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La sapinière de Sainte-Croix-Volvestre Regards sur site par le Conseil scientifique du Parc naturel régional des Pyrénées Ariégeoises La sapinière de Sainte-Croix-Volvestre Regards sur site Le bulletin du Conseil scientifique du PNR Automne 2013 Une forêt royale Au XIIIe siècle, la forêt appartient au monastère féminin de Sainte-Croix, affilié à l’ordre de Fontevrault. A la Révolution, les 174 ha du massif deviennent bien national. Le nom de « forêt royale » date de la Restauration (1814-1830). En 1856, sous le Second Empire, la forêt est vendue en totalité à des particuliers. Mais les habitants de la commune y conservent des droits d’usage importants. Pour les limiter, les nouveaux propriétaires choisissent de « cantonner » ces droits d’usage : ils donnent une partie de la forêt à la commune (98 ha, dont 17 ha de pâtures) contre l’abandon des droits sur le restant de la forêt privée. Finalement, la commune revend cette forêt à l’État en 1970, pour la somme de 960 000 francs. Elle devient la forêt domaniale actuelle. Acquisitions et échanges récents ont porté sa surface à près de 104 ha, incluant 40 ha de sapinière emblématique. PV, JPM Champignons : plus de 900 espèces différentes ! Sous le couvert des arbres, des foules de champignons aux formes multiples colonisent le sol de leurs tons pastel, qui réjouissent tout promeneur par leur variété. Extraordinaire, car implantée à basse altitude, la sapi- nière de Sainte-Croix-Volvestre l’est également par la présence de nombreuses espèces de champignons. Plus de 900 espèces y sont recensées, un chiffre énorme pour une forêt somme toute d’une surface ré- duite : à peine plus d’un kilomètre carré pour la partie domaniale, la zone nettement la plus riche en cham- pignons. Si le grand public traque surtout quelques espèces comestibles, le mycologue (spécialiste des champignons) retient avant tout leur prodigieuse diversité. Qui plus est, tout le cortège fongique de la sapinière de montagne est présent, avec beaucoup d’espèces rares. Lorsque le sapin a recolonisé les Pyrénées, après la dernière glaciation, il est fort proba- ble que les champignons présents à Sainte- Croix-Volvestre l’aient accompagné dans son ascension de la montagne pyrénéenne, ren- dant plus facile sa reconquête par la capacité des champignons à vivre en symbiose avec les arbres, en les aidant à pousser en quelque sorte. Tout cela concourt à donner à cette sapinière une importance européenne, sinon mondiale. Il est à parier que de nombreuses espèces de champignons seront encore découvertes dans les années à venir. NM Une mer, des fleuves, des deltas… La genèse de l’actuelle chaîne pyrénéenne a débuté il y a plus de 250 millions d’années avec l’ouverture de l’Atlantique. Cet événement pro- voque la dérive de la plaque ibérique, qui va heurter la plaque euro- péenne. Un grand sillon est-ouest se forme au sein d’un continent issu d’une ancienne chaîne de montagnes fortement arasée, c’est le sillon nord-pyrénéen. Il est envahi par la mer ; son évolution donnera plus tard le golfe de l’Adour. L’érosion du continent resté émergé au sud va l’alimenter en apports terrigènes importants. Lors des pério- des calmes, les conditions marines sont propices à la formation de dépôts calcaires de grande ampleur. A partir de 100 millions d’années, les mouvements des plaques s’accélèrent, le milieu devient très ins- table. Au pied des reliefs, de grands bassins se constituent avec des sédiments rythmiques essentiellement détritiques, parfois plus calca- reux : c’est le flysch, ici très abondant, dont l’histoire se poursuivra sur plusieurs millions d’années. Au niveau de Sainte-Croix, les fleuves issus du continent émergé développent des deltas immenses du type Mississippi. Dans les chenaux, la sédimentation détritique est constituée de galets et graviers qui se transformeront en poudingues. Latéralement, la sédimentation est nettement plus sableu- se. Ces sables peu transformés et très riches en quartz feront par la suite la joie des verriers. Quelques petits îlots préservés verront proliférer des marécages avec des dépôts de décantation de nature nettement plus argileuse. De temps en temps, la mer fait des incursions et les calcaires refont leur apparition. Le fonctionnement de ces paléo-deltas est ici gravé dans la roche. C’est une page de l’his- toire des Pyrénées qui est inscrite dans le sous-sol de la forêt de Sainte-Croix, dont la nature fortement siliceuse permettra l’implantation d’une sapinière. AM

La sapinière de Sainte-Croix-Volvestre...Une gestion multifonctionnelle de la sapinière La forêt domaniale de Sainte-Croix-Volvestre est gérée par l’Office national des Forêts

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Page 1: La sapinière de Sainte-Croix-Volvestre...Une gestion multifonctionnelle de la sapinière La forêt domaniale de Sainte-Croix-Volvestre est gérée par l’Office national des Forêts

La sapinière de Sainte-Croix-Volvestre Regards sur site par le Conseil scientif ique du Parc naturel régional des Pyrénées Ariégeoises

La sapinière deSainte-Croix-Volvestre

Regards sur site

Le bulletin du Conseil scientif ique du PNR

Automne 2013

Une forêt royaleAu XIIIe siècle, la forêt appartient au monastère féminin de Sainte-Croix, affilié à l’ordre de Fontevrault. A la Révolution, les 174 ha du massif deviennent bien national. Le nom de « forêt royale » date de la Restauration (1814-1830). En 1856, sous le Second Empire, la forêt est vendue en totalité à des particuliers. Mais les habitants de la commune y conservent des droits d’usage importants. Pour les limiter, les nouveaux propriétaires choisissent de « cantonner » ces droits d’usage : ils donnent une partie de la forêt à la commune (98 ha, dont 17 ha de pâtures) contre l’abandon des droits sur le restant de la forêt privée. Finalement, la commune revend cette forêt à l’État en 1970, pour la somme de 960 000 francs. Elle devient la forêt domaniale actuelle. Acquisitions et échanges récents ont porté sa surface à près de 104 ha, incluant 40 ha de sapinière emblématique. PV, JPM

Champignons : plus de 900 espèces différentes !Sous le couvert des arbres, des foules de champignons aux formes multiples colonisent le sol de leurs tons pastel, qui réjouissent tout promeneur par leur variété.

Extraordinaire, car implantée à basse altitude, la sapi-nière de Sainte-Croix-Volvestre l’est également par la présence de nombreuses espèces de champignons. Plus de 900 espèces y sont recensées, un chiffre énorme pour une forêt somme toute d’une surface ré-duite : à peine plus d’un kilomètre carré pour la partie domaniale, la zone nettement la plus riche en cham-pignons. Si le grand public traque surtout quelques espèces comestibles, le mycologue (spécialiste des

champignons) retient avant tout leur prodigieuse diversité. Qui plus est, tout le cortège fongique de la sapinière de montagne

est présent, avec beaucoup d’espèces rares. Lorsque le sapin a recolonisé les Pyrénées, après la dernière glaciation, il est fort proba-ble que les champignons présents à Sainte-Croix-Volvestre l’aient accompagné dans son ascension de la montagne pyrénéenne, ren-dant plus facile sa reconquête par la capacité des champignons à vivre en symbiose avec les arbres, en les aidant à pousser en quelque sorte. Tout cela concourt à donner à cette sapinière une importance européenne, sinon mondiale. Il est à parier que de nombreuses espèces de champignons seront encore découvertes dans les années à venir. NM

Une mer, des fleuves, des deltas…La genèse de l’actuelle chaîne pyrénéenne a débuté il y a plus de 250 millions d’années avec l’ouverture de l’Atlantique. Cet événement pro-voque la dérive de la plaque ibérique, qui va heurter la plaque euro-péenne. Un grand sillon est-ouest se forme au sein d’un continent issu d’une ancienne chaîne de montagnes fortement arasée, c’est le sillon nord-pyrénéen. Il est envahi par la mer ; son évolution donnera plus tard le golfe de l’Adour. L’érosion du continent resté émergé au sud va l’alimenter en apports terrigènes importants. Lors des pério-des calmes, les conditions marines sont propices à la formation de dépôts calcaires de grande ampleur. A partir de 100 millions d’années, les mouvements des plaques s’accélèrent, le milieu devient très ins-table. Au pied des reliefs, de grands bassins se constituent avec des sédiments rythmiques essentiellement détritiques, parfois plus calca-reux : c’est le flysch, ici très abondant, dont l’histoire se poursuivra sur plusieurs millions d’années.Au niveau de Sainte-Croix, les fleuves issus du continent émergé

développent des deltas immenses du type Mississippi. Dans les chenaux, la sédimentation détritique est constituée de galets et graviers qui se transformeront en poudingues. Latéralement, la sédimentation est nettement plus sableu-se. Ces sables peu transformés et très riches en quartz feront par la suite la joie des verriers. Quelques petits îlots préservés verront proliférer des marécages avec des dépôts de décantation de nature nettement plus argileuse. De temps en temps, la mer fait des incursions et les calcaires refont leur apparition. Le fonctionnement de ces paléo-deltas est ici gravé dans la roche. C’est une page de l’his-toire des Pyrénées qui est inscrite dans le sous-sol de la forêt de Sainte-Croix, dont la nature fortement siliceuse permettra l’implantation d’une sapinière. AM

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Le Sapin des Pyrénées, une longue reconquête après la dernière glaciation

Des analyses génétiques récentes ont révélé que les sapinières pyrénéennes s’organisent en deux grandes familles : l’une située à l’ouest, l’autre à l’est de la vallée de Luchon (Pyrénées centrales). La cause la plus probable de cette structuration est liée à la dernière glaciation, qui a eu lieu entre -100 000 et -10 000 ans. Pendant cette période glaciaire, les espèces soumises à un froid trop important pour elles ont dû migrer vers les plaines et/ou se déplacer vers le sud. Pour le sapin, il y a vraisemblablement eu deux refuges distincts au cours de cette période. Isolés l’un de l’autre, chaque refuge a évolué de manière indépendante, devenant sensi-blement différent. Une fois la glaciation terminée, le sapin a pu recoloniser les hauteurs pyrénéennes à partir de ces deux noyaux de population. Les peuplements actuels, qui forment aujourd’hui un ensemble continu, gardent dans leur génome la trace de leur origine distincte.

Au sein de cette histoire évolutive, les sapins du Volvestre appartiennent clairement au groupe oriental, allant de la mer Méditerranée à la vallée de Luchon. BF, BM

Les gourmands, assurance-vie du sapin !

Les sapins de Sainte-Croix présentent depuis plusieurs an-nées des signes de faiblesse : perte d’aiguilles, branches mor-tes, gui... Mais en regardant attentivement les arbres, on y trouve aussi des signes de vitalité : les gourmands. Issus de bourgeons restés longtemps en latence, les gourmands n’ap-paraissent qu’en cas de besoin, quand l’arbre doit recréer de la surface foliaire. Ils peuvent alors reformer la cime cassée des jeunes sapins ou remplacer les rameaux morts après un stress. Ils parviennent même parfois à développer un deuxiè-me houppier sous le feuillage d’origine. Vous rencontrerez aisément toutes ces situations à Sainte-Croix.Ainsi, si les sapins de Sainte-Croix sont marqués par les épisodes climatiques passés (sécheresse, canicule), ils ne sont pas pour autant en train de mourir : ils réagissent pour se refaire une santé. CD

Les recherches paléo-environnementales récentes (études des pollens et charbons fossiles) ont permis d’aller plus loin. On sait maintenant que le sapin est probablement présent dans les pré-Pyrénées en peuplements étendus dès 4000 ans avant J.C., com-me en atteste le schéma ci-contre :

La science en marcheUne sapinière à 350 mètres d’altitude… Cela intrigue les forestiers depuis longtemps ! Les sapinières sont généralement installées en montagne. Celle de Sainte-Croix-Volvestre est située dans le piémont, à basse altitude. Est-elle naturelle ou a-t-elle été plantée ?Depuis quelques années, les sapins de la forêt royale montrent des signes de dépérissement. Faut-il s’inquiéter ?Une étude impliquant plusieurs organismes de recherche a été réalisée pendant trois ans sur le Volvestre et l’ensemble du massif pyrénéen. Elle a permis d’apporter des réponses nouvelles à ces questions, présentées ici. PG

Localisation des forêts comportant du sapindans les Pyrénées (source : IFN)

La myrtille, comme en montagne ?Le peuplement de sapin pectiné à Sainte-Croix-Volvestre marque le promeneur et intrigue le naturaliste. Si l’on s’intéresse de plus près à sa végétation, peut-il nous surprendre un peu plus ? Oui et non. Non, parce que les communautés végétales arborescentes, ar-bustives et herbacées de la forêt sont tout à fait comparables à celles qu’on peut trouver en d’autres endroits du piémont nord-pyrénéen, dans des situations écologiques compa-rables : sols à tendance acide, climat général sous net-te influence océanique et climat local (lié à la topogra-phie) frais. Les tapis de myrtilles observés sur les sols les plus acides de la forêt répondent précisément à ces deux derniers facteurs combinés d’humidité et de fraîcheur. Oui, car étant donnée l’origine naturelle des sapins, on aurait pu attendre la présence relictuelle d’autres plantes à réparti-tion essentiellement montagnarde. Peut-être l’étude des mousses pourrait-elle contredire cet-te apparence ? GC

L’origine de la sapinière Les sources historiques les plus anciennes datent du Moyen-âge. Elles attestent de la donation de la forêt au prieuré de Sainte-Croix en 1263, mais aucune information n’y est donnée sur la présence de sapin. Il faut attendre le XVIIe siècle, et la mise en route par Colbert de la « Réformation des Forêts » (inventaire des forêts du Roi et des forêts seigneuriales), pour qu’une visite et un arpentage soient réalisés. On apprend alors qu’il y a 85 ha de sapins, jeunes, mais dynamiques et de belle venue. Cette vitalité plaide en faveur d’une origine naturelle du sapin, mais aucune archive historique ne permet de le confirmer.

1 Entre 3000-3150 av. JC et 2100-2250 av. JC, la forêt est consti-tuée de sapins, chênes, tilleuls et noisetiers, caractéristiques d’un climat relativement sec. Le hêtre est quasiment absent. La faible proportion de plantes herbacées montre que le paysage est très forestier, mais il y a déjà des indices nombreux d’activités pasto-rales et agricoles. 2 Pendant une deuxième période allant de 2100-2250 av. JC jusqu’au 1er siècle av. JC (âges de Bronze et du Fer), le climat s’hu-midifie, le hêtre se développe ainsi que l’aulne ; le sapin se main-tient. On note des indices agro-pastoraux malgré l’ambiance très forestière.

3 Durant l’Antiquité gallo-romaine (probablement les trois pre-miers siècles de notre ère), on discerne une première phase de dé-boisement : la courbe du hêtre fléchit, le sapin diminue également et les indices d’agro-pastoralisme deviennent abondants.

4 Après une courte période de rétraction des activités humaines, qui doit correspondre à la crise de la fin de l’Antiquité, le Moyen-Âge, probablement à partir du Xe siècle, est marqué par une dé-forestation généralisée (le sapin disparaît presque) et l’expansion des marqueurs de l’agriculture et du pastoralisme : herbacées, cé-réales, plantes nitrophiles.

La sapinière de Sainte-Croix-Volvestre

En fait, le sapin de Sainte-Croix a connu la même histoire que dans toute la moi-tié est des Pyrénées : répandu autrefois partout, il a reculé à partir de la colonisa-tion agro-pastorale de la montagne. Le hêtre et le chêne l’ont progressivement remplacé, en particulier au Moyen-Âge. Il n’a survécu en certains lieux que dans la mesure où des protections ont été mises en place. La sapinière de Sainte-Croix-Volvestre n’est pas une anomalie ou une plan-tation, mais un isolat, témoin d’une répartition ancienne beaucoup plus ample. JPM

Résultats des analyses génétiques réalisées sur 45 peuplements de sapins pyrénéens : il existe une diversité génétique marquée entre les peuplements rouge et vert situés de part et d’autre de la vallée de Luchon (peuplements intermédiaires en noir).

Dryopteris affinis : une fougère qui, comme la myrtille, se trouve en montagne et dans les plaines sous climat très atlantique

Le sapin se maintient dans la forêt de Sainte-Croix, forêt seigneuriale où il est certainement protégé par des règlements et des gardes forestiers (la première mention d’un garde date de 1331). Jusqu’à la Révolution, il est protégé dans la partie de la forêt qui appartient au prieuré, puis dans la forêt domaniale qui lui fait suite.

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Une gestion multifonctionnelle de la sapinièreLa forêt domaniale de Sainte-Croix-Volvestre est gérée par l’Office national des Forêts (ONF) avec un triple objectif : la production de bois de qualité, l’ac-cueil du public et la préservation de la biodiversité. La sapinière est traitée en futaie irrégulière : les arbres coupés à maturité le sont de manière diffuse, les jeunes sapins prenant régulièrement la place des vieux. Le forestier ne plante pas les sapins, mais favo-rise leur régénération naturelle, par le biais des graines produites par les arbres adultes du peuplement. Gérée de cette façon, la sapinière a un aspect naturel, avec un mélange d’arbres de toutes tailles, intimement mêlés. Le sapin pectiné produit un bois aux très bonnes propriétés mécaniques, léger, très utilisé pour réaliser des charpentes. Les arbres sont considérés comme mûrs pour la récolte à partir d’un diamètre de 50 cm. Une zone de 4 ha au cœur de la forêt a été classée en « îlot de vieillissement ». Dans cet îlot, l’aménage-ment (ou plan de gestion) ne prévoit aucune coupe pendant 20 ans (2012-2031). Les arbres mortssont délibérément laissés sur pied ou au sol pour être progressivement dégradés par les insectes,champignons et bactéries saproxyliques (spécialisés dans la consommation du bois mort).Un sentier a été aménagé autour de cette zone cœur, pour découvrir les richesses dela forêt domaniale. Un guide d’exploration est disponible à l’Office de Tourisme. PV

Du XVIe à la fin du XIXe siècle, quelques familles de verriers sont venues exercer leur art dans la région. Elles trou-vaient là les principaux ingrédients pour fabriquer le verre : sable, chaux, potasse et combustible fourni par la forêt. Les éléments étaient fondus dans de précaires fours à bois. On y fabriquait de nombreux objets utilitaires, flacons, bouteilles et verres. La technique utilisée était celle du verre soufflé, qui nécessitait des années d’apprentissage. Ce sont les paysans de la région qui se chargeaient de vendre ces objets, tout le long de la Garonne, de Toulouse à Bordeaux.Le verre est composé à 70 % environ de silice, de 15 à 20% de potasse et de 10 à 15% de chaux. La silice provenait des sables compactés dans les blocs de grès, la chaux des roches calcaires, et la potasse de la fougère, qui poussait déjà en

abondance. Le bois constituait le combustible, mais les besoins étant énormes, son exploitation pouvait poser problème. En 1667, un ins-pecteur des forêts interdit d’ailleurs d’installer des verreries dans la forêt des évêques du Couserans, toute proche.

L’activité des verreries était saisonnière et, du fait des besoins en matières premières, souvent itinérante. De ces installations temporaires, il ne reste que peu de vestiges. Mais autour du maître verrier gravitait tout un petit monde assurant les différentes étapes de la fabrication et nourris-sant inlassablement les fours. Le privilège d’exercer le métier de verrier avait été accordé par Saint Louis à des gentilshom-mes qui l’avaient accompagné dans les croisa-des (1248 et 1270). Ils en avaient le monopole absolu. Ces gentilshommes verriers se sont installés dans la région de Sainte-Croix vers le milieu du XVIe siècle. Très tôt, ils adhérè-rent au protestantisme. Après la révocation de l’Edit de Nantes, ils durent pratiquer leur culte clandestinement. En 1745, certains furent envoyés aux galères à la suite d’as-semblées ayant eu lieu dans les bois de Sainte-Croix et de Fabas. CM, CP

Parc naturel régional des Pyrénées AriégeoisesPôle d’activités La Ferme d’Icart - 09240 Montels

Tél. : 05 61 02 71 69 - Fax : 05 61 02 80 23info@parc-pyrenees-ariegeoises.frwww.parc-pyrenees-ariegeoises.fr

Auteurs : Gilles CORRIOL (CBNPMP),Nicolas DE MUNNIK, Christophe DRENOU,

Bruno FADY, Pierre GONIN,Alain MANGIN, Jean-Paul METAILIE,

Christiane MIRAMONT, Brigitte MUSCH,Claude PRUDENT, Patrick VALETTE.

Illustrations : Enrico CANGINI,GEODE, IFN, INRA.

Crédits photos :Florence MARTINEAU,Christophe DRENOU,

Gilles CORRIOL.

La sapinière de Sainte-Croix-Volvestre

Thermes, moulins, foulonsLe ruisseau de la Sabine traverse la forêt royale. Il rejoint le Volp au sud de Sainte-Croix-Volvestre. Le long de ce der-nier, de nombreux moulins à farine étaient installés pour nourrir la population locale, plus importante au XIXe siècle qu’aujourd’hui (1612 habitants en 1872, 658 en 2009). En 1830, 35 moulins tournaient au fil de l’eau. Il y avait égale-ment des foulons, qui servaient à battre les draps de laine tissés, dans l’eau et l’argile, pour les assouplir et les dégraisser. Certaines de ces étoffes étaient ensuite expédiées vers les foires de Toulouse ou Bordeaux, par la Garonne. Plus tard, des moulins à scie furent construits pour faciliter l’exploitation et le sciage des arbres. A proximité de Sainte-Croix, un établissement thermal a même fonctionné à Bédeille jusque vers 1970. CM, CP