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.., .- I .i MONDE Au Nord c o m e au Sud, l'urbain se généralise, entre le concept de viUe intelligente et l'enfer promis par la montée des sauvages urbains, la ville n'est pas plus un problkme qu'une solution, PaiEde LE BRIS, INTERURBA / "l'un des phéilzoiiièizes les plus [email protected] (. ..) est la g iga II fesgu e exmissai i ce des in étropales u rha iiies au détriiiieizt d u iiionde i-ural. Ce déséquilibre eutse ln uìl- le et la cai?lpagi?e, la preiiiière eiig/ozctissuiit /es res- soiirces de lu secoiide saiu réelle coiih.epmfie. coiisti- tue manfessfei7ieiit mie iizjristice sociale qu'il est uigent de répaiw . . " Déclaration de Paul Biya, 1'échelle de la planète sera franchi, Moins spmbolique- nient, cela signifie que, dans le courant du prochain quart de siècle, il faudra faire face à l'afflux d'un niil- liard de nouveaux' citadins dont les trois-quarts dans le tiers-nionde. Le développement des grandes niétropoles - du Caire à Mexico - est plus imputable i la croissance naturelle qu'à l'exode rural. Les grandes villes, y compris celles du Sud, ne peuvent plus étre considérées. n'en déplai- se aux' observateurs superficiels. conime ces "machines à transformer des paysans en citadins" décrites dans la première moitié du W siècle. Entre 19Sj et l'an 2000. sur les 17 nouvelles villes qui franchironr le cap des j niillionsd'liabitants, 16 seront des villes du sud! Dans les pays du sud. la tendance acruelle, dans les pays du Sud est à la mégapolisa- tion. Elle se définità partir de l'opposition entre la mi- tropole qui or,oanisait son territoire et fonctionnait com- nie "transforniateur" en trouvant dans la production une grande part de son dynamisme interne et la niigapole qui ne structure aucun territoire environnant niais au contraire le consomme, proliftrant sans logique appa- rente et tuant le sens ménie de la ville. Faut-il pour autant assimiler ces nouvelles concentra- tions urbaines à des "territoires sans lieux;"réduisanr du enjanT'ier u modèle industrialiste à la révolution verte, les doctrines "dé~eloppementistes" ont. dans le meilleur des cas, ignoré la ville. .hombre de gouvernants des pays en développement ont ménie dénoncé l'urbanisation comme un fléau à combattre, rejoints et confortés dans leurs "croisades" des années 70, par les théoriciens du "biais urbain". L'horizon de l'urbain généralisé suscite depuis quelques années le retour d'un discours assimilant développement urbain et développement économique. entre ville et civilisa- tion. .ilprès l'excès d'indignité ne doit-on pas craindre l'excès d'honneur ? Alors que les populations citadines paient au prix fort les rigueurs de l'ajustement structurel, les experts en écononiie-monde, grands pourfendeurs des construc- tions étatiques, nous assurent qu'une meilleure gestion des villes assurera de fagon quasi automatique la crois- sance et le développement au binéfice du plu nombre.. . Mais, en attendant que chantent les lendenlains d'ajus- tement. il faut bien parer aux risques politiques que représentent la pauvreté urbaine de niasse. aggravée par les déclassements sociaux et la montée insupportable des inégalités. C'est ainsi qu'en contrepoint du nouveau dogme" la ville facteur du développement". ressursis- sent les vieilles angoisses avivées par la violence urbai- ne et que ressort la vieille potion: tous ces citadins pauvres ne seraient-ils pas moins dangereux s'ils éraient restés au village i La Banque Alondiale esprime h e n toure I'anibiguité qui régir les rapports entre la i-ille et le d&eloppenient.. . L4 JELE ALI DIMENSIONS DE L4 PLLV&TE antonnée historiquement aux pays industriali- sés, l'urbanisation est en train de devenir un phénomène mondial. Entre 2010 et 2020, le ymboliquk - , des 50 ?/o de population urbaine à

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I

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MONDE

Au Nord c o m e au Sud, l'urbain se généralise, entre le concept de viUe intelligente

et l'enfer promis par la montée des sauvages urbains, la ville n'est pas plus un problkme qu'une solution,

P a i E d e LE BRIS, INTERURBA /

" l 'un des phéilzoiiièizes les plus [email protected] (. ..) est la g iga II fesgu e exmissai i ce des in étropales u rha iiies au détriiiieizt d u iiionde i-ural. Ce déséquilibre eutse ln uìl- le et la cai?lpagi?e, la preiiiière eiig/ozctissuiit /es res- soiirces de lu secoiide saiu réelle coiih.epmfie. coiisti- tue manfessfei7ieiit mie iizjristice sociale qu'il est uigent de répaiw . . "

Déclaration de Paul Biya,

1'échelle de la planète sera franchi, Moins spmbolique- nient, cela signifie que, dans le courant du prochain quart de siècle, il faudra faire face à l'afflux d'un niil- liard de nouveaux' citadins dont les trois-quarts dans le tiers-nionde. Le développement des grandes niétropoles - du Caire à Mexico - est plus imputable i la croissance naturelle qu'à l'exode rural. Les grandes villes, y compris celles du Sud, ne peuvent plus étre considérées. n'en déplai- se aux' observateurs superficiels. conime ces "machines à transformer des paysans en citadins" décrites dans la première moitié du W siècle. Entre 19Sj et l'an 2000. sur les 17 nouvelles villes qui franchironr le cap des j niillionsd'liabitants, 16 seront des villes du sud! Dans les pays du sud. la tendance acruelle, dans les pays du Sud est à la mégapolisa- tion. Elle se définità partir de l'opposition entre la m i - tropole qui or,oanisait son territoire et fonctionnait com- nie "transforniateur" en trouvant dans la production une grande part de son dynamisme interne et la niigapole qui ne structure aucun territoire environnant niais au contraire le consomme, proliftrant sans logique appa- rente et tuant le sens ménie de la ville. Faut-il pour autant assimiler ces nouvelles concentra- tions urbaines à des "territoires sans lieux;" réduisanr

du enjanT'ier

u modèle industrialiste à la révolution verte, les doctrines "dé~eloppementistes" ont. dans le meilleur des cas, ignoré la ville. .hombre de

gouvernants des pays en développement ont ménie dénoncé l'urbanisation comme un fléau à combattre, rejoints et confortés dans leurs "croisades" des années 70, par les théoriciens du "biais urbain". L'horizon de l'urbain généralisé suscite depuis quelques années le retour d'un discours assimilant développement urbain et développement économique. entre ville et civilisa- tion. .ilprès l'excès d'indignité ne doit-on pas craindre l'excès d'honneur ?

Alors que les populations citadines paient au prix fort les rigueurs de l'ajustement structurel, les experts en écononiie-monde, grands pourfendeurs des construc- tions étatiques, nous assurent qu'une meilleure gestion des villes assurera de fagon quasi automatique la crois- sance et le développement au binéfice du plu nombre.. . Mais, en attendant que chantent les lendenlains d'ajus- tement. il faut bien parer aux risques politiques que représentent la pauvreté urbaine de niasse. aggravée par les déclassements sociaux et la montée insupportable des inégalités. C'est ainsi qu'en contrepoint du nouveau dogme" la ville facteur du développement". ressursis- sent les vieilles angoisses avivées par la violence urbai- ne et que ressort la vieille potion: tous ces citadins pauvres ne seraient-ils pas moins dangereux s'ils éraient restés au village i La Banque Alondiale esprime h e n toure I'anibiguité qui régir les rapports entre la i-ille et le d&eloppenient.. .

L4 JELE A L I DIMENSIONS DE L4 PLLV&TE

antonnée historiquement aux pays industriali- sés, l'urbanisation est en train de devenir un phénomène mondial. Entre 2010 et 2020, le

ymboliquk - , des 50 ?/o de population urbaine à

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Le Caire. Egypte

les cultures locales à la consommation et au spectacu- laire marchand ? Elles demeurent en tout étar de cause. pour une fracrion croissante de I'hunianiré. des "villes i vivre" envers er contre toutes les carences. Mais

, ces niégapoles contemporaines entretiennent-elks en- core une quelconque filiation avec I'idGe de ville for- gée depuis des millénaires ?

D'OU VIENT-ON ?

rois âges de l'urbain peuvent schématiquement ttre distingués : - le premier ige va de la période médiévale i la

piriode classique. I1 est caractérisé par une évolution technologique lente. L'harmonie urbaine nait de la reproduction de modèles urbains connus de longue date, - le deuxième âge est celui de la niodernité,avec ses deux grands vecteurs : le progrès et la machine et un credo: un nouvel ordre urbain doit remplacer l'ancien. h i s , finalement, le principe de la reproducdon de modèles ne change pas. Seuls changent les modèles.

- Le troisième ;ige est celui de In post-moclerniré, sou- ycnt caractérisé trop simplement par le bricolage et

l'éclectisnie ... et la fin des niodkles. C'est en t o p CJS Pige des contradictions. D'un côt5, retour aux lieux niais dans un monde télescopique et télécommuniquant

croyance en un mode de pensée unique pour faire la . ville inais dans un système-monde Grendu aux dimensions de ia planère et command< p u des forces h prétenrion hégémonìque, Les rransforniations en cours en matière d'urbmisation dans les pays du Sud relèvent en gros de trois shies de facteurs, Les deus premiers s'inscrivent chis le temps court : - l'accélération de I'urbanisarion imputable. 311 cours des dernières décennies, P des rythmes de croissance dhnognphiques inédits dans l'histoire de l 'humanit i , - la crise économique mondiale et l'ajustement struc- turel, médecine de crise assise sur le dognie néo-libé- r31 et inipos<e à I'échelle planéraire. Le troisième facteur s'inscrit dans le temps long et ne concerne pas seulenient le Sud. C'est l'ipuisemenr du niodè!e fordiste, c'est à dire d'un niodèle où de forts gJins de productivité nourrissent une forte croissance de la consommation et réciproquement.

où triomphe le "non-lieu", de l'autre, la fin de la . -.. ._

AU GRE DES C O l j Y T S DE PENSEE CONTRADICTOIRES

i l'on s'en tient JUS vingt dernitres années, plusieurs'dates jalonnent I'évolution des rapports enrre la pensée sur le développement et la ville:

- Conférence Habitat I (Vancouver, 1976). Eile marque d'une ceitiine manière la fin du modèle de modernisa- tion à b x e narioilale et des théories de la dépendance. Ces réftrents, quasi hégémoniques au cours des années 50 et 60. appellaient un renforcement de 1'Etar centrali- sareur et ne s'intéressaient i la ville que pour autant

nalité par rapport à l'indusrrialisarion. Inipérarifs stcuritaires et idéaux de justice sociule (doc- trine des besoins fondamentaux) vont se conjuguer au cours des années 70 pour faire prévaloir la thèse de Yin- terdépendance Nord-Sud et promouvoir la dynamique propre du monde populaire urbain (auto-construction, secteur informel...), Les ONG investissent alors la scène urbaine tout en restant très influencées par les doctrines anti-sille. - 1977, publication d'un ouvrage sur le "biais urbain'' qui dénie à la ville ses vertus modernisatrices. R. Srren (1) résume la thèse de la manière suivante : ?certains aiid~ates oiit soilteilil p i e l'iizilestisseiizeizt daizs les zoiit?s urbaines dotinaif des résdtats contraires ¿i ceiix qui étaieiit recherchés pziisqii/il ne faisait que rei$or- cer iiii Pcirfipris urbaiizn bieii ancré: azi détrinielit d u déileloppeiiieut riiral oir le rendenient réel di1 cqitnl

qu'elle Pvoluir dans le sens d'une meilleure fonction- ,.

.

HdD - no 31/32 - Decembre 1995 47

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.. ..

était sensiblement plus élecé". Dans son ouvrage paru en 1977 sous le titre Why Poor People Stay Poor : Urban Bias in World Development, Michael Lipton explique le sous-investissement dans les petites exploitations agri- coles par les pressions exercées par une "alliance ur- baine" défendant ses intérêts, - Aux 'Yournées internationales de Lille", en 1989, la pensée sur Ia ville consacre le modèle néo-moderni- sateur à base transnationale. L'objectif n'est plus le dé- veloppement mais l'adaptation des espaces nationaux aux exigences de cohérence de l'espace économique international. L'ajustement au nouvel ordre global ap- pelle une recomposition des espaces urbains s'inspirant de logiques (celle des pôles performants en particulier) qui provoquent la désarticulation des anciennes logi- ques territoriales de développement et s'expriment au milieu du chaos apparent de la ville éclatée.

.

Les grandes villes du monde entier sont de plus en plus dépendantes de réseaux délocalisés à base économique et celles du tiers monde tendent à hre de moins en moins en prise sur leur hinterland national. - La conférence Habitat II (Istanbul, 1996) va-t-elle consacrer la revanche des villes ?

Produire u n plan d'action mondial pour mobiliser des ressources internationales et créer des arrangements institutionnels afin d'aider les pays 6 réaliser les objec- t$ des établìssements humains via bles et d'un logement pour tous et à en surveiller la réalisation, et protéger l'environnement naturel contre les effets fâcheux et in- désirables de l'urbanisation,

Extrait du rapport du Comité préparatoire (New-York, avril 1994)

. Rien de bien nouveau donc s'agissant des grands objectifs ... sinon la perspective d'une gestion interna- tionale des villes et le fait que, pour la première fois, citoyens, groupes communautaires , autorités locales, etc. sont appelés à participer aux préparatifs nationaux et que les représentants des autorités locales pourraient être associés (sans droit de vote) aux délibérations de la Conférence. Très tôt mobilisées dans sa préparation, les grandes métropoles entendent faire de cette confé- rence des États un véritable "Sommet des villes". Les textes préparatoires à cette rencontre montrent cepen- dant que la pensée sur la ville demeure ambivalente.

DE LA PLANETE DES SANS ABNS AUX SAUVAGES URBMNS

es transformations du monde ne semblent géné- rer en ville que de la précarité et de la désa- L grégation, voire du chaos. L'initiative publique

perd sa capacité d'anticipation par rapport à la pro- duction massive d'exclusion et à la destruction des formes de consensus social nouées autour de l'émer- gence des classes moyennes urbaines. Les Symptomes du dérapage sont la déstructuration des groupes fami- liaux et l'érosion des solidarités. Le monde enchanté,

où les échanges personnalisés entre groupes jouaient le rôle d'amortisseurs de crise, se lézarde (2). Les signes de la crise mondiale se lisent au Nord com- me au Sud dans la.crise urbaine. Un mur s'est dressé entre des mondes qui ne peuvent plus communiquer. Pour casser ce mur, on dispose certes au Nord des mé- canismes technocratiques de la solidarité mais on ne sait plus fabriquer du lien social. L'exclusion produit de la violence. Faut-il s'en étonner ? Disons d'abord que les pays du Sud sont loin d'avoir le monopole de cette violence urbaine (les exemples abondent chez nous et outre-atlantique). Cette violence se trouve, il est vrai, exagérément am- plifiée par les discours qu'elle suscite mais ses mani- festations sont assez préoccupantes pour justifier la ré-

'

manence d'une vision négative de la ville. Si elle se cantonne le plus souvent dans des formes métaphoriques (ici le rap, là la peinture murale com- me dans le mouvement set sétal à Dakar au Sénégal, là encore le sport), le pas est de plus en plus souvent franchi entre le stade métaphorique et la violence ef- fective, Celle-ci prend un tour brutal mais éphémère lorsque, comme au Caire, à Tunis et dans d'autres lieux, elle se manifeste en de gigantesques émeutes de la faim. La violence urbaine constitue aussi une réponse plus ou moins spontanée mais récurrente à des ca- rences insupportables. Dans le domaine de l'accès au sol urbain et au logement, celà se traduit par les inva- sions, fréquentes en particulier en Amérique Latine. Elle traduit enfin le refus global d'une modernité citadine inaccessible (des simples larcins à la constitution de bandes armées) et des valeurs universelles de progrès qui sous-tendent cette modernité. Cette violence ne par- vient qu'exceptionnellement à s'exprimer sur un registre politique, comme c'est le cas au Brésil avec le Mou- vement de la Réforme Urbaine; il arrive en revanche qu'elle soit récupérée par les pouvoirs autoritaires ou par les organisations mafieuses dont on aurait tort de penser qu'elles constituent l'apanage de la péninsule ita- lienne et de quelques pays latino-américains.

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1

~~~~ ~

MIRACLE DU NEO-LIBERALISME

II la savait foyer des vertus civilisatrices, mère nourricière de la mobilité sociale contre les so- O ciétés hiérarchiques et immobiles (à cette ré-

serve près que la solitude bienfaisante s'y paie de la perte du confort psychologique de la tradition). Les experts redécouvrent aujourd'hui qu'elle crée de surcroît toutes les conditions favorables à la produc- tion et à la consommation, grâce à ses effets sur la pro- ductivité, sur les coûts, sur l'inflation, sur la répartition

(21 La métropole, synonynze de modernité, a sign$é déliaison par rapport b la tribu et arracbemntpar rappo?t aux l iem ori- ginels. Cette déliaison et cet arrachement filrent, il faut le rap; peler les conditions de la construction de la citoyennete. Aujourd'hui, on est en traila de coiutater que la crise du lien spatial est génératrice dkne crise du lien social.

dn HdD - no 31/32 - Décembre 1995

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cl! revenu etc. La ville est désormais traitée conime un acteur économique. Cependant tous ces experts trai- tênt malheureusenient la ville en tenant pour acquises les politiques macro-Pcononiiques et ignorent résolu- ment les enjeus n_on éconorniques du diveloppement urbain : . - La production et la circulation des richesses prennent aujourd'hui d'autres formes que celles qui ont caracté- risé le développement de la ville indusrrielle. Mais les économies qui ne relèvent pas de ces fornies sont lais- sées dans l'ombre ou, dans le meilleur des cas. lues en creux. C'est tout !e problème de ce que les Pcononiistes appellent dans le tiers monde la seconde économie, l'iconomie souterraine ou le secteur informel. Et si pourtant ce secteur informel ne faisait qu'esprimer l'ef- facement du travail salarié comme producteur de ville et valeur structurante des soci6tPs urbaines contempo- raines ? - Les discours et les operations dheloppés sur le rhème "la rille corime facteur de de'reloppetnent éco- ~ioiiiiqiie" se réfèrenr à un nouveau parndigme urb:iin qui subordonne la logique du social aus rapports mar- chands. Or, on imagine difficilement ici, en Europe, combien il est difficile de faire comprendre i un citadin africain que l'accès à l'eau potable doit releiver d'un "service urbain marcliand",..

L'UTOPIE ?E PREND PLUS FORME ITRBUNE ~ ~ ~~

u Sord. on rêve de "villes intelligentes", de "cirés de l'informarion'' où les technologies de communication ouvriraient la voie à une nou-

velle démocrstie. D'autres voi\' prédisent, au Kord coni- me au Sud, la "montée des sauvages urbains". Les mégapoles, devenues l'antichambre de l'enfer, risque- raient d'entraîner l'humanité dans une régression fidtlt3- le, sauf à supposer leur déclin pour le milieu du prochain siècle. On se situe là sur le registre du pronostic hasardeux et non sur celui de la prospective sérieuse. &lénie si l'on constate dès maintenant un peu partout dans le nionde un tassement de la croissance des très grandes villes, force est de constater que, loin de dépérir, les territoires urbains s'étendent, annoncant un "urbain généralisé". Au Sud, les caractéristiques démogra- phiques - leur grande jeunesse en particulier - des très grandes villes à croissance ralentie, doivent conduire à renforcer les efforts en matière de scolarisation et de logement. Ces mégapoles s'érigent de plus en plus en sujets au- tonomes, compte tenu des tendances lourdes de la n:ondialisation, et plus particulièrement de la flesibili- té spatiale croissante de la force de travail. Celi renforce bien évidemment la nécessiri de traduire cet- te autonomie par une décentralisation effective des dkisions en matière de politique urbaine. La "pensée unique" réduit malheureusenient cette impérieuse nécessité à une double équation simpliste : décentrali- sation = déinocratietion = développement local.

. , . (

72, lesp$ts.de la Banqìie ~?ondialiau sect& Urbain avaiqit dépassé les

' 2 niìlliards'en 1988. P&'& ¿O.% desfondspr&éspar la Banque pour le ~e&r&bai?a depuis 1972 sotit allés à des opératiom de lÖgein&t; toÚtefìs, IapaflaJectée di- rectement à la construcfioti de logemaits a comidéra- blenieill diminui ces deniières années., , In riouvelle dé- marche de la Bariqiie à l'égard du secterk urbain met l'accent sur le cadre ~iiaci.o~conomiqiie et insfitutiounel e/ viseà faire en soite que lesprojets aient u n impuctsiir lblsemble du secteur. Panni les iioutlelles pl~oiori~és~gu- rent lbmdiorafion de lhdtnìnisfration des uilles et la nzo- bilkatioiz des ressources munic$ales, ainsi que la d j w - ni~kation des marchés des teraiils et l'asaitiissenzent de l'en Lironnement. Les iiite~zientiom par projets, coniine la mise en place d'une infrastmture tirbaine de base, consenieront de l'impoiltance. Mais /esProjeis dei!soizt dé- sonnais accorder beaucoup phis dbttentiotz à ces ques- tio/% de potiée plus laige. Rapport de la Banque mondiale sur la pauvreté dans le monde, 1990 (Encadré 8.6. p. 152)

Une nouvelle pensée est en gestation qui s'oppose à la fois au dogme néo-libéral et i de puissants mouve- ments anti-modernisateurs à base largement urbaine. La proclamation des droits de l'homme et la défense de la démocratie pluraliste ne tiendront cependant lieu de viatique que si elles s'accompagnent d'une réaffir- mation du droit à la ville et au logement pour tous. C'est bien en effet à travers la consolidation des liens sociaux à l'intérieur de collectivités solidement ancrées dans le territoire (la ville, le quartier) niais aussi en ré- affirmant le nécessaire rôle régulateur des Etats que l'on reconstruira la politique, fille de la vie urbaine depuis Socrate et Platon. Bien des interrogations demeurent sans réponse : .les villes du X?iIimC siècle produiront-elles encore du sens ? Y aura-r-il encore un art urbain dans le désordre planétaire ? Saurons-nous inventer des villes "durables" et sans exclusion à partir de la configuration inédite que représentent les mégapoles d'aujourd'hui ? En artendant le surgissement de ces utopies créatrices il importe de se convaincre que la ville n'est pas plus un problème qu'elle n'est une solution et peut étre emprunter la voie pragmatique que sugère Italo Calvino : "L'ei2fer des ui- vaiits rz'est pas chose à uenii; s'il y en a uii, c'est celui qui est déjà là, l'eizfer qrre nous habitoils toils les jours, qire izoiis fornioizs d'être ensemble. 11 y a deiix façons de fie pas erz soi @ir*. La première réussit aisémeizt à la plu- pad: accepter l'erlfer, eiz devenir m e paif au point de lie pliis le voir Ln seconde est risquée et elle demande m e attentioiz, iria apprentissage, coiztiizuels: chercher et sauoir reconnaître qui et p o i , au iizilieu de l'eizfer, n'est pas l'eizfer, et le faire durei; et lui faire de la place" (3).

HdD - no 31/32 - Décembre 1775 49

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