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Quelle que soit la définition que l’on donne du mot « vérité », on ne saurait affirmer que les sciences peuvent atteindre la vérité en soi. On peut cependant dire qu’elles progressent vers elle non en se sens qu’elles s’en rapprocheraient réellement, mais en ce sens qu’elles s’éloignent de l’erreur. Car si l’on ne peut démontrer la vérité d’une proposition scientifique, on peut du moins en prouver, comme l’a souligné Karl Popper, la fausseté.
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LA VÉRITÉFormateur : Yves LIOGIER
Collection Philosophique
Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés pour tous pays à l’auteur. Dépôt légal : Décembre 2013
LA VÉRITÉ
La vérité se définit comme « ce à quoi l’esprit peut et doit donner son
assentiment (par suite d’un rapport de conformité avec l’objet de pensée, d’une
cohérence interne de la pensée) »
(Le Robert)
La vérité, qui s’oppose à l’erreur et à l’ILLUSION, est donc liée au JUGEMENT.
Collection Philosophique 1
LA VÉRITÉ
Les sciences progressent-elles vers la vérité ?
Vous attendez peut-être par mon intervention que je vous expose surtout ici
une réflexion épistémologique sur la connaissance scientifique (notamment que j’examine avec vous la thèse popperienne
sur la non vérifiabilité des théories scientifiques qui se caractérisent au
contraire par leur réfutabilité). Collection
Philosophique 2
Question
LA VÉRITÉ
Les sciences progressent-elles vers la vérité ?
Cependant cette question ayant été déjà largement abordée dans le sujet :
THEORIE ET EXPERIENCE (cf.http://
yvesvianney.over-blog.com/2013/11/notions-philosophiques-la-connaissance-et-la-raison.html
)
nous traiterons cette fois-ci ce sujet d’une manière un peu particulière, en cherchant à
définir quelle conception de la vérité implique l’idée d’une progression des sciences vers elle.
Collection Philosophique 3
Question
LA VÉRITÉ
L’opinion commune, spontanément, associe science et vérité (le savant est
celui qui possède la science, c’est-à-dire une connaissance vraie), et considère que
le progrès des sciences est un progrès vers une vérité toujours plus étendue et plus
parfaite.
Collection Philosophique 4
QuestionIntroduction
LA VÉRITÉToutefois, qu’entendons-nous exactement
par « vérité » ? On pourrait assurément dire à propos d’elle ce qu’Augustin disait du temps :
« Qu’est-ce ? Si personne ne me le demande, je le sais ; mais si on me le demande et que
je veuille l’expliquer, je ne le sais plus ».
Mais comment pouvons-nous dire que les sciences progressent vers la vérité si nous ne
savons pas ce qu’est la vérité ?
C’est pourquoi il nous faut chercher à la définir, et, cette définition éventuellement trouvée, examiner s’il y a un sens à parler
d’un progrès des sciences vers la vérité.Collection
Philosophique 5
QuestionIntroduction
LA VÉRITÉa) Exposition de cette théorie
Pour la conscience commune, est vrai ce qui existe réellement : dire la vérité, c’est dire ce qui est, mentir, ce qui n’est pas. Le vrai
se trouve ainsi identifié à l’être, et une pensée vraie est une pensée qui
correspond à une réalité objective, indépendante du sujet pensant. La vérité
consisterait dans une certaine forme de correspondance entre la pensée et le fait :
lorsqu’une pensée est vraie, ce qui est pensé est un fait, et inversement,
lorsqu’une pensée est fausse, ce qui est pensé n’est pas un fait.
Collection Philosophique 6
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
LA VÉRITÉa) Exposition de cette théorie
C’est cette doctrine de la vérité-correspondance, ou doctrine réaliste,
que résume la fameuse formule scolastique :
veritas est adequatio rei et intellectus (« la vérité est l’adéquation de l’intellect
et de la chose »).
Collection Philosophique 7
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
LA VÉRITÉb) Un progrès des sciences dans
la description du réel
Dans ces conditions, dire que les sciences progressent vers la vérité, c’est dire qu’elles progressent dans la description de ce qui est réellement, ce réel pouvant être entendu à la
fois dans un sens extensif (les sciences progressent vers une connaissance de la totalité du réel), et en un sens qualitatif
(l’adéquation des idées, des lois scientifiques avec la réalité qui leur correspond est de plus
en plus grande). L’accroissement des connaissances scientifiques et leur précision
de plus en plus poussée semblent évidemment confirmer cette vue.
Collection Philosophique 8
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
LA VÉRITÉc) Objections
Toutefois, la théorie de la vérité-correspondance qui fait de l’idée vraie une sorte de copie exacte de la réalité
n’est pas sans poser de sérieuses difficultés.
Collection Philosophique 9
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
LA VÉRITÉc) Objections
Il nous est en effet impossible de sortir de nous-mêmes, de nos représentations,
de nos idées, pour comparer cette copie à son modèle. Le monde en soi
nous est inaccessible, puisque nous ne pouvons le saisir qu’à travers nos
représentations.
Comment pouvons-nous donc dire qu’une idée, qu’une proposition correspond
réellement à la réalité ?Collection Philosophique 10
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
LA VÉRITÉc) Objections
Et de quelle réalité une loi scientifique
sera-t-elle la copie ?
Les lois qu’énoncent les sciences, telles des Idées platoniciennes, existent-elles en soi,
indépendamment des phénomènes que seuls peut connaître le savant ?
Et comment peut-on assurer qu’une loi, qui est par définition générale, correspond bien à la réalité, qu’elle est bien la copie de son modèle qui doit
donc lui aussi être général, universel, alors qu’on ne peut la comparer qu’avec des phénomènes
particuliers et en nombre limités ?Collection
Philosophique 11
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
LA VÉRITÉc) Objections
On peut dès lors se demander s’il ne faut pas chercher une autre définition de la vérité, et pour ce faire se tourner vers
les sciences dont la vérité semble absolue, à savoir les mathématiques.
Collection Philosophique 12
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
LA VÉRITÉSi nous considérons en effet la
mathématique pure ou la logique formelle, il apparaît avec évidence que la
définition de la vérité comme correspondance d’une idée avec la réalité
est inadéquate, puisque leurs objets ne semblent pas des êtres réels et que leurs
propositions peuvent être vides de tout contenu. Dans les systèmes logico-
mathématiques, la vérité ne doit donc plus être définie en terme de
correspondance d’une proposition avec un fait, mais de cohérence d’une
proposition avec d’autres propositions.Collection Philosophique 13
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
LA VÉRITÉ
Cette définition de la vérité valable pour les systèmes hypothético-déductifs que
sont les systèmes logico-mathématiques est-elle généralisable,
et peut-on considérer qu’une pensée vraie est une pensée cohérente ?
Collection Philosophique 14
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
LA VÉRITÉa) Exposition de cette théorie
Les logiciens ont dégagé les traits spécifiques suivants d’une théorie de la
vérité-cohérence :
La vérité d’une proposition doit être évaluée en fonction de sa
« cohérence » avec d’autres propositions : qu’elle soit ou non considérée comme vraie dépend
exclusivement de son accord ou de sa contradiction avec celles-ci.Collection
Philosophique 15
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
LA VÉRITÉa) Exposition de cette théorie
Les logiciens ont dégagé les traits spécifiques suivants d’une théorie de la
vérité-cohérence :
La question de la vérité d’une proposition est donc un problème contextuel,
puisqu’on ne peut déterminer si une proposition est ou n’est pas vraie en
l’examinant isolément.
Collection Philosophique 16
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
LA VÉRITÉa) Exposition de cette théorie
Les logiciens ont dégagé les traits spécifiques suivants d’une théorie de la
vérité-cohérence :
La vérité des propositions est ainsi fondamentalement dépendante de
questions de systématisation, c’est-à-dire de leurs enchaînements logiques
avec d’autres propositions, avec lesquelles elles forment un réseau de
relations.Collection Philosophique 17
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
LA VÉRITÉa) Exposition de cette théorie
Les logiciens ont dégagé les traits spécifiques suivants d’une théorie de la
vérité-cohérence :
Les vérités doivent donc constituer un système logiquement consistant, dont
les éléments sont reliés entre eux de manière appropriée : ils doivent l’être
de façon à former une seule unité cohérente, dont la cohésion même fait
exclure les autres possibilités.Collection Philosophique 18
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
LA VÉRITÉb) Une théorie qui vaut pour les
sciences
On a pu objecter aux partisans de la doctrine de la vérité-cohérence que celle-ci se
fonde sur le raisonnement a priori caractéristique de la logique et des
mathématiques, et qu’en conséquence sa validité ne saurait être étendue au-delà de
ces domaines. Mais les partisans de la vérité-cohérence répondent qu’un examen du raisonnement a posteriori des sciences
empiriques comme de la vie ordinaire peut confirmer en réalité cette théorie.Collection
Philosophique 19
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
LA VÉRITÉb) Une théorie qui vaut pour les sciences
Si, par exemple, nous considérons une assertion à propos d’un fait présent, telle que « Il y a un
homme dans la pièce d’à côté », on dira que pour vérifier cela, il suffit de regarder dans
cette pièce, et que si ce qu’on y voit correspond à l’assertion, il faut la tenir pour
vraie. Par cette réponse, on suppose qu’il existe un fait indiscutable qui s’impose à nos
sens et auquel se conforme notre pensée. Mais, en réalité, ce que l’on prend pour la
perception d’un fait est un jugement puisque, sans un ensemble de jugements, on ne
pourrait jamais identifier un homme ni une pièce.
Collection Philosophique 20
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
LA VÉRITÉb) Une théorie qui vaut pour les sciences
Nous ne sommes donc pas ici en présence de la confrontation d’une assertion et d’un fait,
mais d’un jugement avec un autre jugement ou un ensemble d’autres jugements, et ce
qui autorise la vérification du jugement initial est sa cohérence avec les autres. Or
ce qui vaut pour la vie ordinaire, vaut davantage encore pour les sciences,
puisque les « faits » scientifiques auxquels on demande de vérifier ou d’infirmer une
hypothèse sont des faits éminemment construits, des faits inséparables d’une
théorie et donc de jugements. Collection Philosophique 21
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
LA VÉRITÉc) Objections
On a toutefois émis des objections sur la théorie elle-même, en faisant observer que
la cohérence ne peut être le critère de la vérité pour les raisons suivantes :
En déterminant la cohérence de propositions, nous usons des vérités de la logique : nous
devons donc déjà posséder un critère de vérité antérieur à celui de la cohérence, et
des considérations de cohérence ne peuvent être utilisées pour valider le critère
lui-même sans tomber dans un cercle vicieux.
Collection Philosophique 22
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
LA VÉRITÉc) Objections
On a toutefois émis des objections sur la théorie elle-même, en faisant observer
que la cohérence ne peut être le critère de la vérité pour les raisons suivantes :
Quand on parle de cohérence, de quelle cohérence s’agit-il ?
Est-ce une cohérence avec « tout le reste », avec toutes les autres
propositions pouvant être énoncées ? Collection
Philosophique 23
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
LA VÉRITÉc) Objections
On a toutefois émis des objections sur la théorie elle-même, en faisant observer
que la cohérence ne peut être le critère de la vérité pour les raisons suivantes :
Cela est évidemment impossible car la totalité des propositions signifiantes est
certainement inconsistante, donc incohérente.
Collection
Philosophique 24
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
LA VÉRITÉc) Objections
On a toutefois émis des objections sur la théorie elle-même, en faisant observer que la
cohérence ne peut être le critère de la vérité pour les raisons suivantes :
Est-ce plus simplement une cohérence avec quelque chose, avec quelque(s)
proposition(s) ?
Il est alors clair que n’importe quelle proposition satisfera à cette condition, et que cette
cohérence ne nous apprendra donc rien sur sa vérité.
Collection
Philosophique 25
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
LA VÉRITÉc) Objections
On a toutefois émis des objections sur la théorie elle-même, en faisant observer que la
cohérence ne peut être le critère de la vérité pour les raisons suivantes :
On ne pourra pas dire qu’il s’agit d’une cohérence avec d’autres vérités, car on
aurait alors besoin d’autres critères préalables pour déterminer la vérité de ces autres vérités. La cohérence ne peut donc servir de critère pour une vérité première, mais seulement pour son développement.
Collection
Philosophique 26
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
LA VÉRITÉc) Objections
On a toutefois émis des objections sur la théorie elle-même, en faisant observer
que la cohérence ne peut être le critère de la vérité pour les raisons suivantes :
Enfin, il est possible d’obtenir une multiplicité de systèmes différents mais également cohérents : ils devront donc tous être tenus pour vrais. Mais alors la vérité ne peut plus être conçue comme
unique et monolithique.
Collection
Philosophique 27
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
LA VÉRITÉLe philosophe et mathématicien anglais B.
Russell (1872-1970) a bien souligné ce grave problème :
« Il n’y a aucune raison, écrit-il, de supposer qu’un seul corps cohérent de doctrines est possible. Il peut se
faire qu’un romancier, avec une imagination suffisante, puisse inventer pour le monde un passé
qui s’accorderait parfaitement avec nos connaissances, et que ce passé soit pourtant très
différent du passé réel. Dans des matières plus spécifiques, il est certain qu’il y a souvent deux ou
plusieurs hypothèses qui rendent raison de tous les faits connus sur un sujet. Et, bien que dans de tels
cas les savants s’efforcent de trouver des faits susceptibles d’éliminer toutes les hypothèses sauf
une, il n’y a pas de raisons qu’ils y parviennent toujours »
(The Problems of Philosophy, 1912, p. 191). Collection
Philosophique 28
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
Texte de Bertrand Russell
LA VÉRITÉd) Un progrès des sciences vers
un système complet
Si la vérité d’une proposition est liée à celle de toutes les propositions du
système, donc au système tout entier, il apparaît que les propositions
particulières sont en tant que telles seulement partiellement vraies, et par
conséquent partiellement fausses, tandis que seul le système complet est
totalement vrai.
Collection Philosophique 29
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
LA VÉRITÉd) Un progrès des sciences vers
un système complet
Dans ces conditions, poser que les sciences progressent vers la vérité
signifie qu’elles tendent à former un système de plus en plus complet, c’est-
à-dire un système fournissant une explication globale, totale, de l’univers
tout entier considéré comme formant lui-même un tout cohérent.
Collection
Philosophique 30
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
LA VÉRITÉd) Un progrès des sciences vers
un système complet
Mais il est impossible de dire si les sciences progressent réellement vers la
vérité, puisque cette vérité consiste dans la cohérence globale du système
complet : or, l’achèvement d’un tel système lui-même n’est pas atteint et
même la possibilité d’y atteindre ne saurait être démontrée.
Collection
Philosophique 31
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
LA VÉRITÉa) Exposition
Critique de la vérité-correspondance
Le philosophe américain William James (1842-1910) a tenté de donner une solution nouvelle au problème de la vérité en
rejetant la thèse de la vérité-correspondance. James fait en effet
observer que si à la question « qu’est-ce qu’un jugement vrai ? » nous répondons naturellement que c’est un jugement qui s’accorde avec la réalité, il reste à savoir
en quoi consiste cet accord.
Collection Philosophique 32
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
Le pragmatisme
LA VÉRITÉa) Exposition
Critique de la vérité-correspondance
« L’opinion courante, là-dessus, remarque-t-il, c’est qu’une idée vraie doit être la copie de la
réalité correspondante »
(Le Pragmatisme, éd. Flammarion, Science Poche, p. 142).
Selon cette opinion courante, la concordance de l’affirmation vraie avec la réalité serait, pour
user de la formule de Bergson, « quelque chose comme la ressemblance du portrait au
modèle »
(La Pensée et le Mouvant, p. 244).
Collection
Philosophique 33
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
Le pragmatisme
LA VÉRITÉa) Exposition
Critique de la vérité-correspondance
On voit ici vers quoi nous entraîne comme malgré nous une telle vue : à confondre
la vérité et la réalité, soit en hypostasiant la vérité, comme le fait Platon pour qui nos idées sont vraies
dans la mesure où elles copient fidèlement les vérités éternelles et les modèles que sont les « Idées », soit en
plaçant la vérité dans la réalité objective elle-même.Collection
Philosophique 34
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
Le pragmatisme
LA VÉRITÉAinsi, écrit Bergson
« la vérité serait déposée dans les choses et dans les faits : notre science irait l’y
chercher, la tirerait de sa cachette, l’amènerait au grand jour. Une
affirmation telle que « la chaleur dilate les corps » serait une loi qui gouverne
les faits, qui trône, sinon au-dessus d’eux, du moins au milieu d’eux, une loi
véritablement contenue dans notre expérience et que nous nous bornerions
à en extraire. »Collection Philosophique 35
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
Le pragmatisme
Texte de Bergson
LA VÉRITÉSuite du texte de Bergson
… Les lois qu’énonce la science seraient donc des vérités en soi, inscrites dans la réalité même et indépendantes de
notre jugement. Telle est la conception du rationalisme qui considère la réalité
« comme un tout parfaitement cohérent et systématisé, que soutient une
armature logique (…) et pour lequel, nous dit W. James, la vérité « règne et
s’impose d’une manière absolue. »
(Le Pragmatisme, p. 154).Collection Philosophique 36
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
Le pragmatisme
Texte de Bergson
LA VÉRITÉa) Exposition
Le vrai consiste dans l’avantageux
W. James refuse une telle identification de la vérité à la réalité :
« C’est au moins un abus de langage, note-t-il, que de transférer le mot vérité de l’idée à
l’existence de l’objet ».
La réalité n’est pas « vraie », elle est. Ce qui est « vrai », ce sont nos jugements sur cette réalité, non pas en tant qu’ils la copieraient, mais en tant qu’ils nous permettent de nous
mouvoir correctement et efficacement au milieu d’elle, d’avoir prise sur elle : Collection
Philosophique 37
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
Le pragmatisme
LA VÉRITÉ« Qu’une idée, écrit W. James, nous aide à
nous mettre en rapport, intellectuellement ou pratiquement, soit
avec le réel, soit avec ses tenants et aboutissants, qu’au lieu d’entraver notre marche par toutes sortes de contretemps, elle adapte et ajuste
effectivement notre vie à tout l’engrenage de la réalité, alors il y aura
un accord ou seront remplies suffisamment les conditions que l’on
exige du vrai ; et cette idée sera vraie à l’égard de la réalité en question » (id.,
p. 151). Collection Philosophique 38
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
Le pragmatisme
Texte de William James
LA VÉRITÉ… La proposition « la chaleur dilate les
corps » est vraie seulement en tant qu’elle nous permet de prévoir un événement et
de préparer éventuellement notre action à l’égard de cet événement. Une idée, est donc vraie dans la mesure où elle est un
« fil conducteur » nous permettant de réussir une action ou, de manière générale, d’avoir une expérience
satisfaisante : « le vrai consiste simplement dans ce qui est avantageux
pour notre pensée, de même que le juste consiste simplement dans ce qui est
avantageux pour notre conduite» (id., p. 157). Collection
Philosophique 39
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
Le pragmatisme
Texte de William James
LA VÉRITÉ… Et tant que la réalité ne viendra pas
contredire nos idées, obstruer, les voies qu’elles nous font emprunter et par où
nous passons « d’expériences anciennes à des expériences nouvelles », nous pourrons les tenir pour vraies.
En ce sens « la vérité vit à crédit, la plupart du temps »
(id., p. 148).
Collection Philosophique 40
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
Le pragmatisme
Texte de William James
LA VÉRITÉa) Exposition
La vérité est un événement
Ainsi donc une idée est vraie si elle se trouve « vérifiée » par les
conséquences d’ordre physique ou mental qu’elle entraîne. La vérité d’une
idée se ramène à un processus, à un ensemble d’opérations concrètes se
situant entre l’idée et la réalité, et qui constitue l’accord de l’idée avec la
vérité :
Collection Philosophique 41
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
Le pragmatisme
LA VÉRITÉa) Exposition
La vérité est un événement
« La vérité d’une idée n’est pas une propriété qui se trouverait lui être inhérente et qui resterait
inactive. La vérité est un événement qui se produit pour une idée. Celle-ci devient vraie ;
elle est rendue vraie par certains faits. Elle acquiert sa vérité par un travail qu’elle effectue,
par le travail qui consiste à se vérifier elle-même, qui a pour but et pour résultat sa
vérification. Et, de même, elle acquiert sa validité en effectuant le travail ayant pour but
et pour résultat sa validation »
(Pragmatisme, p. 144).
Collection
Philosophique 42
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
Le pragmatisme
LA VÉRITÉa) Exposition
La vérité est un événement
Aussi les vérités ne sont-elles pas des principes absolus et éternels inscrits
dans la réalité ou dans un ciel transcendantal.
Collection Philosophique 43
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
Le pragmatisme
LA VÉRITÉb) Les sciences convergent vers un
point idéal
Ainsi la Vérité absolue et éternelle vers laquelle d’aucuns pensent que
progressent les sciences n’est que « ce point idéal, toujours à perte de vue,
vers lequel nous imaginons que toutes nos vérités temporaires effectueront, un jour ou l’autre, leur convergence »
(id., p. 157).
Collection Philosophique 44
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
Le pragmatisme
LA VÉRITÉc) Critique
On a fait valoir à W. James que la notion de fonctionnement, d’efficacité, d’avantage, était
ambiguë. Une croyance peut en effet fonctionner en deux sens différents : elle peut fonctionner en tant qu’elle voit ses prédictions
se réaliser (comme dans les vérités de la science), et fonctionner en tant qu’elle est
avantageuse pour celui qui la partage. Or une même croyance peut fonctionner dans un sens
et pas dans l’autre : par exemple un malade peut guérir en croyant à l’efficacité d’un
médicament alors que celui-ci est en réalité inefficace (effet placebo) : la « vérité » du
malade est « erreur » pour le savant.Collection Philosophique 45
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
Le pragmatisme
LA VÉRITÉc) Critique
Par ailleurs, il est souvent impossible de déterminer si une croyance est avantageuse
ou non.
Enfin, on ne peut soutenir que « vrai » soit synonyme d’ « avantageux » :
Dire qu’il est vrai que E = mc2 n’est pas la même chose que de dire qu’il est avantageux de
croire que E = mc2. Car si ces deux propositions avaient la même signification, en croyant l’une nous croirions l’autre sans qu’il
y ait dans notre esprit de transition de l’une à l’autre, ce qui n’est évidemment pas le cas.Collection
Philosophique 46
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
Le pragmatisme
LA VÉRITÉQuelle que soit la définition que l’on donne
du mot « vérité », on ne saurait affirmer que les sciences peuvent atteindre la vérité en soi. On peut cependant dire
qu’elles progressent vers elle non en se sens qu’elles s’en rapprocheraient
réellement, mais en ce sens qu’elles s’éloignent de l’erreur. Car si l’on ne
peut démontrer la vérité d’une proposition scientifique, on peut du
moins en prouver, comme l’a souligné Karl Popper, la fausseté.
Collection Philosophique 47
QuestionIntroduction
Doctrine de la vérité-
correspondance
Doctrine de la vérité-cohérence
Le pragmatisme
Conclusion
LA VÉRITÉFormateur : Yves LIOGIER
Collection Philosophique
Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés pour tous pays à l’auteur. Dépôt légal : Décembre 2013
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