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La Revue Du Praticien-Cardiologie Pathologie_Vasculaire

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  • Anvrisme de laorteabdominaletiologie, diagnostic, complications

    PR Jean-Pierre BECQUEMIN, DR Didier ERNENWEINService de chirurgie vasculaire, hpital Henri-Mondor, 94010 Crteil cedex.

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    Causes

    Elles sont nombreuses mais lathrosclrose est de trsloin la plus frquente.

    1. Athrosclrose Thorie classique : les facteurs de risque de lathromesont frquents. Le tabagisme est prsent dans 60 % des cas, lhypertension artrielle dans 30 % et lesdyslipidmies dans 12 %. Les patients porteurs dan-vrisme ont bien souvent des lsions dathrosclrose dansdautres territoires, 60 % ont des lsions coronaires, 30 %une artrite des membres infrieurs et 10 % une stnose carotidienne. Mais la possibilit dan-vrisme en labsence de facteurs de risque dathrosclrosefait penser que ces derniers agissent plus comme cataly-seurs de la formation anvrismale que comme la causedclenchante. Hypothses modernes : la plus en vogue est celle duneperturbation de lactivit enzymatique de la paroi. Cettehypothse sappuie sur la rarfaction de llastine et ducollagne dans la paroi de lanvrisme, et sur la possibilitde reproduire dauthentiques anvrismes chez lanimalpar la perfusion dlastase. Lhyperactivation de protases,plus particulirement des mtalloprotases, est respon-sable dun hypercatabolisme de llastine et du collagne.Laugmentation de lactivit des protases est provoquepar une diminution des facteurs inhibant leurs scrtions.Lorigine gntique de ces perturbations a t voque

    par les tudes pidmiologiques. Le risque de dvelop-per un anvrisme de laorte abdominale lorsquunparent du premier degr est atteint, est 12 18 fois plusgrand que dans une population indemne. Des formesfamiliales ont galement t rapportes. La rpartitiondes deux sexes est trs ingale avec une femme pour 10hommes atteints. La femme est atteinte en moyenne 10 ans aprs lhomme.

    2. Autres causesElles sont exceptionnelles : Dystrophies de la mdia : elles entrent dans le cadredes maladies de Marfan et (ou) dEhlers-Danlos. Ilsagit de sujets jeunes, indemnes de lsion athroscl-reuse dans dautres territoires. Les dystrophies sont plusfrquemment responsables de dissections aortiques quedanvrismes, mais elles peuvent voluer vers dauthen-tiques anvrismes ; Artrites inflammatoires : la maladie de Takayasu estplus frquente en Asie ou en Afrique ; elle se manifesteinitialement par un syndrome inflammatoire, puis suc-cde une phase chronique avec des occlusions art-rielles et une hypertension artrielle. Des anvrismessont possibles, gnralement ils ont une paroi trspaisse, mais ils peuvent se rompre ; Maladie de Behet : cause encore plus exceptionnelledanvrisme, elle se manifeste par une aphtose bucco-gnitale et des localisations artrielles occlusives ouparfois anvrismales. Anvrismes infectieux : ils compliquent les septic-mies, quelle que soit leur porte dentre (cutane, pul-monaire, ORL, cardiaque) ou les foyers septiquespri-aortiques. Il peut sagir de surinfection dan-vrisme vrai ou de rupture paritale par ncrose. Les

    DfinitionUn anvrisme est un largissement dun segment artriel avecperte du paralllisme des bords au contraire de lartriomgalie ola dilatation est harmonieuse. Seul lanvrisme expose la rup-ture. Nanmoins, les artriomgalies peuvent se compliquerdanvrismes.

    Lanvrisme est le plus souvent asymptomatiqueet est dcouvert loccasion dune chographieabdominale ralise pour une autre indication. Lchographie est lexamen cl pour ledpistage et la surveillance. La rupture est la plus grave des complications Le traitement est chirurgical mais destechniques endovasculaires sont en coursdvaluation

    Points Forts comprendre

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    germes les plus frquemment en cause sont les salmo-nelles et les staphylocoques. Des bacilles gram-ngatifssont galement retrouvs (Proteus, Escherichia coli).Les anvrismes septiques se dveloppent plus frquem-ment sur des terrains immunodprims.

    Diagnostic

    1. Diagnostic de lanvrisme non compliqu Circonstances de dcouverte : lanvrisme le plussouvent asymptomatique est dcouvert loccasiondune chographie abdominale ralise pour une autrepathologie, notamment adnome de la prostate, etlithiase vsiculaire, ou dans le cadre dun dpistage sys-tmatique. Ce dpistage est justifi chez les patients

    ayant une autre manifestation de lathrosclrosenotamment une coronaropathie ou une artrite desmembres infrieurs, et chez les hommes de plus de 50 ans, hypertendus ou lorsquun anvrisme a tdcouvert dans la famille. Parfois, lanvrisme, videntcliniquement, est dcouvert par le malade lui-mme oupar le mdecin traitant qui constate une masse abdomi-nale battante, ou des calcifications sur une radiographiesans prparation de labdomen. Examen clinique : en cas danvrisme volumineuxchez un patient sans surcharge pondrale, il permet luiseul le diagnostic. Linspection et surtout la palpation delabdomen retrouvent une masse pigastrique (la bifur-cation aortique se projette au niveau de lombilic),volontiers latralise gauche. La nature vasculaire estaffirme par le caractre pulsatile et surtout expansif.Les doigts qui la palpent sont carts chaque systole(signe pathognomonique). Classiquement, le signe deBakey permet daffirmer le caractre sous-rnal delanvrisme : les doigts de lexaminateur peuvent treglisss entre le rebord costal et le ple suprieur delanvrisme de laorte abdominale. En fait, les examenscomplmentaires sont obligatoires pour valuer avecfiabilit, lextension relle.

    2. Examens complmentairesCertains sont simples et toujours ralisables, dautressont plus spcialiss et permettent soit daffirmer undiagnostic hsitant soit entrent dans le cadre du bilanprthrapeutique. Examens simples La radiographie sans prparation : de face et de pro-fil, elle peut montrer lopacit de lanvrisme et parfoisdes calcifications linaires discontinues dessinant lapoche anvrismale.

    Examen tomodensitomtrique avec injection de produitde contraste : coupes transversales montrant lanvrisme delaorte abdominale. Absence de thrombus mural, la coqueantrieure est inflammatoire.

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    Examen tomodensitomtrique avec injection de produitde contraste : coupes transversales montrant lanvrisme delaorte abdominale, le thrombus, les calcifications et la lumireopacifie.

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    Examen tomodensitomtrique hlicodal danvrisme delaorte abdominale avec anvrisme iliaque : reconstruction 3 D montrant les anvrismes.

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    Lchographie et (ou) lchographie-doppler : ce sontles examens cls pour le dpistage ou la surveillance desanvrismes de laorte abdominale (examens non inva-sifs, relativement peu coteux, reproductibles, de bonnesensibilit et spcificit). Ils permettent de mesurer lediamtre de la poche anvrismale, et lpaisseur duthrombus et dvaluer, dans les cas anatomiquementfavorables, lextension aux artres rnales ou auxartres iliaques. Ces examens sont parfois gns par unedistension gazeuse intestinale ou une obsit. Examens spcialiss La tomodensitomtrie : elle est effectue dabord sansinjection de produit de contraste. Lexamen TDMmesure le diamtre externe de lanvrisme, des colletset des artres iliaques. Il prcise lextension en hauteur,la longueur du collet, et la prsence danvrisme desartres iliaques (primitive, interne ou externe), enfin ilmontre dventuelles calcifications paritales. Linjec-tion de produit de contraste permet de mesurer lpais-seur du thrombus mural, sa rpartition circulaire ou lat-rale, laspect et lpaisseur de la coque anvrismale. Latomodensitomtrie prcise les rapports avec les organesde voisinage, veine cave infrieure, uretres, corps ver-tbral, duodnum, la prsence ventuelle dune fibrosepri-anvrismale, ou dune pathologie rtro-pritonaleou intra-abdominale associe.Elle dtecte des anomalies anatomiques telles quunrein en fer cheval, une veine cave gauche ou double ouune veine rnale gauche rtro-aortique. Tous ces l-ments sont importants pour dfinir la stratgie thrapeu-tique. Lartriographie : par ponction artrielle fmorale ouhumrale, elle est actuellement ralise le plus souventavec numrisation de limage. Lartriographie permetdtudier laorte, les artres rnales, le tronc cliaque,les artres msentriques suprieures et infrieures, lesartres hypogastriques, et les artres des membres inf-rieurs. En aucun cas elle ne permet de mesurer le dia-mtre extrieur de lanvrisme puisque seul le chenalinterne est opacifi. Langiographie est effectue avecdes clichs de face et de profil de laorte, des clichs deface et oblique antrieurs gauche et droit pour les artresiliaques et hypogastriques.Selon les quipes, lartriographie est indique cheztous les malades ou seulement chez les patients qui ontune artrite des membres infrieurs, une hypertensionartrielle, un angor msentrique ou des stnoses art-rielles dtectes en cho-doppler. Elle est indispensablelorsquun traitement endovasculaire est envisag, carelle permet de mesurer prcisment la longueur delanvrisme et la distance entre les artres rnales et lesartres hypogastriques. Limagerie par rsonance magntique nuclaire : ellepermet un bilan non invasif complet des anvrismes aor-tiques. Malheureusement, la lenteur de lacquisition desimages avec les appareils actuels et leur faible disponi-bilit font que cet examen nest pas encore entr dans lapratique quotidienne.

    Bilan gnral

    Ce bilan a un double but : valuer le risque opratoire,et dpister une autre pathologie pouvant rduire lesp-rance de vie du patient. Ces informations sont impor-tantes pour la dcision opratoire ventuelle.Les principaux lments sont : lge en prenant en compte lge rel et lge physio-logique ;

    Artriographie danvrisme de laorte abdominale mon-trant un volumineux anvrisme fusiforme sous-rnal (a) ettendu aux artres iliaques primitives (b), noter la prsencedun collet sous-rnal de plus de 1,5 cm.

    4a-b

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    le bilan cardiaque : la recherche des antcdents din-farctus du myocarde et dangor, lexamen clinique etllectrocardiogramme sont systmatiques. Chez unpatient suspect de coronaropathie, dautres examenssont ncessaires : scintigraphie myocardique larecherche de zones de non-fixation du marqueur isoto-pique, chographie avec preuve deffort par injectionde dobutamine pour rechercher des plages akintiques,coronarographie. Lorsque des lsions coronaires sontdpistes, elles peuvent faire lobjet dun traitementavant le traitement de lanvrisme de laorte abdomi-nale. Il peut sagir dune angioplastie en cas de stnosesserres et limites, dun pontage aorto-coronaire pourdes lsions plus complexes, ou dun simple traitementmdical pour des lsions peu svres ou, linverse, deslsions non revascularisables. La fonction ventriculairegauche est value par lchographie et la mesure de lafraction djection. Cette valuation est dautant plusimportante que le patient prsente une hypertensionartrielle (HTA), une cardiopathie ischmique ou valvu-laire ou une cardiomyopathie ; le bilan carotidien est effectu par lcho-doppler.Les stnoses asymptomatiques suprieures 80 % ousymptomatiques suprieures 70 % sont traites chirur-gicalement avant la chirurgie de laorte ; le bilan rnal : gnralement, un ionogramme sanguinsuffit (ure, cratinine, et K+). Une insuffisance rnalechronique, avec ou sans dialyse, est un facteur de gra-vit important. En cas dhypertension, la responsabilitdune ventuelle stnose de lartre rnale peut treapprcie par scintigraphie rnale avec preuve au cap-topril, et les dosages fractionns de la rnine dans lesveines rnales ; le bilan respiratoire : une bronchopneumopathie chro-nique obstructive (BPCO)augmente le risque de rupturede lanvrisme de laorte abdominale. Linsuffisancerespiratoire et la BPCO augmentent le risque pulmo-naire postopratoire, en particulier linfection. Lespreuves fonctionnelles respiratoires sont effectueslorsque le contexte clinique est vocateur. Le risque decomplications pulmonaires peut tre rduit par unekinsithrapie respiratoire adapte ;

    le bilan vasculaire priphrique recherche dautresanvrismes (par ordre de frquence : poplit, thoraco-abdominal, fmoral commun) et des signes docclusionartrielle, une claudication intermittente, absence depouls priphriques et souffles sur les trajets vascu-laires.Ce double bilan local de lanvrisme et gnral du ter-rain permet de poser les indications thrapeutiques :abstention dfinitive (comorbidits rdhibitoires), sur-veillance rgulire (petit anvrisme) ou interventionchirurgicale (gros anvrisme).Complications1. volutionNon trait, lanvrisme peut rester stable mais dans laplupart des cas, le diamtre saccrot progressivementselon une courbe exponentielle. Laugmentation du dia-mtre est de 0,4 cm/an en moyenne. Elle est de 0,22 cmpour des anvrismes de moins de 4 cm, et de 0,6 cmpour des anvrismes de plus de 5 cm. Le risque ultimede cette volution est la rupture. Le risque de rupture estcorrl 4 facteurs : le plus grand diamtre : cest le facteur le plus impor-tant ; 5 ans, le taux de rupture est de 2 % pour les an-vrismes infrieurs 4 cm, 3 12 % entre 4 et 5 cm, 25 41 % au-del de 5 cm, et de 75 % pour les anvrismesde laorte abdominale de 8 cm de diamtre ; lHTA : elle augmente la vitesse de croissance et lerisque de rupture ;

    la BPCO ; la forme de lanvrisme : diamtre gal, les an-vrismes sacciformes ont un risque de rupture accru.

    2. RuptureCest la plus grave des complications : la mortalit glo-bale en cas de rupture est de 90 %. Sans traitement, elle

    Artriographie danvrisme de laorte abdominale mon-trant lanvrisme sacciforme probablement dorigine infec-tieuse.

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    Examen tomodensitomtrique avec injection de produitde contraste : coupes transversales : volumineux hmatomertropritonal gauche refoulant le sac pritonal et effaantle bord du psoas.

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    est de 100 %. Parmi les malades arrivant vivants au blocopratoire, seuls 50 % survivent lintervention.La rupture revt diffrents aspects de gravit variable : Prrupture, lanvrisme devient douloureux ; la dou-leur est lie la croissance brutale de la poche, la fra-gilisation de la paroi, une pousse inflammatoire, ou un hmatome parital. Le risque de rupture est immi-nent. Les douleurs sont plus ou moins intenses, dor-sales, du flanc gauche ou de la fosse iliaque gauche. Ilny a pas de collapsus, lexamen de labdomen retrouvela masse anvrismale, douloureuse la palpation pro-fonde. Lorsque lanvrisme nest pas connu, dautresdiagnostics peuvent tre voqus : colique nphrtique,ulcre gastroduodnal, pousse de sigmodite, dissec-tion aortique, pathologie rachidienne ou pancratique.Le scanner en urgence permet de rectifier le diagnos-tique et dliminer un hmatome priaortique qui nces-site une chirurgie immdiate. Dans les autres cas, lin-tervention en urgence diffre est le plus souventindique ; la rupture rtropritonale correspond une dhis-cence de la paroi gnralement postro-latrale gauchede lanvrisme ; elle est souvent contenue entre lerachis, le psoas, et le pritoine. Le patient a des douleursabdominales et dorsales intenses. Un collapsus peutsinstaller, parfois, et de faon trompeuse, transitoire.Lexamen clinique retrouve la masse abdominale, dou-loureuse, et une dfense localise. Le caractre pulsatilepersiste mais le caractre expansif peut manquer. Aprsles manuvres de ranimation durgence, le patient estconduit au bloc opratoire. Lorsque ltat hmodyna-mique est stable, et que le diagnostic est hsitant, unechographie abdominale ou un scanner peut aider.Lexistence dun hmatome priaortique doit conduire la chirurgie immdiate ; la rupture intrapritonale entrane une hmorragieinterne cataclysmique. Elle peut succder une rupturertropritonale ou survenir demble la suite de larupture de la paroi antrieure de lanvrisme. Le patientprsente un collapsus majeur associ une douleurabdominale brutale. Labdomen est globalement dis-tendu, douloureux, mat la percussion. Le pronostic esttrs svre. La seule chance de survie rside dans leclampage immdiat de laorte. En labsence de traite-ment, le dcs survient en quelques minutes ou quelquesheures ; Ruptures dans les organes de voisinage : elles sontexceptionnelles ; il peut sagir dune rupture dans laveine iliaque ou la veine cave infrieure ralisant unefistule artrio-veineuse gros dbit. Le patient a desdouleurs abdominales ou lombaires, une hypertensionveineuse dans les membres infrieurs (dmes etvarices pulsatiles) et une insuffisance cardiaque dbitlev. Il peut sy associer une hmaturie par hyperpres-sion dans la veine rnale, ou une embolie pulmonairepar migration du thrombus dans la veine cave et lartrepulmonaire. lauscultation de labdomen, on retrouveun souffle continu systolo-diastolique. En labsencedtat de choc, on effectue une angiographie ou un scan-

    ner qui montrent lopacification prcoce du systmeveineux, pathognomonique du diagnostic. Linterven-tion durgence est ncessaire ; Ruptures dans le tube digestif : elles sont encore plusexceptionnelles ; il peut sagir dune fistule aorto-duo-dnale se manifestant par une hmorragie digestivehaute, minime au dbut, ou un tableau septique. Lafibroscopie limine un ulcre gastroduodnal. Elle peutretrouver une rosion de la face postrieure du troisimeduodnum.

    3. Thromboses et emboliesElles peuvent revtir plusieurs aspects : Ischmie aigu des membres infrieurs : 3 5 % desanvrismes de laorte abdominale, se compliquent dis-chmie aigu ; il peut sagir dembolie fibrino-cruoriqueiliaque, fmorale ou poplite, ou dune thrombose aigudu carrefour aortique. Cette dernire survient plus fr-quemment sur des petits anvrismes avec des stnosesathromateuses iliaques et en cas de bas dbit central.Toute ischmie des membres infrieurs doit fairerechercher une origine aortique au mme titre quuneorigine cardiaque ; Ischmie chronique des membres infrieurs : 30 40 % des anvrismes de laorte abdominale ont deslsions athromateuses en aval. Selon leur svrit, ellesentranent une claudication intermittente, des douleur dedcubitus ou des troubles trophiques ; Micro-embolies distales : elles sont retrouves dans 3 % des anvrismes de laorte abdominale ; il sagitdembolie de cristaux de cholestrol dans les artriolesdu tissu cellulaire sous-cutan. Elles se manifestent parun livedo gnralement douloureux des orteils, du piedou des membres infrieurs. Une priartrite noueusepeut tre voque, lorsque sy associent des emboliesdans les artres viscrales, rnales et (ou) digestives.Dans ce cas, il existe une hypertension artrielle svreet une insuffisance rnale daggravation progressive. Lediagnostic est fait par la biopsie cutane et lchogra-phie abdominale.

    Aspect de micro-embolie distale provenant danvrismede laorte abdominale.

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    4. Compressions

    Tous les organes priaortiques peuvent tre comprimssoit par un anvrisme volumineux soit par la fibroseprianvrismale. La compression de la veine cave infrieure ou desveines iliaques entrane un dme des membres infrieursou une phlbite. Lrosion dun corps vertbral par la paroi postrieurede lanvrisme peut tre lorigine de lombalgies. Les compressions des uretres peuvent tre loriginedanurie ou de distension urtrale avec ou sans coliquenphrtique. Les compressions des racines nerveuses peuvent entra-ner des cruralgies ou des sciatalgies ; elles sont gnrale-ment lies des anvrismes iliaques ou hypogastriquesassocis. Les compressions digestives sont exceptionnelles.

    Complications du traitement

    1. Complications postopratoiresPour lanvrisme asymptomatique : lvaluation du risqueopratoire, la slection des indications et la prparationmdicale ont permis de rduire considrablement la morta-lit opratoire des anvrismes oprs froid. Estime dansles annes 1960 15 %, elle est actuellement de 2 5 %.Les dcs postopratoires sont lis la survenue dun

    infarctus du myocarde, dune insuffisance rnale, oudune complication respiratoire. Des complications chi-rurgicales sont galement possibles : hmorragie, ncrosecolique, ischmie des membres infrieurs par embolieou thrombose.Pour les anvrismes urgents : les complications sont lesmmes, mais elles sont plus frquentes et graves. Parmiles facteurs favorisants, on retrouve lge, les antc-dents, le type de rupture, le collapsus, une anurie pr-

    opratoire, la rapidit de lintervention, et limportancede la transfusion.

    2. Complications tardivesLa survie long terme dun anvrisme opr est inf-rieure de 10 18 % une population indemne dan-vrisme de laorte abdominale, de mme rpartitiondge et sexe. La surmortalit est lie aux coronaropa-thies associes et aux cancers notamment bronchopul-monaires, plus frquents dans cette population taba-gique.Les complications tardives de la chirurgie sont rares. Ilpeut sagir de fistule prothto-duodnale (1 %), dinfec-tion de prothse (0,5 %), de faux anvrisme anastomo-tique (1 %) ou dvolution de la maladie anvrismalesur les segments artriels sus- et sous-jacents la pro-thse (anvrisme iliaque ou thoracique). Les throm-boses prothtiques sont relativement rares en labsencedartriopathie associe.Ces volutions justifient unesurveillance clinique et chographique postopratoirergulire et prolonge. Enfin, les complicationssexuelles type dimpuissance ou djaculation rtro-grade ne sont pas rares. Elles peuvent tre prvenues parle respect si possible des artres hypogastriques et desplexus nerveux msentrique infrieur ou hypogas-trique.

    Traitement

    1. Traitement chirurgicalPlusieurs voies dabord peuvent tre choisies selon leshabitudes de lquipe chirurgicale : laparotomiemdiane xipho-pubienne, abord rtropritonal gaucheou laparotomie transverse. La dissection doit dgagerles collets de part et dautre de lanvrisme, ce qui peutncessiter labord des iliaques primitives, externes oudes fmorales communes. Les vaisseaux sont clamps.Lanvrisme est ouvert, dbarrass des caillots. Uneprothse vasculaire est ensuite suture sur les artressaines de part et dautre de lanvrisme , ralisant unpontage aorto-aortique, aorto-bi-iliaque ou aorto-bi-fmoral. La msentrique infrieure peut tre rimplan-te dans la prothse. La coque de lanvrisme estensuite suture sur la prothse pour lisoler du contenuabdominal, puis labdomen est referm plan par plan.

    2. Traitement endovasculaireLe principe est de placer la prothse lintrieur delanvrisme depuis une artre priphrique, gnrale-ment lartre fmorale. Les extrmits de la prothsesont fixes par des stents la paroi saine. On raliseainsi une exclusion endovasculaire de la poche anvris-male. Il existe actuellement des tubes droits et des pro-thses bifurques. Lintrt le plus vident est labsencede laparotomie et une rduction du traumatisme opra-toire, notamment des transfusions. La faisabilit estdmontre mais lvaluation long terme est ncessairepour juger de son efficacit plus particulirement sur laprvention de la rupture. n

    Vue opratoire dune prothse aorto-iliaque avec pontagede la msentrique infrieure, la coque anvrismale estouverte.

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    POUR APPROFONDIR

    1 / AnatomopathologieLa paroi de lanvrisme comporte des dbris athromateux, des cris-taux de cholestrol et souvent des calcifications. Dans la mdia, il y aune rarfaction de llastine et des cellules musculaires lisses, une infil-tration inflammatoire avec de nombreux macrophages moncytes et lym-phocytes T et B, et une no-angiogense partir de ladventice. Lin-filtration est plus ou moins marque. Lorsquelle est majeure, la coqueest blanc nacr, et les tissus priaortiques sont trs adhrents, on parledanvrisme inflammatoire. Un thrombus parital compos de couchesthrombotiques dges diffrents, plus ou moins organises, est frquent.Il pourrait tre secondaire aux perturbations de lcoulement du fluxsanguin dans lanvrisme. La mise en culture systmatique du throm-bus des anvrismes de laorte abdominale oprs montre dans 10 % descas la prsence de germes. Le signification clinique est pronostique decette colonisation bactrienne nest pas vidente.Les considrations anatomo-pathologiques expliquent les complica-tions possibles : rupture par fragilisation de la paroi, qui nest pluscapable de rpondre la pousse de londe systolique, embolie dansles membres infrieurs de thrombus fibrino-cruorique ou de cristauxde cholestrol, ou plus rarement compression des structures pri-aortiques par le volume de lanvrisme ou la fibrose inflammatoire.

    2 / Localisation anatomiqueDans 85 % des cas, le ple suprieur de lanvrisme dbute en avaldes artres rnales laissant un segment artriel sain de un ou plusieurscentimtres, appel collet suprieur. Le collet peut suivre le grand axede laorte, ou tre angul dans le plan antro-postrieur ou frontal. Leple suprieur de lanvrisme englobe dans 10 % des cas une ou deuxartres rnales et dans 5 % des cas lartre msentrique suprieure.Lanvrisme sarrte la bifurcation iliaque dans 35 % des cas,stend une ou aux deux iliaques primitives dans 60 % des cas etenglobe les iliaques externes et (ou) les fmorales communes dans 5 % des cas.Lostium de la msentrique infrieure est gnralement incluse danslanvrisme. Dans 40 % des cas, elle est occluse par le thrombus oupar un processus athrosclreux.Ces diffrentes localisations expliquent les possibilits chirurgicales :la ncessit de remplacer laorte soit par un tube simple soit par unebifurcation et la possibilit de clampage entre les artres rnales et leple suprieur de lanvrisme.

    Les anvrismes de laorte abdominale (AAA)sont frquents : la prvalence dtermine parexamen ultrasonographique est de 2,6 % entre 60 et 64 ans, de 6 % entre 65 et 74 ans et de 9 %aprs 75 ans. Longtemps asymptomatiques, ils peuvent se rompre, entranant une hmorragie internegravissime souvent responsable du dcs. Lchographie abdominale est lexamen de dpistage le plus simple. La dcouverte dun anvrisme de laorte abdominale impose un bilan morphologique pour apprcier les dimensions et lextension de lanvrisme,et un bilan gnral la recherche de comorbidits associes. Chez les patients nayant pas de comorbiditrdhibitoire, et un anvrisme de plus de 5 cm de diamtre, le traitement radical chirurgical ou endovasculaire offre la meilleure chance de survie.

    Points Forts retenir

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    Espagne et Italie. Le mme phnomne est observ entrelAmrique du Nord et lAmrique du Sud (respective-ment 160 et 100).Le taux de dcs attribuable la cardiopathie ischmiquevarie considrablement et schelonne entre 7 13 % enEurope du Sud et en Amrique du Sud, 22 23 % enAmrique du Nord et de 26 28 % en Europe du Nord.Le taux de dcs de la cardiopathie ischmique est pluslev pour les hommes que pour les femmes dans tousles pays, avec des variations dans chaque pays, le rapportvariant de 2,4/1 en cosse 4/1 en France. Dautre part,la diffrence homme-femme est prdominante aux gesmoyens de la vie (7,2 hommes pour 1 femme) par rap-port au troisime ge (3 hommes pour 1 femme)

    Variations du taux de mortalit dans le temps

    Le dclin du taux de dcs par maladie cardiovasculairesobserve dans presque tous les pays et est dautant plusmarqu que lincidence de la maladie tait grande.Ainsi, les variations entre 1940 et 1980 ont t de 40 %au tats-Unis, de 35 % en France mais restent inf-rieures 20 % en cosse et en Espagne.

    Variations de la ltalit et soins mdicaux

    Le dclin de la mortalit due la cardiopathie isch-mique est probablement un effet de la prvention pri-maire, au moyen de modification des facteurs de risqueet de lapparition de meilleurs soins mdicaux (respecti-vement 40 et 60 %). La gestion dune cardiopathieischmique chronique comprend maintenant des modifi-cations du mode de vie, des interventions pharmaco-logiques et des procdures de revascularisation instru-mentales ou chirurgicales. Leffet bnfique du traitementdhypertension, dune dyslipidmie, et dautres facteursde risque sassocie une hygine alimentaire, une activit physique adapte et larrt du tabac.

    Physiopathologie et tiologie

    Physiopathologie

    Dans des conditions normales, aussi bien au reposqu leffort, existe un quilibre parfait entre les besoinsen oxygne du muscle cardiaque et les apports en oxy-

    pidmiologie

    Au cours des 30 dernires annes, des progrs majeursont t raliss dans les domaines de la prvention, dudiagnostic et du traitement des cardiopathies isch-miques. Des comparaisons internationales ont jou etcontinuent jouer un rle majeur pour accrotre notrecomprhension de ltiologie complexe et de lvolutionde la cardiopathie ischmique.

    Population : dmographie et mortalit

    Les tudes dmographiques ont montr quil existe unediffrence de rpartition des cardiopathies ischmiquesentre lEurope du Nord et lEurope du Sud. Ainsi, le tauxde cardiopathies ischmiques est de 200 250 patientspour 100 000 habitants en Angleterre, cosse, Finlandeet Sude alors quil nest que de 60 100 en France,

    Angine de poitrinepidmiologie, tiologie, physiopathologie, diagnostic, volution, traitement

    PR Jacques BOSCHATDpartement de cardiologie (Pr J.-J. Blanc), unit dhmodynamique, CHU, hpital de la Cavale-Blanche, 29609 Brest cedex.

    Langine de poitrine ou angor est la douleurprovoque par lischmie myocardique. Celle-ci existe quand il y a un dsquilibre entre les apports en oxygne et les besoins en oxygne du myocarde.

    On oppose les angors primaires par rductionbrutale des apports (obstruction aigu ou transitoire dune artre coronaire par thrombose et spasme) langor secondairepar augmentation des besoins (angor deffort).

    Langor instable correspond au premier mcanisme et survient quand la capsule fibreuse qui recouvre la plaque lipidique se rompt. Cest une vritable urgence thrapeutique conduisant pratiquement toujours la coronarographie.

    Langor stable, plus lent et progressif,ncessite un traitement de fond des facteurs de risque et une valuation fonctionnelle par preuve deffort pour guider au mieux le traitement.

    Les traitements antithrombotiques et anti-ischmiques sont indispensables dans toutes les formes dangine de poitrine.

    Points Forts comprendre

  • gne du myocarde assimil au flux sanguin coronaire. Laconsommation en O2 du myocarde (MVO2) dpend de : la frquence cardiaque ; la contractilit myocardique et la dure de ljectionsystolique ; la tension paritale dpendant elle-mme de la pres-sion artrielle systmique et de la taille de la cavit.Les 2 plus importants paramtres sont la tension art-rielle et la frquence cardiaque. Lischmie myocardique rsulte du dsquilibre brutalentre besoins et apports qui peut venir : dune rduction brutale des apports donc du flux sansmodification des besoins (ischmie primaire) ; dune augmentation disproportionne des besoinssans modification du flux (ischmie secondaire) ; les 2 mcanismes peuvent coexister.

    tiologie

    1. Ischmie dorigine coronaireCe sont les causes les plus frquentes des ischmiesmyocardiques. La rduction slective du flux sanguincoronaire entrane une ischmie myocardique rgionaledont le sige et ltendue dpendent du tronc coronaireatteint.Trois mcanismes parfois intriqus peuvent dclencherune ischmie myocardique : la stnose artriosclreusefixe ; le vasospasme et la thrombose. La stnose artriosclreuse est forme dun centre lipi-dique et dune capsule fibreuse. La croissance progressi-ve de cette plaque nentrane aucune rpercussion tantque la surface endoluminale restante excde 30 % de lasurface thorique. Les stnoses de 70 % et plus entra-nent des phnomnes dischmie leffort car, dans cecas, laugmentation de flux engendr par laugmentationdes besoins ne peut se produire. Par ailleurs, sur unmme vaisseau, plusieurs plaques athromateuses dgeet dvolution diffrents peuvent tre observes.Certaines localisations ont une incidence pronostiqueparticulire (stnose du tronc commun coronaire gauche,de linterventriculaire antrieure proximale).Par convention, on parle datteinte : monotronculaire : lorsque 1 seul des vaisseaux est atteint ; bitronculaire lorsque 2 vaisseaux sont lss ; tritronculaires lorsque les 3 vaisseaux sont touchs. Le vasospasme : un trouble de la vasomotricit coro-naire peut tre observ. Il sagit le plus souvent dunrtrcissement localis et transitoire de la lumire art-rielle par contracture des cellules musculaires lisses dela mdia.Dans 90 % des cas, le phnomne sobserve en regardou au pourtour dune stnose athromateuse fixe expli-quant lexistence de phnomnes ischmiques deffortet spontans chez le mme malade.Plus rarement, le spasme localis survient sur une artreangiographiquement normale (angor vasospastique pri-maire). Cependant, dans ce cas, les tudes anatomiques

    et chographiques ont rvl lexistence dun athromemodr mais pratiquement toujours prsent. La thrombose : le risque volutif dune plaque athro-sclreuse, outre son augmentation, est la rupture de lacapsule fibreuse qui lentoure et lexposition de soncontenu au sang circulant. Adhrence et aggravationplaquettaire sont les premires tapes survenant aupourtour de la plaque rompue. Cette thrombose peut trenon occlusive et elle reprsente alors le mcanismehabituel de langor instable. Elle a un fort potentiel vo-lutif en labsence de traitement et peut se compliquerdune thrombose totale de lartre et tre alors respon-sable dun infarctus myocardique.En outre, il existe souvent des phnomnes spastiquessurajouts sa rupture de plaque. La rpercussion myocardique dpend de limportanceet de la dure de lischmie.Lischmie brve nentrane aucune lsion cellulairemyocardique et on peut admettre que 70 % de ces pi-sodes sont asymptomatiques. Il existe en effet un dca-lage dans le temps des manifestations de lischmiemyocardique. Les altrations de la cintique rgionaleventriculaire gauche prcdent les manifestations lec-trocardiographiques qui, elles-mmes prcdent lesmanifestations cliniques.Lischmie prolonge et rptitive ralise le tableau delangor instable. Suivant limportance du tableau cli-nique, des altrations de la contractilit rgionale peu-vent tre observes.

    2. Ischmie dorigine extracoronaire Causes cardiaques : il sagit dischmie myocardiqueoccasionne par une augmentation brutale des besoinsen oxygne comme dans les grandes pousses hyperten-sives, soit par diminution de remplissage diastoliquecomme dans certains troubles du rythme rapides (fibril-lation auriculaire, tachycardie supraventriculaire ettachycardie ventriculaire), soit par dsquilibre relatifentre apport et besoin en oxygne comme on peut le voirdans certaines hypertrophies ventriculaires gauches(hypertension artrielle, rtrcissement aortique orifi-ciel, cardiomyopathie hypertrophique obstructive ounon). Causes extracardiaques : toute cause pouvant entra-ner une baisse de loxygne dans les artres coronairespeut, surtout si coexiste une cause cardiaque dinsuffi-sance coronaire, dclencher ou aggraver une ischmiemyocardique (anmie, hypoxie svre).

    Diagnostic

    Tableaux cliniques

    En fonction du degr dvolutivit dune plaque athro-mateuse, langine de poitrine peut tre stable ouinstable, les 2 manifestations de la maladie peuventalterner dans le temps.

    A N G I N E D E P O I T R I N E

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  • 2. Angor instable

    Habituellement, il est d un remaniement brutal auniveau dune plaque athromateuse ; en particulier, larupture de la chape fibreuse de la plaque entrane ledveloppement dune thrombose non occlusive laquel-le sassocie souvent un vasospasme.Cest un tat clinique fort potentiel volutif car : si unpatient est hospitalis prcocement pour angor instable,lvolution vers linfarctus sera vite 9 fois sur 10 ; eten cas dinfarctus du myocarde, 1 malade sur 2 a pr-sent dans les jours qui ont prcd un tableau cliniquedangor instable.Langor instable ralise 3 tableaux cliniques diffrents :langor de repos ; langor postinfarctus immdiat ; lan-gor deffort de novo ou crescendo. Langor de repos : la survenue dune douleur angineu-se typique (sige et irradiation) au repos chez un sujetprsentant un contexte vocateur (coronarien connu,nombreux facteurs de risque) doit entraner son hospita-lisation immdiate.Parfois, la douleur fugace a spontanment cd, lexa-men du mdecin et llectrocardiogramme sont peu per-turbs. La prudence est de rgle et la surveillance auxsoins intensifs est souhaitable. Les reprises angineuses aprs un infarctus myocar-dique aigu dans les 3 semaines qui suivent lpisode ini-tial sont appeles menaces dextension et peuventannoncer une rcidive in situ ou distance. Elles justi-fient un renforcement du traitement mdical et une opa-cification coronaire compte tenu de la gravit de lvo-lution spontane. Langor deffort : 2 tableaux cliniques dangor def-fort correspondent un vritable angor instable : langor de novo est lapparition depuis moins de 1mois dune angine de poitrine svre, il se manifestesouvent du jour au lendemain, pour des efforts demblemodestes ; langor crescendo est une rupture du rythme dunangor stable ancien par la modification brutale et rapidede la symptomatologie associant : modifications des circonstances dapparition (la douleur apparat pour desefforts minimes, peut mme tre spontane) ; modifica-tions des caractres de la douleur (intensit plus forte,irradiation nouvelle) ; modifications de la dure descrises qui sallongent. Classification : en fonction de la diversit des situa-tions cliniques, elle tient compte des facteurs dclen-chants, de la svrit et de limpact du traitement qui at propos (tableau II).

    Moyens diagnostiques

    1. Recherche des facteurs de risqueElle est essentielle. Ainsi, linterrogatoire et les examensbiologiques usuels rechercheront une hyperlipmie, undiabte, une obsit, une hypertension artrielle, uneintoxication tabagique ou une hrdit vasculaire.

    1. Angor stable deffort

    Il sagit dans ce cas dun diagnostic dinterrogation dontla certitude est taye par des examens complmentaires.Il sagit 9 fois sur 10 dun homme de 50 60 ans qui seplaint de douleurs rtrosternales ou rtromandibulairesmdianes, constrictives, type de poids ou de serre-ment, dintensit variable avec irradiation scapulaire,brachiale ou mandibulaire, volontiers unilatrales, sur-venant leffort et tant calmes larrt de celui-ci.Cette douleur est volontiers majore par le froid.On en prcisera : la frquence ; le mode de dclenche-ment ; les ventuels risques associs (ructations) ;lanciennet et le mode volutif ; la gravit (tableau I).Certaines localisations de la douleur sont plus atypiqueset peuvent faire garer le diagnostic (douleurs exclusive-ment localises une irradiation, douleur pigastrique).Dautres manifestations sont rattaches langor def-fort mais tmoignent souvent dune atteinte coronairesvre (angor de primo dcubitus, angor post-prandial).Parfois, enfin, les manifestations cliniques sont encoreplus trompeuses car la douleur manque, remplace parun blocage respiratoire qui freine brutalement le patientds quil acclre le pas : cest la classique blocpnedeffort.

    Cardiologie-Pathologie vasculaire

    1217L A R E V U E D U P R A T I C I E N ( P a r i s ) 1 9 9 9 , 4 9

    Limitation importante de lactivit ordinaire, cest--diremarcher 2 pts de maison sur un plan horizontal ou mon-ter un tage dans des conditions normales.

    Incapacit davoir une activit sans gne douloureuse avecou sans douleur de repos.

    Lactivit physique ordinaire telle que marcher et monterdes escaliers ne cause pas dangor. Les douleurs napparaissent que pour des efforts impor-tants, brutaux ou prolongs.

    Classe 1

    Classe 2

    Angor entranant une diminution modre de lactivit quo-tidienne : la marche rapide, monter rapidement un escalier,gravir une pente, marcher ou monter des escaliers aprs unsjour dans le froid, contre-vent ou sous le coup dunstress, dune motion ou encore lors des premires heuresde sommeil. Marcher plus de 2 pts de maisons ou mon-ter plus dun tage dans des conditions normales.

    Classe 3

    Classe 3

    Classification fonctionnelle de langor deffort de la Socit

    canadienne de cardiologie

    TABLEAU I

  • 2. Examen clinique Il est gnralement normal mais il doit tre complet :prise de pression artrielle ; examen vasculaire ; auscul-tation cardiaque.

    3. lectrocardiogramme Dans la maladie coronaire stable, celui-ci est normal1 fois sur 2. Dans les autres cas, celui-ci pourra mettreen vidence des signes dinfarctus ancien, des troublesconductifs non spcifiques (bloc de branche gauche ethmibloc), des anomalies non spcifiques de la repolari-sation intressant souvent le segment ST. Dans langor instable, llectrocardiogramme estanormal 8 fois sur 10.En dehors des crises, une ischmie sous-picardiquepeut tre observe (onde T ngative, pointue et sym-trique) localise dans le territoire myocardique menac,parfois il sagit dune lsion sous-endocardique (sous-dcalage de ST) dont la valeur localisatrice est plus dis-cutable. Pendant les crises, llectrocardiogramme peut mon-trer un des lments suivants :. sous-dcalage ischmique du segment ST (apparitionou aggravation) ;

    . sous-dcalage du segment ST faisant voquer uneischmie transmurale et un spasme associ ;. parfois une pseudo normalisation dune ischmiesous-picardique qui nest pas un signe damlioration,mais, au contraire, dvolution persistante. Lpreuve deffort permet en cas de doute davancerdans la dmarche diagnostique et si le diagnostic est cer-tain, dapprcier la gravit de lischmie et le pronostic.Cet examen simple, peu coteux et reproductible trouveson indication principale dans langor deffort stable.Langor instable avec douleur dans les 48 heures prc-dentes est une contre-indication. Le critre de positivit est lapparition au moins 85 %de frquence maximale thorique (220) :. habituellement dun sous-dcalage dau moins 1 mmhorizontal ou descendant 0,08 s aprs le point J ;. plus rarement dun sus-dcalage de ST en labsencedinfarctus. Plus rare, il tmoigne dune lsion svrevoire dun spasme surtout sil survient aprs leffort ;. la douleur qui augmente leffort est moins frquenteque le sous-dcalage. La sensibilit de lpreuve deffort est de 75 % pourdpister une ischmie myocardique mais sa spcificitest faible surtout chez la femme et en cas danomalieprexistante de llectrocardiogramme (valvulopathie,bloc de branche gauche, hypertrophie ventriculairegauche, hypertension artrielle). Certains paramtres ont un intrt pronostique impor-tant et tmoignent des lsions tritronculaires svres oude stnose du tronc commun de la coronaire gauche etdoivent conduire une coronarographie rapide :. positivit prcoce (< 60 watts) ;. sous-dcalage > 4 mm tendu plusieurs drivations ;. lenteur de la normalisation en rcupration ;. extrasystoles ventriculaires leffort ;. hypotension ou absence dlvation de la tension art-rielle leffort. Lenregistrement ambulatoire de llectrocardio-gramme (Holter) (fig. 1) : lintrt essentiel de lexa-men est de dtecter les pisodes ischmiques survenantau cours des activits quotidiennes chez le patient coro-narien. Son intrt principal est dapprcier la frquencedes pisodes ischmiques asymptomatiques chez lecoronarien. Les pisodes se manifestent par un sous-dcalage rectiligne ou pente descendante du segmentST llectrocardiogramme, gale ou suprieure 1mm et dune dure dau moins 1 minute. Sept pisodesischmiques sur 10 sont asymptomatiques chez le coro-narien. La scintigraphie myocardique (fig. 2) permet dva-luer si la perfusion myocardique est adquate ou non,utilisant le plus souvent des images tomographiques. Le plus souvent, les images sont obtenues larrt duneffort, gradues et compares des images de repos de faon dtecter un dfaut de perfusion transitoire leffort.Diffrents tests de provocation sont utiliss : preuvedeffort, injection intraveineuse de dipyridamole oudadnosine.

    A N G I N E D E P O I T R I N E

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    Classe 1 : angor de novo (moins de 2 mois) ou angor deffort accler

    Classe 2 : angor de repos subaigu (plusieurs douleurs dans le mois prcdent mais aucun pisodedans les 48 dernires heures)

    Classe 3 : angor de repos aigu actuel

    Svrit

    Classe A : angor instable secondaire (anmie, trouble du rythme)

    Classe B : angor instable primaire

    Classe C : angor instable postinfarctus

    Facteurs dclenchants

    1 : pas de traitement au moment de la survenue de linstabilit

    2 : traitement dangor chronique stable

    3 : rfractaire au traitement maximal de langor instable

    Selon lintensit du traitement en cours

    Classification de langor instable

    TABLEAU II

  • Cardiologie-Pathologie vasculaire

    1219L A R E V U E D U P R A T I C I E N ( P a r i s ) 1 9 9 9 , 4 9

    Enregistrement Holter dun patient prsentant un angor de Prinzmetal coronaires angiographiquement peu altres.1

  • Lisotope le plus souvent utilis est le thallium 201 quine se fixe que sur les cellules myocardiques dont lemtabolisme est normal. Dautres marqueurs au techn-tium mtastable (99mTc) comme le Sistamibi sont ga-lement utiliss.La sensibilit et la spcificit sont respectivement de 80et 90 %.La scintigraphie permet la localisation prcise du territoireischmique et donc de lartre probablement en cause. La coronarographie est lexamen cl de lexplorationde langine de poitrine. Effectu par voie fmorale,humrale, voire radicale, cet examen comprend 2 temps :la ventriculographie gauche, lopacification coronaire.La ventriculographie gauche, ralise en incidenceoblique antrieure droite et oblique antrieure gauche,permet de calculer le volume de la cavit et dapprcierlexistence dune hypokinsie localise et ventuelle-ment des squelles dun infarctus ancien sous formedune akinsie.Lopacification coronaire, ralise sous de multiplesincidences, permet de prciser : le type de lsion en cause : stnose, occlusion, exis-tence dun thrombus ; le degr, le nombre et le sige des lsions sur les diff-rents vaisseaux ; le nombre de vaisseaux atteints ; la qualit du lit daval ; lexistence ventuelle dune circulation collatrale.Dans 5 10 % des cas, lartriogramme est normal ou le

    sige de la lsion non significatif. Dans les autres cas, ilexiste une stnose serre du tronc (10 20 %), dun seulvaisseau dans 30 % des cas, de 2 troncs dans 30 % descas et de 3 vaisseaux dans 30 % des cas. Cette rparti-tion des lsions nest pas fondamentalement diffrentedans langor stable et instable si ce nest la plus grandefrquence des stnoses du tronc commun dans langorinstable surtout dans la forme avec angor crescendo.Lanalyse qualitative de la coronarographie est souventutile dans la perspective dune revascularisation.Certains caractres seront recherchs : concentricit ouexcentricit ; prsence de calcifications avec liserradiopaque plus ou moins pais ; longueur de lastnose ; thrombus intracoronaire avec tonalit inhomo-gne avec prsence de dfects endoluminaux ; prsencedune dissection matrialise par un trait de refend, par-fois spirale avec imprgnation du produit de contraste.Une classification propose par lAmerican HeartAssociation et lAmerican College of Cardiology est uti-lise pour valuer les difficults possibles lors desangioplasties coronaires (tableau III). Les indications dela coronarographie sont larges mais cet examen ne doitpas tre systmatique dans langor. Les principales indi-cations usuelles sont : angor chronique stable non amlior par un traitementmdical bien conduit ou lorsque les anti-ischmiquessont mal tolrs ; angor instable ; bilan propratoire des valvulopathies ;

    A N G I N E D E P O I T R I N E

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    Scintigraphie myocardique par voie apicale mettant en vidence une souffrance dans le territoire de linterventriculaireantrieure.

    2

  • Stratgie diagnostique dans langorstable et instable

    1. Angor stableEn cas dangor stable, les examens complmentaires ontpour but principal daffirmer lischmie myocardique etden apprcier la gravit pouvant ventuellement orien-ter la stratgie thrapeutique.Lpreuve deffort reprsente lexamen complmentairele plus simple et le plus reproductible pour apprcier les2 paramtres prcdents. On apprciera : la dure deleffort ; la charge atteinte ; la variation de la tensionartrielle ; limportance du sous-dcalage au maximumde leffort et la vitesse de rcupration ; lapparitionventuelle du sous-dcalage survenant essentiellementen phase de rcupration.En fonction des signes obtenus, seuls seront adresss lacoronarographie immdiate les patients prsentant mani-festement des critres de gravit de lpreuve deffort(positivit prcoce pour une charge faible, sous-dcalagede plus de 3 mm dans plusieurs drivations, lenteur de larcupration leffort, stagnation tensionnelle).Les autres patients recevront un traitement antithrombo-tique et anti-ischmique. Le bnfice dun tel traitementsera apprci sur les critres cliniques (amlioration dela symptomatologie) et lectrocardiographiques deffort(attnuation des signes ischmiques). La frquence desurveillance par preuve deffort est dun examen par anen cas dangor stable amlior par le traitement.

    2. Angor instableLe patient souffrant dangor instable, surtout quandcelui-ci est svre avec douleur spontane et modifica-tion percritique de llectrocardiogramme, doit tre hos-pitalis pour mettre en route un traitement antithrombo-tique et anti-ischmique.La coronarographie est quasiment indispensable ladfinition dune prise en charge rationnelle de langorinstable en dehors dune contre-indication a priori uneventuelle revascularisation (ge extrme, pathologieintercurrente).La date de la coronarographie par rapport aux derniresdouleurs thoraciques est discute. Si le traitement mdical au maximum ne suffit pas contrler la symptomatologie, la coronarographie doittre effectue en urgence dans loptique dune revascu-larisation chaque fois quelle est possible. Si le traitement mdical contrle la symptomatologie,ventualit la plus frquente (90 %), le choix de la datede la coronarographie est discut.Effectue tt (entre 2 et 3 jours), elle a lavantagedidentifier prcocement les malades ayant une indica-tion chirurgicale demble (stnose du tronc commun)et loppos, didentifier les patients bas risque pourlesquels un retour prcoce domicile est possible.Cependant, lopacification prcoce a 2 inconvnients :un traitement antithrombotique court nest pas suffisantpour liminer le thrombus endoluminal ce qui aug-

    angor de novo surtout si le sujet est jeune et (ou) actif ; suspicion dangor vasospastique ; suites immdiates dinfarctus myocardique avec testdeffort positif.Les complications sont rares : les accidents cardiaquesgraves se voient essentiellement dans les stnoses dutronc commun coronaire ou chez les patients prsentantdes lsions diffuses svres associes ou pas une alt-ration svre de la fonction ventriculaire gauche. Ellessont dues le plus souvent une occlusion coronaire bru-tale. Les troubles du rythme (extrasystole ventriculaire,tachycardie ventriculaire ou fibrillation ventriculaire)sont rares. Les accidents au point de ponction (hmato-me et hmorragie) ont vu leur frquence diminuer du fait de la diminution de taille des cathters utiliss.Les accidents gnraux aux produits de contraste iodssont assez frquents mais la plupart du temps bnins.Les tests provocateurs du spasme coronaire compltentla coronarographie lorsque celle-ci apparat normale ousubnormale. La rponse est juge sur les critres cli-niques (douleur), lectrocardiographiques (sus-dcalagede ST) et sur lapparition dun spasme localis occlusifou non sur la coronarographie. Le test le plus utilis enFrance est linjection de 0,4 mg de Mthergin (driv delergot dou de proprit vasoconstrictive puissante).

    Cardiologie-Pathologie vasculaire

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    Courtes (< 10 mm), concentriques, facilement accessibles,angulation < 45 %, contours lisses, peu ou pas calcifies,infrieures 100 %, extra-ostiales, ne touchant pas auxautres branches, absence de thrombus.

    Lsions de type Asuccs primaire lev, 85 %, risque faible

    Lsions tubulaires (10 20 mm), excentriques, segmentdamont modrment tortueux, angulation modre (> 45,< 90), contour irrgulier, calcifications franches, occlusionde moins de 3 mois, localisation ostiale, lsions sur unebifurcation, prsence de thrombus.

    Lsions de type Bsuccs primaire intermdiaire, 60-85 %, risque modr

    Lsions longues (> 20 mm), segment proximal trs tor-tueux, angulation trs marque (> 90), occlusion compltede plus de 3 mois, impossibilit de protger une collatraleimportante, greffons veineux dgnrs avec lsionsfriables.

    Les lsions de type B sont subdivises en 2 sous-groupes :B1 prsence dun seul critre du groupe B ;B2 prsence dau moins 2 critres de svrit du groupe B.

    Lsions de type Csuccs faible, 60 %, risque lev

    Classification qualitative des stnoses coronaires daprs

    lAmerican Heart Associationet lAmerican College of Cardiology

    TABLEAU III

  • mente le risque en cas dangioplastie prcoce. Dautrepart, elle empche deffectuer une preuve deffortdvaluation la recherche dune ischmie rsiduelle etde justifier une revascularisation par angioplastie.La coronarographie retarde au 7e jour est prfrablelorsquon subodore une indication ventuelle uneangioplastie. Aussi, en cas dangor de novo, la prsencede lsions mono- ou bitronculaires est frquente (2/3 descas) et justifie dattendre le dlai. loppos, si langorinstable survient chez un coronarien connu, la probabili-t dune atteinte multitronculaire est frquente et uneindication prcoce dopacification peut tre retenue.

    Formes cliniques

    1. Ischmie silencieuseOn entend par ce terme toutes les manifestations isch-miques qui ne saccompagnent daucune douleur. Parmi les facteurs susceptibles de dclencher ce ph-nomne, on retient : la dure de laccs ischmique : les manifestations cli-niques surviennent aprs les pisodes lectrocardio-graphiques, ces derniers peuvent donc rester isols silischmie nest pas trop brusque ; que les accs sont dautant plus frquents quil existedes vasospasmes associs ; quen outre, le diabte peut masquer les manifesta-tions douloureuses. Trois formes cliniques peuvent tre dcrites : type I : ischmie vritable chez un sujet totalementasymptomatique mise en vidence le plus souvent aucours dune preuve deffort systmatique chez un sujet risque (frquence 7 %) ; type II : mise en vidence chez un sujet qui a prsentun infarctus du myocarde plus ou moins rcent ; type III : alternance daccs ischmiques symptoma-tiques ou non chez le mme malade. On admet que cetype dischmie est rencontr chez 40 % des sujetsatteints dangor stable et chez 70 % des sujets atteintsdangor instable. Le pronostic est globalement identique celui obser-v chez les patients symptomatiques lsions coro-naires gales ce qui ncessite donc une prise en chargeidentique.Il est admis que le risque daccident coronaire aigu estchez le coronarien stable ou instable multipli par 4 sides pisodes dischmie silencieuse se surajoutent auxpisodes ischmiques douloureux habituels. Lischmiesilencieuse aprs un infarctus rcent (< 1 mois) augmen-te le risque de mortalit (1 par 10).2. Angor spastiqueDeux formes cliniques peuvent tre dcrites : langorspastique pur survenant sur un rseau coronaire en appa-rence normal ou une angine de poitrine de Prinzmetal ;langor spastique survenant sur une lsion athromateu-se fixe qui en augmente transitoirement le degr.

    Aspects cliniques : il sagit dune douleur volontiersspontane survenant surtout la nuit ou au petit matin,plus rarement au dcours immdiat dun effort, voluantpar paroxysmes avec alternance de phases actives o lesdouleurs surviennent horaire fixe et de phases de repospendant lesquelles les douleurs sont plus rares voireabsentes. Sy associent parfois dautres signes fonction-nels (palpitations, malaise, lipothymies voire syncopes). Aspects lectrocardiographiques : laspect le plushabituel est lapparition dun sus-dcalage de ST, tra-duction dune ischmie transmurale mais parfois ilsagit dun sous-dcalage ou dune pseudonormalisationde londe T quand lischmie nest pas transmurale.Des troubles du rythme ventriculaires (extrasystoles,tachycardie, fibrillation) sont plus rares et peuvent vo-luer vers la mort subite.Plus rarement encore des troubles conductifs peuventtre observs en cas de spasme occlusif de la coronairedroite.Dans tous les cas, le caractre fugace de la crise rendprcieuse lutilisation de lenregistrement Holter car onsait que 60 70 % des pisodes ischmiques sont indo-lores dans langor spastique. Aspect coronarographique : habituellement, laspectdun spasme est une occlusion transitoire dun segmentcoronaire qui apparat normal ou le sige dune lsionathrosclreuse sur une opacification pralable. Plusrarement, il sagit dun spasme diffus svre saccompa-gnant de modifications cliniques et lectrocardiogra-phiques.La mise en vidence dun spasme coronaire repose surlinjection intraveineuse de 0,1 0,4 mg de Mtherginavec contrle angiographique pendant 3 minutes. Lespasme mis en vidence conduit injecter rapidement 2 mg de drivs nitrs par voie endocoronaire. Aspect volutif : pendant les priodes dactivit de lamaladie, langor vasospastique expose au risque nonngligeable de mort subite par trouble du rythme ventri-culaire et dinfarctus du myocarde car le spasme favorisela thrombose.

    3. Autres formes cliniques Formes pseudo-digestives : lassociation frquentedpigastralgies douloureuses associes des ructa-tions peut faire errer le diagnostic. Cependant, lesmodes de dclenchement leffort et la disparition larrt de celui-ci oriente le diagnostic chez un hommedge mr ayant des facteurs de risque vasculaire.Langor invalidant chronique : sa frquence a consid-rablement diminu depuis les progrs des mthodesmodernes de revascularisation.

    volution

    Lvolution est trs variable ( de 30 secondes 30 ans ).La gravit de lvolution est fonction du caractre stableou instable de langor ; de la diffusion des lsions coro-naires et de la fonction ventriculaire gauche.

    A N G I N E D E P O I T R I N E

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  • 2. Traitement antithrombotique

    Laspirine a une efficacit prouve dans la prventiondes accidents ischmiques dans langor stable et langorinstable. Elle est utilise des doses journalires de 100 250 mg/j, dans toutes les formes cliniques dangor, sonprincipal effet secondaire est une gastrotoxicit (dose-dpendante). La ticlopidine trouve ses indications dans les contre-indications laspirine. Son principal effet secondaireest le risque de leucopnie et de thrombopnie.Elle est surtout utilise en association avec laspirinedans la prvention des occlusions thrombotiques aprsmise en place dune prothse endocoronaire (500 mg/jpendant 1 mois). Le Clopidogrel a rcemment obtenu son A.M.M. dansla rduction des vnements lis lathrosclrose(infarctus du myocarde, accident vasculaire crbral,dcs dorigine vasculaire) chez des patients prsentantdes antcdants de manifestation clinique dathro-sclrose. Lhparine est utilise la seringue lectrique danslangor instable des doses suffisantes pour maintenir letemps de cphaline active entre 2 et 2,5 fois celui dutmoin. Ce traitement est poursuivi de 2 4 jours. Les antivitamines K ont peu dindications reconnues,en dehors de la fibrillation auriculaire sur cardiopathieischmique et anvrisme postinfarctus. Dautres antithrombotiques sont actuellement ltudedans linsuffisance coronaire aigu (angor instable etinfarctus) : anticorps monoclonaux anti-rcepteurs plaquettaireGP IIb IIIa. Le C7 E3 (ABCIXIMAB ou Ro-Pro) a ttest avec succs dans le syndrome coronaire aigu et utilis dans langioplastie coronaire ; antithrombine de synthse (Argatroban) ; hirudines ; hparine de bas-poids molculaire : certaines ont leurA.M.M. dans langor instable et linfarctus sans onde Q.3. Traitements anti-ischmiquesIls nont aucune action sur lvolution des lsions maisagissent en amliorant le dsquilibre entre besoins etapports en oxygne du myocarde.Quatre classes thrapeutiques peuvent tre utilises :les drivs nitrs ; les btabloquants, les inhibiteurs calciques et plus rcemment les agonistes potassiques. Drivs nitrs : la trinitrine sublinguale, croquer ouen spray, est le plus ancien des anti-ischmiques et sonefficacit dans le traitement de la crise angineuse en faitun test diagnostique.Ils assurent un effet vasodilatateur direct antispastique etune rduction des besoins en oxygne du myocarde lis la baisse de la pression tldiastolique du ventriculegauche. Leffet vasodilatateur est surtout prsent auxfortes concentrations. Leffet secondaire le plus mar-quant est li leffet vasodilatateur (cphales, troublesvasomoteurs).

    Lvolution naturelle sest trouve modifie depuis 20ans par : une meilleure prise en charge des facteurs de risquevasculaires ; une meilleure approche des traitements antithrombo-tiques et anti-ischmiques ; une plus grande efficacit des moyens de revasculari-sation.Schmatiquement, 3 volutions sont possibles.

    Mort subite

    Habituellement en rapport avec un trouble du rythmeventriculaire (tachycardie ventriculaire et fibrillationventriculaire (8 fois sur 10), plus rarement en rapportavec un infarctus aigu (2 fois sur 10).Les facteurs prdictifs sont surtout connus aprs linfarc-tus : altration majeure de la fraction djection ; prsencedune tachycardie ventriculaire au stade aigu ; et dlaiinfrieur 3 mois entre linfarctus et la tachycardie.

    Infarctus du myocarde

    Il fait suite 1 fois sur 2 un pisode rcent dangorinstable.La frquence de linfarctus chez un patient angineux estde 5 % par an ; celle-ci est dautant plus grande que letableau clinique de la maladie est celui dun angorinstable.

    Insuffisance cardiaque par cardiopathieischmique

    Elle peut compliquer lvolution dun patient ayant desantcdents dinfarctus et se dmasque loccasiondpisodes ischmiques.Elle peut plus rarement tre sur le devant de la scne cli-nique chez un patient nayant jamais prsent de symp-tmes angineux.

    Traitement

    Celui-ci comprend le traitement mdical appliquerdans tous les cas et la revascularisation myocardique(angioplastie transluminale et pontage) dont la ralisa-tion dpend dune coronarographie pralable et dunediscussion mdico-chirurgicale.

    Traitement mdical

    1. Rgles hygino-dittiques

    Elles concernent le mode de vie avec prvention du stresset prise en charge des facteurs de risque vasculaire : arrt total du tabac ; traitement dune hypertension artrielle ; traitement dune hyperlipmie ; rgime amaigrissant et activit physique modre.

    Cardiologie-Pathologie vasculaire

    1223L A R E V U E D U P R A T I C I E N ( P a r i s ) 1 9 9 9 , 4 9

  • La trinitrine est bien absorbe par la peau. Cette voie est utilise dans le traitement de fond car elle permet une excellente concentration sanguine. Elle doit tre utilise de faon discontinue en raison du risque detachyphylaxie.La molsidomine (Corvasal) sapparente aux drivsnitrs. Elle sutilise exclusivement par voie orale (2 4mg x 3/j). La voie intravasculaire est la linsidomine.Lindication et le mode dutilisation de ces molculesvarient en fonction du tableau clinique en prfrant lavoie intraveineuse dans langor instable. Les btabloquants font partie intgrante et obligatoiredu traitement de langor stable et instable sauf contre-indication dment documente (angor de Prinzmetal careffet vasoconstricteur). Leur effet anti-ischmique est d une diminution de la consommation en O2 du myocardepar baisse de la frquence cardiaque, de la tension art-rielle et de la contractilit myocardique. Lefficacit sejuge sur la frquence cardiaque atteindre (50 60/min).On privilgie actuellement lutilisation dun btablo-quant cardioslectif demie-vie longue. Les inhibiteurs calciques ont, comme les nitrs, undouble effet pharmacologique : rduction des besoins enO2 par diminution de la pr- et post-charge ; augmenta-tion du flux coronaire par effet vasodilatateur direct.Deux classes thrapeutiques peuvent tre utiliss : tropisme vasculaire : dihydropyridine ou drive :. effet antihypertenseur marqu,. peut tre associ aux btabloquants (Chronadalate) ; tropisme myocardique : diltiazem, vrapamil, bpridilont un effet bradycardisant et inotrope ngatif plus oumoins marqu ce qui rend lassociation aux btabloquantsprudente (diltiazem, bpridil) ou viter (vrapamil).Les principales indications sont : angor stable en association avec drivs nitrs ; angor spastique document ou leur efficacit estingale ; angor instable rfractaire une bithrapie (btablo-quants + nitrs) ; angor instable rcent chez un patient trait antrieure-ment par un btabloquant (hypertension artrielle) ; contre-indications documentes aux btabloquants.Le choix de la molcule se portera prfrentiellementvers le diltiazem (Tildiem) ou le vrapamil (Isoptine) sile malade ne reoit pas concomitamment des btablo-quants et vers une dihydropyridine ou une molculeapparente ayant lA.M.M. (Amlodipine) en cas decoprescription avec un btabloquant. Rcemment, la classe des agonistes potassiques (nicorandel) a complt larsenal thrapeuthique,ils ontun effet vaso-dilatateur direct sur les artres coronaireset une puissante activit spasolytique sans action sur lacontractilit myocardique.

    Revascularisation myocardique

    La discussion de la revascularisation myocardique tientcompte des rsultats du traitement mdical ; des don-nes de la coronarographie (stnose proximale bon lit

    daval) ; du lien de cause effet entre la lsion et lasymptomatologie clinique.Deux techniques sont possibles en complmentarit : langioplastie transluminale ; la chirurgie.

    1. Angioplastie transluminaleElle consiste dilater la lsion coupable laide dunballon et recrer une lumire artrielle du diamtreaussi proche que possible de la normale. Dautres tech-niques complmentaires sont parfois utilises : athrec-tomie directionnelle, rotablator (fraise tournant grandevitesse). La mise en place dune prothse endocoronairecomplte le geste dangioplastie dans 30 70 % des casselon le centre.Le taux de succs immdiat est de 95 % au prix dunrisque de mortalit de 0,5 % et de risque dinfarctus de 1 %.En cas de succs, le patient peut sortir 48 heures aprs.Le risque secondaire est celui de la restnose observechez 25 % des patients avec une prothse endocoronaireet 40 % chez ceux qui nen ont pas. Elle survient prf-rentiellement dans les 6 mois qui suivent la procdureinitiale et justifie une surveillance rgulire (chirurgie etpreuve deffort).Langioplastie transluminale des coronaires est indiqueprfrentiellement en cas datteinte monotronculaire,parfois bitronculaire si les indications techniques sontfavorables.

    2. Chirurgie de revascularisationUtilises de faon prfrentielle, les artres mammairesinternes donnent un taux de permabilit 10 ans sup-rieur 90 % a la place des veines saphnes dont 30 %sont occluses 1 an.Les indications chirurgicales ont volu du fait de lessorde langioplastie transluminale des coronaires : chec dangioplastie ; stnose du tronc commun gauche ; patients tritronculaires fraction ventriculaire gauchealtre ; stnoses juges inaccessibles pour langioplastietransluminale des coronaires.Le risque opratoire (mortalit opratoire) varie de 2 3 % en fonction de la gravit du tableau initial avec untaux dinfarctus priopratoire de 5 %.Le rsultat fonctionnel long terme est bon avec allon-gement de la dure de vie pour les patients les plusgraves (bi- et tritronculaires fonction ventriculairegauche altre).

    Indications thrapeutiques schmatiques

    1. Angor stableTraitement mdical de premire intention associantaspirine, btabloquants, drivs nitrs ou inhibiteurs calciques.

    A N G I N E D E P O I T R I N E

    1224 L A R E V U E D U P R A T I C I E N ( P a r i s ) 1 9 9 9 , 4 9

  • valuation bisannuelle par preuve deffort (sous traite-ment).Sil ny a pas daggravation, on poursuit le traitement encorrigeant des facteurs de risque.Sil y a aggravation ou inefficacit du traitement, onrecourt la coronarographie et la revascularisation.

    2. Angor instableLe patient est hospitalis en unit de soins intensifs soushparine et aspirine, associes des btabloquants et desdrivs nitrs ou inhibiteurs calciques bradycardisants.Si la mthode est efficace, une coronarographie est ra-lise J7 et on envisage la revascularisation sur : laspect lsionnel ; les donnes ventuelles dune preuve deffort pru-dente sous traitement.Si un tableau instable persiste sous traitement, une coro-narographie immdiate est ralise puis une revasculari-sation, chaque fois quelle est techniquement possible.Plus rcemment, il est acquis que la prescription dinhi-biteurs des rcepteurs plaquettaires GIIb IIIa diminue lamorbi-mortalit dans langor instable trait par uneangioplastie.

    3. Angor spastiqueMme traitement que langor instable lexclusion desbtabloquants.Si une stnose apparat, elle est corrige la plupart dutemps par angiographie transluminale des coronairesavec ou sans stent.Si les coronaires sont angiographiquement normales, onassocie des inhibiteurs calciques et des drivs nitrs. n

    Cardiologie-Pathologie vasculaire

    1225L A R E V U E D U P R A T I C I E N ( P a r i s ) 1 9 9 9 , 4 9

    Langine de poitrine est un diagnostic suspect par la clinique et affirm par llectrocardiogramme et les examens complmentaires.

    preuve deffort et scintigraphie myocardiquepermettent au mieux dapprcier la gravit de la maladie.

    Celle-ci ne peut tre affirme que par la coronarographie qui prcise laltration de la fonction ventriculaire gauche et lextension des lsions coronaires. Cet examen nest pas systmatique mais lindication doit tre pose en fonction des critres cliniques et des rsultats des preuves fonctionnelles (lectrocardio-gramme deffort et scintigraphie).

    Le traitement mdical et la prise en charge des facteurs de risque doivent tresystmatiques pour tous les patients.

    Les dcisions de revascularisation instrumentale ou chirurgicale doivent tre discutes cas par cas.

    Points Forts retenir

    POUR EN SAVOIR PLUS

    Bourdarias JP, Cacoub P, Bierling P. Pathologie cardiaque et vasculaire. Paris : Mdecine-Sciences Flammarion, 1998.

    Gandjbakhch I, Ollivier JP, Pavie A. Maladie coronaire. Paris :Arnette Blackwell, 1995.

  • 193L A R E V U E D U P R A T I C I E N ( P a r i s ) 1 9 9 8 , 4 8

    Cardiologie - Pathologie vasculaire

    A 91

    Arrt circulatoireOrientation diagnostique et conduite tenir avec la posologie mdicamenteuse

    Dr Nathalie BOULET, Dr Nicolas SIMONDpartement accueil urgences (DAU), CHI, 78303 Poissy cedex

    Larrt cardiorespiratoire (ACR) reprsente une urgence absolue. La prcocit de sa prise encharge est le meilleur garant du pronostic et toutdoit tre fait pour quun enchanement rapide des secours soit ralis.On divise artificiellement la prise en charge en 6 tapes successives, pas toujours ncessaires : la reconnaissance des signes prcoces de larrtcardiorespiratoire ; le dclenchement rapide des secours ; la ranimation cardiopulmonaire de base (gesteslmentaires de survie) ; la dfibrillation ; lintubation ; lutilisation de mdicaments par voieintraveineuse.La ncessit dassocier ces diffrentes phases a donn lieu au concept de chane de survie dont chaque maillon participe au pronostic. Le premier maillon est lalerte prcoce, ds la reconnaissance de larrt cardiorespiratoire. En France, il existe un numro de tlphoneunique pour le SAMU : le 15. Le deuxime maillonest la ranimation cardiopulmonaire (RCP) de base pratique par les premiers tmoins. Le troisime maillon est la dfibrillation prcoce.Le quatrime maillon est la ranimationcardiopulmonaire spcialise avec ventilationartificielle et administration de mdicaments. Les deux premiers maillons sadressent au grandpublic, les deux derniers concernent les secoursspcialiss.

    Points Forts comprendre

    Diagnostic de larrt cardiorespiratoire

    Larrt cardiorespiratoire est dfini par linterruption bru-tale de la circulation et de la ventilation. Le diagnostic esttabli sur : labsence de pouls carotidien (et fmoral) dcelable ; une absence de ventilation spontane efficace ou une res-piration sous forme de gasps agoniques ; une perte de connaissance brutale ; la mydriase bilatrale aractive est un signe classique.Elle est tmoin de la gravit de latteinte crbrale, secon-

    daire lanoxie. Elle apparat parfois aprs linjectiondadrnaline. Elle nest donc pas ncessaire au diagnosticet nest pas forcment un signe pjoratif pendant la rani-mation cardiopulmonaire.

    tiologiesLes causes darrt cardiorespiratoire sont multiples. On dis-tingue dune part, le mcanisme de larrt circulatoire, etdautre part la pathologie sous-jacente.1. McanismesLlectrocardiogramme (ECG) reste indispensable pour lediagnostic du mcanisme qui est un trouble du rythme. La fibrillation ventriculaire (FV) reprsente 70 % descauses darrt cardiorespiratoire ; elle est la principale causedes morts subites de ladulte. Son pronostic dpend essen-tiellement de la prcocit de la dfibrillation. La tachycardie ventriculaire (TV) non traite, voluerapidement vers la fibrillation ventriculaire dont elle se rap-proche pour le pronostic et le traitement. Lasystolie ou bradycardie extrme (frquence cardiaque< 20/min) avec complexes cardiaques de type agonique tra-duit une souffrance myocardique importante, en rapportavec la maladie sous-jacente ou avec un arrt cardiorespi-ratoire prolong. La dissociation lectromcanique est la prsence duneactivit lectrique apparemment normale sans activitmcanique du myocarde. Son mcanisme est mal compriset elle se voit plus volontiers au cours dune tamponnade,dun pneumothorax, dune embolie pulmonaire, dunehypovolmie, dune acidose ou dune anoxie.

    2. Les diffrentes causes darrts cardiorespiratoiresElles sont constitues par : les causes cardiaques chez ladulte avec en tte la mala-die coronaire (grande pourvoyeuse de tachycardie ventri-culaire et de fibrillation ventriculaire, puis les valvulopa-thies, les cardiomyopathies et les troubles du rythme et dela conduction idiopathiques ; les causes respiratoires avec lasthme aigu grave et lescorps trangers des voies ariennes surtout chez lenfantde moins de 4 ans ; les causes accidentelles qui prdominent chez ladultejeune avec les traumatismes, les intoxications (mdica-menteuses, par fume dincendie, par monoxyde de car-bone), les lectrocutions et les noyades.

  • Prise en charge dun arrt cardiorespiratoire.1

    194 L A R E V U E D U P R A T I C I E N ( P a r i s ) 1 9 9 8 , 4 8

    A R R T C I R C U L A T O I R E

    Ranimation cardiopulmonaireLa prise en charge de larrt cardiorespiratoire est trs stan-dardise. Le but de la ranimation cardiopulmonaire estdassurer une oxygnation et une perfusion myocardiqueet crbrale. Les techniques de ranimation cardiopulmo-naire de larrt circulatoire font lobjet de recommanda-tions internationales. Les recommandations de lAmericanHeart Association (AHA) ont t ractualises en 1992.LEuropean Resuscitation Council (ERC) a pour la pre-mire fois tabli ses propres recommandations en 1992.La ranimation cardiopulmonaire comprend 2 volets : la ranimation cardiopulmonaire de base encore appeleBasic Life Support (BLS) par les Anglo-Saxons. Elle com-porte des gestes de secourisme lmentaire pouvant trepratiqus par des tmoins ayant suivi une formation de base.Ces diffrentes manuvres sont regroupes selon les lettresABC correspondant respectivement Airway (libert desvoies ariennes), Breath (respiration) et Circulation (cir-culation) ; la ranimation cardiopulmonaire spcialise ou lAd-vanced Life Support (ALS) complte la ranimation car-diopulmonaire de base et doit tre pratique par un per-sonnel mdicalis expriment.

    Ranimation cardiopulmonaire de baseLa ranimation cardiopulmonaire de base est la ralisationdes gestes lmentaires de survie, afin de maintenir lalibert des voies ariennes, une ventilation pulmonaire etune circulation sanguine efficaces. Elle se limite la

    squence ABC dcrite dans les recommandations de lAme-rican Heart Association.

    1. Airway : libration des voies ariennesLa tte est en lgre hyperextension avec subluxation dumaxillaire infrieur pour viter que la filire pharyngo-larynge ne soit obstrue par la chute de la langue en arrire.Un rapide examen de la cavit buccale permettra de recher-cher la prsence de scrtions ou de corps trangers (dbrisalimentaires, dentier) quil faudra enlever. Si le contexteou lanamnse de lentourage voquent un corps trangerlaryng, une manuvre de Heimlich sera effectue.

    S 15

    prcoce Dfi-brillation

    RCPbasse

    pr-coce

    Alertepr-coce

    RCP

    spcialise prcoce

    1. Reconnaissancerapide des signesde lACR

    2. Alerte immdiateSAMU 15

    3. Gestes lmen-taires de survie :A : libert desvoies ariennesB : ventilationC : MCE

    4. EGC : TV ou FVDfibrillation 200 JSi chec :200 - 300 - 400 J

    5. Intubation

    6. MdicamentsAdrnaline :1 mg/3 min (NaCO3H

    1 mM/kg i.v.) (Xylocane

    1 mg/kg i.v.Max : 3 mg/kg)

    Tm

    oins

    de

    lAR

    CP

    erso

    nnel

    md

    ical

    < 4 min

    < 8 min

    < 12 min

    Dlai Inter-Maillons tapes de misevenants

    en uvre

    La manuvre de Heimlich est une technique primordiale destine lvacuation des corps trangers. Le sauveteur, plac derrire la vic-time debout ou assise, positionne ses deux poings plat sous laxiphode et exerce une pression croissante et ascendante, provoquantainsi une hyperpression intrathoracique permettant dexpulser le corpstranger. Cette manuvre peut aussi seffectuer sur un patient en dcu-bitus dorsal, en se plaant califourchon sur elle.

    2. Breath : ventilationPlusieurs techniques peuvent tre utilises : bouche bouche, bouche nez, ventilation au masque. Malgr unrisque quasi nul, le bouche bouche est de moins en moinspratiqu devant la crainte dune contamination par le VIH.Quelle que soit la technique choisie, la ventilation doit sin-tercaler avec les compressions du massage cardiaqueexterne : 15 compressions cardiaques suivies de 2 insuf-flations si le sauveteur est seul, 5 compressions suivies de1 insufflation sils sont deux. Chaque insufflation est ra-lise lentement en 1,5 2 secondes et lon doit attendre uneexpiration complte (3 4 s) avant de recommencer. Levolume courant est celui dune inspiration normale(500 mL).3. Circulation : massage cardiaque externe Technique de base : la technique du massage cardiaqueexterne, qui na besoin daucun autre matriel que la pr-sence des sauveteurs, doit tre ralise selon des rglesstrictes pour obtenir une efficacit optimale et un minimumdeffets nfastes. Le patient est en dcubitus dorsal sur unplan dur, le talon de la main est en appui sur le tiers inf-rieur du sternum, lautre main tant pose par-dessus, lesdoigts en crochets. Le sternum doit senfoncer denviron4 cm. Le rythme de compression doit tre rapide, de 80 100/min. Le temps de compression doit tre gal au tempsde relaxation. Variantes de la technique de base : aucune des techniquessuivantes na en fait vraiment prouv son efficacit : compression et insufflation synchrone ; compression abdominale synchrone : la compression delabdomen se fait lors de la relaxation thoracique du mas-sage cardiaque externe ; compression abdominale continue par le pantalon anti-choc ;

  • 195L A R E V U E D U P R A T I C I E N ( P a r i s ) 1 9 9 8 , 4 8

    Cardiologie - Pathologie vasculaire

    vest CPR : mthode rcente, encore exprimentalemais prometteuse, ralise au moyen dune veste pneu-matique gonfle squentiellement ; la compression-dcompression active fait appel lap-plication dune ventouse sur le thorax ; le massage cardiaque externe thorax nest plus prati-qu. Thories expliquant lefficacit du massage cardiaqueexterne : deux thories saffrontent pour expliquer leffi-cacit du massage cardiaque externe. La tendance actuellefait coexister les deux : thorie de la pompe cardiaque (Kouwenhoven, 1960).Elle fait jouer un rle essentiel la compression cardiaque.Le cur est rgulirement comprim entre le sternum et lerachis. La systole et la diastole sont artificiellement repro-duites avec un fonctionnement normal des valves car-diaques ; thorie de la pompe thoracique (Rudikoff, 1980). Unedeuxime thorie apparat la suite des travaux de Rudi-koff qui montre que le massage cardiaque externe entraneune augmentation gnralise de toutes les pressions intra-thoraciques. Ce serait le thorax tout entier qui servirait depompe au cours de la ranimation. La compression ster-nale permettant ljection ventriculaire, le cur se com-porte comme un conduit passif avec des valves unidirec-tionnelles incomptentes.

    Ranimation cardiopulmonairespcialise

    Elle fait suite la ranimation cardiopulmonaire de base.

    1. Dfibrillation ou choc lectrique externeLa fibrillation ventriculaire est la cause la plus frquentedarrt circulatoire. Le choc lectrique externe (CEE) estle seul traitement, et le facteur pronostique essentiel est saprcocit dapplication. Le but de la dfibrillation nest pasde dpolariser tout le myocarde mais seulement une massecritique suffisante pour rtablir une activit lectrique nor-male engendre par un seul foyer dautomatisme. Lutili-sation dune nergie trop forte risque de lser le myocarde. linverse, une nergie trop faible peut tre inefficace.LAmerican Heart Association recommande de commen-cer par un choc lectrique externe de 200 J. En cas dchec,on refait un deuxime choc lectrique externe de 200 J puison augmente lintensit 300 J puis 360 J. En cas de rci-dive de la fibrillation ventriculaire, on utilise une nergiegale celle qui avait prcdemment permis la dfibrilla-tion. La technique du choc lectrique externe doit trerigoureuse pour tre efficace. Les lectrodes (qui doiventtre largement enduites de gel conducteur) sont places ensous-claviculaire droit et sous-axillaire gauche, permettantde prendre le cur dans son grand axe. Le choc doit tredlivr en fin dexpiration o le cur est le plus proche dela paroi thoracique. Lutilisation de dfibrillateur externeautomatique ou semi-automatique permet dadministrer cetraitement de faon prcoce par un personnel non mdicalmais entran.

    2. Ventilation artificielleDs que possible, une intubation endotrachale doit treralise.Elle permet : une ventilation artificielle en oxygne pur,ladministration de la premire dose dadrnaline en lab-sence dune voie veineuse et dassurer une protection desvoies ariennes contre une inhalation du liquide gastrique.

    3. Voie dabord et soluts de perfusionLobjectif dans le choix dune voie dabord est la rapiditet la scurit de sa mise en place. Il existe en fait plusieursvoies possibles : la voie veineuse priphrique ou centrale (jugulaireinterne, sous-clavire, fmorale) : lavantage de la voie vei-neuse priphrique par rapport la voie centrale est dtrerapide, facile mettre en place sans complication grave, etde permettre de hauts dbits de perfusion sur des cathterscourts et de gros calibre ; la voie endotrachale est intressante considrer lorsquelabord veineux est impossible obtenir rapidement. Ellepermet dinjecter la premire dose dadrnaline (qui sera5 fois suprieure la dose ncessaire pour linjection intra-veineuse) ; la voie intra-osseuse reprsente une solution possible sur-tout chez lenfant. Elle a lavantage de pouvoir servir devoie de perfusion et de ne pas ncessiter daugmentationdes doses dadrnaline par rapport la voie veineuse. Letrocart est introduit dans la mdullaire osseuse de lextr-mit suprieure du tibia ; la voie intracardiaque est abandonne car trop difficileet dangereuse.Le meilleur solut de perfusion actuel pour lentretien delabord vasculaire est le solut sal isotonique. En effet,lapport glucidique est dconseill : il a t dmontr quilaggravait le pronostic neurologique (peut-tre en rapportavec une accentuation de la glycolyse anarobie augmen-tant la concentration intracellulaire en lactates). Il est sou-haitable de ne pas utiliser dexpansion volmique syst-matique pour tout arrt circulatoire en dehors de ladissociation lectromcanique. Le volume de perfusion nedoit pas dpasser 200 300 mL.

    4. Traitements mdicamenteux Ladrnaline est une hormone surrnale agissant sur lesrcepteurs a 1, a 2 et b . Elle est actuellement reconnuecomme le mdicament essentiel de la ranimation cardio-pulmonaire. Elle permet par ses effets vasoconstricteurs etsympathomimtiques damliorer lefficacit du massagecardiaque externe en augmentant la pression de perfusioncoronaire et le dbit sanguin crbral. La dose idale injecter est encore un sujet de controverse. Classiquement,il est recommand dutiliser des injections unitaires de 1mg rptes toutes les 3 minutes. En cas dchec, des dosesplus importantes peuvent tre utilises. Pour certains, cesdoses atteignent 0,1 mg/kg. Ladrnaline prsente parailleurs lavantage de pouvoir tre utilise par voie endo-trachale avec la mme rapidit daction que la voie intra-veineuse. Les doses doivent par contre tre plus impor-

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    A R R T C I R C U L A T O I R E

    tantes et dilues dans du srum physiologique (5 mg dans10 mL de srum physiologique quivalent 1 mg intra-veineux). les agents alcalinisants : larrt cardiorespiratoire est res-ponsable dune acidose mixte : mtabolique par ischmietissulaire et production dacide lactique, respiratoire parhypercapnie, larrt cardiorespiratoire empchant llimi-nation du CO2 produit.Le mcanisme le plus important pour la correction de cetteacidose est lpuration du CO2 en excs par la ventilationet le massage cardiaque externe. Le tamponnement de laci-dose mtabolique par les bicarbonates augmente la pro-duction de CO2. Lutilisation des bicarbonates reste donctrs contestable. Cependant, elle reste indique endeuxime intention lorsque larrt cardiorespiratoire seprennise (plus de 10 min) ou immdiatement quant il y aune acidose mtabolique prexistante ou une intoxicationpar des antidpresseurs tricycliques. Les doses de bicar-bonates de sodium molaire 84 selon lAmerican HeartAssociations ont de 1 mmol/kg puis 0,5 mmol/kg toutes les10 min. Le chlorure de calcium : les seules indications du cal-cium sont : lhyperkalimie, lhypocalcmie et lintoxica-tion aux inhibiteurs calciques. La dose recommande estde 1 g (10 mL) de chlorure de calcium en injection intra-veineuse lente. Latropine peut tre utilise en cas dasystolie ou de bra-dycardie importante mais son efficacit nest pas dmon-tre. Elle est administre la dose de 1 mg renouvelertoutes les 5 min. Les antiarythmiques : la lidocane (Xylocane) est lemdicament le plus employ en cas de fibrillation ventri-culaire rcidivante ou en cas dchec de la dfibrillation.Les recommandations de lAmerican Heart Associationsont de 1 mg/kg en injection unitaire avec une solution 2 % pouvant tre rpte la dose de 0,5 mg/kg toutes les10 min sans dpasser 3 mg/kg en tout.

    5. Entranement lectrosystoliqueLentranement lectrosystolique externe ou interne na pasdmontr son efficacit dans larrt cardiaque.

    Surveillance de la ranimation cardiopulmonaire

    Une surveillance crite, comprenant les horaires de tousles vnements et de tous les mdicaments administrs, estessentielle au bon droulement de la ranimation cardio-pulmonaire.

    1. Examen cliniqueLa palpation dun pouls priphrique, la reprise dune ven-tilation et lvolution de ltat neurologique sont des para-mtres peu sensibles. La prsence dune mydriase bilat-rale aractive au dcours immdiat de la ranimationcardiopulmonaire na pas forcment un pronostic sombre,dautant que le malade a reu de ladrnaline.

    2. Examens complmentaires non invasifsLa surveillance du trac de llectrocardiogramme gardeune importance vidente. Loxymtrie de pouls est inin-terprtable au cours de la ranimation cardiopulmonaire,en labsence donde de pouls pulse.Par contre, la capnomtrie semble tre une technique simpleet facilement accessible pour juger de lefficacit du mas-sage cardiaque externe.

    Principe de la capnomtrieIl existe au cours dun arrt cardiorespiratoire, une accumulation deCO2 dans les tissus et dans le secteur veineux. Le CO2 est brutale-ment relargu lors de la reprise dune activit cardiaque spontane.LETCO2 (end-tidal CO2) correspond la concentration en CO2 enfin dexpiration. Cest un reflet direct de la concentration alvolaireen CO2. La mesure de la pression partielle en CO2 dans lair expir(PET CO2) permet de juger de lefficacit du massage cardiaqueexterne. Ds la reprise dune activit circulatoire efficace, on observeune augmentation rapide de la PET CO2. Il est actuellement admis quelorsquelle est infrieure 10 mmHg de faon constante pendant laranimation cardiopulmonaire, il ny a pas de possibilit de rcup-ration. Il faut noter cependant que linterprtation de la PET CO2 nestplus aussi fiable en cas dadministration de bicarbonates.

    3. Examen complmentaire invasifLa pression de perfusion myocardique nest gnralementpas accessible (sauf chez un malade hospitalis en milieuspcialis et dj surveill par une technique invasive). Lapression artrielle diastolique priphrique en reprsenteune mesure approche.

    Complicationsde la ranimation cardiopulmonaireEl