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LEXIQUE DE LA SEPARATION DES POUVOIRS 1 – NATURE DE LA SEPARATION. Selon les époques et les pays, la théorie de la séparation des pouvoirs a été comprise différemment. On peut l’interpréter comme une séparation stricte ou rigide des pouvoirs, c’est-à-dire un système dans lequel le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif sont très cloisonnés. A partir de cette idée, certains auteurs ont conçu un modèle théorique qui est celui du régime présidentiel. On peut aussi interpréter la théorie comme une séparation souple des pouvoirs, c’est-à- dire une collaboration entre le pouvoir exécutif et le législatif. Ce schéma correspond davantage au modèle historique du régime parlementaire. 2 – STRUCTURE DE L’EXECUTIF. Dans la séparation stricte des pouvoirs (régime présidentiel), il n’y a pas de Premier ministre. Le Chef de l’Etat est en même temps le chef de l’équipe gouvernementale (Etats-Unis). Dans la séparation souple des pouvoirs (régime parlementaire), le pouvoir exécutif présente un double caractère : - Il est marqué par le dualisme. Un exécutif dualiste comporte un chef d’Etat (que ce soit un monarque ou un président) et un gouvernement (organe collégial, sans leader). - Il peut se compliquer de bicéphalisme. Le terme « bicéphalisme » désigne une organisation « à deux têtes ». Autrement dit, l’exécutif sera composé de deux autorités individuelles : le chef de l’Etat d’un côté, le chef du gouvernement de l’autre. Bien que le bicéphalisme ne soit pas indispensable dans un régime parlementaire, il est devenu systématique à l’époque moderne. Pour des raisons d’efficacité, on ne trouve plus de gouvernement qui n’ait pas de Premier ministre.

La séparation des pouvoirs

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Page 1: La séparation des pouvoirs

LEXIQUE DE LA SEPARATION DES POUVOIRS

 1 – NATURE DE LA SEPARATION. Selon les époques et les pays, la théorie de la séparation des pouvoirs a été comprise différemment. On peut l’interpréter comme une séparation stricte ou rigide des pouvoirs, c’est-à-dire un système dans lequel le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif sont très cloisonnés. A partir de cette idée, certains auteurs ont conçu un modèle théorique qui est celui du régime présidentiel. On peut aussi interpréter la théorie comme une séparation souple des pouvoirs, c’est-à-dire une collaboration entre le pouvoir exécutif et le législatif. Ce schéma correspond davantage au modèle historique du régime parlementaire.

 2 – STRUCTURE DE L’EXECUTIF. Dans la séparation stricte des pouvoirs (régime présidentiel), il n’y a pas de Premier ministre. Le Chef de l’Etat est en même temps le chef de l’équipe gouvernementale (Etats-Unis). Dans la séparation souple des pouvoirs (régime parlementaire), le pouvoir exécutif présente un double caractère :

 -  Il est marqué par le dualisme. Un exécutif dualiste comporte un chef d’Etat (que ce soit un monarque ou un président) et un gouvernement (organe collégial, sans leader).

-  Il peut se compliquer de bicéphalisme. Le terme « bicéphalisme » désigne une organisation « à deux têtes ». Autrement dit, l’exécutif sera composé de deux autorités individuelles : le chef de l’Etat d’un côté, le chef du gouvernement de l’autre. Bien que le bicéphalisme ne soit pas indispensable dans un régime parlementaire, il est devenu systématique à l’époque moderne. Pour des raisons d’efficacité, on ne trouve plus de gouvernement qui n’ait pas de Premier ministre.

 3 – LEGITIMITE DE L’EXECUTIF. La question de la légitimité renvoie ici à la source de l’autorité politique que détient le titulaire de l’exécutif.

 Dans la séparation stricte des pouvoirs (régime présidentiel), la situation est simple. Le président qui est à la fois le chef de l’Etat et le chef de l’équipe gouvernementale est élu au suffrage universel. Sa légitimité est populaire. Le gouvernement ne dépend que de lui et n’a pas besoin de la confiance du parlement.

 Dans la séparation souple des pouvoirs (régime parlementaire), c’est plus compliqué. Le chef de l’Etat n’a pas de problème de légitimité soit parce qu’il est un monarque héréditaire, soit parce qu’il est élu (en général par le parlement). On sait d’où il tire sa légitimité : de son ascendance dynastique ou des urnes. Une difficulté survient, en revanche, à propos du gouvernement qui n’est pas élu et ne répond à aucune logique dynastique. Deux solutions sont envisageables : le monisme ou le dualisme.

 -       Le monisme signifie que le gouvernement tire sa légitimité de sa désignation par un seul organe. Soit il reçoit sa légitimité du pouvoir législatif (monisme parlementaire au sens strict), soit il la reçoit du chef de l’Etat (monisme inversé).

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Selon les régimes, il aura besoin de la confiance de l’un ou de l’autre. Dans un régime parlementaire classique, le monisme signifie normalement que le gouvernement s’appuie sur le pouvoir législatif seul (le monisme inversé est aujourd’hui considéré comme une déviation du régime parlementaire).

-       Le dualisme signifie que pour être légitime, c’est-à-dire pour pouvoir entrer en fonctions, le gouvernement doit être désigné par les deux organes à la fois. Il lui faudra avoir la confiance du chef de l’Etat et celle du parlement. Ce dualisme est souvent qualifié d’orléaniste, car il s’est développé en France à partir de 1830 sous le règne de Louis-Philippe, héritier de la famille d’Orléans.

  CRITERES THEORIQUES DU REGIME PRESIDENTIEL

 1 - L’INDEPENDANCE ORGANIQUE. L’indépendance organique signifie que chacun des organes ne peut avoir d’influence sur la désignation ou sur l’existence de l’autre.

 a) Un recrutement séparé. Le but est d’assurer aux organes de pouvoir (exécutif et législatif) une indépendance réciproque. Il faut éviter que l’un des organes puisse avoir une influence sur le recrutement de l’autre. Pour atteindre ce but, la solution la plus simple consiste à faire élire de manière identique tous les organes. L’exécutif et le législatif vont émaner du suffrage universel. Aucun des deux ne peut influer sur le recrutement de l’autre.

b) Une immunité politique réciproque. On va chercher à éviter qu’un organe puisse porter atteinte à l’existence de l’autre. Pour cela, il faut que ni l’exécutif ni le législatif ne puisse mettre fin politiquement à l’existence de l’autre. En régime présidentiel, sont donc prohibés les deux rapports organiques types : le droit de dissolution qui permet au pouvoir exécutif de porter atteinte au pouvoir législatif en provoquant des élections parlementaires anticipées et en renvoyant les représentants devant leurs électeurs ; la mise en jeu de la responsabilité politique du gouvernement qui permet au pouvoir législatif de destituer le gouvernement en le forçant à démissionner.

 2 - LA SPECIALISATION FONCTIONNELLE. Elle implique que chacun des organes est étroitement spécialisé dans la fonction que lui attribue la constitution. On interdit ainsi tout rapport fonctionnel, c’est-à-dire tout rapport permettant à un organe chargé d’une fonction donnée d’intervenir dans l’exercice d’une fonction réservée à un autre organe. Chacun est compétent pour accomplir une fonction déterminée et il n’est pas autorisé à s’immiscer dans la fonction de l’autre. Le pouvoir législatif est compétent pour légiférer et seulement pour légiférer. Le pouvoir exécutif est compétent pour exécuter les lois et seulement pour cela. L’exécutif détient le monopole de la fonction exécutive. Le législatif celui de la fonction législative.

 

CRITERES THEORIQUES DU REGIME PARLEMENTAIRE

Page 3: La séparation des pouvoirs

1 – LA STRUCTURE DES POUVOIRS. L’exécutif est dualiste et bicéphale. Il est dualiste, parce qu’il se décompose en deux éléments, le chef de l’Etat et le gouvernement. Il est presque toujours bicéphale, parce qu’il y a un chef du gouvernement qui est qualifié différemment selon les lieux et les époques : président du Conseil sous les IIIème et IVème Républiques françaises ou en Italie, président du gouvernement en Espagne, Chancelier en Allemagne, Premier ministre en Grande-Bretagne et en France aujourd’hui.

Quant au Parlement, il est souvent composé de deux chambres (bicamérisme). L’une des chambres est, en principe issue du suffrage universel et représente l’ensemble du peuple (Chambre des Communes en Grande-Bretagne). L’autre peut avoir une fonction variable : elle peut être chargée de représenter les Etats fédérés dans un système fédéral (Allemagne) ou les régions dans un Etat fortement décentralisé (Espagne, Italie). Elle peut aussi être une chambre issue de la tradition aristocratique (Chambre des Lords en Grande-Bretagne).

 2 - L’EQUILIBRE ORGANIQUE. Il ne s’agit plus de cloisonner l’exécutif et le législatif, mais, au contraire, d’établir un système de relations entre eux. Ils demeurent distincts, séparés, mais ils doivent aller ensemble au lieu d’aller isolément.

 a) La légitimation parlementaire du gouvernement. En régime parlementaire, le chef de l’Etat peut être héréditaire, lorsque le régime parlementaire s’est implanté dans le cadre monarchique (GB, Belgique, Hollande, pays scandinaves, Espagne). Il peut aussi être un président de la République généralement élu par le parlement (Allemagne, Italie). Sur un plan strictement juridique, le gouvernement est nommé par un décret du Chef de l’Etat. Mais, sur un plan politique, le Chef de l’Etat sera dans l’obligation de choisir les ministres dans les rangs de la majorité parlementaire. Il devra même, la plupart du temps, choisir comme Premier ministre, le leader du parti qui a gagné les élections législatives (procédure de l’investiture parlementaire).

 b) Les interactions organiques. Chacun des pouvoirs détient le moyen de mettre fin à l’existence de l’autre. D’une part, le législatif peut renverser le gouvernement (mise en jeu de la responsabilité politique). D’autre part, l’exécutif peut dissoudre le législatif (droit de dissolution) : il peut provoquer des élections anticipées et renvoyer les représentants devant leurs électeurs. Ceci répond au principe d’équilibre entre les deux pouvoirs. En bonne logique, l’exécutif ne doit pouvoir dissoudre que celle des deux chambres qui peut le renverser, c’est-à-dire la chambre basse.

 3 - LA COLLABORATION FONCTIONNELLE. Les deux organes, exécutif et législatif, doivent collaborer entre eux pour exercer les principales fonctions de l’Etat. Chacun doit donc participer à la fonction de l’autre :

- L’organe exécutif participe à l’exercice de la fonction législative (initiative des lois, discussion, amendements, promulgation).

 - L’organe législatif participe à l’exercice de la fonction exécutive (autorisation préalable en matière diplomatique, ratification des traités internationaux).