauvaise

foi, commettent une infraction aux dispositions de la loi, a l’exception de celles visees

aux articles 30, 93, 97, 102, 104 et 105. Calquee sur l’ancien article 61 de la L.P.C.,

cette disposition suscite des difficultes d’interpretation du concept de mauvaise foi 4.

690 La violation des prescriptions judiciaires

L’article 104, 1o, punit d’une amende de 1.000 a 20.000 euros ceux qui ne se

conforment pas aux prescriptions d’un jugement rendu en vertu des articles 95

(jugement de cessation) et 99 (affichage et publication du jugement).

700 Le commercial tient le criminel en etat

L’article 106 confirme le renversement de la regle traditionnelle de procedure penale,

selon laquelle l’issue du litige civil est subordonnee a celle du litige criminel. Il

1. Corr. Liege 24 oct. 2002, J.D.S.C., 2005, p. 273, Annuaire Pratiques du commerce et Concurrence,2002, p. 734: Toute infraction requiert, outre un element materiel, un element moral, meme lorsquecelui-ci n’est pas expressement enonce dans l’incrimination. La culpabilite du chef d’une infractionrequiert la connaissance de ce qu’elle est commise. En l’espece, tant selon les constatations desverbalisateurs que selon la declaration de la vendeuse du magasin, les faits reproches sont accidentels.L’element moral constitutif de l’infraction n’est pas etabli. La prevention n’est pas etablie.

2. Pour un cas d’application, voy. Bruxelles, 7 oct. 1982, J.T., 1984, p. 7; Liege, 7 nov. 1996, J.L.M.B.,1997, p. 528.

3. Corr. Bruges, 23 juin 1998, D.C.C.R., 2000, p. 261, note G. Ballon. Corr. Louvain, 4 oct. 1999, An-nuaire Pratiques du commerce et Concurrence, 1999, p. 459.

4. Cass., 10 nov. 1982, Rev. dr. pen., 1983, p. 386 cassant Liege, 5 avril 1982, J.L., 1982, p. 303; Corr.Namur, 28 oct. 1981, R.R.D., 1982, p. 57; Civ. Malines, 28 mai 1982, Ing.-Cons., 1982, p. 239;Bruxelles, 31 mai 1990, Rev. dr. pen., 1991, p. 277, note. P. Arnou, ‘De «kwade trouw» uit artikel 61W.H.P.’, Ann. prat. comm., 1989, pp. 241 a 251. Gand, 18 dec. 2000, Annuaire Pratiques du commerceet Concurrence, 2000, p. 608.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 86, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

86 – Livre 119.4 Kluwer

enonce en effet que lorsque les faits soumis a la juridiction repressive font l’objet

d’une action en cessation, il ne peut etre statue sur l’action penale qu’apres qu’une

decision definitive ait ete rendue relativement a l’action en cessation 1.

F. LE DROIT PENAL DE L’ENVIRONNEMENT

710 Le cadre legal

Au cours des dernieres annees, la legislation protectrice de l’environnement s’est

developpee par le recours systematique aux sanctions penales en cas d’agissements

portant atteinte au milieu de vie et a la sante des citoyens 2. La mise en œuvre de ces

dispositions est particulierement delicate, car elles sont de nature a avoir des

repercussions souvent considerables sur les activites de l’entreprise. Le souci de

sauvegarder l’emploi, qui suppose le maintien de l’activite de l’entreprise, explique

la grande prudence avec laquelle les autorites appliquent ces lois, en particulier quand

elles prevoient des sanctions pouvant entraıner la fermeture de l’etablissement 3. La

Cour de cassation 4 a rappele que les principes generaux du droit penal sont bien

applicables a cette matiere en relevant qu’‘une infraction ne peut etre sanctionnee

penalement que lorsque celui qui l’a commise a agi sciemment. La constatation

qu’une pollution n’etait pas accidentelle, que le chef d’entreprise avait competence

pour demander les dispenses necessaires et pour mettre fin a la situation illicite,

n’impliquent pas que le dirigeant ait eu connaissance de la pollution’. Le Conseil

d’Etat a la meme approche des choses 5.

La presentation et l’assimilation de ces matieres sont fort complexes en raison de

l’intervention de divers niveaux de pouvoirs (Union europeenne, Etat, Regions,

1. Comm. Bruxelles (pres.), 9 mai 1988, J.L.M.B., 1988, p. 1327.2. Sur cette matiere, voy.: La repression des infractions en matiere d’environnement en Region wallonne,

E. Story-Scientia, 1987; B. Jadot, J.-P. Hannequart et E. Orban de Xivry, Le droit de l’environne-ment, De Boeck, 1988; B. Jadot, ‘Les regions belges et la repression des infractions specialement dans ledomaine de l’environnement’, Rev. dr. pen. crim., 1989, pp. 1075 a 1088. F. Van Remoortere, ‘Laquestion de la responsabilite penale des personnes morales en droit de l’environnement’, Rev. dr. pen.,1991, pp. 311 a 371; J.-M. Piret et C.Hennau-Hublet,‘ Les crimes contre l’environnement – Applica-tion de la partie generale’, Rev. dr. pen., 1993, pp. 257 a 310; A. De Nauw, Les metamorphoses

administratives du droit penal de l’entreprise, Mys & Breesch, 1994, pp. 75 a 90; N. Denies etN. Basecqz, ‘Droit de l’environnement et droit economique et social: reflexion sur l’element moral dansles lois et reglements particuliers’,Rev. dr. pen., 1994, pp. 473 a 508;M.Faure, ‘Bedenkingen over de rolvan het strafrecht bij de bestrijding van milieu-verontreiniging’, Liber amicorum A. Vandeplas, 1994,pp. 229 a 264; L.Dehin, ‘Le regime des sanctions enmatiere d’urbanisme et d’amenagement du territoire’,Amen., 1994, p. 235 et s.; A. Schaus et S. Lew, ‘Le droit penal et la protection de l’environnement’, Rev.U.L.B., 1995, p. 199 et s.; M. Faure et P. Morrens, ‘De verjaring van grenzen in het milieustrafrecht’,R.W., 1996, p. 1193; E.Staudt,La repression des infractions enmatiere d’environnement etA.Roef, ‘Detoerekening aan natuurlijke personen van milieumisdrijven gepleegd in de schoot van een onderneming –een overzicht en enkele beschouwingen’, Le droit des affaires en evolution – L’entreprise face au droit

penal, Bruylant, 1995, pp. 137 a 157 et 157 a 176; P.Coenraets,Droit de l’environnement, Larcier, 1996,358 p.; P.Coenraets et P.DeWolf, ‘Les responsabilites civile et penale des societes et de leurs dirigeantsen droit de l’environnement’, Rev. prat. soc., 1997, p. 5 et s; S. Godfroid, ‘Les infractions en matiered’environnement: recherche, constatation et repression’,R.R.D., 1997, p. 103 et s.; Ph.Coenraets et P.De

Wolf, ‘Les responsabilites civile et penale des societes et de leurs dirigeants en droit de l’environnement’,Rev. prat. soc., 1997, p. 5 et s.; F.Roggen,,Les juges et la protection de l’environnement: le juge penal et laprotection de l’environnement, Bruylant, 1998.

3. Corr. Neufchateau, 13 oct. 1977, J.L., 1977-1978, p. 155.4. Cass., 10 oct. 1989, R.D.C., 1990, p. 393.Dans le meme sens, Gand, 20 sept. 2002, T.M.R., 2003, p. 520.5. C.E., n8 131.709, 25 mai 2004, Amen. 2004, p. 260: ‘Il incombe a l’Agence regionale pour la proprete,

dont les agents ont inflige au requerant une amende pour depot sauvage sur la voie publique enapplication de l’ord. Cons. Reg.-Brux.-Cap. du 25 mars 1999 relative a la recherche, la constatation, lapoursuite et la repression des infractions en matiere d’environnement, de rapporter la preuve de ce quele requerant est bien l’auteur de l’infraction. Si les constatations faites par les agents font foi jusqu’apreuve du contraire, celles-ci ne font pas foi de ce que l’auteur du depot sauvage serait le requerant’.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 87, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 87

Provinces, Communes) dont les spheres de competences respectives ne sont pas

toujours definies avec precision.

L’article 23 de la Constitution accorde a chacun le droit de mener une vie conforme

a la dignite humaine, ce qui comprend notamment, selon le meme article 23.48, le droita la protection d’un environnement sain.

L’Union europeenne a fait adopter une decision-cadre relative a la protection de

l’environnement par le droit penal 1.

La loi speciale du 8 aout 1980 de reformes institutionnelles, telle que modifiee par

la loi du 8 aout 1988, confere aux Regions competence pour ‘la protection de

l’environnement, en ce compris les normes generales et sectorielles, dans le respect

des normes generales et sectorielles, arretees par les autorites nationales lorsqu’il

n’existe pas de normes europeennes’.

Par son arret du 5 avril 1990 2, la Cour d’arbitrage avait annule partiellement le

decret de la Region wallonne du 5 juillet 1985 relatif aux dechets 3. Seul le legislateur

national peut determiner les formes de la poursuite, les conditions de visites domici-

liaires, la charge de la preuve en matiere penale et l’application des dispositions du

Livre 1er du Code penal (notamment la determination des personnes civilement

responsables, la recidive, la confiscation 4).

La reglementation tres technique contenue dans le R.G.P.T. (arretes du Regent des

11 fevrier 1946 et 27 septembre 1947) peut aussi etre consideree comme participant a

la protection penale de l’environnement, des lors qu’elle repose sur une classification

des etablissements dangereux, insalubres ou incommodes; dans la meme mouvance, il

importe aussi de souligner le decret du 11 mars 1999 du Conseil regional wallon relatif

au permis d’environnement qui vise a assurer, dans une optique d’approche integree

de prevention et de reduction de la pollution, la protection de l’homme ou de

l’environnement contre les dangers, nuisances ou inconvenients qu’un etablissement

est susceptible de causer, directement ou indirectement, pendant ou apres l’exploita-

tion; ce decret vise tout autant la preservation des equilibres climatiques, que la qualite

de l’eau, de l’air, des sols, du sous-sol, de la bio-diversite et de l’environnement

sonore; ce texte prevoit des sanctions administratives et des sanctions penales (art. 61

a 80) 5.

En l’absence de toute codification, les textes applicables – qui connaissent d’in-

cessantes modifications – representent un veritable maquis reglementaire dans lequel

seuls quelques rares inities ne s’egarent pas. On trouvera ci-apres quelques points de

repere qui n’ont rien d’exhaustif.

711 La pollution de l’atmosphere

Loi du 28 decembre 1964 relative a la lutte contre la pollution atmospherique definie

comme ‘toute emission dans l’air quelle qu’en soit la source de substances gazeuses,

1. Decision-cadre 2003/80/JAI du 27 janv. 2003 du Conseil relative a la protection de l’environnementpar le droit penal, J.O.C.E., L. 29, 5 fevr. 2003. F. Comte (s.l.d.), Environmental Crime in Europe.

Rules of Sanctions, Europa Law Publishing, Groningen, 2004, 234 p.2. C.A., 5 avril 1990, R.R.D., 1990, p. 309, note M. Cadelli; C.A., 7 mai 1992, J.L.M.B., 1992, p. 1298;

C.A., 17 juin 1993, Rev. dr. pen., 1994, p. 203, note H.D. Bosly.3. Ce decret a ete abroge et remplace par le decret du Conseil regional wallon du 27 juin 1996 relatif aux

dechets.4. B. Van Overstraeten, ‘La confiscation et le droit de l’environnement’, Amen. 2002, pp. 194-211.5. J. Cartuyvels et L. Renoy, ‘Le point sur la surveillance, les mesures administratives et les sanctions

penales dans le cadre du decret wallon du 11 mars 1999 relatif au permis d’environnement’, C.D.P.K.,2005, pp. 739-750.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 88, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

88 – Livre 119.4 Kluwer

liquides ou solides susceptibles de porter atteinte a la sante humaine, de nuire aux

animaux ou aux plantes et de causer un dommage aux biens ou aux sites’.

Il s’agit d’une loi-cadre habilitant le Roi a prendre toutes mesures utiles en vue de

prevenir et de combattre ce type d’atteinte a l’environnement. De multiples arretes

royaux ont ete pris dans ce domaine.

Exemples:

– L’arrete royal du 8 aout 1975 organisant la prevention de la pollution atmosphe-

rique par les oxydes de soufre et les poussieres engendrees par les installations

industrielles de combustion.

– L’arrete royal du 22 mars 1982 limitant l’utilisation de certains gaz propulseurs

dans les aerosols.

– L’arrete royal du 30 decembre 1988, modifie par celui du 24 avril 1990, relatif aux

mesures a prendre contre la pollution de l’air par les gaz d’echappement provenant

des moteurs equipant les vehicules a moteur.

– L’arrete du Gouvernement wallon du 9 decembre 1993 relatif a la lutte contre la

pollution atmospherique en provenance des installations industrielles.

– L’arrete du 13 avril 2000 du Gouvernement wallon relatif aux installations

specialisees d’incineration et aux installations de co-incineration de dechets

dangereux.

– L’arrete du 5 decembre 2002 du Gouvernement wallon modifiant l’arrete du

Gouvernement wallon du 23 juin 2000 relatif a l’evaluation et a la gestion de la

qualite de l’air ambiant.

Peuvent aussi etre mentionnes le decret du Conseil regional wallon du 10 novembre

2004 et l’arrete du Gouvernement de la Region de Bruxelles-Capitale du 3 juin 2004

instaurant tous deux un systeme d’echange de quotas d’emission de gaz a effet de

serre, creant un Fonds wallon Kyoto et relatif aux mecanismes de flexibilite du

Protocole de Kyoto.

712 La pollution des eaux 1

Dans le souci de transposer la directive europeenne 2000/60/CE du 23 octobre 2000

etablissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau, le

legislateur wallon a adopte le decret du 27 mai 2004 relatif au Livre II du Code de

l’environnement contenant le Code de l’eau: ce decret coordonne en realite une serie

de dispositions pertinentes dans la matiere, dont celles qui suivent dans les domaines

specifiques, et organise un regime tres complet de constatation des infractions et de

sanctions, tant administratives que penales; ce decret n’est cependant pas encore en

vigueur, celle-ci devant intervenir a une date indeterminee a fixer par le Gouverne-

ment.

1. Les eaux de surface

Le decret du Conseil regional wallon du 7 octobre 1985 sur la protection des eaux de

surface contre la pollution reglemente cette matiere; il abroge la loi du 26 mars 1971

qui reste neanmoins d’application pour ce qui concerne les normes generales et

1. E.Orban de Xivry, ‘Le droit des eaux en Regions wallonne et bruxelloise’, Droit de l’environnementet de l’urbanisme, C.U.P., vol. XVII, 1997, p. 201 et s.; Corr. Liege, 28 oct. 1993, J.L.M.B., 1996,p. 1297, note A. Lebrun. Mons, 3 oct. 2001, J.T., 2002, p. 45, note. Adde, le decret du 15 avril 1999 duConseil regional wallon relatif au cycle de l’eau et instituant une Societe publique de gestion de l’eaudont l’article 45 appelle a la codification de la matiere sour la forme d’un Code wallon de l’eau; cedecret est abroge a une date indeterminee, par l’effet du decret du 27 mai 2004.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 89, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 89

sectorielles en execution desquelles l’arrete royal du 3 aout 1976 fixe les conditions

generales de deversement des eaux usees.

Le decret wallon organise un regime d’autorisation pour le deversement de ces

eaux. Il sanctionne notamment:

– d’un emprisonnement de 8 jours a 6 mois et/ou d’une amende de 26 a 500.000 eu-

ros, celui qui deverse des eaux usees dans une eau de surface ordinaire, dans les

egouts publics ou dans les voies artificielles d’ecoulement sans respecter la

reglementation particuliere (art. 49, 1o); l’article 49, alinea 2, du decret precise

que ‘les deversements infractionnels sont punissables encore qu’ils n’aient ete

commis que par negligence ou abstention fautive d’agir’.

– d’un emprisonnement de 8 jours a 1 mois et/ou d’une amende de 26 a 10.000 euros

ou de l’une de ces peines seulement, celui qui nettoie un vehicule a moteur, une

machine ou d’autres engins similaires dans une eau de surface ordinaire ou a moins

de 10 metres de celle-ci et alors que le produit nettoyant est susceptible de s’y

ecouler, sans disposer du permis d’environnement requis (art. 50, 7o);

– d’un emprisonnement de 6 mois a 3 ans et/ou d’une amende de 100 a 10.000 euros,

celui qui detruit ou deteriore volontairement des installations d’epuration ou de

mesure de pollution ou en empeche le fonctionnement correct, de quelque facon

que ce soit (art. 51, 1o);

La Region de Bruxelles-Capitale est concernee par un arrete du Gouvernement

regional du 20 septembre 2001 relatif a la protection des eaux de surface contre la

pollution causee par certaines substances dangereuses, ainsi que par un meme arrete

du 19 novembre 1998 relatif a la protection des eaux contre la pollution par les nitrates

a partir de sources agricoles.

2. Les eaux potabilisables

Le decret du Conseil regional wallon du 30 avril 1990 sur la protection et l’exploita-

tion des eaux souterraines et des eaux potabilisables abroge notamment la loi du

26 mars 1971 sur la protection des eaux souterraines et la loi du 9 juillet 1976 relative

a la reglementation des prises d’eau souterraine.

Son article 22 punit d’un emprisonnement de 8 jours a 3 ans et/ou d’une amende de

100 a 500.000 euros, celui qui meconnaıt les dispositions qui assurent la protection des

eaux souterraines et potabilisables de surface contre la pollution.

3. La qualite de l’eau distribuee

L’arrete de l’Executif regional wallon du 20 juillet 1989 imposait aux fournisseurs

d’eau alimentaire un certain nombre d’interdictions (p. ex. fournir de l’eau de

distribution contenant une substance nocive pour la sante) et d’obligations (p. ex.

effectuer des controles de qualite suivant une frequence determinee). L’arrete du

Gouvernement wallon du 3 mars 2005 relatif au Livre II du Code de l’environnement,

contenant le Code de l’eau, a abroge ce texte pour en assurer la coordination avec

d’autres.

Les infractions sont punies conformement aux articles 14 et 15 de la loi du

24 janvier 1977 relative a la protection de la sante des consommateurs d’une peine

de 8 jours a 6 mois et/ou d’une amende de 50 a 1.000 euros.

Le dispositif fait de sanctions administratives et penales est complete par le decret

du Conseil regional wallon du 12 decembre 2002 relatif a la qualite de l’eau destinee a

une consommation humaine.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 90, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

90 – Livre 119.4 Kluwer

713 La lutte contre le bruit

La matiere est regie notamment par une loi-cadre du 18 juillet 1973 relative a la lutte

contre le bruit, modifiee notamment par le decret de la Region wallonne du 1er avril

1999.

Peuvent aussi etre cites:

– l’arrete royal du 24 fevrier 1977 fixant les normes acoustiques pour la musique

dans les etablissements publics et prives;

– l’arrete du 27 mai 1999 du Gouvernement de la Region de Bruxelles-capitale relatif

a la lutte contre le bruit genere par le trafic aerien;

– l’ordonnance du Conseil de la Region de Bruxelles-Capitale du 17 juillet 1997

relative a la lutte contre le bruit en milieu urbain;

– l’arrete royal du 29 avril 2001 relatif au bruit aerien emis par les appareils

domestiques;

– l’arrete royal du 6 mars 2002 relatif a la puissance sonore des materiels destines a

etre utilises a l’exterieur des batiments, pris en execution de la loi du 21 decembre

1998 relative aux normes de produits ayant pour but la promotion de modes et de

consommation durables et la protection de l’environnement et de la sante.

714 La lutte contre la pollution par les dechets 1

Le decret du 27 juin 1996 du Conseil regional wallon relatif aux dechets s’applique a

toutes categories de dechets (menagers, agricoles, industriels, dangereux, inertes, et

d’activites hospitalieres et de soins de sante) et intervient comme loi-cadre qui a fonde

une serie importante d’arretes d’execution dont la violation est reprimee de maniere

commune: en effet, ce decret prevoit plusieurs categories d’infractions sanctionnees

penalement, a cote de sanctions administratives (art. 47):

1. l’abandon de dechets sans respecter les dispositions legales et reglementaires. Le

contrevenant est sanctionne, selon les hypotheses, d’un emprisonnement pouvant

atteindre, en cas de recidive, 10 ans et d’une amende pouvant atteindre 5 millions 2

(art. 51 et 52) 3;

2. la collecte ou le transport de dechets dangereux sans avoir obtenu les autorisations

et agreations ou sans en respecter les conditions (art. 51 et 52);

3. l’entrave a la surveillance (art. 54).

La Region de Bruxelles-Capitale est regie par l’arrete royal du 9 mai 1986 relatif

aux dechets en Region bruxelloise et par un arrete du Gouvernement de la Region de

Bruxelles-Capitale du 18 avril 2002 concernant la mise en decharge des dechets.

Plusieurs arretes du Gouvernement wallon 4 et du Gouvernement de la Region de

Bruxelles-capitale 5 imposent des obligations et fixent les conditions d’exploitation

des centres d’enfouissement, de tri, d’incineration, de destruction, de depollution, ou

de traitement.

1. J. Sambon, ‘La reglementation de la gestion des dechets en Regions wallonne et bruxelloise’, Droit del’environnement et de l’urbanisme, C.U.P., vol. XVII, 1997, p. 92 et s., spec. pp. 196-197. Cass., 2 fevr.1999, Bull., 1999, 133. F. Roggen, ‘[Questions communes au decret de la Region wallonne du 27 juin1996 et a l’accord de cooperation du 30 mai 1996] La surveillance et les sanctions administratives etpenales’, in X., De nouvelles regles en matiere de dechets, Bruxelles, La Charte, 1997, pp. 191-224.

2. L’article 2 de l’arrete du Gouvernement wallon du 20 dec. 2001 relatif a l’introduction de l’euro enmatiere de dechets n’a pas modifie la reference au franc belge pour la determination des amendespenales des articles 51 et suivants du decret du 27 juin 1996.

3. Pour la Region flamande, voy. C. Billiet, ‘De minimis non curat praetor. Kleine milieucriminaliteit inhet handhavingsbeleid’, T.M.R., 2003, pp. 186-188, note sous Corr. Audenarde, 10 oct. 2002.

4. Voy. les arretes des 27 fevr. 2003 (3 textes) et 18 mars 2004.5. Voy. les arretes des 18 juill. et 21 nov. 2002.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 91, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 91

G. LE DROIT PENAL DES ACTIVITES REGLEMENTEES

720 Les dispositions legales

Outre la loi du 15 decembre 1970 que nous avons deja evoquee, abrogee et remplacee

cependant par la loi du 10 fevrier 1998 contenant loi-programme pour la promotion

de l’entreprise independante, de nombreuses dispositions legales et reglementaires

subordonnent a diverses conditions d’agreation 1 l’acces aux activites economiques,

en frappant de sanctions penales ceux qui contreviennent aux obligations qu’elles

imposent 2. On peut citer a titre d’exemple:

– les assurances: loi du 9 juillet 1975 sur le controle des entreprises d’assurance,

modifiee par les lois des 19 juillet 1991 et 20 juin 2005 (art. 3 a 12, 83 et 84); loi du

27 mars 1995 relative a l’intermediation en assurances et a la distribution d’assu-

rances (art. 15 et 16);

– les banques, etablissements de credit et caisses d’epargne: loi du 22 mars 1993

relative au statut et au controle des etablissements de credit (art. 7 a 22, 102 a 109)

et loi du 22 mars 2006 relative a l’intermediation en services bancaires et en

services d’investissement et a la distribution d’instruments financiers;

– le leasing: arrete royal no 55 du 10 novembre 1967 (art. 3);

– l’implantation commerciale: loi du 13 aout 2004 (art. 14 a 18) 3;

– le credit a la consommation: loi du 12 juin 1991 (art. 74 a 80) et decret du Conseil

de la Communaute francaise du 18 juillet 1996 organisant l’agrement des institu-

tions pratiquant la mediation de dettes;

– l’exercice de l’activite de recouvrement amiable des dettes du consommateur:

loi du 20 decembre 2002 (art. 15) 4;

– le transport: loi du 3 mai 1999 (transport de choses par route: art. 35 et 36); loi du

27 decembre 1974 (services de taxis: art. 20) et l’ordonnance bruxelloise du

27 avril 1995 sur le meme sujet;

– les agences de voyage: loi du 21 avril 1965 (art. 9);

– les hotels: decret du 18 decembre 2003 duConseil regional wallon (art. 143 a 147) 5;

– les prets hypothecaires: arrete royal n8 225 du 7 janvier 1936 (art. 87 a 97);

– les activites ambulantes et l’organisation des marches publics: loi du 25 juin

1993 6 executee par l’arrete royal du 3 avril 1995 lui-meme modifie par les arretes

royaux des 30 avril 1999 et 17 novembre 2003;

– le port du titre de juriste d’entreprise: loi du 1er mars 2000 creant un Institut des

juristes d’entreprise (art. 6);

1. Par arret n8 41/2002 du 20 fevr. 2002, la Cour d’arbitrage a tranche que, en ce que les dispositions legalesconfiaient a des juridictions administratives la connaissance des litiges relatifs aux conditions d’acces aces professions, les articles 2 et 4 a 13 de la loi du 15 dec. 1970 sur l’exercice des activites professionnellesdans les petites etmoyennes entreprises du commerce et de l’artisanat ne violent pas les articles 10 et 11 dela Constitution, combines avec l’article 23 ou l’article 144 de celle-ci, avec l’article 6 du Pacteinternational relatif aux droits economiques, sociaux et culturels ou avec l’article 1er du Premier Protocoleadditionnel a la Convention europeenne des droits de l’homme: les requerants (M.B., 22 mai 2002).

2. S. Depre, Les autorisations administratives relatives a l’exercice de certaines professions, Bruylant,1999, 172 p. S. Depre, ‘L’exercice d’une activite professionnelle au regard de la Conventioneuropeenne des droits de l’homme et de la liberte du commerce et de l’industrie’, Rev. trim. D.H.2002, pp. 369-383.

3. F. Boon, ‘La loi du 13 aout 2004 relative a l’autorisation d’implantations commerciales’, Amen. 2005,pp. 255-264.

4. C. Biquet-Mathieu, ‘La loi du 20 decembre 2002 relative au recouvrement amiable des dettes duconsommateur’, J.T. 2003, pp. 669-681; L. Guinotte, ‘Le recouvrement amiable des dettes duconsommateur apres la loi du 20 decembre 2002’, Act. dr. 2003, pp. 734-777.

5. C. Guyot, Le droit du tourisme. Regime actuel et developpements en droits belge et europeen, Serie‘Droit et Justice’, n8 25, Nemesis, Bruxelles – Bruylant, Bruxelles, 1999, 171 p.

6. Cette loi est abrogee par la loi du 4 juill. 2005 qui n’est cependant pas encore en vigueur.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 92, 20 September 2006, 14:27 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

92 – Livre 119.4 Kluwer

– le port du titre d’expert-comptable ou de conseil fiscal: loi du 22 avril 1999

relative aux professions comptables 1 et fiscales (art. 58), par reference egalement

aux dispositions prises, pour d’autres professions, en execution de la loi-cadre du

1er mars 1976 reglementant la protection du titre professionnel et l’exercice des

professions intellectuelles prestataires de services;

– le port du titre d’agent immobilier: arrete royal du 6 septembre 2003 protegeant

le titre professionnel et l’exercice de la profession d’agent immobilier 2 en execu-

tion de la loi-cadre du 1er mars 1976 reglementant la protection du titre profes-

sionnel et l’exercice des professions intellectuelles prestataires de services

– l’exercice de certaines activites industrielles dans le cadre d’etablissements

classes dangereux, insalubres ou incommodes par le R.G.P.T., ou soumis a permis

d’environnement.

H. LE DROIT PENAL DE LA CONSOMMATION

730 Les dispositions legales

De nombreuses lois – dont certaines ont deja ete evoquees, par exemple la loi du

14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce et sur l’information et la protection du

consommateur – ont une incidence sur la protection des consommateurs.

Citons en outre:

– la loi du 24 janvier 1977 relative a la protection de la sante des consommateurs en

ce qui concerne les denrees alimentaires et les autres produits. Cette loi confere

notamment au Roi le pouvoir, dans l’interet de la sante publique ainsi qu’en vue

d’empecher les tromperies et les falsifications dans le secteur alimentaire, de

reglementer ou d’interdire la fabrication, l’exportation et le commerce de denrees

alimentaires (sur le volet penal de cette loi, voir art. 13 a 17) 3; c’est ainsi que 385

arretes d’execution ont vu le jour dont, par exemple, l’arrete royal du 5 avril 2001

modifiant l’arrete royal du 13 mars 2000 fixant les teneurs maximales pour les

residus de pesticides autorisees sur et dans les denrees alimentaires, ou encore

l’arrete royal du 3 fevrier 2005 relatif a l’interdiction de vente de produits a base de

tabacs aux personnes agees de moins de seize ans au moyen d’appareils auto-

matiques de distribution. La loi du 4 fevrier 2000 a par ailleurs cree une Agence

federale pour la securite de la chaıne alimentaire 4;

– la loi du 28 mars 1975 (modifiee par la loi du 5 fevrier 1999) relative au commerce

des produits de l’agriculture, de l’horticulture et de la peche maritime, qui confere

des pouvoirs semblables au Roi qui a adopte 757 arretes d’execution (art. 6 a 10);

– la loi ‘Breyne’ du 9 juillet 1971 reglementant la construction d’habitations et la

vente d’habitations a construire ou en voie de construction (art. 14) 5;

– la loi du 4 aout 1992 relative au credit hypothecaire (art. 34 a 36);

1. Voy. aussi pour la profession de comptable, Mons, 3 mars 1999, J.L.M.B., 1999, p. 609. Par arret n8 5/2001 du 25 janv. 2001 (M.B., 16 fevr. 2001), la Cour d’arbitrage a annule dans l’article 58 de la loi du22 avril 1999, la reference a l’article 10 de la loi du 1er mars 1976 en tant que cette disposition permetde reprimer l’infraction en cause par une peine plus lourde qu’une amende de 1.000 francs. G.Lenaerts, ‘L’exercice illegal des professions economiques est sanctionne plus severement’, Pacioli,2006, pp. 1-3; J. Van Drooghenbroeck, ‘Protection penale des titres professionnels d’expert-comptable et de conseil fiscal et du monopole legal d’expert-comptable externe (1re partie)’, Accoun-tancy et Tax, 2004, pp. 12-23.

2. L. Collon, Le statut juridique de l’agent immobilier, Bruxelles, Larcier, 2004, 428 p.3. J. Spreutels, F. Roggen, E. Roger France, Droit penal des affaires, Bruylant, 2005, pp. 1023-1041.4. P. Vanthemsche et P. Cassart, ‘Une approche nationale de la securite de la chaıne alimentaire:

l’Agence federale pour la securite de la chaıne alimentaire (AFSCA) en Belgique’, in X., La securite

alimentaire et la reglementation des OGM. Perspectives nationale, europeenne et internationale,Bruxelles, Larcier, 2005, pp. 137-151.

5. J. Spreutels, F. Roggen, E. Roger France, Droit penal des affaires, Bruylant, 2005, pp. 1053-1061.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 93, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 93

– la loi qui a adopte 757 arretes d’execution du 9 fevrier 1994 relative a la securite

des consommateurs (art. 19 a 26), concernant l’ensemble des produits et des

services «a risque» 1;

– la loi du 16 fevrier 1994 regissant le contrat d’organisation de voyages et le contrat

d’intermediaire de voyages;

– la loi du 11 avril 1999 relative aux contrats portant sur l’acquisition d’un droit

d’utilisation d’immeubles a temps partage 2.

740 La loi du 12 juin 1991 relative au credit a la consommation

Soucieux d’assurer ‘un respect optimal’ 3 a la loi du 12 juin 1991, modifiee par la loi du

24 mars 2003, le legislateur a mis en place un systeme tres complet, comportant quatre

categories de sanctions, l’edifice etant complete de 50 arretes royaux d’execution:

a. Les sanctions civiles (art. 85 a 100)

Prononcees soit a la demande du consommateur, soit ordonnees d’office par le juge

(ex. art. 87: reduction de plein droit des obligations du consommateur au prix au

comptant; art. 90: reduction de plein droit ou annulation des penalites non autorisees

ou excessives), elles consistent notamment en l’annulation ou la resolution du contrat,

la reduction des obligations du consommateur, le remboursement au consommateur

des sommes indument versees par lui, le droit pour ce dernier de conserver des

sommes recues a tort, la dispense de paiement des interets, la decharge de toute

obligation pesant sur les cautions.

Elles se superposent a l’article 4 de la loi qui dispose que ‘sans prejudice des

dispositions des articles 85 a 100, toute stipulation contraire aux dispositions de la

presente loi et de ses arretes d’execution est nulle pour autant qu’elle vise a restreindre

les droits des consommateurs ou a aggraver leurs obligations’.

b. Les sanctions penales (art. 101 a 105)

De multiples manquements sont vises. Citons, a titre exemplatif:

– le fait d’offrir, en tant que preteur, des contrats de credit ou de consentir des credits,

directement ou par l’entremise d’un intermediaire de credit ou d’un autre preteur

dans le cadre de ses activites commerciales, professionnelles ou artisanales, sans

etre agree ou inscrit par le Ministre des Affaires economiques, dans les cas ou la loi

impose cet agrement ou cette inscription;

– le fait de faire signer en blanc ou d’antidater des offres et contrats vises par la loi;

– le fait d’utiliser l’une des clauses abusives visees aux articles 28 a 32 de la loi;

– le fait de faire signer, en infraction aux dispositions de l’article 33 de la loi, dans le

cadre d’un contrat de credit, une lettre de change ou un billet a ordre a titre de

paiement ou de surete du contrat, ou d’accepter un cheque a titre de surete du

remboursement total ou partiel de la somme due;

– le fait d’agir comme mediateur de dettes lorsque cette activite est interdite par

l’article 67 de la loi.

c. Les sanctions administratives

LeMinistre des Affaires economiques a le pouvoir soit de retirer soit de suspendre tant

1. J. Spreutels, F. Roggen, E. Roger France, Droit penal des affaires, Bruylant, 2005, pp. 1042-1052.2. B. Vanbrabant, Time-sharing, Bruxelles, Larcier, 2006, 132 p.3. R. Geurts, ‘La loi du 12 juin 1991 sur le credit a la consommation, controle, constatation et repression

des actes interdits’, D.C.C.R., 1991-1992, pp. 810-835; E. Balate, P. Dejemeppe et F. De Patoul, Ledroit du credit a la consommation, De Boeck, 1995, 519 p. X., Actualites du droit du credit a la

consommation, Serie ‘Travaux et Recherches’, n8 47, Publications des Facultes universitaires Saint-Louis, Bruxelles, 2004, 183 p. J. Spreutels, F. Roggen, E. Roger France, Droit penal des affaires,Bruylant, 2005, p. 1061-1079.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 94, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

94 – Livre 119.4 Kluwer

l’agrement obligatoire pour les personnes physiques et morales exercant une activite

de preteur (art. 106) que l’inscription requise pour l’exercice des activites visees a

l’article 77 de la loi (art. 107).

d. L’action en cessation

L’article 109 permet au president du tribunal de commerce de constater l’existence et

d’ordonner la cessation d’une longue liste d’actes, memes penalement reprimes,

conformement aux regles prevues par la legislation sur les pratiques du commerce

en matiere d’action en cessation.

I. LE DELIT D’INITIE

750 Le cadre legal

Introduit en droit belge par la loi du 9 mars 1989 ajoutant un article 509quater au

Code penal, le delit d’initie a fait l’objet d’une refonte complete a l’occasion de l’adop-

tion de la loi du 4 decembre 1990 relative aux operations financieres et aux marches

financiers, dont les articles 181 a 193, inspires de la directiveC.E.E. du 13novembre 1989,

definissaient les operations d’insider trading et en organisaient la repression. Apres

plusieurs modifications legislatives et un arret de la Cour de justice de Luxembourg, c’est

l’article 40 de la loi du 2 aout 2002 relative a la surveillance du secteur financier et aux

services financiers 1 qui a fixe, tant qu’a present, le cadre legislatif de l’incrimination.

L’objectif du legislateur est d’assurer un fonctionnement correct de la bourse, par la

confiance de l’investisseur dans la transparence et l’integrite de ce marche ainsi que

dans le respect de l’egalite entre investisseurs.

Fort complexe, cette matiere pose les principales questions suivantes 2 3:

1. Cette loi a ete baptisee ‘loi corporate governance’.2. Sur cette matiere, voy., en doctrine, R. Huberty, ‘L’introduction en droit belge du delit d’initie’, Ann.

Dr., 1991, pp. 219 a 264; P. Denis, ‘Les operations d’initie’, Rev. prat. soc., 1991, pp. 95 a 120; J.V.Louis, D. Devos et autres, L’ethique des marches financiers, U.L.B., 1991, 224 p.; B. Hendrickx et W.VanGulck, ‘Misbruik van voorwetenschap in vergelijkend perspectief’, Jura Falc., 1990-91, pp. 361 a399; P. Krekels, ‘Misbruik van voorkennis naar Belgisch recht’, R.D.C., 1992, pp. 3 a 53. K. Geens,‘Misbruik van voorkennis na de wet 6 april 1997, weinig nieuws onder de zon’, Le droit des affaires enevolution – L’entreprise face au droit penal, Bruylant, 1995, pp. 85 a 136; B. Feron et B. Taevernier,Principes generaux du droit des marches financiers, Larcier, 1997, 390 p.; Cahiers A.E.D.B.F., Lareforme des marches et des intermediaires financiers, Bruylant, 1997, 824 p.; Ph. Lambrecht, ‘Le pointa propos du delit d’initie’, Rev. dr. ULB, 1997, pp. 85-120; F. Deruyck, ‘De wet van 6 april 1995 inzakede secundaire markten, het statuut van en het toezicht op de beleggingsondernemingen, de bemiddelaarsen de beleggingsadviseurs: strafrechtelijke en administratiefrechtelijke handhaving’, in X., Onderne-mingsstrafrecht, Bruges, Die Keure, 1999, pp. 115-127; B. Feron, Les delits boursiers en droit belge eten droit compare, et Ph. Lambrecht, ‘Les autorites chargees de la detection et de la poursuite des delitsfinanciers’, in Les delits financiers, Cahiers A.E.D.B.F., n8 12, 2001, pp. 39-100 et 113-203. Th.Afschrift et V.A. De Brauwere, Manuel de droit penal financier, Kluwer, 2001, pp. 479-507. C.Sonttag, ‘Prejudices et sanctions des infractions d’inities: Approche juridique et economique’, in X.,L’organisation des dispositifs specialises de lutte contre la criminalite economique et financiere en

Europe, Paris, L.G.D.J., 2004, pp. 111-157. J. Spreutels, F. Roggen, E. Roger France, Droit penaldes affaires, Bruylant, 2005, pp. 572-605. O. Clevenbergh, ‘La communication d’informationsconfidentielles dans le cadre des due diligence, en particulier dans le cas des societes cotees’, R.D.C.,2005, pp. 115-138. Par reference a l’arrete royal du 5 mars 2006 relatif aux abus de marche, voy. E.Janssens, ‘Delit d’initie: nouvelles mesures au 10 mai 2006’, Bilan, 2006, pp. 1-4.

3. Pour les rares applications jurisprudentielles, voy. Corr. Charleroi, 27 sept. 1995, Rev. prat. soc., 1996,p. 152; Corr. Gand, 27 sept. 1995, Rev. prat. soc., 1996, p. 155 (reforme en appel par Gand, 30 avril1997, T.R.V., 1997, p. 336) et Rev. Banq., 1997, p. 413; Corr. Gand, 27 janv. 1999, T.R.V., 1999, p. 47,note, posant une question prejudicielle posee a la C.J.C.E. qui repondit par son arret du 3 mai 2001,T.R.V., 2001, pp. 234-244, l’acquittement etant prononce dans cette affaire Ter Beke par Corr. Gand,18 dec. 2002,Droit banc. fin., 2003, p. 53, note P.J. Engelen; Mons, 30 juin 2000, Rev. Banq., 2000, p.549. Gand, 3 nov. 2005, T.R.V., 2005, p. 400, note.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 95, 29 September 2006, 10:07 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 95

751 Qu’est-ce qu’un initie?

Il s’agit des personnes disposant d’une information dont elles savent ou ne peuvent

raisonnablement ignorer qu’elle est privilegiee, soit:

– en raison de leur qualite de membre des organes d’administration, de gestion ou de

surveillance de l’emetteur de l’instrument financier en question ou d’une societe

ayant des liens etroits avec celui-ci;

– en raison de leur participation dans le capital de l’emetteur;

– ou parce qu’elles ont acces a cette information en raison de l’exercice de leur

travail, de leur profession ou de leurs fonctions.

Il s’agit des inities dits primaires qui, soit ont des responsabilites au sein de la

societe (insiders, inities internes: administrateurs, gerants, directeurs, cadres, mem-

bres du personnel, ...), soit, sans y travailler, ont neanmoins acces a des donnees

particulieres la concernant (outsiders, inities externes: avocats, reviseurs d’entrepri-

ses, notaires, membres d’autres societes, ...), et possedent a ce titre une information

dont le public, lui, ne dispose pas; la loi du 2 aout 2002 y assimile les personnes qui

disposent de l’information privilegiee en raison de leurs activites professionnelles,

ainsi que les personnes physiques qui, dans le cas d’une societe ou autre personne

morale, participent a la decision d’effectuer une transaction ou de passer un ordre pour

le compte de la personne morale en question, ainsi qu’aux societes d’investissement,

aux societes d’investissement en creances et aux societes de gestion d’organismes de

placement collectif, aux membres des organes de ces societes et aux membres de leur

personnel, qui disposent d’une information privilegiee concernant un instrument

financier detenu par la societe ou l’organisme en question.

Le champ d’application de la loi s’etend egalement aux inities secondaires , c’est-

a-dire aux personnes qui ont obtenu une information privilegiee autrement qu’en

raison de leurs fonctions ou de leur profession, a savoir la personne qui, en connais-

sance de cause, dispose d’une information dont elle sait ou ne peut raisonnablement

ignorer qu’elle est privilegiee et qu’elle provient directement ou indirectement d’une

personne visee ci-dessus, ce qui recouvre soit les relations privees (parents, amis et

connaissances de l’initie qui leur donne un tuyau), soit l’effet du hasard (le chauffeur

de taxi ou le garcon de cafe qui surprend une conversation ultra-confidentielle entre

magnats de la haute finance...).

752 Qu’est-ce qu’une information privilegiee?

L’information privilegiee doit repondre a trois criteres:

a. Elle n’est pas publique

Le delit d’initie implique que des operations soient effectuees sur base de donnees qui ne

sont pas connues du marche ni des autres operateurs. La loi ne definit pas le concept

d’information ‘rendue publique’ qui est laisse a l’appreciation du juge qui doit se laisser

guider par l’idee que le delit d’initie consiste principalement dans l’exploitation du

decalage qui existe entre le moment ou l’information est connue du prevenu et le

moment de sa diffusion dans le public. Un guide pourrait etre le defunt arrete royal du

3 juillet 1996 relatif aux obligations en matiere d’information occasionnelle des

emetteurs dont les instruments financiers sont inscrits au premier marche et au nouveau

marche d’une bourse de valeurs mobilieres, qui imposait l’obligation d’information

occasionnelle pour les societes cotees en bourse, lesquelles devaient rendre public sans

delai (art. 5, § 1) ‘tout fait ou toute decision dont elles ont connaissance et qui, s’il etait

rendu public, serait susceptible d’influencer de maniere sensible le cours de bourse des

instruments financiers’.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 96, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

96 – Livre 119.4 Kluwer

b. Elle doit avoir un caractere suffisamment precis

Une information vague, des bruits alarmants, de simples rumeurs ne repondent pas a

l’exigence de precision suffisante. La connaissance de pertes, de pourparlers confi-

dentiels avances en revanche y repondent 1.

c. Elle est de nature a influencer de maniere sensible le cours de l’instrument

financier en question

L’expose des motifs de la loi du 9 mai 1989 donnait les exemples suivants: ‘le

changement dans le controle de la societe, l’acquisition ou la vente de nouveaux

actifs importants, la survenance de pertes ou de faits dommageables graves, les

modifications substantielles envisagees dans le caractere ou la nature des activites,

la conclusion de contrats ou d’operations importantes, des faits ou des decisions

externes a l’emetteur, dont celui-ci a connaissance et qui le concernent, mais que le

public ignore ou dont il ne peut apprecier les implications concretes’. La rare

jurisprudence deja citee a eu l’occasion de s’arreter a ce critere essentiel et toujours

controverse.

Les operateurs qui exploitent des informations non ‘sensibles’ ne commettent donc

pas d’infraction: cette precision etait bien entendu indispensable pour laisser une

marge de manœuvre suffisante a ceux qui operent sur titre.

d. Disparition d’une exception importante

Apres l’arret de la Cour de Luxembourg, la loi du 2 aout 2002 a fait disparaıtre

l’exception des ‘holdings’ selon laquelle ne constituaient pas des informations

privilegiees celles dont les societes a portefeuille disposaient du fait de leur role dans

la gestion des societes dans lesquelles elles possedaient une participation.

753 Quels sont les instruments financiers vises?

Il s’agit des valeurs mobilieres et des autres instruments financiers definis a l’arti-

cle 40, § 4, de la loi: actions, parts, obligations, bons de caisse, certificats immobiliers,

parts de fonds communs de placement, droits de souscription, etc. dans la mesure ou

ces titres sont, en Belgique, cotes a la Bourse ou, a l’etranger, negocies sur un marche

reglemente

754 Quels sont les comportements prohibes?

L’initie se voit interdire:

a. d’acquerir ou de ceder, pour compte propre ou pour autrui, des titres concernes par

cette information;

b. de communiquer une information privilegiee a un tiers, si ce n’est dans le cadre

normal de son activite professionnelle; l’administrateur de societe qui revele une

information privilegiee a l’avocat charge des interets de l’entreprise ne commet

donc pas de delit d’initie;

c. de recommander a un tiers, sur base de cette information, la vente ou l’acquisition

de titres.

1. Voy. cependant Gand, 3 nov. 2005, T.R.V., 2005, p. 400, note: meme l’information relative a des faitsou evenements incertains peut etre consideree comme privilegiee et faire l’objet d’une obligation depublication.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 97, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 97

755 Quelles sont les sanctions?

L’auteur du delit d’initie est puni d’un emprisonnement de trois mois a un an et d’une

amende de cinquante a dix mille euros. En outre, l’initie pourra etre condamne a payer

une somme correspondant au maximum au triple du montant de l’avantage patrimo-

nial – c’est-a-dire du gain realise ou de la perte evitee – tire de l’infraction.

756 Intervention de la CBFA

LaCBFA (Commission bancaire, financiere et des assurances) dispose, selon l’article 40,

§§ 7 et 8, de la loi du 2 aout 2002, de pouvoirs importants, tant sur le plan administratif

que sur le plan de la denonciation d’informations aux autorites judiciaires qui la

requierent pour la recherche ou la poursuite des infractions en matiere de delit d’initie 1.

760 a 860. Reserves

J. LE DROIT PENAL SOCIAL

870 Les dispositions legales

Pour le chef d’entreprise, cette matiere revet une importance pratique considerable,

compte tenu de l’abondante legislation regissant le droit du travail et de la securite

sociale. Le cadre limite de notre etude ne permet pas de consacrer aux infractions a la

legislation sociale la place qu’elles meritent 2-3.

Citons neanmoins comme exemples caracteristiques:

– les articles 12 a 18 de la loi du 30 avril 1999 relative a l’occupation des travailleurs

etrangers 4, completee par une vingtaine d’arretes royaux d’execution, dont ceux du

9 juin 1999 (M.B., 21 mai et 26 juin 1999);

– les articles 27 a 30 de l’arrete royal du 28 novembre 1975 relatif a l’exploitation des

bureaux de placement payants, applicable encore uniquement en Region wallonne,

1. Dans le cadre de l’ancienne loi, voy. Ph. Lambrecht, ‘Les autorites chargees de la detection et de lapoursuite des delits financiers’, in Les delits financiers, Cahiers A.E.D.B.F., o.c.

2. Sur cette matiere, voy. H.D. Bosly, Les sanctions en droit penal social belge, E. Story-Scientia, 1979;R. Legros, ‘Le droit penal dans l’entreprise’, J.T.T., 1977, p. 169; D. Delooz-Lamers, ‘Droit penalsocial’, Qualifications et jurisprudence penales, vol. 2, La Charte, 1994, vo Chomage – conventions

collectives de travail – documents sociaux – obstacle a la surveillance – fonds de securite d’existence –

remuneration. J.Hubin, ‘Essai de politique criminelle enmatiere de droit penal social’,Rev. dr. pen., 1995,pp. 771 a 839; W. Van Eeckhoutte, ‘Last but not least: de strafbepalingen in de sociale wetgeving’, Ledroit des affaires en evolution – L’evolution face au droit penal, Bruylant, 1995, pp. 177 a 225;M.Dumont

et autres, Le droit penal social, C.U.P., Larcier, 1997, pp. 1 a 468; F. Kefer, Droit penal du travail, LaCharte, 1997, 552 p. F. Lagasse,Manuel de droit penal social, Bruxelles, Larcier, 2003, 181 p.; S. Derre etO. Michiels, ‘De quelques aspects de droit penal social et de procedure penale susceptibles d’etrerencontres par le juge social ou le juge repressif’, Rev. b. sec. soc., 2005, pp. 287-304. O. Vanachter,‘Arbeidsrecht en strafrecht’, in X., Strafrecht als roeping. Liber amicorum Lieven Dupont, UniversitairePers Leuven, Louvain, 2005, pp. 115-123. Adde Corr. Bruxelles, 20 mars 1998, J.L.M.B. 1998, p. 870(affaire Renault-Vilvorde) et Cass., 8 sept. 1999, J.L.M.B., 2000, p. 312 (aff. Bongiorno).Sur la notion de faute en droit penal social, voir Bruxelles, 7 sept. 1994, Rev. dr. pen., 1995, p. 91 etBruxelles, 4 janv. 1995,Rev. dr. pen., 1995, p. 753.Adde l’important arret que constitue Cass., 3 oct. 1994,J.T., 1995, p. 26: ‘La transgression materielle d’une disposition legale ou reglementaire constitue en soi

une faute qui entraıne la responsabilite penale et civile de l’auteur, a condition que cette transgression soit

commise librement et consciemment’, ainsi qu’une application par Bruxelles, 4 dec. 1996, Rev. dr. pen.,1997, p. 677.

3. Il y a lieu de tenir compte de la redaction de l’article 155, alinea 2, du Code judiciaire qui precise qu’ilappartient au Procureur general de designer le magistrat du parquet du procureur du Roi ou del’auditorat du travail qui exerce l’action publique en cas de concours entre infractions relevant dudroit penal commun et du droit penal social. Cass., 8 oct. 1996, J.T., 1997, p. 496, obs. O. Michiels;Cass., 26 mai 1999, J.L.M.B., 2000, p. 413.

4. C. trav. Bruxelles, 5 janv. 2006, J.T.T., 2006, p. 169.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 98, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

98 – Livre 119.4 Kluwer

et les articles 24 a 29 du decret du Conseil regional wallon du 13 mars 2003 relatif a

l’agrement des agences de placement;

– les articles 80 a 94 de la loi du 4 aout 1996 relative au bien-etre des travailleurs lors

de l’execution de leur travail;

– les articles 11 a 15 de l’arrete royal n8 5 du 23 octobre 1978, modifies par la loi du

23 mars 1994, relatif a la tenue des documents sociaux 1- 2;

– les articles 35 a 39 de la loi du 27 juin 1969 revisant l’arrete-loi du 28 decembre

1944 concernant la securite sociale des travailleurs 3;

– les articles 42 a 46 de la loi du 12 avril 1965 concernant la protection de la

remuneration des travailleurs 4;

– les articles 53 a 59 de la loi du 16 mars 1971 sur le travail, modifies par la loi du

5 aout 1992, reprimant notamment le travail des enfants en violation de la loi;

– les dispositions des conventions collectives de travail rendues obligatoires par

arrete royal 5;

– les articles epars de la legislation de droit penal social incriminant l’obstacle a la

surveillance 6.

La loi du 30 juin 1971 relative aux amendes administratives applicables en cas

d’infraction a certaines lois sociales, notamment modifiee par la loi du 23 mars

1994 et aussi par l’effet de plusieurs arrets de la Cour d’arbitrage, organise un systeme

de sanctions administratives particulierement remarquable 7.

1. Cass., 16 nov. 1994, Rev. dr. pen., 1995, p. 648: ces dispositions penales s’appliquent meme si ellesconcernent la protection de travailleurs exercant au moins partiellement leurs activites a l’etranger.

2. Cass., 8 janv. 1997, Rev. dr. pen., 1997, p. 492; Corr. Liege, 14 mai 1999, J.L.M.B., 2000, p. 436; Cass.,10 dec. 2002, J.T. 2004, p. 655, note F. Kuty.

3. Corr. Liege, 10 mai 2002, Rev. dr. pen. 2003, p. 548, note G. Raneri.4. Bruxelles, 4 janv. 1995, Rev. dr. pen., 1995, p. 753; Cass., 17 avril 1996, J.T.T., 1996, p. 331; Bruxelles,

4 dec. 1996, Rev. dr. pen., 1997, p. 677. C. trav. Anvers, 8 juin 2001, J.T.T., 2002, p. 96, note.5. C. trav. Mons, 3 fevr. 1995, J.L.M.B., 1995, p. 1141; Corr. Bruxelles, 20 mars 1998, J.L.M.B., 1998,

p. 870 (aff. Renault Vilvorde).6. P. ex., Bruxelles, 7 nov. 1994, Rev. dr. pen., 1995, p. 738 et Corr., Charleroi, 15 mai 1996, Rev. dr. pen.,

1997, p. 521; A. Nayer e.a., L’inspection du travail et la protection juridique du citoyen, La Charte,1996, 272 p.; Corr. Tournai, 16 fevr. 1999, (2 especes), J.L.M.B., 2000, pp. 424 et 426. Th. Werquin,‘Droit penal social: le droit de ne pas contribuer a sa propre incrimination, le droit au silence et l’obstaclea la surveillance’, J.T.T., 2000, p. 81 et s. H. Mormont, ‘L’incrimination d’obstacle a la surveillance auregard des droits de se taire et de ne pas contribuer a sa propre incrimination: etat de la question’, Chron.D.S. 2003, pp. 105-112 et 213-228. F. Kefer, ‘Questions a propos du delit d’obstacle a la surveillance endroit belge’, Rev. trim. D.H., 2003, pp. 1305-1333, ainsi que ‘Le droit au silence permet-il de faireobstacle a la mission de controle et de surveillance de l’administration ?’, Amen., 2005, pp. 111-121.

7. Sur les amendes administratives en droit penal social, voir A. De Nauw, Les metamorphoses

administratives du droit penal de l’entreprise, Mys & Breesch, 1994, pp. 111 a 121, et les nombreusesreferences citees; Trib. trav. Tournai, 21 janv. 1997, J.L.M.B., 1997, p. 233 (exclusion du sursis). Cetteexclusion n’est pas jugee contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution, selon C. A., 14 juill. 1997,J.L.M.B., 1997, p. 1068; ce meme arret de la C.A. precise cependant qu’il y a violation des articles 10 et11 de la Constitution en ce que la loi du 30 juin 1971 ne permet pas aux personnes qui exercent devantle tribunal du travail le recours prevu par l’article 8 de cette loi de beneficier d’une reduction del’amende au-dessous des minima legaux alors que, pour une meme infraction, elles peuvent beneficierdevant le tribunal correctionnel de l’application de l’article 85 du Code penal; cet arret est a la base dela modification de la loi. C.Deneve, ‘De administratieve geldboeten en de rechten van de verdediging’,Rev. dr. soc., 1997, p. 285 et s.; C. trav. Mons, 3 juin 1997, J.L.M.B., 1998, p. 66, note D. Dumont.A. Simon, ‘Examen de la conformite de la loi du 30 juin 1971 a la Constitution, en regard des principesdirecteurs du droit penal. Commentaire des arrets rendus par la cour d’arbitrage le 14 juillet 1997’,Chron. D.S., 1998, pp. 105-111. Ph. De Koster, ‘Pouvoir de l’administration et pouvoir judiciaire:l’accroissement du pouvoir de sanction de l’administration en droit social et le role residuaire devolu aposteriori au pouvoir judiciaire’, J.T.T., 1999, pp. 65-76. Cass., 6 mai 2002, J.T.T., 2002, p. 458, concl.M.P., note. J. Demarche, ‘Amendes administratives et droits de la defense’, J.L.M.B., 2004, pp. 618-619, ainsi que ‘L’ecoulement du temps dans la repression administrative: entre droits de defense,equitable procedure et bonne administration’, J.L.M.B., 2004, pp. 1770-1773; H. Bosly, ‘L’amendeadministrative et le depassement du delai raisonnable’, Rev. dr. pen., 2005, pp. 188-197, note sousC.A., n8 148/2004, 15 sept. 2004.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 99, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 99

Le travail independant connaıt egalement des dispositions, sanctionnees penale-

ment, tendant a amenager les conditions de son exercice; citons a titre d’exemples:

– la loi du 22 juin 1960 instaurant le repos hebdomadaire dans l’artisanat et le

commerce (art. 16) 1;

– la loi du 24 juillet 1973, modifiee par la loi du 29 janvier 1999, instaurant la

fermeture obligatoire du soir dans le commerce, l’artisanat et les services (art. 11).

SECTION 3. LE DROIT PENAL DES SOCIETES

880 Presentation generale

La codification du droit des societes par les lois des 7 mai 1999 et 23 janvier 2001 2 3,

qui est entree en vigueur le 1er fevrier 2001, a quelque peu modifie la consistance du

droit penal des societes 4.

Les dispositions penales continuent toujours a etre peu lisibles, car elles se

presentent trop souvent sous la forme de renvois a des enumerations d’articles du

Code des societes.

Elles gagnent cependant un peu en lisibilite en ce qu’elles sont regroupees en fin de

chaque livre du Code des societes, suivant en cela le plan general de la codification

(societes en general, societes specifiques).

L’objectif du droit penal des societes reste tres large: protection de la societe elle-

meme, des actionnaires, des tiers tels les banquiers, les creanciers, les administrations

publiques, les fournisseurs, les clients, les entreprises concurrentes,... contre les

violations de la loi commises par la societe elle-meme, ses organes dirigeants, ses

employes, ses professionnels du controle comptable, ses liquidateurs,... aussi bien lors

de la constitution de la societe que durant sa vie (fonctionnement, publicite) qu’au

moment de sa dissolution ou de sa liquidation.

Il est frequent pour le droit penal des societes de recourir au mecanisme de

l’imputabilite legale: c’est la disposition legale elle-meme qui designe l’auteur de

l’infraction qui doit revetir ainsi une qualite propre: administrateur, gerant, directeur,

commissaire, fondateur,... mais il sera garde a l’esprit que ces fonctions peuvent autant

etre celles exercees en droit que celles que le prevenu a exercees en fait, sans disposer

des nominations statutaires ou legales adequates mais dont la realite des choses

demontre qu’il les detenait 5.

1. Cass., 8 nov. 1994, Rev. dr. pen., 1995, p. 646.2. Adde l’arrete royal d’execution du 30 janv. 2001, M.B., 6 fevr. 2001.3. Centre J. Renauld (U.C.L.), Le nouveau code des societes, actes d’une journee d’etudes du 24 nov.

1999, Bruylant, 1999, 400 p.; M.A. Delvaux et M. Coipel, ‘Le Code des societes’, J.T., 2000, pp. 545a 556.

4. Th. Afschrift et V.A. De Brauwere,Manuel de droit penal financier, Kluwer, 2001, pp. 341-403. S.Romaniello et S. DeMeulenaer, ‘De vennootschap in het strafrecht: inbreuken op het Wetboek vanVennootschappen en het Strafwetboek’, in X., Strafrecht in de onderneming. Praktische gids voor

bestuurders en zaakvoerders, Intersentia, 2004, 2e ed., pp. 101-143; J.F. Goffin, Responsabilites desdirigeants de societes, Larcier, 2004, pp. 404-414; M.A. Delvaux, ‘Quelques developpements relatifsaux responsabilites civile et penale de l’administrateur personne morale d’une SA, d’une SPRL oud’une SCRL’, in Liber amicorum M. Coipel, Kluwer, 2004, pp. 527-559. J. Spreutels, F; Roggen, E.Roger France, Droit penal des affaires, Bruylant, 2005, pp. 623-676.

5. Cass., 23 mai 1990, R.C.J.B., 1992, p. 550, note A. de Nauw.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 100, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

100 – Livre 119.4 Kluwer

L’element moral des infractions du droit penal des societes repond a quelques

difficultes qui egarent parfois la doctrine non specifiquement penale 1.

Il y a lieu de retenir que:

– soit la disposition penale requiert un dol special, ce qui ne peut etre le cas que si la

disposition penale precise expressement l’element moral qui est requis pour son

application: ainsi, l’article 650 C. soc. requiert-il que le prevenu ait agi ‘fraudu-

leusement’: il s’agit d’un dol special qui designe l’intention dans le chef du prevenu

de se procurer, pour lui-meme ou pour autrui, un benefice illicite;

– soit la disposition penale requiert un dol general, ce qui est le cas si la disposition

penale exige expressement que l’auteur de l’infraction ait agi ‘sciemment’: ainsi,

l’article 349, 38 C. soc. requiert-il que le prevenu ait agi ‘sciemment’: il s’agit d’un

dol general qui requiert que le prevenu ait agi en connaissance de cause;

– soit la disposition penale requiert une faute, ce qui est le cas si la disposition penale

exige expressement que l’auteur de l’infraction ait agi ‘par negligence’: ainsi,

l’article 196, 38 C. soc. sanctionne-t-il le liquidateur negligent;– soit la disposition penale ne requiert ni dol special ni dol general ni negligence, ce

qui est le cas de la toute grande majorite des infractions du droit penal des societes;

ces infractions ne mentionnent en effet expressement aucun element moral: ainsi,

l’article 647, 48 C. soc. sanctionne-t-il les administrateurs qui n’ont pas respecte

une obligation prevue dans d’autres dispositions du Code des societes: il s’agit

alors d’infractions reglementaires; les delits reglementaires ou delits contraven-

tionnels sont des delits qui, pour ainsi dire, existent par le seul fait qu’ils ont ete

commis: l’element materiel paraıt suffire et reveler en lui-meme l’infraction, la

commission de l’acte materiel est censee contenir en elle-meme l’element moral,

de sorte que la preuve de l’acte materiel conduit a une presomption de culpabilite 2;

il demeure que la personne poursuivie a la possibilite d’invoquer des causes de

justification; dans le domaine du droit penal des societes, il n’y a donc pas

d’infractions purement materielles, car le prevenu conserve la faculte d’invoquer

des causes de justification 3, mais la charge probatoire du ministere public est

assurement facilitee dans cette matiere comme dans bon nombre de matieres de

droit penal purement technique.

890 Provocation a l’achat de titres de societes par des moyens frauduleux

Les articles 348 C. soc. pour les SPRL, 388 pour les SC, et 649 pour les SA (ex-art.

202 L.C.S.C.) considere comme coupables d’escroquerie et punit des memes peines

que celle-ci, ceux qui ont provoque soit des souscriptions ou des versements, soit des

achats de parts, d’actions, d’obligations ou d’autres titres de societes par l’un des

moyens suivants:

– simulation de souscriptions ou de versements a une societe;

– publication de souscriptions ou de versements qu’ils savent ne pas exister;

– publication de noms de personnes designees comme etant ou devant etre attachees

1. Ainsi, c’est par erreur que Th. Afschrift et V.A. De Brauwere, o.c., pp. 345-347, ecrivent que laplupart des infractions du droit penal des societes (n8 530 in initio) requiert un dol general qu’ilsconfondent d’ailleurs avec la negligence (p. 346 in fine) et que les infractions du droit penal des societesqui requierent que l’auteur ait agi ‘sciemment’ traduisent l’expression d’un dol special (n8 530, al. 2).Ainsi, l’expression ‘simple negligence’ utilisee par J.F. Goffin, o.c., p. 405, est erronee.

2. Trib. trav. Audenarde, 31 aout 2001, J.T.T., 2002, p. 507, note. Liege, 24 sept. 2002, R.R.D., 2002, p.392. Cass., 8 oct. 2002, http://www.cass.be.

3. Cass., 15 dec. 1999, Pas., 1999, II, p. 1692. J.F. Goffin, o.c., p. 408.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 101, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 101

a la societe a un titre quelconque, alors qu’ils savent ces designations contraires a la

verite;

– publication de tous autres faits qu’ils savent etre faux.

Les comportements reprimes consistent essentiellement a fournir des informations

fausses pour attirer le public 1.

900 La violation des regles d’information et de publicite

Le souci d’assurer l’information claire et complete tant du public que des actionnaires

ou associes et des organes de controle a amene le legislateur a sanctionner penalement

un grand nombre de regles relatives a la publicite et a la transparence des actes

sociaux, que ce soit au moment de la constitution de la societe, au cours de son

fonctionnement ou de sa liquidation.

Citons a titre exemplatif 2:

– les articles 91, 28 C. soc. pour la constitution des societes, 433, 38 C. soc. pour lesSCRL, 647, 38 pour les SA, 773, 18 pour la restructuration (dont la fusion et la

scission) des societes, et 788, 28 pour leur transformation (ex-art. 201.38 L.C.S.C.):ces articles sanctionnent ceux qui n’ont pas fait les enonciations requises par la loi,

notamment en cas de constitution, de transformation de societe ou d’augmentation

de capital; il s’agit d’infractions reglementaires;

– les articles 126, § 1er, 18 et 128, al. 1er C. soc. de maniere generale, 91, al. 1er, 18 C.soc. pour les succursales de societes etrangeres et 196, al. 1er, 28 pour les

liquidateurs (ex-art. 201, 38quater et 48 L.C.S.C.): ces articles consacrent des

infractions reglementaires qui sanctionnent les gerants ou administrateurs:

. qui n’auront pas soumis a l’assemblee generale les comptes annuels dans les 6

mois de la cloture de l’exercice;

. qui ne les auront pas deposes, avec les annexes requises, a la Banque nationale

de Belgique dans les 30 jours de leur approbation par l’assemblee generale;

– les articles 128 C. soc., et, pour les liquidateurs, 196, 28 C. soc. sanctionnent

penalement le non-respect de l’obligation de presenter a l’assemblee generale le

rapport de gestion qui est prevu par les articles 95 et 96 C. soc. (ex-art. 201.98 et204.28 L.C.S.C.);

– le non-respect de l’obligation de deposer les comptes annuels et autres documents

vises par les articles 98 et 100 C. soc. a la Banque nationale de Belgique, dans les

30 jours de l’approbation des comptes annuels et au plus tard 7 mois apres la

cloture de l’exercice 3, a connu une evolution legislative pour aboutir a une

depenalisation: pour les comptes annuels et consolides clotures avant le

1er octobre 2005, l’article 129bis C. soc., introduit par la loi-programme 4 du 8 avril

2003, a consacre l’abandon de la voie penale puisque ces infractions ont ete

desormais reprimees par le recours au mecanisme des amendes administratives

1. Pour un cas d’application, voy. Bruxelles, 29 janv. 1969, Rev. prat. soc., 1970. p. 100.2. Pour une enumeration exhaustive et leur examen, voy. Th. Afschrift et V.A. De Brauwere, o.c., p.

351 et s. En jurisprudence, voy. notamment Corr. Audenarde, 7 fevr. 2002, R.W., 2002-2003, 1311,note et R.D.C., 2002, p. 738, note E. Desmet, a propos de la designation precise du siege social dansl’acte de societe, J.D.S.C., 2005, p. 33, note S. Gilcart et S. Kettmann; R.W., 2002-2003, p. 1311,note; Rev. prat. soc., 2004, p. 284, note S. Kettmann.

3. Corr. Gand, 15 avril 1994, T.R.V., 1994, p. 342, note M. Wyckaert, ‘Het wanbedrijf van niet-neerlegging der jaarrekening’.

4. C. Lewalle, ‘Loi-programme du 8 avril 2003 modifiant, entre autres, le Code des societes’, Dr. banc.fin., 2003/4, p. 249.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 102, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

102 – Livre 119.4 Kluwer

tel qu’organise par le nouvel art. 129bis C. soc. 1, lesquelles seront infligees a la

societe et non plus personnellement aux administrateurs, gerants et liquidateurs;

pour les comptes annuels et consolides clotures apres le 1er octobre 2005, le regime

des amendes administratives a ete ecarte par les articles 17 a 19 de la loi-

programme du 27 decembre 2005 qui modifient notamment l’article 101 C. soc.

en imposant une contribution aux frais de surveillance de 120 a 1.200 euros pour

les depots tardifs;

– l’article 170, 38 C. soc. sanctionne penalement la violation de toute regle relative au

controle des commissaires, et non plus seulement l’entrave au pouvoir d’investiga-

tion des commissaires (ex-art. 204. 68 L.C.S.C.); l’element materiel de l’infraction

laisse entendre que le dol general est requis a titre d’element moral;

– l’article 652, 28 C. soc. qui sanctionne ceux qui transmettent sciemment a la

Commission bancaire et financiere des renseignements inexacts ou incomplets

(ex-art. 204.88 L.C.S.C.), le texte exigeant donc un dol general.

910 La distribution de dividendes ou de tantiemes fictifs

Les articles 347 C. soc. pour les SPRL, 434 pour les SCRL et 648 pour les SA (ex-art.

205, al. 1er L.C.S.C.), prevoit que seront punis d’une amende et d’un emprisonnement

facultatif, les gerants ou les administrateurs qui:

– en l’absence d’inventaires ou de comptes annuels;

– malgre les inventaires ou les comptes annuels;

– ou au moyen d’inventaires ou de comptes annuels frauduleux,

– ont distribue des dividendes ou tantiemes en violation des articles 320 C. soc. pour

les SPRL, 429 pour les SCRL et 617 pour les S.A, lesquels determinent la notion de

benefice distribuable.

L’absence de precision dans les textes quant a un eventuel element moral laisse

entendre qu’il s’agit d’une infraction reglementaire; il n’est pas requis que le gerant ou

l’administrateur qui distribue ces avantages fictifs ait participe ou ait ete au courant du

caractere frauduleux des inventaires ou des comptes annuels; cette derniere precision

quant a une severite extreme, qui a ete tres critiquee, demeure dans les textes mais il se

verifie que le ministere public, dans l’exercice de son pouvoir d’appreciation de

l’opportunite des poursuites, n’y recourt que dans les hypotheses ou l’auteur etait

manifestement au courant, souvent pour y avoir participe, du caractere frauduleux des

comptes annuels 2.

920 La distribution illicite d’un acompte sur dividende

L’article 648, 28 C. soc. (ex-art. 205, al 2, L.C.S.C.) sanctionne les administrateurs des

seules SA qui distribuent des acomptes sur dividende sans respecter les conditions

prescrites par l’article 618. C. soc (ex-art. 77ter L.C.S.C.).

Il s’agit d’une infraction reglementaire.

1. L’amende administrative est de 200 euros (60 euros pour les petites societes) par mois de retard avec unmaximum de 1.200 euros (360 euros pour les petites societes).

2. J.F. Goffin, o.c., pp. 410-411.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 103, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 103

930 La reduction delictueuse de capital social

Les articles 347 C. soc. pour les SPRL, 387 pour les S.C., 434 pour les SCRL et 648

pour les SA (ex-art. 206 L.C.S.C.) sanctionnent trois types de faits eriges en infrac-

tions reglementaires:

– l’acquisition par une SA ou une SPRL, de ses propres actions ou parts par voie

d’achat ou d’echange en contravention avec les articles 620 et 321 C. soc. qui

reglementent de facon tres contraignante ce genre d’operations;

– la prise en gage par une SA ou une SPRL de ses propres titres en contravention avec

les articles 630 et 330 C. soc.;

– les versements sur les actions faits, par un moyen quelconque, aux frais de la

societe ou admis comme faits, alors qu’ils ne sont pas effectues reellement de la

maniere et aux epoques prescrites.

940 Les faux dans les comptes annuels

Cette infraction est reprimee par l’article 127, al. 1er 18 C. soc. (ex-art. 207 L.C.S.C.),directement inspire de l’article 196 du Code penal que nous avons deja examine 1.

Les elements constitutifs en sont identiques.

Precisons seulement ici que:

– le faux doit etre commis dans les comptes annuels de la societe, tels qu’ils sont

prescrits par l’article 92 C. soc. et par la loi du 17 juillet 1975, soit: le bilan, le

compte de resultats et l’annexe 2;

– en vertu de l’article 127, al. 2, C. soc., les comptes annuels sont censes exister des

qu’ils sont soumis a l’inspection des actionnaires ou associes, soit des le moment

ou, au moins 15 jours avant l’assemblee generale annuelle, les comptes sont tenus a

la disposition des actionnaires (art. 553 C. soc.), alors que, sous l’angle commercial

ou fiscal, le bilan n’est definitif qu’apres discussion et approbation par l’assemblee

generale;

– un bilan inexact n’est pas necessairement faux pour autant: l’infraction suppose

une intention frauduleuse ou le dessein de nuire, c’est-a-dire que son auteur ait

frauduleusement cherche a induire en erreur ceux qui examineront les comptes

annuels 3; il s’agit donc bien de l’exigence d’un dol special;

– l’usage de faux comptes annuels est reprime par l’article 127, al. 1er, 28 C. soc.;– les peines portees par l’article 127 C. soc. sont des peines criminelles emportant la

reclusion de cinq a dix ans et d’une amende de 26 a 2.000 F (lire ‘euros’) (x 5,5);

ces infractions sont toujours correctionnalisees, en telle sorte que, devant le

tribunal correctionnel, le maximum de la peine d’emprisonnement est abaisse a

5 ans et le maximum de l’amende a 2.000 F (lire ‘euros’);

1. Sur cette infraction, voir J.-P. Spreutels et J. Messinne, ‘Questions speciales de droit penal’, inL’entreprise en difficulte, Bruxelles, Ed. Jeune Barreau, 1981, p. 365 et s. S. De Meulenaer, ‘Isjaarrekeningfraude strafbaar?’, et ‘Wie ligt in het vizier van de strafrechter?’, in X., Uit balans! Eeninterdisciplinaire analyse van recente boekhoudschandalen, Anvers, Intersentia, 2004, pp. 92-109 et109-115.

2. A l’exclusion de l’inventaire et du livre-journal, proteges par l’art. 196 C.P., et d’une situationcomptable ne constituant qu’un document interne (Bruxelles, 14 dec. 1994, J.L.M.B., 1995, p. 210,note O. Klees, et Rev. dr. pen., 1995, p. 745).

3. Corr. Tournai, 25 fevr. 1965, Rev. prat. soc., 1965 p. 70; Bruxelles, 14 dec. 1994, J.L.M B., 1995, p.210.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 104, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

104 – Livre 119.4 Kluwer

– pourraient etre inquietes comme coauteurs ou complices de l’infraction, le comp-

table qui, en connaissance de cause et sans but frauduleux pour lui-meme, prepare

le faux bilan, l’avocat qui donne les conseils indispensables pour le fausser, ou

encore le commissaire ou le reviseur d’entreprises qui approuvent un bilan qu’ils

savent faux 1.

1. J.M. Piret, ‘Faux bilans’, Rev. dr. pen., 1961-1962, p. 275; Corr. Neufchateau, 26 janv. 1995 et Liege,25 janv. 1996, Rev. prat. soc., 1997, p. 177, note A. Benoit-Moury et N. Thirion: ‘se rend coupablede faux, le commissaire qui certifie les comptes annuels d’une societe, alors qu’il a connaissance del’existence d’une comptabilite parallele au sein de celle-ci’. L. Dupont et S. Van Dyck, ‘Quelquesperspectives quant a la responsabilite penale du reviseur d’entreprises’, in X., La responsabilite civile,

penale et disciplinaire du reviseur d’entreprises, Actes d’une journee d’etude organisee le 13 mars2002, Serie ‘Droit et Entreprise’, n8 6, Bruges, La Charte, 2003, pp. 29-93.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 105, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 105

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 106, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

106 – Livre 119.4 Kluwer

Bibliographie

Outre les references deja citees, nous recommandons la consultation des ouvrages

suivants:‘Le risque penal dans la gestion des entreprises’, Actes du 41e Seminaire de la Commission

Droit et Vie des Affaires de l’Universite de Liege, E. Story-Scientia, 1992.

Afschrift, Th. et De Brauwere, V.A.,Manuel de droit penal financier, Kluwer, 2001, 599 p.

Delmas-Marty, M., Droit penal des affaires, Paris, P.U.F., 1990.

De Nauw, A., Les metamorphoses administratives du droit penal de l’entreprise, Gand, Mys

& Breesch, 1994.

Detienne, J., Droit penal des affaires, Bruxelles, De Boeck, 1989.

Goffin, J.F., Responsabilites des dirigeants de societes, Larcier, 2004, 456 p.

Jeandidier, W., Droit penal des affaires, Paris, Dalloz, 1991.

Spreutels, J.P., Droit penal des affaires, Presses universitaires de Bruxelles, 1990.

Spreutels, J. et Roger France, E., ‘Droit penal des affaires – Chronique de jurisprudence,

1996-1999, 2000-2001, 2002-2004’, R.D.C, 2001, pp. 80-106, 2003, pp. 189-216, et 2006,

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Spreutels, J., Roggen, F., Roger France, E., Droit penal des affaires, Bruylant, 2005,

1230 p.

Van Steenwinckel, J. et Waeterinckx, P. (s.l.d.), Strafrecht in de onderneming. Praktische

gids voor bestuurders en zaakvoerders, Intersentia, 2e ed., 2004, 584 p.

Veron, M., Droit penal des affaires, Paris, Masson, 1992.

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 107, 20 September 2006, 11:19 —

LIVRE 119.4. LA RESPONSABILITE PENALE DANS L’ENTREPRISE

GUJE (2e ed.), 7 septembre 2006 Livre 119.4 – 107

– 3B2 (v 8.07k/W (Nov 26 2004)) , "J:/JOBS/3D/GUJE/SUP75/XII-LIVRE119-4/IX-L119-4_BOEK", p. 108, 20 September 2006, 11:19 —

TITRE XII. L’ENTREPRISE ET SES RESPONSABILITES

108 – Livre 119.4 Kluwer