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L’Asie dans la place publique au Congo : Cas de l’Université coréenne à Kinshasa Author: Dr. Julie Ndaya Tshiteku Institution: Université de Kinshasa Address: c/o Leeuwerikspad 20, Ter Aar, the Netherlands Email: [email protected] Responsible Development in a Polycentric World Inequality, Citizenship and the Middle Classes 14th EADI General Conference 23-26 June 2014, Bonn www.gc2014.org

L’Asie dans la place publique au Congo : Cas de l’Université ......qui ont affaire avec leurs actions. C’est le cas du Congo Kinshasa où, depuis la célèbre phrase du feu

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L’Asie dans la place publique au Congo : Cas de l’Université coréenne à Kinshasa

Author: Dr. Julie Ndaya Tshiteku

Institution: Université de Kinshasa

Address: c/o Leeuwerikspad 20,

Ter Aar, the Netherlands

Email: [email protected]

Responsible Development in a Polycentric World Inequality, Citizenship and the Middle Classes

14th EADI General Conference 23-26 June 2014, Bonn

www.gc2014.org

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Abstract

Depuis quelques années, la Chine est considérée comme le partenaire important dans la

coopération au développement en Afrique. Elle se profile en promouvant une coopération « Win

Win », marquant la rupture avec la relation paternaliste entretenue entre l’Afrique et l’Occident

depuis les indépendances. La présence chinoise est aussi très remarquée en Dr Congo. En effet,

dans le cadre du programme LES CINQ CHANTIERS initié par le gouvernement congolais, la Chine

a fortement investi dans la coopération avec le Congo, en échange des ressources naturelles, le

Congo devenant entre outre un marché où sont déversés des produits chinois.

Mais la Chine n’est pas la seule puissance asiatique présente dans l’espace public congolais. Des

différents autres partenaires émergent dans le cadre du programme gouvernemental LES CINQ

CHANTIERS. C’est le cas de la coopération de l'Appui Technique Coréenne au chantier

EDUCATION. Dans ce but, la Mission d’Evangélisation Protestante au Congo (MEPCO) a créé en

2010 l’Université Révérend Kim, en abrégé URKIM. Cette Université porte le nom de son

initiateur le pasteur sud-coréen Kim Kyung Sik. L’URKIM a comme mission l’amélioration de la

qualité de l’éducation au Congo, par la formation de la jeunesse à bien servir la nation dans le

respect des valeurs fondamentales. Elle s’est assignée comme tâche de façonner une élite qui

pourra servir la communauté par une éducation basée sur une analyse du marché de l’emploi,

conciliant le savoir, le savoir-faire et le savoir-être. Par cette formation l’URKIM veut produire une

élite congolaise capable de prendre en mains le devenir du pays.

La participation coréenne au chantier éducation au Congo suggère la circulation des idées et

d’une forme d’enseignement d’une place à une autre. Cette contribution veut examiner cela. Les

questions que nous nous posons sont: Quelles sont les valeurs diffusées par l’éducation coréenne

pour former une élite congolaise? Quelle en est le cadre de référence et quelles sont les

stratégies utilisées en vue de les réaliser? En outre, en partant des expériences des étudiants de

l’URKIM, nous aimerions examiner leur profil et leur histoire. Quelles sont leurs motivations?

Comment se représentent-t-il la formation donnée? Quelles attentes orientent leur choix et

comment envisagent-t-ils leur avenir à partir de la formation reçue?

Keywords

Asie, Corée, Congo, Education, jeunesse congolaise

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« Aujourd’hui, la difficulté d’étudier qui nous frappait est résolu. Le Coréen a redoré L’image de notre

quartier N’Djili. C’est un véritable soulagement pour nous, d’avoir une Université dans le coin. Nos

enfants étaient avant cela condamnés à parcourir des longues distances, parfois à pieds, par

manque de moyen de transport, à la recherche d’un institut supérieur ou d’une Université qui sont

tous situés à l’ouest, au sud, et nord de Kinshasa, là où vivent les nantis. Maintenant il suffit de se

déplacer un peu, nous avons tout. Le problème des études ne se pose plus. » ( Extrait des propos

d’un entretien avec un chef quartier. Kinshasa ; janv. 2014)

Le recteur de L’Université Révérend Kim, Kim Kyung Sik, et son corps professoral

Introduction

Durant la décade passée, les discours sur la coopération afro asiatique est surtout dominé par

l’importance de la présence très controversée de la Chine en Afrique et les effets de cette

coopération sur l’économie, la politique et l’infrastructure des pays d’accueil.

Le corps très large d’études à ce sujet explorent le point de vue des concernés eux-mêmes,

c’est à dire, les populations africaines, directement d’une manière ou d’une autre par les actions et

les interactions de cette coopération sino asiatique. En fait, la Chine est très présente dans les

domaines particuliers en Afrique. Mais la Chine n’est pas le seul partenaire. Il y a une multiplicité des

autres acteurs qui n’actent pas dans la direction où à partir de Beijing. Ils émergent dans des autres

domaines à partir desquels ils orientent, redéfinissent et élargissent les choix ou les voies des ceux

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qui ont affaire avec leurs actions. C’est le cas du Congo Kinshasa où, depuis la célèbre phrase du feu

président, le père de l’actuel président « Je veux faire du Congo l’Asie de l’Afrique (Ndaya 2005),

exprimant l’idéal du modèle de développement national, des nouvelles connections dans la

coopération du Congo avec l’Asie profilèrent. C’est le cas des accords avec la Corée du Sud. Elle

s’est engagée à la coopération technique, en s’emparant du CHANTIER EDUCATION, un des cinq

chantiers1 du programme de développement national du Congo.

Cette contribution est une étude des cas qui va investiguer la perspective locale Congolais et

leurs motivations dans la participation aux activités coréennes au Congo. En prenant le cas de

L’Université Révérend Kim (URKIM en abrégé), du nom de son recteur et initiateur, le pasteur Sud-

Coréen Kim Kyung Sik au sein de laquelle nous avons effectué des recherches entre 2012 et 2014,

nous aimerions relever le profil des étudiants qui fréquentent cette Université. Quelle est

l’expérience du jeune congolais suivant la formation dans une telle institution ? Quelle est son

histoire ? Quelles sont ses motivations et ses attentes ? A partir de ces matériaux nous allons

montrer le contexte de l’émergence de l’URKIM au Congo, ses aspirations, ses objectifs et les

stratégies mises en place les atteindre.

Emblème de l’URKIM

2. Histoires de quelques étudiants de l’URKIM à N’Djili et Linguala

2.1. Ebenge, étudiant en G22 informatique

J’ai terminé mes études secondaires en 2008. J’avais envie de continuer à étudier. Mais ce n’était

pas possible. Il n’y avait personne qui pouvait supporter mes études. Mes parents disaient que

1 Les cinq chantiers sont les cinq domaines du programme de développement du Congo élaboré par le

gouvernement lors des élections présidentielles de 2006. Il s’agit d’Infrastructures, de la santé, l’éducation,

l’eau et électricité, création des logements, des emplois.

2 G2 est l’abréviation de 2éme graduat.

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j’avais mon diplôme d’état et que je devrais me débrouiller. Nous sommes à 8 à la maison et les

autres enfants devraient aller aussi à l’école. Il était difficile de trouver un travail quelconque. C’est

ainsi que j’ai fait fabriquer une table pour faire une cabine et vendre les unités de téléphone. Ça

allait bien, mais c’était juste assez pour mes besoins. Parfois j’aidais un peu mes frères et sœurs qui

étaient renvoyés pour le minerval. Mes parents ont peu de moyen et j’aidais aussi à la maison avec

ce que je gagnais. J’ai par après eu la chance d’être engagé par un homme d’affaires de la ville pour

que je sois son agent à Sans Fil3. J’étais son agent. Il me confia son commerce de vente en gros aux

petits détaillant les cartes de téléphone de toutes les serveurs. Je recevais un pourcentage en

fonction de ce que j’avais vendu. J’étais content, même si ce n’était pas mon commerce. Ça marchait

très bien. Et c’est en 2010 que j’ai alors entendu que l’URKIM, que j’ai vu en construction, allait

ouvrir ses portes. Je me suis dit que je ne voulais pas rater cette occasion pour poursuivre mes

études. L’Université était près de la maison. Je peux marcher jusque-là. J’ai demandé à mon chef si je

pouvais de temps à autre prendre un journalier pour me remplacer en fonction de mes heures de

cours. Il n’y voyait pas d’inconvénients et c’est ainsi que je suis rentré sur le banc de l’école. Avec ce

que je gagne, je paie moi-même mon minerval. L’Université nous permet de payer en tranche les

frais qui s’élèvent à $ 350 par an. Je paie en 5 tranches et ça marche. Je n’ai problème de transport.

J’ai choisi l’informatique pour être sûr de trouver du travail. Il y a aujourd’hui partout dans les

quartiers des internet-cafés. Mais ils ont souvent des problèmes. Avec la formation que je suis, je

donne un coup de mains déjà. Nous apprenons à réparer, à installer et à programmer les

ordinateurs. Les professeurs coréens qui viennent ici quelques fois par an sont très bien pour cela.

L’enseignement est très bon aussi. Nous avons tout pout nous exercer. Dans les laboratoires, on évite

l’enseignement des masses, chaque étudiant est devant la machine. L’interdiction de la langue est

bien car il faut s’exprimer en français. Le français est la porte pour les affaires.

3 Sans Fil est le nom d’un quartier de la Commune de Masina.

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La Cérémonie d’ouverture de l’URKIM en 2010

2.2. Zango, étudiante en G3 Droit

J’étais d’abord à L’UNIKIN, pour étudier le droit. J’aime les études de droit car il y a trop d’injustice

dans notre pays, je veux mettre au service de la population. Mais j’ai abandonné mes études avec

des difficultés rencontrées à l’UNKIN. Les auditoires étaient archi pleines. C’était impossible

d’étudier. On devrait arriver à 6 heures du matin pour être sûr de trouver une place pour un cours

qui commence à 9 heures. Il fallait aussi amener sa propre chaise. Je me suis alors inscrite à

l’Université Kimbangu mais là aussi les réalités ne me plaisaient pas. Il y avait trop de manipulations.

Il fallait toujours payer de l’argent, même pour faire un TP. On ne pouvait pas le faire sans avoir

acheté le syllabus. C’était difficile. Ensuite les professeurs se prennent comme des extra humains. On

ne peut rien faire. Il n’y a aucune sanction contre eux. C’est ainsi que je suis venu ici dès que

l’Université avait ouvert ses portes et je dois vous dire que je me sens atterrie. J’habite à

Kimbanseke. Tout est devenu facile. Le transport, le contact avec les profs. Les échanges entre les

étudiants et les professeurs sont bons. Les professeurs s’intéressent aux étudiants, ils sont

imprégnés des bonnes valeurs, ils ne sont pas des personnes extra, difficiles à approcher. Il y a trop

de libéralité dans les autres Universités. Le professeur ne peut jamais accepter qu’on le contredise.

Mais ici ils font tout pour connaitre nos noms, même s’il s’agit des grands auditoires. Ils demandent

ce qu’on a compris ou qu’on n’a pas compris et ils vous aident avec ça. Les doléances des étudiants

sont entendus, le corps académique comprends, il n’y a pas des ventes des TP par les assistants. Si

un assistant ose le faire, il est rappelé à l’ordre. D’ailleurs c’est arrivé qu’un assistant l’ait fait. Il a été

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rappelé dans l’immédiat au secrétariat académique. Il devrait présentait des excuses aux étudiants.

D’ailleurs presque tous nos professeurs viennent de l’UNIKIN. Nous recevons donc les mêmes

matières que ceux qui restent à l’UNIKIN. Ils n’y a pas de différence. Les valeurs sont chrétiennes.

Les mauvaises mentalités sont prohibées. Et aussi entre les étudiants. Dans les autres Universités,

après avoir payé le minerval, il y a des groupes parallèles des étudiants qui vous donnent leurs

injonctions, qui vous intimident. Dans cette université chrétienne ce type de problèmes est exclu.

Nous voulons bel et bien être parmi les premiers de la faculté de droit. Les mentalités ont fait que le

pays n’avance pas. L’université veut nous lancer dans le monde, former des hommes et des femmes

nouveaux, avec des bonnes mentalités. Il est interdit de parler le lingala dans l’enceinte ou autour de

l’Université. On parle tous le français ou l’anglais. Parler une même langue nous réunit. L’université a

mis sur pieds une commission pour traquer les lingalaphone. Si on vous surprend en train de parler

une autre langue que le français, vous préparez vous-même votre échec. Vous recevez une lettre

d’exclusion. En parlant français, nous nous améliorons. Quant à l’habillement, on s’habille comme

l’humanité le demande, avec la dignité humaine. Pas des nombrils dehors.

Les étudiants dans l’auditoire

2.3. Kalinda étudiante en G2 Communication et Média :

J’ai d’abord commencé mes études à l IFASIC car je voulais devenir journaliste. Mais durant la

première année, j’ai dû abandonner car je ne savais pas payer le minerval. On est même venu faire

un contrôle durant la mi session, dans les locaux où nous avions cours. Je n’avais pas mon bordereau

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de paiement et c’est ainsi que j ’ai été renvoyé. Je ne savais pas cette année pourvoir aux frais.

J’habite à de Bonhomme et c’est le pasteur de l’église où je prie qui m’a soufflé l’ouverture de

l’Université révérend Kim. Cet homme de Dieu connaissait mon désir de devenir journaliste.

Je me suis présenté pour l’[ inscription, ce n’était pas aussi compliqué qu’à l’IFASIC où il faut

d’abord donner de l’argent par ci par là aux intermédiaires pour qu’ils puissent vous aider à vous

inscrire. Cela me donnait déjà un bon sentiment. Aussi la possibilité donnée à chaque étudiant de

payer son minerval par tranche. Ce minerval est bien plus cher que l’IFASIC, il fallait payer $350 au

lieu de $250. Mais ici on peut payer par tranche. Et je n’ai pas trop d’autres frais à payer. De de

Bonhomme où j’habite je peux même venir à pieds si je me lève tôt. Et puis je ne peux pas me

plaindre pour le minerval. Nous recevons une bonne formation, avec des professeurs qualifiés. Ils se

distinguent dans leur considération de nous, et dans leur manière de donner cours. Nous étudions

dans des très bonnes conditions. Kim a fait un effort pour prendre soin de mettre à notre disposition

des professeurs de qualité et surtout des exercices pratiques. Nous nous exerçons comme

journaliste à notre chaine de radiotélévision KIM. Et pour écrire nous avons un mensuel « l ‘URKIM

news ». Cela nous permet de bien assimiler nos matières, de la mettre en pratique. Dans leur

dispensation des cours les professeurs ne vous insultent pas. Il y a une attitude de courtoisie entre

les professeurs et les étudiants, il y a une bonne collaboration. Il y a de la discipline, chez les

enseignants. Pas de corruption, ou d’harcèlement sexuel des filles. On se sent chez soi. Les

enseignants ici c’est différent. Quand j’entre je sens que je suis à l’Université on sent qu’on est dans

un centre de formation. Il y a un hangar prévu pour ceux qui veulent étudier, les sonneries de

téléphones sont interdites, il y a de la discipline.

Je suis chez moi. Dans les autres Universités comme à l ’UNIKIN ou l’UPC règne la magie, on

vient vous attaquer au cours. Le cadre n’était pas aisé, pas de toilettes, difficile de se concentrer.

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L’enceinte de l’URKIM à Kinshasa

2.4. Sankana étudiante en G2 en hôtellerie et Tourisme

Je suis venue à l’URKIM parce que c’est très prêt de la maison. Depuis la fin de mes études il y a deux

ans, mes parents ne voulaient pas que j’aille étudier loin de la maison, à l’UNIKIN ou à l’UPN ou à

l’ISP Gombe. J’étais chaque fois confronté à PAS QUESTION quand je demandais d’aller poursuivre

mes études. Mes parents avaient peur que je commence à me dévergonder en faisant des telles

distances, sur la route, que j’aillais entrer dans un mauvais chemin. On entend d’ailleurs cette

réputation des filles qui font l’Université, qu’elles ont des mauvaises habitudes et fréquentations,

qu’elles courent avec des hommes. C’est pour cela que j’ai passé mon temps à travailler dans une

pharmacie dans notre quartier. Mais j’étais triste de ne pas faire des études comme mes copines.

Et quand Kim a ouvert ici, je suis encore aller parler à ma maman pour qu’elle demande à

papa de me laisser étudier. Papa a directement accepté. Je quitte la maison à une certaine heure et

je reviens avant même qu’il fasse noir. Il n’y a aucun problème de transport, ou de déperdition sur la

route. Mes parents connaissent mes horaires de cours. D’ailleurs quand j’y pense, je crois qu’ils

avaient raison de ne pas me laisser partir loin, ne fut-ce que pour les problèmes de transport. Nous

avons tout à l’URKIM, les professeurs sont les mêmes que l’UNIKIN, nous n’avons rien à envier aux

étudiants de là-bas. Ici c’est bien, les conditions sont bonnes. Les professeurs respectent les filles. Et

comme c’est une université qui commence avec une bonne réputation, et à peine connu, j’espère

trouver un bon emploi dans le tourisme. J’aime ce métier. L’université nous donne aussi la pratique.

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Elle a dernièrement organisé un voyage au site chute Nzongo, cela nous a permis aussi de mettre en

pratique ce que nous apprenons aux cours. Nous sommes les premières promotions, Il faut être

parmi les premiers. Une Université qui commence, c’est un défi.

2.5. Tendanga, étudiante en G2 économie de développement

Je suis mère de famille. Je voulais étudier. Mais mon mari ne voulait pas que j’aille loin de la maison.

Je le comprenais. On entend tellement des histoires des femmes, même mariées qui ne se

respectent pas dans les Universités. Moi-même aussi je voulais bien étudier mais être proche de la

maison pour venir facilement au cours et rentrer. Nous habitons à Bandal. Je ne voulais pas être

prise pendant des heures dans les embouteillages et arriver à la maison trop tard. Ça tombait bien

lorsque nous avons entendu que l’URKIM allait ouvrir une filiale à Lingwala. Il me fallait prendre

seulement un bus pour y arriver. Mais pour nous rassurer de la mentalité, mon mari et moi nous

sommes allés à l’ouverture. Il y avait une journée porte ouverte.

Le premier contact nous a vraiment plu. On avait été accueilli chaleureusement, avec égard

et joie. Et aussi l’état des locaux nous a beaucoup frappé. Il y a des plafonnières qui marchent. Ces

ventilateurs n’étaient même pas poussiéreux. Ils étaient propres.

Je me suis inscrite. En économie de développement car cela m’intéresse. J’ai toujours

pratiqué le commerce ; je viens d’une famille qui ne fait que cela. Je suis motivée parce qu’il s’agit

d’une Université qui commence. Si tu vas ailleurs, tu ne sais pas. Tandis que cette l’Université est

aussi proche de la maison. Les professeurs sont imprégnés de certaines valeurs. Ils s’intéressent aux

étudiants. La formation se donne personnellement. Dans la dispensation de leur cours, les

professeurs n’insultent pas les étudiants. Il y a le souci du maintien des valeurs chrétiennes car le

promoteur de notre Université est un pasteur. Les doléances des étudiants sont entendus, le corps

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académique comprends, il n’y a pas des ventes des TP par les assistants. Si on le fait on est rappelé à

l’Ordre, dans l’immédiat et on doit demander des excuses aux étudiants.

Il y a la courtoisie et une bonne collaboration entre le prof et les étudiants. Les professeurs

s’impliquent. Cela donne une belle image. On peut leur dire quelques choses lorsque ce qu’il dit est

faux. On peut les approcher. Ils ne sont pas des personnes extra. On n’a pas peur d’eux. Parmi les

professeurs il y a qui ont fait leurs études en Corée. Et puis, si on a besoin de se soulager, on va aux

toilettes, elles sont propres, les conditions d’hygiène sont impeccables, il y a de l’eau réservée pour

la chasse s’il n’y a pas de l’eau. La notion d’hygiène est très présente. Et sur la cours de l’Université,

on vous interpelle sur votre habillement. Pas d’extravagance. On doit porter les pagnes. Les

pantalons sont mal vus.

Le panneau devant l’URKIM à N’djili

3. L’émergence de l’URKIM au Congo

Les cas présentés ci-dessus ne sont pas exhaustifs, mais ils montrent la réalité à laquelle l’Université

Révérend KIM Kim Kyung Sik, appelée aussi par l’entourage l’Université de PROXIMITE voulait

répondre en pénétrant des zones jusque-là laissées pour compte en créant des institutions

d’enseignement où prennent aujourd’hui part des milliers des jeunes congolais, en occurrence des

filles, dans l’impasse comme le montre les cas transcrits de participer aux études supérieures.

Depuis sa création en 2010, son effectif d’étudiant est en croissance. Suivant les archives des deux

filiales où nos recherches ont eu lieu, en 2010 il y avait 950 étudiants dans le siège de N’Djili. Ils sont

aujourd’hui à 4 502 et à Linguala 2 132 étudiants. Et selon nos premières impressions, la majorité

sont des filles.

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Deux étudiants de l’ URKIM en Corée pour les échanges

L’Université leur offre des formations dans des domaines différents. Elle dispose des

facultés de médecine, de droit, des sciences économiques, des sciences de communications

informatiques, d’hôtellerie, des Sciences sociales, politiques et administratives. En outre l’Université

dispose d’une chaine de télévision pour la diffusions des émissions éducatives pour les étudiants en

communication et a développé un programme d’échange NIED (National Institute for International

Education) qui invite chaque années les étudiants venant des différents pays du pays du monde

entier en Corée du Sud afin de partager quelques expériences et effectuer des échanges culturelles,

notamment dans l’apprentissage de la culture coréen, pour la diffusion de la civilisation coréenne

partout dans le monde.

En effet, l’URKIM a été créé en 2010, un an avant la visite au Congo du président Sud-coréen

Lee Myung-Bak en 2011. Visite au cours de laquelle la Corée du Sud s’engageait à apporter son

expertise à la RDC au Congo dans la coopération économique et technique. Elle est l’œuvre du Sud

Coréen Kim. Pasteur, ex diplomate à l Ambassade de la Corée du Sud au Congo et représentant

légal de la Mission d’Evangélisation Protestante au Congo (MEPCO).

La visite du président sud-coréen à son homologue Kabila

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L’œuvre de Kim est centré sur l’éducation comme participation au programme Les Cinq Chantiers du

gouvernement congolais. Elle comprend la création d’une chaine institution scolaire, allant de

l’enseignement maternel, primaire, secondaire et Universitaire.

Son but est de donner l’espoir à la population congolaise marginalisée et surtout

désenclaver le milieu défavorisé. Il l’exprimait ainsi, lors de l’ouverture de son discours à la

cérémonie d’ouverture de son Université: « En 1960, la Corée du Sud et le Congo avait le même

niveau de développement. Nous avons la même culture, les mêmes conditions de vie pourquoi le

Congo ne peut-t-il pas atteindre le niveau de mon pays, la Corée du Sud comme elle aujourd’hui ».

(Archives URKIM N’Djili).

En effet, les années 2000, la période où est apparue l’initiative du sud-coréen de participer à

l’éducation au Congo peut être qualifié comme le souligne Ekwa dans son livre « l’école trahie »

comme période de la dégringolade de l’enseignement au Congo. La majorité de la jeunesse

congolaise était sans éducation. L’enseignement n’étant pas basé sur la réalité congolaise,

chômage, corruption sont à l’ordre. Les élèves arrivent à l’enseignement supérieur sans avoir

maîtrisé les mécanismes de la lecture, de l’écriture.

Pendant la colonisation et au lendemain de l’indépendance du Congo en 1960,

l’enseignement au Congo était le monopole de la mission catholique et dans une moindre mesure de

la mission protestante. Ils formaient dans des institutions créer par eux-mêmes des cadres, une élite

qui travaillait dans les structures de l’administration coloniale belge. C’est aussi l’exemple des

Universités au Congo. L’Université de Kinshasa, à l’époque Lovanium, d’après la ville belge Louvain,

fondée en 1954, située sur une colline vers Mont Ngafula. Loin des habitations des gens ordinaires.

Dans l’immédiat après l’indépendance le système scolaire était fonctionnel. Il était sous la

tutelle de l’état congolais qui faisait des grandes réformes. Les Universités par exemple étaient

presque tous situés dans les zones plus ou moins des nantis, comme Gombe (la carte) la plupart sont

situés à l’ouest, au sud, et nord de Kinshasa. Université de Kinshasa, loin, sur une colline. Accès

difficile à cause du transport. De l’infrastructure routière, les embouteillages. Mais à partir de 1975

on participa progressivement à la démission de l’Etat de ses responsabilités. Le pouvoir en place

avait étatisé le système scolaire et les taux bruts de scolarisation ont progressivement baissé. Le

budget que l’Etat allouait à l’éducation était en régression. Dans le Livre Ecole Trahie, Martin Ekwa,

signale par exemple ce taux avait commencé à chuter dés. En 1970, il était de 19%, en 1983 de

16,8%, en 1994 de 0,5% et 0,8 % en 1996. La conséquence de cela est qu’aujourd’hui le poids

financier entier de l’enseignement (y compris payer les enseignants) repose sur les étroites épaules

des parents.

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4. Emplacement de L’URKIM

Lors de sa création, l’enseignement était en dérive. Il y a aujourd’hui un bilan alarmant au sujet du

secteur de l’éducation nationale, primaire secondaire supérieur/universitaire. Cette dérive frappe

encore davantage les enfants des familles défavorisées.

Un des faits remarquables, ces sont lieux où sont situés les institutions Kim. Il s’agit des

quartiers défavorisés, appelé Cité indigène par l’administration colonial qui avait structuré la ville sur

un principe de ségrégation entre les populations, marquant la distance entre la ville européenne et

la cité qui pour hébergeait leur main-d’œuvre. C’est le cas par exemple de la commune de N’Djili qui

abrite l’URKIM et d’où sont originaires, suivant le secrétaire académique, la majorité des étudiants.

La commune de N’Djili, du nom de l’aéroport internationale et de la rivière qui le traverse, est dans

le district de Tshangu C’est l’une des communes urbano-semi rurale et les plus délaissées de

Kinshasa, la turbulente capitale du Congo à 15 Km du centre-ville. Elle couvre une superficie de

11.400 Km² et est l'une des entités administratives décentralisées la plus peuplée de la capitale.

Cette croissance démographique s’est empirée avec les pillages de 1991 et 1993, et s’empire

davantage à cause des épurations ethniques et les deux guerres. Entrainant l’exode des populations

congolaises qui viennent s’établir à proximité des centres économiques et cosmopolites.

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Une vue du quartier où est implantée l’URKIM

Le quartier n’a pas d’infrastructure. Sa population vit dans l’extrême pauvreté. Le taux de

chômage est très élevée et croissant, la dégradation de la qualité des ressources humaines

productives. C’est un quartier mal loti, sans décharges publiques avec sur les avenues des

inondations fréquentes. Des fournitures d’eau et d’électricité sont toutes délabrées. Le quartier n’a

pas d’écoles secondaires. Le taux d’analphabétisme y est croissant. Les habitations sont fragiles et de

dimensions très réduites. Elles présentent des mauvaises conditions hygiéniques. A cause de la

pauvreté des parents, le taux de scolarité est moins élevé, surtout chez les filles. Elles sont dans la

plupart de victimes de grossesses et de mariages précoces. La plus grande partie de la population est

sans travail et pour subvenir aux besoins la majorité de personnes, surtout les femmes, ont des

petites activités de vente du pain, des arachides, des médicaments dans le secteur informel. La

jeunesse, qui y forme une grande partie de la population une jeunesse qui est presque sacrifiée à

cause de la pauvreté des parents qui ont démissionné face à l’éducation des enfants. Elle se lance à

la délinquance juvénile.

L’implantation de l’université à N’Djili est une première dans l’histoire du district de

Tshangu. Comme le montre l’extrait de l’entretien cité plus haut avec un chef quartier « Cette

initiative est un véritable soulagement pour la populations de ces coins, condamnées autrefois à

parcourir des longues distances à la recherche d’un institut supérieur de qualité. Il a redoré l’image

de ce milieu, autrefois mal réputé. La plupart de ses étudiants viennent d’ici. Et donc, l’initiative de

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cet Asiatique, le promoteur de l’Urkim, est à encourager. Car, elle vient redonner de l’espoir et tirer

de la boue la jeunesse maintenant avec des ambitions de prendre en mains le devenir du pays.

Un vue du quartier où est implanté l’URKIM

En effet, suivant les entretiens avec le secrétaire académique, la majorité d’étudiant

habitent non loin du quartier. Ils viennent des familles pauvres. La proximité des institutions Kim leur

a donné la possibilité d’étudier en économisant sur les frais de transports. C’est pour cela qu’il s’agit

d’une Université de proximité. En outre, cela a été à des différentes reprises souligné dans les

entretiens cités, la possibilité de payer à tempérament les frais académiques facilite la participation

aux enseignements.

L’URKIM se profile comme une école d’excellence. Son slogan est « produire une élite

formée à l’image du Christ dans le but de servir la communauté dans le respect des valeurs

fondamentales dont l’égalité, la justice, la liberté et le respect de la personnalité humaine dans

l’égalité». Dans la formation, l’accent est mis sur l’analyse du marché de l’emploi. Les responsables

mettent l’accent sur la révolution de la modernité au Congo par l’éducation. C’est pour cela que

dans la formation, l’URKIM concilie le savoir, le savoir-faire et le savoir-être, comme souligné dans

les entretiens, pour participer à « l’envol du Congo vers la modernité ».

En outre, les valeurs morales forment. Suivant l’entretien avec le secrétaire académique,

afin de sauvegarder les valeurs, dans le processus de recrutement, on tient à ne pas engager les

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enseignants qu’on ne connait pas. Mais à avoir des contacts fréquent pour se rassurer de leur

conduite, il y a des entretiens et des échanges où sont donné aux enseignements la philosophie de

l’œuvre Kim.

L’accent est mis sur la ponctualité, sur la gestion du temps, la propreté aux tenues car

l’enseignant est aussi un éducateur. Il doit transmettre des valeurs morales, pas seulement

dispenser le cours ou l’enseignement. Il y a un acte d’engagement que tout enseignant est obligé de

suivre. Les syllabus sont par exemple déposés au secrétariat de l’Université et c’est l’Université qui

en fait le marketing. Les TP et les interrogations ne sont pas vendus. En outre l’université est

sérieuse dans ses engagements. Les professeurs sont payés à la date précise. Ils peuvent aussi, en

cas de besoin demander un emprunt soit leurs problèmes sociaux sont pris en charge par

l’Université.

Le bâtiment de l’URKIM dans la commune de N’djili à Kinshasa

5. Une solidarité de la Corée du Sud au développement du Congo ?

Les connections sud-sud, entre l’Afrique et les autres régions connus aujourd’hui sous le terme les

global sud ont existé depuis des centenaires. Et en particulier les contacts entre le Congo et la Chine

ont existé depuis Bandoeng et se sont intensifié avec la visite de Mobutu Sese Seko en chine.

L’influence de la Chine au Congo est symbolisée par le palais du peuple congolais, construit par les

chinois dans les années septante. Mais c’est depuis la fin de la guerre froide, qu’il y a la

multiplication des contacts aussi avec des autres partenaires et qui entraine une dynamique très

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complexe au sein de la population congolaise. Transformant le cadre de référence, démocratisant les

choix des défavorisés à l’accès aux objets jusque-là réservés à l’élite.

Les présentés ci-dessous, de la facilitation de l’accès à l’enseignement aux classes

défavorisées illustre ce champ d’interaction très large qui doit encore être explorée. Il montre les

changements et les défis de la modification du monde dans certains secteurs que nous ignorons

encore.

La collaboration entre l’Afrique et les forces émergeantes présente un marché large pas

seulement de l’exploitation des minerais en Afrique. Mais probablement que leurs activités

apportent des opportunités dans le continent, renforçant ou équilibrant la position des populations

en redistribuant le savoir comme dans les cas présentés. C’est comme si ces forces créaient aussi des

opportunités objectives pour la coparticipation des personnes défavorisées à l’exercice d’une

influence par l’acquisition d’un savoir dont elles étaient démunies. Cette approche de la

mondialisation est relativement nouvelle.

La salle d’informatique