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1 Université Robert Schuman Strasbourg Faculté de Droit de Science politiques et de Gestion LA TRANSACTION A L’EPREUVE DU DROIT DES ENTREPRISES EN DIFFICULTE Mémoire présenté par Redouane SAOUDI en vue de l’obtention du D.E.A. « Droit des Affaires » Sous la direction de Monsieur le professeur Jean-luc Vallens Année 2002-2003

LA TRANSACTION A L’EPREUVE DU DROIT DES ENTREPRISES EN … · transaction en droit français, ce qui distingue la conception française de la transaction de la conception romaine

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Page 1: LA TRANSACTION A L’EPREUVE DU DROIT DES ENTREPRISES EN … · transaction en droit français, ce qui distingue la conception française de la transaction de la conception romaine

1

Université Robert Schuman Strasbourg

Faculté de Droit de Science politiques et de Gestion

LA TRANSACTION A L’EPREUVE DU

DROIT DES ENTREPRISES EN

DIFFICULTE

Mémoire présenté par Redouane SAOUDI en vue de

l’obtention du D.E.A. « Droit des Affaires »

Sous la direction de Monsieur le professeur Jean-luc Vallens

Année 2002-2003

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2

LA TRANSACTION A L’EPREUVE DU

DROIT DES ENTREPRISES EN

DIFFICULTE

La faculté entend donner ni approbation ni

improbation aux opinions émises ; ces opinions

devant être tenues pour propres à leur auteur.

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3

REMERCIEMENTS

Aux Professeurs, Maîtres de Conférences et autres professionnels du droit participant au

D.E.A., pour leur compétence ;

A mon directeur de mémoire, Monsieur le professeur Jean-luc VALLENS, pour son esprit

critique et sa disponibilité ;

A tous les professionnels du droit qui ont pu m’éclairer et qui ont su me faire profiter de leurs

précieuses expériences ;

A ma famille et mes amis pour leur inestimable soutien ;

Que tous trouvent ici mes plus sincères remerciements.

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4

PRINCIPALES ABREVIATIONS

Act. des P.C. Actualité des procédures collectives

act. juris. Actualité jurisprudentielle (voir Dalloz Sirey)

al. Alinéa

Ann. Fac. Dr. Aix Annales de la faculté de droit d’Aix en Provence

Ann. Loyers Annales des loyers

art. Article

Ass. plén. Assemblée plénière de la Cour de cassation

Banque et droit Banque et droit

Bull. civ. Bulletin des arrêts des Chambres civiles de Cour de

cassation

Bull. d’act. Lamy dr. Com Bulletin d’actualité Lamy droit commercial

BRDA Bulletin rapide de droit des affaires, Francis Lefebvre

CA Cour d’appel

Cass. Cour de cassation

Cass. req. Chambre des requêtes de la Cour de cassation

Chron. Chronique

Civ. Chambres civiles de la Cour de cassation

Com. Chambre commercial de la Cour de cassation

ch. Chambre

chap. Chapitre

Circ. Circulaire

C. com. Code de commerce

C. civ. Code civil

CGI Code général des impôts

Cons. Const. Conseil constitutionnel

D. Recueil Dalloz (Dalloz-Sirey depuis 1965)

D.A. Dalloz affaire

Doc. Sénat Documentation parlementaire

D.P. Dalloz Périodique (voir Dalloz-Sirey)

doctr. Doctrine

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5

Dict. perm. diff. entr. Dictionnaire permanent des entreprises en difficulté

Dr. social Droit social

Dr. société Droit des sociétés

éd. Edition

Fasc. Fascicule

Gaz. Pal. Gazette du Palais

infra Infra

I.R. Informations rapides

JO déb. Ass. Nat. Journal officiel des débats de l’Assemblée national

JO déb. Sénat Journal officiel des débats du Sénat

J.Cl. Juris-Classeur

JCP G. Juris-Classeur Périodique (la semaine juridique) édition

général

JCP E. Juris-Classeur Périodique (la semaine juridique) édition

entreprise

Juris. Jurisprudence

Juris-Data Juris-Data (Banque de données juridiques)

Justices Revue justices

LGDJ Librairie général de droit et de jurisprudence

L. Loi

Mél. Mélanges

NCPC Nouveau Code de procédure civile

note Note

n° Numéro

obs. Observation

op. cit. Ouvrage cité (opere citato)

p. Page

§ Paragraphe

P.A. Petites Affiches

préc. Précité

rapp. Rapport

Rép. civ. Dalloz Dalloz (Encyclopédie civile)

Rec. Jur. Est Receuil juridique de l’Est

R.F de théo. Revue française de théorie, de philosophie et de culture

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6

Rev. arb. Revue de l’arbitrage

RJ. Com. Revue de jurisprudence commerciale

RJS Revue de jurisprudence sociale

Rev. Lamy dr. aff. Revue Lamy droit des affaires

Rev. proc. coll. Revue des procédures collectives

Rev. sociétés Revue des sociétés

RTD civ. Revue trimestrielle de droit civil

RTD com. Revue trimestrielle de droit commercial

Resp. civ. et ass. Responsabilité civile et assurance

sect. Section

somm. Sommaire

suppl. Supplément

supra Supra

t. Tome

T. Civ. Tribunal civil

T. Com. Tribunal de commerce

V. Voir

vol. Volume

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SOMMAIRE

INTRODUCTION ....................................................................................

TITRE 1. LA TRANSACTION CONCLUE EN VUE D’ EVITER L’OUVERTURE DELA PROCÉDURE COLLECTIVE........................................................................

CHAPITRE 1. LES RISQUES INHERENTS AUX TRANSACTIONSINDIVIDUELLES CONCLUES PAR LE DIRIGEANT DE L’ENTREPRISE ENDIFFICULTE ....................................................................................................................... 19

SECTION 1. LA FACULTE POUR LE DIRIGEANT DE L’ENTREPRISE ENDIFFICULTE DE TRANSIGER ................................................................................... 20SECTION 2. LA POSSIBLE REMISE EN CAUSE DE LA TRANSACTION ÀPOSTERIORI ? ............................................................................................................... 27

CHAPITRE 2. LA POSSIBILITE DE RECOURIR A UN ACCORD DE REGLEMENTCOLLECTIF DES DIFFICULTES AUX EFFETS TRANSACTIONNELS : L’ACCORDAMIABLE............................................................................................................................ 40

SECTION 1. L’ELABORATION DU REGLEMENT AMIABLE : CADRE DEL’ACCORD AMIABLE .................................................................................................. 41SECTION 2. L’ACCORD AMIABLE : UN CONTRAT A « VALEUR DETRANSACTION » ........................................................................................................... 51

TITRE 2. LA TRANSACTION CONCLUE EN VUE D’AMELIORER L’EFFICACITEDE LA PROCEDURE COLLECTIVE ....................................................................

CHAPITRE 1. LA TRANSACTION DANS LES PROCEDURES COLLECTIVES : UNOUTIL SEDUISANT........................................................................................................... 60

SECTION 1. LES SPECIFICITES DE LA TRANSACTION CONCLUE PENDANTLA PROCEDURE COLLECTIVE ................................................................................. 60SECTION 2. L’APPORT DE LA TRANSACTION AUX PROCEDURESCOLLECTIVES............................................................................................................... 79

CHAPITRE 2. LA TRANSACTION DANS LES PROCEDURES COLLECTIVES : UNOUTIL DANGEREUX ........................................................................................................ 95

SECTION 1. LES DANGERS DE LA TRANSACTION DANS LES PROCEDURESCOLLECTIVES............................................................................................................... 96SECTION 2. L ORDRE PUBLIC DANS LES PROCEDURES COLLECTIVES : UNENOTION A CLARIFIER. ............................................................................................. 108

CONCLUSION.........................................................................................

BIBLIOGRAPHIE......................................................................................

ANNEXES.............................................................................................

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TABLE DES MATIERES................................................................................

INTRODUCTION

Dies irae dies illa (…) quando judex est

venturus !

Jour de colère que ce jour-là, lorsque le

juge reviendra, chantent les chœurs de

Mozart.

Dies dulcis dies hoec, nam conciliant

inter se partes !

Jour de douceur que ce jour-ci, car les

parties se concilient, répond par écho

dissonant le chœur du Parlement, pour

justifier l’économie du recours au juge et

exalter la transaction.1

Le procès a toujours eu mauvaise réputation. Outre le fait que l’agressivité humaine est

donnée en spectacle, le procès est dans l’esprit des justiciables long et coûteux.

1 Cité par S. Neuville, La transaction suspecte, D. 2000, n°37 chron. p. 571.

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C’est la raison pour laquelle les modes alternatifs de résolution des litiges connaissent de nos

jours un nouvel essor.

La transaction est bien souvent le point d’aboutissement de ces derniers : qu’il s’agisse de la

conciliation, du compromis ou de la négociation.

Définir simplement le terme de transaction n’est pas chose aisée dans la mesure où il fait

partie de ces mots à sens juridique multiple comme le révèle la lecture des dictionnaires

juridiques2, c’est cependant à la lumière du Code civil qu’il nous faut définir la transaction

comme« un contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent une

contestation à naître ».

Bien que le Code ait fait une place relativement importante à la transaction3, la définition

donnée par ce dernier est cependant incomplète4, elle ne prend en compte que l’effet de la

convention. Elle ne mentionne pas en effet la nécessité de concession réciproque pourtant

unanimement admise5.

Cette déficience est d’autant plus regrettable que de tout temps la transaction a été considérée

comme une matière particulièrement délicate6. D’Argentré relevait déjà à son époque qu’elle

est une matière à dispute, ce qui est paradoxal7 pour un mode de règlement dit « alternatif »

des litiges qui participe à la recherche d’une solution pacifique.

Plusieurs éléments sont donc nécessaires à l’existence d’une transaction.

La transaction nécessite tout d’abord une situation litigieuse, l’article 2044 du Code civil

implique en effet l’existence ou la possibilité de celle-ci. Il nous faut cependant préciser la

portée de cette exigence qui fait de la situation litigieuse la « matière première » de la

2 Vocabulaire juridique Capitant, dir. G. Cornu, V° Transaction. Outre la définition de l’article 2044 du codecivil, la transaction désigne :

- « le mode d’extinction de l’action publique résultant du pouvoir conféré à certaines administrations(contributions directes, douanes, eaux et forêts, concurrence et prix) de renoncer à l’exercice depoursuites contre un délinquant, en le contraignant à verser une somme destinée à tenir lieu depénalité » ;

- « la convention par laquelle une administration (contributions indirectes, douanes, eaux et forêts)accepte que soient atténuées les peines pécuniaires prononcées par une juridiction répressive contre undélinquant (transaction après condamnation) » ;

- « dans le langage de la pratique financière, toute opération de bourse sur valeurs ou marchandises, toutmarché commercial ».

3 Art 2044 à 2058 du Code civil.4 On trouve la même lacune dans les définitions données par Domat, les lois civiles dans leur ordre naturel,Luxembourg, 1702, tome I, p. 131 : « La transaction est une convention entre deux ou plusieurs personnes, quipour prévenir ou terminer un procès, règlent leur différent de gré à gré, de la manière dont ils conviennent » etles quatre livres du droit public, in Œuvre de J. Domat, Paris, 1829, réimpression par le Centre de Philosophiepolitique et juridique de l’Université de Caen, 1989, p. 565 : « La transaction est un traité sur un différend oucommencé, ou à commencer, et qui le termine ».5 L. Boyer, la notion de transaction. Contribution à l’étude des concepts de cause et d’actes déclaratifs, thèseToulouse, Sirey, 1947 : Rép. Civ., V. Transaction.6 « Haec materia difficilima et speculativa est » déclarait déjà Urgeolus cité par L. Boyer, Rep. Civ. n°3.

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transaction en droit français, ce qui distingue la conception française de la transaction de la

conception romaine et que l’on retrouve encore aujourd’hui dans le Code civil allemand8.

Selon la conception romano-germanique, le terme de transaction désigne non seulement le

contrat mettant fin à un litige, mais encore tout accord par lequel les parties veulent éliminer

une quelconque incertitude existant dans leur relation juridique, et cela, même s’il n’existe

entre elles aucune difficulté contentieuse.

Le droit français, quant à lui, substitue depuis le XVI ème siècle l’exigence d’une situation

litigieuse, res litigiosa, à celle d’une simple incertitude, res dubia. C’est à cette époque, en

effet, que se sont fixés dans notre droit, certains des traits les plus caractéristiques de la

transaction9 qui a aboutit au développement d’une conception restrictive de la transaction par

rapport à celle du droit romain et que la tradition historique légua aux auteurs du Code civil.

Toute situation litigieuse est en principe susceptible de transaction. La « contestation née ou à

naître » provoque une incertitude quant aux droits respectifs des parties.

Cette incertitude peut avoir deux objets : elle peut affecter le fond du droit en cause, mais elle

peut aussi se limiter à son exécution.

En principe, c’est le fond même des droits en présence qui doit être contestable. Il n’est pas

pour autant nécessaire qu’un procès soit déjà engagé : la contestation peut, en effet, consister

en un simple différend qui pourrait éventuellement déboucher sur un procès. Il peut même

suffire que l’on ait en vue une contestation à naître, alors même que le différend n’est pas

encore apparu10, pour que celle-ci puisse donner prise à une transaction.

Mais même lorsque les droits en cause ne donnent prise à aucune discussion, lorsque un

jugement est déjà intervenu par exemple, on admet encore qu’il puisse y avoir transaction sur

leur mise en œuvre.

On peut , en effet, transiger pour clarifier un droit douteux mais on le fait aussi très souvent

pour éviter les lenteurs, les difficultés et les soucis résultant de la mise en œuvre d’un droit

certain par la voie de l’exécution forcée. C’est ce qui explique qu’on puisse transiger sur

l’interprétation et l’exécution d’un jugement, lesquelles pourrait donner lieu à de nouvelles

actions judiciaires11.

7 D’Argentré, Coutume de Bretagne, art. 266, Chap. 3, A : « De transactione mirifice pugnatur in scholis ».8 Paragraphe 779 du code civil allemand (BGB).9 Une ordonnance d’avril 1960 en interdit la rescision pour lésion, son caractère essentiellement déclaratif est àpeu près dégagé pour éluder l’application de certains principes du droit féodal et fiscal.10 C’est-à-dire que les droits des parties soient contestables, affectés d’un doute.11 Cf. civ. 1re, 13 mars 1957, Bull. civ. I, n°135

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Ainsi, il apparaît que la transaction n’est pas seulement un procédé de substitution à la vérité

juridictionnelle mais aussi un moyen d’application spontanée du droit12.

La transaction nécessite également, bien que la définition légale n’en fasse pas état, que

chacune des parties renonce à une part de ses prétentions. Cette exigence a été introduite par

la Cour de Cassation dans la définition même de la transaction13 lorsqu’elle énonce que la

transaction est « un contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou à naître en

se consentant des concessions réciproques » ce qui fait de la transaction un contrat

synallagmatique : « le sacrifice consenti par chacune des parties devient ainsi la cause de

l’engagement contracté par l’autre »14. Il convient cependant de souligner que ces sacrifices

n’ont pas à être d’égale valeur, la lésion n’étant pas une cause de rescision du contrat15.

Ainsi lorsque l’une des parties abandonne en totalité l’objet du litige, le sacrifice de l’autre

peut consister en un engagement de donner, de faire ou de ne pas faire étranger à cet objet.

Comme c’est souvent le cas, la renonciation par l’un peut avoir pour contrepartie une

prestation étrangère au litige. C’est ce qui nous permet de dire qu’est dépassée aujourd’hui la

vision classique qui admet que le type même de l’engagement transactionnel est celui dans

lequel les parties renoncent chacune à une part de leurs prétentions originaires quant à l’objet

du litige, de sorte que la renonciation de chaque partie porte uniquement sur son droit

d’action, c'est-à-dire sur la faculté lui appartenant de demander au juge la vérification et la

protection de ce qu’elle affirme être son droit16.

La transaction implique enfin que les parties en se consentant des concessions réciproques

aient pour volonté de mettre fin au litige né ou à naître dans leur relation car il est certain que

si les parties n’ont pas entendu mettre fin à un litige, l’accord qui est intervenu n’est pas une

transaction17.

12 V. E. Serverin, P. Lescoumes et T. Lambert, Transaction et pratique transactionnelle, Economica 1987, p.28.13 V. Cass. Civ., 3 janvier 1883 : D.P. 1883, 1, p.457.- Cass. Civ., 13 mars 1922 : D.P. 1925, 1, p. 139 et lesnombreux arrêts de la chambre sociale de la Cour de Cassation dont Cass. Soc., 29 mai 1996 : Dr. social. 1996,p. 689, obs. J. Savatier.- V. C. Jarrosson, les concessions réciproques dans le contrat de transaction, D. 1997,chron. P.267 et s.- P. Soulier, Existence et importance des concessions réciproques dans la transaction, RJS1997, chron. N°19.14 Cass. Req., 24 déc. 1900, D. 1901, 1, juris. p. 135.15 Art. 2052 du Code civil.16 L. Boyer, thèse préc., p. 47 et s.17 Cass. Civ., 10 mars 1903, D.P 1903. 1. 485.

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Cet élément intentionnel a donc une importance particulière pour déterminer si tel ou tel acte

a ou non un caractère transactionnel. C’est la raison pour laquelle on a souvent présenté cette

intention des parties comme un troisième élément nécessaire à l’existence d’une transaction18.

Cet élément intentionnel n’est cependant pas spécifique à la transaction, mais il n’est qu’une

forme particulière d’une exigence propre à tous les contrats : celle d’une adhésion consciente

des parties à la réalisation des effets normaux d’un contrat et en l’espèce, celui de mettre fin

au litige pour ce qui concerne le contrat de transaction19.

Lorsqu’elle est donc normalement constituée, la transaction a pour effet, comme tous les

autres contrats, d’engendrer des obligations. Elle a surtout un effet d’une nature spéciale :

c’est d’emporter de la part des contractants l’obligation de ne pas engager ou de ne pas

continuer la contestation qu’ils ont eu l’intention de prévenir ou de terminer en transigeant.

Les parties s’interdisent par ce contrat, quelle que soit plus tard la certitude de leurs droits, de

mettre à nouveau en question le débat qu’elles ont voulu trancher d’une manière irrévocable.

Elles se déclarent définitivement satisfaites et consacrent un état de choses qu’à titre

exceptionnel seulement elles pourront modifier.

C’est en ce sens, que le Code civil, dans l’art 2052, assimile la transaction au jugement en

édictant que « les transactions ont entre les parties l’autorité de la chose jugée en dernier

ressort. ».

Ce texte marque la profonde analogie existant entre la transaction et la décision judiciaire : en

mettant fin au litige, ils ont tout deux un effet extinctif. Par la suite, celle des parties qui aurait

l’intention de faire renaître le litige que la transaction a définitivement réglé pourrait se voir

opposer par l’autre partie une exception péremptoire, l’exceptio litis finitae per transactionem

analogue à l’exception de chose jugée, l’exceptio litis finitae per rem judicatam20.

Mais il faut, pour que la transaction empêche un second procès de naître, qu’il y ait comme en

matière de jugement, identité d’objet et identité de parties.

Forte de ces caractéristiques, la transaction, comme tout contrat, crée une situation nouvelle

que les parties doivent respecter. Elle a pour but d’éteindre ou de prévenir une situation

litigieuse.

18 M. Plagniol et G. Ripert, Traité pratique de droit civil français, L.G.D.J., t. 11, par R. Savatier, 1954, n°1585.19 L. Boyer, thèse préc., p. 16 note 1.20 L. Boyer, Rép. civ.., n°187.

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La transaction joue, a priori, un rôle bénéfique en apaisant des conflits : inspirés de l’idée

janséniste que le procès était « un des fléaux où se traduit la corruption de la nature

humaine », les codificateurs avaient jugé « que c’était une convention qui devait être

favorisée, parce qu’elle était porteuse d’un bien, étant extinctive d’un mal »21. Il est vrai que

l’on entend souvent chez les gens de justice répéter le vieux brocard qu’ « une mauvaise

transaction vaut mieux qu’un bon procès », tant un règlement amiable semble supérieur à un

règlement contentieux.

Dès lors la transaction peut se targuer d’avoir les faveurs de l’opinion publique mais aussi du

législateur qui a décelé en elle un moyen à bon compte pour ne pas surcharger le juge d’un

contentieux déjà pléthorique22.

Ainsi dans le domaine fiscal et douanier, il permet de substituer à la peine une sanction

acceptée, plus efficace23.

Dans le domaine des accidents de la circulation, la loi du 5 juillet 1985, consacrant une

pratique ancienne, impose à l’assureur d’offrir à la victime une indemnisation24. Sur ce

modèle, des lois postérieures (Loi du 9 décembre 1986 et du 6 juillet 1990) ont imposé la

même obligation au fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres

infractions.

La transaction connaît également un formidable développement en droit du travail. Il n’est

qu’à consulter les tables décennales de certaines gazettes pour se rendre compte de

l’importance de la transaction dans cette matière25.

Mais il est également un domaine dans lequel la transaction a une importance considérable en

pratique : celui du droit économique.

La transaction en matière économique est très certainement une de celle qui est le plus

marquée par cette volonté pacificatrice des relations : les partenaires économiques étant en

relation d’affaires évitent le recours à la justice pour régler les difficultés pouvant intervenir

dans leur relation. Un procès, en raison de son coût, de sa longueur et de sa mauvaise

réputation laissant toujours beaucoup plus de « séquelles » qu’un arrangement à l’amiable.

21 J. Carbonnier, Flexible droit, L.G.D.G., 8e éd, p. 309.22 V., dernièrement, la loi n°98-1163 du 18 déc. 1998 relative à l’accès au droit et à la résolution amiable desconflits (JO 22 déc., p.19343, D. 1999, Lég. p. 71).23 F. Boulan, La transaction douanière, Etudes de droit pénal douanier, An. Fac. Dr. Aix, 1968, p.219 et s.24 J.-P. Chauchard, La transaction dans l’indemnisation du préjudice corporel, RTD civ., 1989, p.1-39.25 Notamment dans la Gazette du Palais : 85% des arrêts ayant trait à la transaction concernent la conclusion decelle-ci dans le cadre de litiges relatifs au du droit du travail, la contribution à l’élaboration du régime desart.2044 et s. est principalement l’œuvre de la chambre sociale de la Cour de Cassation.

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14

C’est cette même logique qui prime lorsque les difficultés dans les relations économiques

résultent d’un problème de trésorerie voir même de l’état de cessation des paiements d’un

partenaire. Les créanciers, même s’ils ont moins d’espoir quant a une éventuelle poursuite

d’activité avec l’entreprise en difficulté privilégient dans la mesure du possible cette solution

« extrajudiciaire », le recours à un règlement amiable étant peut-être leur dernière chance de

se voir pour partie indemnisés.

En effet, comme « un organisme vivant, une entreprise naît, vit, et peut être le siège de

désordres divers, dont les plus graves sont susceptibles de provoquer sa disparition »26. Cette

situation perturbatrice de l’ordre juridique n’a jamais été tolérée par le législateur.

Pour rétablir cet ordre, la solution traditionnelle consistait à éliminer, au moins juridiquement,

le perturbateur dont la liquidation devait alors être organisée. Cette finalité traditionnelle du

droit des faillites n’a pas disparu mais est passée aujourd’hui au second plan, derrière le souci

dicté par des considérations économiques, de la sauvegarde du débiteur27.

Du droit des faillites, nous sommes passés aujourd’hui au droit des entreprises en difficulté28.

Ce changement de perspective perceptible dès 196729 a été confirmé par les textes intervenus

depuis 1984 et sur lesquels notre droit positif repose30.

En effet, les dispositions des lois du 1er mars 1984 et du 25 janvier 1985 sont codifiées, pour

l’essentiel, dans le livre VI du nouveau Code de commerce31 sous l’intitulé général « Des

difficultés des entreprises ».

La transaction ne trouve qu’une très faible place parmi ces dispositions relatives aux

entreprises en difficultés et pourtant en pratique, elle est un mot qui revient souvent aux lèvres

des protagonistes de ce droit.

Très peu d’études ont, au demeurant, été consacrées à la transaction dans le droit des

entreprises en difficultés et c’est ce qui constitue tout l’intérêt mais également toute la

difficulté de notre exposé.

26 F. Pérochon et R. Bonhomme, Entreprises en difficulté, Instruments de crédit et de paiement, LGDJ, 5e éd2001, n°1 p.1.27 En effet, le débiteur exploite une entreprise ; « un centre de production de biens ou services et un outil detravail, donc une cellule du tissu économique local, régional, national, dont la survie est d’intérêt général et dontla protection relève aux yeux du législateur, de l’ordre public économique et social », F. Pérochon, op. cit. n°1.28 J. Pailluseau, Du droit des faillites au droit des entreprises en difficultés…, Mél. Houin, 1985, p.109.29 Loi n°67-563 du 13 juillet 1967 sur le règlement judiciaire, la liquidation des biens, la faillite personnelle et labanqueroute.30 Loi n°84-148 du 1er mars 1984 complété par le décret du 1er mars 1985 relative à la prévention et au règlementamiable des difficultés des entreprises.Loi n°85-98 du 25 janvier 1985 complétée par deux décrets du 27 décembre 1985 relative au redressement et à laliquidation judiciaire des difficultés des entreprises.Ces textes ont été profondément remaniés par la loi n°94-475 du 10 juin 1994 relative à la prévention et autraitement des difficultés des entreprises.

Page 15: LA TRANSACTION A L’EPREUVE DU DROIT DES ENTREPRISES EN … · transaction en droit français, ce qui distingue la conception française de la transaction de la conception romaine

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En effet, la transaction est « un instrument » souple qui permet d’éviter les lourdeurs et les

aléas d’une procédure souvent coûteuse, autant dire qu’elle présente à priori des qualités

indéniables pour tout contentieux d’une manière générale.

Cependant, les procédures prévues par le droit des entreprises en difficultés sont des

procédures particulières marquées par une finalité économique et sociale car la survie des

entreprises relève de l’intérêt général.

Dès lors, il convient dans cette matière, plus que dans toute autre, de mesurer ses propos et de

voir dans quelle mesure la transaction peut être un instrument nécessaire pour les entreprises

en difficulté. Peut-on, même dans cette matière, affirmer aussi facilement que dans les autres

domaines qu’un mauvais arrangement vaut mieux qu’un bon procès ?

Afin d’apprécier la qualité de cet « outil », il convient de voir dans quelles optiques celui-ci

est utilisé car, en effet, la transaction selon le moment où elle intervient peut avoir une

finalité différente.

En premier lieu, la transaction peut être utilisée en vue d’éviter l’aggravation de difficultés qui

pourraient conduire à l’ouverture d’une procédure collective : elle est donc conclue avant

l’état de cessation des paiements, lorsque l’entreprise a des difficultés mais est encore « in

bonis ».

Dans cette hypothèse, la validité d’une telle transaction ne pose à priori pas de difficultés car,

en vertu du principe de liberté de gestion, rien n’interdit encore au chef d’entreprise de

transiger dès lors qu’il remplit les conditions propres à celle-ci. Cependant, la transaction en

vertu de ses caractéristiques32 et du contexte dans lequel elle est conclue, est un acte qui peut

s’avérer dangereux pour l’entreprise en difficulté. C’est pourquoi cette absence de contrôle à

priori est compensée par une possible remise en cause à posteriori, le cas échéant, lorsque

l’état de cessation est consommé. La nature juridique du contrat de transaction n’est

cependant pas sans soulever quelques incertitudes lorsqu’il s’agit de remettre en cause ces

transactions.

Dans tous les cas, le recours à des transactions conclues individuellement avec chaque

créancier n’est de nature qu’à faire disparaître autant de litiges individuels alors que c’est

dans leur ensemble qu’il convient de régler ces difficultés pour éviter l’ouverture de la

procédure collective, dès lors le droit des entreprises en difficulté permet dans un cadre

organisé et favorisé de négocier un accord transactionnel avec l’ensemble de ses créanciers

dans le but d’éviter l’ouverture d’une procédure collective.

31 Adopté par l’ordonnance n°2000-912 du 18 septembre 200032 Article 2052 du Code civil.

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16

Celui-ci en vertu de son caractère institutionnel semble plus efficace et moins dangereux que

des transactions conclues individuellement par le dirigeant en difficulté. Il convient cependant

de s’interroger sur la nature de cet acte : en effet l’accord conclu dans le cadre d’un règlement

amiable, même s’il procède de la même logique et qu’il a la même finalité que la transaction,

ne semble cependant pas pouvoir être strictement interprété comme tel. C’est ce que nous

tenterons de démonter (1ère partie).

Si la transaction peut servir à éviter l’ouverture d’une procédure collective, paradoxalement

elle peut également participer à la recherche d’une amélioration des procédures collectives.

En effet, la transaction peut également intervenir pendant la procédure collective lorsque

l’entreprise a été déclarée en état de cessation des paiements : dans cette optique, étant prévue

par le droit des entreprises en difficulté, la transaction au même titre que toute les autres

dispositions de la loi de 1985 tend à la poursuite de l’efficacité de la procédure collective.

Celle-ci a en effet un fondement légal, deux dispositions de la loi de 1985 autorisent celle-ci

mais la subordonne à un certain nombre de conditions.

La transaction peut être conclue dans la phase de redressement judiciaire comme dans la

phase de liquidation judiciaire conformément aux anciens articles 33 et 158 de la loi de 1985

devenus respectivement art L 621-24 et L 622-20 du Code de commerce.

La transaction conclue pendant la procédure collective présente un certain nombre d’intérêts

qui permettent d’améliorer l’efficacité d’une procédure collective : elle se présente comme un

instrument qui a tout pour séduire.

Cependant le recours à la transaction dépasse aujourd’hui le cadre pour lequel elle a été

conçue de sorte qu’elle recèle un certain nombre de dangers. Le plus important de ces dangers

étant certainement l’incompatibilité même de la transaction avec l’ordre public des procédures

collectives (2ème partie).

.

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17

TITRE 1. LA TRANSACTION CONCLUE EN VUE D’ EVITER

L’OUVERTURE DE LA PROCEDURE COLLECTIVE

Avant l’ouverture de la procédure collective, le dirigeant, bien que son entreprise soit en

difficulté, n’est pas dessaisi de sa gestion tant que celle-ci n’est pas en état de cessation des

paiements.

En vertu du principe de non ingérence dans les affaires du dirigeant, celui-ci peut conclure

seul et à son initiative les actes qui lui semblent nécessaires à la gestion de son entreprise.

Toutes sortes de raisons peuvent amener le dirigeant de l’entreprise en difficulté à transiger

avant l’ouverture de la procédure collective. Ces transactions ont très souvent pour ambition

d’éviter l’aggravation des difficultés que connaît l’entreprise et qui pourrait la conduire à

l’ouverture d’une procédure collective.

La particularité de ces transactions ressort du cadre dans lequel elles sont élaborées : un

contexte de difficultés pour l’entreprise, de sorte qu’un dirigeant aux abois acceptera plus

facilement des accords transactionnels dans lesquels ses contreparties excèdent celles de

l’autre partie contractante.

Paradoxalement, la transaction peut être également conclue à l’initiative des créanciers qui

peuvent y trouver un intérêt.

Ainsi, lorsque l’entreprise conteste le montant de la dette d’un créancier et le met dans

l’obligation d’engager un procès, il peut alors être préférable pour celui-ci d’abandonner une

partie du montant de sa créance (facture) afin d’éviter les frais, la lenteur et les aléas d’un

procès.

Cependant la transaction, plus que tout autre contrat, présente des particularités qui en font, si

on ajoute à cela le cadre dans lequel elles sont conclues, un acte dangereux.

Si elle ne fait l’objet d’aucun contrôle a priori, une remise en cause de tels actes est toutefois

possible une fois que l’entreprise a déposé son bilan sur le fondement des actes conclus

pendant la période suspecte.

Celle-ci, eu égard à la nature juridique du contrat de transaction, mérite cependant discussion.

(Chapitre 1).

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Les transactions conclues individuellement par le dirigeant ne sont cependant pas de nature à

résoudre en bloc toutes les difficultés que connaît l’entreprise et à éliminer ainsi tout risque

d’ouverture d’une procédure collective. Le législateur a favorisé un tel objectif en instituant la

procédure de règlement amiable des difficultés des entreprises33.

Celle-ci tend à favoriser la conclusion d’un accord entre le débiteur et tous ses créanciers avec

l’aide d’un conciliateur nommé par le juge. Cette procédure, par rapport aux divers autres

modes de règlement amiable « non institutionnel », propose aux entreprises un support

juridique précis pour leur permettre de surmonter leurs difficultés.

L’accord amiable peut présenter un grand intérêt pour les entreprises « au bord du gouffre ».

Il semble, a priori, s’analyser en une transaction conclue entre le débiteur et ses créanciers

dans le but d’éviter l’ouverture d’une procédure collective.

Or, celui-ci, s’il emprunte la même logique et aboutit au même résultat que la transaction ne

semble pas comporter tous les éléments constitutifs de la transaction de sorte qu’on peut

difficilement qualifier l’accord amiable de transaction au sens civiliste du terme (Chapitre 2).

33 V. not. A. Couret, N. Morvilliers, G.-A. de Sentenac, Le traitement amiable des difficultés des entreprises,Droit poche, Economica, 1995 ; M. Rouger, chron., P.A. n°5, janv.1994 ; v. P.A. 14 sept. 1994, chron. Vallens,p.120, et Chaput, p.35.

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CHAPITRE 1. LES RISQUES INHERENTS AUX TRANSACTIONS

INDIVIDUELLES CONCLUES PAR LE DIRIGEANT DE

L’ENTREPRISE EN DIFFICULTE

La notion de difficulté dans une entreprise n’est pas une notion floue.

Ainsi, un certain nombre d’indices permettent de déceler les difficultés dans une entreprise.

Dans le souci de déceler rapidement ces difficultés et de les traiter avant que la situation ne

soit irrémédiablement compromise, le législateur a institué un « véritable droit économique de

l’information »34 qui profite à toutes les composantes de l’entreprise et qui résulte

principalement de la tenue d’une comptabilité35.

La loi du 1er mars 1984 a également institué une procédure d’alerte destinée à informer le chef

d’entreprise et éventuellement d’autres organes sociaux, de « faits de nature à compromettre

la continuité de l’exploitation »36.

La prévention, qu’elle résulte de l’information ou de l’alerte, a seulement pour but d’inviter

le dirigeant à agir.

En effet, tant que le dirigeant n’est pas en état de cessation des paiements, il demeure libre

dans la gestion de son entreprise. Celui-ci peut, bien qu’il soit en difficulté, valablement

transiger.

Pourtant, le recours à la transaction n’est pas sans danger et cela tant en raison des

circonstances dans lesquelles elle est conclue qu’en raison de ses caractéristiques propres

(Section 1).

Cette absence, au demeurant justifiée, de « contrôle à priori » des transactions conclues par le

dirigeant en difficulté est cependant corrigée par un possible « contrôle à posteriori ».

En effet, cette entreprise, si elle n’a pas surmonté ses difficultés, déposera son bilan. Dans

cette hypothèse et dans un souci de protection des créanciers et de l’entreprise, la loi prévoit le

34 M. Jeantin, La loi du 1er mars 1984 relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés desentreprises, Dr. Social, 1984, p.599 et s. ; P. Le Cannu, L’amélioration de l’information au sein de l’entreprise,RJ. Com., n°spéc. 1986, p.8.35 V. C. Saint-Alary-Houin, Droit des entreprises en difficulté, Montchrestien, Domat, 4e éd., 2001, n°87 et s.36 Idée lancée par le rapport du Comité présidé par P. Sudreau, La réforme de l’entreprise, Ed. 10/18, p.178, 179.

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droit d’agir en nullité de certains actes conclus au cours de la période suspecte qui s’étend de

la cessation des paiements au jour du jugement d’ouverture37.

Les actes conclus par le débiteur durant cette période fixée par le Tribunal pourront donc être

remis en cause et annulés.

Si le contrat de transaction fait sans conteste partie des actes pouvant faire l’objet d’une

nullité facultative38 (si les conditions de celle-ci sont remplies), la nullité de droit39 des

transactions conclues dans cette période soulève quant à elle plus d’incertitudes (Section 2).

SECTION 1. LA FACULTE POUR LE DIRIGEANT DE L’ ENTREPRISE

EN DIFFICULTE DE TRANSIGER

En vertu du principe de liberté de gestion du dirigeant de l’entreprise « in bonis », celui-ci

peut valablement transiger dès lors qu’il remplit les conditions propres à la formation de tout

contrat. L’entreprise n’étant pas en état de cessation des paiements, on ne saurait s’immiscer

dans ses affaires internes sans porter atteinte à l’autorité du chef d’entreprise (§1).

Cependant, si la faculté pour le dirigeant de l’entreprise en difficulté de transiger est justifiée,

elle n’en est pas moins dangereuse et cela tant en raison des caractéristiques propres du

contrat de transaction que du cadre dans lequel elle est conclue (§2).

§1. UNE FACULTE JUSTIFIEE

Dès lors que le dirigeant de l’entreprise en difficulté remplit les conditions nécessaires à la

formation du contrat de transaction, il peut valablement transiger.

37 V. C. Saint-Alary-Houin et M.H. Monsérié, Nullités de droit et nullités facultatives, Jurisclasseur com., Fasc.2506 à 2515.38 Article 108 de la loi de 1985 codifié à l’art. L 621-108 du nouveau code de commerce : « les paiements pourdettes échues effectués après la date de cessation des paiements et les actes à titre onéreux accomplis après cettemême date peuvent être annulés si ceux qui ont traités avec le débiteur ont eu connaissance de la cessation despaiements ».39 Article 107 de la loi de 1985 codifié à l’art. L 621-107 du nouveau Code de commerce.

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A. La condition : le respect des conditions de formation du contrat de transaction

Pour pouvoir transiger, le dirigeant de l’entreprise en difficulté doit remplir les conditions

propres à la formation du contrat de transaction. Celles-ci obéissent au droit commun des

contrats.

Cependant, l’originalité de ce contrat se traduit par certaines particularités.

La transaction est un acte de disposition : les parties renoncent définitivement à exercer

l’action en justice relative au litige qu’elles apaisent. Cette renonciation implique l’aptitude à

disposer du droit, fondement de l’action.

Même si l’aliénation intervient à titre onéreux, elle n’est pas destinée, à la différence d’une

aliénation ordinaire, à procurer un profit à l’une des parties mais à éviter un litige.

Aussi, l’objet de la transaction, la capacité et le pouvoir de transiger ainsi que la forme de ce

contrat relèvent-ils, à certains égards, de règles spéciales.

En effet, concernant tout d’abord l’objet de la transaction, la renonciation à l’action en justice,

qu’implique toute transaction, conduit à exiger que cette action soit disponible, c'est-à-dire

que le droit qu’elle sanctionne puisse faire l’objet d’un commerce juridique.

Si l’on peut en principe transiger sur tout litige, trois sortes d’obstacles s’opposent à la

transaction : l’indisponibilité du droit40, l’intérêt public41 et l’ordre public.

Les transactions conclues par le dirigeant en difficulté peuvent tomber sous le coup de ces

limites eu égard à leur grande diversité.

Il semble, au regard du caractère particulier du domaine des entreprises en difficulté, que

l’ordre public soit l’obstacle qui limite le plus le droit de transiger.

Ainsi, on peut admettre une transaction conclue par le dirigeant en difficulté avec un de ses

partenaires économiques en vue d’éviter l’état de cessation des paiements qui conduirait à

l’ouverture d’une procédure collective.

Par contre, une transaction conclue par le dirigeant d’une entreprise déjà en état de cessation

des paiements (cependant non encore « judiciairement déclarée ») avec un de ses partenaires

pour éviter la demande d’ouverture d’une procédure collective serait contraire à l’ordre

public. Ceci, en raison des dispositions de la loi de 1985, texte d’ordre public, codifiées à

40 Les droits extrapatrimoniaux ne peuvent être l’objet d’une transaction, ainsi en est-il de l’état des personnes.41 Les droits d’intérêt public ne peuvent faire l’objet d’une renonciation conventionnelle comme les actionsrelatives au domaine public ou à la puissance publique ( Circ. Du 6 fév. 1995) et de l’action publique naissantd’une infraction (art 2046).

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l’article L 620-1 et suivant du nouveau Code commerce, qui s’imposent dès lors que

l’entreprise est en état de cessation des paiements.

Mais avant même de s’intéresser à l’objet de la transaction, encore faut-il avoir le pouvoir de

transiger.

En effet, la transaction constitue un acte de disposition grave dans la mesure où la contrepartie

à l’abandon de l’action peut être difficile à apprécier.

Elle est interdite à ceux qui sont frappés d’une incapacité d’exercice42 : les mineurs et les

majeurs incapables.

Sauf à appartenir à l’une de ces deux catégories, tout dirigeant peut valablement transiger.

L’existence de difficultés n’affecte en rien cette capacité dès lors que l’entreprise n’est pas en

état de cessation de paiement43.

La transaction, malgré les termes de l’article 2044 al 2, est un contrat consensuel. Sa validité

n’est subordonnée au respect d’aucune forme particulière.

Ce principe est tempéré par les règles de preuve. L’exigence d’un écrit, formulée par l’article

2044 al 2, est une règle de preuve44. Toute transaction, même sur un montant inférieur à 800

euros, s’établit par écrit.

En réalité, la jurisprudence s’est efforcée de gommer les différences avec le droit commun de

la preuve : l’écrit n’est pas exigé en matière commerciale45 et la preuve testimoniale est

recevable s’il existe un commencement de preuve par écrit.

En règle générale, les transactions sont, dans leur très grande majorité, constatées dans un

écrit surtout lorsqu’elles sont conclues par des entreprises46.

Par ailleurs, il est parfois utile de procéder à l’enregistrement de la transaction47. La

transaction peut être établie dans n’importe quel écrit, ce peut être un acte notarié ou un

contrat judiciaire par exemple48.

42 Art 2045 du Code civil.43 Il en va autrement lorsque l’entreprise est en état de cessation supra Titre 2e Chap. 1er sect. 1ere sur laprocédure spécifique de conclusion d’une transaction.44 Cass. Civ. 1re, 18 mars 1986, Bull. civ. II N°74.45 Cass. Civ., 26 déc. 1950, D.P. 52.I.37, note .R. Meurisse.46 Voir annexe 1 pour un modèle de transaction conclue par le dirigeant d’une entreprise en difficulté avec un deses créanciers.47 Pour lui donner une date certaine vis-à-vis des tiers par exemple, dans un tel cas il est nécessaire d’établir unécrit pour le présenter aux services de l’enregistrement.48 C'est-à-dire une transaction validée par une décision de justice.

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En pratique, les parties croient souvent nécessaire d’utiliser les termes « transaction » ou

« accord transactionnel » et de se référer expressément aux dispositions du Code civil

relatives à la transaction.

Ce formalisme incantatoire n’a aucune vertu : il n’empêche pas d’agir en nullité de la

transaction ou de requalifier une transaction simulée.

Il reste que la transaction, comportant une renonciation, implique une volonté caractérisée et

fait l’objet d’une interprétation restrictive : mieux vaut qu’elle soit écrite et claire49.

Une fois ces conditions remplies, le dirigeant peut valablement transiger et cela même si son

entreprise connaît des difficultés dès lors qu’elle n’est pas en état de cessation des paiements.

B. Le principe : la liberté de gestion du dirigeant « in bonis »

L’information comptable comme l’information par l’alerte permettent de déceler les

difficultés dans l’entreprise.

Elles ont pour but d’inciter le dirigeant ou la direction de l’entreprise à agir pour résoudre

celles-ci.

Lorsque les difficultés de l’entreprise sont trop graves pour être résolues à l’amiable par le

dirigeant, concrètement lorsque l’entreprise ne parvient plus à payer, ou à apaiser ses

créanciers, elle relève d’un traitement judiciaire à visée soit curative, soit liquidative, qui lui

sera administré par le tribunal après ouverture d’une procédure de redressement ou de

liquidation judiciaire50.

Le critère d’ouverture d’une telle procédure est défini à l’article L 621-1 du Code de

commerce : la procédure de redressement judiciaire est ouverte à toute entreprise51 qui est

dans l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible.

Cette situation financière, comme condition de mise en « faillite » du débiteur, résulte donc

d’une notion comptable dégagée par la jurisprudence sous l’empire de la loi du 13 juillet

196752.

49 Une transaction ne peut être modifiée qu’en respectant les formes du contrat : V. Civ. 1ère, 10 oct. 1995, Bull.civ. n°360 ; RTD civ., 96.643, note P.-Y. Gautier : « cette transaction ayant entre les parties l’autorité de lachose jugée en dernier ressort, celles-ci ne peuvent en modifier les modalités d’exécution qu’aux conditions deforme auxquelles elle est soumise ».50 Titre II du livre VI du code de commerce.51 Mentionnée à l’art. L 620-2 du Code de commerce.52 V. par ex., Cass. Com., 14 février 1978, D. 1979 IR.1980, obs. A. Honorat ; Cass. Com., 7 mai 1980, Bull.Civ. 1980 IV, n°181 ; V. Y. Chaput, Règlement amiable et cessation des paiements, in « Les innovations de laloi sur le redressement judiciaire des entreprises », Sirey, n°spéc. 1986, p.17.

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Il a, cependant été souligné que cette notion est, de par son inflexibilité et sa technicité, une

notion rigide53 qu’il conviendrait d’assouplir. Or, la question de l’assouplissement de la

définition légale de la cessation des paiements est une question difficile à résoudre54.

Elle plonge ceux qui cherchent à la résoudre dans un cercle vicieux : si le tribunal est saisi

trop tard, c'est-à-dire si la procédure s’ouvre alors que l’entreprise n’a plus d’actif, on ne voit

pas comment cette entreprise moribonde pourra se redresser.

A l’inverse, si l’intervention est prématurée, la révélation publique de cette procédure lourde

et coûteuse peut avoir des effets disproportionnés et nuire à son tour au redressement.

En l’état actuel du droit positif, tant que l’entreprise en difficulté n’est pas en état de cessation

des paiements, le dirigeant reste libre dans sa gestion.

Cette situation est logique. Elle découle du principe de la liberté d’entreprendre reconnu par

la déclaration des droits de l’homme et du citoyen55 et que l’on range parmi les droits et

libertés fondamentaux reconnus aux employeurs par la Constitution.

Aucune intervention judiciaire ne saurait intervenir à ce stade de difficultés de l’entreprise. Le

législateur a, cependant, prévu un certain nombre de mécanismes tendant à l’intervention d’un

tiers dans la vie de l’entreprise tel que le président du tribunal de commerce56, un mandataire

ad hoc57, un conciliateur58.

Cependant, ces modes conventionnels de règlement des difficultés s’ils sont recommandés au

chef d’entreprise ne s’imposent pas à lui de sorte que celui-ci peut très bien les refuser.

Quand bien même le dirigeant en difficulté accepte l’intervention de tiers dans la vie de

l’entreprise, celui-ci n’est pas dessaisi de la gestion de son entreprise, de sorte qu’il peut

accomplir tous les actes qui lui semblent nécessaire à la vie de son entreprise et de ce fait il

peut valablement transiger.

53C. Nanterme et G. Ponceblanc, L’opportunité d’avoir caractérisé légalement la notion de cessation despaiements : une opportunité qui n’est pas sans risques, Rev. proc. coll. 1986, n°4, p.33 et Gaz. Pal. 1986 p. 661;F. Delesalle, Réflexions sur le fait générateur de l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire, Rev.proc. coll. 1987, n°4, p.1 ; J. Guyénot, L’évolution de la notion de cessation des paiements, P.A., 1981, n°37 ; G.Teboul, A propos de la cessation des paiements, RJ Com. 1998, 169.54 S. Bénisty, Le moment de l’ouverture des procédures collectives, thèses, Paris I, 1983.55 Art 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.56 Art L 611-2 du Code de commerce ; V. J.J. Daigre, Le rôle du tribunal de commerce, bilan d’une enquête, JCP1987 II 15066, p.625 ; J.Ph. Hael, La consécration du droit d’alerte du président du tribunal, P.A., 30 sept.1994, p.13.57 J.P. Marchi, Une création originale du tribunal de commerce de Paris : « Le mandataire ad hoc », Gaz. Pal.,1983, doct. 1, p.123 ; D. Schmitt et F. Michel, Le traitement amiable des difficultés judiciaires dans le cadre dumandat « ad hoc », Banque et droit, n°27, janv. 1993, p.14 ; G. Bolard, « administration provisoire et mandat adhoc : du fait au droit », J.C.P., 1995, I, 3882.58 V. Chr. Gavalda, Le règlement amiable, in « le souci d’éviter la faillite des entreprises », RJ Com., 1986,n°spéc., p.88. ; J.F. Martin, Le règlement amiable, réflexion d’un praticien, in « le souci d’éviter la faillite desentreprises », RJ. Com., 1986, n°spéc., p. 96. ; M. Bayle, « De l’intérêt du règlement amiable », RTD com.,1988, p.1.

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Les transactions qui interviennent à ce stade ne sont cependant pas sans danger.

§2. UNE FACULTE DANGEREUSE

Si la faculté pour le dirigeant en difficulté de transiger est justifiée, elle n’en est pas moins

dangereuse : ces dangers tiennent d’une part aux caractéristiques même de la transaction et

d’autre part au contexte dans le cadre duquel elle est conclue.

En effet, la transaction comme toute convention implique que les parties aient échangé un

consentement éclairé : un vice du consentement en provoque la nullité. Ainsi, du dol et de la

violence dont l’application ne présente aucune particularité59.

Au contraire, l’erreur est l’objet de trois textes spéciaux. Selon l’article 2052 alinéa 2, l’erreur

de droit n’est pas une cause de nullité. L’erreur sur l’objet de la contestation ou sur la

personne permet cependant d’attaquer la transaction60. La simple erreur de calcul doit être

réparée61.

D’autres dispositions permettent l’annulation de la transaction. Ainsi, l’admission de celle-ci

en cas de découverte d’un jugement définitif62, d’un titre nul lorsque celui-ci a servi de base à

la transaction63, de la fausseté des pièces64 ou d’un titre décisif ignoré des parties65. Par

contre, la transaction ne peut être attaquée pour cause de lésion66.

La nature de la transaction permet d’expliquer ces dispositions spécifiques. Par définition, les

parties renoncent à faire sanctionner en justice leur droit et se contentent de la sanction

conventionnelle qu’est la transaction.

Elles acceptent donc « un risque d’erreur sur la valeur juridique des prétentions en

présence »67 : elles ne sauront jamais quel était, en son principe et son étendue, leur droit ;

l’erreur de droit est donc exclue.

59 Art 2053 al 2 du Code civil.60 Art 2053 du Code civil.61 Art 2058 du Code civil ; Ex. Civ. 3e , 15 mai 1991, Bull. civ. III, n°145 ; JCP 91.IV.269 : les juges ne peuvent« réparer qu’une erreur purement arithmétique dans la transaction elle-même » ; en la cour d’appel avait décidé« que l’erreur de calcul de l’expert a nécessairement affecté la transaction puisque le rapport d’expertise, qui enest l’annexe, a servi de base à la négociation et que cette erreur doit être réparée ». Cassation.62 Art 2056 du Code civil.63 Art 2054 du Code civil.64 Art 2055 du Code civil.65 Art 2057 du Code civil.66 Art 2052 du Code civil.67 L. Boyer, thèse citée, p. 71et s.

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Elles renoncent aussi à connaître la valeur exacte du droit litigieux qu’elles abandonnent ou

qu’elles limitent ; de là, l’exclusion de la lésion.

L’exclusion de l’erreur de droit et de la rescision pour lésion des causes de nullité de la

transaction fait de ce contrat un acte dangereux. D’autant plus qu’en matière économique plus

qu’en toute autre matière, la transaction porte sur des montants déterminés attachés à des

droits litigieux. L’exclusion de la lésion de ce type de contrat peut alors permettre

l’élaboration de contrat totalement déséquilibré sans possibilité de recours et on connaît

l’importance et le danger de celle-ci pour une entreprise en difficulté.

De plus une altération du consentement peut être provoquée par le besoin dans lequel se

trouve le dirigeant en difficulté dans une hypothèse où il est créancier, pressé d’obtenir un

paiement auprès de son débiteur que celui-ci conteste ou tarde à régler.

Dans ce cas, un accord transactionnel peut être concédé par le dirigeant en difficulté68. Le vice

n’est pas l’erreur, mais la légèreté. Sauf lorsqu’elle s’identifie à l’absence totale de

consentement, elle n’est pas sanctionnée par le droit.

Dans le but de lutter contre de tels consentements irréfléchis, la loi ouvre dans certaines

hypothèses à certains contractants réputés influençables, une faculté de rétractation dans un

bref délai, après la conclusion d’accord transactionnel de ce type.

Ainsi, les victimes d’accident de la circulation69, d’actes de terrorisme ou de certaines

infractions70 peuvent revenir sur leur acceptation d’accord transactionnel avec leur assureur

dans les quinze jours.

Le dirigeant de l’entreprise en difficulté bien qu’on puisse considérer qu’il soit, en période de

crise, « influençable » ne bénéficie pas de cette possibilité, pas plus que de la possibilité

d’invoquer une éventuelle rescision pour lésion exclue du contrat de transaction.

Même si elle présente un certain nombre de dangers, la transaction conclue avant l’ouverture

de la procédure collective par le dirigeant en difficulté ne fait l’objet d’aucun contrôle à priori.

68 V. un récent arrêt, Cass. Com.,26 juin 2001 pourvoi n° 98-16.479., dans lequel une société mise ultérieurementen redressement judiciaire avait ainsi renoncé à poursuivre un client en recouvrement d’une créance encontrepartie d’un prêt et de l’attribution d’un marché qui, en réalité, ne lui fut jamais confié. Cette transactionayant cependant été conclue pendant la période suspecte, elle a fait l’objet d’une nullité sur le fondement de l’artL 621-107 (cf. sect. 2, §2)69 Code des Assurances, art. L 211-16.70 Code des Assurances, art. L 422-2.

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Cela se justifie, comme nous l’avons vu par le principe de liberté de gestion du dirigeant de

l’entreprise « in bonis ».

Or, de tels actes ne sont pas sans conséquences sur la santé économique de l’entreprise et

peuvent conduire à aggraver les difficultés de l’entreprise en alourdissant son passif ou pour

être plus précis en diminuant son actif.

De tels actes sont-ils susceptibles d’être remis en cause, une fois que l’entreprise a déposé son

bilan, dès lors qu’ils sont conclus dans la période suspecte ?

SECTION 2. LA POSSIBLE REMISE EN CAUSE DE LA

TRANSACTION À POSTERIORI ?

La période précédant le jugement d’ouverture est bien souvent propice à la fraude :

l’entrepreneur à qui tout réussissait éprouve souvent des difficultés à admettre les

conséquences d’un détournement de conjoncture ou d’erreurs de gestion.

Criblé de dettes, pressé par ses créanciers, il peut être conduit à accomplir un certain nombre

d’actes inconsidérés.

Ses finalités sont diverses. Il cherche au minimum à empêcher les poursuites, à se procurer

une trésorerie dont il a besoin pour surmonter une situation difficile qu’il croit provisoire ou à

retarder la révélation de l’état de l’entreprise. Par sa souplesse, sa rapidité et sa discrétion la

transaction peut se présenter comme un instrument efficace pour réaliser ces objectifs

frauduleux.

Traditionnellement, le droit de la faillite prévoyait des règles permettant de combattre les

actes accomplis par le débiteur au cours de la période dite période suspecte71, qui va de la

cessation des paiements à l’ouverture de la procédure.

Mais, comme rien ne révèle aux tiers la cessation des paiements et que la période suspecte

peut durer jusqu’à dix-huit mois72, l’impératif de sécurité juridique interdit d’annuler tous les

actes du débiteur.

71 V. C. Saint-Alary-Houin et M.H. Monsérié, Nullités de droit et nullités facultatives, Jurisclasseur com., Fasc.2506 à 2515.72 Les dix-huit mois précédent l’ouverture.

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Les anciens articles 107 et 108 de la loi de 1985 devenue respectivement articles L 621-107 et

L 621-108 du Code de commerce visent donc seulement certains de ces actes : ceux qui

paraissent le plus évidemment ou probablement frauduleux.

La transaction peut ainsi avoir été conclue dans cette période qui s’écoule de la date de la

cessation des paiements à la date du jugement d’ouverture de la procédure collective, lorsque

le débiteur aux abois est prêt à tout.

Durant cette période suspecte, pour que la transaction soit annulée, encore faut-il qu’elle

puisse entrer dans les différentes catégories d’actes nuls visés par le législateur.

Si la transaction fait sans conteste partie des actes énumérés par l’article L 621-108, la nullité

de celle-ci est loin d’être automatique car dans ce cadre la nullité est soumise à condition et

elle est de plus seulement facultative (§1).

Un contrôle a posteriori efficace de tels actes devrait donc résulter d’une nullité systématique

de tels actes tel que le prévoit l’article L 621-107. Cependant, l’inclusion de la transaction

dans les actes énumérés par l’article L 621-107 est, de par sa nature, loin d’être unanimement

approuvée par la doctrine. Il convient donc de voir si la transaction doit faire partie des actes

nuls de droit lorsqu’ils sont accomplis dans la période suspecte (§2).

§1. LA NULLITE DE LA TRANSACTION SUR LE FONDEMENT DE

L’ARTICLE L 621-108 : UNE NULLITE FACULTATIVE ET

CONDITIONNELLE

Au terme de l’article L 621-108, « les paiements pour dette échues effectués après la date de

cessation des paiements et les actes à titre onéreux accomplis après cette même date peuvent

être annulés si ceux qui ont traité avec le débiteur ont eu connaissance de la cessation des

paiements ».

Ce texte permet de sanctionner tous les agissements du débiteur dès lors que le tiers avec

lequel il a traité connaissait son état de cessation des paiements.

La transaction pourra si les conditions légales sont réunies être annulés sur ce fondement (A),

mais il s’agit pour le tribunal d’une simple faculté et non d’une obligation (B).

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A. UNE NULLITE CONDITIONNELLE

Pour pouvoir être annulée sur le fondement de cet article L 621-108, la transaction doit

répondre à des conditions objectives mais également à une condition subjective.

1. Les conditions objectives

Les conditions objectives tiennent tout d’abord à la nature de l’acte. En effet, peuvent être

annulés les paiements pour dettes échues et les actes à titre onéreux accomplis depuis la

cessation des paiements. Il convient donc de voir si la transaction entre dans ces catégories.

N’étant pas par nature un paiement de dette, seule la notion d’acte à titre onéreux est

susceptible d’englober la transaction.

Selon l’article 1106 du Code civil, le contrat à titre onéreux est celui qui assujettit chacune des

parties à donner ou à faire quelque chose.

La transaction se définit comme le contrat par lequel les parties terminent une contestation

née, ou préviennent une contestation à naître.

Même si l’article 2044 n’en fait pas état, cette contestation ne sera éliminée que par le biais de

concession réciproque73, les parties n’achetant la paix qu’au prix de leurs sacrifices

réciproques.

Le contrat étant intéressé de part et d’autre, la transaction est un contrat à titre onéreux. Elle

fait donc partie des actes annulables sur le fondement de l’article L 621-108.

On pourrait se demander si la transaction ou plus généralement l’acte à titre onéreux conclu

durant cette période suspecte doit avoir causé un préjudice à l’entreprise pour être annulé ?

Traditionnellement, c’est ce que la jurisprudence exigeait. Cette exigence, bien qu’elle n’était

pas expressément formulée par l’ancien article 108 de la loi de 1985 devenu article L 621-108

du Code de commerce, découlait de la règle « pas d’intérêt, pas d’action ».

Dans cette hypothèse, si la transaction ou d’une manière plus générale l’acte n’a pas été

conclu dans des conditions qui ont nui à l’entreprise, il n’y a pas de raison de l’annuler, cette

solution était acquise avant la loi du 25 janvier 1985 et était fondée sur le défaut d’intérêt de

la masse à agir74. La suppression de la masse a conduit à supprimer cette exigence.

73 V. C. Jarrosson, Les concessions réciproques dans la transaction, D. 97, Chron. p. 267.74 Cass. Com., 17 janvier 1962, Bull. Civ. IV, n°156 ; CA Montpellier, 28 février 1968, D. 1968. somm. p. 107

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C’est ce qui ressort d’une série d’arrêts de la Cour de Cassation qui n’exige plus que soit subit

un préjudice par le débiteur ou par ses créanciers75.

La Cour estime, en effet, que l’objet de l’action en nullité est seulement de reconstituer l’actif

de l’entreprise ce qui n’exige pas l’existence d’un préjudice.

2. La condition subjective

A cette condition objective tenant à la nature de l’acte s’ajoute une condition subjective.

Celle-ci porte sur la connaissance par le tiers de l’état de cessation des paiements de son

cocontractant : ce n’est que si le tiers avait connaissance de celui-ci lorsqu’il a contracté avec

le débiteur que la nullité de l’acte, de la transaction pour ce qui nous intéresse, pourra être

prononcée.

Cette connaissance est appréciée souverainement par les juges du fond sous réserve d’une

motivation précise76 de leur décision.

Elle doit également exister au moment où l’acte répréhensible a été commis.

Cela s’entend d’une connaissance précise77 et personnelle78 de la cessation des paiements elle-

même et non pas seulement du fait que le débiteur était dans une passe difficile79.

Le tiers doit savoir que l’actif disponible est insuffisant pour qu’il puisse faire face à son

passif exigible80.

Cette connaissance peut être prouvée par tous moyens puisqu’il s’agit d’établir un fait

juridique et la charge de la preuve incombe à l’auxiliaire de justice qui intente l’action en

nullité. La tendance récente de la Cour de cassation serait d’exiger que la connaissance de la

cessation des paiements par le tiers soit clairement établie81.

75 Cass. Com., 16 février 1993, Rev. proc. coll. 1994. 254, obs. B. Lemistre ; JCP E 1993, I.277, n°9, obs.Cabrillac et Petel ; B.R.D.A. 15.3.93, p. 10 ; et Cass. Com., 24 oct. 1995, RJ Com. 1996.204, obs. D. Martin.76 V. comme exemple de contrôles exercés par la Cour de Cassation : Cass. Com., 6 mars 1990, Rev. proc. coll.1991.1, p. 106 ; Cass. Com., 25 oct. 1994, Rev. proc. coll. 1995.449, obs. B. Lemistre.77 V. CA Paris, 13 janvier 1987, Rev. Proc. Coll. 1988, n°1, p. 78, obs Y. Guyon.78 Il ne suffirait pas d’établir que la cessation des paiements était de notoriété publique : Civ. 20 nov. 1911, D.P.1912.1.120. La jurisprudence procède à une appréciation in concreto de cette connaissance de la cessation despaiements.79 Civ., 18 avril 1866, D.P. 1866.1.260 ; V. cependant, CA Dijon, 1re ch. Sect. C, 7 juin 1989, Rev. proc. coll.1991-1, p. 106, obs. Y. Guyon qui estime la connaissance de la cessation des paiements établie si le tiers a étéavisé par lettre des difficultés de son client80 CA Rennes 2e ch., 10 juill. 1981, Juris-data, n° 040730.81 Cass. Com., 31 mars 1998, RJDA 8/9, 1998, n°1015, p. 743.

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La transaction étant un acte à titre onéreux, elle pourra être annulée sur le fondement de

l’article L 621-108 dès lors que le tiers contractant avait connaissance de l’état de cessation

des paiements.

On imagine facilement la difficulté pour l’auxiliaire de justice de rapporter une telle preuve

car si le tiers peut très certainement avoir eu connaissance des difficultés que connaissait

l’entreprise au moment où il a accepté de transiger (difficultés qui l’ont certainement incité à

rechercher un accord transactionnel avec le débiteur), il n’a objectivement aucun moyen, sauf

à être uni par un lien de parenté ou d’affaires très fort (cas du conjoint ou du banquier82),

d’être au courant de l’état de cessation des paiements de son cocontractant.

De plus, quand bien même le tiers contractant connaissait l’état de cessation des paiements du

dirigeant en difficulté, la nullité de la transaction conclue entre eux durant la période suspecte

n’est pas automatique. Le tribunal reste libre de la prononcer ou pas.

B. UNE NULLITE FACULTATIVE

Le prononcé de la nullité du contrat à titre onéreux accompli pendant la période suspecte n’est

pas une obligation pour le tribunal, elle demeure facultative pour celui-ci.

Le Tribunal dispose d’un pouvoir total d’appréciation83 et cette liberté d’appréciation échappe

au contrôle de la Cour de cassation.

Le Tribunal doit cependant exercer le pouvoir qui lui est attribué. Il ne saurait prononcer la

nullité de manière automatique en s’appuyant sur la seule connaissance par le tiers de l’état de

cessation des paiements du débiteur.

La bonne ou mauvaise foi du tiers est souvent prise en compte dans l’appréciation des juges

du fond. La constatation de la bonne foi entraîne souvent le rejet de la demande de nullité et

inversement la mauvaise foi conduit à la nullité.

La transaction conclue par le dirigeant en difficulté et un tiers (fournisseur, créancier …)

pendant la période suspecte peut faire l’objet d’une nullité sur le fondement de cet article L

621-108.

82 V. pour le conjoint du débiteur : CA Rennes 2e ch. 5 juill. 1981, Juris-data n°040527 ; Pour un banquier qui nepouvait ignorer la cessation des paiements de son client en raison du solde débiteur de ses comptes : CA Rouen2e ch. 17 mars 1988, Rev. proc. coll. 1992, p. 68, obs. Y. Guillon.83 Paris, 2e ch. B, 27 févr. 1991, Rev. Proc. Coll. 1992, p. 68, obs. Y. Guyon.

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Cependant, celle-ci, quand bien même la transaction aurait porté atteinte aux intérêts de

l’entreprise en aggravant son passif ou en diminuant son actif, est loin d’être automatique.

En effet, doit d’abord être rapportée la preuve que le tiers contractant connaissait l’état de

cessation des paiements du dirigeant en difficulté et quand bien même cette preuve serait

rapportée, le Tribunal reste libre de prononcer ou non cette nullité.

Une protection efficace de l’entreprise contre les transactions disproportionnées accordées à

son détriment par le dirigeant en difficulté doit passer par une nullité « systématique » de tels

actes dès lors qu’ils sont accomplis pendant la période suspecte.

Mais pour aboutir à un tel résultat encore faut-il que la transaction fasse partie des actes

considérés comme nuls de droit par l’article L 621-107.

Si la pratique des tribunaux de commerce permet une telle nullité, celle-ci mérite néanmoins

de faire l’objet d’une discussion eu égard à la nature juridique du contrat de transaction.

§2. LA TRANSACTION ET LA NULLITE DE DROIT DE L’ARTICLE

L 621- 107

Lorsque l’acte à titre onéreux a été commis au cours de la période suspecte, il est susceptible

d’être annulé.

À coté des nullités facultatives que nous venons de voir, le législateur a consacré des nullités

de droit. Celles-ci s’imposent au juge.

L’article L 621-107 énumère sept cas de nullité obligatoire frappant des actes objectivement

et intrinsèquement anormaux compte tenu de la cessation des paiements de leur auteur.

Ces actes doivent être annulés dès que les dispositions sont réunies, que les parties soient de

bonne ou de mauvaise foi. Le tribunal n’a aucun pouvoir d’appréciation d’où l’appellation

classique de « nullité de droit ».

Le législateur n’a pas explicitement mentionné la transaction parmi les actes nuls de droit de

la période suspecte. Certaines juridictions du fond84 ont cependant qualifié la transaction de

contrat commutatif et ont admis que la transaction puisse être déséquilibrée au sens de

l’article L 621-107 du Code de commerce.

84 V. par ex. CA Paris, 10 juill. 1984 D. 1984, IR p.339, obs. A. Honorat ; CA Poitiers, 28 nov. 1990, Juris-Data,n° 0521117 ; CA Paris, 14 nov. 1996, Rev. Proc. Coll. 1998, p. 205, obs. B. Lemistre ; V. S. Neuville, latransaction suspecte, D. 2000 n°37, chron., p.571.

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La doctrine n’est pourtant pas unanime pour considérer que la transaction est un contrat

commutatif (A).

En outre, on peut se demander comment une transaction peut être déséquilibrée alors même

que l’on admet que les concessions réciproques consenties dans une transaction n’ont pas à

être d’égale valeur (B).

A. LA TRANSACTION EST ELLE UN CONTRAT COMMUTATIF ?

Selon l’article 1104 du Code civil, le contrat à titre onéreux peut être commutatif ou aléatoire.

Il est « commutatif lorsque chacune des parties s’engage à donner ou à faire une chose qui

est regardée comme l’équivalent de ce qu’on lui donne ou de ce qu’on fait pour elle. Lorsque

l’équivalent consiste dans la chance de gain ou de perte pour chacune des parties, d’après un

événement incertain, le contrat est aléatoire ».

La question de savoir si la transaction est un contrat commutatif ou aléatoire est une question

controversée depuis longtemps, la doctrine étant partagée entre ces deux tendances.

Cette question est renouvelée dans l’hypothèse d’une transaction conclue au cours de la

période suspecte.

Or aucune des ces deux tendances ne fait référence à cette situation alors même qu’elle revêt

un grand intérêt pratique car si le contrat commutatif fait partie des actes annulables de droit

sur le fondement de l’article L 621-107, cet article ne s’applique pas aux contrats aléatoires.

L’appauvrissement étant le résultat de l’aléa voulu entre les parties et « l’aléa chassant la

lésion », ces contrats ne peuvent être contestés dans le cadre de la disposition énoncée85.

Alain Bénabent, qui représente l’opinion minoritaire, classe la transaction parmi les contrats

aléatoires, du moins il estime que « tout se passe comme si c’était un contrat aléatoire ».

Selon lui, « le rapport entre les sacrifices que consent chaque partie et les avantages qu’elle

recueille dépend bien de l’appréciation qu’elles font de leurs chances de gain et risque de

perte dans le procès, et ce procès constitue bien un événement incertain.

Celui qui transige agit exactement comme celui qui cède un droit litigieux à la seule

différence qu’il le cède à son adversaire : il « monnaie » sa chance de gain contre un

85 V. CA Paris 25e ch. Sect. B, 13 juin 1988 : Rev. proc. coll. 1989-1, p. 48, n°4, obs. Soinne.

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avantage évalué arbitrairement, favorable s’il eût perdu le procès et défavorable s’il l’eût

gagné.

La seule différence est qu’il ne saura jamais s’il a fait une bonne ou mauvaise affaire puisque

le procès est éteint par la transaction.

Mais cela n’enlève rien au fait que le contrat constitue de la part des deux parties une

évaluation de chances et de risques liés à un événement incertain à savoir ce qui aurait été

jugé.

Que cet événement doive demeurer incertain à jamais n’enlève pas cette incertitude, tout au

contraire : on ne peut donc pas dire que le contrat est commutatif»86.

Cependant, il a été souligné par certains auteurs que si la transaction peut comporter un aléa,

celui-ci ne réside pas dans une confrontation avec le procès comme le propose Alain

Bénabent car la transaction a justement pour objet de supprimer tout élément d’incertitude

tenant à un éventuel procès.

« Comme le procès n’aura pas lieu, il n’y aura pas de gain ou de perte à attendre : de ce

point de vue, il n’est pas possible d’affirmer que le contrat est aléatoire »87.

L’autre partie de la doctrine, majoritaire88, à la suite du doyen Louis Boyer considère que la

transaction est un contrat commutatif :

« L’analyse de la prestation de chaque partie permet d’écarter l’opinion faisant de la

transaction un contrat aléatoire : non seulement, en effet, la transaction est possible en

l’absence de tout aléa mais la prestation de chacun est entièrement déterminée au moment de

sa conclusion ; c’est une renonciation au droit d’action ; il faut donc conclure au caractère

commutatif du contrat »89.

La transaction étant une renonciation réciproque au droit d’action, elle est nécessairement

commutative : la renonciation au droit d’action de l’un est regardée comme l’équivalent de la

renonciation au droit d’action de l’autre.

Cependant, l’hypothèse envisagée par Laurent Boyer est celle d’une transaction pure90, or il

est rare que les parties se contentent d’une simple renonciation réciproque à leur droit

d’action91.

86 A. Bénabent, Droit civil, Les contrats spéciaux, Montchrestien, coll. Domat droit privé, 5e éd., 2001, n° 1002,p. 61987 S. Neuville, op. cit., n°4.88 V. par ex., P. Malaurie et L. Aynès, Les contrats spéciaux, Cujas, 1998, 12e ed. ; D.Veaux, Juris-ClasseurCivil, art 2044 à 2058, fasc. 10, n°106 ; F. Boulan, La transaction en droit privé positif, thèse, Aix, 1971, n°323,p. 315.89 L. Boyer, thèse préc., p. 470 et s.90 L. Boyer, thèse préc., p. 14 : « c’est l’hypothèse où chacun abandonne en partie ses prétentions originaires quiconstitue la transaction type, qui contient à l’état pur le caractère transactionnel (certains pandectistes allemands

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Les transactions sont le plus souvent conclues (surtout pour la partie qui renonce à intenter le

procès) moyennant une compensation, le plus souvent pécuniaire.

Dans cette hypothèse, la renonciation à agir en justice est un élément nécessaire mais non

certainement un élément suffisant : la concession s’analysera comme une renonciation au

droit d’action couplée à l’abandon d’un élément substantiel.

Rien n’empêche alors dans cette hypothèse que cet élément substantiel soit soumis à un

certain aléa, certains auteurs ayant alors soutenu que le contrat serait commutatif ou aléatoire

selon la nature des sacrifices consentis92.

Un certain nombre d’éléments nous empêche cependant de retenir une telle solution.

En premier lieu, comme l’ont fort bien démontré certains auteurs93, cette opposition entre

contrat commutatif et contrat aléatoire n’est pas aussi tranchée que l’on pourrait le croire.

Ainsi, selon Fernand Grua, la distinction suggérée par l’article 1104 du Code civil recèle

« une certaine part d’artifice ».

En effet, tout contrat à titre onéreux « assujettit chacune des parties à donner ou à faire

quelque chose 94 et cette chose est toujours regardée comme l’équivalent de ce qu’on lui

donne ou fait pour elle »95 même « lorsque l’équivalent est d’une nature particulière et

consiste en une chance de gain ou de perte96 .

Cette formulation fait du contrat aléatoire une variété de contrats commutatifs, un ensemble

inclus dans celui des contrats commutatifs. Ce n’est pas parce qu’un contrat est aléatoire

qu’il cesse d’être commutatif ».

désignent cette hypothèse sous le nom de reiner Vergleich, transaction pure) ; c’est donc sur elle qu’il convientdésormais de raisonner ».91 Cette vision serait réductrice, et on pourrait lui reprocher d’aboutir à une transaction sans concessionssubstantielles. La jurisprudence a retenu sans ambiguïté que la renonciation concerne, certes le droit d’agir, maisen premier lieu des éléments de fond. Les concessions doivent représenter « un sacrifice réel et chiffrable de partet d’autre » déclare la CA de Paris (CA Paris 11 juin 1975, JCP 1976, II, n°18357, note Assouline). La Cour decassation quant à elle requiert régulièrement les concessions réciproques, mais n’a pas eu l’occasion de direexpressément que celles-ci devaient s’entendre de concessions substantielles.92 V. l’exemple de G. Baudry - Lacantinerie, Traité théorique et pratique de droit civil, 3e éd., Librairie duReceuil J.-B. Sirey, t. III : Des contrats aléatoires, du mandat et du cautionnement, de la transaction par A.Wahl, Paris, 1907. n°985, p. 621 : Cet auteur a pris l’exemple d’une transaction au terme de laquelle une partieabandonne sa prestation moyennant versement d’une rente viagère que l’autre partie s’oblige à lui servir ; unetelle transaction est un contrat aléatoire, par contre si cette même partie s’oblige à verser à la première partie uncapital, dans ce cas la transaction serait un contrat commutatif.93 V. F. Grua, les effets de l’aléa et la distinction des contrats aléatoires et des contrats commutatif, RTD civ.1983, p. 287, n°45.94 Art 1106 du Code civil.95 Art 1104 du Code civil.96 Art 1104 al 2 du Code civil.

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En second lieu, la finalité des procédures collectives semble en elle même trancher le débat :

celle-ci devrait interdire le recours à une transaction déséquilibrée dans la période suspecte

dans le souci de favoriser le redressement de l’entreprise et d’éviter la dispersion des actifs de

cette même entreprise.

Bien que le législateur ne l’ait pas expressément mentionné parmi les actes nuls de droit de la

période suspecte, la poursuite de la finalité des procédures collectives ne peut en effet tolérer

des transactions qui ont abouti à brader certains biens.

Il convient alors de se reposer sur le caractère commutatif de la transaction pour la remettre en

cause dès lors qu’elle est conclue dans la période suspecte. On peut d’ailleurs souligner que la

Cour de cassation a déjà fait application de l’article L 621-107 I al 2 à des contrats comportant

un aléa dès lors que l’évaluation des prestations était possible.

Ainsi, la commutativité a été étendue à des contrats comportant un aléa afin de prononcer la

nullité de droit de la période suspecte. Cela démontre bien la relativité de la distinction

formulée par l’article 1104 du Code civil.

La transaction semble à la vue de ces éléments s’analyser en un contrat commutatif. Elle

rentre donc dans la catégorie des actes nuls de droit de la période suspecte, encore faut-il

qu’elle soit disproportionnée. Or, il convient de se demander si la transaction, en vertu de sa

nature, peut donner naissance à un contrat déséquilibré.

B. LA TRANSACTION PEUT-ELLE ETRE UN CONTRAT DESEQUILIBRE ?

L’article L 621-107 du Code de commerce prévoit que « tout contrat commutatif dans lequel

les obligations du débiteur excèdent celle de l’autre partie » est nul s’il a été fait par le

débiteur depuis la date de la cessation des paiements. Seules seront donc annulées les

transactions comportant un excès notable au préjudice du débiteur.

Il convient pourtant de se demander si la transaction peut être un contrat déséquilibré.

En premier lieu, la transaction étant un contrat commutatif, elle est par essence un contrat

dont l’équilibre a été librement choisi par les parties97.

97 Aristote écrivait dans son livre sur la justice au cœur de l’Ethique à Nicomaque que « ces commutations sontvolontaires car leur principe est librement consenties », Livre V, chap. II, §13, GF-Flammarion, 1992, p. 141.

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Cependant, de tels contrats ne sont pas toujours équilibrés comme l’atteste l’existence de

contrats commutatifs présentant un déséquilibre entre le prix convenu par les parties et la

valeur du bien ou du service, objet du contrat98.

Mais, c’est surtout en raison de ses caractéristiques propres que cette question parait

troublante.

Cela d’abord en raison du fait que les concessions réciproques, cause de l’engagement de

chacune des parties à la transaction, ne sont pas assujetties à une stricte égalité.

D’ailleurs, si l’on retient la conception de Laurent Boyer selon laquelle les concessions

réciproques ne portent que sur une renonciation à un droit d’action, la transaction ne pourra

jamais être déséquilibrée puisque chaque partie renonce à la même chose : à une action en

justice.

Mais, même lorsqu’on ajoute des éléments substantiels (de nature pécuniaire ou autre) à la

renonciation au droit d’action, la jurisprudence continue de relever que la stricte égalité n’est

pas une nécessité99.

Ajoutons à cela que le droit commun de la transaction exclut le recours à la rescision pour

cause de lésion pour ce type de contrat100, le législateur semblant exclure par là même toute

idée de déséquilibre entre les parties.

La jurisprudence ne retient pourtant pas cette conception. Elle admet qu’un contrat de

transaction puisse être déséquilibré101.

A cet égard, les concessions doivent être réelles et chiffrables c’est-à-dire qu’elles doivent

non seulement exister mais également être quantifiables102.

Reste alors à savoir à partir de quel déséquilibre une transaction pourra être considérée

comme annulable.

Le législateur, comme pour tout contrat commutatif déséquilibré conclu durant la période

suspecte, a exclu tout recours à une quelconque méthode mathématique en utilisant seulement

la notion de déséquilibre notable. Cette notion évoque l’idée de lésion bien que le terme ne

soit pas utilisé.

98 V. V. Lasbordes, Les contrats déséquilibrés, thèse, Toulouse, janv. 2000.99 La jurisprudence rappelle régulièrement qu’est une transaction l’accord qui met fin à un litige et qui comportedes concessions réciproques « quelle que soit leur importance relative » : V. par ex. Cass. Soc., 13 mai 1992,Bull. Civ. V, n°307 ; RTD civ. 1992, p. 783, obs. P.-Y. Gautier.100 Art 2052 du Code civil.101 V. par ex CA Paris, 14 nov. 1996, Juris-Data, n°023177. La transaction est annulée car « non seulement laSCI…a obtenu le remboursement de la majeure partie de sa créance, mais en contrepartie, elle n’a strictementrien apporté, puisqu’elle s’est contenté de renoncer à sa créance, laquelle était de toute manière irrécouvrable ».102 V. CA Paris, 11 juin 1975, JCP 1976, II, n°18357, note Y. Assouline.

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Cette notion de déséquilibre notable est cependant ambiguë car selon Jean Huet103 « la

disproportion entre les prestations doit s’apprécier tant objectivement que subjectivement ».

« Objectivement » parce que le déséquilibre doit être « sensible, appréciable, évaluable »104 et

se déduire d’une comparaison mathématique et économique des prestations.

Le juge doit alors être, en raison de la nullité de droit qu’encourt l’acte, le plus objectif

possible.

Cependant, comment être objectif lorsque la jurisprudence n’exige pas dans le contrat de

transaction que les concessions soient d’égale valeur. Annuler uniquement les transactions

avec un déséquilibre flagrant risque de réduire considérablement les nullités de transactions

sur ce fondement, un tel déséquilibre étant en pratique rare.

Le juge doit alors recourir à une appréciation « subjective » : l’importance du déséquilibre

devant révéler la mauvaise foi des contractants, le déséquilibre étant tel que les parties n’aient

pas pu ne pas s’en rendre compte.

Une présomption de connaissance de cet état particulièrement avantageux peut même être

mise à la charge du cotransigeant, présomption qu’il conviendra de ne pas confondre tout de

même avec celle de la connaissance de l’état de cessation des paiements.

En effet, le juge n’hésite pas à traquer les montages financiers qui révèlent un déséquilibre

objectif dont l’importance établit en quelque sorte la mauvaise foi des contractants105.

La Cour de cassation a ainsi récemment rejeté un pourvoi106 contre un jugement prononçant la

nullité de droit d’une transaction conclue pendant la période suspecte dans laquelle un salarié

se faisait réembaucher en contrepartie de l’abandon de son indemnité de licenciement.

La Cour a jugé que bien que le salarié abandonnait une créance de 1 500 000 F soit environ

228 693 euros (dont les chances de recouvrement étaient cependant très aléatoires), cela ne

compensait nullement l’excès de charge créé pour la société, contrainte après avoir licencié ce

salarié, de l’embaucher à nouveau en qualité de directeur commercial : le coût salarial annuel

de cette réembauche était proche d’un million de francs alors que la nécessité d’un tel poste

n’était nullement justifiée.

103 V. CA Paris, 19 mars 1979, D. 1981, Juris. p. 192 note J. Huet.104 J. Huet, note préc., p. 193.105 G. Blanc, Nullités de la période suspecte, Rev. proc. coll. 2002, n°4 déc., p. 275 point n°5.106 Cass. Com., 27 nov. 2001, pourvoi n° 98-21. 887 cité par G. Blanc, op. cit.

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39

La transaction devant, malgré l’existence de divergences doctrinales sur ce point, s’analyser

en contrat commutatif, elle fait partie des actes nuls de droit de la période suspecte mais ne le

sera que lorsque les obligations du débiteur excèdent notablement celle de l’autre partie.

En revanche, lorsque le déséquilibre est seulement léger, la transaction conclue après la

cessation des paiements ne pourra faire l’objet d’une nullité de droit de l’article L 621-107 du

Code de commerce, les concessions réciproques n’ayant pas à être d’égale valeur.

Elle pourra, cependant, faire l’objet d’une nullité facultative mais seulement comme nous

l’avons déjà dit si le cotransigeant avait connaissance de l’état de cessation des paiements,

l’art L 621-108 n’exigeant pas de déséquilibre dans cette transaction comme fondement de la

nullité.

Même si, comme nous venons de la voir, elles risquent d’être remise en cause ultérieurement

(dès lors qu’elles sont accomplies pendant la période suspecte) le dirigeant de l’entreprise en

difficulté cherchera souvent à éviter le recours à la justice pour régler les difficultés qu’il a

avec ses créanciers, en leur proposant des transactions.

Cependant ces « règlements amiables » de type individuel sont destinés à prévenir autant de

litiges individuels qui pourrait en cas d’aggravation conduire à l’ouverture d’une procédure

collective.

Un autre type de règlement amiable, le règlement amiable institué par la loi de 1984

(complétée et modifié par la loi de 1994) vise, lui, à éviter directement l’ouverture d’une

procédure collective. Il permet de prendre en compte dans leur ensemble les difficultés de

l’entreprise. Les transactions individuelles n’ont d’autre ambition que de faire patienter

quelques créanciers le plus longtemps possible : elles font figure d’expédients isolés. La

sauvegarde de l’entreprise exige davantage de réalisme : c’est en bloc qu’il convient de

supputer les difficultés, afin de les prévenir, ou de les traiter à temps.

Seul un accord transactionnel conclu avec les principaux créanciers pourra permettre à

l’entreprise en difficulté de se redresser et d’éviter ainsi l’ouverture d’une procédure. Il

convient cependant de se demander si cet accord amiable est juridiquement une transaction au

sens de l’article 2044 du code civil.

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CHAPITRE 2. LA POSSIBILITE DE RECOURIR A UN ACCORD DE

REGLEMENT COLLECTIF DES DIFFICULTES AUX EFFETS

TRANSACTIONNELS : L’ACCORD AMIABLE

Lorsque l’entreprise donne des signes de défaillances, ses dirigeants qui en prennent

conscience tentent en général de trouver des solutions qui pourrait permettre d’y remédier et

ainsi de sauver leur entreprise. Ces solutions passent très souvent par des transactions

conclues individuellement par le dirigeant de l’entreprise en difficulté avec ses créanciers.

Sont cependant, plus spécifiques à cette hypothèse, les modes conventionnels de règlement

des difficultés qui se traduisent par l’intervention d’un tiers dans la vie de l’entreprise et qui

prennent la forme d’accords conclus entre la grande majorité des créanciers et le débiteur.

Il y a, en effet, toujours eu des conventions conclues entre les créanciers et le débiteur en

difficulté.

L’idée à l’origine de telle convention est en soi intéressante. L’accord conclu entre le débiteur

en difficulté et ses créanciers permet d’éviter l’ouverture d’une procédure judiciaire. Les

créanciers espèrent obtenir en contrepartie de leur sacrifice un paiement plus important que

celui qu’ils obtiendraient dans le cadre de la procédure collective.

Déjà connus sous l’empire du droit antérieur, qu’il s’agisse du concordat préventif ou du

règlement transactionnel107, ces contrats collectifs se sont récemment développés : la loi du 1er

mars 1984 a en effet, prévu la faculté de désigner un conciliateur aux fins de règlement

amiable.

La finalité de cette procédure de règlement amiable, quelque peu modifiée par la loi du 10

juin 1994108, est de permettre un sauvetage de l’entreprise en difficulté en dehors de toute

décision de justice de manière rapide et confidentielle. Schématiquement, le chef d’entreprise

saisit le président du tribunal de commerce ou de grande instance aux fins de désignation

d’un conciliateur, celui-ci a pour mission de rapprocher le débiteur de ses principaux

107 Prévue par la loi du 2 juillet 1919 qui s’analysait en un accord entre le débiteur et ses créanciers, de natureexclusivement contractuelle mais devait être voté par la majorité des créanciers alors que le règlement amiablepeut ne reposer que sur le consentement des principaux créanciers. On peut également citer le règlement amiablehomologué crée ultérieurement par la loi du 25 août 1937 qui ne concernait que les créanciers chirographaires etqui supposait une intervention judiciaire par la voie de l’homologation.108 Inséré aux articles L. 611-3 à L 611-6 du Code de commerce.

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créanciers et de parvenir à un accord selon lequel en contrepartie de sacrifices financiers

consentis par ses derniers, l’entreprise s’oblige à prendre des mesures de redressement.

L’accord amiable est un véritable accord transactionnel conclu entre les créanciers et le

débiteur en difficulté dans le but d’éviter l’ouverture d’une procédure collective. Cependant

au vu de ses éléments constitutifs il semble que l’on ne puisse pas qualifier juridiquement

l’accord amiable de transaction au sens de l’art 2044 du code civil (Section 2). Mais avant de

parvenir à cette démonstration il convient dans un premier temps de voir, de quelle manière et

dans quel domaine celui ci s’élabore (Section 1)

SECTION 1. L’ELABORATION DU REGLEMENT AMIABLE : CADRE

DE L’ACCORD AMIABLE

Le règlement amiable « version 1984 » était doté d’un régime juridique très sommaire, certes

conforme à la nature contractuelle de l’accord amiable mais non susceptible d’abriter les

contractants des menaces auxquelles ils étaient exposés, et il a été assez peu appliqué109.

Aussi la réforme du 10 juin 1994 en a-t-elle étendu le domaine en même temps qu’elle

renforçait les pouvoirs du juge accentuant ainsi la dimension judiciaire du règlement amiable

de droit commun.

Mais l’essentiel, qui figure désormais dans le titre I du Livre VI demeure inchangé : le

règlement amiable repose toujours sur une convention. Quatre articles seulement sont

consacrés au règlement amiable : les articles L 611-3 à L 611-6.

Le petit nombre de textes qui lui est consacré n’est pas le signe d’un désintérêt du législateur

mais est révélateur du souci de conserver sa souplesse et sa rapidité à cette technique de

traitement des défaillances des entreprises.

Le domaine d’application du règlement amiable est très large car toutes les entreprises sont

susceptible « d’en profiter » à l’exception des exploitations agricole qui sont soumises à un

régime propre (§1).

La conclusion de cet accord suppose que le juge nomme un conciliateur et que celui-ci mène à

bien la mission qui lui est confiée (§2).

109 Sauf vers 1992 à l’occasion de la crise de l’immobilier.

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§1. LE DOMAINE DU REGLEMENT AMIABLE

Le règlement amiable est de nature conventionnelle, il a cependant un champ d’application

bien délimité. En pratique celui-ci est assez large car l’article L 611-13 pose des critères qui

permettent à toute entreprise de bénéficier du règlement amiable.

Ce dernier exige en effet que l’entreprise qui en sollicite le bénéfice soit de nature

commerciale ou artisanale (A), qu’elle éprouve une difficulté juridique, économique ou

financière ou des besoins ne pouvant être couverts par un financement adapté aux possibilités

de l’entreprise (B) et que les dirigeants exposent les moyens de faire face aux difficultés (C).

A. L’ENTREPRISE BENEFICIAIRE DU REGLEMENT AMIABLE

Depuis la loi du 10 juin 1994, le domaine du règlement amiable a été considérablement

étendu. En effet depuis cette date, le règlement amiable est ouvert à toute entreprise

commerciale ou civile et l’exigence de la tenue de comptes prévisionnels est supprimée de

sorte que l’importance et la nature de l’entreprise ne sont plus des conditions d’accès à cette

procédure de règlement privé des difficultés.

Le règlement amiable de droit commun est en effet ouvert en principe à toute entreprise

commerciale ou artisanale ainsi qu’à toute personne morale de droit privé. Par ces

dispositions édictées à l’article L 611-3 et L 611-5, il est fait peu d’importance à la forme de

l’entreprise (sociétés commerciales, groupements d’intérêts économiques…). Sont en

revanche exclues comme n’étant pas des « personnes morales de droit privé » selon l’article L

611-5 les entreprises individuelles (sauf les sociétés civiles), les associations, les

groupements d’intérêt économique n’exerçant pas une activité commerciale ou artisanal.

Avant la loi de 1994, il résultait de la pratique que seules les structures importantes

bénéficiaient du règlement amiable. Cette situation non prévue par les textes résultait de

l’interprétation doctrinale de l’art 35 de la loi de 1984. Selon la doctrine de l’époque, cet

article permettant l’accès au règlement amiable, ne visait que les entreprises assujetties à la

tenue des nouveaux documents comptables rendus obligatoires par la même loi.

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Cette interprétation s’est cependant révélée beaucoup trop restrictive, le texte n’effectuant lui-

même aucune distinction. Dès lors toute entreprise qui tenait des comptes prévisionnels même

de manière spontanée pouvait avoir accès au mécanisme du règlement amiable110.

Cependant qu’elle soit tenue de manière obligatoire ou spontanée, l’exigence d’une

comptabilité prévisionnelle avait pour résultat d’exclure la plupart des P.M.E qui ne tiennent

qu’une comptabilité rétrospective.

Dès lors la loi de 1994 a largement ouvert le règlement amiable en supprimant toute référence

à la tenue de comptes prévisionnels.

B. LA SITUATION DE L’ENTREPRISE

Pour que l’entreprise puisse bénéficier du règlement amiable, sa situation doit répondre aux

deux conditions cumulativement requises par l’article L 611-3 alinéa 1er du Code de

commerce.

En premier lieu, elle ne doit pas être en cessation des paiements. Une telle condition s’impose

avec évidence car dès lors que l’entreprise est en état de cessation des paiements, elle doit se

soumettre à une procédure collective.

La seconde condition recèle quand à elle plus d’incertitudes : l’entreprise doit éprouver une

difficulté juridique, économique ou financière ou des besoins ne pouvant être couverts par un

financement adapté aux possibilités de l’entreprise. Ainsi toutes sortes de difficultés sont

prises en compte, ce qui permet une ouverture large du règlement amiable dans l’optique

d’appréhender le problème à sa source, sans attendre ses répercussions financières. Ce critère

« volontairement imprécis » favorise en effet la prévention en permettant l’ouverture précoce

du règlement amiable, sous le contrôle du juge111.

Bien que le texte ne le précise pas, il ne fait aucun doute, comme le souligne d’ailleurs le

professeur Françoise Pérochon, que « la difficulté et/ou les besoins doivent être suffisamment

sérieux (…) et doivent constituer une menace sur la continuité de l’exploitation : ainsi le

débiteur doit être confronté à assez court terme à un problème grave qu’il ne peut résoudre

avec des moyens ordinaires, tel le recours à un simple crédit bancaire, et qui, non traité, met

en danger l’exploitation normale de l’entreprise »112.

110 C. Saint-Halary-Houin, op. cit. p. 149 n°264.111 F. Pérochon et R. Bonhomme, Entreprises en difficulté, Instruments de crédit et de paiement, LGDJ 5emeéd., 2001, p. 43 n°53.112F. Pérochon et R. Bonhomme, op. cit.

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Si l’entreprise n’est pas encore en état de cessation des paiements, elle le sera très

certainement si elle ne prépare pas un plan de redressement.

C. LA POSSIBILITE D’UN SAUVETAGE DE L’ENTREPRISE

La mise en œuvre du règlement amiable n’est pas automatique quand bien même les

conditions relatives à la personne concernée et à sa situation sont acquises.

En effet, le règlement amiable n’est envisageable que si l’entreprise concernée entend prendre

des mesures de redressement : l’article L 611-3 exige que le représentant de l’entreprise

expose sa situation financière, économique et sociale, les besoins de financement ainsi que les

moyens d’y faire face.

L’article 36 du décret du 1er mars 1985 prévoit que ce dernier, dans sa requête, « expose les

difficultés financières qui la motivent, les mesures de redressement envisagées ainsi que les

délais de paiement ou les remises de dettes qui permettraient la mise en œuvre de ces

mesures ».

Ces mesures, bien qu’elles ne soient encore que provisoires et qu’elles puissent être affinées

par la suite au cours de la négociation du règlement amiable, doivent être suffisamment

précises pour emporter la conviction du président du tribunal.

Les dirigeants doivent persuader ce dernier qu’avec un financement adapté, l’entreprise

pourra « être remise sur les rails »113 et pourra surmonter les difficultés qui demeureront

simplement passagères.

Cette étape réussie, sera alors désigné un conciliateur afin d’entamer le processus

d’élaboration du règlement amiable.

§2. L’ELABORATION DU REGLEMENT AMIABLE

le règlement amiable même s’il repose sur une base conventionnelle est une véritable

procédure qui nécessite le respect de certaines étapes.

La conclusion de l’accord amiable suppose en premier lieu que le juge nomme un conciliateur

(A) et que celui-ci mène à bien la mission hautement aléatoire qui lui est confiée, l’objectif

étant toujours de parvenir à un accord qui pourrait permettre de redresser l’entreprise (B).

113 C. Saint –Halary-Houin, op. cit., n°266 p. 150.

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A. LA DESIGNATION DU CONCILIATEUR

Dans la procédure de droit commun, seul le « représentant de l’entreprise » a qualité pour

demander la nomination d’un conciliateur, ce droit est par conséquent refusé au ministère

public, aux créanciers ou aux salariés114, le président du tribunal ne pouvant également se

saisir d’office.

A l’instar du professeur Pérochon, nous pensons qu’il est regrettable, au vu de l’objectif de

prévention, que la procédure ne puisse être engagée par ces derniers car l’abstention du

débiteur résultera souvent de son ignorance de la loi ou de sa mauvaise appréciation de la

situation115.

Un mandataire ad hoc pourra toujours, conformément à l’article L 611-3 al 1er être nommé

d’office par le président du tribunal afin de faire le point avec le débiteur sur sa situation et, si

celle-ci est susceptible d’un règlement amiable, de l’inciter à demander la désignation d’un

conciliateur (qui pourrait naturellement être le mandataire ad hoc).

La demande est donc déposée par « le représentant » de l’entreprise en difficulté, c'est-à-dire

par le chef d’entreprise ou par l’organe de représentation légale de la personne morale :

président directeur général ou directeur général dans les sociétés anonymes, gérant dans les

autres sociétés commerciales et sociétés civiles…

Cette demande est spontanée, ce qui préserve le caractère amiable du règlement et elle est

surtout discrète afin d’éviter que les difficultés de l’entreprise ne soient divulguées.

Elle est adressée au président du tribunal de commerce, si l’entreprise est commerciale ou

artisanale ou au tribunal de grande instance dans le cas contraire.

Une fois cette dernière reçue, le président peut faire convoquer le représentant de l’entreprise

pour recueillir ses explications, le procureur de la République en sera alors informé et ceci

afin d’éviter que le dirigeant ne mène des négociations parallèles auprès d’autres organismes

tels que les comités de restructuration.

Cette information permet ainsi une meilleure harmonisation des mesures de traitement116.

Le président du tribunal peut, avant de prendre sa décision, pour apprécier la situation du

débiteur, demander des renseignements de nature à lui donner une exacte information sur la

situation économique de l’entreprise ; il peut en effet au terme de l’article L 611-3 al 3

114 Y. Guyon, Le règlement amiable des difficultés des entreprises et les salariés, Dr. social 1985, p. 267.115 F. Pérochon et alii, op. Cit. n°55 p. 45116 C. Saint-Halary-Houin, op. Cit. n°270 p. 152

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« charger un expert de son choix d’établir un rapport sur la situation économique, sociale et

financière de l’entreprise », il peut également demander des renseignements à certains tiers

qui ne peuvent lui opposer le secret professionnel.

Il peut ainsi se renseigner auprès des commissaires aux comptes, des membres et

représentants du personnel, auprès des administrations publiques ainsi qu’auprès des

établissements bancaires ou financiers ou des services chargés de centraliser les risques

bancaires et incidents de paiements.

Ces demandes de renseignements risquant toutefois d’ébruiter les difficultés du débiteur et de

compromettre le redressement espéré, le législateur a prévu dans l’art L 611-6 que toute

personne qui a connaissance du règlement amiable est tenue au secret professionnel. Le

danger d’une divulgation de la fragilité de l’entreprise n’en est cependant pas moins réel.

Lorsqu’il estime être suffisamment informé, le président du tribunal dispose de pouvoirs très

étendus, voire discrétionnaires, pour déterminer la solution la plus opportune.

Ainsi « s’il lui apparaît que les propositions du débiteur sont de nature à favoriser le

redressement de l’entreprise117 » le président ouvre le règlement amiable.

Il désigne alors un conciliateur pour une période n’excédant pas trois mois qui peut être

prorogée d’un mois à la demande de ce dernier.

Si cette désignation n’intervient pas dans un délai d’un mois à compter de la demande, elle est

réputée non admise.

Le président du tribunal est totalement libre du choix de la personne du conciliateur. Le

président désigne la personne la mieux à même d’assumer cette fonction délicate : il peut

s’agir d’un administrateur ou d’un expert en diagnostic d’entreprise mais encore de personnes

reconnues pour leur compétence ou leur notoriété ; experts-comptables, gestionnaires,

avocats-conseils, magistrats consulaires ou encore des cadres de l’entreprise qui en

connaissent les rouages.

Il convient de relever que ce conciliateur n’est investi par la loi d’aucun statut spécifique, en

conséquence celui-ci n’est pas partie à la procédure. Il n’exerce en effet aucune fonction

d’assistance ou de représentation du débiteur. Sa mission consiste simplement à « favoriser le

fonctionnement de l’entreprise et à rechercher la conclusion d’un accord avec les

créanciers »118.

Il ne dispose cependant d’aucune prérogative particulière pour mener à bien cette mission.

117 Art 37, al.2, décr. 1er mars 1985118 C. Saint-Halary-Houin, op. cit. n°274 p. 155

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Tout le succès de son entreprise repose, comme l’écrit le professeur Mestre119, sur sa « force

de persuasion » : il doit convaincre les créanciers de faire confiance au débiteur et de lui

permettre par leur effort financier, de sauver l’entreprise.

Cette mission sera d’autant plus délicate qu’il n’a aucun avantage à leur faire miroiter, aucune

priorité en cas de redressement n’est conférée à ceux qui acceptent l’accord amiable.

Cependant certaines dispositions issues de la réforme du 10 juin 1994 sont de nature à

favoriser la participation des créanciers au règlement amiable.

Parmi celles-ci, il faut retenir essentiellement la possibilité pour le conciliateur de demander

la suspension provisoire des poursuites lorsqu’il estime que cette dernière serait de nature à

faciliter la conclusion de l’accord (art. L 611-4 III). Cette demande est adressée au président

du tribunal qui pourra ordonner celle-ci pour une durée n’excédant pas celle de la mission du

conciliateur.

La suspension provisoire des poursuites est seulement une faculté pour le président, qui doit

apprécier son opportunité et soigneusement peser le pour et le contre, elle est d’ailleurs très

peu utilisée par les juges tant et si bien qu’il est prévu de la supprimer dans le projet de

reforme des tribunaux de commerce120.

La suspension provisoire des poursuites présente de nombreux aspects bénéfiques pour la

conclusion de l’accord amiable, elle permet en premier lieu de rassurer les créanciers qui

acceptent de participer au règlement amiable en leur évitant d’être doublés par les autres

créanciers poursuivant utilement le débiteur pendant que ces premiers négocient.

Elle leur permet également d’éviter la tentation de « monnayer » leur participation au

règlement amiable contre un paiement partiel substantiel en violation de l’égalité des

créanciers car si la suspension est prononcée, aucun paiement ne pourra être effectué par le

débiteur.

Elle est enfin un moyen de pression sur les autres créanciers qui peut être de nature à les

inciter à participer à la conclusion de l’accord.

La suspension provisoire des poursuites procure un soulagement immédiat au débiteur car aux

termes de l’article L 611-14 IV, l’ordonnance de suspension provisoire des poursuites suspend

ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance a son origine

antérieurement à la décision d’arrêt des poursuites.

119 J. Mestre et M.-E. Tian-Pancrazi, Droit commercial, LGDJ 25e éd. 2001, n°1010.120 C. Saint-Halary-Houin, op. cit., n° 276 p. 156.

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L’arrêt des poursuites met le débiteur à l’abri des réclamations de ses créanciers ce qui

favorise la conclusion du règlement amiable.

Pour compenser le sacrifice consenti par les créanciers et pour compléter l’efficacité du

dispositif, l’article L 611-7 prévoit que sauf autorisation du tribunal, l’ordonnance qui

prononce la suspension provisoire des poursuites interdit au débiteur à peine de nullité, de

payer en tout ou en partie une créance antérieure à cette décision ou de désintéresser les

cautions qui acquitteraient des créances antérieures (cette interdiction ne s’appliquant

toutefois pas aux créances salariales).

Il est en outre fait interdiction au débiteur de faire un acte de disposition étranger à la gestion

normale de l’entreprise ou de consentir une hypothèque ou un nantissement. Cette dernière

mesure a pour objectif d’éviter toute fraude aux droits des créanciers.

La désignation du conciliateur est la pierre angulaire du règlement amiable, son objectif

principal est de parvenir à la conclusion d’un accord collectif entre le débiteur et ses

créanciers.

B. LA CONCLUSION DE L’ACCORD

L’accord amiable est un accord d’essence contractuelle. Il a pour objet d’adopter des mesures

nécessaires au redressement de l’entreprise en difficulté.

Le représentant de l’entreprise n’obtiendra ce règlement amiable de ses difficultés que s’il

présente des mesures solides pour y mettre fin.

Peuvent ainsi être envisagée la cession d’une branche d’activité ou la fermeture d’un

établissement peu rentable, la cessation de fabrication de certains produits ou au contraire

l’exploitation de nouveaux produits.

En règle générale, ce plan de redressement proposé par le chef d’établissement s’accompagne

souvent de compression d’effectifs : seront dans ce cas envisagées des mesures tendant à la

reconversion des salariés ou bien même le cas échéant des licenciements, d’où l’importance

d’informer les représentants du personnel de la préparation d’un plan de règlement amiable.

En contrepartie des mesures d’assainissements projetées par le débiteur, les créanciers

consentent des sacrifices financiers de nature à permettre le sauvetage de l’entreprise.

Ces sacrifices n’ont pas à être d’égale valeur entre les créanciers car les efforts consentis ne

sont pas les mêmes pour tous les partenaires à l’accord chacun étant libre d’être plus ou

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moins généreux, d’ailleurs d’un point de vue technique une égalité entre les créanciers serait

difficilement applicable dans la mesure où tous les créanciers ne sont pas nécessairement

connus.

Il ressort cependant de la pratique que les délais et remises tendent à s’aligner : chacun ne

s’engageant que parce que les autres s’engagent aussi et en fonction de ce qu’ils acceptent121.

La portée de l’accord est en outre variable.

Il peut réunir tous les créanciers et dans ce cas il sera automatiquement homologué par le

tribunal, mais il s’agit cependant là d’une hypothèse d’école dans la mesure où en l’absence

de procédure invitant les créanciers à se faire connaître, il est impossible pour le président de

savoir si tous les créanciers ont participés à l’accord, aussi nombreux que soient les

signataires.

En règle générale, l’accord lie les principaux créanciers seulement, il faut entendre par là les

titulaires des principales créances : on retrouve ainsi souvent les « créanciers institutionnels »:

Trésor, organismes de prévoyance et de sécurité sociale, banquiers122…

La participation des créanciers au règlement amiable est toujours volontaire, leur libre

consentement est une manifestation du caractère « amiable » du règlement.

Lorsque l’accord est conclu avec les principaux créanciers seulement, il est en principe

constaté dans un écrit signé par les parties et le conciliateur.

C’est la volonté commune qui lui donne sa force, aucune ratification par le tribunal n’étant

requise.

Cependant l’article L 611-14 VIII du Code de commerce prévoit que « le président du

tribunal peut également l’homologuer et accorder au débiteur les délais de paiement prévus à

l’article 1244-1 du Code civil pour les créances non incluses dans l’accord ».

Cette homologation, bien qu’elle n’augmente pas la force du règlement amiable, qui demeure

celle d’un contrat, confère au règlement amiable une « véritable sécurité juridique »123.

On comprend alors qu’en pratique nombreux sont les créanciers qui la demandent car elle est

censée être le signe que l’entreprise n’est pas en état de cessation des paiements, il convient

121 F. Pérochon et alii, op. cit. n°73 p. 62122 C. Saint-Halary-Houin, op. cit., n°284 p. 159 qui cite M. Mathieu, la participation du banquier au règlementamiable des difficultés des entreprises, JCP E 1986, 14805, p. 690 selon lequel les banquiers ont intérêt àparticiper à la négociation pour discuter les clauses du règlement amiable et sur le plan psychologique pour nepas être soupçonnés de faire échouer le redressement.123 C. Saint-Halary-Houin, op. cit., n°286 p. 161.

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cependant de rappeler que l’homologation ne fait pas obstacle au prononcé éventuel des

nullités de la période suspecte124.

Comme tout contrat, l’accord amiable doit, en vertu de l’article 1165 du Code civil, être

exécuté par les parties qui se sont engagées et seulement par elles.

Les créanciers qui ont consenti des délais de paiements ou des remises totales ou partielles de

dettes doivent respecter leurs engagements.

Aussi afin d’assurer l’efficacité des sacrifices consentis, l’article L 611-4 IX prévoit que

l’accord « suspend, pendant la durée de son exécution toute action en justice, toute poursuite

individuelle tant sur les meubles que sur les immeubles du débiteur dans le but d’obtenir le

paiement des créances qui en font l’objet ».

La situation des créanciers parties à l’accord est donc gelée, ils ne peuvent poursuivre le

débiteur en paiement, a fortiori ils ne peuvent non plus conforter leur position en prenant de

nouvelles garanties sur les biens du débiteur.

En contrepartie du répit que lui accordent les créanciers, le débiteur doit mettre en œuvre les

engagements qu’il a souscrits dans le règlement amiable. Ainsi doit-il accomplir toutes les

mesures qu’il s’est engagé à mettre en oeuvre lors de la négociation du « plan de

redressement ».

Comme tout contrat celui-ci doit donc être exécuté de bonne foi et les partenaires à l’accord

engageraient leur responsabilité en cas d’inexécution ou de mauvaise exécution.

Rappelons toutefois qu’eu égard à l’effet relatif des conventions, le règlement amiable ne

produit aucun effet à l’égard des tiers qui n’y sont pas parties, ainsi ces derniers peuvent

librement engager des poursuites individuelles ou des voies d’exécutions contre le débiteur,

ils ont également la faculté de déclencher la procédure de redressement ou liquidation

judiciaire.

Aussi afin de donner ses chances au règlement amiable, l’article L 611-4 VIII du Code de

commerce prévoit que le président du tribunal peut accorder au débiteur des délais de

paiements prévus à l’article 1244-1 du Code civil pour les créances non incluses dans

124 CA Rennes, 23 sept. 1998, JCP E 2000, n°27, p. 1078, obs. F.-X. Lucas justifiant cette position par l’absenced’autorité de la chose jugée quant au problème de la date de cessation des paiements de l’ordonnanced’homologation et confirmé par Cass. Com, 14 mai 2002, D. 2002 n°22 act. Juris. , p. 1837 obs. A. Lienhard oùil a été décidé que « ni l’ordonnance ouvrant le règlement amiable, ni l’ordonnance suspendant les poursuites, nil’ordonnance homologuant l’accord n’ayant autorité de chose jugée quant à la date de cessation des paiements,l’ouverture de la procédure de règlement amiable n’empêche pas le report de la date de cessation despaiements ».

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l’accord. Dans ce cas le décret précise que le président statue à l’égard de chacun des

créanciers concernés en la forme des référés.

Le règlement amiable de la loi de 1984 quelque peu modifiée par la loi de 1994 n’est en

réalité qu’une espèce du genre très répandu des « règlements à l’amiable » des difficultés que

peuvent rencontrer des partenaires économiques dans leur relation d’affaire. Il présente la

particularité de voir ses caractères fixés par la loi, alors que les autres espèces voisines restent

informelles.

D’une manière générale toutes ces solutions extra-judiciaires sont du domaine de la

transaction, où le droit des contrats se taille la part du lion.

Le règlement amiable institutionnel, par opposition aux divers autres règlements amiables,

propose aux entreprises un support juridique plus précis.

C’est « un lien entre l’ordre juridique étatique et les règlements transactionnels »125.

C’est une « formalisation du cadre de discussion »126 qui a une incidence sur le contenu de la

« transaction ». Cependant il convient de se demander si l’accord amiable est une transaction

au sens de l’article 2044 du Code civil.

Cette question n’est pas soulevée par la doctrine et pourtant il convient dans un souci de

rigueur juridique de clarifier la nature juridique véritable de l’accord amiable car si ce dernier

fait sans conteste partie de la famille des accords transactionnels, la question de son

assimilation à une transaction reste ouverte de sorte qu’il convient d’apporter une ébauche de

réponse à cette question.

SECTION 2. L’ACCORD AMIABLE : UN CONTRAT A « VALEUR DE

TRANSACTION »

La nature juridique de l’accord amiable fait l’objet de peu de commentaires de la part de la

doctrine et pourtant règne sur la question une certaine confusion.

125 A. Jeammaud, « La part du droit dans les règlements transactionnels », introduction du thème, III èmecolloque du CERCRID (Université de Saint-Etienne), 23 mai 1986.126 E. Serverin, « La transaction, contrat de droit privé », colloque préc. du CERCRID.

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Ainsi on n’hésite pas à qualifier le règlement amiable de règlement transactionnel127,

d’ailleurs c’est le nom que portait cette institution sous l’empire du droit antérieur, et

notamment suite à la loi du 2 juillet 1919 où ce dernier s’analysait en un accord conclu entre

le débiteur et ses créanciers et qui de nature exclusivement contractuelle, devait être voté par

la majorité des créanciers.

A la lecture des dictionnaires juridiques, il ressort sans grande surprise qu’un règlement ou

d’une manière plus générale une pratique transactionnelle est une pratique qui a la caractère

d’une transaction. Rappelons que la transaction se définit au terme de l’article 2044 du Code

civil « comme « le contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou

préviennent une contestation à naître ».

En adoptant un raisonnement purement logique, il est tentant d’adopter une vision

simplificatrice de la question qui nous permettrait d’aboutir à un syllogisme parfait : l’accord

amiable est un accord transactionnel, l’accord transactionnel est une transaction, donc

l’accord amiable est une transaction.

Cependant le souci de rigueur juridique qui nous anime ne nous permet pas de nous contenter

de ce raccourci aux fondements discutables mais nous incite au contraire à pousser la

réflexion.

Car si l’accord amiable a pour principal objectif d’éviter l’ouverture d’une procédure

collective, encore que l’on pourrait s’interroger sur le point de savoir si celui-ci termine ou

prévient une contestation née ou à naître comme l’entend l’article 2044 du Code civil (§1),

cela n’est pas suffisant pour qualifier l’accord amiable de transaction.

En effet, il est unanimement admis par la doctrine que sans concessions réciproques entre les

parties dans la renonciation à agir en justice, il n’y a pas de transaction128. Il convient alors de

s’interroger sur la présence ou l’absence de concessions réciproques dans la conclusion de

l’accord amiable (§2).

127 V. M. Bayle, De l’intérêt du règlement amiable, RTD com. N°41 janv.-mars 1988.128 V. C. Jarrosson, les concessions réciproques dans le contrat de transaction, D. 1997, chron. P.267 et s. ; P.Soulier, Existence et importance des concessions réciproques dans la transaction, RJS 1997, chron. N°19.

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§1. LA VOLONTE D’EVITER L’OUVERTURE D’UNE PROCEDURE

COLLECTIVE

La lecture des articles 2044 à 2058 du Code civil fait apparaître la transaction comme un

contrat à visée pragmatique, orienté vers le seul objectif de « terminer, ou de prévenir, une

contestation ».

En tant que contrat de droit privé, la transaction apparaît comme le résultat d’une relation de

négociation entre les protagonistes d’un conflit, dont le droit propre à cette convention

n’organise pas le déroulement : les conditions dans lesquelles ces négociations s’engagent, la

forme du cadre de la discussion, ne font pas partie de la définition de cette convention, qui

trouve dans ses dispositions particulières son régime propre, et dans les principes généraux du

contrat, son fondement juridique.

Dès lors, le cadre spécifique du règlement amiable n’est pas un obstacle à la qualification de

transaction de l’acte qui sera l’aboutissement de cette procédure.

D’ailleurs les professeurs Serverin, Lascoumes et Lambert n’hésitent pas à dissocier la

transaction, acte juridique, de l’action de transiger, qui désigne le processus interactif dans

lequel s’engagent les protagonistes d’un conflit129 et soulignent l’importance que revêt le

« cadre » d’interaction dans la détermination du contenu des échanges.

En effet, le but principal de l’accord amiable conclu entre le dirigeant de l’entreprise en

difficulté et ses créanciers est d’éviter une action en justice : l’ouverture d’une procédure

collective qui résulterait de l’impossibilité pour l’entreprise de faire face à son passif exigible

avec son actif disponible.

Dès lors, comme nous l’avons vu, la négociation doit avoir pour but la conclusion d’un

accord, par lequel les créanciers sollicités acceptent des délais de paiement, ou accordent des

remises de dettes.

Si cette mention n’est pas limitative, l’orientation de la discussion paraît difficile à élargir : on

pense immédiatement à un contrat de transaction par lequel les créanciers devront renoncer

partiellement à leurs créances et par conséquent à intenter une action sur ce fondement qui

peut prendre la forme d’une demande d’ouverture d’une procédure collective.

D’ailleurs la réalisation de cette convention n’a-t-elle pas pour effet de suspendre le droit

d’action des créanciers qui y ont souscrit.

129 E. Serverin et alii, Transactions et pratiques transactionnelles, Economica 1987, p. 19.

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Cependant il convient de revenir sur la cause même de l’institution de la transaction, en effet

celle-ci repose fondamentalement sur l’existence d’une contestation, l’inéluctabilité d’un

différend.

On peut se poser la question de savoir où est la contestation dans le cadre d’un règlement

amiable.

Celle-ci n’est pas impossible à concevoir : ainsi on peut imaginer un litige en germe entre le

dirigeant d’une entreprise en difficulté et un créancier sur le montant d’une créance suite à

une malfaçon ou une mauvaise exécution dans la prestation du dernier et soulevé par le

premier.

Dans cette hypothèse, le créancier plutôt que de se voir intenter une action en justice tendant à

la réduction de sa créance peut préférer accorder tout de suite une remise de dette en

considération de ce litige en germe au travers de sa participation au règlement amiable.

Certains créanciers peuvent également préférer renoncer à une partie de leurs créances en vue

d’éviter l’ouverture d’une procédure collective dans laquelle ils n’interviendraient pas en rang

utile eu égard à la nature chirographaire de leurs créances, ainsi préfèreront-ils renoncer à une

partie de leurs créances plutôt que de voir celles-ci disparaître entièrement dans le gouffre de

la procédure collective.

Cependant il convient de ne pas faire de ces quelques exemples une généralité : tous les

créanciers qui acceptent de participer au règlement amiable ne le font pas systématiquement

en raison d’un différend ou d’une contestation sur leurs créances.

D’ailleurs il convient dans ce dernier exemple de se demander si il y a véritablement litige, le

simple fait de renoncer à demander l’ouverture d’une procédure collective, qui est certes une

action en justice, signifie t-il qu’il y a litige entre le créancier et le débiteur ?. Quelle

contestation oppose le créancier au débiteur : une éventuelle contestation, comme celle

concernant la mauvaise exécution dans la prestation du créancier, concerne les relations entre

le débiteur et son créancier, l’objet du litige découle de leur relation et justifierait une

transaction qui aurait pour objectif de terminer ce litige déjà né ou à naître.

L’ouverture d’une procédure collective ne constitue pas le litige qui oppose ou serait

susceptible d’opposer le créancier et le débiteur, la cessation des paiements ne peut faire en

effet l’objet que d’un constat et n’appelle pas de débat sur un problème juridique comme

pourrait le faire un procès sur une action en responsabilité par exemple. Elle n’est pas un litige

au sens strict dans la mesure où elle ne concerne directement que la situation patrimoniale

d’une seule partie.

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55

On peut également se demander quelle chance de gain ou de perte résulterait d’une

transaction sur la demande d’ouverture de la procédure collective pour le créancier, et même

si il y en a une, celle-ci ne peut résulter directement du constat de la cessation des paiements.

Elle n’a aucune incidence directe sur la situation juridique du créancier.

La volonté d’éviter l’ouverture d’une procédure collective ne rentre donc pas dans l’objet de

leurs litiges et ne peut donc constituer la contestation requise par l’article 2044 du Code civil.

Au demeurant, la plupart des créanciers qui acceptent de participer au règlement amiable le

font dans un esprit purement libéral et si celui-ci est intéressé c’est uniquement dans la

volonté de voir ce partenaire économique se redresser afin de ne pas perdre un client, un

fournisseur… et de pouvoir poursuivre cette relation économique.

D’ailleurs tous n’accordent pas des remises de dettes, certains se contentent d’accorder, et

cela peut résulter de la pratique même de certains tribunaux130, uniquement des délais de

paiements.

Dans cette hypothèse la renonciation de ces créanciers à agir en justice n’est que temporaire et

ne dure que le temps des délais qu’ils ont accordé, dès lors l’accord amiable conclu avec le

débiteur est incompatible avec la qualification de transaction, celle-ci ayant pour objectif de

terminer une contestation née ou à naître et non pas seulement de l’interrompre.

Même si l’accord amiable a pour finalité implicite d’éviter l’ouverture d’une procédure

collective, la qualification de cette dernière de litige, qui est la matière première de toute

transaction, appelle cependant certaines interrogations.

Elle constituera une telle hypothèse uniquement lorsque ont été négociées des remises totales

ou partielles de dettes, l’accord amiable prévoyant dans une telle hypothèse l’impossibilité

d’agir en justice pour celles-ci.

Mais même dans l’hypothèse où l’on considère qu’il y a la volonté d’éviter un litige, l’accord

amiable ne peut être assimilé à une transaction et cela en raison de l’absence d’un élément

considéré par la majorité de la doctrine comme indispensable à toute transaction : des

concessions réciproques afin de terminer le litige né ou à naître.

130 Comme par exemple la chambre commerciale du TGI de Metz.

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§2. L’ABSENCE DE CONCESSIONS RECIPROQUES

A la lecture de l’article 2044, l’accent est mis sur deux éléments nécessaires et

caractéristiques : la contestation et la volonté des parties d’y mettre fin.

Ce texte se contente d’indiquer la fin poursuivie par la transaction, sans préciser les moyens

nécessaires pour y parvenir.

En revanche, la doctrine française unanime131 expose que l’existence de concessions

réciproques est le troisième élément fondamental de la transaction, le plus caractéristique : il

est donc également requis quoique non visé par le texte.

L’accord amiable, lorsque qu’il a été conclu pour terminer ou prévenir un litige, ne peut

acquérir la qualification de transaction que s’il comporte des concessions réciproques.

On doit alors se demander si dans la conclusion de l’accord amiable des concessions

réciproques sont consentis.

Nous avons vu au travers de l’étude du domaine du règlement amiable132 que l’ouverture de

ce dernier et donc la désignation d’un conciliateur ne sont possibles que si le dirigeant de

l’entreprise en difficulté s’engage à prendre des mesures de redressement qui sont la

contrepartie des sacrifices consentis par les créanciers.

Cependant il n’est pas possible de voir dans cet engagement du débiteur à prendre des

mesures salvatrices, les concessions réciproques qui sont inhérentes à toutes transactions.

Rappelons qu’à la lecture des dictionnaires133 une concession s’entend d’un abandon de ses

droits, de ses prétentions. L’engagement à une certaine ligne de conduite si stricte soit-elle ne

peut être assimilé à une concession.

Il faut alors se poser la question de savoir où sont les concessions réciproques qui pourraient

nous permettre de qualifier l’accord amiable de transaction ?

Une certaine vision de la procédure collective nous permet de voir des concessions

réciproques dans l’accord amiable.

Cette vision correspond à la vision moderne que l’on pourrait avoir de la procédure

collective : loin de la honte et de l’infamie qu’elle infligeait au représentant de l’entreprise qui

en faisait l’objet.

131 V. L. Boyer, La notion de transaction, contribution à l’étude des concepts de cause et d’acte déclaratif, thèse,Toulouse, Sirey, 1948.132 Infra p. 42.133Le petit Larousse, grand format sous la direction de M. Legrain et Y. Garnier, 2001.

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En effet aujourd’hui, la procédure collective est considérée comme un droit pour le dirigeant

de l’entreprise en difficulté. Elle permet à ce dernier de bénéficier d’un cadre protecteur qui

lui permet de « reprendre son souffle » à l’abri des poursuites.

Paradoxalement ceux qui redoutent l’ouverture d’une procédure collective ne sont plus les

personnes qui en font l’objet mais les créanciers de cette dernière qui hier encore étaient les

heureux bénéficiaires de cette procédure.

Aujourd’hui on peut soutenir qu’un créancier ordinaire à plus de chance de recouvrer sa

créance en trouvant un arrangement avec l’entreprise débitrice en lui permettant d’éviter

l’ouverture d’une procédure collective au lieu d’attendre celle-ci pour déclarer sa créance. Le

règlement amiable apparaît ainsi pour le débiteur comme un réel « mode de gestion » pour

résoudre ses difficultés, on comprend alors mieux que les créanciers répondent très souvent

présent pour les procédures de règlement amiable.

Les conciliateurs n’ont donc pas de mal, en général, à trouver un accord avec ses derniers.

Dans cette optique on peut concevoir que l’accord amiable comporte des concessions

réciproques en vue d’éviter un litige.

Ainsi le débiteur renonce à demander l’ouverture d’une procédure collective en contrepartie

des remises de dettes et délais de paiements que lui accordent les créanciers. Dans cette

hypothèse, sauf une éventuelle réserve concernant l’aspect litigieux de la demande

d’ouverture d’une procédure collective, rien ne nous empêche de qualifier l’accord amiable

qui est conclu, de transaction. On retrouve la volonté des parties de mettre fin à un

contentieux en se consentant des concessions réciproques.

Mais cependant un tel raisonnement s’il a le mérite d’être pragmatique comporte un oubli de

taille qu’est le caractère d’ordre public de la loi du 25 janvier 1985.

L’article L 621-1 du Code de commerce prévoit en effet que « la procédure de redressement

judiciaire est ouverte à toute entreprise (…) qui est dans l’impossibilité de faire face à son

passif exigible avec son actif disponible ».

Cette disposition, comme toutes celles de la loi de 1985, est d’ordre public, dès lors en vertu

de l’article 6 du Code civil, on ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui

intéressent l’ordre public.

Lorsque le débiteur est en état de cessation des paiements il ne peut transiger avec ses

créanciers pour éviter l’ouverture de la procédure collective sous peine de contrevenir à

l’ordre public et en particulier l’ordre public économique qui caractérise les procédures

collectives.

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58

Dès lors on ne peut justifier de concessions réciproques dans l’accord amiable car si les

créanciers accordent des remises de dettes, il semble que le débiteur ne fait aucune

concession, au sens où nous l’avons défini, de son côté.

Eu égard aux caractéristiques de l’accord amiable, il nous semble difficile d’assimiler celui-ci

à la transaction au sens où l’entend le code civil. Un concept juridique qui engloberait tous les

contrats mettant un terme à un litige, avec ou sans concessions réciproques, est parfaitement

imaginable.

Mais sans aller jusqu’à cette proposition dont il nous faudrait d’ailleurs montrer l’utilité, on

peut, concernant l’accord amiable, qualifier celui-ci de contrat « à valeur de transaction » car

en effet si l’accord amiable ne comporte pas tous les éléments nécessaires à la qualification de

transaction il ressort d’un point de vue pragmatique qu’il emporte les mêmes effets et en

particulier celui d’éviter une procédure judiciaire.

L’accord amiable présente cependant une certaine supériorité sur les transactions conclues

individuellement par le dirigeant de l’entreprise avec chacun de ses créanciers.

En effet, ces transactions sont destinées à prévenir autant de litiges individuels, le règlement

amiable lui permet de prendre en compte dans leur ensemble les difficultés de l’entreprise afin

d’éviter l’ouverture d’une procédure collective.

La présence du conciliateur voir l’homologation du tribunal permettent de conclure des

accords équilibrés qui ont plus de chance de ne pas être remis en cause si le cas échéant

l’entreprise fait l’objet d’une procédure collective.

La transaction ou l’accord transactionnel sont donc des instruments qui permettent d’éviter de

manière directe ou indirecte l’ouverture d’une procédure collective.

Lorsqu’ils réussissent on entend rarement parler d’eux, seule la prévention qui échoue fait

parler d’elle.

Si la transaction stricto sensu ou lato sensu est couramment utilisée avant l’ouverture de la

procédure collective qu’elle tend justement à éviter, sa présence dans les procédures

collectives est toute aussi importante.

Sa finalité n’est cependant plus la même et le moins que l’on puisse dire c’est qu’elle évolue

dans un cadre particulier ce qui n’est pas sans conséquence sur ses effets.

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TITRE 2. LA TRANSACTION CONCLUE EN VUE D’AMELIORER

L’EFFICACITE DE LA PROCEDURE COLLECTIVE

En cas d’échec des mesures transactionnelles préventives l’entreprise se trouve en état de

cessation des paiements.

Une fois l’état de cessation consommé cette dernière ne peut plus échapper à son sort, elle se

trouve alors soumise à la procédure de redressement judiciaire régie par la loi n° 85-98 du 25

janvier 1985, codifié aux articles L 620-1 à L 628-3 du Code de commerce.

L’objectif principal de cette procédure est la survie de l’entreprise, elle est l’épicentre134 de la

procédure collective.

Même dans ce cadre particulier des transactions sont couramment conclues. Celles-ci, eu

égard à la nature particulière de la procédure collective ont un fondement légal.

En effet deux dispositions particulières de la loi de 1985 sont consacrées aux transactions.

L’article 33 al 2 de la loi de 1985 devenu article L 621-24 et l’article 158 al 1 de cette même

loi devenu article L 622-20 permettent de transiger tout au long de la procédure collective.

Le cadre des procédures collectives n’est pas sans effets sur ces transactions de sorte que

celles-ci qu’elles soient conclues en phase de redressement judiciaire ou de liquidation sont

soumises à une procédure particulière.

Cette possibilité de transiger pendant la procédure collective peut être, en fonction des

circonstances, réellement bénéfique pour l’entreprise en état de cessation des paiements

comme pour ses dirigeants. A ce stade de l’analyse, la transaction se présente comme un outil

qui a tout pour séduire (Chapitre 1).

Cependant ce cadeau fait par le législateur aux protagonistes du droit des entreprises en

difficulté s’avère être un cadeau empoisonné.

L’examen des transactions conclues pendant la procédure collective nous montre que si cet

outil est séduisant il n’en est pas moins dangereux et peut être constitutif d’abus (Chapitre 2).

Le principal danger résulte en l’occurrence de la validité même de certaines transactions avec

l’ordre public économique qui caractérise les procédures collectives. Celui-ci présente

cependant l’inconvénient d’être flou de sorte qu’une réflexion sur la nécessité d’adapter ces

deux notions s’impose.

134 C. Saint-Halary-Houin, Droit des entreprises en difficulté, Montchrestien 4e éd. 2001, n°319 p. 180.

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60

CHAPITRE 1. LA TRANSACTION DANS LES PROCEDURES

COLLECTIVES : UN OUTIL SEDUISANT

« Une mauvaise transaction vaut mieux qu’un bon procès », cette phrase qu’on entend

souvent chez les gens de justice se transpose aisément dans les procédures collectives si l’on

en croit la fréquence des transactions qui sont conclues dans ce domaine.

La transaction présente, en effet, un certain nombre d’intérêts : certains tirés de la nature

même de ce mécanisme, d’autres qui résultent de l’alchimie entre cette dernière et le cadre

dans lequel elles sont conclues.

Qu’elle soit conclue dans la période de redressement judiciaire ou pendant la phase de

liquidation, la transaction n’en présente pas moins d’intérêts (Section 2).

Mais pour être à même de pouvoir saisir ces derniers, il convient d’analyser les spécificités de

la transaction conclue pendant la procédure collective car à ce stade de difficulté de

l’entreprise « ne transige pas qui il veut ».

En effet au principe de liberté de gestion du dirigeant in bonis, on oppose la liberté sous

surveillance, lorsqu’elle n’est tout simplement pas retirée, du dirigeant de l’entreprise soumis

à une procédure collective (Section 1).

SECTION 1. LES SPECIFICITES DE LA TRANSACTION CONCLUE

PENDANT LA PROCEDURE COLLECTIVE

Le redressement et la liquidation judiciaires sont des procédures qui, à la différence du

règlement amiable, supposent une intervention de justice et qui se déroulent devant le tribunal

(de commerce ou de grande instance) selon un processus très réglementé.

La transaction dans ce domaine ne peut être conclue selon la libre volonté des parties mais est

soumise à un certain nombre de conditions qui ont pour but de protéger tant le débiteur

défaillant que ses créanciers.

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61

Il en résulte que la transaction conclue pendant les procédures collectives connaît un certain

nombre de spécificités qui concerne tant les auteurs (§1) de cette dernière que la procédure

qu’elle engendre (§2).

§1. LES SPECIFICITES QUANT AUX AUTEURS DE LA

TRANSACTION

La transaction n’est pas soumise aux mêmes conditions selon qu’elle est conclue durant la

période de redressement ou de liquidation judiciaire.

Il convient de voir quels sont les auteurs et les conditions que ces derniers doivent remplir

pour pouvoir transiger tant durant la phase de redressement (A) que durant la phase de

liquidation (B).

A. DANS LA PHASE DE REDRESSEMENT JUDICIAIRE

Sous l’empire de la loi du 13 juillet 1967, dès le jugement déclaratif constatant la cessation

des paiements, le débiteur était dessaisi de la gestion de son entreprise et assisté ou représenté

par un syndic.

La loi du 25 janvier 1985 a rompu avec l’automaticité de ce système, le jugement d’ouverture

ne privant plus ipso facto le chef d’entreprise de la gestion de son affaire.

Cette variabilité dans le dessaisissement du débiteur est à l’origine de l’absence d’exclusivité

de la faculté pour un acteur du droit des entreprises en difficulté de transiger dans le cadre

d’un redressement judiciaire135.

En effet, au terme de l’ancien article 33 al 2 de la loi du 25 janvier 1985 devenu article L 621-

24 du Code de commerce, le juge commissaire peut autoriser le chef d’entreprise ou

l’administrateur à faire un acte de disposition étranger à la gestion courante de l’entreprise, à

consentir une hypothèque ou un nantissement ou à compromettre ou à transiger.

1. L’initiateur de la transaction

Depuis la loi du 25 janvier 1985 est institué un dessaisissement à la carte.

135 V. annexe n°2 sur la requête adressée au juge commissaire pour transiger dans la phase de redressementjudiciaire

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62

Il convient en premier lieu, de distinguer selon que la procédure est soumise à un régime

général ou simplifié.

Dans le régime simplifié136, en principe, il n’est pas nommé d’administrateur (une telle

désignation devant être jugée nécessaire par le tribunal). Le débiteur conservant le pouvoir de

gestion de l’entreprise c’est lui qui a le pouvoir d’initiative en matière de transaction.

Dans le cadre du régime général, un administrateur est toujours nommé (article L 621-8 du

Code de commerce) mais sa mission est d’une étendue variable.

Au terme de l’article L 622-22, il peut avoir une mission de simple surveillance. Dans une

telle hypothèse c’est toujours le débiteur qui a l’initiative en matière de transaction.

Il peut également avoir une mission d’assistance, dans ce cas le pouvoir d’initiative en matière

de transaction appartient aux deux.

Il peut enfin avoir une mission de représentation, c’est alors à lui que revient le pouvoir

d’initiative en matière de transaction.

Il convient, en effet dans tous les cas de parler de simple pouvoir d’initiative car quel que soit

l’hypothèse la transaction pour pouvoir être conclue doit faire l’objet d’une autorisation du

juge commissaire.

2. La nécessaire autorisation préalable du juge commissaire

Quel que soit l’auteur de l’initiative de la transaction, celle-ci doit toujours être autorisée par

le juge commissaire.

La transaction constitue en effet un acte grave qui ne peut être laissé à l’appréciation des seuls

organes de gestion car elle peut se traduire par un appauvrissement du débiteur et donc une

atteinte aux intérêts des créanciers137.

A ce titre, la transaction passée sans l’autorisation du juge-commissaire est nulle quel que soit

son objet. C’est ce qui résulte d’un arrêt de la Cour de Cassation du 5 janvier 1999138.

136 Rappelons qu’aux termes de l’article L 620-2 du Code de commerce et de l’article 1er du décret n°85-1387 du27 décembre 1985 en portant application, les personnes physiques ou morales qui emploient cinquante salariésau plus et dont le chiffre d’affaires hors taxe est inférieur à 20 millions anciens de francs (environ 3 millionsd’euros) bénéficient de la procédure simplifiée. Le régime général s’applique donc aux entreprises qui dépassentl’un de ses seuils. Pour la portée de la distinction cf. C. Saint-Halary-Houin, op. cit. n°399 et s. p. 246.137 V. C. Saint-Halary-Houin, la gestion de l’entreprise, RTD Com. 1986, n°spécial p.5 n°36.138 Cass. Com. 5 janvier 1999, Di Giorgio / Herbert es qualités, Dr. société éd. du Juris-Classeur, déc. 1999 p. 15note J. -L. Courtier ; D.A. 28 janv. 1999 n°146, p. 174 ; Act. des P.C 12 février 1999 n°3, p. 1 note J. P. Dom ;RJ Com. 1999, p. 408 note C. H. Gallet.

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63

Cette décision avait soulevé une contradiction entre les anciens articles 32 al 1 et 33 al 2 de la

loi de 1985, devenus respectivement articles L 621-23 et L 621-24 du Code de commerce, sur

la capacité du débiteur à transiger, notamment lorsqu’il fait l’objet d’une procédure simplifiée

de redressement judiciaire sans administrateur.

L’article L 621-24 prévoit en effet que « le juge commissaire peut autoriser le chef

d’entreprise ou l’administrateur à faire un acte de disposition étranger à la gestion courante de

l’entreprise, à consentir une hypothèque ou un nantissement ou à compromettre ou transiger ».

L’article L 621-23 stipule quant a lui que « le débiteur continue à exercer sur son patrimoine

les actes de disposition et d’administration, ainsi que les droits et actions qui ne sont pas

compris dans la mission de l’administrateur ».

Dans cet arrêt restait donc à déterminer si l’accord transactionnel intervenu entre un chef

d’entreprise et une cliente dans le cadre de travaux effectués par celui-ci à cette dernière avant

l’ouverture de la procédure collective, constituait ou non un acte de gestion courante.

Pour parvenir à cet accord transactionnel, le débiteur avait fait des concessions relatives au

paiement de travaux, en échange d’un désistement de la part de sa cliente de toute

contestation concernant l’achèvement et la finition des travaux, ce contrat étant accompagné

d’un acte de désistement de toute instance ou action conformément aux dispositions de

l’article 2052 al 1 du Code civil.

Dans cet arrêt la Cour de cassation a confirmé la position déjà défendue par les juridictions du

fond selon laquelle toute conclusion d’une transaction par l’administrateur, ou le débiteur lui-

même dans le cas où a été ouverte une procédure simplifiée de redressement judiciaire, doit

être nécessairement précédée d’une autorisation du juge-commissaire.

Son arrêt de rejet du pourvoi formé contre un arrêt rendu, le 8 mars 1996, par la 4e chambre

commerciale de la cour d’appel d’Amiens généralise, en effet, la portée des dispositions de

l’article L 621-24 à l’ensemble des compromis et transactions pouvant être conclus au cours

du déroulement d’une procédure collective, avec un créancier de l’entreprise soumise à cette

procédure ou un tiers.

Déjà la cour d’appel de Paris, le 10 février 1994139et le tribunal de Commerce de Bobigny le 7

juillet 1997140 avaient eu l’occasion, sous le régime de la loi du 25 janvier 1985, de statuer sur

des transactions et compromis conclus entre une entreprise en redressement et des créanciers

afin de régler des litiges en cours.

139 CA Paris 1ere ch. Civ., 10 février 1994, D. 1994 I.R .p. 79140T. Com. Bobigny 7 juill. 1997, RJ Com. 1998 somm. n°188 p. 78 obs. Ch-.H. Gallet.

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64

Qu’il s’agisse de l’une ou de l’autre de ces opérations, ces deux juridictions avaient

subordonné leur conclusion à l’autorisation préalable du juge-commissaire.

Dans l’affaire soumise à la Cour de cassation, la question posée était de savoir si le débiteur,

soumis à une procédure simplifiée de redressement judiciaire, avait pu signer valablement une

convention valant accord transactionnel sur le montant de la créance qu’il détenait sur une

entreprise pour laquelle il avait exécuté des travaux, ainsi qu’un acte de désistement pur et

simple de toute instance et action relatives à cette créance, sans avoir sollicité l’autorisation

préalable du juge-commissaire.

Le cocontractant du débiteur soutenait que la signature de ces actes était valide, car n’ayant

pas pour objet le paiement d’une créance ou d’une dette née antérieurement à l’ouverture

d’une procédure collective et qu’elle correspondait à l’exercice des actes de disposition et

d’administration courants visés à l’alinéa 1er de l’article L 621-24.

Il contestait dès lors, la nullité des actes conclus qu’avait prononcée la 4e chambre de la Cour

d’appel d’Amiens le 8 mars 1996.

La chambre commerciale de la Cour de cassation ne l’a pas entendu ainsi et interprète les

dispositions de l’alinéa 2 de l’article L 621-24 précité de la manière la plus large, suivant ainsi

la position défendue par des auteurs éminents spécialistes de la matière des procédures

collectives141.

Elle énonce, en effet, sans aucune ambiguïté, que l’article L 621-24 ne distingue pas selon

l’objet de la transaction et qu’ainsi toute transaction passée en violation des dispositions de ce

texte est annulée à bon droit, à la demande de tout intéressé.

Le champ d’application de l’article L 621-24 est donc très général, l’autorisation doit être

sollicitée que les biens dont le débiteur entend disposer soient ou non attachés à

l’exploitation142.

Selon le professeur Bernard Soinne, « il peut s’agir aussi bien de créances ou de dettes

antérieures que postérieures au redressement judiciaire.

Pour les créances antérieures au jugement, la transaction se fera dans le cadre de la

procédure de vérification des créances par devant le juge commissaire qui en est

spécialement chargé. Créanciers, débiteurs ou administrateurs et représentants des

141 V. F. Derrida, P. Godé et J.-P. Sortais, avec la collaboration d’A. Honorat, Redressement et liquidationjudiciaires des entreprises, 3e éd., Dalloz, 1991, n°382.142 Cass. Com. 9 juin 1992, arrêt n°1114 D, aff. Schwartz et autres, inedit cité par B. Soinne, Traité desprocédures collectives, Litec 1995 p. 989 n° 1320.

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65

créanciers exprimeront à ce moment un accord lors de la comparution ayant pour objet de

trancher le conflit portant sur la nature et l’importance de la créance »143.

Messieurs Derrida, Godé, Sortais sont quant à eux moins catégoriques quand à l’étendue des

transactions pouvant intervenir au cours de la période d’observation.

« Les créances pouvant faire l’objet d’une transaction sont des créances nées après le

jugement notamment à l’occasion de la poursuite d’exploitation, les transactions intervenant

sur des créances antérieures au jugement qui ont donné lieu à déclaration relèvent

normalement de la compétence du juge commissaire chargé de procéder à la vérification des

créances.

Admettre le compromis ou la transaction pour des créances antérieures conduit à déposséder

le juge commissaire de ses prérogatives puisqu’il arrête normalement seul l’état des

créances.

En autorisant ces actes, le juge commissaire consent à une diminution de ses prérogatives

mais la procédure de déclaration et de vérification étant d’ordre public, il ne semble pas

possible même au juge-commissaire d’y déroger »144.

A cette objection de Messieurs Derrida, Godé, Sortais, il semble cependant que l’on puisse

opposer le caractère général de l’art L 621-24 al 2 qui n’opère aucune distinction selon la date

de naissance des créances, or n’enseigne t-on pas qu’il n’y a pas lieu de distinguer la où la loi

ne distingue pas, de sorte que à l’ordre public de la procédure de vérification des créances on

peut opposer celui de l’article L 621-24 qui étant prévu par la loi de 1985 (ancien article 33 al

2) est également d’ordre public.

Rappelons également le rôle du juge-commissaire qui est le véritable « homme-orchestre de la

procédure »145 qui veille à son bon déroulement et à la protection des intérêts en présence :

l’autorisation qu’il donne ne peut que manifester l’intérêt pour l’entreprise de la diminution

éventuelle d’une créance.

L’autorisation du juge-commissaire est donc nécessaire pour tous les actes visés par l’article L

621-24 quels que soient les pouvoirs confiés à l’administrateur. L’autorisation ne peut porter

143 B. Soinne op. cit. p. 989 n° 1320.144 F. Derrida et alii, op. cit., note 1539 et en ce sens C. Saint-Halary-Houin, op. cit n° 524 p. 325.145 Sur l’importance du rôle du juge commissaire v. C. Saint-Halary-Houin, op. cit. n° 405 et s. p. 248.

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66

que sur un ou plusieurs de ces actes. Elle doit être écrite et spéciale146, le juge-commissaire ne

saurait délivrer une autorisation générale ou indéterminée147.

Lorsque le juge-commissaire statue sur une demande d’autorisation présentée par

l’administrateur, le greffier doit convoquer le débiteur conformément à l’article 55 du décret

d’application de la loi de 1985, les droits de la défense devant en effet être respectés.

La transaction effectuée pendant la période d’observation est un acte dangereux, à ce titre il

est en principe interdit.

Seule l’autorisation du juge-commissaire la soustrait à ce principe d’interdiction et la fait

échapper aux sanctions civiles et pénales qu’elle devrait encourir.

On comprend que la passation de tel acte exige une autorisation de justice car elle ne relève

pas de l’exploitation normale d’une entreprise et peut se traduire par un appauvrissement du

débiteur et donc une atteinte aux intérêts des créanciers.

La protection des créanciers est une donnée fondamentale des procédures collectives, c’est en

poursuivant cet intérêt que le législateur permet de transiger également dans la phase de

liquidation judiciaire.

B. DANS LA PHASE DE LIQUIDATION JUDICIAIRE

Lorsque, à l’ouverture de la procédure collective, l’entreprise en difficulté n’est pas

susceptible d’être sauvée ou lorsque, à l’issue de la période d’observation, aucun plan ne peut

être arrêté tendant à la continuation ou à la cession de l’entreprise, c’est la liquidation

judiciaire qui doit être prononcée.

Le jugement d’ouverture désigne le liquidateur qui sera chargé de procéder aux opérations de

réalisation de l’actif et d’apurement du passif. Il produit un effet très énergique sur la situation

du débiteur qui est immédiatement dessaisi de la gestion de son entreprise.

La loi a édicté plusieurs régimes permettant la réalisation de l’actif et notamment la faculté de

transiger.

En effet, selon l’ancien article 158 al 1 de la loi de 1985 devenu article L 622-20 du Code de

commerce « le liquidateur peut avec l’autorisation du juge-commissaire et le débiteur entendu

146 Voir annexe n°2 pour l’autorisation délivrée par juge-commissaire.147 F. Derrida et alii, op. cit. n°382.

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67

ou dûment appelé (1) compromettre ou transiger sur toutes les contestations qui intéressent

collectivement les créanciers (2) même sur celles qui sont relatives à des droits et actions

immobiliers ».

L’alinéa 2 prévoit que « si l’objet du compromis ou de la transaction est d’une valeur

indéterminée ou excède la compétence en dernier ressort du tribunal, le compromis ou la

transaction doit être soumis à l’homologation du tribunal (3) ».

1. L’autorisation du juge commissaire

Le liquidateur ne peut agir dans le cadre de l’article L 622-20 que s’il y est autorisé par le

juge-commissaire.

Comme pour la transaction prévue par l’article L 621-24, celle-ci se justifie par le fait que les

actes visés peuvent se traduire par un appauvrissement du débiteur et donc une atteinte aux

intérêts des créanciers.

Le champ d’application de cette règle est très large et fait du juge-commissaire l’arbitre d’un

grand nombre de conflits existants ou à naître148, dès lors qu’ils mettent en cause l’intérêt

collectif des créanciers, c'est-à-dire le patrimoine actif et passif du débiteur failli.

Le juge-commissaire statuera sur la requête du liquidateur par ordonnance.

La requête est obligatoire, elle doit porter sur un acte déterminé, le juge-commissaire ne peut

délivrer d’autorisation générale au liquidateur.

Par extrapolation des règles applicables à la transaction conclue pendant la phase de

redressement judiciaire, l’autorisation du juge-commissaire doit être sollicitée pour les

transactions portant sur des biens affectés ou non à l’activité professionnelle de l’exploitant

individuel : règle que l’on comprend d’autant plus aisément qu’en matière de liquidation

judiciaire, le dessaisissement englobe tous les biens du débiteur.

L’autorisation du juge-commissaire a pour objectif d’assurer la protection des créanciers, à ce

titre il peut refuser l’autorisation de transiger lorsque leurs droits sont insuffisamment

protégés ou sauvegardés ou encore lorsque les biens du débiteur sont inutilement sacrifiés.

Pour prévenir cette dernière hypothèse, l’article L 622-20 prévoit que « le débiteur doit être

entendu ou dûment appelé ».

Le respect des droits de la défense justifie une telle mesure, cette règle est en outre

traditionnelle : elle l’était déjà dans l’article 499 du Code de commerce dans sa rédaction de

148 V. Dict. perm. diff. entr., 4 fév. 2002, feuillets 70 p. 764-16 n °102 et s.

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1955, repris par l’article 82 de la loi du 13 juillet 1967. Un débiteur « dûment appelé » est un

débiteur convoqué selon les « formes prescrites »149 et si possible entendu.

Selon l’article 124 du décret n° 85-1388 de la loi de 1985, lorsque en application de l’article

158 de la loi de 1985, il y a lieu, pour le juge-commissaire d’autoriser le liquidateur à

transiger, le greffier doit convoquer le débiteur à l’audience en joignant à cette convocation la

copie de la requête du liquidateur.

En effet, l’autorisation de transiger accordée par le juge-commissaire est une décision

importante, il importe alors que celui-ci ait toutes les données de l’opération, l’opinion du

débiteur pouvant s’avérer intéressante dans cette perspective, celui-ci étant à priori bien placé

pour apprécier l’utilité de la transaction150.

Afin de permettre au débiteur de préparer ses observations, le greffier lui envoie une copie de

la requête du liquidateur.

Cette précision est heureuse car sous l’empire de la loi de 1967, l’article 79 de son décret

d’application disposait que le greffier trois jours avant la décision du juge-commissaire

appelait le débiteur par lettre recommandée (sans accusé de réception), dans laquelle était

précisée l’étendue de la transaction envisagée, les conditions et motifs juridiques et

économiques d’une telle mesure.

La mise à disposition du contenu exact de la requête présentée par le liquidateur au juge-

commissaire est plus logique pour le débiteur mais cependant moins explicite pour ce dernier

qu’une explication concrète de l’opération.

On peut toutefois regretter, sous l’empire de la loi de 1985 comme celle de 1967, le peu de

temps dont dispose le débiteur (3 jours avant la convocation) pour préparer ses observations.

Quoi qu’il en soit les observations du débiteur si pertinentes soient-elles, ne peuvent être de

nature à conduire le juge-commissaire à refuser d’autoriser une transaction proposée par le

mandataire liquidateur dès lors que celle-ci est indispensable à la poursuite de l’intérêt

collectif des créanciers.

149J. Rey-Debove et A. Rey, dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, Dictionnaires LeRobert, 1993.150 V. Dict. perm. diff. entr.,, 4 fév. 2002 feuillets 70 p. 764-16 n ° 104.

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69

2. La poursuite de l’intérêt collectif des créanciers

Le liquidateur ne peut transiger que sur « les contestations qui intéressent collectivement les

créanciers », d’ailleurs le juge-commissaire n’autorisera jamais une transaction qui ne répond

pas à cet objectif151.

La transaction, pour les litiges existants ou encore virtuels, peut s’étendre ainsi à tout ce qui

intéresse les créanciers.

Le représentant des créanciers a seul qualité pour agir dans « l’intérêt collectif » et dans

« l’intérêt personnel » des créanciers.

Certains auteurs soutiennent cependant qu’un créancier peut agir pour la défense de son

intérêt personnel 152.

Il faut alors pour clarifier la situation revenir sur le sens de l’article L 622-20, la notion

d’intérêt collectif des créanciers semble être de nature à éradiquer toute difficulté.

En effet, la lecture des travaux préparatoires de la loi de 1985 parait conduire à n’autoriser le

liquidateur à n’agir qu’à propos de contestations qui intéressent la « collectivité » des

créanciers.

Sous l’empire de la loi du 13 juillet 1967, l’article 82 alinéa 1er de cette loi visait les

« contestations qui intéressent la masse ». Pour souligner la disparition de celle-ci le projet de

loi de la loi de 1985 tel que voté en première lecture par l’Assemblée nationale visait, lui, les

« contestations qui intéressent les créanciers ». Sur proposition de sa commission des lois, le

Sénat adopta sans discussion un amendement tendant à ajouter le mot « collectivement »

avant celui de « créancier ». Pour le rapporteur cette précision est importante pour éviter toute

confusion153 : « les contestations ne peuvent porter que sur les intérêts collectifs des

créanciers et non pas sur les intérêts individuels des créanciers bénéficiaires de sûretés réelles

spéciales »154.

Cependant on peut noter que le législateur en pratiquant ainsi a opposé nettement les intérêts

collectifs aux intérêts individuels sans pour autant en donner les critères de distinction, seule

la lecture des travaux préparatoires que nous venons de voir nous donne comme exemple

d’intérêts individuels ceux des bénéficiaires de sûretés réelles spéciales.

151 V. Cass. Civ. 16 fév. 1864, DP 1864, I, p. 89.152G. Ripert et R. Roblot, Traité élémentaire de droit commercial, t.2, L.G.D.J., 15e éd. par Ph. Delebecque et M.Germain, 1996, n. 2998.153 J.O déb. Sénat 9 juin 1984, p. 1437154 Rapp. Thyraud , Doc. Sénat 1983-84, n° 332, p. 203

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Si le liquidateur a seul qualité pour agir concernant les contestations qui intéressent

collectivement les créanciers, on pourrait se demander ce qui se passe quand celui-ci n’agit

pas : un créancier peut-il par exemple exercer ut singuli l’action dans l’intérêt de la

collectivité ?

Le rôle spécifique du liquidateur ne semble guère permettre une réponse positive, la

jurisprudence rappelle régulièrement qu’il n’est pas possible à un créancier de se substituer au

liquidateur155.

D’ailleurs il convient de rappeler qu’en droit des sociétés, l’ « action ut singuli »156 n’est

possible que là seulement où elle est prévue157.

Le liquidateur détient un véritable monopole pour transiger dans l’intérêt collectif des

créanciers, cette dernière notion ne semble cependant pas faire l’objet d’une définition

précise.

Certains auteurs ont proposé de se référer au droit de l’indivision et cela conformément à

l’arrêt de la première chambre civile du 13 novembre 1984158 censurant un arrêt de la cour

d’appel d’Aix du 2 mars 1983159 qui a décidé que l’ « existence en la personne de certains

indivisaires d’intérêts divergents nés d’une circonstance étrangère à l’indivision n’implique

pas l’absence d’intérêts communs ». Autrement dit, l’intérêt commun ne saurait s’analyser

comme la somme arithmétique des intérêts individuels.

On retrouve cette conclusion sur la controverse bien connue en droit des sociétés sur le sens

qu’il convient de donner à l’intérêt social, quelle que soit la théorie défendue : celle qui

assimile l’intérêt social à l’intérêt des seuls associés et celle pour laquelle l’intérêt social

s’identifie à l’intérêt de l’entreprise. L’intérêt social n’est dans tous les cas pas là non plus la

somme arithmétique des intérêts individuels. Aussi a-t-il été écrit pour la seconde comme

155 V. Com. 13 juin 1979 , JCP 1979, II, 19172 note Gavalda et Stoufflet,: où on refuse à un créancier de sesubstituer au syndic et d’exercer l’action ut singuli en réparation de la totalité du préjudice causé à la masse ; V.encore en matière de liquidation des sociétés Cass. Com. 15 déc. 1977 : Rev. Sociétés 1978, p. 725 note Chartierqui a décidé que le liquidateur d’une société était seule apte à la représenter ; récemment encore Cass. Com. 3juin 1997, JCP E 1997, n°38 p. 189 note J.-L. Courtier où il a été décidé qu’ « en vertu des articles 46 al 1er et148 al 3 de la loi du 25 janvier 1985, dans leur rédaction applicable en la cause, seul le représentant descréanciers, dont les attributions sont ensuite dévolues au liquidateur, a qualité pour agir au nom et dans l’intérêtcollectif des créanciers ; il en résulte qu’un associé ou un créancier ne sont pas recevables à agir au nom descréanciers ».156 V. Y. Chesné, l’exercice ut singuli de l’action sociale : RTD com. 1962 p. 347.157 Cass. Civ. 1ère 30 janv. 1980, Rev. Sociétés 1982, p. 110 note chartier.158 V. Civ. 1ère 13 nov. 1984, D.1985 p. 104 note Breton

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pour la théorie que l’ « intérêt collectif est supérieur aux intérêts individuels (lesquels, en son

nom) pourront être partiellement sacrifiés »160.

L’intérêt social transcende donc les intérêts individuels, il est l’intérêt de la collectivité que

constitue l’ensemble des créanciers.

Un intérêt dont il semble bien qu’il soit contrôlé par les tribunaux au travers de

l’homologation des transactions excédant un certain montant significatif.

3. L’homologation des transactions

Dès lors que l’objet du compromis ou de la transaction est d’une valeur indéterminée ou

excède la compétence en dernier ressort du tribunal, le compromis ou la transaction sont

soumis à l’homologation du tribunal .

La notion d’homologation est présente dans le droit français depuis le XVème siècle et depuis

elle n’a pas cessé d’être utilisée161. Elle pourrait se définir comme une « approbation

judiciaire à laquelle la loi subordonne certains actes et qui, supposant du juge un contrôle de

légalité, et souvent un contrôle d’opportunité, confère à l’acte homologué la force exécutoire

d’une décision de justice162 ». L’homologation ne se conçoit ainsi que de la juxtaposition de

deux éléments : un acte de volonté privé, élément contractuel, auquel s’adjoint une

intervention du juge, élément judiciaire.

L’homologation que nous avons déjà rencontré au travers de la loi du 10 juin 1994 qui soumet

le règlement amiable à l’homologation du juge se distingue d’autres situations où il peut être

fait appel au juge, en dehors d’un litige.

L’homologation se distingue ainsi de l’autorisation ou de l’habilitation où le juge intervient

alors à priori pour accorder ou accroître le pouvoir d’une personne d’accomplir un acte,

l’homologation intervient à posteriori pour conférer à l’accord qui l’intéresse force

exécutoire.

Ainsi s’est posée la question en jurisprudence du caractère obligatoire ou non de la double

étape procédurale prévue par l’article L 622-20. Au terme de l’alinéa 1er de cet article, la

transaction doit être autorisée par le juge-commissaire, l’alinéa 2 prévoit quant à lui que si

159 V. CA Aix 2 mars 1983, D. 1984 p. 145 note Breton ; RTD civ. 1984, p. 343, obs. Patarin, arrêt conforme àl’arrêt « Laroche » rendue par la chambre commerciale de la Cour de Cassation le 7 janvier 1976, JCP 1976, II,18327, note Gavalda et stoufflet.160 D. Schmidt, les droits de la minorité dans la société anonyme, thèse 1970, n°82.161 V. L. Amiel Cosme, la fonction d’homologation judiciaire, Justices 1997, n°5, p. 135 et s. ; Ch. Fardet, Lanotion d’homologation, R.F de théo., 1er juin 1998 n°28, p. 181. Elle était déjà présente dans le fragment d’unrépertoire de jurisprudence parisienne.

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l’objet de la transaction est d’une valeur indéterminée ou excède la compétence en dernier

ressort du tribunal, celle-ci doit être soumis à homologation du tribunal.

On pourrait alors se demander si le mécanisme prévu par l’article L 662-20 est un mécanisme

en deux temps ou un mécanisme alternatif ?

Ni sous l’empire de la loi du 13 juillet 1967 qui connaissait semblable disposition163 ni sous

celui de la loi en vigueur la question n’a véritablement été tranchée. Un arrêt de la Cour

d’appel de Reims avait penché en faveur de la double étape procédurale164, mais,

ultérieurement, une décision de la Cour de cassation165 avait pu laissait penser le contraire et

semblait rejoindre la position soutenue par l’éminent professeur Soinne166. Un arrêt de la

Cour d’Appel d’Orléans est d’ailleurs venu confirmer cette tendance en affirmant que dans

l’hypothèse d’une transaction d’une valeur indéterminée ou qui excède la compétence en

dernier ressort du tribunal la seule homologation du tribunal est suffisante.

Cependant un arrêt de la Cour d’appel de Paris du 31 mai 2002167 vient clarifier la situation en

optant sans ambiguïté, et par une solution motivée, pour le caractère obligatoire de la double

formalité a priori et a posteriori pour les transactions visées par le deuxième alinéa de l’article

L 622-20. Cette solution a au demeurant été précédée par un arrêt récent de la chambre

commerciale de la Cour de Cassation en date du 29 avril 2002168 qui retient que « le

liquidateur ne peut transiger sur les contestations qui intéressent collectivement les

créanciers qu’avec l’autorisation du juge-commissaire, la transaction conclue en violation

de cette règle d’ordre public est nulle de nullité absolue ».

L’intervention du tribunal est cependant avant tout fonction de la valeur de l’objet de la

transaction.

Par objet il convient de prendre en compte le droit litigieux lui-même et non les sacrifices

réciproques consentis par les parties. Ainsi ce n’est pas le chiffre de la transaction qui

détermine l’intervention du tribunal mais celui de la contestation sur laquelle la transaction est

intervenue.

162 V. Ch. Fardet, op.cit. p. 182.163 V. Cass. Com. 6 déc. 1994, D. 1995, somm. P. 215, obs. A. Honorat.164 V. CA Reims, 5 juin 1996, Rev. proc. oll. 1999, p. 176, obs. P. Cannet.165 V. Cass. Com., 2 mars 1999, Rev. proc. coll. 1999 p. 176, obs. P. Canet ; P.A. 24 avril 2000, p. 9, note C.-H.Gallet.166 B. Soinne, Traité théorique et pratique des procédures collectives, Litec 2e éd., 1995, n°2456 : « lorsqu’il y adépassement de la compétence en dernier ressort de la juridiction, le juge-commissaire n’est plus alorscompétent. Seule la juridiction le devient… »167 V. CA Paris 31 mai 2002, D. 2002, n°32, act. juris., p. 2533, note A. Lienhard.168 V. Cass. Com. 29 avr. 2002, Juris-Data n°202-014239.

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73

L’utilisation d’un critérium chiffré est adaptée pour déterminer l’importance économique de

l’acte. Il était originellement donné par un chiffre inscrit dans la loi 169 et est aujourd’hui

comme sous l’empire de la loi précédente déterminé par référence aux taux du ressort du

tribunal qui est modifié périodiquement par voie réglementaire en fonction de la dépréciation

monétaire.

Il conviendrait pour déterminer ce chiffre de référence de distinguer selon la nature du

tribunal compétent.

Cependant le taux en dernier ressort du tribunal de commerce ou du tribunal de grande

instance (lorsque le débiteur n’est ni commerçant ni artisan) étant le même, les transactions

doivent être homologuées lorsque l’objet de l’acte est supérieur à 1981, 84 euros170 (13 000F).

Lorsque la valeur de l’opération est indéterminée, elle est soumise à la même formalité, celle-

ci risquant de dépasser ce chiffre.

La conclusion d’une transaction lorsqu’ est ouverte une procédure collective présente donc un

certain nombre de spécificités. Ces dernières ne s’arrêtent pas à la simple conclusion de la

transaction mais se manifestent également à l’encontre des voies de recours directes ou

indirectes contre cette dernière mais également au niveau des sanctions en cas de non respect

des formalités légales de cette dernière.

§ 2. LES SPECIFICITES QUANT A LA PROCEDURE

La transaction conclue pendant la procédure collective, étant soumise à certaines obligations

procédurales aussi bien en période de redressement que de liquidation judiciaire, revêt un fort

particularisme. Ainsi si la transaction conclue hors procédure collective ne peut en vertu de

l’article 2052 être remise en cause par les parties à l’accord, la transaction conclue pendant les

procédures collectives, si elle ne peut l’être également directement, peut l’être indirectement

par le biais des voies de recours à l’encontre des décisions nécessaires à la conclusion de la

transaction dans les procédures collectives (A).

Ainsi le non-respect des formalités légales obligatoires rend invalides les transactions

conclues pendant la procédure collective (B).

169 Notamment avec la loi de 1838 pour les actes portant sur des contestations supérieur à 300 francs.170 Le décret du 28 décembre 1998 n’ayant pas modifié le NCPE et le Code de l’organisation judiciaire, V. Dict.perm. diff. entr., 4 fév. 2002 feuillets 70 p. 764-16 n ° 104

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74

A. LA PARTICULARITE DES VOIES DE RECOURS

La transaction étant soumise à des formalités procédurales, des voies de recours indirectes

contre la transaction sont permises car aucune voie de recours n’est ouverte contre la

transaction stricto sensu171 celle-ci ayant en vertu de l’article 2052 autorité de la chose jugée

en dernier ressort entre les parties. Il convient donc d’examiner ces voies de recours ouvertes

tant contre l’ordonnance du juge-commissaire autorisant ou non la transaction (1) que les

voies de recours, dans l’hypothèse d’une liquidation judiciaire, ouvertes contre la décision

d’homologation du tribunal (2) pour les transactions portant sur des contestations d’un

montant supérieur à 1981,84 euros ou de valeur indéterminée.

1. Les voies de recours contre l’autorisation du juge-commissaire

En principe les décisions du juge-commissaire quelles qu’elles soient sont, sauf exception,

comme toutes ses ordonnances insusceptibles de voies de recours dès lors qu’elles sont prises

dans la limite de ses attributions sous réserve d’opposition par tout intéressé devant le tribunal

de la procédure collective172.

L’article L 623-4 du Code de commerce laisse au tribunal le soin de statuer sur les recours

formés contre les ordonnances du juge-commissaire rendues dans la limite de ses attributions.

L’article 25 alinéa 3 du décret de 1985 précise quant à lui que les ordonnances du juge

peuvent faire l’objet d’un recours, que la pratique appelle souvent par habitude

« opposition »173, par simple déclaration au greffe faite contre récépissé ou par lettre

recommandée avec accusé de réception dans les huit jours de leur notification.

Ce recours est formé devant le tribunal saisi, le juge-commissaire ne peut siéger lorsque le

tribunal statue ainsi contre l’une de ses ordonnances.

En effet, les décisions de la juridiction statuant sur opposition lorsque le juge statue dans les

limites de ses pouvoirs sont insusceptibles de toutes voies de recours, le jugement rendu à la

suite du recours en question ne peut faire l’objet ni d’opposition, ni de tierce opposition, ni de

171 La transaction peut cependant être annulée dans les cas prévue aux articles 2052 à 2058 du Code civil : dol,violence, erreur sur la personne ou sur l’objet de la contestation, transaction en exécution d’un titre nul,transaction sur pièces reconnues fausses, transaction sur un procès terminé par un jugement passé en force dechose jugée. Titre 1er, Chap. 1er, Section 1ère §2 : Une faculté dangereuse p. 25-26.172 B. Soinne, op. cit. n° 2456 p. 2016173 V. F. Pérochon et R. Bonhomme, Entreprises en difficultés, Instrument de crédit et de paiement, LGDJ 5ème

éd. 2001, n°142 p. 133.

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pourvoi en cassation, ni d’appel174 sauf à réserver les cas de recours particuliers comme

l’appel nullité175 d’une partie qui justifiant d’un intérêt se prévaut de la violation d’un droit

fondamental ou d’un excès de pouvoir du juge-commissaire.

En revanche, lorsque le juge-commissaire n’a pas statué dans « la limite de ses attributions »,

toutes les voies de recours de droit commun sont ouvertes.

2. Les voies de recours contre le jugement d’homologation

Quelle que soit la nature de la transaction qui lui est soumise, le tribunal de l’homologation

est celui de la liquidation.

Le tribunal joue un rôle très actif au travers de ces homologations dans la mesure où celles-ci

conduisent non pas à un simple enregistrement de ces dernières mais constitue au contraire un

véritable contrôle d’opportunité des transactions. On va même jusqu'à dire qu’il « substitue »

le juge commissaire176.

Cependant quand une transaction donne lieu à homologation, la mise en oeuvre des nullités

dont elle est entachée ne peut se faire que dans deux perspectives différentes : on distingue en

effet selon que celles ci soient rendues à la suite ou non d’un débat contradictoire.

Lorsque le jugement d’homologation est dépourvu de tout caractère contentieux, il n’y a pas

alors un véritable acte juridictionnel et la nullité de l’opération doit être demandée par voie

d’action principale.

Par contre et ce qui nous intéresse lorsque le jugement d’homologation est rendu à la suite

d’un débat contradictoire, c’est seulement au moyen des voies de recours possibles contre

cette décision que la nullité de l’opération peut être recherchée : le jugement d’homologation

étant assimilé à un acte de juridiction contentieuse il est susceptible des différentes voies de

recours que prévoit le droit des procédures collectives.

Ainsi lorsque le débiteur est appelé à la procédure d’homologation devant le tribunal, celle-ci

lui est opposable. Il a en conséquence était jugé que ce dernier pouvait interjeter appel d’un

jugement d’homologation contraire à ses conclusions177, on a même estimé que les règles de

174 Il en résulte que l’appel d’un jugement rendu sur opposition à une ordonnance ayant autorisé une transactiondoit être déclarée irrecevable ; v. Cass. Civ. 2e, 8 avril 1970, D. 1970, som. 207 ; JCP G, 1970, IV, p. 135.175 V. B. Soinne, le recours nullité dans le cadre des procédures collectives, Gaz. Pal. 1987, 2, p. 695 ; v.L.Cadiet, l’appel nullité dans les procédures collectives, Rev. proc. coll. 1988, p. 17 et s.176 V. J.-C. May, Réalisation de l’actif - transactions, compromis et actes voisins, Jurisclasseur fasc. 2710-4.177 V. Cass. Com. 3 janv. 1968 : Bull. Civ. 1968 IV, n°8 ; Cass. Com. 3 fév. 1981: Bull. Civ., IV, n°61 et plusrécemment arrêt CA Paris 21 juin 1994, Juris-Data n°022251, Rev. proc. coll. 1999 p. 177, obs. P. Canet.

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dessaisissement ne faisaient pas obstacle à ce que le débiteur interjette seul appel du jugement

d’homologation et ce nonobstant le caractère patrimonial de l’intérêt en jeu178. La règle n’est

cependant pas fixe en la matière car certains arrêts ont considérés comme irrecevable l’appel

du débiteur alors qu’il avait été dûment convoqué à l’audience du tribunal et qu’il s’était

associé à la demande d’homologation par voie de son représentant légal179.

On peut également relever qu’il a été jugé dans le passé que la partie adverse qui n’a pas

participé à l’instance peut former tierce opposition à la décision accordant ou refusant

l’homologation180.

Des voies de recours sont donc ouvertes aux parties à la procédure, par contre s’est posée la

question devant les tribunaux des personnes titulaires de la qualité de « parties » : ainsi un

arrêt récent a déclaré irrecevable l’appel formé par les associés de la personne morale en

liquidation à l’encontre du jugement homologuant la transaction, solution évidente selon M.

Canet « si l’on se réfère à la règle du dessaisissement et des dispositions de l’article L 622-20

qui réserve au seul liquidateur la faculté de transiger181 ».

La Cour de cassation a également résolu la question au sujet des contrôleurs désignés dans

une procédure par un arrêt du 9 décembre 1997182 concernant l’appel formé par ces derniers

contre un jugement d’homologation d’une transaction déclarée irrecevable par une Cour

d’appel : ainsi a-t-il était jugé dans cet arrêt « qu’en vertu de la combinaison des articles 46,

148 et 152 de la loi du 25 janvier 1985, le liquidateur a seul qualité pour exercer les droits et

actions du débiteur sur son patrimoine et pour agir au nom et dans l’intérêt des créanciers et

que si en application de l’article 15 de la loi du 25 janvier 1985, les contrôleurs désignés par

le juge-commissaire assistent le représentant des créanciers dans ses fonctions, leur audition

éventuelle ne leur confère pas la qualité de partie.

La Cour d’appel en a donc exactement déduit qu’en application de l’article 31 du nouveau

Code de procédure civile, que la Caisse n’était pas recevable en son appel, que ce soit en

qualité de créancier ou en celle de contrôleur ».

Au-delà même du droit de former appel contre les jugements d’homologation, les droits des

contrôleurs sont très limités en ce qui concerne l’élaboration de la transaction, ainsi il a été

jugé qu’un mandataire liquidateur peut à juste titre refuser de communiquer aux contrôleurs le

178 V. Cass. Com. 3 fév. 1981, Bull. civ., IV, n°61; CA Paris 21 juin 1979, RJ Com., p. 244, note Fricero-Goujon.179 V. C.A Versailles 12 oct. 1995, Juris-Data n°051870; Rev. proc. coll. 1999 p. 177 obs. Canet.180 V. Cass. req. 9 mai 1939, JCP 1939, p. 1297 note C. Campana-Reymond de Gentile181 V. Cass. Com. 16 oct. 2001, Rev. proc. coll. 2002 p. 287 obs. P. Canet ; Act. PC 2001-20 n°266 ; Dr. société2002, comm. n°41.182 V. Cass. Com. 9 décembre 1997, Bull. civ.1997, IV, n°325 ; JCP E 5 fév. 1998 n°6 p. 204 note J.-L. Courtier.

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protocole de règlement amiable ayant conduit à une transaction et à l’abandon de 50 % de la

créance du débiteur contrôlé183. En effet les documents dont les contrôleurs « peuvent »

prendre connaissance sont ceux qui sont transmis à l’administrateur et au représentant des

créanciers, leur droit de consultation est donc limité puisqu’il ne peut s’exercer sur les

documents adressés au seul juge-commissaire. D’ailleurs là même où il est reconnu, ce droit

n’est pas absolu : autrement dit, le droit à l’information prévue par la loi ne signifie pas que

les mandataires de justice doivent nécessairement transmettre à ces derniers tous les

documents qui leur sont transmis.

Ainsi comme l’a très justement souligné un auteur on voit au travers de ces deux illustrations

que « si la réforme de la loi du 25 janvier 1985 issue de la loi du 10 juin 1994 a conféré aux

contrôleurs des prérogatives, elle ne leur a pas pour autant conféré des droits »184.

Les voies de recours à l’encontre du jugement d’homologation comme celles contre

l’ordonnance du juge-commissaire même si elles sont limités peuvent permettre de remettre

en cause la transaction car celles-ci font partie intégrante de sa validité, le cadre particulier

des procédures collectives confère donc une certaine spécificité aux transactions conclues

dans ce domaine qui ne sont donc plus soumises à la simple volonté des parties, le non respect

des formalités légales obligatoires étant sanctionné par la nullité de la transaction.

B. LES SANCTIONS DU NON-RESPECT DES FORMALITES LEGALES

OBLIGATOIRES

Lorsqu’une transaction a été conclue sans avoir respecté les formalités légales, la sanction de

principe est la nullité.

Il convient cependant de distinguer selon la formalité non respectée. Ainsi si la convocation

du débiteur devant le juge commissaire a été omise, la transaction est en principe nulle. Cette

règle fait cependant l’objet d’atténuation lorsque la transaction est conclue pendant la phase

de liquidation judiciaire. Dans cette hypothèse,si la formalité omise concerne l’audition du

débiteur par le juge commissaire, le débiteur non entendu par ce dernier pourra toujours l’être

dans l’instance en homologation, ce n’est que le cas échéant que l’acte sera définitivement

nul.

183 V. T. Com. Paris, 18e ch., 20 sept. 1996, P.A. 6 juin 1997, p. 27, note Ch. Leguévaques.184 Ch. Leguevaques, op. cit., p. 27

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La nullité est donc en toute hypothèse la sanction de principe car les actes visés sont a priori

interdits : ils ne sont valables que s’ils ont été autorisés. Ainsi nous avons déjà eu l’occasion

de souligner que les transactions signées pendant la période de redressement judiciaire

doivent être soumises, à peine de nullité, à l’autorisation du juge-commissaire185.

Le non respect des formalités légales justifie la nullité lorsque le débiteur, comme nous

venons de le voir, est l’auteur de l’acte irrégulier mais également lorsque c’est le liquidateur

qui en est l’auteur.

Les formalités légales valent en quelque sorte ad validatem, le non-respect de ces dernières

privant l’opération d’existence juridique.

Ainsi il a été décidé sous l’empire de la loi du 13 juillet 1967 mais la solution vaut toujours

aujourd’hui, la disposition légale concernée ayant été reproduite dans le texte de la loi du 25

janvier 1985, que « la transaction conclue par le syndic d’une liquidation des biens sans

l’autorisation du juge-commissaire ni, le cas échéant, l’homologation du tribunal, est nulle de

nullité absolue en raison de la violation des formes prescrites par l’article 82 de la loi n° 67-

563 du 13 juillet 1967 qui sont d’ordre public ; en conséquence, une telle transaction n’est

pas susceptible de confirmation 186 ».

La nullité en tout cas ne peut être encourue dès lors que la transaction n’a pas été exécutée

avant son homologation par la juridiction187. Cette nullité ne peut plus être invoquée lorsque

le jugement d’homologation est passé en force de chose jugée188. Une jurisprudence ancienne

considère que la nullité peut être couverte par accord exprès ou tacite donné à l’acte par le

débiteur ou par les créanciers. Cette solution est contestable. Seule l’autorisation du juge-

commissaire et, le cas échéant, l’homologation du tribunal, même intervenue après

l’exécution de l’acte pourrait permettre d’éviter la contestation de l’opération intervenue189.

La nullité est une sanction adéquate au non respect des formalités légales obligatoires, ces

dernières ont pour objectif de protéger les créanciers en évitant un appauvrissement du

débiteur. La transaction est en effet un acte grave qui ne peut être laissée à l’appréciation des

185 Cass. Com. 5 janvier 1999, Di Giorgio / Herbert es qualités, Dr. société éd. du Juris-Classeur déc. 1999 p. 15note J. L. Courtier ; D.A. 28 janv. 1999 n°146 p. 174 ; Act. des P.C n° 3- 12 février 1999 p. 1 note J. P. Dom ;RJ Com. 1999 p. 408 note C. H. Gallet.186 Cass. Com. 6 déc. 1994, D. 1995 somm. p. 215 note A. Honorat.187 Cass. Com. 14 mars 1989, Rev. proc. coll. 1990, n° 17, p. 274 obs. B. Soinne.188 T. Civ. Bordeaux 15 janv. 1951 et sur appel Bordeaux 27 oct. 1952 cité par B. Soinne, op. cit. n°2457 note8817 p. 2017.189 Cass. Com. 6 déc. 1994, op. cit. : Faute d’avoir obtenu l’autorisation du juge et le cas échéant l’homologationde la juridiction, l’acte nul d’une nullité absolue n’est pas susceptible de confirmation.

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seuls organes de gestion. Elle reste en principe un acte interdit, ce n’est que si les formalités

légales sont respectées que cette dernière sera valable.

Les spécificités de la transaction se justifient par le cadre dans lesquels elles sont conclues,

on ne peut d’ailleurs taxer ces dernières d’embarrassantes si l’on en croit la fréquence des

transactions conclues dans ce domaine. Les transactions sont en effet monnaie courante dans

les procédures collectives et ceci en raison du grand nombre d’intérêts qu’elle présente pour

les protagonistes de ce droit.

SECTION 2. L’APPORT DE LA TRANSACTION AUX PROCEDURES

COLLECTIVES

L’ouverture d’une procédure collective est synonyme de lourdeur et de coût, la conclusion

d’une transaction dans ce cadre n’a pas pour ambition d’éliminer totalement ceux-ci mais

participe à la recherche d’une amélioration des procédures collectives et plus particulièrement

de son efficacité.

En effet la transaction est un instrument souple et, même si elle doit respecter certaines

formalités procédurales, reste simple d’utilisation.

On comprend dès lors que les protagonistes du droit des procédures collectives soient friands

de cet instrument qui permet, même si les transactions sont soumises au contrôle des juges

(juge-commissaire ou juge de l’homologation) une certaine « déjuridicisation » des

procédures collectives : un certain nombre de litiges connexes à la procédures étant réglés en

marge de la procédure de manière transactionnelle.

Si la transaction concerne principalement des petits litiges, qui sont certes indispensables à

l’amélioration de l’efficacité des procédures collectives, certaines décisions nous ont

démontré que la transaction peut être au centre même de la procédure collective et être

l’élément déterminant de la survie de l’entreprise en difficulté. Dans une telle hypothèse la

transaction prend une toute autre ampleur et ne se contente plus simplement de participer à

l’efficience des procédures collectives mais en constitue le pilier principal, l’instrument qui a

permis à la procédure de jouer pleinement son rôle en assurant le redressement et la reprise de

l’entreprise en difficulté.

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80

Pour être plus à même de saisir tout l’intérêt de la transaction dans les procédures collectives,

il convient de distinguer la transaction conclue dans la phase de redressement (§1) de la

transaction conclue dans la phase de liquidation judiciaire (§2).

§1. L’APPORT DANS LA PHASE DE REDRESSEMENT JUDICIAIRE

Dans la phase de redressement, le dessaisissement de la gestion du débiteur n’est pas

automatique. Dès lors aucun protagoniste du droit des entreprises en difficulté ne se voit

conférer le monopole de transiger.

Les transactions, selon que l’on se trouve dans le régime simplifié ou dans le régime général

voir dans cette dernière hypothèse selon l’étendue du dessaisissement du débiteur, peuvent

être conclues par le débiteur lui-même ou par l’administrateur.

Les transactions conclues par le débiteur lui-même n’ont pas toujours étaient permises, elles

ont à ce titre une portée particulière car à travers la possibilité accordée par la loi du 25

janvier 1985 pour le débiteur de transiger se manifeste la volonté d’améliorer l’efficacité des

procédures collectives en dédramatisant celle-ci (A).

Les transactions conclues par l’administrateur ont quant à elles une portée moins profonde

mais beaucoup plus concrète : la transaction conclue par l’administrateur peut en effet aller

jusqu’à constituer l’élément déterminant de la survie de certaines entreprises, certaines

décisions rares mais fortement médiatisées l’ont au demeurant fort bien démontré (B).

A. LA TRANSACTION CONCLUE A L’INITIATIVE DU DEBITEUR : UN

FACTEUR DE DEDRAMATISATION DES PROCEDURES COLLECTIVES

La transaction conclue par le débiteur, au-delà de l’acte matériel qui en résulte, symbolise un

mouvement de fond recherché par la loi de 1985 qui est le souci de dédramatiser les

procédures collectives190. Le souci édicté par la loi de 1985 est en effet de faire perdre à cette

procédure son caractère infâmant et d’assimiler le dépôt de bilan à un simple acte de gestion.

La possibilité pour le débiteur de transiger pendant la période de redressement résulte de cette

volonté du législateur de dédramatiser les procédures collectives.

190 . C. Saint-Halary-Houin, la gestion de l’entreprise, RTD Com. 1986, n°spécial p. 39 n°9 et s.

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En effet la conclusion d’une transaction n’a pas toujours été permise durant la phase de

redressement judiciaire : sous l’empire de la loi du 13 juillet 1967, seul était permis le recours

à la transaction pour la liquidation des biens. Cependant depuis la loi du 25 janvier 1985, la

transaction, sous réserve du respect des exigences de forme, est expressément permise aussi

bien durant la période d’observation que de liquidation judiciaire191.

Dans cette même volonté de dédramatiser les procédures collectives, la loi nouvelle cherche à

supprimer les rigidités de nature à entraver le redressement de l’entreprise en mettant en

œuvre un dispositif destiné à permettre une gestion souple et personnelle.

La loi de 1985 se garde ainsi d’assortir le prononcé du jugement d’ouverture de mesures de

gestion automatique, le débiteur n’est plus dès le prononcé de ce jugement dessaisi de la

gestion de son entreprise ou encore assisté ou représenté par un syndic.

La loi du 25 janvier 1985 a en effet rompu avec l’automaticité de ce système ; le jugement

d’ouverture ne privant plus ipso facto le chef d’entreprise de la gestion de son affaire.

D’ailleurs dans la plupart des cas celui-ci n’entraîne pas une modification de la répartition des

pouvoirs, le débiteur continue à diriger l’entreprise.

Rappelons que dans 95 pour 100192 des cas c’est le régime simplifié qui s’applique, dans ce

régime il n’est en principe pas nommé d’administrateur, les transactions seront donc conclues

à l’initiative du débiteur.

La possibilité de transiger durant la période d’observation ainsi que la volonté de limiter le

dessaisissement de la gestion du débiteur ont véritablement pour objectif d’améliorer

l’efficacité des procédures collectives en dédramatisant celles-ci. Ces mesures visent à

rassurer les créanciers qui restent en relation directe avec leurs véritables partenaires

économiques quand bien même ces derniers éprouvent des difficultés économiques. La

possibilité pour le débiteur en difficulté d’accomplir encore des actes d’une certaine

importance comme de transiger avec ses créanciers rassure ces derniers qui ne voient plus

dans l’ouverture d’une procédure collective la mort annoncée de leur partenaire.

Cette absence de rupture quasi automatique des relations par les créanciers joue un rôle

fondamental pour l’image des procédures collectives. La disparition de l’infamie et de la mise

au pilori du failli qu’elles entraînent encourage les débiteurs à ne plus craindre de déposer le

191 V. S. Neuville, op. cit. n°1, p. 571 ; C. Saint-Halary-Houin, la gestion de l’entreprise, RTD 1986, n°spécial p.50 n°36192 V. C. Saint-Halary-Houin, Droit des entreprises en difficultés, Montchrestien 4eme éd. 2001, N°50 p. 32

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bilan et à le faire à temps : dans un délai qui pourrait permettre d’améliorer les choses et non

plus d’attendre que l’entreprise soit complètement moribonde.

La transaction ne concoure à la dédramatisation des procédures collectives que lorsqu’ elle est

conclue à l’initiative du débiteur. Dans les autres hypothèses de conclusion de transaction,

celle-ci n’a pas véritablement cet effet car c’est à l’initiative d’un auxiliaire de justice que

celles-ci sont conclues, on retrouve alors le cadre judiciaire de la procédure qui rappelle aux

créanciers que l’entreprise est soumise à une procédure collective. Les transactions conclues à

l’initiative de l’administrateur n’en présentent pas moins d’intérêt pour les procédures

collectives comme en témoigne certaines affaires très médiatisées où c’est par l’intermédiaire

de celles-ci que certaines entreprises ont pu être sauvées.

B. LA TRANSACTION CONCLUE A L’INITIATIVE DE L’ADMINISTRATEUR :

UN ELEMENT DETERMINANT DANS LA SURVIE DE CERTAINES

ENTREPRISES

L’une des innovations majeures de la loi du 25 janvier 1985 est très certainement l’institution

d’une période d’observation. Celle-ci permet au tribunal, avant de décider d’arrêter un plan ou

de déclarer la liquidation judiciaire de l’entreprise, d’observer sa situation économique et

sociale et d’en dresser un bilan afin de pouvoir décider en connaissance de cause la mesure

qui est la plus appropriée.

Cette période d’observation apparaît indispensable tant pour dresser le constat de la gestion

passée au travers du bilan économique et social que pour préparer l’avenir et la restructuration

de l’entreprise par le biais d’un plan de redressement.

La période d’observation peut voir l’administrateur judiciaire négocier des transactions

nécessaires à l’accompagnement de la présentation d’un plan. Certaines décisions ont

cependant montré que celles-ci peuvent aller jusqu'à être l’élément indispensable à la réussite

du plan.

C’est le cas de la décision rendue par le tribunal de commerce de Créteil au sujet de l’affaire

AOM-Air liberté le 27 juillet 2001193.

En effet, par jugement en date du 19 juin 2000, le tribunal de commerce de Créteil avait

ouvert le redressement judiciaire des sociétés AOM et Air liberté.

193 V. B. Soinne, Une étrange décision (à propos de l’affaire AOM-Air Liberté), Rev. proc. coll. 2001 n°4 p.161 ; F. Derrida, Transaction sur les sanctions (sur l’affaire AOM-Air Liberté), D.A. somm., 2002 n°1 p. 75.

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83

Par la suite, envisageant un plan de cession de ces entreprises, un jugement en date du 27

juillet 2001 détaille toutes les offres de plan présentées et notamment celle de Monsieur Jean-

Charles Corbet, pilote de ligne et commandant de bord. Ce dernier envisageait pour la reprise

de ces entreprises de créer une SA qui serait dénommée HOLCO et dont le capital serait

répartie entre des actionnaires salariés et un Groupe d’investisseurs et de partenaires

industriels.

Ce dernier avait cependant posé en condition suspensive de la reprise, le versement par les

actionnaires de référence des entités Air liberté et AOM d’une contribution de 2 milliards de

francs, le repreneur ajoutant que le prix de cession qu’il proposait était de 1 F.

La possibilité de demander une contribution indispensable à la reprise de l’entreprise résulte

de la mise en cause par les administrateurs judiciaires des actionnaires et dirigeants des

sociétés en redressement judiciaire (Swissair), afin que ces derniers accordent leur soutien aux

différents candidats repreneurs. Cependant ces derniers contestaient formellement leur mise

en cause dans la déconfiture de ces entreprises.

Le plan de cession proposé par le repreneur était cependant soumis à la condition intrinsèque

que Swissair accorde, sous diverses formes, un soutien financier très important au projet de

reprise, à défaut duquel le redressement des entreprises ne pourrait être réalisé.

Dès lors a l’initiative des administrateurs a été proposé une transaction qui serait de nature à

permettre le sauvetage de ces entreprises : c’est dans ces conditions que Swissair et le

repreneur se sont rapprochés, l’objet de la transaction était de fixer une contribution

importante au plan de cession ( 1 250 000 000 F194) en contrepartie de laquelle les organes de

la procédure renonçaient irrévocablement à toute réclamation à quelque titre que ce soit et sur

quel fondement que ce soit à l’encontre de Swissair mais également de tous les membres de

son conseil d’administration personnes physiques ou morales.

Ce protocole transactionnel a été homologué par le tribunal de commerce de Créteil le 1er août

2001195.

L’affaire AOM-Air liberté peut être considérée, d’un point de vue économique, comme le

symbole de l’apport des transactions aux procédures collectives. En effet sans celle-ci, le plan

de cession des entreprises AOM-Air liberté n’aurait pas été possible provoquant de la sorte la

perte de milliers d’emplois directe des salariés de ces entreprises (plus de 2500 emplois) et

194 Ainsi que la prise en charge des billets émis par AOM-Air liberté à la date du 19 juin 2001 et non utilisée à ladate du jugement arrêtant le plan de cession à concurrence d’un montant forfaitaire de 200 000 000 F.195 V. annexe 4 pour le jugement homologuant cette transaction (document 1) ainsi que pour un extrait de ceprotocole transactionnel (document 2).

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indirectement plus encore pour les entreprises en relations d’affaires avec les sociétés AOM-

Air liberté.

L’affaire AOM-Air liberté n’est cependant pas la seule illustration de l’utilisation de la

transaction comme élément déterminant dans la survie de certaines entreprises.

En effet, ce schéma a été identiquement reproduit dans l’affaire BATA196. Par un jugement en

date du 13 juillet 2001, la chambre commerciale du Tribunal de Grande Instance de Metz a en

effet ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’encontre du fabricant de chaussures :

la société BATA HELLOCOURT.

Au cours de la période d’observation, aucune solution de redressement par voie de

continuation de cette société n’avait pu être envisagée eu égard aux résultats d’exploitation et

de l’importance du passif à apurer. En outre, le contexte économique dans le secteur de la

chaussure aurait imposé une restructuration immédiate de la société et notamment une

diminution de ses effectifs dont le coût n’aurait pu être financièrement supporté dans le cadre

d’un tel plan.

Des solutions de reprise ont donc été recherchées par les administrateurs. Six offres de

reprises partielles ont ainsi été déposées : trois pour l’activité de fabrication de chaussures,

deux pour l’activité de dépôt et une seule pour l’activité d’imprimerie.

Bien que les offres de reprises concernant l’activité de fabrication de chaussure, qui

constituait l’activité principale de l’entreprise en redressement, soient bien ficelées d’un point

de vue social et économique, elles ne présentaient pas un financement qui puisse garantir des

perspectives d’activités de l’entreprise. Dès lors seule une subvention importante des

actionnaires de la société BATA HELLOCOURT : la SA Holding BATA pouvait permettre la

reprise de cette entreprise.

En considération de cette situation, ces derniers se sont rapprochés des organes de la

procédure de redressement judiciaire afin de mettre un terme à un débat qui mettait en cause

la responsabilité des dirigeants et des actionnaires de la société BATA HELLOCOURT.

Ce rapprochement a abouti à la signature d’un protocole197 au terme duquel « BATA SA

énonce les conditions dans lesquelles elle s’engage en sa qualité d’actionnaire de BATA

HELLOCOURT à contribuer à la poursuite de cette société par le soutien à un plan de

cession, au maintien d’un nombre significatif d’emplois par l’intermédiaire de ce plan et à

l’apurement du passif de BATA HELLOCOURT ».

196 TGI ch. com. Metz 26 nov. 2001, inédit.197 V. annexe 4 document 3 pour une copie du jugement conférant force de chose jugée à cette transaction.

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Au terme de cette transaction, la société BATA SA s’était engagée en effet à verser au

repreneur la plus faible des deux sommes que constituait soit la somme de 35 millions de

francs ou la somme sollicitée par ce dernier. Elle s’engageait également à conclure avec le

repreneur une convention de fourniture pour contribuer au maintien de l’activité, de verser

aux mandataires judiciaires de BATA HELLOCOURT la somme forfaitaire de 3 millions de

francs pour faciliter l’apurement du passif, d’abandonner la totalité de son compte courant de

95 millions de francs et de contribuer au plan social à hauteur de 35 millions de francs.

En contrepartie, les mandataires et autres organes de la procédures renonçaient à toute action

à l’encontre des actionnaires et mandataires passés et actuels ayant directement ou

indirectement, pour fondement, cause ou origine la gestion de BATA HELLOCOURT ainsi

que les relations de toute nature entre celle-ci et les sociétés du groupe BATA.

Il est manifeste que cette transaction était indispensable à la reprise de l’entreprise de

fabrication de chaussures en ce qu’elle permettait d’apporter des fonds vitaux pour la

continuité de l’activité. Ainsi, le projet de reprise prévoyait que ces fonds devaient financer,

dès la première année, le besoin de fonds de roulement évalué à plus de 25 millions et

devaient autofinancer les investissements nécessaires évalués à 11 millions de francs, les

besoins de la société les années suivantes étant financés par les résultats de celle-ci.

Rappelons que le repreneur ne s’engageait à apporter pour la reprise de l’entreprise que 5

millions, tous ses documents prévisionnels et notamment ceux concernant le résultat de la

première année tenaient compte de la subvention sollicitée auprès de BATA SA, autant dire

que sans cette dernière aucune reprise de l’entreprise de fabrication de chaussures n’aurait été

possible.

La transaction conclue en phase de redressement judiciaire qu’elle soit conclue par le débiteur

lui-même ou par l’administrateur judiciaire présente donc un intérêt certain pour le droit des

entreprises en difficulté : qu’il s’agisse de dédramatiser ce dernier ou même de permettre la

reprise d’entreprise en difficulté. La transaction conclue dans la phase de liquidation judiciaire

converge dans cette même otique d’améliorer l’efficacité des procédures collectives.

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§ 2. L’APPORT DANS LA PHASE DE LIQUIDATION JUDICIAIRE

Lorsque à l’issue de la période d’observation aucune mesure de redressement n’est

envisageable, le tribunal peut décider de liquider l’entreprise198.

Le jugement d’ouverture produit un effet très énergique sur la situation du débiteur qui est

immédiatement dessaisi de la gestion de son entreprise, il désigne en contrepartie un

mandataire liquidateur qui sera chargé de procéder aux opérations de réalisation de l’actif et

d’apurement du passif.

Celui-ci, comme nous l’avons vu, a la faculté légale de transiger sous réserve du respect des

conditions de l’article L 622-20 du Code de commerce. Cette faculté qui lui était déjà

reconnue par le Code de commerce dans sa rédaction de 1955199, reprise par la loi du 13

juillet 1967 dans son article 82, elle-même reproduite à son tour fidèlement dans l’article 158

de la loi de 1985200 est une faculté indispensable pour la réalisation de ses missions.

La transaction constitue en effet un outil indispensable pour une réalisation efficace de l’actif

par le liquidateur (A), elle est également un moyen d’assurer de manière optimale le

recouvrement du passif en évitant une action lourde : l’action en comblement de l’insuffisance

d’actif (B).

A. UN OUTIL INDISPENSABLE À UNE REALISATION FACILITEE DE

L’ACTIF

En tant que mandataire de justice, organe de la procédure, le mandataire liquidateur est chargé

de conduire toutes les opérations de réalisation de l’actif : il procède ainsi aux ventes de gré à

gré de biens isolés ou aux cessions d’unité de production par exemple. L’objectif de sa

mission est de tirer le maximum de fonds de cette réalisation des actifs, à ce titre la

transaction peut se présenter comme un instrument plus que nécessaire pour parvenir à cet

objectif en permettant notamment au liquidateur d’éviter de se retrouver dans une situation

génératrice de passif.

198 La liquidation judiciaire peut également être déclarée comme sanction de l’inexécution d’un plan decontinuation voir de cession, depuis la loi du 10 juin 1994, l’article L 620-1 prévoit que la liquidation judiciairepeut être prononcée sans ouverture d’une période d’observation lorsque l’entreprise a cessé toute activité oulorsque le redressement est manifestement impossible.199 Article 499 alinéa 1 et 2.200 V. J.-C. May, Réalisation de l’actif : transactions, compromis et actes voisins, Jurisclasseur com. Fasc. 2710-4

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Quelques exemples pratiques pourront nous permettre de l’apprécier aisément. Ainsi si l’on

prend l’exemple d’une société de fabrication de machines industrielles en liquidation, le

liquidateur dans le cadre de sa mission va vendre tout les actifs de la société : les machines si

la société en possède encore mais également l’entrepôt lui-même si la société en liquidation

en était propriétaire ou dans le cas contraire il résiliera le bail où se trouvaient ces machines.

Dans l’hypothèse où il y a, ce que la pratique des mandataires dénomme, des « créances

clients » c'est-à-dire des sommes dues au débiteur en liquidation par des clients pour la vente

notamment de ces machines, le liquidateur va chercher à les recouvrer. Or il se peut que ces

clients éprouvent eux-mêmes des difficultés à régler le montant dû pour ces machines, et

s’ouvre alors une action en justice pour le liquidateur.

Eu égard à l’incapacité financière du client celle-ci n’aurait pour effet que de permettre au

liquidateur de récupérer les machines, cependant le liquidateur ayant vendu les murs de

l’entrepôt ou résilié le bail de ces derniers devrait conclure à nouveau un bail pour entreposer

les machines récupérées et générer de la sorte du passif au lieu de rapporter des fonds. Dans

une telle hypothèse, seule une transaction serait de nature à débloquer la situation : ainsi le

liquidateur en tenant compte des difficultés du client pourrait l’inciter à faire un effort en lui

proposant un arrangement transactionnel : le liquidateur s’engageant à ne pas exercer d’action

en justice concernant la somme initialement due pour les machines contre versement

immédiat par le client de la moitié ou des deux tiers par exemple de la valeur de la machine.

Une telle hypothèse aurait pour effet d’éviter de générer du passif et d’obtenir immédiatement

une partie substantielle de la somme qui était due.

D’autres hypothèses où la transaction permet d’éviter de générer du passif sont envisageables.

Ainsi on peut prendre l’exemple d’une entreprise faisant l’objet d’une procédure de

liquidation judiciaire qui avait conclu un contrat de bail commercial avec X.

Ce contrat fixait outre le versement d’un dépôt de garantie, le versement mensuel d’un loyer

d’un montant de 3000 euros.

Il est de droit positif que le jugement de liquidation n’emporte pas de plein droit la résiliation

du contrat de bail201. Au contraire dans une telle situation la résiliation du contrat de bail ne

peut devenir effective qu’à l’issue de la procédure de vente aux enchères publiques des actifs

de ladite entreprise et après restitution des biens mobiliers corporels appartenant à des tiers.

201 Art L 621-28 al 6 (ancien art. 37 de la loi de 1985) et L 621-40 (ancien art. 47 de la loi de 1985).

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En d’autres termes la conservation des actifs dont dispose l’entreprise est un objectif essentiel,

prioritaire par rapport au droit du bailleur.

Il peut en outre arriver que les actifs de l’entreprise se composent pour partie de stocks faisant

l’objet d’une clause de réserve de propriété. Par conséquent, ces marchandises sont

susceptibles de faire l’objet d’une procédure de revendication202 à l’initiative du fournisseur

impayé.

Dans une telle hypothèse le bail ne pourra être résilié qu’à la double condition que la vente

aux enchères publiques des actifs de l’entreprise intervienne et que les biens appartenant à des

tiers aient fait l’objet d’une restitution à leur propriétaire respectifs.

La difficulté réside dans l’hypothèse où les droits du revendiquant ne sont pas réglés, ce qui a

à priori pour conséquence le maintien du contrat de bail et la création de dettes de l’ancien

article 40 de la loi du 25 janvier 1985 devenu article L 621-32 du Code de commerce.

Le mandataire de justice n’a pas le droit dans la jurisprudence actuelle de réaliser des actifs

faisant l’objet d’une clause de réserve de propriété203 sauf à engager sa responsabilité204.

D’où un conflit entre les droits du vendeur de meubles bénéficiant d’une clause de réserve de

propriété et les droits du bailleur.

Dans cette hypothèse on pourrait se demander s’il faut privilégier le bailleur et lui restituer au

plus vite ses locaux ou au contraire s’il convient de garantir les droits du revendiquant dont le

droit de propriété n’est pas solutionné.

Pour éviter l’augmentation des dettes de l’art L 621-32 résultant du paiement des loyers la

transaction apparaît comme un moyen non négligeable pour prévenir ou mettre un terme à

l’instance qui doit fixer les droits du vendeur de meubles revendiquant.

Si les droits du revendiquant ne sont pas reconnus dans le cadre de la procédure de

revendication, il y aura création de dettes de loyers qui aurait pu être évitées si le stock

revendiqué avait été vendu dans le cadre de la vente aux enchères.

Ainsi la transaction apparaît comme la solution la plus opportune pour maintenir un équilibre

et préserver au maximum les droits de chacune des parties.

La transaction dans cette hypothèse consisterait pour le liquidateur à trouver un accord avec le

revendiquant et obtenir son agrément pour la cession des biens faisant l’objet de la

202 Sur la revendication de biens fondée sur une clause de réserve de propriété voir F. Pérochon et alii, op. cit. n°287 et s. p. 306 ou encore C. Saint-Halary-Houin, op. cit. n°722 et s. p. 464 ; v. F. Pérochon (Colloque sur lesRevendications) Leurs dernières évolutions jurisprudentiels et leur philosophie, , Rev. proc. coll. n°2 juin 2002p. 123.203 V. C. Saint-Halary-Houin, op. cit. n° 722 et s., p. 464.204 Cass. Com. 6 juill. 1999 Bull. Civ. IV n°150, Rev. des Proc. Coll. 2000 n°14 p.1980, obs. B. Soinne. ; Cass.Com. 4 janv. 2000, JCP E 2000 701 n°7 obs. Cabrillac.

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revendication et répercuter l’éventualité de son droit de propriété et de récupération, qui au

demeurant ne sont pas encore reconnus et qui ne seront peut être pas reconnus dans le cadre

de la procédure de revendication, sur le prix de vente des marchandises dans le cadre de la

vente aux enchères publiques.

Le liquidateur ne devrait pas avoir de mal à trouver un accord avec le revendiquant car si ce

dernier refuse de transiger, il risque, si son droit de propriété n’est pas reconnu dans le cadre

de la procédure de revendication, d’être tenu pour responsable de la création de nouvelles

dettes postérieures au jugement de liquidation judiciaire et de devoir ainsi en faire les frais.

La transaction se présente donc bien souvent comme la seule possibilité qui s’ouvre au

liquidateur pour éviter de générer du passif au travers de l’exercice de sa mission, ainsi à titre

d’ultime exemple on peut citer une dernière illustration de l’utilisation de la transaction

comme moyen de réalisation optimal de l’actif, illustration au demeurant tirée des faits d’un

arrêt du tribunal de commerce de Paris du 20 décembre 1996 : dans cette affaire la Société S,

SARL holding propriétaire de biens immobiliers évalués à 60 millions de francs détenait des

participations majoritaires dans plusieurs sociétés et notamment la société U qui faisait l’objet

d’une procédure de liquidation judiciaire.

La société mère S en difficulté se trouvant être débitrice de sa fille d’une somme de 50

millions de francs, le mandataire liquidateur de la société U a donc engagé une action en

confusion de patrimoine à l’encontre de la société mère pour tenter de récupérer les biens

immobiliers de la société S. Cependant ces derniers étaient hypothéqués au profit de la banque

B de sorte que si l’action avait prospéré elle n’aurait eu d’autre effets que d’augmenter le

passif devenu commun tout en permettant au créancier hypothécaire, en l’espèce la banque B,

de récupérer seul les biens grevés à son profit.

Dans une telle hypothèse les possibilités du mandataire étaient limitées de sorte que l’action

dont il disposait qu’elle soit actionnée ou non ne lui permettait pas de récupérer la créance de

la société en liquidation. Dès lors seule une transaction était de nature à lui permettre de

récupérer une partie de sa créance : en effet dans cet arrêt le mandataire liquidateur fort de

cette analyse a préféré transiger en participant à la procédure de conciliation initiée par la

société S.

Au terme de ce protocole de règlement amiable, la société S a cédé de gré à gré pour la valeur

du marché les actifs immobiliers à charge pour elle de régler l’ensemble de ces créanciers et

notamment pour ce qui nous intéresse la société U pour un montant de 25 millions de francs

soit la moitié de sa créance. Cet arrangement transactionnel était dans une telle hypothèse la

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seule possibilité à la disposition du mandataire liquidateur pour récupérer une partie de ces

fonds tout en évitant de générer du passif à la procédure.

La transaction au vu de ces quelques exemples que l’on pourrait multiplier s’apparente donc à

un outil indispensable pour le liquidateur dans sa mission de réalisation de l’actif, elle permet

d’éviter de générer de nouveaux frais qui viendraient alourdir le passif de l’entreprise en

liquidation. Il est manifeste qu’au travers de ces quelques exemples que, dans les procédures

collectives (et plus particulièrement dans cette phase de liquidation judiciaire) plus que dans

tout autre domaine, est justifié ce vieil adage selon laquelle « une mauvaise transaction vaut

mieux qu’un bon procès ».

L’intérêt de la transaction dans la phase de liquidation judiciaire ne se limite cependant pas à

cette seule forme d’utilisation, en effet les liquidateurs transigent également souvent en vue

d’éviter une action lourde qu’est l’action en comblement de l’insuffisance d’actif.

B. UN MOYEN D’EVITER UNE ACTION LOURDE : L’ACTION EN

COMBLEMENT POUR INSUFFISANCE D’ACTIF

L’article L 624-3 du Code de commerce prévoit que « lorsque le redressement judiciaire ou

la liquidation judicaire d’une personne morale fait apparaître une insuffisance d’actif, le

tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d’actif, décider

que les dettes de la personne morale seront supportées, en tout ou en partie, avec ou sans

solidarité, par tous les dirigeants de droit ou de fait, rémunérés ou non, ou par certains

d’entre eux ».

La condamnation du dirigeant au comblement de l’insuffisance d’actif suppose une faute de

gestion de ce dernier ayant contribué à cette insuffisance. Cette faute de gestion doit être

appréciée par référence à l’attitude d’un dirigeant normalement avisé : on pourrait penser que

cette faute doit être en relation avec la gestion de l’entreprise mais la jurisprudence est sur ce

point très extensive ; la quasi-totalité des décisions des dirigeants se rapportant à la gestion ou

ayant une incidence sur la gestion largement entendue205.

L’application de l’article L 624-3 requière par ailleurs une insuffisance d’actif qui constitue le

préjudice subi par les créanciers, il suppose que l’actif de l’entreprise soit inférieur au montant

de ses dettes et résulte de l’impossibilité de désintéresser les créanciers.

205 V. F. Pérochon et alii, op. cit. N°432 p. 486.

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Il faut enfin que la faute ait contribué à cette insuffisance d’actif. L’exigence du lien de

causalité est en effet fondamentale puisque la loi du 25 janvier 1985 a supprimé la

présomption de faute et de causalité qui constituait la règle sous l’empire de la loi du 13 juillet

1967 au travers notamment de son article 99. Le nouveau texte exige que le dirigeant par sa

faute ait contribué à l’insuffisance d’actif ce qui implique que la faute commise puisse n’être

que l’une des causes de l’insuffisance d’actif206. Selon le professeur Saint-Halary-Houin une

telle preuve, en pratique, se révèle difficile à rapporter207.

C’est, selon elle, « la raison pour laquelle les tribunaux exigent souvent un ensemble de

fautes de gestion afin de mieux caractériser le lien de causalité entre le comportement du

dirigeant et l’insuffisance d’actif. Ils ne se satisfont pas de toute faute, si légère soit-elle qui

aurait concouru au dommage. La Cour de cassation exerce son contrôle et vérifie que la

preuve du lien de causalité a été rapportée, elle estime d’ailleurs à ce sujet que le dirigeant

ne saurait justifier de sa gestion sans mettre en œuvre d’autres causes que l’insuffisance

d’actif »

La transaction sur l’action en comblement de passif208 est de ce fait une pratique qui se

développe de plus en plus dans les juridictions consulaires et qui est ainsi devenue une option

sérieuse qui connaît de plus en plus les faveurs des protagonistes de cette action209.

Les raisons en sont simples et même si les intérêts de chacune des parties sont différents, tous

trouvent un intérêt à transiger.

Ainsi pour les mandataires liquidateurs, il n’y a pas d’opposition systématique car ceux-ci

d’expérience savent que la transaction sur l’action en comblement de passif leur permet d’ôter

l’aléa inhérent à toute procédure judiciaire et rend de ce fait moins incertain le remboursement

d’une partie du passif, sans attendre l’issue souvent longue du procès, issue à laquelle ils

pourraient se heurter le cas échéant à l’insolvabilité de leur débiteur210. Elle leur évite en outre

de rapporter la difficile preuve des fautes de gestion ayant contribué à l’insuffisance d’actif.

Pour le dirigeant l’intérêt de transiger est évident, la transaction lui permettant d’éviter les

conséquences redoutables d’une action en comblement de passif et notamment l’épreuve

206 V. Cass. Com. 17 fév. 1998, Rev. sociétés 1998 p. 581 note Y. Guyon.207 V. C. Saint-Halary-Houin, op. cit. n°1091 et s., p. 718.208 V. J.-A. Robert, Comblement de passif : action ou transaction ?, Gaz. Pal. 2002,2, doct. p. 1642.209 Voir annexe 3 pour un exemple de transaction sur l’action en comblement de l’insuffisance d’actif.210 V. J.-F. Martin, Comblement de passif : un jugement de condamnation peut-il être évité ?, Rev. Lamy dr. aff.2001 suppl. n°42 p. 11.

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difficile de la comparution en chambre du conseil211 mais surtout une éventuelle

condamnation pécuniaire avec la consignation dans le jugement de toutes ses fautes de gestion

ce qui aurait pour conséquence de détruire sa réputation. L’arrangement transactionnel a en

outre le mérite de faire disparaître le risque pour lui de se voir mis en redressement judiciaire

s’il viendrait à ne pas s’acquitter du paiement de sa dette212.

Cette possibilité de transiger n’est bien sûr qu’une faculté pour le dirigeant qui peut estimer

que la preuve que doit rapporter le mandataire liquidateur concernant soit sa qualité de

dirigeant de droit ou de fait, soit concernant la faute de gestion ayant contribué à

l’insuffisance d’actif sera insuffisamment rapportée de sorte qu’il peut préférer courir sa

chance devant les tribunaux.

Les créanciers ne sont pas en reste quant à une transaction sur l’action en comblement de

passif, car ces derniers, même s’ils n’interviennent pas personnellement à la transaction se

voient par le biais de celle-ci désintéressés pour une partie appréciable de leur créance et de

cela de manière sûre et rapide : certaines décisions de justice ont au demeurant fort bien

démontré l’avantage procuré aux créanciers suite à un arrangement transactionnel sur

l’abandon des poursuites comme c’est le cas des transactions conclues à la suite des faillites

de la Banque Pallas Stern et des succursales françaises de la Bank of Crédit and Commerce

International (BCCI)213.

Le groupe BCCI était composé d’une société holding basée au Luxembourg, dont le capital

appartenait majoritairement au suzerain de l’Emirat d’Abu Dhabi, et d’une trentaine de filiales

comme la BCCI Overseas qui a son siège aux îles Caïmans elle-même composée de

succursales relevant de plus de vingt-huit juridictions d’états différents dont la succursale de

Paris qui avait dans sa mouvance des bureaux à Cannes, Marseille et Monaco.

Les difficultés rencontrées par ce groupe qui s’élevaient à un passif de plusieurs dizaines de

milliards de francs ont conduit à sa faillite partout dans le monde et notamment pour la

France, de l’agence basée à Paris : sa liquidation judiciaire ayant été prononcée le 23 juillet

1992 par le tribunal de commerce de Paris.

Dans cette affaire, pour sa partie française, le Gouvernement d’Abu Dhabi, principal

actionnaire du groupe BCCI a proposé une transaction au liquidateur des succursales

211 Le respect de cette exigence est requis à peine de nullité du jugement car il s’agit d’une prescription d’ordrepublic, c’est ce qui résulte d’un arrêt de la chambre commercial de la Cour de cassation du 25 février 1986,JCPE 1986, I, 15379.212 V. J.-L. Vallens, Le comblement de passif n’est pas soluble dans une transaction, Rev. Lamy dr. aff. 2001suppl. n°42 p. 15.213 V. M. Vasseur, le traitement des défaillances des établissements de crédit : les suites de l’affaire BCCI, D.1995 somm. p. 385.

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françaises et monégasques de la BCCI Overseas par laquelle celui-ci offre à chaque créancier

des succursales de lui verser dans la limite du montant de sa créance la somme de 500 000 F

au maximum avec un plafond de 160 millions de F moyennant en contrepartie pour chaque

créancier et en même temps le liquidateur des succursales, l’abandon de leur droit d’agir

contre le Gouvernement d’Abu Dhabi et les parties d’Abu Dhabi au titre d’une responsabilité

ou d’une action en comblement de passif. Cet accord transactionnel a été autorisé par le juge

commissaire et homologué par le tribunal de commerce de Paris. Il ressort des faits de

l’espèce que dès avant l’audience le ministère public avait conclu à l’homologation de

l’accord précité214. Il avait en particulier fait observer que « toute action en responsabilité à

l’encontre du Gouvernement d’Abu Dhabi, au motif qu’il est actionnaire majoritaire de la

société débitrice, la BCCI Holdings, n’avait que peu de chances d’aboutir et surtout mettrait

en jeu un contentieux difficile risquant de se heurter au principe d’ordre public de l’immunité

de juridiction et d’exécution dont bénéficie un Etat étranger » d’ailleurs relevait-il

« l’exécution du protocole permettrait l’indemnisation totale de 580 déposants, s’ajoutant aux

584 autres qui ont fait l’objet d’une complète indemnisation par l’effet d’un mécanisme de

solidarité (AFB), soit 1164 sur un total de 1230 déposants environ. Dix neuf banques sur

vingt-huit seraient également totalement indemnisées ; quatre-vingt-un autres créanciers

chirographaires sur quatre-vingt-quatre le seraient également. Au total, 1164 sur 1342

seraient intégralement remboursés, 178 créanciers non encore intégralement remboursés

auront néanmoins une somme de 500 000F en conséquence de l’offre du Gouvernement

d’Abu Dhabi qu’ils auront accepté ».

Eu égard à l’indemnisation substantielle des créanciers, le ministère public ne pouvait

qu’approuver le liquidateur d’avoir renoncé à toute action en responsabilité à l’encontre du

Gouvernement d’Abu Dhabi et des actionnaires majoritaires en contrepartie de l’offre faite à

tous les créanciers.

La transaction sur l’action en comblement de passif semble pouvoir recueillir les faveurs de

tous les protagonistes de cette action et même d’autres encore, le développement des

assurances prévenant la faute de gestion des chefs d’entreprise est de nature à augmenter les

initiatives des assureurs en ce sens215.

L’unanimité autour des bienfaits de cette pratique n’est cependant pas acquise.

214 M. Vasseur, op. cit. p. 389.215 V. N. Colin, Transaction et action en comblement de passif, P.A. 16 juill. 1999 n°141 p. 4.

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94

En effet un certain nombre de voix éminentes216 s’élèvent contre cette pratique et mettent en

garde contre les dangers de celle-ci. Ces critiques au fond ne visent pas uniquement la

transaction sur l’action en comblement de passif mais visent d’une manière plus générale la

transaction sur des dispositions du droit des procédures collectives en raison des risques

qu’elle présente, ceux-ci résultant du fait que la transaction est un acte dangereux qui comme

tout contrat trouve ses limites dans l’ordre public or la matière des procédures collectives est

dans son ensemble d’ordre public, dès lors comment concilier l’inconciliable si ce n’est en

clarifiant l’ordre public des procédures collectives.

216 V. dossier spécial sur le comblement de passif et la transaction : la quadrature du cercle ? avec lescommentaires de M. Chaput, de M. Martin et de M. Vallens, Suppl. Rev. Lamy dr. des aff., Oct. 2001 p. 3 et s.

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95

CHAPITRE 2. LA TRANSACTION DANS LES PROCEDURES

COLLECTIVES : UN OUTIL DANGEREUX

La transaction a toujours été considérée comme un acte particulièrement dangereux,

d’Argentré le relevait déjà à son époque217.

Le cadre des procédures collectives n’est pas de nature à apaiser ce trait mais au contraire

semble l’amplifier, cela résulte du fait que les procédures collectives sont une matière

particulièrement sensible qui met en jeu notre économie nationale.

La transaction, si elle semble faciliter la tache des mandataires judiciaires n’est pas,

contrairement à une décision de justice qu’elle a pour but de remplacer, synonyme de sécurité

juridique.

Cette insécurité résulte essentiellement de l’utilisation qui est faite de la transaction car celle-

ci selon le moment où elle est conclue n’est pas de nature à éteindre complètement un

contentieux ou au contraire peut l’éteindre inutilement lorsqu’on transige sur l’exécution

même d’une décision de justice, alors que l’on pourrait plus efficacement laisser celle-ci

suivre librement son cours.

Mais les véritables dangers de la transaction résultent essentiellement de leur objet car en effet

la question est de savoir si l’on peut transiger sur tout, il nous faut donc connaître les limites

des pouvoirs des mandataires liquidateurs dans leur pouvoir de transiger. (Section 1)

La réponse semble communément donnée dans l’ordre public économique des procédures

collectives. Cela n’empêche pas la loi de 1985 de prévoir elle-même la faculté de transiger.

Une contradiction nous semble au demeurant apparente : comment peut-on transiger sur une

matière d’ordre public si la limite même de la transaction est l’ordre public. Seule une

clarification de l’ordre public des procédures collectives est de nature à éviter ce syllogisme

parfait et de nous permettre d’adapter ces deux notions à priori incompatibles que sont l’ordre

public et la transaction. (Section 2)

217 D’Argentré, Coutume de Bretagne, art. 266, Chap. 3, A : « De transactione mirifice pugnatur in scholis ».

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96

SECTION 1. LES DANGERS DE LA TRANSACTION DANS LES

PROCEDURES COLLECTIVES

La transaction étant permise par le droit des entreprises en difficulté, les dangers qui résultent

de ce contrat ne peuvent provenir que de l’utilisation qui en est faite. C’est d’ailleurs pour

cette raison que la transaction, qu’elle soit conclue en période de redressement ou de

liquidation judiciaire, est soumise à des formalités procédurales.

Cependant l’utilisation qui est faite aujourd’hui de la transaction dans les procédures

collectives dépasse très souvent le cadre pour lequel elles ont été conçues de sorte que même

la procédure de conclusion d’une transaction avec toutes les formalités légales obligatoires

qu’elle emporte n’est pas de nature à éliminer ces dangers.

De nouveaux dangers liés aux nouvelles formes d’utilisation de la transaction, comme celle

sur l’action en comblement de passif, sont donc apparus. Ces dangers pour cette dernière

résultent essentiellement du moment choisi au niveau de la procédure en comblement de

passif pour rechercher une transaction. (§1)

De manière plus profonde, le véritable danger de la transaction dans les procédures collectives

résulte de son objet, la possibilité de transiger pour les mandataires liquidateurs peut conduire

à des abus de leur part, d’ailleurs certaines décisions déjà citées si elles sont tout à fait

justifiées d’un point de vue économique n’en restent pas moins excessives d’un point de vue

juridique. (§2)

§1. LES DANGERS QUANT A SA DATE DE CONCLUSION

La transaction sur l’action en comblement de passif si elle semble présenter un certain nombre

d’intérêts pour tous les protagonistes de cette action n’est cependant pas dépourvue de risques

pour ces derniers.

En effet certains risques sont inhérents à la conclusion d’une transaction « prématurée » (A),

il convient pour ces raisons d’éviter de transiger trop tôt.

Il ne faut cependant pas transiger trop tard non plus car en effet, la recherche d’un

arrangement transactionnel alors même qu’une décision de condamnation au comblement du

passif est intervenue, est possible, celle-ci pose néanmoins un problème de justification et le

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développement de cette pratique n’est pas sans poser des difficultés pour l’exigence

d’efficience des procédures collectives. (B)

A. LES RISQUES INHERENTS A UNE TRANSACTION PREMATUREE SUR

L’ACTION EN COMBLEMENT DE PASSIF

La transaction sur l’action en comblement de passif a pour but d’éviter une condamnation du

dirigeant en contrepartie d’une contribution de ce dernier à la procédure collective.

L’apport fait par le dirigeant à la procédure collective le met à l’abri des poursuites que

pourrait engager le mandataire liquidateur pour les fautes qu’aurait commis le dirigeant dans

sa gestion passée.

Cependant une transaction qui interviendrait trop tôt peut présenter des risques pour ce dernier

et cela pour plusieurs raisons.

En premier lieu, les fautes de gestion envisagées dans l’accord peuvent ne pas être les seules

fautes de gestion qu’aurait commis le dirigeant dans sa gestion passée, dès lors en vertu de

l’article 2048 du Code civil, qui est d’interprétation stricte, ces dernières ne sont pas incluses

dans l’accord transactionnel.

Rien n’empêche alors le mandataire liquidateur d’agir en comblement de passif en invoquant

la découverte de nouvelles fautes qui n’auraient pas été visées dans l’accord et cela de

manière d’autant plus légitime si elles ont été découvertes après.

On peut à ce titre rappeler de manière accessoire qu’une transaction peut faire l’objet d’une

rescision sur le fondement de l’article 2053 du Code civil pour erreur sur l’objet ou lorsqu’il y

a dol.

Certaines transactions, pour prévenir ce risque lié à la diversité des fautes de gestion prévoient

une renonciation générale du liquidateur à l’action en comblement de passif pour toutes les

fautes de gestion du dirigeant antérieures au jugement d’ouverture, cependant pour le

professeur Chaput « la validité d’une telle renonciation générale est douteuse »218. Il a ainsi

été jugé que l’accord intervenu ne peut avoir d’effet sur des éléments de préjudice inconnus

lors de l’établissement d’une transaction.219

218 V. Y. Chaput, l’action en comblement de passif est-elle susceptible d’une transaction ?, Bull. d’act. Lamy dr.Com. Mars 2001 n°131 p. 1.219 Cass. Civ. 1ère , 26 janv. 1999, Resp. civ. et assurances 1999, p. 100.

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98

Ces risques liés à une transaction prématurée ne sont au demeurant pas les seuls. En effet si

une transaction conclue avec le mandataire liquidateur a pour résultat de mettre à l’abri le

débiteur contre une action en comblement de passif intentée par ce dernier, le dirigeant n’est

pas pour autant à l’abri de toutes actions en comblement de passif et cela en raison du fait que

les titulaires de cette action sont multiples.

En effet, depuis la loi du 25 janvier 1985, le liquidateur n’a plus le monopole de cette action

et celle-ci peut être intentée par tous les auxiliaires de justice à savoir l’administrateur, le

représentant des créanciers, le commissaire à l’exécution du plan et le liquidateur mais

également par les autorités judiciaires et notamment par le tribunal qui peut se saisir d’office

ou peut être saisi par le procureur de la République220.

Les mandataires liquidateurs, s’ils peuvent donc renoncer à agir individuellement, ne peuvent

paralyser le droit à agir des autres intervenants, dès lors ils n’ont pas juridiquement le pouvoir

de mettre fin au litige. La transaction conclue par le dirigeant et le mandataire n’est donc pas

de nature à libérer totalement le dirigeant qui peut se voir poursuivi pour les fautes par un

autre organe de la procédure et cela en raison de l’effet relatif des conventions.

Un certain nombre de risques sont donc inhérents à une transaction qui interviendrait trop tôt

et dans la précipitation.

Une transaction ne doit pas intervenir trop tard non plus, lorsque une condamnation au

comblement du passif est déjà intervenue. Se poserait alors la question de la justification de

cette dernière car une transaction inutile qui s’apparente à une remise de dette injustifiée n’est

pas sans poser de difficultés pour l’exigence d’efficacité des procédures collectives.

B. LA TRANSACTION POSTERIEURE AU JUGEMENT DE CONDAMNATION

A COMBLER L’INSUFFISANCE D’ACTIF : UNE REMISE DE DETTE

JUSTIFIEE ?

Si la transaction est généralement conclue avant un procès qu’elle tend justement à éviter,

c’est poser la question très tôt dans la pratique de la possibilité de transiger sur les

conséquences d’une décision ayant autorité de chose jugée voir même force de chose jugée.

220 V. F. Pérochon, op. cit. n°430 p. 484.

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99

En effet lorsque les droits en cause ne donnent prise à aucune discussion, notamment lorsque

un jugement est déjà intervenu, on s’est demandé si l’on pouvait admettre qu’ y ait

transaction sur leur mise en œuvre.

La réponse nous a été donnée par la pratique car en effet si on peut transiger pour clarifier un

droit douteux, on le fait aussi très souvent pour éviter les lenteurs, les difficultés et les soucis

résultant de la mise en œuvre d’un droit certain par la voie de l’exécution forcée. C’est ce qui

explique qu’on puisse transiger sur l’interprétation et l’exécution d’un jugement, lesquelles

pourraient donner lieu à de nouvelles actions judiciaires.

Ainsi, il apparaît que la transaction n’est pas seulement un procédé de substitution à la vérité

juridictionnelle mais aussi un moyen d’application spontanée du droit221.

L’application de ce postulat aux procédures collectives et plus particulièrement à un jugement

de condamnation à combler l’insuffisance d’actif a eu lieu pour la première fois sous l’empire

du droit antérieur où il a été décidé qu’une transaction peut valablement intervenir, après la

condamnation au comblement au passif, entre le syndic et le dirigeant condamné222.

Cette pratique est aujourd’hui confirmé dans notre droit positif et notamment au travers d’un

arrêt de la Cour d’appel de Metz du 9 janvier 2001 qui a repris cette solution en décidant que

« n’est en rien contraire à l’ordre public la transaction intervenue après condamnation d’un

dirigeant au paiement d’une partie des dettes sociales, en vertu de laquelle celui-ci paie au

liquidateur un montant inférieur à celui auquel il a été condamné »223.

On peut cependant, à l’image de certains auteurs224, s’interroger sur la justification d’une telle

transaction car en effet lorsqu’une juridiction condamne un dirigeant à combler le passif cette

dernière a généralement pris le soin, conformément aux prescriptions de l’article L 624-7 du

Code de commerce, de mesurer les éléments du patrimoine du dirigeant susceptibles de

permettre de combler le passif et de servir au dédommagement des créanciers.

Dès lors, on peut « craindre que celui qui refuse d’indemniser et propose une transaction

compte sur l’absence d’exécution forcée des jugements des tribunaux de commerce225 et sur le

découragement des créanciers face à la nécessité d’entamer une procédure de redressement

221 V. E. Serverin, P. Lescoumes et T. Lambert, Transactions et pratique transactionnelle, Economica 1987, p.28222 V. Cass. Com. 18 mai 1979, D. 1979, IR, p. 531 obs. A. Honorat.223 CA Metz 9 janv. 2001, Rec. Jur. Est 2001 p. 103.224 Comme le professeur Chaput qui soulève le risque, notamment en matière fiscale, d’y voir un acte anormal degestion. Y. Chaput, op. cit.225 Qui résulte de l’article 877 du NCPC.

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100

ou de liquidation judiciaire à son encontre (prévue par l’article L 624-4 du Code de

commerce) »226.

Il n’est d’ailleurs pas possible de considérer que la transaction prévient ce litige à naître

concernant l’application de l’article L 624-4 car « ce dernier n’est pas porteur d’un litige à

proprement parler (…) il n’est qu’une modalité d’exécution de la condamnation obtenue

selon l’article L 624-3. Aucun litige n’est à prévenir ; aussi bien, l’accord qui révise le

montant de la somme mise à la charge du dirigeant dont la faute de gestion a été prouvée doit

être qualifié, plutôt que de transaction, de remise de dette accordée par l’administrateur ou le

mandataire au bénéfice du dirigeant fautif ».

Cette remise de dette est prévue par la loi du 25 janvier 1985 dans son article 74 devenu

article L 621-76 du Code de commerce, elle l’était déjà sous l’empire de la loi du 13 juillet

1967 au travers du concordat conclu par le débiteur et ses créanciers chirographaires. Cette

remise de dette n’est au demeurant pas gratuite, elle est concédée dans l’espoir que le débiteur

surmonte ses difficultés et rembourse plus sûrement ce qui reste dû, elle ne peut donc dans

cette optique être accordée qu’en phase de redressement judiciaire.

Dès lors comme le souligne si judicieusement Nathalie Colin227 « lorsque la liquidation

judiciaire est prononcée, les créanciers, n’ont par définition, aucun espoir de retour à

meilleur fortune ; la remise de dette ne peut avoir le caractère intéressé qui est le sien depuis

1967.

Dans l’hypothèse où le tribunal a validé un plan de redressement judiciaire, la remise de la

dette découlant de la condamnation à combler tout ou partie du passif social peine encore à

se trouver une contrepartie. En effet, le produit de l’action en comblement ne provient pas du

patrimoine social, mais du patrimoine personnel du dirigeant. Renoncer à une part de la dette

n’assure pas un paiement plus sûr de ce qui reste dû. De ce point de vue, les créanciers n’ont

donc pas intérêt à la diminution de la dette et à un échelonnement des paiements.

Le représentant des créanciers n’accepte la remise au titre de l’article L 623-4 que pour en

terminer avec les procédures judiciaires et enfin percevoir une part de l’indemnisation jugée.

Il y a donc un intérêt, mais cet intérêt trouve sa source dans la mauvaise volonté du débiteur

et ne doit pas être encouragé par les institutions judiciaires ».

Il est donc difficile, comme le démontre si bien ces auteurs de trouver une justification à une

transaction sur un jugement de condamnation à combler l’insuffisance d’actif qui constitue en

226 V. N. Colin, op. cit.227 N. Colin, op. cit.

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101

réalité une remise de dettes. D’ailleurs même lorsque celle-ci trouve un intérêt elle ne peut

être consentie librement par le mandataire liquidateur car elle nécessite l’accord du créancier,

le pouvoir de transiger reconnu par la loi de 1985 n’emporte pas, ou du moins c’est à

souhaiter, pouvoir de remettre des dettes228.

Le pouvoir de transiger du mandataire liquidateur n’est donc pas sans limites et c’est là la

véritable problématique car il convient de déterminer ces limites, en effet un certain nombre

de décisions nous ont montré que certaines pratiques transactionnelles des mandataires

liquidateurs peuvent avoir un objet excessif, pour ne pas dire abusif.

§ 2. LES DANGERS QUANT A SON OBJET

Les dangers relatifs à l’objet des transactions résultent principalement de l’absence de limites

(ou des limites peu claire) aux pouvoirs des mandataires de justice de transiger, ce qui peut

avoir pour conséquence la conclusion de transactions qui ont peu de rapport avec l’objectif

pour lequel elles ont été prévues.

On pourrait penser que pour les mandataires liquidateurs cette limite est plus claire que pour

les administrateurs judiciaires dans la mesure où ils ne peuvent transiger que dans l’intérêt

collectif des créanciers or nous avons eu l’occasion de voir que cette notion est elle-même peu

satisfaisante dans la mesure où le législateur s’il a clairement opposé les intérêts individuels

aux intérêts collectifs n’a donné aucun critère qui permettrait de les distinguer ou d’identifier

un intérêt collectif229. La notion est donc floue et la porte semble ouverte aux abus, on peut en

effet constater dans certaines hypothèses que l’intérêt collectif qui devrait être la motivation

première des mandataires liquidateurs semble passer au second plan.

Certaines décisions ont en effet démontré que l’absence de limites aux pouvoirs

transactionnels dévolus aux mandataires liquidateurs peut conduire à des abus. (A)

D’autres décisions, nous ont montré que certaines transactions au demeurant justifiées d’un

point de vue économique, peuvent être d’un point de vue juridique complètement excessives.

(B)

228 N. Colin, op. cit.229 Supra Chap. 1er ,Section 1ère ,§1er , B, 2. La poursuite de l’intérêt collectif des créanciers.

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A. LA PROBLEMATIQUE LIMITE DES POUVOIRS TRANSACTIONNELS

DEVOLUS AU MANDATAIRES LIQUIDATEURS

L’absence de limites claire aux pouvoirs des mandataires liquidateurs de transiger n’est pas

sans poser de problèmes quand à la portée de certaines pratiques transactionnelles. Les

mandataires liquidateurs procèdent souvent, comme nous avons pu l’apprécier, à des

arrangements transactionnels avec les créanciers ou les débiteurs du dirigeant en liquidation.

Si ces arrangements présentent un certain nombre d’avantages de par la rapidité et la

souplesse qu’ils présentent face à la lourdeur et la complexité d’une action en justice, certains

n’en présentent pas moins une validité douteuse dans la mesure où en matière de procédure

collective tout ne prête peut être pas à transaction. En effet, la Cour de cassation n’hésite pas

à remettre en cause certaines transactions alors même qu’elles sont autorisées par le juge

commissaire.

Même si les interventions de la Cour régulatrice apparaissent dans ce domaine rarissime,

certaines décisions apparaissent fortement utiles pour tenter de fixer une limite aux pouvoirs

des mandataires liquidateurs de transiger.

La décision du 23 novembre 1999230 apparaît en ce sens porteuse d’une solution réellement

innovante dans la mesure où, alors même que le pourvoi ne se référait pas expressément à

l’ancien article 158 de la loi de 1985 devenue L 622-20 du Code de commerce, la Chambre

commerciale, saisissant l’occasion, explicite la portée de ce texte, en fixant une limite précise

et concrète au pouvoir de transiger accordé au liquidateur.

Dans cette affaire, la société Logirep avait passé avec la société Bardeco un marché pour la

construction d’un immeuble assuré par la garantie de bonne fin d’un établissement bancaire.

La société Bardeco ayant été déclarée en liquidation judiciaire, un avenant de transfert du

marché avait été signé, fixant notamment le montant des travaux non réalisés. La société

Logirep avait demandé le paiement de ce montant à la banque, demande qui a été rejetée par

la Cour d’appel de Paris le 17 juin 1997 dans un arrêt confirmatif. La demanderesse s’est alors

pourvue en cassation. Dans son premier moyen, qui est repris dans la suite de ses prétentions

et qui repose sur une interprétation erronée des articles 99 de la loi du 25 janvier 1985 devenu

article L 621-102 du Code de commerce et 71 du décret d’application231, la société Logirep

soutient qu’en cas de liquidation judiciaire, il n’y a pas de vérification de créances, le produit

230 V. A. Lienhard, le liquidateur n’a pas le pouvoir de renoncer à l’extinction d’une créance, obs. sous Cass.Com. 23 nov. 1999, D.A. 2000 n°1 act. juris. p. 13 ; JCP E 2000 n°18-19, p. 752, obs. P.Pétel ; RTD com. 2000,p. 719, obs. A. Martin-Serf.

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de l’actif étant absorbé par les frais de justice et les créances privilégiées, les créanciers n’ont

donc pas à procéder à une déclaration de créance.

Elle en conclue que la créance ne peut être regardée comme éteinte au motif qu’elle n’était

pas déclarée. Ce moyen qui n’est pas nouveau n’est pas recevable mais fait ressortir l’objectif

recherché par la demanderesse au pourvoi.

C’est la seconde branche du moyen qui doit cependant nous intéresser. La société Logirep, en

effet, déduit de ce qui précède que puisque la déclaration de créance n’est pas obligatoire, le

liquidateur peut renoncer à l’effet extinctif qui s’attache au défaut de formalité des articles 50

et suivants de la loi de 1985 devenus articles L 621-43 et suivants du Code de commerce. Or,

selon elle, les juridictions n’ont pas recherchées si, à l’occasion de la signature de l’avenant de

transfert, le liquidateur de son cocontractant n’avait pas renoncé à l’effet extinctif qui pouvait

s’attacher à un éventuel défaut de déclaration de créance. Ce faisant, elles auraient violé les

articles L 621-43 et suivants du Code de commerce (ancien article 50 et suivants la loi du 25

janvier 1985), 2013 et 2036 du Code civil.

La demanderesse au pourvoi semble donc avoir masqué dans la rédaction de ce moyen sa

véritable intention et plus encore le terrain juridique sur lequel elle tenait, en pratique, à se

placer. La chambre commerciale ne s’y est pas trompée et a rendu sa décision par le biais

d’une substitution de motifs.

Dans cet arrêt il ne fait pas de doute que la Cour de cassation ait voulu rendre une solution de

principe en refusant au mandataire le droit de renoncer à l’extinction d’une créance non

déclarée. Mais par-delà sa solution particulière, cet arrêt ouvre la réflexion sur les règles

auxquelles le liquidateur peut renoncer.

Certains auteurs232 ont dans cet objectif préconisé des limites qui résideraient dans la

prohibition des transactions qui dérogeraient à des « interdictions légales » tel que les

paiements préférentiels ou « des obligations inhérentes au fondement même de la procédure

et de son caractère collectif », au premier rang desquels le principe d’égalité des créanciers.

C’est en réalité dans la notion d’ordre publique que la majorité de la doctrine233 voit, suite à

cet arrêt et conformément au droit commun des obligations, la principale limite des

mandataires liquidateurs dans leurs pouvoirs de transiger, les notions précédemment évoquées

par les auteurs n’en étant que des notions plus restrictives234.

231 V. Cass. Com. 11 juin 1996, RD bancaire et bourse 1996, p. 213, obs. Campana et Calendini.232 CA Versailles 15 déc. 1995, Rev. proc. coll. 1999, p. 178, obs. P. Canet233 V. P.-M. Le Corre, Pratique des procédures collectives, Dalloz Référence, 2001, n°272 ; E. Le Corre-Broly,Droit des entreprises en difficulté, éd. Armand Colin,2001, n°147 p. 121.234 V. J.-L. Vallens, op. cit.

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104

C’est d’ailleurs dans cette notion d’ordre public qu’il semble que la Cour de cassation s’est à

nouveau prononcé très récemment sur les limites du pouvoir de transiger du liquidateur. Dans

un arrêt du 10 décembre 2002235, la Cour livre encore une précision importante sur les limites

des pouvoirs du liquidateur de transiger. Dans cet affaire, le liquidateur d’un débiteur

exploitant individuel d’un fonds de commerce de bar-tabac loto et salle de jeux, louant à la

société venderesse du fonds le matériel, les jeux et la licence de boissons, et aux dirigeants de

cette société les locaux d’exploitation, avait sollicité du juge-commissaire, conformément à

l’article L 622-20 du Code de commerce, l’autorisation de restituer les locaux, les jeux et la

licence à leurs propriétaires contre abandon par ceux-ci de leur créance. Demande à laquelle

s’est opposée la banque prêteuse nantie sur ledit fonds.

Dans cet arrêt, la Cour de cassation, approuvant la Cour de Saint Denis de la Réunion, s’est

prononcée contre le principe même de la transaction projetée, dont l’objet excède le pouvoir

de transiger du liquidateur, fût-il autorisé par le juge-commissaire.

Cet arrêt rejoint donc l’arrêt du 23 décembre 1999 qui a empêché le liquidateur de transiger

sur une disposition d’ordre public : la renonciation à l’extinction d’une créance. Il faut en

effet voir dans ce nouvel arrêt la traduction d’une réserve implicite des textes visant à

proscrire comme en droit commun, toute transaction qui conduirait à bafouer une règle

d’ordre public, en l’espèce, le « principe d’interprétation stricte des privilèges » inscrit dans

l’article 2093 du code civil, duquel il résulte qu’un créancier chirographaire ne saurait par la

magie d’une transaction se retrouver mieux loti qu’un créancier nanti236.

Il n’empêche que si l’ordre public doit constituer la principale limite des transactions conclues

pendant les procédures collectives, certaines transactions alors même qu’elles sont tout a fait

valides et homologuées par les tribunaux n’en sont pas moins fortement attentatoires à l’ordre

public.

B. LES TRANSACTIONS EXCESSIVES

La pratique récente des transactions sur les actions en responsabilité tend à se développer de

plus en plus dans les juridictions consulaires et devient une option sérieuse pour ces dernières,

cependant cette pratique appelle de sérieuses questions quand à sa validité.

235 Cass. Com. 10 déc. 2002, , D.A.. 2003 n°2 act. juris., p. 135 obs. A. Lienhard.236 A. Lienhard, op. cit.

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105

On pourrait en effet se demander si l’on peut balayer d’un trait de plume toutes les actions en

responsabilité contre le versement d’une somme dont on ne sait ce qu’elle représente

réellement.

Les transactions AOM-Air liberté et BATA sont, de ce point de vue, des décisions que l’on ne

peut approuver pleinement237. Ainsi si l’on a vu que seules ces transactions pouvaient

permettre le sauvetage de ces entreprises en apportant immédiatement des fonds

indispensables à la reprise de l’entreprise, on ne peut, d’un point de vue juridique et non plus

seulement économique, qu’être effaré du nombre d’actions auxquels les organes de la

procédure ont renoncé. Ainsi si la doctrine238 peine à trouver une justification à une

transaction sur l’action en comblement de passif, comment justifier une transaction sur toutes

les actions en responsabilité possibles et imaginables offerte par le droit des entreprises en

difficulté et plus encore par le droit commercial.

De telles transactions sont tout simplement excessives et bafouent totalement l’ordre public

des procédures collectives. Ainsi dans la transaction AOM-Air liberté, il a été renoncé à la

mise en œuvre de toutes les actions fondées sur les dispositions des articles 1382 du Code

civil, L 225-25 du code de commerce (qui en cas d’ouverture d’une procédure de

redressement ou de liquidation judiciaires, rend responsables du passif social les personnes

visées par les textes concernant ces procédures et les soumet aux interdictions et déchéances

prévues par ces textes), L 624-3 (sur l’action en comblement de passif), L 624-4, L 624-5, L

624-6 et suivants (concernant le redressement et la liquidation personnelle) ainsi que sur les

articles L 625-1 à L 625-10 et suivants (sur la faillite personnelle et l’interdiction de gérer), L

626-1 à L 626-7 (délit de banqueroute et complicité de banqueroute), L 626-8 à L 628-12

(autres infractions) du Code de commerce. Toutes les actions en responsabilité délictuelle et

contractuelle ont été interdites, il a également été renoncé à la mise en œuvre de lettres de

confort ou de toute autre garantie donnée par Swissair ou par ses administrateurs, certains

auteurs comme le professeur Soinne239 ajoutant même, que bien que les actions appartenant à

l’administration fiscale en cas de fraude fiscale, ou celles concernant d’éventuels abus de

biens sociaux ou encore celles concernant d’éventuels détournements d’actifs et leurs

237 V. les commentaires de la presse et notamment l’article de M. Bostnavaron « AOM-Air Liberté sous pavillonde complaisance » journal Le Monde du 3 août 2001 p. 1 et 11et les nombreux communiqués de l’associationAir 100 sur www.air100.net mais aussi pour l’affaire BATA l’article de J. Morawski « BATA : un accord secretdévoilé » journal l’Humanité du 12 décembre 2001.238 V. dossier spécial sur le comblement de passif et la transaction : la quadrature du cercle ? avec lescommentaires de M. Chaput, de M. Martin et de M. Vallens, Suppl. Rev. Lamy dr. aff., Oct. 2001 p. 3 et s. ;mais aussi N. Colin, Transaction et action en comblement de passif, P.A. 16 juill. 1999 n°141 p. 4.239 V. B. Soinne, Une étrange décision (à propos de l’affaire AOM-Air Liberté), Rev. proc. Coll. 2001 n°4 p.161.

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106

conséquences civiles n’ont pas été évoquées on peut supposer qu’elles ont également été

interdites.

La transaction élaborée dans le cadre de l’affaire BATA si elle est moins explicite quant aux

actions auxquels les organes de la procédures renoncent n’en est pas moins tout aussi

purgative d’actions en responsabilité pour la société en redressement. Ainsi il a été prévu

qu’en contrepartie de leurs contributions les organes de la procédure « renoncent à toute

instance, action, réclamation, demande et prétention de quelque nature que ce soit à

l’encontre des actionnaires et mandataires (de droit et/ou de fait) sociaux passés et actuels

des sociétés du Groupe BATA ayant, directement ou indirectement, pour fondement, cause ou

origine la gestion de BATA HELLOCOURT et les sociétés du Groupe BATA ».

L’intérêt des créanciers est au demeurant quasiment absent de cet accord dans la mesure où le

prix de cession a été dans les deux hypothèses très faible voir même inexistant pour l’affaire

AOM où le prix de cession a été de 4 francs symboliques. D’ailleurs le montant de la

contribution versée par les cotransigeants ne profite nullement au créancier dans la mesure où

cette dernière est versée au repreneur alors même qu’il est de droit positif que le produit d’une

action en responsabilité basée sur les articles L 624-3 et suivants doit conformément à l’alinéa

3 être réparti entre les créanciers au marc le franc et qu’il en est ainsi même pour les sommes

issues d’une transaction conclue sur cette action240.

Cette prime de cession ne laisse au demeurant pas le droit de la concurrence indifférent dans

la mesure où elle s’analyse en « une sorte de subvention accordée à une entreprise privée par

une autre entreprise privée pour des raisons sociales ». Pour la juridiction l’opération a

consisté à « exproprier judiciairement une entreprise privée, représentée par ses créanciers,

au profit d’une autre entreprise privée, le repreneur »241.

De tels pratiques sont au demeurant de nature à créer un clivage dans l’application du droit

des entreprises en difficulté en constituant un régime pour le commun des débiteurs, les

dirigeants modestes actionnés en comblement de passif pour quelques centaines de milliers

de francs, et un régime particulier pour « les gros poissons242 », ceux qui peuvent se « laver »

de leurs responsabilités en offrant des sommes faramineuses indispensables à la reprise de

telles structures.

Les transactions conclues dans le cadre des affaires AOM-Air Liberté et BATA sont donc

manifestement attentatoires à l’ordre public et au-delà même de l’homologation dont elles ont

240 V. Cass. Com. 20 mai 1997, RJ Com. 1998 n°1496 p. 26 note J.-M. Calendini.241 V. B. Soinne, op. cit.

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fait l’objet on peut s’interroger sur le rôle du représentant de l’ordre public dans ces

juridictions qu’est le Ministère public. En effet, la vie des entreprises relève de l’ordre public,

économique et social, et à ce titre le ministère public est nécessairement intéressé par

l’application de la réglementation la concernant. Ainsi dans ces deux affaires il a été fait

observer par le Ministère public qu’il n’était pas partie à la transaction mais qu’il ne fait

aucune observation particulière quant au contenu du protocole qui lui a été présenté, par cette

formule un peu sibylline, le ministère public fait savoir qu’il ne s’oppose pas à sa validité

mais qu’en même temps il ne peut pas renoncer à ses droits. On peut légitimement se

demander comment celui qui est chargé de veiller à la défense de l’ordre public économique

et social et qui n’est autre que le porte parole des autorités publiques243 auprès du tribunal

saisi de la procédure de redressement judiciaire peut valider même implicitement une telle

renonciation à ces dispositions : n’aurait-il pas dû plutôt relever appel ?

Le professeur Derrida244 évoque ainsi la possibilité, à défaut de pouvoir engager la

responsabilité des organes de la procédure pour avoir renoncé aux actions protectrices des

intérêts des créanciers en raison de la force de chose jugée attachée à la décision qui a imposé

la transaction, « d’engager la responsabilité de l’Etat pour la faute lourde qu’aurait commise

le tribunal en subordonnant la conclusion du plan de cession à une transaction emportant

renonciation à l’application de dispositions d’ordre public245 »

Les transactions conclues dans le cadre de l’affaire BATA comme dans l’affaire AOM-Air

Liberté ont d’ailleurs un fondement légal douteux dans la mesure où dans les deux cas il n’est

pas mentionné la disposition de la loi qui a permis aux organes de la procédure de transiger :

l’ancien article 33 ou 158 de la loi de 1985 (devenue respectivement L 621-24 et L 622-20 du

Code de commerce), les deux sociétés étant toutes les deux en période d’observation au

moment de la transaction, la logique voudrait que la procédure empruntée soit celle de

l’ancien article 33 de la loi de 1985 devenu article L 621-24, or dans les deux hypothèses les

administrateurs ont transigé sur une action en responsabilité pour la défense de l’intérêt

collectif des créanciers alors qu’ ils n’ont aucun pouvoir pour exercer cette action246.

D’ailleurs dans les deux hypothèses, les transactions (même si dans l’affaire BATA le juge-

commissaire a donné un avis favorable à cette dernière) n’ont à aucun moment été autorisées

242 F. Derrida, Transaction sur les sanctions (sur l’affaire AOM-Air Liberté), D.A. 2002 n°1, somm.Commentés, p. 75.243 V. M.-A. Lafortune, Le ministère public et l’entreprise en difficultés, P.A. 12 janv. 1994 n°5 p. 20.244 F. Derrida, Transaction sur les sanctions (sur l’affaire AOM-Air Liberté), D.A. 2002., Somm. Commentés,n°1 p. 75.245 Art. 718-1 COJ246 V. Cass. Com., 12 juill. 94, Rev. proc. coll. 1995, n°5 p. 124 , obs. B. Soinne.

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par le juge-commissaire, elle n’a pas même été homologué par le tribunal dans le cadre de

l’affaire BATA qui a très habilement contourné la difficulté en conférant autorité de la chose

jugée à celle-ci.

Les transactions conclues dans le cadre des affaires AOM - Air liberté sont donc des décisions

qu’il est difficile d’approuver pleinement car elles sont pour le moins discutables dans leur

principe en ce qu’elles débordent largement sur l’ordre public.

S’il convient de ne pas faire de l’intégrisme dans l’interprétation juridique, le respect de la

règle de droit, comme le souligne le professeur Soinne, « lorsque celle-ci est apparemment

claire et nette implique qu’elle soit respectée car ce n’est pas en la violant d’une manière

aussi délibérée que l’on rétablira et renforcera l’état de droit qui doit demeurer le notre »247.

Cependant de telles décisions ne sont au demeurant pas totalement injustifiées dans la mesure

où elles étaient l’unique possibilité de sauver des milliers d’emplois, on peut même dire que

d’un point de vue économique et social elles étaient au contraire totalement justifiées.

Dès lors comment concilier l’inconciliable si ce n’est en clarifiant la notion d’ordre public

afin de pouvoir trouver un équilibre entre cette notion et celle de transaction qui sont

apparemment des notions incompatibles.

SECTION 2. L ORDRE PUBLIC DANS LES PROCEDURES

COLLECTIVES : UNE NOTION A CLARIFIER.

En raison de la place primordiale des entreprises dans le jeu de notre économie nationale, leur

vie relève de l’ordre public, économique et social. En effet, la place importante de l’intérêt

général au plan notamment économique, social et financier du redressement des entreprises,

justifie l’intervention nécessaire du ministère public dans les procédures collectives et les très

larges attributions du procureur de la République.

La notion d’ordre public est cependant, une des notions juridiques les plus difficiles à définir.

Bien qu’un nombre important de définitions ait été proposé par la doctrine248, la plupart

découlent du résultat et bien évidemment ne servent à rien quand on s’interroge à titre

préalable sur ce qui est d’ordre public ou ce qui ne l’est pas.

247 V. B. Soinne, op. cit.

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L’ordre public constitue une limite à la transaction249 mais également à tous les modes de

règlements alternatifs des litiges : il en est ainsi de l’arbitrage250 par exemple.

La loi du 25 janvier 1985 eu égard à sa finalité est dans son ensemble d’ordre public, elle

devrait donc à priori constituer un îlot inaccessible pour la transaction, or ce serait oublier que

cette dernière a elle-même prévu au travers de ces anciens articles 33 et 158 (devenus L 621-

24 et L 622-20 du Code de commerce) la faculté de transiger.

Dès lors, seule une clarification de cet ordre public pourrait nous permettre de concilier

l’inconciliable, l’apport précieux de la transaction à l’efficacité des procédures collectives

mais les risques d’atteinte à l’ordre public qu’elle recèle doit nous inciter à trouver un

équilibre entre ces deux notions afin que ces dernières ne basent plus leur rapport sur la

contradiction mais une sorte de coopération.

Certains auteurs ont dans cette optique proposé de recourir à des pratiques qui ne se

distinguent de la transaction que par le nom afin de concilier celle-ci avec l’ordre public des

procédures collectives (§1), cette démarche, si elle permet d’éviter tout débat sur la contrariété

avec l’ordre public ne vaut que pour un pan du droit des procédures collectives qu’est celui

des sanctions à l’encontre des dirigeants.

Dès lors c’est une véritable réflexion de fond sur les rapports entre la transaction et l’ordre

public qui doit être menée afin de trouver un équilibre entre ces deux notions apparemment

antinomiques (§2) .

§1. UNE PRATIQUE TRANSACTIONNELLE RESPECTUEUSE DE L’

ORDRE PUBLIC : L’OFFRE DE CONTRIBUTION VOLONTAIRE

La validité des transactions sur les actions en responsabilité et notamment sur l’action en

comblement de passif n’ayant pas convaincu la majorité de la doctrine, certains auteurs251 ont

proposé de recourir à d’autres pratiques qui pourraient permettre d’éviter la condamnation des

dirigeants tout en étant conformes à l’ordre public économique.

248 Cf. F. Dreifuss-Netter, Ordre public et bonnes mœurs, Rep. Civ. D. V° Ordre public qui cite M. Malaurie quia recensé dans sa thèse, l’ordre public et le contrat (Paris 1953) plus de vingt définition.249 Art. 2046 du Code civil.250 V. P. Ancel, Arbitrage et procédures collectives après la loi du 25 janvier 1985, Rev. arb. 1987, p. 27 ; maissurtout P. Fouchard, Arbitrage et faillite, Rev. arb. 1998 n°3 p. 471.251 V. J.-F. Martin, Comblement de passif : un jugement de condamnation peut il être évité ?, Suppl. Rev. Lamydr. des aff., Oct. 2001p. 11 et s.

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Pour cet auteur, la validité d’une transaction sur cette action en responsabilité est doublement

illusoire dans la mesure où d’une part, le texte qui autorise le liquidateur à transiger n’est pas

applicable à la matière du comblement de passif : en effet, selon M. Jean-François Martin, la

transaction sur laquelle est fondée la solution est prévue par l’article L 622-20 du Code de

commerce qui concerne le sort des biens de l’entreprise en liquidation judiciaire alors que

l’objet de l’opération qui nous intéresse est de régler la sanction des fautes des dirigeants par

l’action spécifique instituée par la loi pour les traiter.

Pour M. Martin, le comblement de passif qui repose sur une faute de gestion, ne peut être

traité selon les dispositions de l’article L 622-20 qui concerne la réalisation de l’actif.

D’autre part, et c’est là pour M. Martin l’obstacle essentiel du recours à la transaction pour

éviter la condamnation au comblement du passif, cette action est marquée par son caractère

d’ordre public et dès lors ne peut faire l’objet d’une transaction.

Pour échapper à ces critiques, cet auteur propose, à l’instar de la pratique des tribunaux de

commerce, de recourir à un autre mécanisme qui repose sur une proposition de contribution

volontaire formulée par les dirigeants252.

Actionnés en comblement de passif, les défendeurs présentent des offres de paiement

volontaire en demandant au tribunal de les juger satisfactoires et en renonçant à statuer plus

avant sur les dispositions de l’article L 624-3.

Il est donc dans cet objectif procédé à l’instruction de l’affaire, dans ce cadre le tribunal peut

recourir à la procédure d’information sur la situation patrimoniale du dirigeant et le

liquidateur de son côté va recueillir tous les éléments utiles sur le montant de l’insuffisance

d’actif, les conditions de l’offre et les mesures prises pour assurer l’exécution immédiate de

celle-ci. Ce dernier devra par ailleurs donner son avis sur la proposition en cas d’acceptation

par le tribunal.

Tous les acteurs de la procédure sont au demeurant entendus par le tribunal en chambre du

conseil : les dirigeants, le mandataire de justice. Le tribunal reçoit par ailleurs l’avis du juge-

commissaire mais également des contrôleurs, le procureur de la République est entendu en ses

réquisitions.

Après ce débat contradictoire, le tribunal statue sur la demande en paiement de l’insuffisance

d’actif et sur les offres des dirigeants ; il peut soit rejeter les offres et prononcer un jugement

de condamnation soit les déclarer satisfactoires, dans cette seconde hypothèse chaque

252 V. Pour un exemple d’offre de contribution volontaire déclarée satisfactoire : T. com. Paris, 1ère ch., 7 sept.1998, Suppl. Rev. Lamy dr. des aff., Oct. 2001, n°42 p. 26.

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dirigeant devra alors exécuter individuellement son offre et les sommes seront réparties par le

liquidateur judiciaire au marc le franc entre les créanciers.

Pour M. Martin cette pratique résulte « d’une construction purement prétorienne édifiée dans

le cadre de la procédure en comblement de passif elle-même ». Le fondement se rapproche et

s’inspire d’une mesure concernant également les sanctions applicables aux dirigeants qui sont

la faillite personnelle et les autres mesures d’interdiction. En effet, « la loi permet au tribunal

de relever les personnes concernées des interdictions et déchéances si elles ont apporté une

contribution au paiement du passif 253. C’est une initiative du législateur en faveur des

créanciers. La formule retenue par le tribunal dans le jugement précité ne s’écarte ni de

l’objectif de la loi ni de son esprit. Elle répond au caractère patrimonial et indemnitaire du

comblement du passif et consacre une réparation par un paiement spontané du dirigeant qui

est reconnu satisfactoire. En aucun cas elle n’affecte l’entière liberté du tribunal qui

souverainement décide d’appliquer strictement la loi, en rejetant l’offre faite et en

condamnant ou, au contraire, en l’acceptant. Son pouvoir est discrétionnaire. Comme le

rappelle le ministère public dans ses réquisitions et le tribunal dans ses motifs, la

condamnation des dirigeants, quand bien même elle serait caractérisée par une ou plusieurs

fautes de gestion ayant entraîné la création de tout ou partie de l’insuffisance d’actif demeure

aux termes de la loi, facultative. Aucune disposition légale n’interdit au tribunal saisi

d’estimer que les propositions de contribution présentées par des défendeurs puissent être

considérées comme satisfactoires et de nature à mettre fin à l’instance ».

Pour M. Martin les dispositions d’ordre public de la loi de 1985 ne constituent nullement un

obstacle à la validité du procédé, contrairement à la transaction.

Or il nous semble cependant qu’une telle pratique ne se distingue nullement de la transaction

dans la mesure où les dirigeants actionnés en comblement de passif ne proposent une

contribution qu’en contrepartie de la renonciation par les organes du tribunal à statuer plus

avant sur l’action de l’article L 624-3. L’offre de contribution volontaire est en réalité une

transaction implicite voir déguisée.

Il nous est donc difficile de croire qu’un simple changement de dénomination de la

transaction sur l’action en comblement de passif est de nature à rendre plus compatible cette

dernière avec l’ordre public inhérent aux procédures collectives. De plus un tel substitut, si

l’on considère que l’offre de contribution volontaire est réellement distincte de la transaction,

efface les incompatibilités avec l’ordre public uniquement pour une partie de la loi de 1985

253 Art. L 625-10 du Code de commerce.

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celui des sanctions à l’encontre des dirigeants et le problème reste donc entier pour toutes les

transactions qui ne touchent pas à ces dernières.

Ainsi une réelle réflexion sur la recherche d’un équilibre entre ces deux notions s’impose.

§ 2. LA NECESSAIRE RECHERCHE D’UN EQUILIBRE ENTRE

L’ORDRE PUBLIC ET LA TRANSACTION

Les notions d’ordre public et de transaction sont des notions apparemment antinomiques dans

la mesure où la première limite la seconde, l’ordre public est en effet l’antithèse de la

transaction et d’une manière plus générale de la liberté contractuelle, laquelle est bien sur la

règle.

Cependant nous avons à plusieurs reprises eu l’occasion de souligner la difficulté de définir

cette notion, pour la majorité de la doctrine c’est tout de même la notion d’intérêt général254

qui pourrait rendre le mieux compte de ce que l’on veut inclure dans l’ordre public.

Or une telle référence supposerait que soit définie la notion d’intérêt général encore plus

vague que celle d’ordre public.

La loi de 1985 est, eu égard à sa finalité, dans son ensemble d’ordre public, dès lors aucune de

ses dispositions ne pourrait faire l’objet d’une transaction. Cependant cette même loi a prévu

la faculté de transiger au travers de ces articles 33 et 158 (devenue L 621-24 et L 622-22 du

Code de commerce) qui sont par conséquent également d’ordre public.

Cette confusion n’est pas sans poser de difficultés quant à la validité de certaines transactions

dans la mesure où ceux qui veulent accomplir cet acte juridique ne savent pas avec certitude

ce qu’ils peuvent écarter et ce qu’ils ne peuvent pas.

Dès lors eu égard à la qualification d’ensemble d’ordre public de la loi de 1985 il convient de

trouver un équilibre avec la transaction.

Cet équilibre passe nécessairement par une certaine clarification de l’ordre public des

procédures collectives.

Afin de ne pas réduire à néant (du moins théoriquement) la faculté de transiger dans ce cadre,

il convient en premier lieu de faire un tri parmi les dispositions les plus impératives de la loi

de 1985. Seules ces dernières ne pourraient faire l’objet de transaction. Il faut entendre par

dispositions impératives celles qui sont les fondements de la procédure collective, celles sans

254 V. Ph. Malaurie, L’ordre public et le contrat, thèse, Paris, 1953, p. 263.

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113

lesquelles la procédure prévue par la loi de 1985 n’aurait aucune efficacité. Sans établir nous

même une liste de ces dispositions qui nous paraîtrait quelque arbitraire alors même que leur

caractère impératif peut varier en fonction des circonstances de l’espèce il nous semble tout

de même que certaines dispositions devraient par principe être insusceptibles de toute

transaction : ainsi devrait-il en aller des dispositions concernant l’ouverture de la procédure,

de l’arrêt des poursuites individuelles, de la procédure de déclaration des créances mais aussi

et surtout de certaines dispositions relatives aux sanctions applicables à l’encontre des

personnes morales et à leurs dirigeants : ainsi pour ce dernier pan du droit des procédures

collectives, certaines dispositions ne devraient pas à notre avis pouvoir être écartées comme

celle concernant la « banqueroute et autres infractions » dans la mesure où ces sanctions

d’ordre pénales visent à réprimer des violations manifestes de règles de gestion ou

d’appauvrissement volontaire de l’entreprise. Leur caractère pénal, l’élément intentionnel

qu’elles impliquent ne devraient pas pouvoir permettre à leurs auteurs d’échapper à leurs

sanctions.

A l’heure de la réforme tant annoncée du droit des entreprises en difficulté une telle

distinction entre les dispositions en fonction de leur caractère impératif élaboré par le

législateur, qui pourrait prendre la forme d’une simple formule manifestant le caractère

impératif de la disposition en cause, serait l’idéal en ce qu’elle mettrait fin à toute incertitude

quand à la validité de telle ou telle transaction sur une disposition de la loi de 1985.

En attendant cette éventuelle clarification expresse, une autre clarification implicite peut

intervenir : en effet, les formalités légales obligatoires pour pouvoir transiger une fois

l’ouverture de la procédure collective sont de nature à tracer les contours des dispositions les

plus impératives, d’ailleurs n’est-ce pas la raison même de leur institution. En effet tant le

juge-commissaire que le tribunal au travers de l’homologation des transactions les plus

importantes sont les garants de la licéité et de la justification des transactions, la transaction

ne se conclue jamais à la seule initiative du mandataire liquidateur ou de l’administrateur mais

fait toujours intervenir les organes de la procédure collective, pour le professeur Vallens c’est

là un des critères les plus déterminants quand à l’opportunité et la validité d’une transaction

« si il y a transaction, elle intervient par et au moment de la décision judiciaire rendue par le

tribunal : il ne peut déléguer ce pouvoir au mandataire de justice ».

On pourrait cependant avoir des doutes quant au rôle des organes de la procédure collective

pour tracer les contours des dispositions de la loi de 1985 les plus impératives eu égard aux

jurisprudences BATA et AOM. C’est cependant de telles décisions qui nous permettent

d’élaborer une seconde proposition dans notre recherche d’un juste (au sens étymologique du

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114

terme) équilibre entre l’ordre public et la transaction : il nous semble que des solutions

transactionnelles en partie dérogatoires à l’ordre public pourraient être admises.

Cette solution qui peut apparaître extrême aux yeux de certains est à recommander

uniquement lorsque cette transaction sert l’intérêt général comme dans les décisions précitées,

dans de telles décisions l’opposition entre transaction et ordre public n’est qu’apparente car

même si la première empiète sur la seconde, elle le fait uniquement pour réaliser l’objectif

poursuivi par l’ordre public qui est aux yeux de tous la protection de l’intérêt général et en

l’occurrence la protection de l’emploi.

La possibilité d’admettre des solutions transactionnelles en partie dérogatoires à l’ordre public

dès lors qu’elles poursuivent un objectif d’intérêt général peut à notre avis trouver un

fondement juridique dans ce qu’il faut considérer comme les principes directeurs du droit des

entreprises en difficulté édictés dans l’article 1er de la loi de 1985 devenue article L 620-1 aux

termes duquel « il est institué une procédure de redressement judiciaire destinée à permettre

la sauvegarde de l’entreprise, le maintien de l’activité et de l’emploi et l’apurement du

passif ».

Ainsi, eu égard à la finalité de la procédure de redressement judiciaire telle qu’elle est

mentionnée dans cet article, une transaction qui pourrait permettre la sauvegarde de

l’entreprise et le maintien de l’activité et l’emploi doit être admise alors même qu’elle déroge

pour partie à l’ordre public dans la mesure où leur opposition n’est qu’apparente, c’est au

contraire vers le même idéal qu’elles tendent : celui de la protection de l’intérêt général.

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115

CONCLUSION

Qu’elle se fasse suite à un arrangement à l’amiable ou à une conciliation, la transaction est un

idéal de justice vers laquelle on doit tendre car une justice négociée présente beaucoup plus

d’avantages qu’une justice imposée.

Le développement des pratiques transactionnelles dans le droit des entreprises en difficulté en

est une manifestation concrète.

La transaction peut en effet être recherchée par une entreprise à tous les niveaux de

difficultés.

Elle peut être conclue par le dirigeant en vue d’éviter l’aggravation de ces difficultés qui

pourrait conduire à l’ouverture d’une procédure collective. Cependant les transactions

conclues individuellement par le dirigeant de l’entreprise en difficulté, en plus des dangers

qu’elles présentent eu égard au contexte dans lequel elles sont conclues et à leur absence de

contrôle a priori, sont destinées à prévenir autant de litiges individuels alors que c’est dans

l’ensemble qu’il convient de prendre en compte les difficultés de l’entreprise afin d’éviter

l’ouverture d’une procédure collective.

Dans cet objectif le législateur a prévu dans un cadre organisé la possibilité pour le dirigeant

de négocier un arrangement transactionnel avec l’ensemble de ses créanciers. Cet accord

amiable n’est cependant qu’ « un contrat à valeur de transaction » car s’il a la même logique

et aboutit à la même finalité que la transaction, il ne comporte pas tous les éléments

constitutifs de cette dernière.

La transaction si elle peut permettre d’éviter l’ouverture d’une procédure collective peut dans

une tout autre optique permettre d’améliorer l’efficacité de la procédure collective en se

présentant dans certaines situations comme une « aubaine » pour les auxiliaires de justice

habilités à transiger.

Or cette séduisante faculté peut être utilisée à outrance et des risques d’abus sont possibles : le

plus important d’entre eux étant très certainement l’incompatibilité même de certaines

transactions avec l’ordre public économique des procédures collectives. Cette notion présente

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116

cependant l’inconvénient d’être une notion floue de sorte qu’une clarification de cette

dernière s’impose afin qu’elle puisse trouver un équilibre avec la transaction.

Celle-ci pourrait, à notre avis, prendre la forme d’un tri parmi les dispositions les plus

impératives de la loi de 1985, seules les dispositions les moins impératives de la loi de 1985

pourraient de la sorte faire l’objet d’une transaction.

Ainsi, il nous semble que l’on devrait écarter du domaine de la transaction les dispositions qui

constituent le fondement des procédures collectives, celles qui lui confèrent tout son sens

mais également toute son efficacité : ainsi en va-t-il des dispositions concernant l’ouverture de

la procédure collective, de celles concernant l’arrêt des poursuites individuelles ou encore de

la déclaration des créances, mais il en va surtout ainsi de certaines dispositions relatives aux

sanctions applicables aux personnes morales et à leur dirigeant comme celles concernant la

banqueroute et les autres infractions d’ordre pénal qui visent à réprimer des violations

manifestes de règles de gestion ou d’appauvrissement volontaire de l’entreprise. Leur

caractère pénal, l’élément intentionnel qu’elles impliquent ne devraient pas pouvoir permettre

à leurs auteurs d’échapper à leurs sanctions.

Cependant un examen sage de la jurisprudence nous amène pourtant à ne pas faire de cette

liste des dispositions les plus impératives un terrain, en toutes circonstances, inaccessible pour

la transaction. Il nous semble que certaines solutions transactionnelles en partie dérogatoires à

l’ordre public pourraient toutefois être admises dès lors qu’elles poursuivent un objectif

d’intérêt général tel que la sauvegarde de l’entreprise et le maintien de l’emploi, principe

directeur du droit des entreprises en difficulté.

L’ordre public ne devrait donc pas au final être une notion par principe incompatible avec la

transaction mais une notion qui doit pouvoir s’adapter en fonction des intérêts supérieurs que

pourraient receler une transaction car une transaction qui poursuit un objectif d’intérêt général

ne peut être d’un point de vue pragmatique incompatible avec l’ordre public dans la mesure

où ce dernier tend lui-même à cet objectif.

La qualification d’ordre public doit donc être cantonnée à tout ce que la loi de 1985 comporte

de plus impératif dans ses dispositions afin de ne pas rendre inopérant la faculté de transiger.

Elle ne doit pas non plus à notre avis disparaître complètement, à l’instar du système des pays

anglo-saxons, ce qui aurait pour objectif de transformer notre droit des entreprises en

difficulté en un véritable « souk » au sens péjoratif du terme où tout et n’importe quoi serait

permis.

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117

L’apport de la transaction à tout contentieux d’une manière générale est en réalité révélateur

d’un mouvement plus important qu’est le développement des modes de règlement alternatifs

des litiges.

Le droit des entreprises en difficulté connaît pour partie de ces modes de règlement alternatif

des litiges, qu’il s’agisse de la conciliation que nous avons vu ou encore du compromis.

Dès lors, à travers l’étude de l’apport de la transaction au droit des entreprises en difficulté,

n’est-ce pas en réalité une nouvelle conception de ce droit qu’il conviendrait d’envisager, une

conception moins rigide et formelle qui accorderait plus de place à ces modes de règlement

alternatifs?

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118

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126

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127

ANNEXES

ANNEXE 1 : MODELE DE TRANSACTION CONCLUE PAR LE

DIRIGEANT D’UNE ENTREPRISE EN DIFFICULTE AVANT

L’OUVERTURE DE LA PROCEDURE COLLECTIVE 255

Entre les soussignées :

- la société ( dénomination et siège social ), représentée à la signature des présentes par

M. ……, son gérant,

Et

- la société ( dénomination et siège social ), représentée à la signature des présentes par

M. …., son président – directeur général,

Il est rappelé et convenu ce qui suit :

Le …… ( date ), la société X a passé commande auprès de la société Y de ( matériel,

marchandises …. ), que celui-ci a livré le ….. ( date ). Par courrier en date du …., la société

X a contesté la qualité des biens livrés et le montant de la facture de la société Y.

Par acte en date du ….., la société Y a assigné la société X devant le tribunal de commerce de

…… ( ville ) pour obtenir sa condamnation à lui verser :

- le montant de sa facture en date du ….. et des pénalités de retard résultant de

l’application de ses conditions générales de vente ;

- la somme de 750 € sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure

civile.

255 Ce type de transaction même s’il n’a pas pour objectif d’éviter directement l’ouverture d’une procédurecollective fait tout de même partie de cette volonté pour le dirigeant de l’entreprise en difficulté d’éviter deslitiges qui pourraient révéler des problèmes plus profond de trésorerie et ainsi conduire à l’ouverture d’uneprocédure collective.

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128

Les deux parties ont alors décidé de se rapprocher pour mettre fin à ce litige en concluant le

présent protocole d’accord :

! La société X verse ce jour à la société Y la somme forfaitaire de ….. € en règlement du

matériel ( ou des marchandises ) et abandonne l’ensemble de ses contestations formulées sur

le matériel ( ou les marchandises ) dans son courrier en date du ……

" La société Y renonce à son action en justice et notamment à ses demandes formulées au

titre des pénalités de retard et de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

# Le présent protocole vaut transaction dans les termes des articles 2044 et suivants du code

civil.

Fait à ….., le ……En deux exemplaires.

Signature du gérant de la société X Signature du P-DG de la société Y

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129

ANNEXE 2 : REQUETE AU JUGE – COMMISSAIRE POUR

AUTORISER LE CHEF D’ENTREPRISE OU L’ADMINISTRATEUR A

TRANSIGER 256

REQUETE AU JUGE – COMMISSAIRE POUR ETRE AUTORISE A

TRANSIGER

( art. 33 al.2 de la loi du 25 janvier 1985 devenue article L 621-24 du C. com.)

Redressement judiciaire ….. ( 1 )

N° du greffe

M. ….. A Monsieur le juge – commissaire

Juge – commissaire du redressement judiciaire de ……. ( 1 )

M. ….. ( 2 )

Administrateur

Monsieur le juge – commissaire,

Le soussigné X. ….. ( 3 )

et ( 4 ) A. ….. ( 5 ) agissant en qualité d’administrateur au redressement judiciaire

……. ( 1 ) nommé à cette fonction par jugement du ……

A ( ONT ) L’HONNEUR DE VOUS EXPOSER :

- Rappel des faits

256 Modèle tiré du Dict. perm. diff. entr., feuillet 53 (13 oct. 97) p. 1819.

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130

- Opportunité de régler le litige par transaction

- Bases de la transaction

que ce litige est de la nature de ceux que l’(les) exposant(s) estime(nt) devoir être solutionné

transactionnellement,

que l’article 33 alinéa de la loi du 25 janvier 1985 devenue article L 621-24 du Code de

commerce le prévoit, sous réserve de votre autorisation.

Ce que l’(les) exposant(s) prie(nt) qu’il vous plaise, Monsieur le juge – commissaire, bien

vouloir leur donner ( 6 )

ET VOUS FEREZ JUSTICE

….. ( 7 )

( 1 ) Désignation de l’affaire

( 2 ) Lorsqu’un administrateur a été nommé

( 3 ) Débiteur ( chef d’entreprise ) agissant seul

( 4 ) Requête conjointe : administrateur et débiteur

( 5 ) Administrateur agissant seul

( 6 ) Lorsque la requête émane de l’administrateur seul, ajouter : « le débiteur étant convoqué

par le greffe conformément à l’article 55 du décret ».

Pour les procédures ouvertes à compter du 22 octobre 1994, ajouter, quelque soit l’auteur de

la requête, les mots : « le représentant es créanciers étant convoqué conformément à l’article

55 du décret »

( 7 ) Lorsque la requête est présentée par l’administrateur seul, on mentionne ici : « NB pour

le greffe. Bien vouloir convoquer le débiteur ( et, pour les procédures ouvertes à compter du

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131

22 octobre 1994, le représentant des créanciers ) devant le juge – commissaire à la date que

celui-ci vous indiquera et m’en aviser »

ORDONNANCE DU JUGE – COMMISSAIRE

Nous, juge – commissaire

Vu la requête présentée, les motifs et les pièces à l’appui.

Vu les dispositions de l’article 33 alinéa 2 de la loi du 25 janvier 1985 devenue article L 621-

24 du Code de commerce et celles de l’article 55 du décret du 27 décembre 1985.

( 1 ) Vu la convocation adressée par le greffe, le ….. , M. ….. ( 2 ) ( 3 ) d’avoir à se

présenter devant nous ce jour à ….. heures, en notre cabinet au tribunal,

( 1 ) Attendu que M. ….. ( 2 )

se présente et fait observer que …..

ne se présente pas ( 4 ) ( 5 )

Autorisons

Me ( 6 )

( ou ) Me et M. ……. ( 2 ) à transiger le litige sur les bases exposées en la requête

( ou ) M. …… ( 2 ).

Disons que la présente ordonnance sera notifiée par lettre recommandée AR du greffe à M.

….. ( 2 ) ( 7 ).

Fait à ……

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132

Le ……….

Le juge – commissaire …...

( 1 ) Lorsque la requête est présentée par l’administrateur, la convocation du débiteur par le

greffier est prescrite par l’article 55 du décret

( 2 ) Débiteur

( 3 ) Pour les procédures ouvertes à compter du 22 octobre 1994, ajouter, quel que soit

l’auteur de la requête, les mots « et à Me ….., représentant des créanciers »

( 4 ) Eventuellement « mais nous a fait connaître ses observations ( son accord ) par courrier

du ……. Que nous annexons à la présente ».

( 5 ) Pour les procédures ouvertes à compter du 22 octobre 1994, ajouter les observations

éventuellement formulées par le représentant des créanciers.

( 6 ) Administrateur

( 7 ) Lorsque le débiteur ne s’est pas présenté

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133

ANNEXE 3 : COMBLEMENT DE PASSIF : UN EXEMPLE DE

TRANSACTION 257

PROTOCOLE D’ACCORD :

ENTRE :

La SCP MIZON THOUX,

• Maître Patrick MIZON, né le 12 juillet 1934 à MARCQ EN BAREUIL ( 59 ), de

nationalité française,

• et Maître Loïc THOUX, né le 1er septembre 1945 à LAVAL ( 53 ), de nationalité

française,

Mandataires judiciaires, demeurant 60, boulevard de Sébastopol 75 001 PARIS, et agissant en

sa qualité de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire des sociétés suivantes :

- la SA ESPACE France RESTAURATION

- l’EURL ESPACE France RESTAURATUION Italie,

D’UNE PART,

ET :

1) La société MAC DONALD’S France, dont le siège social est 1, rue Gustave Eiffel 78

045 GUYANCOURT, représente par ses représentants légaux y domiciliés en cette

qualité,

257 Exemple tiré du Suppl. Rev. Lamy dr. des aff., Oct. 2001 p. 19.

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134

2) La société GROUPE LEDUFF, société anonyme immatriculée au RCS de RENNES

sous le n° B. 34 89 39 513, sis 105 A avenue Henri Fréville 35 200 RENNES,

représentée par ses représentants légaux y domiciliés en cette qualité,

D’AUTRE PART,

IL EST RAPPELE CE QUI SUIT :

1) Par jugement en date du 1er octobre 1996, le Tribunal de Commerce de PARIS a

ouvert le redressement judiciaire de :

- la SA ESPACE France RESTAURATION

- l’EURL ESPACE France RESTAURATION Italie

Par jugement en date du 3 décembre suivant, le Tribunal de Commerce de PARIS a

prononcé la liquidation judiciaire de ces deux sociétés et désigné la SCP MIZON

THOUX en qualité de liquidateur judiciaire.

Par décision du 8 avril 1997, le Tribunal a joint les deux procédures sous patrimoine

commun.

2) Le passif admis s’élève à la somme de 10 042 224 FRS se décomposant comme suit :

- privilégié : 590 227 F

- chirographaire : 13 451 997 F ( dont la créance déclarée par la société MAC

DONALD’S à hauteur d’un montant total de 1 589 446 F )

Le passif contesté s’élève à la somme de 3 731 748 FRS se décomposant comme suit :

- CREDIT AGRICOLE : 168 096 F

- GARP : 66 784 F

- GOURMET ITALIE : 396 868 F

- MIRA : 200 000 F

- SOREGAL : 2 900 000 F

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135

L’actif réalisé s’élève à la somme de 558 521, 03 F.

3) Dans le cadre de sa mission, le mandataire liquidateur a relevé des éléments et

recueilli des informations le conduisant à soumettre au Tribunal une demande

d’application de l’article 180 de la Loi de 25 janvier 1985 devenue article L 624-3 du

Code de commerce aux dirigeants de droit des sociétés ainsi qu’à la leurs dirigeants de

fait.

C’est dans ces conditions que la SCP MIZON THOUX ès-qualités a fait citer en

Chambre du Conseil Messieurs Philippe LABBE, François FLAUD, Thierry

FOUREZ, Louis LE DUFF, Norbert ABOU,Cédric ABOU,Cyril ABOU, Yves

MONTPETIT, la société MAC DONALD’S France puis par la suite la société Groupe

LE DUFF afin que, en raison des fautes de gestion commises par ceux-ci, ils soient,

sur le fondement de l’article 180 de la Loi du 25 janvier 1985 devenue L 624-3 du

Code de commerce, condamnés, comme dirigeants de droit ou de fait, selon le cas, à

payer à la SCP MIZON THOUX ès-qualités le montant de l’insuffisance d’actif en

tout ou partie, avec ou sans solidarité, selon ce qu’appréciera souverainement le

Tribunal à cet égard.

Les défendeurs ont contesté la demande du liquidateur et conclu à son rejet.

La procédure est actuellement pendante devant le Tribunal de Commerce.

EN CET ETAT LES PARTIES SE

SONT RAPPROCHEES ET ONT

CONVENU CE QUI SUIT :

1) La société MAC DONALD’S France et la société GROUPE LE DUFF versent

immédiatement à la SCP MIZON THOUX ès-qualités de liquidateur judiciaire des

sociétés EFR et EFRI, la somme globale de 8 000 000 de FRS ( HUIT MILLIONS

DE FRANCS ).

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136

2) En outre la société MAC DONALD’S abandonne les créances qu’elle a déclarées

au passif des sociétés EFR et EFRI pour le montant total de 1 589 446,20 FRS,

renonçant à toute répartition à ce titre.

3) En conséquence de quoi,

- la SCP MIZON THOUX, ès-qualités de liquidateur judiciaire des sociétés

ESPACE France RESTAURATION et ESPACE France RESTAURATION

Italie, met fin à l’instance qu’elle a engagée devant le Tribunal de Commerce

de PARIS et à l’action afférente à l’encontre de l’ensemble des défendeurs,

- les sociétés soussignées renoncent au bénéfice de leurs conclusions.

4) Le présent accord constitue une transaction intervenant dans les termes des articles

2044 et suivants du Code civil.

Il a donc, entre les parties, l’autorité de la chose jugée en dernier ressort.

5) La présente transaction est soumise à la double condition suspensive suivante :

- l’autorisation du juge – commissaire de transiger dans les conditions ci-dessus

exposées

- l’homologation du Tribunal

6) Chaque partie conserve à sa charge les frais et honoraires exposés par elle.

FAIT A PARIS, le 20 décembre 1999

La SCP MIZON THOUX La STE MAC DONALD’S SA

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137

La STE GPE LE DUFF

ANNEXE 4 : EXTRAIT DES ARRETS INEDIT AOM AIR LIBERTE ETBATA258

DOCUMENT 1 : JUGEMENT D’HOMOLOGATION EN DATE DU 1er AOUT 2001 DE

LA TRANSACTION INTERVENUE DANS LE CADRE DE L’AFFAIRE AOM AIR

LIBERTE.

DOCUMENT 2 : EXTRAIT DU PROTOCOLE TRANSACTIONNEL ANNEXE A CE

JUGEMENT.

DOCUMENT 3 : JUGEMENT DU 26 NOVEMBRE 2001 CONFERANT FORCE DE

CHOSE JUGEE A LA TRANSACTION INTERVENUE DANS LE CADRE DE

L’AFFAIRE BATA.

258 Voir version papier ou documents joints à la présente disquette.

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TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION ....................................................................................

TITRE 1. LA TRANSACTION CONCLUE EN VUE D’ EVITER L’OUVERTURE DELA PROCÉDURE COLLECTIVE........................................................................

CHAPITRE 1. LES RISQUES INHERENTS AUX TRANSACTIONSINDIVIDUELLES CONCLUES PAR LE DIRIGEANT DE L’ENTREPRISE ENDIFFICULTE ..................................................................................................................... 19

SECTION 1. LA FACULTE POUR LE DIRIGEANT DE L’ENTREPRISE ENDIFFICULTE DE TRANSIGER ................................................................................... 20

§1. UNE FACULTE JUSTIFIEE................................................................................. 20A. La condition : le respect des conditions de formation du contrat de transaction 21B. Le principe : la liberté de gestion du dirigeant « in bonis »................................. 23

§2. UNE FACULTE DANGEREUSE......................................................................... 25

SECTION 2. LA POSSIBLE REMISE EN CAUSE DE LA TRANSACTION ÀPOSTERIORI ? ............................................................................................................... 27

§1. LA NULLITE DE LA TRANSACTION SUR LE FONDEMENT DEL’ARTICLE L 621-108 : UNE NULLITE FACULTATIVE ET CONDITIONNELLE...................................................................................................................................... 28

A. UNE NULLITÉ CONDITIONNELLE ............................................................... 291. Les conditions objectives ................................................................................. 292. La condition subjective .................................................................................... 30

B. UNE NULLITÉ FACULTATIVE....................................................................... 31

§2. LA TRANSACTION ET LA NULLITE DE DROIT DE L’ARTICLE L 621- 107...................................................................................................................................... 32

A. LA TRANSACTION EST ELLE UN CONTRAT COMMUTATIF ? .............. 33B. LA TRANSACTION PEUT-ELLE ÊTRE UN CONTRAT DÉSÉQUILIBRÉ ?.................................................................................................................................. 36

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CHAPITRE 2. LA POSSIBILITE DE RECOURIR A UN ACCORD DEREGLEMENT COLLECTIF DES DIFFICULTES AUX EFFETSTRANSACTIONNELS : L’ACCORD AMIABLE ......................................................... 40

SECTION 1. L’ELABORATION DU REGLEMENT AMIABLE : CADRE DEL’ACCORD AMIABLE .................................................................................................. 41

§1. LE DOMAINE DU REGLEMENT AMIABLE.................................................... 42A. L’ENTREPRISE BÉNÉFICIAIRE DU RÈGLEMENT AMIABLE.................. 42B. LA SITUATION DE L’ENTREPRISE............................................................... 43C. LA POSSIBILITÉ D’UN SAUVETAGE DE L’ENTREPRISE......................... 44

§2. L’ELABORATION DU REGLEMENT AMIABLE............................................................ 44A. LA DÉSIGNATION DU CONCILIATEUR ...................................................... 45B. LA CONCLUSION DE L’ACCORD ................................................................. 48

SECTION 2. L’ACCORD AMIABLE : UN CONTRAT A « VALEUR DETRANSACTION » ........................................................................................................... 51

§1. LA VOLONTE D’EVITER L’OUVERTURE D’UNE PROCEDURECOLLECTIVE ............................................................................................................. 53§2. L’ABSENCE DE CONCESSIONS RECIPROQUES........................................... 56

TITRE 2. LA TRANSACTION CONCLUE EN VUE D’AMELIORER L’EFFICACITEDE LA PROCEDURE COLLECTIVE ....................................................................

CHAPITRE 1. LA TRANSACTION DANS LES PROCEDURES COLLECTIVES :UN OUTIL SEDUISANT .................................................................................................. 60

SECTION 1. LES SPECIFICITES DE LA TRANSACTION CONCLUE PENDANTLA PROCEDURE COLLECTIVE ................................................................................. 60

§1. LES SPECIFICITES QUANT AUX AUTEURS DE LA TRANSACTION ........ 61A. DANS LA PHASE DE REDRESSEMENT JUDICIAIRE ............................. 61

1. L’initiateur de la transaction......................................................................... 612. La nécessaire autorisation préalable du juge commissaire..................................... 62

B. DANS LA PHASE DE LIQUIDATION JUDICIAIRE................................... 661. L’autorisation du juge commissaire ............................................................. 672. La poursuite de l’intérêt collectif des créanciers.......................................... 693. L’homologation des transactions.................................................................. 71

§ 2. LES SPÉCIFICITÉS QUANT À LA PROCÉDURE ........................................... 73A. LA PARTICULARITE DES VOIES DE RECOURS ..................................... 74

1. Les voies de recours contre l’autorisation du juge-commissaire ..................... 742. Les voies de recours contre le jugement d’homologation................................ 75

B. LES SANCTIONS DU NON RESPECT DES FORMALITÉS LÉGALESOBLIGATOIRES..................................................................................................... 77

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SECTION 2. L’APPORT DE LA TRANSACTION AUX PROCEDURESCOLLECTIVES............................................................................................................... 79

§1. L’APPORT DANS LA PHASE DE REDRESSEMENT JUDICIAIRE ............... 80A. LA TRANSACTION CONCLUE A L’INITIATIVE DU DEBITEUR : UNFACTEUR DE DEDRAMATISATION DES PROCEDURES COLLECTIVES80B. LA TRANSACTION CONCLUE A L’INITIATIVE DEL’ADMINISTRATEUR : UN ELEMENT DETERMINANT DANS LASURVIE DE CERTAINES ENTREPRISES ........................................................... 82

§ 2. L’APPORT DANS LA PHASE DE LIQUIDATION JUDICIAIRE ................... 86A. UN OUTIL INDISPENSABLE À UNE REALISATION FACILITEE DEL’ACTIF................................................................................................................... 86B. UN MOYEN D’EVITER UNE ACTION LOURDE : L’ACTION ENCOMBLEMENT POUR INSUFFISANCE D’ACTIF ............................................ 90

CHAPITRE 2. LA TRANSACTION DANS LES PROCEDURES COLLECTIVES :UN OUTIL DANGEREUX................................................................................................ 95

SECTION 1. LES DANGERS DE LA TRANSACTION DANS LES PROCEDURESCOLLECTIVES............................................................................................................... 96

§1. DANGER QUANT A SA DATE DE CONCLUSION.......................................... 96A. LES RISQUES INHERENTS A UNE TRANSACTION PREMATUREE SURL’ACTION EN COMBLEMENT DE PASSIF ....................................................... 97B. LA TRANSACTION POSTERIEURE AU JUGEMENT DECONDAMNATION A COMBLER L’INSUFFISANCE D’ACTIF : UNE REMISEDE DETTE JUSTIFIEE ? ........................................................................................ 98

§ 2. LES DANGERS QUANT A SON OBJET ......................................................... 101A. LA PROBLEMATIQUE LIMITE DES POUVOIRS TRANSACTIONNELSDEVOLUS AU MANDATAIRES LIQUIDATEURS .......................................... 102B. LES TRANSACTIONS EXCESSIVES......................................................... 104

SECTION 2. L ORDRE PUBLIC DANS LES PROCEDURES COLLECTIVES : UNENOTION A CLARIFIER. ............................................................................................. 108

§1. UNE PRATIQUE TRANSACTIONNELLE RESPECTUEUSE DE L ORDREPUBLIC : L’OFFRE DE CONTRIBUTION VOLONTAIRE .................................. 109

§ 2. LA NECESSAIRE RECHERCHE D’UN EQUILIBRE ENTRE L’ORDREPUBLIC ET LA TRANSACTION ............................................................................ 112

CONCLUSION.........................................................................................

BIBLIOGRAPHIE......................................................................................

ANNEXES.............................................................................................

TABLE DES MATIERES................................................................................

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