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PASSERELLES Travailler ensemble dans les humanités numériques Laura Piccolo

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PASSERELLES

Travailler ensemble dans les humanités numériques

Laura Piccolo

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Sommaire

Humanités numériques et design 12

1 — Que sont les humanités numériques ? 13 Définition 13 En France - formations et sessions THATCamp 14

2 — Quels acteurs dans les humanités numériques ? 20 Un triangle collaboratif 20 La place du design 23

Les problèmes engendrés par la collaboration 32

1 — Différences fondamentales 33 Quelles sont-elles ? 33 Situations de friction 34

2 — Perception de l’autre 40 Déformation 40 Situations de friction 44

3 — Monde universitaire 45 Vie académique 45 Logiques économiques 46 Ce que l’on peut tirer des sciences dures 48

Introduction 7

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Quelles solutions ? 54

1 — Les solutions à long terme 55 L’expérience par imprégnation 55 Double cursus 57 Gestion du temps et de l’espace 61

2 — Les outils 62 Langage : le lexique 62 Format : le carnet 67 Organisation spatiale et temporelle 71 Dénominateur commun 72

3 — L’impact du design au moment précis de la collaboration 75 Le design non plus comme discipline … 75 … mais comme “ in-discipline ” 75 … mais comme méthode critique 77 Le design comme ensemble de pratiques, avec ses outils et ses spécificités 78 La pensée visuelle chez le designer : un outil de communication 78 La pensée visuelle chez les autres acteurs : échapper aux rapports de force 78 Les datascapes du MediaLab 80

Conclusion  87

Bibliographie  89

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. Introduction

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7 introduction

En 2017, mon projet de DNAT nommé Book Link était une plate- forme en ligne permettant à ses usagers d’accéder à l’ensemble des documents disponibles sur des librairies en lignes (telles que Google Books, archive.org, ou Gallica), puis de créer des liens entre les passages d’un document A et d’un document B. Pour la démonstration, j’avais dans un premier temps élaboré deux corpus, au sein desquels j’avais moi-même tissé les liens qui me parais-saient pertinents. Puis dans un second temps, il me sembla intéressant, afin de mieux contextualiser mon outil, de travailler avec quelqu’un qui ait récemment publié ses recherches.

Chercheur en astrophysique, William Béthune venait alors tout juste de soutenir sa thèse et accepta de collaborer avec moi. Je lui demandai donc si les conclusions de sa thèse permettaient de réfuter certaines publications qui lui étaient antérieures. Comme c’était le cas, il m’envoya un corpus comprenant sa thèse ainsi que quatre autres textes, dont il avait au préalable sélectionné certains extraits, en lien avec des passages de sa thèse qui les réfutaient.

À partir de ce moment-ci, trois groupes de personnes se distinguaient au sein de mon projet : • William Béthune, chercheur en sciences dures, qui allait bénéficier de mon outil (en terme de visibilité sur le web par exemple) ; mais qui allait à la fois évaluer, par son apport, la nécessité et la pertinence de celui-ci. • Moi-même, qui avais fait le design et programmé la plateforme. • Et le jury, composé de trois designers, et ni eux ni moi ne nous y connaissions en astrophysique. Il allait donc falloir mettre en place des dispositifs pour permettre un dialogue entre les différents groupes.

La première étape consista à demander à William Béthune de m’ex- pliquer en quelques lignes et dans des termes accessibles de quoi traitait sa thèse (dont le titre était Dynamique à grande échelle des disques protoplanétaires). Il aurait été inimaginable pour William et moi de travailler ensemble sans ses explications : des questions de lexique se posaient alors. La deuxième étape fût d’expliquer le corpus de l’astro-physicien au jury, et je produis à cette fin de grandes cartes mentales qui avaient pour but de permettre au jury de saisir rapidement les liens entre les documents, sans avoir besoin de tout lire, grâce à un système visuel de surlignage et de couleurs [voir page suivante]. Finalement, je me retrouvais à faire les liens entre les différents groupes. Évidemment, cela se justifiait en l’occurence par le fait que le projet central était le mien — et que c’était logique, comme je l’avais construit, de le défendre.

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John F. Hawley, Charles F. Gammie, and Steven A. BalbusLocal three-dimensional magnetohydrdynamic simulations of accretion1994

M. Flock, N. Dzyurkevich, H. Klahr, N.J. Turner, and Th. HenningTurbulence and steady flows in three-dimensional global stratified magnetohydrodynamic simulations of accretion disks2011

S. Fromang, W. Lyra, and F. MassetMeridional circulation in turbulent protoplanetary disks2010

Steven A. Balbus and John F. HawleyA powerful local shear instability in weakly magnetized disks1991

William BéthuneDynamique à grande échelle des disques protoplanétaires2017

Les disques protoplanétaires

Les disques protoplanétaires sont-ils turbulents sous l’action de l’instabilité magnétorotationnelle (MRI) ?

Our present work shows that the meridional outflow at the midplane is only present in HD simulations, e.g., in viscous simulations with an x value assumed to be onstant in time and space. For our MHD models, we find time variations of orbital frequency of around 50 local orbits, which are not present in the viscous disk models and which prevent a steady radial outflow. A similar result, the absence of a meridional flow in global MHD simulations, was recently found by Fromang and al. (2011).

Large-scale meridional circulation has been predicted in protoplane-tary disks based on 2D viscous disk theory. However, the flow in a protoplanetary disk is known to be turbulent, most likely because of the MRI. The question raised in this paper is thus simple : does meridional circulation exist in turbulent protoplaneratry disks ? This problem has been addressed using a set of numerical simulations of turbulent protoplanetary disks. The large-scale radial flow of the gas was computed by averaging the results in the azimuthal direction, as well as on lon time intervals. The results found to disagree with 2D viscous disk theory. There is no sign of any meridional circulation in the disk.

S. Fromang, W. Lyra, and F. Masset, Meridional circulation in turbulent protoplanetary disks - 2010

M. Flock, N. Dzyurkevich, H. Klahr, N.J. Turner, and Th. Henning, Turbulence and steady flows in three-dimensional global stratified

magnetohydrodynamic simulations of accretion disks - 2011

En résumé, le champs toroïdal By est principalement contrôlé par les instabilités MHD au sein du disque.

En l’absence de turbulence, certaines de nos simulations exhibent des circulations méridionales.

[...]

William Béthune, Dynamique à grande échelle des disques protoplanétaires - 2017

Sous l’influence de la MRI, les disques protoplanétaires peuvent-ils exhiber de circulation méridionale ?

John F. Hawley, Charles F. Gammie, and Steven A. Balbus, Local three-dimensional magnetohydrdynamic simulations of accretion - 1994

The most important consequence of the instability is that the mechanism behind a generic means of transport in accretion disks has been elucidated.

Steven A. Balbus and John F. Hawley, A powerful local shear instability in weakly magnetized disks - 1991

Our primary aim has been to move beyond the linear analysis and to investigate the 3D dynamics of the fully nonlinear state, for here the disk’s behavior could be quite different from that seen in 2D. […] Beyond the breakup of the channel solution the flow saturates in a nonlinear, nonisotropic turbulent state.

William Béthune, Dynamique à grande échelle des disques protoplanétaires - 2017

Figure vi.11 confirme que des écoulements zonaux se sont formés dans une simulation 3D, à partir d’un état initialement turbulent, et persistants sur plusieurs centaines d’orbites internes. Cette carte est représentative de l’ensemble des simulations en MHD Hall avec L 1 : plusieurs bandes de largeur h peuvent être formées, elles accumulent tout le flux magnétique positif, et l’écoulement reste apparemment turbulent entre les bandes.

Figure vi.11. – Distribution instantanée du flux magnétique vertical Bz dans le run ‘B3L6’ après t = 300T0 d’intégration.

[...]

Ces éléments indiquent que l’écoulement n’est pas turbulent à proprement parler.

Planche explicative du corpus autour de Dynamique à grande échelle des disques protoplanétaires de William Béthune, pour mon oral de DNAT (2017).

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John F. Hawley, Charles F. Gammie, and Steven A. BalbusLocal three-dimensional magnetohydrdynamic simulations of accretion1994

M. Flock, N. Dzyurkevich, H. Klahr, N.J. Turner, and Th. HenningTurbulence and steady flows in three-dimensional global stratified magnetohydrodynamic simulations of accretion disks2011

S. Fromang, W. Lyra, and F. MassetMeridional circulation in turbulent protoplanetary disks2010

Steven A. Balbus and John F. HawleyA powerful local shear instability in weakly magnetized disks1991

William BéthuneDynamique à grande échelle des disques protoplanétaires2017

Les disques protoplanétaires

Les disques protoplanétaires sont-ils turbulents sous l’action de l’instabilité magnétorotationnelle (MRI) ?

Our present work shows that the meridional outflow at the midplane is only present in HD simulations, e.g., in viscous simulations with an x value assumed to be onstant in time and space. For our MHD models, we find time variations of orbital frequency of around 50 local orbits, which are not present in the viscous disk models and which prevent a steady radial outflow. A similar result, the absence of a meridional flow in global MHD simulations, was recently found by Fromang and al. (2011).

Large-scale meridional circulation has been predicted in protoplane-tary disks based on 2D viscous disk theory. However, the flow in a protoplanetary disk is known to be turbulent, most likely because of the MRI. The question raised in this paper is thus simple : does meridional circulation exist in turbulent protoplaneratry disks ? This problem has been addressed using a set of numerical simulations of turbulent protoplanetary disks. The large-scale radial flow of the gas was computed by averaging the results in the azimuthal direction, as well as on lon time intervals. The results found to disagree with 2D viscous disk theory. There is no sign of any meridional circulation in the disk.

S. Fromang, W. Lyra, and F. Masset, Meridional circulation in turbulent protoplanetary disks - 2010

M. Flock, N. Dzyurkevich, H. Klahr, N.J. Turner, and Th. Henning, Turbulence and steady flows in three-dimensional global stratified

magnetohydrodynamic simulations of accretion disks - 2011

En résumé, le champs toroïdal By est principalement contrôlé par les instabilités MHD au sein du disque.

En l’absence de turbulence, certaines de nos simulations exhibent des circulations méridionales.

[...]

William Béthune, Dynamique à grande échelle des disques protoplanétaires - 2017

Sous l’influence de la MRI, les disques protoplanétaires peuvent-ils exhiber de circulation méridionale ?

John F. Hawley, Charles F. Gammie, and Steven A. Balbus, Local three-dimensional magnetohydrdynamic simulations of accretion - 1994

The most important consequence of the instability is that the mechanism behind a generic means of transport in accretion disks has been elucidated.

Steven A. Balbus and John F. Hawley, A powerful local shear instability in weakly magnetized disks - 1991

Our primary aim has been to move beyond the linear analysis and to investigate the 3D dynamics of the fully nonlinear state, for here the disk’s behavior could be quite different from that seen in 2D. […] Beyond the breakup of the channel solution the flow saturates in a nonlinear, nonisotropic turbulent state.

William Béthune, Dynamique à grande échelle des disques protoplanétaires - 2017

Figure vi.11 confirme que des écoulements zonaux se sont formés dans une simulation 3D, à partir d’un état initialement turbulent, et persistants sur plusieurs centaines d’orbites internes. Cette carte est représentative de l’ensemble des simulations en MHD Hall avec L 1 : plusieurs bandes de largeur h peuvent être formées, elles accumulent tout le flux magnétique positif, et l’écoulement reste apparemment turbulent entre les bandes.

Figure vi.11. – Distribution instantanée du flux magnétique vertical Bz dans le run ‘B3L6’ après t = 300T0 d’intégration.

[...]

Ces éléments indiquent que l’écoulement n’est pas turbulent à proprement parler.

Planche explicative du corpus autour de Dynamique à grande échelle des disques protoplanétaires de William Béthune, pour mon oral de DNAT (2017).

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Mais était-ce vraiment la seule raison ? Une personne ne pratiquant pas le design l’aurait-elle fait de la même façon ?

De cette expérience découlèrent deux interrogations : Comment travailler ensemble lorsqu’on ne provient pas des mêmes champs de pratiquse ? Dans ce type de situation, le design pourrait-il occuper une place particulière ? En me penchant un peu plus sur le sujet, j’ai rapidement repéré que le contexte des humanités numériques était un terrain particulièrement fertile pour étudier ces questions. D’une part car le croisement constant qu’il implique entre les différents champs de pratiques soulève un certain nombre de questions quant au travail collaboratif inter-disciplinaire. Et d’autre part car la question du design est arrivée il y a peu dans ce domaine, et son rôle au sein des humanités numériques, même s’il a fait l’objet de nombreux écrits, reste en partie à analyser. C’est pourquoi j’ai décidé de laisser de côté le terrain des sciences dures pour me consacrer exclusivement aux humanités numériques. La première partie de mon mémoire consistera à définir le contexte précis de mes recherches : ce que sont les humanités numériques, et plus précisement en France, et quelle place y occupe — et pourrait y occuper — le design.

Au fil de mes recherches, de nouvelles questions ont émergé. Tout d’abord, quelles sont, dans le cadres de humanités numériques, les difficultés qu’engendre la collaboration entre les différents champs de pratiques ? Elles semblaient être nombreuses, mais en raison de la faible documentation sur le sujet, il m’était difficile de l’affirmer. Mon travail de recherche a donc nécessité d’aller à la rencontre d’acteurs des humanités numériques : des designers, mais aussi des chercheurs en sciences humaines et sociales, et des ingénieurs en programmation.

Les entretiens se succédant, j’ai commencé à saisir les problèmes aux-quels sont confrontées toutes ces personnes, problèmes qui seront abordés en deuxième partie. Ensuite, s’est amorcée la seconde phase de mon travail, qui avait pour objectif de savoir s’il existe des façons de surmonter ou d’atténuer ces problèmes — et si tel est le cas, en quoi consistent-elles. Le résultat de ces recherchent représente la troisième partie de ce mémoire. Dans cette dernière partie, figurent également des réflexions sur l’interrogation énoncée plus tôt concernant l’impact du design plus spécifiquement dans le processus collaboratif, et la place qu’il y tient.

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INTRODUCTIO

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INTRODUCTIO

N

humanités numériques et design

1 Clavert, Frédéric, « 2DH - Design & Digital Humanities : le design comme méthode pour les humanités numériques ? », Proposition d’atelier pour THATCamp Paris 2015 (9-11 juin), [En ligne] 26 mai 2015. URL : https://tcp.hypotheses.org/849/. consulté le 31 mai 2018.

2 Source : https://www.conseil-national-des-universites.fr.

3 Berra, Aurélien « Faire des humanités numériques » dans Read-write book 2 : une introduction aux humanités numériques / textes réunis par Pierre Mounier, Marseille, OpenEdition Press, coll. Read/write book, 2012, p.25-43.

1  — Que sont les humanités numériques Définition

Commençons par définir ce que sont les humanités numériques. À noter que la mouvance et l’amplitude de ce champ de recherche sont à l’image de la multiplicité de ses formes et de ses définitions. J’ai choisi ici celles qui seraient les plus parlantes dans le cadre de ce mémoire.

Les humanités numériques sont définies par Frédéric Clavert (docteur en histoire contemporaine et chercheur au LabEx), comme « un champ interdisciplinaire qui traite du rôle des technologies infor-matiques et des cultures numériques dans la production (recherche), la publication (édition, “ éditorialisation ”, etc.) et l’enseignement (formation, médiation, etc.) du savoir et de la culture ». Le terme interdisciplinaire utilisé ici implique le croisement des champs de pratiques suivants : les sciences humaines et sociales (SHS), l’ingénierie informatique et le design (que nous n’incluerons pas au sein des SHS dans ce mémoire, même si la question fait régulièrement débat — en effet le design n’apparaît pas, à l’heure actuelle, parmi les disciplines du Conseil National des Universités, ni en Lettres et sciences humaines ni ailleurs).

Dans la continuité de cette idée, Aurélien Berra (enseignant-chercheur en littérature grecque antique) cite « Mark Sample [chercheur en litté-rature contemporaine], pour qui “ The digital humanities is not about building, it’s about sharing. ” Il s’agit donc de partage, c’est-à-dire d’échanges, de réflexion méthodologique collective et de mise en commun : ni de la théorie pure, ni de la pratique pure, mais un dialogue au sujet de nos représentations du savoir ». Aurélien Berra souligne les notions de partage et de mise en commun, qui témoignent de l’importance cruciale de la collaboration dans les humanités numériques. Ce dernier aspect constituera un des points de départ de mes questionnements.

Dans ce mémoire, nous entendrons le terme collaboration dans son sens juridique, et dénué de toute connotation péjorative liée à l’Histoire :

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4 L.113-2 al.1er du Code de la propriété intellectuelle. Source : http://www.legifrance.gouv.fr.

5 Disponible en ligne : http://www.corpusthomisticum.org/.

6 Source : https://tcp.hypotheses.org.

7 DaCos, Marin, « Manifeste des Digital humanities », THATCamp Paris 2010, [En Ligne], 26 Mars 2011. URL : https://tcp.hypotheses.org/318/. consulté le 31 mai 2018.

« Est dite de collaboration l’oeuvre à la création de laquelle ont concouru plusieurs personnes physiques ». Mais avant de s’y attarder, il est nécessaire d’observer plus précisément la situation des humanités numériques en France.

En France — formations et sessions THATCamp

La question des humanités numériques fait son apparition dès 1949 aux États-Unis, avec le travail de Roberto Busa (prêtre jésuite italien et théologien thomiste), associé au patron de l’International Business Machines Corporation (IBM) : la mise en place de l’Index Thomisticus , une informatisation des œuvres de Thomas d’Aquin grâce à un système de fiches perforées. S’en suivit le traîtement éléctronique de données dans les années 1950 ; puis une progression de ce traitement et l’arrivée de la question de la publication numérique au début des an- nées 1990, avec l’apparition du Web. La France n’a explicitement pris part aux humanités numériques qu’en 2010, lors du THATCamp Paris.

Les THATCamp sont des “ non-conférences ” dont le principe a été initié aux États-Unis, en 2008. « Au contraire des colloques habituels, THATCamp met l’accent sur les discussions informelles, et non sur les conférences canoniques, sur la collaboration et non l’individualisme, sur une approche pragmatique et non sur les approches théoriques ». Les THATCamp France, au nombre de cinq depuis 2010, sont un bon exemple de rassemblement de la communauté française des humanités numériques.

En 2010, à l’occasion du premier rassemblement, fut rédigé le Manifeste des Digital Humanities . Ce texte témoigne d’une volonté des acteurs français — environ quatre-vingts personnes à l’époque, appartenant pour la quasi-totalité aux SHS ou aux sciences de l’infor- matique — de prendre part aux humanités numériques, et de mettre en place les outils et les méthodes qu’elles impliquent et nécessitent. Neuf ans plus tard, la France reste peu avancée dans cette ambition comparée aux autres pays concernés (États-Unis, Royaume-Uni, etc.). Toutefois, certaines initiatives ont vu le jour.

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15 humanités numériques et design

8 Le datasprint est un hackaton (événement où des développeurs se réunissent pour faire de la programmation informatique collaborative, sur plusieurs jours) porté sur les données [source : https://tcp.hypotheses.org/878].

9 « Manifeste des Digital humanities », op. cit.

À THATCamp Paris 2015 — dernier rassemblement à Paris à ce jour — un datasprint a été organisé, autour des données liées aux THATCamp anglophones et francophones. L’idée de départ était de proposer une extraction et une analyse du contenu de la base MySQL du site thatcamp.org, dans le but d’en extraire les thèmes les plus abordés, les acteurs principaux, les villes etc., afin d’esquisser une vue d’ensemble des humanités numériques en France. Ce site web est une plateforme réunissant des informations sur les THATCamp du monde entier : chaque rassemblement y est annoncé par ses organisateurs. Cette plateforme dispose d’une entrée par session, par activité (à la manière d’un fil d’actualité) et par membre, ainsi que d’une partie forum. Ce site constitue un noyau à partir duquel il est possible d’accéder à la quasi-totalité des données des THATCamp : soit par la redirection vers des sites web spécifiques à chaque évènement, soit par l’analyse de l’activité des membres qui y sont enregistrés (participation aux différents camps, amis [friends], activités etc.).

Une compilation des données d’inscription des six THATCamp fran- cophones par Martin Grandjean (enseignant-chercheur en histoire contemporaine) a permis de générer des graphes [voir page suivante] qui représentent le réseau des participants français. Le second graphique, tout particulièrement, met en évidence la présence d’une grande com- munauté des humanités numériques sur Paris (282 participants sur l’ensemble des trois THATCamp Paris, pour 500 participants en tout).

Parallèlement, il existe désormais des formations identifiées en “ humanités numériques ” en France, qui incarnent la mise en appli-cation du souhait du Manifeste d’une « intégration de formations aux digital humanities au sein des cursus en Sciences humaines et sociales, en Arts et en Lettres, [de] la création de diplômes spécifiques aux digital humanities et [du] développement de formations professionnelles dédiées ». À ce jour, deux voies se distinguent.

D’une part, certains cours se sont développés dans des cursus déjà existants. Il s’agit la plupart du temps de cours d’informatique appliquée aux traitement de données, dont le contenu est quasiment commun à

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Graphes réalisés lors du datasprint de THATCamp Paris 2015.Extraits de GRANDJEAN Martin, « Analyse de réseau : THATCamp et communauté des humanités numériques francophones », [En ligne], juin 2015.URL : http://www.martingrandjean.ch/analyse-de-reseau-thatcamp-et-communaute-des-humanites-numeriques-francophones

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17 humanités numériques et design

10 Descriptif du « Master spécialisé Digital Humanities de Sciences Po Paris ». Source : https://www.sciencespo.fr/executive-education/executive-master-digital-humanities.

11 Berra, Aurélien et CLAVAUD, Florence « Formations et humanités numériques » dans THATCamp Paris 2012: Non-actes de la non-conférence des humanités numériques, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 1 oct. 2012, p.43.

12 Doduik, Nicolas, « Les humanités numériques, une révolution ? », [En Ligne], 13 Avril 2017. URL : https://doctlames.hypotheses.org/77/. consulté le 31 mai 2018.

13 Entretien avec Thomas Lebarbé (enseignant en humanités numériques à l’UGA), octobre 2018.

toutes les filières. L’une de ces formations de Master à Sciences Po Paris présente ainsi son projet pédagogique :

« Apport de connaissances qui permettent de comprendre les défis et les enjeux liés au monde numérique, d’analyser les transformations dans différents domaines de nos vies sociales (études, famille, travail, santé, etc.), dans nos vies privées, comme dans les espaces publics réels et virtuels ; approche sociologique, historique, économique, etc. ». L’objet commun qu’est le numérique — et plus explicitement l’outil informatique — fait ici seul le lien entre les différentes filières. Aurélien Berra et Florence Clavaud (responsable de projets numériques aux archives nationales) évoquent alors le risque de « vernis numérique».

En effet, dès 2012, il parait évident qu’ « il y a […] des différences d’approches parfois irréconciliables entre différentes disciplines. La sociologie n’a pas forcément les mêmes besoins d’outils numériques que le droit. Chercher un consensus de toutes les disciplines sur le numérique peut conduire à ne finalement tisser aucun lien avec les socles théoriques de chacune des traditions disciplinaires ».

Depuis, dans certaines universités, des professeurs enseignent l’informatique, non plus dans les SHS en général, mais dans des domaines spécifiques tels que la littérature à l’Université Grenoble-Alpes (UGA) ou encore l’art et l’esthétique à Rennes 2. L’objectif est de « donner aux étudiants suffisamment de littératie numérique — soit la capacité de lire et d’écrire, dans le domaine numérique, en fonction de leurs besoins personnels et professionnels » ; mais aussi de donner goût à l'informatique aux étudiants en SHS. Les formations dispensées sont ainsi plus adaptées à chaque discipline.

Il existe d’autre part des formations spécifiques [voir page suivante]. Elles sont au nombre de vingt-deux, sous différents formats : Licences (2), Masters (9) ou encore formations hors cursus (3). On citera notamment le Master “ Technologies numériques appliquées à l’Histoire ”, de l’École des Chartes, le Master “ Humanités Numériques ” à Rennes 2 ou encore le Master “ Architecture de l’information ” de l’ENS Lyon qui comporte une spécialité “ humanités numériques ”. Le plus souvent, dans les masters, l’enseignement se matérialise par des cours sur

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14 Ferrante, Éric, Amadieu, Frank, «Les “ Digital Humanities ” dans l’enseignement : diversité des approches», conférence lors de la journée « Les Digital Humanities : Un renouvellement des questionnements et des pratiques en SHS-ALL ? » à l’Université Toulouse 2 – Le Mirail, le 28 mai 2013, [En ligne], https://www.canal-u.tv/video/ universite_toulouse_ii_le_mirail/les_digital_humanities_dans_l_enseignement_ diversite_des_approches_eric_ferrante_franck_amadieu.12990.

15 Source : https://sites-formations.univ-rennes2.fr/master-humanitesnumeriques/ (site officiel de l’université Rennes 2).

16 Source : http://www.chartes.psl.eu/fr/cursus/master-humanitesnumeriques/ (site officiel de l’École Nationale des Chartres).

les humanités numériques, combinés à une spécialisation choisie par les étudiants par proximité avec leur discipline d’origine.

Malheureusement, ce type de formation reste assez peu présent dans les universités françaises. En 2013, à l’occasion d’une conférence sur « Les Digital Humanities dans l’enseignement », Éric Ferrante, coordinateur de l’Atelier de Développement Internet et Multimédia (ADIM) de l’Université de Toulouse, explique que le développement des humanités numériques et leur enseignement dans le supérieur sont le reflet direct de la conception que ses acteurs ont du numérique. Il y a un retard des universités dans la considération du numérique et du bénéfice que le traitement de données peut apporter aux recherches en sciences humaines et sociales.

Si l’on prend l’exemple du master “ Humanités Numériques ” de Rennes 2, on voit dans les cours proposés que « les semestres sont construits autour de trois blocs fondamentaux, les enseignements étant progressifs à l’intérieur de chaque bloc ». Tout d’abord, un bloc Théorie et épistémologie s’intéresse aux fondamentaux des humanités numériques. Puis un bloc Notions et pratiques vise à la maîtrise du concept de “ document numérique ” et à l’apprentissage des techniques et outils pour le traitement informatique et l’exploitation des données. Enfin une partie Connaissances disciplinaires et académiques aborde les fondamentaux de la discipline de SHS choisie par chaque étudiant.

Le master “ Humanités Numériques et computationnelles ” de l’École Nationale des Chartes qui a pour objet de « donner [aux étudiants] à la fois les compétences dans leurs disciplines et en méthodes numé- riques pour leur permettre de mener leurs recherches de manière autonome », présente un programme sensiblement similaire. On y retrouve une partie théorique, une partie pratique et une que l’on pourrait appeler disciplinaire, qui correspond à la poursuite de la discipline de licence .

Dans ces deux exemples, un va-et-vient constant s’établit à la fois entre théorie et pratique, et entre sciences humaines et sociales et informatique ; des aspects essentiels des humanités numériques, négligés dans le cas du simple apport de cours d’informatique énoncé plus haut.

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Digital Humanities Course Registry

Cartes et liste des formations en humanités numériques en France et en Europe.URL : https://registries.clarin-dariah.eu/courses/

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Ce type de master semble donc remplir les attentes de cursus des humanités numériques aujourd’hui, que ce soit en terme de théorie, de pratique, ou de méthode ; sans que ne soit (du tout) évoquées les questions de design. Pourtant, le design est depuis quelques années enseigné dans certaines universités (format Licence ou Master), et présente de plus en plus, entre autres dans ce cadre, un intérêt pour les humanités numériques.

Que nous indique son absence dans ces formations spécifiques sur la place accordée au design dans les humanités numériques ?

2  — Quels acteurs dans les humanités numériques ? Un triangle collaboratif

Les collaborations trandisciplinaires qui caractérisent les humanités numériques ont longtemps été limitées à un face à face entre chercheurs en sciences humaines et sociales (littérature, histoire, sociologie, etc.) et praticiens de l’informatique (programmeurs etc.). Pourtant, si l’on revient à la définition de Frédéric Clavert, les termes production, publication, édition, ou encore médiation correspondent tous à des pratiques dans lesquelles le design, notamment graphique et éditorial, trouve sa place. Si l’interêt de la contribution du design est évidente aux yeux des designers, elle reste aujourd’hui souvent oubliée ou négligée par les autres acteurs (chercheurs en SHS et développeurs). Comparons tout d’abord les comptes-rendus des THATCamp Paris de 2012 et 2015.

En 2012, sur quinze ateliers différents, seul le dernier évoque la question du design — Rôle et enjeux du design graphique, proposé par Nicolas Thély (professeur en art, esthétique et humanités numériques à Rennes 2), David-Olivier Lartigaud (enseignant-chercheur en théorie et pratique des nouveaux médias en art à l’ESADSE) et Gilles Rouffineau (enseignant-chercheur en design et archéologie des médias à l’ÉSAD•Valence).

En 2015, trois ateliers abordent le sujet, et on trouve parmi eux l’atelier 2DH — Design & Digital Humanities : le design comme méthode

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17 « 2DH - Design & Digital Humanities : le design comme méthode pour les humanités numériques ? », op. cit.

18 Masure, Anthony, Design et humanités numériques, Paris, B42, coll. Esthétique des données, 2017, p.32.

19 Masure, Anthony, « Vers des humanités numériques “ critiques ” », AOC, 5 juillet 2018, [En ligne], http://www.anthonymasure.com/articles/2018-07-vers-humanites-numeriques- critiques.

20 Traduction : « Données libres et Logiciels opensources : les chercheurs SHS partagent leur experience ».

pour les humanités numériques ?, proposé par Stéphane Vial (chercheur en design à Nîmes puis à Montréal) et Yves Rinato (directeur d’Intactile Design, agence de design et de communication) — compte-rendu dans lequel se trouve cette affirmation :

« L’activité de conception des plateformes digitales, chères aux humanités numériques […] doit être considérée par nature comme relevant d’un travail de design et, par conséquent, en intégrer la culture créative et la philosophie dès le commencement, dans l’esprit d’un “ design des programmes ” (Masure, 2014) qui doit permettre de développer et d’améliorer le design des plateformes ».

Aujourd’hui, si l’on aborde la question d’un point de vue théorique, le principe semble acté, et le design est très présent dans l’actualité des humanités numériques. De nombreux théoriciens tels que Stéphane Vial, Johanna Drucker (théoricienne de l’esthétique visuelle) ou encore Anthony Masure (enseignant-chercheur en design) ont identifié la question et pour eux, le rôle du designer semble évident et essentiel.

Dans son dernier ouvrage, Anthony Masure traite du lien entre design et humanités numériques, tout en l’inscrivant dans un contexte plus large. Selon lui, « les méthodes du design concernent tous les aspects des pratiques des humanités », et il va même plus loin en exprimant qu’elles pourraient « permettre, tout en facilitant l’accès aux productions de recherche […] d’en renouveler l’approche ».

À présent, si l’on observe la question d’un point de vue pratique, les choses restent moins avancées pour les designers. En juin 2018, j’ai eu l’occasion de participer à un THATCamp à Valence. Organisé par l’UGA (Université Grenoble-Alpes), et plus précisement par Géraldine Castel, enseignante-chercheuse en litté-rature anglaise, le THATCamp avait comme intitulé « Open data and Freeware : Resear-chers in the humanities and social sciences share their experience ». Nous étions une vingtaine de participants réunis pendant deux jours, j’étais la seule designer présente. Tous les autres apparte-naient soit au champ du traitement informatique des données soit aux sciences humaines et sociales.

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21 Carnet hypotheses de CAHIER : https://cahier.hypotheses.org.

L’information était parvenue tardivement à l’ÉSAD (quelques jours avant l’évènement), l’UGA n’ayant pas tout de suite pensé à prévenir notre école. D’autre part, le fait que je sois la seule élève présente soulève la question de l’intérêt porté aux humanités numériques par les personnes étudiant le design en école d’art .

Après avoir identifié la formation de l’UGA, j’ai pu discuter avec Thomas Lebarbé, enseignant-chercheur en humanités numériques, et ingénieur en informatique linguistique de formation. En parallèle de son activité d’enseignement, Thomas Lebarbé est président de CAHIER, un consortium interdisciplinaire de projets numériques. « Le Consortium CAHIER est constitué de projets de recherche dont la vocation est de travailler conjointement à l’essor, à la valorisation et à la co-construction des nouvelles pratiques numériques dans le domaine des sciences humaines et sociales. Leurs objets d’études principaux sont les corpus d’auteurs et plus généralement les corpus textuels constitués en référence à l’œuvre d’un auteur, d’une tradition éditoriale, d’une forme littéraire, d’un genre ».

Pendant une longue discussion, pour laquelle je le remercie ici, il me décrit son activité qui inclut notamment une collaboration récur-rente avec des ingénieurs (intégrés à son équipe de travail). Je lui demandai alors s’il avait déjà travaillé avec des designers. Il m’avoua que non et que malheureusement, même s’il était convaincu d’avance que j’allais probablement essayer de lui prouver le contraire, il ne voyait pas clairement ce que le design pourrait lui apporter.

Ces deux exemples montrent bien que la prise en compte de la place du design étant récente, elle engendre une mise en pratique très progressive, et on observe un clivage entre théorie et pratique. Cela traduit en réalité un problème plus global : le développement tardif de la culture du design en France. La production d’objets aux visuels pauvres, par des personnes n’étant pas designers, est communément acceptée. Ainsi, faire appel à un designer graphique est encore aujourd’hui souvent considéré comme secondaire, comme un luxe et cette situation a une incidence directe sur les éditions produites, notamment en humanités numériques.

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23 humanités numériques et design

22 DruCker, Johanna, BurdiCk, Anne, Lunenfeld, Peter, PRESNER, Todd, Schnapp, Jeffrey, Digital_Humanities, Cambridge / Londres (Royaume-Uni), mit Press, 2012, p.118.

23 COLLECTIF. « Rôle et enjeux du design graphique : Proposé par : Nicolas Thély, David-Olivier Lartigaud et Gilles Rouffineau » In : THATCamp Paris 2012 : Non-actes de la non-conférence des humanités numériques [en ligne]. Paris : Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2012 (généré le 13 décembre 2017). Disponible sur Internet : <http://books.openedition.org/editionsmsh/386>. ISBN : 9782735115273. DOI : 10.4000/books.editionsmsh.386.

Johanna Drucker déplore dans Graphesis la situation aux États-Unis, proche de celle en France : « le design amateur a miné [plagued] de nombreuses expérimentations en humanités numériques et a contribué à leur disparition prématurée ». Nous reviendrons sur cette question un peu plus loin.

La place du design

Si le designer est un acteur tout aussi important que les autres dans les humanités numériques, il est nécessaire d’identifier les différentes temporalités et modalités dans lesquelles son apport se révèle crucial. En 2012, le THATCamp Paris, évoquant l’importance « du dialogue entre les compétences [affirme que] dans le cas du design, cela se passe en dehors du temps identifié de la recherche ». Il me semble que d’autres modalités sont à imaginer aujourd’hui. Pour préciser cette question temporelle, nous pouvons globalement distinguer trois moments d’intervention du design lorsqu’il opère avec d’autres disciplines. (Suivront des exemples illustrant les différentes situations.)

Prévisualisation — préparation graphique des données En amont du travail du chercheur : c’est-à-dire par la création ou le conseil d’outils et de méthodes qui permettront ensuite une optimisation du travail de la recherche. Le designer propose un projet (d’interface par exemple) qui peut potentiellement évoluer par la suite, en s’appuyant par exemple sur des méthodologies éprouvées du design : – organisation du lisible (nous penserons notamment aux travaux de Jan Tschichold ou de Béatrice Warde) – tri et rationalisation visuelle (Jacques Bertin, Edward Tufte) – data-mining (Ben Fry)

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24 GanGloff-ZieGler, Christine, « Les freins au travail collectif », Marché et organisations, n°10, Mars 2009, pages 95-112, [En Ligne], Mars 2009. URL : https://www.cairn.info/revue-marche-et-organisations-2009-3-page-95.htm/, consulté le 31 mai 2018.

Co-élaboration Soit en même temps et avec le chercheur : c’est à dire que designers, informaticiens et chercheurs travaillent ensemble sur la production d’un même objet de recherche. Ainsi leurs approches et leurs méthodes de travail se conjuguent et ne s’excluent pas.

Publication — diffusion Enfin en aval : c’est-à-dire par la mise en forme et la diffusion de travaux effectués au préalable par les chercheurs.

À ce niveau, il faut distinguer les notions de collaboration et coopération. Pour Christine Gangloff-Ziegler (docteur en sciences de l’éducation) dans Les freins au travail collaboratif, « le travail coopératif se définit comme une forme d’organisation conjointe du travail où chacun des opérateurs est responsable pour sa part, parce qu’elle est identifiable, mesurable et prédéfinie […], alors que le travail collaboratif est une forme d’organisation solidaire du travail où chacun est responsable pour le tout, sans que la part individuelle puisse être systématiquement isolée, la coordination se faisant par ajustement mutuel ».

Les interventions préparatoires (prévisualisation — préparation et co-élaboration) relèvent plutôt de la collaboration, et les autres (publi-cation — diffusion) plus de la coopération. En voici deux exemples.

Thomas Lebarbé expliquait que ses seules occasions de produire un objet avec des designers furent les moments où il a fait appel à une agence de communication qui avait pour rôle de mettre en forme les projets selon une modalité qu’il qualifie de “ surcouche ”. Ainsi, l’idée est exclusivement de rendre les interfaces (produites en amont) plus “ sexy ” — selon la terminologie entendue — et plus accessibles aux utilisateurs. En l’interrogeant sur l’action précise des designers de cette agence, il me confirma qu’il ne s’était en aucun cas agi de faire des choix concernant les fonctions présentes ou les modalités d’utilisation, mais uniquement des choix de couleurs, de disposition, de formes et de typographie.

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25 humanités numériques et design

La plateforme évoquée n’est pas encore disponible en ligne, il m’est donc impossible d’y mesurer l’apport des designers.

Ici, le rôle du design se limite à l’habillage graphique d’un dispo-sitif déjà conçu au préalable — rôle communément assigné au design graphique, réduit à une plus value esthétique. Il s’agit d’une inter-vention en aval de la recherche et plutôt d’une coopération que d’une réelle collaboration. On pourrait y voir un rapport de subordination du chercheur sur le designer. La pratique de ce dernier se réduit à ce que l’on qualifie de service, et le terme n’est pas anodin.

À l’inverse, certains projets se construisent sur d’autres modèles collaboratifs, comme le VÉgA (Vocabulaire de l’Égyptien Ancien), un dictionnaire en ligne permettant de modéliser et représenter les connaissances évolutives en égyptien ancien (hiéroglyphes). Il consiste en une plateforme sur le web qui vient remplacer l’ancien Dictionnaire de Berlin, le Wörterbuch der Ägyptischen Sprache. Tous les égyptologues en possèdent un exemplaire (le plus souvent sous forme de pdf), mais il représente un vrai problème en terme d’actualisation du savoir.Ce dictionnaire édité par Adolf Erman et Hermann Grapow en 1897, comprend l’ancien égyptien, le moyen égyptien et le néo-égyptien, ainsi que les inscriptions hiéroglyphes de l’époque gréco-romaine d’Égypte. L’ouvrage a été mis à jour jusqu’en 1961. Le nombre de textes s’étant considérablement accru de 1961 à nos jours, la création d’un nouvel outil de référence était, de toute évidence, nécessaire. En réponse à ce besoin, le dictionnaire en ligne VÉgA permet à la fois d’aller chercher des signes (grâce à un moteur de recherche basé sur un système de lettres connu de la communauté des égyptologues) pour trouver leur signification, mais également aux chercheurs accrédités d’en modifier les notices afin de partager leurs propres découvertes.

En comparant les traductions et définitions pour un même signe (mȝʿ ) dans le Wörterbuch der Ägyptischen Sprache puis dans le VÉgA, la différence en terme de lisibilité est flagrante [voir deux pages suivantes].

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erman Adolf et Grapow Hermann, Wörterbuch der Ägyptischen Sprache, 1897 - 1961, Volume V, p.22, à propos du mot mȝʿ .Ouvrage disponible en ligne sur : https://archive.org/details/timlkane_yahoo_WbW

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erman Adolf et Grapow Hermann, Wörterbuch der Ägyptischen Sprache, 1897 - 1961, Volume V, p.22, à propos du mot mȝʿ .Ouvrage disponible en ligne sur : https://archive.org/details/timlkane_yahoo_WbW

Notice du mot mȝʿ  sur la plateforme VÉgA https://vega.arcanae.frImage extraite de la documentation sur l’outil : http://vega-vocabulaire-egyptien-ancien.fr

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25 Chauveau, Nicolas, « Le design numérique au service de la recherche en SHS : une étude de cas du projet VÉgA, Vocabulaire de l’Égyptien Ancien », Sciences du Design, n°2, Décembre 2015, pages 82-87, [En Ligne], Décembre 2015. URL : https://www.cairn.info/revue-sciences-du-design-2015-2-page-82.htm/. consulté le 31 mai 2018.

Sur la plateforme VÉgA, la notice principale contient les éléments suivants : un identifiant unique de l’entrée [label n°1], le mot translittéré (selon un système de graphies phonétiques propre aux égyptologues) [2], les graphies principales en hiéroglyphes de ce mot [3], et les traductions principales [4] (ici en français, mais il est possible de choisir la langue de traduction [8]). Nous noterons dans l’onglet [3] la multitude de graphies dites “ prin- cipales ” pour un seul et même mot, qui explique l’ampleur du diction-naire de Berlin (1,5 million de fiches de mots en tout), et qui pose question sur la façon d’effectuer une recherche sur la plateforme numérique. Sont proposés également des indicateurs contextuels : une frise chrono- logique des périodes d’attestations [5], un indicateur de validité de la notice [6] et un indicateur de l’avancée du travail sur le mot [7].

Cette notice principale s’accompagne également de trois onglets : l’onglet Catalogue des graphies regroupe les graphies les plus courantes et/ou les plus atypiques du mot. L’onglet Dictionnaires et lexiques regroupe toutes les attestations du mot dans les ouvrages de référence. Et enfin l’onglet Remarques regroupe des informations de plusieurs ordres selon les cas (classe grammaticale, sources etc.).

Cet outil représente une véritable révolution dans le milieu de l’égyptologie, en terme de pratiques, d’exhaustivité et d’actualité des connaissances. Il résulte d’un projet commun entre le LabEx Archimede de l’Université Paul-Valéry Montpellier 3 et Intactile Design (une agence de communication) et d’un vrai dialogue entre les chercheurs et les designers, tout au long de la création de l’objet. Ce dialogue a entre autres permis que se dessine au fur et à mesure un projet radicalement différent du projet initial. L’exemple des « égyptologues qui lors des séances de co-conception n’hésitaient pas à invalider les pistes valorisant l’outil davantage que le sujet » illustre particulièrement bien la notion d’échange.

Ce travail est le fruit d’une réelle collaboration dans laquelle les acteurs des différentes disciplines (archélogues/designers) travaillent ensemble et co-construisent un projet dans lequel leurs interventions dialoguent — impliquant un regard critique et des boucles d’ajustement par rétroaction.

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29 humanités numériques et design

26 Darnton, Robert, Apologie du livre: demain, aujourd'hui, hier, Paris, Gallimard, 2010.

27 Design et humanités numériques, op. cit., p.32.

28 « Vers des humanités numériques “ critiques ” » op. cit.

29 Ibid

L’intervention des designers est particulièrement visible et pertinente dans le classement des informations. La notice principale montre le mot dans son aspect le plus simple, et les autres onglets représentent chacun une nouvelle strate de complexité ou de contextualisation de l’information — strates qui évoquent, dans une moindre mesure, l'encyclopédie de Robert Darnton . Les quatre grandes strates retrouvées dans chaque notice sont ainsi adaptées aux différents usages et aux différents niveaux de connaissances recherchés par les utilisateurs.

On bascule dans un nouveau rapport qu’Anthony Masure formule par l’hypothèse suivante : « Le design n’est [plus] convoqué au nom d’un “ embellissement ” de contenus scientifiques qui seraient décidés sans lui mais [il] lui est demandé de prendre part aux pratiques de recherche, d’être pensé comme pratique de recherche ». Ce type de collaboration et de temporalité présente un mode de travail vertueux et bénéfique en de nombreux points pour les huma- nités numériques. La grande majorité des travaux qui m’intéressent s’y inscrivent et permettent de mesurer la solidité de ce type de démarche.

De façon moins pratique, revenons un instant sur les nombreux designers-chercheurs qui ont plaidé, à travers leurs écrits, la nécessité et la potentialité du design dans les humanités numériques. Bien au-delà de la simple mise en forme d’un savoir, ce champ de pratique engagerait un tournant dans les humanités numériques, leur permet- tant notamment d’échapper à « la captation des connaissances et [aux] determinismes technologiques » qui les menacent.

Anthony Masure suppose par exemple que « tout en facilitant l’accès aux productions de recherche [ — fonction du design graphique communément admise — il permettrait], d’en renouveler l’approche ».

Avant lui, Johanna Drucker développe ces mêmes idées dans son ouvrage Graphesis (2014) — mais aussi dès la rédaction de l’ouvrage collectif Digital_Humanities, en 2012 — en parlant plus spécifiquement de questions relatives à la data-visualisation. Pour elle, les expériences menées en sciences humaines et sociales, qui constituent le cœur des

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humanités numériques, sont toujours soumises à un certain degré de subjectivité, du fait de leurs conditions de production : collecte et interprétation par des humains ou évolution constante dans le temps (par exemple : changement du nombre d’habitants dans une ville). De la même façon que l'on réfléchit aux modes de captation des données, il est essentiel de se poser la question du design et de la data-visualisation dans le processus de construction des images qui en découlent. L'enjeu réside dans la conception de nouvelles façons d'explorer les masses de données étudiées dans les humanités numériques et d'en proposer des interprétations, grâce à des dispositifs graphiques, qui soient globalisés, mais qui laissent à la fois une part de liberté aux chercheurs.

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33 les problèmes engendrés par la collaboration

30 Journée d’étude Témoignage : Contributions du design à la production des savoirs, le 19 décembre 2013 à l’École Normale Supérieure de Lyon.

31 Boyd, Danah, Crawford Kate, « Six provocations à propos des big data » dans Read-write book 2 : une introduction aux humanités numériques / textes réunis par Pierre Mounier, Marseille, OpenEdition Press, coll. Read/write book, 2012, p.25-43.

32 « Vers des humanités numériques “ critiques ” », op. cit.

33 « Vers des humanités numériques “ critiques ” », op. cit.

Revenons à présent sur l’importance de la collaboration entre les différents champs de pratiques dans les humanités numériques. Si elle est capitale, elle n’est pas pour autant toujours évidente. La « nécessité d’élaborer des passerelles entre les langages des ingénieurs, chercheurs et designers » est aujourd’hui évoquée de façon récurrente, mais étonnement les études et témoignagnes sur ces questions précises restent assez peu nombreuses, et les méthodes et outils restent à identifier et/ou à mettre en place.

Quels sont les problèmes qui émergent lors de la collaboration entre les disciplines — chercheurs SHS, programmeurs et designers ? Quelles en sont les causes ?

1  — Différences fondamentales Quelles sont-elles ?

Si, dans les projets d’humanités numériques, travailler ensemble n’est pas toujours aisé, c’est bien parce qu’il y a un problème de fond : une différence fondamentale entre les univers. Chaque discipline possède ses propres pratiques avec tout ce qu’elles impliquent (cultures, approches, enjeux, temporalités, objectifs …).

En premier lieu, abordons les univers des ingénieurs et des chercheurs en SHS. Il s’agit de « deux cultures scientifiques, [mais elles sont très différentes. L’une est] mathématique, objective par nature, et l’autre littéraire — subjective forcément ». Anthony Masure distingue justement « les logiques de program-mation propres à l’informatique [qui] voisinent avec celles (par exemple) des historiens, qui peuvent eux-mêmes être amenés à intervenir sur l’architecture de l’information » ; et les « méthodes de ces différents champs, [qui potentiellement conduisent à] des frictions entre la rationalité des langages formels informatiques et l’incertitude propre aux (vieilles) humanités ».

Lors de ma participation aux THATCamp Valence, étant donné le nombre assez restreint de participants, j’ai eu la chance de pouvoir proposer un atelier proche des thématiques de mon mémoire, au

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34 Témoignage récolté lors du THATCamp Valence, juin 2018 [Traduit de l’anglais].

35 moholy-naGy, László, « Nouvelle méthode d’approche. Le design pour a vie » dans Peinture Photographie Film, Nîmes, Éditions Jacqueline Chambon, 1993, p.270.

cours duquel j’ai obtenu des témoignages de chercheurs et de program-meurs sur leurs expériences de collaboration. Parmi ces témoignages, l’organisatrice chercheuse Géraldine Castel, a témoigné de la différence de méthodes énoncées disciplinaires.

« Clairement, nous ne travaillons pas de la même manière. Globalement, en tant que chercheurs en SHS, nous prenons un ensemble de documents — non pas qu’on ne connaisse pas notre objectif, mais l’idée qu’on en a est assez vague. Puis, nous avançons petit à petit et au fil de l’étude des données, nous commençons à trier et à retirer des éléments, ce qui permet aux choses de se préciser. À l’opposé, les informaticiens, eux, ont besoin d’une consigne très claire dès le départ, et de savoir ce qu’ils cherchent. Ce sont donc deux manières très différentes de travailler ».

Cela dit, les programmeurs ne font pas, à ce moment-ci, de la recherche à proprement parler. La recherche en informatique existe (langages formels, algorithmique, systèmes embarqués, IA, etc.) mais il semble qu’elle soit rarement concernée dans les humanités numériques. On peut donc dire que les programmeurs contribuent, et font partie du processus de recherche, mais ils ne font pas de la recherche dans le domaine de l’informatique.

À cela, s’ajoute à son tour le design, qui diffère cette fois-ci non plus simplement dans ses méthodes, mais également dans sa logique.Le designer possède une pensée visuelle, souvent beaucoup moins présente chez les autres acteurs. Contrairement à celle des chercheurs et des ingénieurs, la pensée visuelle « ne procède pas seulement de la fonction, [mais] également des progrès de la technique et des arts ainsi que du contexte sociologique et économique d’une époque donnée » ; elle s’inscrit dans une pensée globale et sensible.

Le scientifique — peu importe la discipline, sciences humaines et sociales ou sciences de l’ingénieur — est invité à suivre des règles et des méthodologies pour crédibiliser son travail et l’inscrire dans des connaissances déjà acquises. Tandis que le designer, même s’il est tenu de mettre au point une méthode de travail, nécessaire pour des raisons

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35 les problèmes engendrés par la collaboration

36 druCker, Johanna, Graphesis : visual forms of knowledge production, Cambridge, Massachusetts : Harvard University Press, Éditions Jacqueline Chambon, coll. MetaLABprojects, 2014, p.24.

37 fournier, Thierry, « Muséographie et numérique: controverses et perspectives », dans COLLECTIF sous la direction de Gilles Rouffineau, Transmettre l’histoire : Contribution du design à la production des savoirs, Paris, ESAD Valence & B42, Octobre 2013.

collaboratives, sera guidé par une intuition qui lui est propre, et qui se traduit dans l’approche sensible qui caractérise ses réponses. Il travaille avec le langage verbal, mais aussi avec des signes et des images.

Selon Johanna Drucker, « contrairement au langage, qui dispose d’une grammaire, ou aux mathématiques, qui opèrent selon des proto-coles explicites, les images, elles, ne sont pas régies par des principes formés d’un ensemble limité de composants, combinés en accord avec des règles déterminées, invariables et stables ».

Le fait d’opposer l’état d’esprit rigoureux du scientifique à celui intui- tif et visuel du designer ne doit pas être perçu comme une approche réductrice du monde scientifique, et j’ai conscience que les questions de vérité et de règles à suivre sont en réalité plus complexes. Je fais référence notamment à des thématiques soulevées dans des ouvrages tels que De la vérité dans les sciences d’Aurélien Barrau ou La structure des révolutions scientifiques de Thomas Kuhn, qui montrent — même si les auteurs parlent principalement de sciences dures — que l’intuition et la transgression sont historiquement profitables au monde scientifique. De même, comme évoqué plus tôt, la pratique du design ne peut s’affranchir complètement de règles et de méthodes. Toujours est-il, ces différences fondamentales sont la source de nombreuses difficultés dans les collaborations. C’est pourtant précisément leur combinaison qui constitue toute la richesse des pratiques des humanités numériques, inhérente à l’idée d’un champ interdisciplinaire.

Situations de friction

Pour illustrer le type de problème que peuvent engendrer ces différences, nous verrons trois exemples.

Dans un article publié en 2013, Thierry Fournier, artiste et com-missaire d’exposition a retracé le processus de création de son projet Pariétale. Créé en 2010 pour Nestploria, Centre d’interprétation numérique des Grottes de Gargas (Hautes-Pyrénées), ce travail prend la forme d’une table interactive multitouch et multi-utilisateurs de grandes dimensions. Consacrée aux mains négatives préhistoriques (les hommes

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38 « Muséographie et numérique: controverses et perspectives », op. cit., p.106.

39 Ibid, p.108.

posaient leurs mains contre la paroi puis soufflaient de la poudre autour, à la manière d’un pochoir), cette table permet aux visiteurs de consulter collectivement ou individuellement seize empreintes et d’en explorer les caractéristiques historiques et techniques.

En fin de texte, Thierry Fournier propose un retour sur cette expérience de collaboration avec le musée, et les difficultés rencontrées : « Personne n’était réellement qualifié pour être l’interlocuteur principal ni le superviseur de cette conception […]. Pour bien préciser et clarifier mon propos, je ne souhaite pas faire ici le bilan ou la critique d’une collaboration […] ; chacun a travaillé au mieux selon ses logiques ».

On retrouve ici la notion de logiques, propres à chaque domaine ( archéologues, médiateurs ) qui n’ont pas réellement réussi à se combiner. Le terme interlocuteur dénote un problème de communi-cation et de compréhension avec l’autre discipline. Personne n’avait les connaissances requises pour pouvoir échanger avec l’artiste, ici designer. Le terme superviseur, quant à lui, signale plutôt un manque d’organi-sation dans le travail : le rôle de chacun n’était pas clair, peut être tant au niveau de la temporalité que de la responsabilité.

Photo de la création muséographique Pariétale de Thierry FOURNIER, 2010Source : https://www.thierryfournier.net/parietale

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37 les problèmes engendrés par la collaboration

À la suite de quoi, il encourage la communauté à « rompre avec la logique de division du travail entre muséographes de “ contenus ” et réalisateurs de “ dispositifs ” » — soit à penser la création et la conception comme parties intégrantes du processus.

En littérature, Thomas Lebarbé évoque lors d’un entretien son projet consacré aux manuscrits de Stendhal. Son travail, initié en 2004 en collaboration avec de nombreux autres chercheurs, avait pour but de réfuter l’idée que Stendhal était un écrivain “ désorganisé ”, ce que prétendent toutes les recherches précédentes sur le sujet. Dix ans plus tard, c’était chose faite, l’équipe réussit à valider son hypothèse. En effet, un échantillonnage des brouillons bien plus large que celui des études précédentes, ainsi qu’une analyse informatique des données sont parvenus à montrer que l’écrivain avait en permanence jusqu’à douze carnets à la fois sur sa table lorsqu’il écrivait. Ce projet est un exemple classique de ce que les humanités numériques peuvent apporter aux sciences humaines et sociales. Lors du déroulement du projet, Thomas Lebarbé avait un rôle à la fois de chercheur et d’ingénieur informatique, propre à sa formation (en informatique linguistique). Mais étant donné le type de profil des autres chercheurs, il se situait plutôt dans la catégorie des ingénieurs.

Quelques années après le début du projet, il mit en place une expérience, qui ne fonctionna pas, mais il réussit grâce cet échec à invalider une hypothèse. Il avait mis en place un premier modèle de transcription qui correspondait à une première conception que l’équipe de travail avait des documents à traiter (la page de manuscrit). Ce modèle s’est révélé incomplet et insuffisant, prouvant ainsi que la première conception que l’équipe avait des documents était fausse. Lors de l’élaboration du second modèle, il fallut recommencer à zéro, et redocumentariser les pages qui avaient déjà été transcrites.

Depuis sa perspective d’ingénieur, cette expérience lui parut satisfaisante : réfuter une hypothèse, c’est déjà quelque chose, et dans ce cas précis cela permettait d'avoir une meilleure appréhension du modèle de structuration à utiliser. Mais il fut surpris par la réaction des autres chercheurs qui, ne raisonnant pas de la même façon, ont estimé que le résultat de cette expérience était une grande perte de temps.

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40 Témoignage récolté lors du THATCamp Valence.

41 Graphesis : visual forms of knowledge production, op. cit., p.48.

Cette expérience pointe la divergence de logiques de production, et des valeurs accordées aux différentes méthodes — ce qui traduit plus largement un déphasage epistémologique entre les différents champs de pratiques. Si un acteur a l’impression d’avancer mais que l’autre n’y voit aucune utilité, cela révèle un problème.

Enfin, je citerai un dernier exemple décrit par Diana Maynard, ingénieure en informatique également présente au THATCamp de Valence, qui illustre très bien les tensions issues des différences de méthodes et de points de vue :

« Avec mon équipe, nous essayons de trouver des champs lexicaux qui représentent un sujet en particulier dans des textes. Par exemple : gestion des déchets ou recyclage. On ne cherche pas seulement des synonymes, mais tous les termes présents dans le document qui peuvent être reliés (de près ou de loin) à ce terme. Concrètement, nous effectuons une classification, car c’est ce dont nous avons besoin pour les outils. Mais jusqu’ici, nous n’avons pas réussi, même avec des experts en traitement de données, à obtenir des résultats corrects qui ne soient pas réduits aux synonymes. Les chercheurs, en observant les résultats que nous obtenons, nous disent “ non, nous ne prendrions pas ce terme là dans le champ lexical, vos résultats sont faux ”. En réalité, ils ne saisissent pas nos besoins. Nous n’arrivons pas à faire comprendre aux gens que la conception mentale de ce que nous voulons, de ce que nous cherchons, n’est pas la même chose que ce que les outils informatiques peuvent traiter ».

Ce témoignage nous parle d’un écart de culture réfléxive entre les différentes disciplines.

Johanna Drucker illustre très bien cet écart à travers l’exemple d’un cercle. Une personne qui observe une ligne traçant une forme ronde se refermant presque sur elle-même y verra (la plupart du temps) un cercle. Mais une machine, elle, y verra non pas un cercle, mais un tracé ouvert. Dans les systèmes numériques, toutes les instructions doivent être

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39 les problèmes engendrés par la collaboration

42 URL : http://www.atlas-semantiques.eu/.

explicites, et aucune expérience humaine sensible ne peut entrer en jeu, à moins d’être finalisée. Faire le lien entre les deux types de perception s’avère parfois délicat.

Ce dernier cas est particulièrement intéressant car il semble montrer qu’il y a potentiellement des limites (peut-être temporaires dans le cas présent) aux passerelles entre les disciplines — des sortes de blocages. D’un côté les ingénieurs qui n’arrivent pas à transcrire dans leurs logiciels ce que souhaitent exactement les chercheurs, même s’ils ont compris la demande ; et de l’autre les chercheurs qui ont du mal à saisir que ce qu’ils demandent aux ingénieurs relève d’une subtilité complexe à transcrire informatiquement.

Toutefois, ces limites sont négociables en fonction de l’économie du projet : les moyens, les équipes de travail et le temps investis. Il existe des unités de recherche spécialisées dans la question du champ lexical, notion floue en informatique, notamment au CNRS qui a mis au point Atlas sémantiques, un outil (en ligne) de représentation géométrique des valeurs sémantiques des termes.

Représentation des valeurs sémantiques du champ lexical du terme livre par Atlas Sémantique. Source : http://www.atlas-semantiques.eu

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43 Témoignage récolté lors du THATCamp Valence.

2 — Perception de l’autre Déformation

Ces différences de point de vue engendrent souvent un autre problème : celui de la méconnaissance du potentiel des autres disciplines. Sur ce point, l’ingénieure Diana Maynard s’exprime à nouveau.

« Un des problèmes majeurs réside dans le fait que ce sont les chercheurs en sciences humaines qui possèdent les données (data), sans comprendre nécessairement ce qu’il est possible d’en tirer, et comment. Il y a un vrai problème de communication entre les deux champs. Il m’arrive très souvent de rencontrer des chercheurs en humanités qui n’ont pas idée qu’il est possible d’effectuer de l’analyse textuelle au-delà de la simple saisie de mots dans un tableau à double entrée. On voit des gens en train d’éditer manuellement leur tableau Excel, y cherchant des termes, et on leur dit “ Tu sais qu’on pourrait passer ton document dans nos systèmes et faire en deux minutes ce que tu feras en deux ans ? ”, et eux nous répondent “ Vraiment ? ”. En réalité les gens n’ont même pas conscience qu’il existe des outils qui peuvent faire ces choses-là, tout en restant simples et accessibles. Le problème réside dans l’idée qu’une grande partie de la communauté a peur de la technologie, car elle ne la comprend pas et n’y connait rien. La simple idée d’utiliser un outil numérique lui fait peur. De cette lacune, découle un second problème. Les personnes ne comprenant pas ces technologies construisent dans leur esprit une image faussée des ingénieurs, qu’ils perçoivent alors comme des gens accomplissant de l’analyse textuelle grâce à la magie. “ Donnons-leur les données et hop, c’est fait ! ”. De ce fait, ils ne savent pas comment formuler leurs besoins auprès des ingénieurs. Ou alors, ils ont une vision complètement irréelle de ce que nous pouvons accomplir. Par conséquent, la plupart du temps, nous essayons de deviner ce que les chercheurs veulent. Et je pense qu’ici se trouve le vrai défi : essayer de résoudre les problèmes de compréhension, à savoir ce que sont vraiment les outils, et ce que la technologie peut et ne peut pas faire ».

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41 les problèmes engendrés par la collaboration

44 THATCamp Paris 2012: Non-actes de la non-conférence des humanités numériques, op. cit., p.151.

Cela soulève la question des processus d’extractions des données, qui reposent majoritairement sur un encodage préliminaire des textes (qui peut être effectué en divers languages : TEI, XML, RDFa etc). En 2012, lors du THATCamp Paris, il a été énoncé qu’« il peut être [...] souhaitable que les chercheurs soient directement confrontés à l’encodage des informations car cela pourrait présenter pour eux un intérêt en terme de questionnements scientifiques ». En effet, cela représente une forme de passerelle entre les pratiques des ingénieurs et celles des chercheurs, et pourrait aider ces derniers à avoir une meilleure appréhension des outils numériques. Plus globalement, Diana Maynard incite ici les chercheurs en SHS à investir le numérique afin de mieux comprendre le traitement des données, et les possibilités algorithmiques.

Si individuellement chacun n’a pas assez conscience des limites produites par son propre regard sur les pratiques des autres disci- plines, il est toujours plus évident de voir la façon dont les autres mécomprennent nos (propres) pratiques. On sent dans ce témoignage que l’ingénieure a bien pris conscience du problème et a déjà imaginé des solutions pour faire dialoguer les différentes pratiques et faire coincider leurs besoins et moyens. De nombreuses solutions ont déjà été pensées individuellement, il semblerait judicieux et important de les recenser et de les rassembler dans un même objet. De la même façon, nous, les designers, avons souvent conscience de la vision parfois très imparfaite ou altérée que peuvent avoir les autres disciplines de nos pratiques. Concrètement, comme énoncé plus tôt, cela consiste généralement à réduire notre pratique à la simple mise en forme élégante d’un contenu produit au préalable.

D’une part, le design ne se limite pas à l’esthétique dans sa pratique, et d’autre part, la notion d’élégance est aujourd’hui dévalorisée et relayée au second plan. Pourtant, selon Norman Potter, le « bon design [oppose] une solution élégante [...], qui satisfait toutes les exigences apparentes avec une très belle économie de moyens, [à une] solutions productive qui assimile ces conditions en une nouvelle intégration

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45 potter, Norman, Qu’est-ce que qu’un designer : objets, lieux, messages, Paris, Cité du design et B42, 2011, p.50.

47 arnheim, Rudolf, Noël Claude, Le Cannu Marc, La pensée visuelle, Paris, Flammarion, coll. Nouvelle Bibliothèque scientifique, 1976, p.11.

48 « Le tournant design des humanités numériques », op. cit.

du sens, par laquelle ce qui était auparavant apparent est vu comme ayant été insuffisant ». Comme l’explique Rudolf Arnheim, ce manque d’estime collectif pour la pensée visuelle découle d’une dichotomie entre perception et pensée :

« Le préjugé qui établit une discrimination entre perception et pensée n’a pas disparu de nos jours. […] On néglige les arts parce qu’ils se fondent sur la perception et l’on méprise la perception parce qu’elle n’est pas censée faire intervenir la pensée. [...] L’art constitue le plus puissant moyen de renforcer la composante perceptuelle en l’absence de laquelle la pensée productive est impossible dans tous les domaines de l’effort humain ».

Pour cette raison, comme Diana Maynard qui appelle les chercheurs à se poser des questions précises sur les outils et la technologie, Stéphane Vial invite les acteurs des humanités numériques à « repenser entièrement le dualisme illusoire établi entre la structure de la donnée et la forme de la donnée ».

Sans pour autant comprendre en détail ce que signifie pratiquer le design, il est essentiel pour la communauté de prendre conscience de son « potentiel structurant » et de le penser comme partie intégrante du processus, et non plus comme quelque chose qui vient a posteriori.

C’est aux designers de prendre en charge le problème et d’aller vers les autres acteurs, afin de les sensibiliser au rôle essentiel que leur pratique peut jouer dans les projets d’humanités numériques. J’entends ici à la fois les designers faisant déjà partie d’une équipe de travail (ce qui nécessite alors qu’ils soient intégrés dès le début du processus — autrement cela s’avère délicat, et pose des questions de temporalité déjà abordées p.24), mais également tous les designers qui ont envie de diffuser une pensée du design, à travers des discussions, des conférences, des workshops etc.

Lors de mon entretien avec Thomas Lebarbé par exemple, il com- mença par me dire qu’il ne connaissait pas le potentiel que pourrait avoir le design dans ses travaux, et qu’il n’en voyait pas clairement

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la nécessité. Après une quinzaine de minutes d’explication de ma part sur ce sujet (avec des exemples simples de projets, et même sans trop aborder tout le côté engagé que le design pourrait apporter aux humanités numériques — mais en évoquant tout de même la question de la pensée visuelle), l’enseignant-chercheur semblait commencer à saisir ce que la pratique de designer pourrait lui apporter. Il finit par convenir qu’il serait utile que je parle aux autres membres de son université, afin qu’ils entendent le même discours.

C’est dans des contextes comme celui-ci que de nouvelles collabora-tions pourront voir le jour. Thomas Lebarbé et moi ne connaissions pas bien nos disciplines mutuelles. Nous avons pris le temps d’échanger à ce sujet, et de se faire mutuellement découvrir toute la richesse de nos pratiques. Seule une ouverture réciproque (autant du côté de celui qui explique, que de celui qui écoute) permettra à chacun de comprendre, et de respecter les pratiques des autres ; mais également de trouver une place adaptée dans la collaboration, afin d’éviter l’apparition d’incompré-hensions et de rapports de force.

Dans le cas contraire, comme le montre le graphe [ci-dessous] de Paul Girard (ingénieur de recherche spécialisé dans l’usage des techno-logies de l’information en SHS, et membre du MédiaLab), la mécon- naissance des autres disciplines, induisant des rapports de force, conduira la plupart du temps à un déséquilibre ou un échec du projet.

les problèmes engendrés par la collaboration

Slide extraite de la conférence de Paul Girard lors de la Journée d’étude DHnord 2018 – Quelles collaborations au sein des structures dédiées aux humanités numériques ? à la MESHS du 15 au 17 octobre 2018.

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49 Gault, Clément, « Quand designers et chercheurs travaillent ensemble », La revue du Design, [En ligne], 17 septembre 2010. URL : http://www.larevuedudesign.com/2010/ 09/17/quand-designers-et-chercheurs-travaillent-ensemble, consulté le 13 décembre 2017.

50 Entretien avec Thomas Lebarbé.

51 Ibid.

52 Propos de Lise Renaud en introduction de la journée d’étude Métamorphoses numériques des objets culturels : le carnet de recherche, organisé par l’Agorantic le 22 novembre 2018 à l’Université d’Avignon.

53 Ibid.

Situations de friction

Voici des exemples de situations concrètes qui reflètent le graphe de Paul Girard.

Clément Gault, doctorant designer à l’IRRCyN (Institut de Recherche en Communications et Cybernétiques de Nantes), s’est intéressé aux « ressources de médiation plutôt qu[‘aux] pratiques » dans des collaborations entre designers d’objets et chercheurs. Dans une conférence au Lift 10 de Genève (2010), il évoque le prob- lème du stéréotype — soit une mauvaise appréhension de la discipline de l’autre. Il cite alors le cas d’un chercheur qui, lors de sa première rencontre avec un designer passe son temps à simplement lui montrer de belles images prises au microscope, au lieu de lui expliquer sa recherche. L’incompréhension du rôle et du potentiel du design est ici manifeste. D’ailleurs, la collaboration n’a finalement pas eu lieu.

Dans un autre registre, Thomas Lebarbé me parle de sa collabo-ration avec des chercheurs. Il me dit avoir entendu certains d’entre eux demander à sa collègue si elle avait « bientôt fini avec Thomas » car ils avaient « besoin de lui ». Cette demande traduit une mauvaise compré-hension de son rôle dans le processus de recherche ; il est vu comme un outil au service des chercheurs, qui effectue les tâches qui lui sont dictées. On revient aux idées de service et de subordination évoquées plus tôt, cette fois-ci entre programmeurs et chercheurs.

Lise Renaud, maître de conférence en Sciences de l’Information et de la Communication, parle dans ce cas d’ « instrumentalisation des disciplines », en citant d’une part le type d’exemple énoncé au dessus, mais aussi à l’inverse, l’exemple du chercheur SHS qui vient « valider par un impact sociologique la recherche en informatique ».

L’ouverture et la connaissance des autres champs sont donc essen-tiels pour éviter les rapports de force qui s’opèrent entre les acteurs (tels que l’instrumentalisation).

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54 Source : https://www.zotero.org.

55 Échanges avec Johannes Krtek (designer-programmeur chez Zotero), septembre 2018.

3 — Monde universitaire Vie académique

Un dernier aspect que j’aimerais développer ici est la différence qu’il y a entre le monde académique (dont font partie les SHS) et la réalité dans laquelle s’inscrivent le design et les sciences de l’informatique. Deux personnes rencontrées ont évoqué cet écart.

Tout d’abord, Johannes Krtek, designer pour le projet Zotero. « Logiciel le plus couramment utilisé [dans les humanités, il s’agit d’] un outil de gestion et de recherche bibliographique permettant aux utilisateurs de collecter, d’organiser et d’exporter des références ».Depuis trois ans, Johannes Krtek travaille quotidiennement avec des ingénieurs informatiques, mais il lui arrive régulièrement de collaborer avec des chercheurs en sciences humaines. Il témoigne ainsi :

« Il existe un aspect spécifique aux humanités numériques et aux sciences en général qui amplifie la friction entre les domaines : la vie académique ne fait pas partie de la vie quotidienne de la plupart des designers. L’objet de notre travail de design peut facilement rester vague et abstrait. Typiquement, quand on commence à travailler sur un projet de design, on essaie d’en savoir le plus possible sur le sujet, de faire beaucoup de recherches etc. Mais ni designers ni développeurs ne peuvent devenir des scientifiques du jour au lendemain. Nous allons alors utiliser des suppositions comme point de départ de nos décisions et discussions. C’est pourquoi il est parfois délicat d’arriver à un accord avec les chercheurs si nos réflexions sont basées sur des suppositions ».

Nicolas Chauveau (designer de VÉgA) appuie son propos en donnant un exemple concret de sa collaboration avec des historiens. Il parle de l’un des rôles du designer qui, pour rendre la plateforme accessible au plus grand nombre, va tendre à vulgariser les données — ici le récit historique. Or, pour les chercheurs en SHS, cela signifie appau- vrir et simplifier, ce qui est synonyme d’une perte d’une partie des connaissances. Il me retranscrit une conversation qu’il a pu avoir avec

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56 Entretien avec Nicolas Chauveau (designer chez Intactile Design), septembre 2018.

les égyptologues, après qu’Intactile Design ait proposé une première maquette de plateforme. Dans celle-ci, l’utilisateur accédait au contenu par le signe dans sa forme la plus commune, et découvrait ensuite toutes les déclinaisons qui pouvaient en découler.

Égyptologues :“ On ne peut pas montrer ça parce que c’est incomplet, parce que c’est faux. ”

Designers :“ Mais dès que l’on clique dessus on pourra accéder à la fiche complète. Cela pourrait quand même aider les gens à mieux comprendre et à voir les choses à une échelle plus globale. ”

Égyptologues :“ Non, on ne peut pas les mettre comme ça, c’est faux ”.

Il y a un blocage : l’intuition des designers ne recontre pas l’exigence des chercheurs. Pour les designers d’Intactile qui ont plus l’habitude de travailler avec des chercheurs des sciences dures, travailler avec des chercheurs en humanités est très intéressant, mais se révèle toujours être un défi.

Logiques économiques

Nicolas Chauveau parle également des logiques économiques propres au monde académique, qui ne coincident pas toujours avec la volonté de mise en commun des connaissances, chère aux humanités numériques. Dans la manière de fonctionner des universitaires, la question de la publication est vitale. Du nombre de publications dépendent l’attribution de subventions, la reconnaissance ou encore l’obtention d’un emploi pour le chercheur. Ainsi, lorsqu’il s’agit de partager ses découvertes de façon gratuite et parfois presque anonyme sur le web, cela pose forcément problème ; la notoriété d’un site n’apporte pas la reconnaissance d’une revue à comité de lecture.

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47 les problèmes engendrés par la collaboration

57 Entretien avec Thomas Lebarbé.

58 Entretien avec Thomas Lebarbé.

59 Hack faisant référence à la pratique de la programmation et Yack à la pratique de l’écriture — Entretien avec Robin De Mourat (designer au MédiaLab), décembre 2018.

60 «Les “ Digital Humanities ” dans l’enseignement : diversité des approches», op. cit.

61 «Les “ Digital Humanities ” dans l’enseignement : diversité des approches», op. cit.

Thomas Lebarbé me cite ainsi deux exemples de situations dont il a été témoin. Tout d’abord le fait qu’il lui soit arrivé, en travaillant sur des projets en tant que programmeur (en collaboration avec des chercheurs), de ne pas être mentionné dans les publications, par mépris — alors même que le programme qu’il avait écrit était à l’origine de la découverte de nombreux élements qui composaient ces publications. Deuxièmement, il évoque les débuts en 2004 de sa collaboration avec Cécile Meynard, (enseignante-chercheuse en littérature française). Il m’explique que cela a été bien plus difficile pour elle que pour lui, non pas de travailler ensemble, mais en raison du regard que les autres chercheurs portaient sur son travail. Lorsque Thomas Lebarbé et elle écrivaient collectivement un article, elle était critiquée car « elle ne savait pas écrire un article toute seule ». Lorsqu’elle faisait une présen-tation avec des visuels, méthode plus courante pour un ingénieur que pour un chercheur en SHS, elle était critiquée car « elle ne savait pas parler sans diaporama ». La communauté des chercheurs exprimait un réel refus à s’ouvrir aux pratiques qui diffèraient des leurs. Aujourd’hui, les choses ont nettement évolué, la collaboration est davantage acceptée dans les universités, mais il reste de nombreuses traces de cette résistance.

Par exemple, Robin De Mourat évoque l’expression “ hack or yack ” , qui symbolise le dilemme du chercheur entre passer du temps à faire des expérimentations informatiques en amateur pour faire avancer sa recherche ou passer ce même temps à écrire ; la partie informatique n’ayant pas, à l’heure actuelle, de statut reconnu dans la recherche en SHS, contrairement à l’écriture. Cela pose plus globalement des questions de carrière pour les chercheurs.

Dès le stade des études le problème se ressent. Éric Ferrante explique, lors de sa conférence , qu’il y a encore aujourd’hui une forte opposition entre chercheurs et ingénieurs dans les esprits universitaires : souvent un choix est à faire entre les deux pour les étudiants, sous peine de « basculer » dans l’autre domaine. Un étudiant en sciences humaines qui manifestera un intêret trop technique serait tenté de passer du côté de l’ingénieur.

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62 Témoignage récolté lors du THATCamp Valence.

63 Source : http://get.genotoul.fr.

Géraldine Castel illustre ce problème en parlant de son expérience : « Quand je dis à mes étudiants en Master que nous allons utiliser nos ordinateurs, la plupart me répondent qu’ils sont en littérature et donc ne peuvent pas faire de programmation, comme s’il s’agissait de deux univers différents ».

Pourtant la même proposition dans des workshops étudiants à l’étranger (en Espagne notamment), recevait un accueil beaucoup plus enthousiaste. Cela montre une fois de plus un décalage entre la France et les autres pays. Pour autant, Géraldine Castel affirme réussir la plupart du temps à sensibiliser ses étudiants à l’intérêt des outils numériques, même si cela ne va pas toujours jusqu’à une formation exhaustive. On revient à l’idée de litteratie numérique déjà évoquée.

Les logiques propres au monde académique sont donc encore éloignées d’un idéal pour les humanités numériques. Pour ce problème précis, il semble difficile de demander à d’autres personnes que les universitaires et les chercheurs eux-mêmes de faire avancer les choses.

À moins que le changement puisse se faire à une échelle politique plus grande. Mais quel système pourrait-on imaginer ?

Ce que l’on peut tirer des sciences dures

Pour imaginer un système académique qui fonctionne mieux en adéquation avec les humanités numériques, on peut considérer le système académique des sciences dures, au sein duquel le numérique est présent depuis bien plus longtemps (dès les années 1950, avec la gestion des calculs). Nicolas Chauveau parle notament de la plateforme en ligne Génome et Transcriptome , recensant toutes les recherches menées sur les génomes depuis plusieurs années. Le fait d’avoir rassemblé toutes les données connues a permis de faire avancer la recherche grâce à des systèmes informatiques.

Thomas Lebarbé ajoute que dans le cadre d’une publication scientifique, il est possible d’avoir jusqu’à deux pages entières remplies des noms des personnes ayant participé à l’élaboration de l’article.

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49 les problèmes engendrés par la collaboration

The CMS experiment at the CERN LHC, article scientifique décri- vant le fonctionnement du détecteur Compact Muon Solenoid (CMS) du CERN, en est un exemple manifeste [voir pages suivantes].

Il n’existe pas actuellement, dans les sciences humaines et sociales, de tel système de partage de connaissances qui soit reconnu, mais l’exemple des sciences dures montre qu’un autre modèle est envisageable.

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2008 JINST 3 S08004

CMS Collaboration

Yerevan Physics Institute, Yerevan, ArmeniaS. Chatrchyan, G. Hmayakyan, V. Khachatryan, A.M. Sirunyan

Institut für Hochenergiephysik der OeAW, Wien, AustriaW. Adam, T. Bauer, T. Bergauer, H. Bergauer, M. Dragicevic, J. Erö, M. Friedl, R. Frühwirth,V.M. Ghete, P. Glaser, C. Hartl, N. Hoermann, J. Hrubec, S. Hänsel, M. Jeitler, K. Kast-ner, M. Krammer, I. Magrans de Abril, M. Markytan, I. Mikulec, B. Neuherz, T. Nöbauer,M. Oberegger, M. Padrta, M. Pernicka, P. Porth, H. Rohringer, S. Schmid, T. Schreiner, R. Stark,H. Steininger, J. Strauss, A. Taurok, D. Uhl, W. Waltenberger, G. Walzel, E. Widl, C.-E. Wulz

Byelorussian State University, Minsk, BelarusV. Petrov, V. Prosolovich

National Centre for Particle and High Energy Physics, Minsk, BelarusV. Chekhovsky, O. Dvornikov, I. Emeliantchik, A. Litomin, V. Makarenko, I. Marfin, V. Mossolov,N. Shumeiko, A. Solin, R. Stefanovitch, J. Suarez Gonzalez, A. Tikhonov

Research Institute for Nuclear Problems, Minsk, BelarusA. Fedorov, M. Korzhik, O. Missevitch, R. Zuyeuski

Universiteit Antwerpen, Antwerpen, BelgiumW. Beaumont, M. Cardaci, E. De Langhe, E.A. De Wolf, E. Delmeire, S. Ochesanu, M. Tasevsky,P. Van Mechelen

Vrije Universiteit Brussel, Brussel, BelgiumJ. D’Hondt, S. De Weirdt, O. Devroede, R. Goorens, S. Hannaert, J. Heyninck, J. Maes,M.U. Mozer, S. Tavernier, W. Van Doninck,1 L. Van Lancker, P. Van Mulders, I. Villella,C. Wastiels, C. Yu

Université Libre de Bruxelles, Bruxelles, BelgiumO. Bouhali, O. Charaf, B. Clerbaux, P. De Harenne, G. De Lentdecker, J.P. Dewulf, S. Elgammal,R. Gindroz, G.H. Hammad, T. Mahmoud, L. Neukermans, M. Pins, R. Pins, S. Rugovac,J. Stefanescu, V. Sundararajan, C. Vander Velde, P. Vanlaer, J. Wickens

– ii –

Vingt-trois premières pages de « The CMS Collaboration » et al, 2008 JINST 3 S08004Disponible en ligne sur : https://iopscience.iop.org/article/10.1088/1748-0221/3/08/S08004/pdf

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2008 JINST 3 S08004

Ghent University, Ghent, BelgiumM. Tytgat

Université Catholique de Louvain, Louvain-la-Neuve, BelgiumS. Assouak, J.L. Bonnet, G. Bruno, J. Caudron, B. De Callatay, J. De Favereau De Jeneret,S. De Visscher, P. Demin, D. Favart, C. Felix, B. Florins, E. Forton, A. Giammanco, G. Grégoire,M. Jonckman, D. Kcira, T. Keutgen, V. Lemaitre, D. Michotte, O. Militaru, S. Ovyn, T. Pierzchala,K. Piotrzkowski, V. Roberfroid, X. Rouby, N. Schul, O. Van der Aa

Université de Mons-Hainaut, Mons, BelgiumN. Beliy, E. Daubie, P. Herquet

Centro Brasileiro de Pesquisas Fisicas, Rio de Janeiro, BrazilG. Alves, M.E. Pol, M.H.G. Souza

Instituto de Fisica - Universidade Federal do Rio de Janeiro,Rio de Janeiro, BrazilM. Vaz

Universidade do Estado do Rio de Janeiro, Rio de Janeiro, BrazilD. De Jesus Damiao, V. Oguri, A. Santoro, A. Sznajder

Instituto de Fisica Teorica-Universidade Estadual Paulista,Sao Paulo, BrazilE. De Moraes Gregores,2 R.L. Iope, S.F. Novaes, T. Tomei

Institute for Nuclear Research and Nuclear Energy, Sofia, BulgariaT. Anguelov, G. Antchev, I. Atanasov, J. Damgov, N. Darmenov,1 L. Dimitrov, V. Genchev,1

P. Iaydjiev, A. Marinov, S. Piperov, S. Stoykova, G. Sultanov, R. Trayanov, I. Vankov

University of Sofia, Sofia, BulgariaC. Cheshkov, A. Dimitrov, M. Dyulendarova, I. Glushkov, V. Kozhuharov, L. Litov, M. Makariev,E. Marinova, S. Markov, M. Mateev, I. Nasteva, B. Pavlov, P. Petev, P. Petkov, V. Spassov,Z. Toteva,1 V. Velev, V. Verguilov

Institute of High Energy Physics, Beijing, ChinaJ.G. Bian, G.M. Chen, H.S. Chen, M. Chen, C.H. Jiang, B. Liu, X.Y. Shen, H.S. Sun, J. Tao,J. Wang, M. Yang, Z. Zhang, W.R. Zhao, H.L. Zhuang

Peking University, Beijing, ChinaY. Ban, J. Cai, Y.C. Ge, S. Liu, H.T. Liu, L. Liu, S.J. Qian, Q. Wang, Z.H. Xue, Z.C. Yang, Y.L. Ye,J. Ying

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Page 52: Laura Piccolo PASSERELLESworkshops-passerelles.fr/docs/passerelles.pdfBibliographie 89. 6 Introduction. 7 introduction En 2017, ... humanités numériques et design 1 Clavert, Frédéric,

2008 JINST 3 S08004

Shanghai Institute of Ceramics, Shanghai, China (Associated Institute)P.J. Li, J. Liao, Z.L. Xue, D.S. Yan, H. Yuan

Universidad de Los Andes, Bogota, ColombiaC.A. Carrillo Montoya, J.C. Sanabria

Technical University of Split, Split, CroatiaN. Godinovic, I. Puljak, I. Soric

University of Split, Split, CroatiaZ. Antunovic, M. Dzelalija, K. Marasovic

Institute Rudjer Boskovic, Zagreb, CroatiaV. Brigljevic, K. Kadija, S. Morovic

University of Cyprus, Nicosia, CyprusR. Fereos, C. Nicolaou, A. Papadakis, F. Ptochos, P.A. Razis, D. Tsiakkouri, Z. Zinonos

National Institute of Chemical Physics and Biophysics, Tallinn, EstoniaA. Hektor, M. Kadastik, K. Kannike, E. Lippmaa, M. Müntel, M. Raidal, L. Rebane

Laboratory of Advanced Energy Systems,Helsinki University of Technology, Espoo, FinlandP.A. Aarnio

Helsinki Institute of Physics, Helsinki, FinlandE. Anttila, K. Banzuzi, P. Bulteau, S. Czellar, N. Eiden, C. Eklund, P. Engstrom,1 A. Heikkinen,A. Honkanen, J. Härkönen, V. Karimäki, H.M. Katajisto, R. Kinnunen, J. Klem, J. Kortesmaa,1

M. Kotamäki, A. Kuronen,1 T. Lampén, K. Lassila-Perini, V. Lefébure, S. Lehti, T. Lindén,P.R. Luukka, S. Michal,1 F. Moura Brigido, T. Mäenpää, T. Nyman, J. Nystén, E. Pietarinen,K. Skog, K. Tammi, E. Tuominen, J. Tuominiemi, D. Ungaro, T.P. Vanhala, L. Wendland,C. Williams

Lappeenranta University of Technology, Lappeenranta, FinlandM. Iskanius, A. Korpela, G. Polese,1 T. Tuuva

Laboratoire d’Annecy-le-Vieux de Physique des Particules,IN2P3-CNRS, Annecy-le-Vieux, FranceG. Bassompierre, A. Bazan, P.Y. David, J. Ditta, G. Drobychev, N. Fouque, J.P. Guillaud, V. Her-mel, A. Karneyeu, T. Le Flour, S. Lieunard, M. Maire, P. Mendiburu, P. Nedelec, J.P. Peigneux,M. Schneegans, D. Sillou, J.P. Vialle

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2008 JINST 3 S08004

DSM/DAPNIA, CEA/Saclay, Gif-sur-Yvette, FranceM. Anfreville, J.P. Bard, P. Besson,∗ E. Bougamont, M. Boyer, P. Bredy, R. Chipaux, M. De-jardin, D. Denegri, J. Descamps, B. Fabbro, J.L. Faure, S. Ganjour, F.X. Gentit, A. Givernaud,P. Gras, G. Hamel de Monchenault, P. Jarry, C. Jeanney, F. Kircher, M.C. Lemaire, Y. Lemoigne,B. Levesy,1 E. Locci, J.P. Lottin, I. Mandjavidze, M. Mur, J.P. Pansart, A. Payn, J. Rander,J.M. Reymond, J. Rolquin, F. Rondeaux, A. Rosowsky, J.Y.A. Rousse, Z.H. Sun, J. Tartas,A. Van Lysebetten, P. Venault, P. Verrecchia

Laboratoire Leprince-Ringuet, Ecole Polytechnique,IN2P3-CNRS, Palaiseau, FranceM. Anduze, J. Badier, S. Baffioni, M. Bercher, C. Bernet, U. Berthon, J. Bourotte, A. Busata,P. Busson, M. Cerutti, D. Chamont, C. Charlot, C. Collard,3 A. Debraine, D. Decotigny, L. Do-brzynski, O. Ferreira, Y. Geerebaert, J. Gilly, C. Gregory,∗ L. Guevara Riveros, M. Haguenauer,A. Karar, B. Koblitz, D. Lecouturier, A. Mathieu, G. Milleret, P. Miné, P. Paganini, P. Poilleux,N. Pukhaeva, N. Regnault, T. Romanteau, I. Semeniouk, Y. Sirois, C. Thiebaux, J.C. Vanel,A. Zabi4

Institut Pluridisciplinaire Hubert Curien,IN2P3-CNRS, Université Louis Pasteur Strasbourg, France, andUniversité de Haute Alsace Mulhouse, Strasbourg, FranceJ.L. Agram,5 A. Albert,5 L. Anckenmann, J. Andrea, F. Anstotz,6 A.M. Bergdolt, J.D. Berst,R. Blaes,5 D. Bloch, J.M. Brom, J. Cailleret, F. Charles,∗ E. Christophel, G. Claus, J. Cof-fin, C. Colledani, J. Croix, E. Dangelser, N. Dick, F. Didierjean, F. Drouhin1,5, W. Dulinski,J.P. Ernenwein,5 R. Fang, J.C. Fontaine,5 G. Gaudiot, W. Geist, D. Gelé, T. Goeltzenlichter,U. Goerlach,6 P. Graehling, L. Gross, C. Guo Hu, J.M. Helleboid, T. Henkes, M. Hoffer, C. Hoff-mann, J. Hosselet, L. Houchu, Y. Hu,6 D. Huss,6 C. Illinger, F. Jeanneau, P. Juillot, T. Kachelhoffer,M.R. Kapp, H. Kettunen, L. Lakehal Ayat, A.C. Le Bihan, A. Lounis,6 C. Maazouzi, V. Mack,P. Majewski, D. Mangeol, J. Michel,6 S. Moreau, C. Olivetto, A. Pallarès,5 Y. Patois, P. Prala-vorio, C. Racca, Y. Riahi, I. Ripp-Baudot, P. Schmitt, J.P. Schunck, G. Schuster, B. Schwaller,M.H. Sigward, J.L. Sohler, J. Speck, R. Strub, T. Todorov, R. Turchetta, P. Van Hove, D. Vintache,A. Zghiche

Institut de Physique Nucléaire,IN2P3-CNRS, Université Claude Bernard Lyon 1, Villeurbanne, FranceM. Ageron, J.E. Augustin, C. Baty, G. Baulieu, M. Bedjidian, J. Blaha, A. Bonnevaux, G. Boudoul,P. Brunet, E. Chabanat, E.C. Chabert, R. Chierici, V. Chorowicz, C. Combaret, D. Contardo,1

R. Della Negra, P. Depasse, O. Drapier, M. Dupanloup, T. Dupasquier, H. El Mamouni, N. Estre,J. Fay, S. Gascon, N. Giraud, C. Girerd, G. Guillot, R. Haroutunian, B. Ille, M. Lethuillier,N. Lumb, C. Martin, H. Mathez, G. Maurelli, S. Muanza, P. Pangaud, S. Perries, O. Ravat,E. Schibler, F. Schirra, G. Smadja, S. Tissot, B. Trocme, S. Vanzetto, J.P. Walder

Institute of High Energy Physics and Informatization,Tbilisi State University, Tbilisi, GeorgiaY. Bagaturia, D. Mjavia, A. Mzhavia, Z. Tsamalaidze

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2008 JINST 3 S08004

INFN e Universita Degli Studi Milano-Bicocca, Milano, ItalyS. Banfi, R. Bertoni, M. Bonesini, L. Carbone, G.B. Cerati, F. Chignoli, P. D’Angelo, A. De Min,P. Dini, F.M. Farina,1 F. Ferri, P. Govoni, S. Magni, M. Malberti, S. Malvezzi, R. Mazza,D. Menasce, V. Miccio, L. Moroni, P. Negri, M. Paganoni, D. Pedrini, A. Pullia, S. Ragazzi,N. Redaelli, M. Rovere, L. Sala, S. Sala, R. Salerno, T. Tabarelli de Fatis, V. Tancini, S. Taroni

Istituto Nazionale di Fisica Nucleare de Napoli (INFN), Napoli, ItalyA. Boiano, F. Cassese, C. Cassese, A. Cimmino, B. D’Aquino, L. Lista, D. Lomidze, P. Noli,P. Paolucci, G. Passeggio, D. Piccolo, L. Roscilli, C. Sciacca, A. Vanzanella

Università di Padova e Sezione dell’ INFN, Padova, ItalyP. Azzi, N. Bacchetta,1 L. Barcellan, M. Bellato, M. Benettoni, D. Bisello, E. Borsato, A. Can-delori, R. Carlin, L. Castellani, P. Checchia, L. Ciano, A. Colombo, E. Conti, M. Da Rold,F. Dal Corso, M. De Giorgi, M. De Mattia, T. Dorigo, U. Dosselli, C. Fanin, G. Galet, F. Gas-parini, U. Gasparini, A. Giraldo, P. Giubilato, F. Gonella, A. Gresele, A. Griggio, P. Guaita,A. Kaminskiy, S. Karaevskii, V. Khomenkov, D. Kostylev, S. Lacaprara, I. Lazzizzera, I. Lippi,M. Loreti, M. Margoni, R. Martinelli, S. Mattiazzo, M. Mazzucato, A.T. Meneguzzo, L. Modenese,F. Montecassiano,1 A. Neviani, M. Nigro, A. Paccagnella, D. Pantano, A. Parenti, M. Passaseo,1

R. Pedrotta, M. Pegoraro, G. Rampazzo, S. Reznikov, P. Ronchese, A. Sancho Daponte, P. Sartori,I. Stavitskiy, M. Tessaro, E. Torassa, A. Triossi, S. Vanini, S. Ventura, L. Ventura, M. Verlato,M. Zago, F. Zatti, P. Zotto, G. Zumerle

Università di Pavia e Sezione dell’ INFN, Pavia, ItalyP. Baesso, G. Belli, U. Berzano, S. Bricola, A. Grelli, G. Musitelli, R. Nardò, M.M. Necchi,D. Pagano, S.P. Ratti, C. Riccardi, P. Torre, A. Vicini, P. Vitulo, C. Viviani

Università di Perugia e Sezione dell’ INFN, Perugia, ItalyD. Aisa, S. Aisa, F. Ambroglini, M.M. Angarano, E. Babucci, D. Benedetti, M. Biasini,G.M. Bilei,1 S. Bizzaglia, M.T. Brunetti, B. Caponeri, B. Checcucci, R. Covarelli, N. Dinu,L. Fanò, L. Farnesini, M. Giorgi, P. Lariccia, G. Mantovani, F. Moscatelli, D. Passeri, A. Piluso,P. Placidi, V. Postolache, R. Santinelli, A. Santocchia, L. Servoli, D. Spiga1

Università di Pisa, Scuola Normale Superiore e Sezione dell’ INFN, Pisa, ItalyP. Azzurri, G. Bagliesi,1 G. Balestri, A. Basti, R. Bellazzini, L. Benucci, J. Bernardini, L. Berretta,S. Bianucci, T. Boccali, A. Bocci, L. Borrello, F. Bosi, F. Bracci, A. Brez, F. Calzolari, R. Castaldi,U. Cazzola, M. Ceccanti, R. Cecchi, C. Cerri, A.S. Cucoanes, R. Dell’Orso, D. Dobur, S. Dutta,F. Fiori, L. Foà, A. Gaggelli, S. Gennai,13 A. Giassi, S. Giusti, D. Kartashov, A. Kraan,L. Latronico, F. Ligabue, S. Linari, T. Lomtadze, G.A. Lungu,48 G. Magazzu, P. Mammini,F. Mariani, G. Martinelli, M. Massa, A. Messineo, A. Moggi, F. Palla, F. Palmonari, G. Petragnani,G. Petrucciani, A. Profeti, F. Raffaelli, D. Rizzi, G. Sanguinetti, S. Sarkar, G. Segneri, D. Sentenac,A.T. Serban, A. Slav, P. Spagnolo, G. Spandre, R. Tenchini, S. Tolaini, G. Tonelli,1 A. Venturi,P.G. Verdini, M. Vos, L. Zaccarelli

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Università di Roma I e Sezione dell’ INFN, Roma, ItalyS. Baccaro,14 L. Barone, A. Bartoloni, B. Borgia, G. Capradossi, F. Cavallari, A. Cecilia,14

D. D’Angelo, I. Dafinei, D. Del Re, E. Di Marco, M. Diemoz, G. Ferrara,14 C. Gargiulo, S. Guerra,M. Iannone, E. Longo, M. Montecchi,14 M. Nuccetelli, G. Organtini, A. Palma, R. Paramatti,F. Pellegrino, S. Rahatlou, C. Rovelli, F. Safai Tehrani, A. Zullo

Università di Torino e Sezione dell’ INFN, Torino, ItalyG. Alampi, N. Amapane, R. Arcidiacono, S. Argiro, M. Arneodo,15 R. Bellan, F. Benotto, C. Bi-ino, S. Bolognesi, M.A. Borgia, C. Botta, A. Brasolin, N. Cartiglia, R. Castello, G. Cerminara,R. Cirio, M. Cordero, M. Costa, D. Dattola, F. Daudo, G. Dellacasa, N. Demaria, G. Dughera,F. Dumitrache, R. Farano, G. Ferrero, E. Filoni, G. Kostyleva, H.E. Larsen, C. Mariotti,M. Marone, S. Maselli, E. Menichetti, P. Mereu, E. Migliore, G. Mila, V. Monaco, M. Musich,M. Nervo, M.M. Obertino,15 R. Panero, A. Parussa, N. Pastrone, C. Peroni, G. Petrillo, A. Romero,M. Ruspa,15 R. Sacchi, M. Scalise, A. Solano, A. Staiano, P.P. Trapani,1 D. Trocino, V. Vaniev,A. Vilela Pereira, A. Zampieri

Università di Trieste e Sezione dell’ INFN, Trieste, ItalyS. Belforte, F. Cossutti, G. Della Ricca, B. Gobbo, C. Kavka, A. Penzo

Chungbuk National University, Chongju, KoreaY.E. Kim

Kangwon National University, Chunchon, KoreaS.K. Nam

Kyungpook National University, Daegu, KoreaD.H. Kim, G.N. Kim, J.C. Kim, D.J. Kong, S.R. Ro, D.C. Son

Wonkwang University, Iksan, KoreaS.Y. Park

Cheju National University, Jeju, KoreaY.J. Kim

Chonnam National University, Kwangju, KoreaJ.Y. Kim, I.T. Lim

Dongshin University, Naju, KoreaM.Y. Pac

Seonam University, Namwon, KoreaS.J. Lee

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T.M. Shaw, E. Skup, R.P. Smith,∗ W.J. Spalding, L. Spiegel, M. Stavrianakou, G. Stiehr,A.L. Stone, I. Suzuki, P. Tan, W. Tanenbaum, L.E. Temple, S. Tkaczyk,1 L. Uplegger, E.W. Vaan-dering, R. Vidal, R. Wands, H. Wenzel, J. Whitmore, E. Wicklund, W.M. Wu, Y. Wu, J. Yarba,V. Yarba, F. Yumiceva, J.C. Yun, T. Zimmerman

University of Florida, Gainesville, Florida, U.S.A.D. Acosta, P. Avery, V. Barashko, P. Bartalini, D. Bourilkov, R. Cavanaugh, S. Dolinsky,A. Drozdetskiy, R.D. Field, Y. Fu, I.K. Furic, L. Gorn, D. Holmes, B.J. Kim, S. Klimenko,J. Konigsberg, A. Korytov, K. Kotov, P. Levchenko, A. Madorsky, K. Matchev, G. Mitselmakher,Y. Pakhotin, C. Prescott, L. Ramond, P. Ramond, M. Schmitt, B. Scurlock, J. Stasko, H. Stoeck,D. Wang, J. Yelton

Florida International University, Miami, Florida, U.S.A.V. Gaultney, L. Kramer, L.M. Lebolo, S. Linn, P. Markowitz, G. Martinez, J.L. Rodriguez

Florida State University, Tallahassee, Florida, U.S.A.T. Adams, A. Askew, O. Atramentov, M. Bertoldi, W.G.D. Dharmaratna,49 Y. Gershtein,S.V. Gleyzer, S. Hagopian, V. Hagopian, C.J. Jenkins, K.F. Johnson, H. Prosper, D. Simek,J. Thomaston

Florida Institute of Technology, Melbourne, Florida, U.S.A.M. Baarmand, L. Baksay,44 S. Guragain, M. Hohlmann, H. Mermerkaya, R. Ralich, I. Vodopiyanov

University of Illinois at Chicago (UIC), Chicago, Illinois, U.S.A.M.R. Adams, I. M. Anghel, L. Apanasevich, O. Barannikova, V.E. Bazterra, R.R. Betts, C. Dragoiu,E.J. Garcia-Solis, C.E. Gerber, D.J. Hofman, R. Hollis, A. Iordanova, S. Khalatian, C. Mironov,E. Shabalina, A. Smoron, N. Varelas

The University of Iowa, Iowa City, Iowa, U.S.A.U. Akgun, E.A. Albayrak, A.S. Ayan, R. Briggs, K. Cankocak,45 W. Clarida, A. Cooper, P. Deb-bins, F. Duru, M. Fountain, E. McCliment, J.P. Merlo, A. Mestvirishvili, M.J. Miller, A. Moeller,C.R. Newsom, E. Norbeck, J. Olson, Y. Onel, L. Perera, I. Schmidt, S. Wang, T. Yetkin

Iowa State University, Ames, Iowa, U.S.A.E.W. Anderson, H. Chakir, J.M. Hauptman, J. Lamsa

Johns Hopkins University, Baltimore, Maryland, U.S.A.B.A. Barnett, B. Blumenfeld, C.Y. Chien, G. Giurgiu, A. Gritsan, D.W. Kim, C.K. Lae, P. Maksi-movic, M. Swartz, N. Tran

The University of Kansas, Lawrence, Kansas, U.S.A.P. Baringer, A. Bean, J. Chen, D. Coppage, O. Grachov, M. Murray, V. Radicci, J.S. Wood,V. Zhukova

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Kansas State University, Manhattan, Kansas, U.S.A.D. Bandurin, T. Bolton, K. Kaadze, W.E. Kahl, Y. Maravin, D. Onoprienko, R. Sidwell, Z. Wan

Lawrence Livermore National Laboratory, Livermore, California, U.S.A.B. Dahmes, J. Gronberg, J. Hollar, D. Lange, D. Wright, C.R. Wuest

University of Maryland, College Park, Maryland, U.S.A.D. Baden, R. Bard, S.C. Eno, D. Ferencek, N.J. Hadley, R.G. Kellogg, M. Kirn, S. Kunori, E. Lock-ner, F. Ratnikov, F. Santanastasio, A. Skuja, T. Toole, L. Wang, M. Wetstein

Massachusetts Institute of Technology, Cambridge, Massachusetts, U.S.A.B. Alver, M. Ballintijn, G. Bauer, W. Busza, G. Gomez Ceballos, K.A. Hahn, P. Harris, M. Klute,I. Kravchenko, W. Li, C. Loizides, T. Ma, S. Nahn, C. Paus, S. Pavlon, J. Piedra Gomez, C. Roland,G. Roland, M. Rudolph, G. Stephans, K. Sumorok, S. Vaurynovich, E.A. Wenger, B. Wyslouch

University of Minnesota, Minneapolis, Minnesota, U.S.A.D. Bailleux, S. Cooper, P. Cushman, A. De Benedetti, A. Dolgopolov, P.R. Dudero, R. Egeland,G. Franzoni, W.J. Gilbert, D. Gong, J. Grahl, J. Haupt, K. Klapoetke, I. Kronkvist, Y. Kubota,J. Mans, R. Rusack, S. Sengupta, B. Sherwood, A. Singovsky, P. Vikas, J. Zhang

University of Mississippi, University, Mississippi, U.S.A.M. Booke, L.M. Cremaldi, R. Godang, R. Kroeger, M. Reep, J. Reidy, D.A. Sanders, P. Sonnek,D. Summers, S. Watkins

University of Nebraska-Lincoln, Lincoln, Nebraska, U.S.A.K. Bloom, B. Bockelman, D.R. Claes, A. Dominguez, M. Eads, M. Furukawa, J. Keller, T. Kelly,C. Lundstedt, S. Malik, G.R. Snow, D. Swanson

State University of New York at Buffalo, Buffalo, New York, U.S.A.K.M. Ecklund, I. Iashvili, A. Kharchilava, A. Kumar, M. Strang

Northeastern University, Boston, Massachusetts, U.S.A.G. Alverson, E. Barberis, O. Boeriu, G. Eulisse, T. McCauley, Y. Musienko,46 S. Muzaffar,I. Osborne, S. Reucroft, J. Swain, L. Taylor, L. Tuura

Northwestern University, Evanston, Illinois, U.S.A.B. Gobbi, M. Kubantsev, A. Kubik, R.A. Ofierzynski, M. Schmitt, E. Spencer, S. Stoynev,M. Szleper, M. Velasco, S. Won

University of Notre Dame, Notre Dame, Indiana, U.S.A.K. Andert, B. Baumbaugh, B.A. Beiersdorf, L. Castle, J. Chorny, A. Goussiou, M. Hildreth,C. Jessop, D.J. Karmgard, T. Kolberg, J. Marchant, N. Marinelli, M. McKenna, R. Ruchti,M. Vigneault, M. Wayne, D. Wiand

– xx –

2008 JINST 3 S08004

Institute of Physics Academy of Science, Tbilisi, GeorgiaV. Roinishvili

RWTH Aachen University, I. Physikalisches Institut, Aachen, GermanyR. Adolphi, G. Anagnostou, R. Brauer, W. Braunschweig, H. Esser, L. Feld, W. Karpinski,A. Khomich, K. Klein, C. Kukulies, K. Lübelsmeyer, J. Olzem, A. Ostaptchouk, D. Pan-doulas, G. Pierschel, F. Raupach, S. Schael, A. Schultz von Dratzig, G. Schwering, R. Siedling,M. Thomas, M. Weber, B. Wittmer, M. Wlochal

RWTH Aachen University, III. Physikalisches Institut A, Aachen, GermanyF. Adamczyk, A. Adolf, G. Altenhöfer, S. Bechstein, S. Bethke, P. Biallass, O. Biebel, M. Bonte-nackels, K. Bosseler, A. Böhm, M. Erdmann, H. Faissner,∗ B. Fehr, H. Fesefeldt, G. Fetchenhauer,1

J. Frangenheim, J.H. Frohn, J. Grooten, T. Hebbeker, S. Hermann, E. Hermens, G. Hilgers,K. Hoepfner, C. Hof, E. Jacobi, S. Kappler, M. Kirsch, P. Kreuzer, R. Kupper, H.R. Lampe,D. Lanske,∗ R. Mameghani, A. Meyer, S. Meyer, T. Moers, E. Müller, R. Pahlke, B. Philipps,D. Rein, H. Reithler, W. Reuter, P. Rütten, S. Schulz, H. Schwarthoff, W. Sobek, M. Sowa,T. Stapelberg, H. Szczesny, H. Teykal, D. Teyssier, H. Tomme, W. Tomme, M. Tonutti, O. Tsigenov,J. Tutas,∗ J. Vandenhirtz, H. Wagner, M. Wegner, C. Zeidler

RWTH Aachen University, III. Physikalisches Institut B, Aachen, GermanyF. Beissel, M. Davids, M. Duda, G. Flügge, M. Giffels, T. Hermanns, D. Heydhausen, S. Kalinin,S. Kasselmann, G. Kaussen, T. Kress, A. Linn, A. Nowack, L. Perchalla, M. Poettgens, O. Pooth,P. Sauerland, A. Stahl, D. Tornier, M.H. Zoeller

Deutsches Elektronen-Synchrotron, Hamburg, GermanyU. Behrens, K. Borras, A. Flossdorf, D. Hatton, B. Hegner, M. Kasemann, R. Mankel, A. Meyer,J. Mnich, C. Rosemann, C. Youngman, W.D. Zeuner1

University of Hamburg, Institute for Experimental Physics,Hamburg, GermanyF. Bechtel, P. Buhmann, E. Butz, G. Flucke, R.H. Hamdorf, U. Holm, R. Klanner, U. Pein,N. Schirm, P. Schleper, G. Steinbrück, R. Van Staa, R. Wolf

Institut für Experimentelle Kernphysik, Karlsruhe, GermanyB. Atz, T. Barvich, P. Blüm, F. Boegelspacher, H. Bol, Z.Y. Chen, S. Chowdhury, W. De Boer,P. Dehm, G. Dirkes, M. Fahrer, U. Felzmann, M. Frey, A. Furgeri, E. Gregoriev, F. Hartmann,1

F. Hauler, S. Heier, K. Kärcher, B. Ledermann, S. Mueller, Th. Müller, D. Neuberger, C. Piasecki,G. Quast, K. Rabbertz, A. Sabellek, A. Scheurer, F.P. Schilling, H.J. Simonis, A. Skiba, P. Steck,A. Theel, W.H. Thümmel, A. Trunov, A. Vest, T. Weiler, C. Weiser, S. Weseler,∗ V. Zhukov7

Institute of Nuclear Physics "Demokritos", Aghia Paraskevi, GreeceM. Barone, G. Daskalakis, N. Dimitriou, G. Fanourakis, C. Filippidis, T. Geralis, C. Kalfas,K. Karafasoulis, A. Koimas, A. Kyriakis, S. Kyriazopoulou, D. Loukas, A. Markou, C. Markou,

– vi –

2008 JINST 3 S08004

Konkuk University, Seoul, KoreaS.Y. Jung, J.T. Rhee

Korea University, Seoul, KoreaS.H. Ahn, B.S. Hong, Y.K. Jeng, M.H. Kang, H.C. Kim, J.H. Kim, T.J. Kim, K.S. Lee, J.K. Lim,D.H. Moon, I.C. Park, S.K. Park, M.S. Ryu, K.-S. Sim, K.J. Son

Seoul National University, Seoul, KoreaS.J. Hong

Sungkyunkwan University, Suwon, KoreaY.I. Choi

Centro de Investigacion y de Estudios Avanzados del IPN, Mexico City, MexicoH. Castilla Valdez, A. Sanchez Hernandez

Universidad Iberoamericana, Mexico City, MexicoS. Carrillo Moreno

Universidad Autonoma de San Luis Potosi, San Luis Potosi, MexicoA. Morelos Pineda

Technische Universiteit Eindhoven, Eindhoven, Netherlands (Associated Institute)A. Aerts, P. Van der Stok, H. Weffers

University of Auckland, Auckland, New ZealandP. Allfrey, R.N.C. Gray, M. Hashimoto, D. Krofcheck

University of Canterbury, Christchurch, New ZealandA.J. Bell, N. Bernardino Rodrigues, P.H. Butler, S. Churchwell, R. Knegjens, S. Whitehead,J.C. Williams

National Centre for Physics, Quaid-I-Azam University, Islamabad, PakistanZ. Aftab, U. Ahmad, I. Ahmed, W. Ahmed, M.I. Asghar, S. Asghar, G. Dad, M. Hafeez,H.R. Hoorani, I. Hussain, N. Hussain, M. Iftikhar, M.S. Khan, K. Mehmood, A. Osman,H. Shahzad, A.R. Zafar

National University of Sciences And Technology,Rawalpindi Cantt, Pakistan (Associated Institute)A. Ali, A. Bashir, A.M. Jan, A. Kamal, F. Khan, M. Saeed, S. Tanwir, M.A. Zafar

Institute of Nuclear Physics, Polish Academy of Sciences, Cracow, PolandJ. Blocki, A. Cyz, E. Gladysz-Dziadus, S. Mikocki, M. Rybczynski, J. Turnau, Z. Wlodarczyk,P. Zychowski

– xi –

2008 JINST 3 S08004

The Ohio State University, Columbus, Ohio, U.S.A.B. Bylsma, L.S. Durkin, J. Gilmore, J. Gu, P. Killewald, T.Y. Ling, C.J. Rush, V. Sehgal,G. Williams

Princeton University, Princeton, New Jersey, U.S.A.N. Adam, S. Chidzik, P. Denes,47 P. Elmer, A. Garmash, D. Gerbaudo, V. Halyo, J. Jones,D. Marlow, J. Olsen, P. Piroué, D. Stickland, C. Tully, J.S. Werner, T. Wildish, S. Wynhoff,∗ Z. Xie

University of Puerto Rico, Mayaguez, Puerto Rico, U.S.A.X.T. Huang, A. Lopez, H. Mendez, J.E. Ramirez Vargas, A. Zatserklyaniy

Purdue University, West Lafayette, Indiana, U.S.A.A. Apresyan, K. Arndt, V.E. Barnes, G. Bolla, D. Bortoletto, A. Bujak, A. Everett, M. Fahling,A.F. Garfinkel, L. Gutay, N. Ippolito, Y. Kozhevnikov,1 A.T. Laasanen, C. Liu, V. Maroussov,S. Medved, P. Merkel, D.H. Miller, J. Miyamoto, N. Neumeister, A. Pompos, A. Roy, A. Sedov,I. Shipsey

Purdue University Calumet, Hammond, Indiana, U.S.A.V. Cuplov, N. Parashar

Rice University, Houston, Texas, U.S.A.P. Bargassa, S.J. Lee, J.H. Liu, D. Maronde, M. Matveev, T. Nussbaum, B.P. Padley, J. Roberts,A. Tumanov

University of Rochester, Rochester, New York, U.S.A.A. Bodek, H. Budd, J. Cammin, Y.S. Chung, P. De Barbaro,1 R. Demina, G. Ginther, Y. Gotra,S. Korjenevski, D.C. Miner, W. Sakumoto, P. Slattery, M. Zielinski

The Rockefeller University, New York, New York, U.S.A.A. Bhatti, L. Demortier, K. Goulianos, K. Hatakeyama, C. Mesropian

Rutgers, the State University of New Jersey, Piscataway, New Jersey, U.S.A.E. Bartz, S.H. Chuang, J. Doroshenko, E. Halkiadakis, P.F. Jacques, D. Khits, A. Lath,A. Macpherson,1 R. Plano, K. Rose, S. Schnetzer, S. Somalwar, R. Stone, T.L. Watts

University of Tennessee, Knoxville, Tennessee, U.S.A.G. Cerizza, M. Hollingsworth, J. Lazoflores, G. Ragghianti, S. Spanier, A. York

Texas A&M University, College Station, Texas, U.S.A.A. Aurisano, A. Golyash, T. Kamon, C.N. Nguyen, J. Pivarski, A. Safonov, D. Toback, M. Wein-berger

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Page 53: Laura Piccolo PASSERELLESworkshops-passerelles.fr/docs/passerelles.pdfBibliographie 89. 6 Introduction. 7 introduction En 2017, ... humanités numériques et design 1 Clavert, Frédéric,

2008 JINST 3 S08004

Institute of Physics Academy of Science, Tbilisi, GeorgiaV. Roinishvili

RWTH Aachen University, I. Physikalisches Institut, Aachen, GermanyR. Adolphi, G. Anagnostou, R. Brauer, W. Braunschweig, H. Esser, L. Feld, W. Karpinski,A. Khomich, K. Klein, C. Kukulies, K. Lübelsmeyer, J. Olzem, A. Ostaptchouk, D. Pan-doulas, G. Pierschel, F. Raupach, S. Schael, A. Schultz von Dratzig, G. Schwering, R. Siedling,M. Thomas, M. Weber, B. Wittmer, M. Wlochal

RWTH Aachen University, III. Physikalisches Institut A, Aachen, GermanyF. Adamczyk, A. Adolf, G. Altenhöfer, S. Bechstein, S. Bethke, P. Biallass, O. Biebel, M. Bonte-nackels, K. Bosseler, A. Böhm, M. Erdmann, H. Faissner,∗ B. Fehr, H. Fesefeldt, G. Fetchenhauer,1

J. Frangenheim, J.H. Frohn, J. Grooten, T. Hebbeker, S. Hermann, E. Hermens, G. Hilgers,K. Hoepfner, C. Hof, E. Jacobi, S. Kappler, M. Kirsch, P. Kreuzer, R. Kupper, H.R. Lampe,D. Lanske,∗ R. Mameghani, A. Meyer, S. Meyer, T. Moers, E. Müller, R. Pahlke, B. Philipps,D. Rein, H. Reithler, W. Reuter, P. Rütten, S. Schulz, H. Schwarthoff, W. Sobek, M. Sowa,T. Stapelberg, H. Szczesny, H. Teykal, D. Teyssier, H. Tomme, W. Tomme, M. Tonutti, O. Tsigenov,J. Tutas,∗ J. Vandenhirtz, H. Wagner, M. Wegner, C. Zeidler

RWTH Aachen University, III. Physikalisches Institut B, Aachen, GermanyF. Beissel, M. Davids, M. Duda, G. Flügge, M. Giffels, T. Hermanns, D. Heydhausen, S. Kalinin,S. Kasselmann, G. Kaussen, T. Kress, A. Linn, A. Nowack, L. Perchalla, M. Poettgens, O. Pooth,P. Sauerland, A. Stahl, D. Tornier, M.H. Zoeller

Deutsches Elektronen-Synchrotron, Hamburg, GermanyU. Behrens, K. Borras, A. Flossdorf, D. Hatton, B. Hegner, M. Kasemann, R. Mankel, A. Meyer,J. Mnich, C. Rosemann, C. Youngman, W.D. Zeuner1

University of Hamburg, Institute for Experimental Physics,Hamburg, GermanyF. Bechtel, P. Buhmann, E. Butz, G. Flucke, R.H. Hamdorf, U. Holm, R. Klanner, U. Pein,N. Schirm, P. Schleper, G. Steinbrück, R. Van Staa, R. Wolf

Institut für Experimentelle Kernphysik, Karlsruhe, GermanyB. Atz, T. Barvich, P. Blüm, F. Boegelspacher, H. Bol, Z.Y. Chen, S. Chowdhury, W. De Boer,P. Dehm, G. Dirkes, M. Fahrer, U. Felzmann, M. Frey, A. Furgeri, E. Gregoriev, F. Hartmann,1

F. Hauler, S. Heier, K. Kärcher, B. Ledermann, S. Mueller, Th. Müller, D. Neuberger, C. Piasecki,G. Quast, K. Rabbertz, A. Sabellek, A. Scheurer, F.P. Schilling, H.J. Simonis, A. Skiba, P. Steck,A. Theel, W.H. Thümmel, A. Trunov, A. Vest, T. Weiler, C. Weiser, S. Weseler,∗ V. Zhukov7

Institute of Nuclear Physics "Demokritos", Aghia Paraskevi, GreeceM. Barone, G. Daskalakis, N. Dimitriou, G. Fanourakis, C. Filippidis, T. Geralis, C. Kalfas,K. Karafasoulis, A. Koimas, A. Kyriakis, S. Kyriazopoulou, D. Loukas, A. Markou, C. Markou,

– vi –

2008 JINST 3 S08004

N. Mastroyiannopoulos, C. Mavrommatis, J. Mousa, I. Papadakis, E. Petrakou, I. Siotis, K. The-ofilatos, S. Tzamarias, A. Vayaki, G. Vermisoglou, A. Zachariadou

University of Athens, Athens, GreeceL. Gouskos, G. Karapostoli, P. Katsas, A. Panagiotou, C. Papadimitropoulos

University of Ioánnina, Ioánnina, GreeceX. Aslanoglou, I. Evangelou, P. Kokkas, N. Manthos, I. Papadopoulos, F.A. Triantis

KFKI Research Institute for Particle and Nuclear Physics,Budapest, HungaryG. Bencze,1 L. Boldizsar, G. Debreczeni, C. Hajdu,1 P. Hidas, D. Horvath,8 P. Kovesarki, A. Laszlo,G. Odor, G. Patay, F. Sikler, G. Veres, G. Vesztergombi, P. Zalan

Institute of Nuclear Research ATOMKI, Debrecen, HungaryA. Fenyvesi, J. Imrek, J. Molnar, D. Novak, J. Palinkas, G. Szekely

University of Debrecen, Debrecen, HungaryN. Beni, A. Kapusi, G. Marian, B. Radics, P. Raics, Z. Szabo, Z. Szillasi,1 Z.L. Trocsanyi, G. Zilizi

Panjab University, Chandigarh, IndiaH.S. Bawa, S.B. Beri, V. Bhandari, V. Bhatnagar, M. Kaur, J.M. Kohli, A. Kumar, B. Singh,J.B. Singh

University of Delhi, Delhi, IndiaS. Arora, S. Bhattacharya,9 S. Chatterji, S. Chauhan, B.C. Choudhary, P. Gupta, M. Jha, K. Ranjan,R.K. Shivpuri, A.K. Srivastava

Bhabha Atomic Research Centre, Mumbai, IndiaR.K. Choudhury, D. Dutta, M. Ghodgaonkar, S. Kailas, S.K. Kataria, A.K. Mohanty, L.M. Pant,P. Shukla, A. Topkar

Tata Institute of Fundamental Research — EHEP, Mumbai, IndiaT. Aziz, Sunanda Banerjee, S. Bose, S. Chendvankar, P.V. Deshpande, M. Guchait,10 A. Gurtu,M. Maity,11 G. Majumder, K. Mazumdar, A. Nayak, M.R. Patil, S. Sharma, K. Sudhakar

Tata Institute of Fundamental Research — HECR, Mumbai, IndiaB.S. Acharya, Sudeshna Banerjee, S. Bheesette, S. Dugad, S.D. Kalmani, V.R. Lakkireddi,N.K. Mondal, N. Panyam, P. Verma

Institute for Studies in Theoretical Physics & Mathematics (IPM),Tehran, IranH. Arfaei, M. Hashemi, M. Mohammadi Najafabadi, A. Moshaii, S. Paktinat Mehdiabadi

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2008 JINST 3 S08004

University College Dublin, Dublin, IrelandM. Felcini, M. Grunewald

Università di Bari, Politecnico di Bari e Sezione dell’ INFN, Bari, ItalyK. Abadjiev, M. Abbrescia, L. Barbone, P. Cariola, F. Chiumarulo, A. Clemente, A. Colaleo,1

D. Creanza, N. De Filippis,25 M. De Palma, G. De Robertis, G. Donvito, R. Ferorelli, L. Fiore,M. Franco, D. Giordano, R. Guida, G. Iaselli, N. Lacalamita, F. Loddo, G. Maggi, M. Maggi,N. Manna, B. Marangelli, M.S. Mennea, S. My, S. Natali, S. Nuzzo, G. Papagni, C. Pinto, A. Pom-pili, G. Pugliese, A. Ranieri, F. Romano, G. Roselli, G. Sala, G. Selvaggi, L. Silvestris,1 P. Tem-pesta, R. Trentadue, S. Tupputi, G. Zito

Università di Bologna e Sezione dell’ INFN, Bologna, ItalyG. Abbiendi, W. Bacchi, C. Battilana, A.C. Benvenuti, M. Boldini, D. Bonacorsi, S. Braibant-Giacomelli, V.D. Cafaro, P. Capiluppi, A. Castro, F.R. Cavallo, C. Ciocca, G. Codispoti, M. Cuf-fiani, I. D’Antone, G.M. Dallavalle, F. Fabbri, A. Fanfani, S. Finelli, P. Giacomelli,12 V. Gior-dano, M. Giunta, C. Grandi, M. Guerzoni, L. Guiducci, S. Marcellini, G. Masetti, A. Montanari,F.L. Navarria, F. Odorici, A. Paolucci, G. Pellegrini, A. Perrotta, A.M. Rossi, T. Rovelli, G.P. Siroli,G. Torromeo, R. Travaglini, G.P. Veronese

Università di Catania e Sezione dell’ INFN, Catania, ItalyS. Albergo, M. Chiorboli, S. Costa, M. Galanti, G. Gatto Rotondo, N. Giudice, N. Guardone,F. Noto, R. Potenza, M.A. Saizu,48 G. Salemi, C. Sutera, A. Tricomi, C. Tuve

Università di Firenze e Sezione dell’ INFN, Firenze, ItalyL. Bellucci, M. Brianzi, G. Broccolo, E. Catacchini, V. Ciulli, C. Civinini, R. D’Alessandro, E. Fo-cardi, S. Frosali, C. Genta, G. Landi, P. Lenzi, A. Macchiolo, F. Maletta, F. Manolescu, C. Marchet-tini, L. Masetti,1 S. Mersi, M. Meschini, C. Minelli, S. Paoletti, G. Parrini, E. Scarlini, G. Sguazzoni

Laboratori Nazionali di Frascati dell’ INFN, Frascati, ItalyL. Benussi, M. Bertani, S. Bianco, M. Caponero, D. Colonna,1 L. Daniello, F. Fabbri, F. Felli,M. Giardoni, A. La Monaca, B. Ortenzi, M. Pallotta, A. Paolozzi, C. Paris, L. Passamonti, D. Pier-luigi, B. Ponzio, C. Pucci, A. Russo, G. Saviano

Università di Genova e Sezione dell’ INFN, Genova, ItalyP. Fabbricatore, S. Farinon, M. Greco, R. Musenich

Laboratori Nazionali di Legnaro dell’ INFN,Legnaro, Italy (Associated Institute)S. Badoer, L. Berti, M. Biasotto, S. Fantinel, E. Frizziero, U. Gastaldi, M. Gulmini,1 F. Lelli,G. Maron, S. Squizzato, N. Toniolo, S. Traldi

– viii –

2008 JINST 3 S08004

Konkuk University, Seoul, KoreaS.Y. Jung, J.T. Rhee

Korea University, Seoul, KoreaS.H. Ahn, B.S. Hong, Y.K. Jeng, M.H. Kang, H.C. Kim, J.H. Kim, T.J. Kim, K.S. Lee, J.K. Lim,D.H. Moon, I.C. Park, S.K. Park, M.S. Ryu, K.-S. Sim, K.J. Son

Seoul National University, Seoul, KoreaS.J. Hong

Sungkyunkwan University, Suwon, KoreaY.I. Choi

Centro de Investigacion y de Estudios Avanzados del IPN, Mexico City, MexicoH. Castilla Valdez, A. Sanchez Hernandez

Universidad Iberoamericana, Mexico City, MexicoS. Carrillo Moreno

Universidad Autonoma de San Luis Potosi, San Luis Potosi, MexicoA. Morelos Pineda

Technische Universiteit Eindhoven, Eindhoven, Netherlands (Associated Institute)A. Aerts, P. Van der Stok, H. Weffers

University of Auckland, Auckland, New ZealandP. Allfrey, R.N.C. Gray, M. Hashimoto, D. Krofcheck

University of Canterbury, Christchurch, New ZealandA.J. Bell, N. Bernardino Rodrigues, P.H. Butler, S. Churchwell, R. Knegjens, S. Whitehead,J.C. Williams

National Centre for Physics, Quaid-I-Azam University, Islamabad, PakistanZ. Aftab, U. Ahmad, I. Ahmed, W. Ahmed, M.I. Asghar, S. Asghar, G. Dad, M. Hafeez,H.R. Hoorani, I. Hussain, N. Hussain, M. Iftikhar, M.S. Khan, K. Mehmood, A. Osman,H. Shahzad, A.R. Zafar

National University of Sciences And Technology,Rawalpindi Cantt, Pakistan (Associated Institute)A. Ali, A. Bashir, A.M. Jan, A. Kamal, F. Khan, M. Saeed, S. Tanwir, M.A. Zafar

Institute of Nuclear Physics, Polish Academy of Sciences, Cracow, PolandJ. Blocki, A. Cyz, E. Gladysz-Dziadus, S. Mikocki, M. Rybczynski, J. Turnau, Z. Wlodarczyk,P. Zychowski

– xi –

2008 JINST 3 S08004

Institute of Experimental Physics, Warsaw, PolandK. Bunkowski, M. Cwiok, H. Czyrkowski, R. Dabrowski, W. Dominik, K. Doroba, A. Kali-nowski, K. Kierzkowski, M. Konecki, J. Krolikowski, I.M. Kudla, M. Pietrusinski, K. Pozniak,16

W. Zabolotny,16 P. Zych

Soltan Institute for Nuclear Studies, Warsaw, PolandR. Gokieli, L. Goscilo, M. Górski, K. Nawrocki, P. Traczyk, G. Wrochna, P. Zalewski

Warsaw University of Technology, Institute of Electronic Systems,Warsaw, Poland (Associated Institute)K.T. Pozniak, R. Romaniuk, W.M. Zabolotny

Laboratório de Instrumentação e Física Experimental de Partículas,Lisboa, PortugalR. Alemany-Fernandez, C. Almeida, N. Almeida, A.S. Araujo Vila Verde, T. Barata Monteiro,M. Bluj, S. Da Mota Silva, A. David Tinoco Mendes, M. Freitas Ferreira, M. Gallinaro, M. Huse-jko, A. Jain, M. Kazana, P. Musella, R. Nobrega, J. Rasteiro Da Silva, P.Q. Ribeiro, M. Santos,P. Silva, S. Silva, I. Teixeira, J.P. Teixeira, J. Varela,1 G. Varner, N. Vaz Cardoso

Joint Institute for Nuclear Research, Dubna, RussiaI. Altsybeev, K. Babich, A. Belkov,∗ I. Belotelov, P. Bunin, S. Chesnevskaya, V. Elsha, Y. Er-shov, I. Filozova, M. Finger, M. Finger Jr., A. Golunov, I. Golutvin, N. Gorbounov, I. Gramenitski,V. Kalagin, A. Kamenev, V. Karjavin, S. Khabarov, V. Khabarov, Y. Kiryushin, V. Konoplyanikov,V. Korenkov, G. Kozlov, A. Kurenkov, A. Lanev, V. Lysiakov, A. Malakhov, I. Melnitchenko,V.V. Mitsyn, K. Moisenz, P. Moisenz, S. Movchan, E. Nikonov, D. Oleynik, V. Palichik, V. Pere-lygin, A. Petrosyan, E. Rogalev, V. Samsonov, M. Savina, R. Semenov, S. Sergeev,17 S. Shmatov,S. Shulha, V. Smirnov, D. Smolin, A. Tcheremoukhine, O. Teryaev, E. Tikhonenko, A. Urkinbaev,S. Vasil’ev, A. Vishnevskiy, A. Volodko, N. Zamiatin, A. Zarubin, P. Zarubin, E. Zubarev

Petersburg Nuclear Physics Institute, Gatchina (St Petersburg), RussiaN. Bondar, Y. Gavrikov, V. Golovtsov, Y. Ivanov, V. Kim, V. Kozlov, V. Lebedev, G. Makarenkov,F. Moroz, P. Neustroev, G. Obrant, E. Orishchin, A. Petrunin, Y. Shcheglov, A. Shchetkovskiy,V. Sknar, V. Skorobogatov, I. Smirnov, V. Sulimov, V. Tarakanov, L. Uvarov, S. Vavilov,G. Velichko, S. Volkov, A. Vorobyev

High Temperature Technology Center of Research & Development Institute of Power Engi-neering, (HTTC RDIPE),Moscow, Russia (Associated Institute)D. Chmelev, D. Druzhkin,1 A. Ivanov, V. Kudinov, O. Logatchev, S. Onishchenko, A. Orlov,V. Sakharov, V. Smetannikov, A. Tikhomirov, S. Zavodthikov

– xii –

2008 JINST 3 S08004

Institute for Nuclear Research, Moscow, RussiaYu. Andreev, A. Anisimov, V. Duk, S. Gninenko, N. Golubev, D. Gorbunov, M. Kirsanov,N. Krasnikov, V. Matveev, A. Pashenkov, A. Pastsyak, V.E. Postoev, A. Sadovski, A. Skassyrskaia,Alexander Solovey, Anatoly Solovey, D. Soloviev, A. Toropin, S. Troitsky

Institute for Theoretical and Experimental Physics, Moscow, RussiaA. Alekhin, A. Baldov, V. Epshteyn, V. Gavrilov, N. Ilina, V. Kaftanov,∗ V. Karpishin, I. Kiselevich,V. Kolosov, M. Kossov,1 A. Krokhotin, S. Kuleshov, A. Oulianov, A. Pozdnyakov, G. Safronov,S. Semenov, N. Stepanov, V. Stolin, E. Vlasov,1 V. Zaytsev

Moscow State University, Moscow, RussiaE. Boos, M. Dubinin,18 L. Dudko, A. Ershov, G. Eyyubova, A. Gribushin, V. Ilyin, V. Klyukhin,O. Kodolova, N.A. Kruglov, A. Kryukov, I. Lokhtin, L. Malinina, V. Mikhaylin, S. Petrushanko,L. Sarycheva, V. Savrin, L. Shamardin, A. Sherstnev, A. Snigirev, K. Teplov, I. Vardanyan

P.N. Lebedev Physical Institute, Moscow, RussiaA.M. Fomenko, N. Konovalova, V. Kozlov, A.I. Lebedev, N. Lvova, S.V. Rusakov, A. Terkulov

State Research Center of Russian Federation - Institute for High Energy Physics, Protvino,RussiaV. Abramov, S. Akimenko, A. Artamonov, A. Ashimova, I. Azhgirey, S. Bitioukov, O. Chikilev,K. Datsko, A. Filine, A. Godizov, P. Goncharov, V. Grishin,1 A. Inyakin,19 V. Kachanov, A. Kalinin,A. Khmelnikov, D. Konstantinov, A. Korablev, V. Krychkine, A. Krinitsyn, A. Levine, I. Lobov,V. Lukanin, Y. Mel’nik, V. Molchanov, V. Petrov, V. Petukhov, V. Pikalov, A. Ryazanov, R. Ryutin,V. Shelikhov, V. Skvortsov, S. Slabospitsky, A. Sobol, A. Sytine, V. Talov, L. Tourtchanovitch,S. Troshin, N. Tyurin, A. Uzunian, A. Volkov, S. Zelepoukine20

Electron National Research Institute, St Petersburg, Russia (Associated Institute)V. Lukyanov, G. Mamaeva, Z. Prilutskaya, I. Rumyantsev, S. Sokha, S. Tataurschikov, I. Vasilyev

Vinca Institute of Nuclear Sciences, Belgrade, SerbiaP. Adzic, I. Anicin,21 M. Djordjevic, D. Jovanovic,21 D. Maletic, J. Puzovic,21 N. Smiljkovic1

Centro de Investigaciones Energeticas Medioambientales y Tecnologicas (CIEMAT), Madrid,SpainE. Aguayo Navarrete, M. Aguilar-Benitez, J. Ahijado Munoz, J.M. Alarcon Vega, J. Alberdi,J. Alcaraz Maestre, M. Aldaya Martin, P. Arce,1 J.M. Barcala, J. Berdugo, C.L. Blanco Ramos,C. Burgos Lazaro, J. Caballero Bejar, E. Calvo, M. Cerrada, M. Chamizo Llatas, J.J. Cher-coles Catalán, N. Colino, M. Daniel, B. De La Cruz, A. Delgado Peris, C. Fernandez Bedoya,A. Ferrando, M.C. Fouz, D. Francia Ferrero, J. Garcia Romero, P. Garcia-Abia, O. Gonza-lez Lopez, J.M. Hernandez, M.I. Josa, J. Marin, G. Merino, A. Molinero, J.J. Navarrete, J.C. Oller,J. Puerta Pelayo, J.C. Puras Sanchez, J. Ramirez, L. Romero, C. Villanueva Munoz, C. Willmott,C. Yuste

– xiii –

2008 JINST 3 S08004

The Ohio State University, Columbus, Ohio, U.S.A.B. Bylsma, L.S. Durkin, J. Gilmore, J. Gu, P. Killewald, T.Y. Ling, C.J. Rush, V. Sehgal,G. Williams

Princeton University, Princeton, New Jersey, U.S.A.N. Adam, S. Chidzik, P. Denes,47 P. Elmer, A. Garmash, D. Gerbaudo, V. Halyo, J. Jones,D. Marlow, J. Olsen, P. Piroué, D. Stickland, C. Tully, J.S. Werner, T. Wildish, S. Wynhoff,∗ Z. Xie

University of Puerto Rico, Mayaguez, Puerto Rico, U.S.A.X.T. Huang, A. Lopez, H. Mendez, J.E. Ramirez Vargas, A. Zatserklyaniy

Purdue University, West Lafayette, Indiana, U.S.A.A. Apresyan, K. Arndt, V.E. Barnes, G. Bolla, D. Bortoletto, A. Bujak, A. Everett, M. Fahling,A.F. Garfinkel, L. Gutay, N. Ippolito, Y. Kozhevnikov,1 A.T. Laasanen, C. Liu, V. Maroussov,S. Medved, P. Merkel, D.H. Miller, J. Miyamoto, N. Neumeister, A. Pompos, A. Roy, A. Sedov,I. Shipsey

Purdue University Calumet, Hammond, Indiana, U.S.A.V. Cuplov, N. Parashar

Rice University, Houston, Texas, U.S.A.P. Bargassa, S.J. Lee, J.H. Liu, D. Maronde, M. Matveev, T. Nussbaum, B.P. Padley, J. Roberts,A. Tumanov

University of Rochester, Rochester, New York, U.S.A.A. Bodek, H. Budd, J. Cammin, Y.S. Chung, P. De Barbaro,1 R. Demina, G. Ginther, Y. Gotra,S. Korjenevski, D.C. Miner, W. Sakumoto, P. Slattery, M. Zielinski

The Rockefeller University, New York, New York, U.S.A.A. Bhatti, L. Demortier, K. Goulianos, K. Hatakeyama, C. Mesropian

Rutgers, the State University of New Jersey, Piscataway, New Jersey, U.S.A.E. Bartz, S.H. Chuang, J. Doroshenko, E. Halkiadakis, P.F. Jacques, D. Khits, A. Lath,A. Macpherson,1 R. Plano, K. Rose, S. Schnetzer, S. Somalwar, R. Stone, T.L. Watts

University of Tennessee, Knoxville, Tennessee, U.S.A.G. Cerizza, M. Hollingsworth, J. Lazoflores, G. Ragghianti, S. Spanier, A. York

Texas A&M University, College Station, Texas, U.S.A.A. Aurisano, A. Golyash, T. Kamon, C.N. Nguyen, J. Pivarski, A. Safonov, D. Toback, M. Wein-berger

– xxi –

2008 JINST 3 S08004

Texas Tech University, Lubbock, Texas, U.S.A.N. Akchurin, L. Berntzon, K.W. Carrell, K. Gumus, C. Jeong, H. Kim, S.W. Lee, B.G. Mc Gonag-ill, Y. Roh, A. Sill, M. Spezziga, R. Thomas, I. Volobouev, E. Washington, R. Wigmans, E. Yazgan

Vanderbilt University, Nashville, Tennessee, U.S.A.T. Bapty, D. Engh, C. Florez, W. Johns, T. Keskinpala, E. Luiggi Lopez, S. Neema, S. Nordstrom,S. Pathak, P. Sheldon

University of Virginia, Charlottesville, Virginia, U.S.A.D. Andelin, M.W. Arenton, M. Balazs, M. Buehler, S. Conetti, B. Cox, R. Hirosky, M. Humphrey,R. Imlay, A. Ledovskoy, D. Phillips II, H. Powell, M. Ronquest, R. Yohay

University of Wisconsin, Madison, Wisconsin, U.S.A.M. Anderson, Y.W. Baek, J.N. Bellinger, D. Bradley, P. Cannarsa, D. Carlsmith, I. Crotty,1

S. Dasu, F. Feyzi, T. Gorski, L. Gray, K.S. Grogg, M. Grothe, M. Jaworski, P. Klabbers, J. Klukas,A. Lanaro, C. Lazaridis, J. Leonard, R. Loveless, M. Magrans de Abril, A. Mohapatra, G. Ott,W.H. Smith, M. Weinberg, D. Wenman

Yale University, New Haven, Connecticut, U.S.A.G.S. Atoian, S. Dhawan, V. Issakov, H. Neal, A. Poblaguev, M.E. Zeller

Institute of Nuclear Physics of the Uzbekistan Academy of Sciences, Ulugbek, Tashkent,UzbekistanG. Abdullaeva, A. Avezov, M.I. Fazylov, E.M. Gasanov, A. Khugaev, Y.N. Koblik, M. Nishonov,K. Olimov, A. Umaraliev, B.S. Yuldashev

1Also at CERN, European Organization for Nuclear Research, Geneva, Switzerland2Now at Universidade Federal do ABC, Santo Andre, Brazil3Now at Laboratoire de l’Accélérateur Linéaire, Orsay, France4Now at CERN, European Organization for Nuclear Research, Geneva, Switzerland5Also at Université de Haute-Alsace, Mulhouse, France6Also at Université Louis Pasteur, Strasbourg, France7Also at Moscow State University, Moscow, Russia8Also at Institute of Nuclear Research ATOMKI, Debrecen, Hungary9Also at University of California, San Diego, La Jolla, U.S.A.

10Also at Tata Institute of Fundamental Research - HECR, Mumbai, India11Also at University of Visva-Bharati, Santiniketan, India12Also at University of California, Riverside, Riverside, U.S.A.13Also at Centro Studi Enrico Fermi, Roma, Italy14Also at ENEA - Casaccia Research Center, S. Maria di Galeria, Italy15Now at Università del Piemonte Orientale, Novara, Italy

– xxii –

2008 JINST 3 S08004

16Also at Warsaw University of Technology, Institute of Electronic Systems,Warsaw, Poland

17Also at Fermi National Accelerator Laboratory, Batavia, U.S.A.18Also at California Institute of Technology, Pasadena, U.S.A.19Also at University of Minnesota, Minneapolis, U.S.A.20Also at Institute for Particle Physics, ETH Zurich, Zurich, Switzerland21Also at Faculty of Physics of University of Belgrade, Belgrade, Serbia22Now at Instituto de Física de Cantabria (IFCA), CSIC-Universidad de Cantabria,

Santander, Spain23Also at Institut für Experimentelle Kernphysik, Karlsruhe, Germany24Also at National Centre for Physics, Quaid-I-Azam University, Islamabad, Pakistan25Also at Laboratoire Leprince-Ringuet, Ecole Polytechnique, IN2P3-CNRS,

Palaiseau, France26Also at Alstom Contracting, Geneve, Switzerland27Also at Scuola Normale Superiore and Sezione INFN, Pisa, Italy28Also at University of Athens, Athens, Greece29Also at Institute of High Energy Physics and Informatization, Tbilisi State University,

Tbilisi, Georgia30Also at Institute for Theoretical and Experimental Physics, Moscow, Russia31Also at Central Laboratory of Mechatronics and Instrumentation, Sofia, Bulgaria32Also at Paul Scherrer Institut, Villigen, Switzerland33Also at Vinca Institute of Nuclear Sciences, Belgrade, Serbia34Also at Institute for Nuclear Research and Nuclear Energy, Sofia, Bulgaria35Also at State Research Center of Russian Federation - Institute for High Energy Physics,

Protvino, Russia36Also at Nigde University, Nigde, Turkey37Also at Mersin University, Mersin, Turkey38Also at Marmara University, Istanbul, Turkey39Also at Kafkas University, Kars, Turkey40Also at Suleyman Demirel University, Isparta, Turkey41Also at Ege University, Izmir, Turkey42Also at Rutherford Appleton Laboratory, Didcot, United Kingdom43Also at KFKI Research Institute for Particle and Nuclear Physics, Budapest, Hungary44Also at University of Debrecen, Debrecen, Hungary45Also at Mugla University, Mugla, Turkey46Also at Institute for Nuclear Research, Moscow, Russia47Now at Lawrence Berkeley National Laboratory, Berkeley, U.S.A.48Now at National Institute of Physics and Nuclear Engineering, Bucharest, Romania49Also at University of Ruhuna, Matara, Sri Lanka∗Deceased

Corresponding author: Roberto Tenchini ([email protected])

– xxiii –

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55 quelles solutions  ?

64 « Quand designers et chercheurs travaillent ensemble », op. cit.

Si tous ces points de tension sont récurrents dans les collaborations, il est à présent nécessaire d’identifier les possibilités en terme de solutions. Tout d’abord, existe-t-il des façons de surmonter ou d’atténuer les problèmes énoncés plus tôt ? Les différentes personnes que j’ai rencontrées dans le cadre de mes recherches m’ont fait comprendre que oui, même si certaines semblent relever de l’anecdote. Ici les réponses étudiées seront réparties en deux grandes catégories : des solutions à long terme, qui s’inscrivent dans le contexte global des humanités numériques, et qui s’amorcent en amont et autour du processus collaboratif ; puis des solutions plus immédiates, à mettre en place au moment-même de la collaboration.

1  — Les solutions à long terme L’expérience par imprégnation

Tout d’abord, un constat commun semble ressortir de tous les témoignages que j’ai pu rassembler : avec l’expérience, la perception portée sur les autres pratiques devient plus juste, et la compréhension grandit.

Le designer Clément Gault a ainsi pu observer que plus les diffé-rents acteurs ont pris l’habitude de croiser leurs pratiques avec d’autres (issues de disciplines différentes), plus leur collaboration est aisée. Avec le temps « chacun semble adopter les modes de communication de l’autre ». Il cite notamment le cas d’un chercheur qui, à force de travailler avec des designers au cours de sa carrière, a adopté leurs méthodes de travail, telles que l’utilisation de visuels pour partager ses recherches. On voit naître chez le chercheur une pensée visuelle, plus couramment attribuée au designer. Petit à petit, les rapports de force s’effacent et laissent place à une sensibilité et des compétences nouvelles.

On peut distinguer deux phases dans l’acquisition d’expérience. Premièrement, une phase d’observation est nécessaire. Prenons l’exemple des débuts du projet VÉgA. Nicolas Chauveau explique que les membres d’Intactile Design ont passé des journées entières à observer les égyptologues derrière leurs ordinateurs, avant

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65 Échanges avec Johannes Krtek.

d’engager la phase de réflexion sur l’interface à créer. Cela leur a permis de comprendre comment les chercheurs utilisaient leurs outils, mais aussi de se détacher des idées préconçues. À cette occasion, ils ont découvert, par exemple, la façon dont les égyptologues utilisent un dictionnaire : non pas par signes, comme le veut l’usage traditionnel, mais par un système de valeurs phonétiques qui leur est propre. Cet aspect essentiel de l’égyptologie leur était indispensable à con- naitre avant de travailler ensemble à la construction numérique d’un dictionnaire !

Il est possible de faire perdurer l’aisance relationnelle à travers des fréquentations durables, que le designer Johannes Krtek qualifie également de « collaborations stratégiques », qui consistent à travailler avec les mêmes personnes (d’autres disciplines) pendant plusieurs années.

Dans un même registre, Nicolas Chauveau explique qu’il est toujours plus confortable de travailler avec les programmeurs basés dans son studio qu’avec n’importe quels autres programmeurs à distance. Cela implique évidemment la question de proximité, puisque leurs ingénieurs travaillent dans les mêmes locaux qu’eux ; mais aussi les habitudes prises dans la façon de dialoguer et dans les méthodes, qui rendent la communication et la collaboration plus simples. Le temps nécessaire à la formation d’habitudes est donc une forme de réponse au problème.

Les universités au Royaume-Uni semblent avoir bien saisi cet enjeu, et

Moteur de recherche de la plateforme VÉgA ( https://vega.arcanae.fr )

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57 quelles solutions  ?

66 Témoignage récolté lors du THATCamp Valence.

Diana Maynard décrit une méthode appliquée dans leurs programmes, permettant d’expérimenter l’inter-disciplinarité dès le stade étudiant.

« À Schaeffer, nous possédons un centre multidisciplinaire, afin que les doctorants s’exercent. Chacun des doctorants doit trouver un projet pluridisciplinaire qui combine les disciplines de deux départe-ments (et même trois de préférence). […] Les étudiants doivent ainsi collaborer entre départements. Parmi les nombreuses sessions mises en place, j’aime particulièrement celle où l'on demande aux étudiants de former des binômes. Ils doivent ensuite expliquer leur sujet ou un sujet proche de leur thèse à l’autre étudiant, assez bien pour que ce dernier puisse à son tour l’expliquer au reste des doctorants présents. Ils apprennent ainsi à expliquer leur sujet. […] Je trouve ça remarquable, par exemple pour des étudiants en ingénierie qui doivent comprendre comment les humanités fonctionnent et quelles sont leurs approches des projets ».

Cette proposition laisse penser que de nouveaux modèles sont envisageables en intégrant également la question du design. Cela n’impliquerait pas seulement un déplacement géographique depuis l’Angleterre, mais aussi un déplacement dans un système où la culture (cf. Johanna Drucker p.23) les logiques universitaires, économiques et politiques sont bien différentes.

Double cursus

Les échanges et l’explication semblent être des procédés utiles, mais il existe également une autre façon de mieux appréhender une discipline inconnue, c’est de la pratiquer.

Cela parait évident et à la fois, il semble difficile de demander cet effort à l’ensemble des acteurs des humanités numériques. Tous les ingé- nieurs ne peuvent pas pratiquer les humanités ni le design, et vice versa. Cependant, certaines tentatives sont faites pour aller dans ce sens à l’université. Hélas, ce sont quasiment toujours les étudiants en SHS qui doivent se pencher sur les sciences des données, et non l’inverse — et ne

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67 espinosa-oviedo, Javier A., varGas-solar, Genoveva, alexandrov, Vassil, Castel, Géraldine, « Comparing Electoral Campaigns by Analysing Online Data », [En ligne], 2016. URL : https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1877050916309656?via%3Dihub, consulté le 13 octobre 2018.

parlons pas du design ! Mais lorsqu’une collaboration inclut des acteurs ayant acquis ce double-profil, l’impact sur le processus est non négligeable.

Au THATCamp Valence, deux personnes ayant travaillé ensemble en avaient fait l’expérience : Géraldine Castel, chercheuse en littérature anglaise, et Genoveva Vargas-Solar, ingénieure en big data. La première mentionne la difficulté pour trouver, au sein de son université (UGA), des ingénieurs-chercheurs intéressés par le champ des humanités numériques. Non pas parce qu’il n’y en a pas ou peu, mais parce qu’il n’est pas évident de les identifier dans la masse de chercheurs présents à l’université. Puis, elle exprime sa gratitude envers Genoveva Vargas-Solar et Javier A.Espinosa-Oviedo, ingénieurs qui ont travaillé avec elle. Ainsi, ils ont particulièrement bien réalisé la passerelle entre leur discipline et la sienne et réussi à comprendre tant ses logiques que son processus de travail et l’enjeu de ses recherches.

Ensemble, ils ont travaillé à la production d’une collection de données nettoyées et prêtes à être utilisées par tous les chercheurs (et/ou politiciens). Leurs recherches portent sur la conception d’un système de comparaison de campagnes électorales grâce à l’analyse de données en ligne . Il s’agit d’une réflexion théorique sur tous les aspects qu’engendrerait un tel système de comparaison, tant au niveau des différents coûts (stockage, temps, etc.) que des différentes opportunités (informations en temps réel, diffusion ciblée de contenus, etc.).

À son tour, Genoveva Vargas-Solar explique qu’en réalité, elle possède deux doctorats : un en ingénierie des données et l’autre en littérature. Elle affirme que cela l’aide beaucoup dans ses collaborations, car effectivement, les deux domaines sont très différents. En tant qu’ingénieure (puisque c’est aujourd’hui sa discipline dominante ) elle invite ses pairs, qu’elle entend souvent dire « tout le monde doit apprendre à coder », à se former en retour aux pratiques des humanités.

Un profil plus courant cependant reste le designer-codeur. Cette formule n’implique évidemment pas que le niveau en program-mation soit aussi élevé que celui des ingénieurs dont c’est le métier, maisc’est une double compétence de plus en plus fréquente chez les designers aujourd’hui. C’est le cas de Johannes Krtek qui explique

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59 quelles solutions  ?

68 Échanges avec Johannes Krtek.

69 Disponible en ligne : http://www.palaeographia.org/graphoskop.

comment les choses fonctionnent dans son équipe de travail (chez Zotero, aux États-Unis) au quotidien.

« Si l’on parle du dialogue designer versus développeur : plus chacun possède un peu des compétences de l’autre, plus c’est simple. Par conséquent, avoir des personnes dans l’équipe qui peuvent agir en temps que médiateur, qui peuvent créer la passerelle entre les deux domaines, est un point fort pour minimiser la friction. Je fais moi-même office de passerelle depuis de nombreuses années. Dans ma pratique, cela se traduit non plus seulement par le design d’interfaces utilisateur, mais aussi par l’implémentation de celles-ci, qui demande des compétences traditionnellement situées plutôt du côté du programmeur. Aujourd’hui, les équipes de Zotero et Tropy cherchent des designers possédant ces compétences techniques — ce qui semble être une approche judicieuse pour permettre d’anticiper et de minimiser les problèmes de collaboration ».

La double compétence, ou au moins une introduction aux pratiques, semble donc être un atout indéniable chez les acteurs des humanités numériques.

Il existe un Master en France, à l’UGA, qui forme des ingénieurs à être les intermédiaires entre linguistes et informaticiens : le Master « Industrie de la langue ». Même s’il ne semble exister de telle formation que pour certains champs spécifiques des SHS, on pourrait imaginer que se développe le même principe pour d’autres disciplines.

Un compte rendu du THATCamp Paris 2012 évoque également la question des historiens-programmeurs. Le sujet est introduit par l’exemple de Maria Guarado, chercheuse en histoire médievale et initiatrice du projet Graphoskop . Cet outil informatique est destiné à aider les paléographes dans l’analyse des écritures anciennes, grâce aux données métriques relevées sur un document numérisé.

« Elle s’est adressée à un informaticien qui a développé un plug-in qui répondait à ses besoins. L’expérience — une discussion entre historienne et développeur — a été riche. Avec surprise, elle a rapidement

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70 Non-actes de la non-conférence des humanités numériques, op. cit., p.36.

71 Ibid, p.37.

72 Ibid, p.38.

73 Girard, Paul, « Des humanités collaboratives », conférence lors de la journée d’étude DHnord 2018 – Quelles collaborations au sein des structures dédiées aux humanités numériques ? à la MESHS (Maison européenne des sciences de l’homme et de la société de Lille) du 15 au 17 octobre 2018, [En ligne] : https://medialab.sciencespo.fr/fr/publications/des-huma-nites-collaboratives/.

constaté que l’informaticien lui faisait part de nouvelles perspectives sur l’interprétation des manuscrits médiévaux. Elle a par la suite suivi une formation en Java pour mieux communiquer avec [lui] ». Après discussion, il est clair que l’expérience de cette chercheuse a été fructueuse, et que ce type de compétence devrait idéalement s’étendre dans la communauté des historiens. Le passage se clôt sur l’importance pour l’historien d’avoir « les compétences nécessaires pour exploiter la richesse des documents disponibles ».

Également, il est établi que « la moindre des choses est qu’il y ait une culture partagée : les informaticiens doivent connaître les sciences humaines et sociales, la culture des chercheurs avec qui [ils] travaille[nt]. Quant à la culture informatique des chercheurs, elle doit venir de loin, dès la maternelle ». L’expression la moindre des choses, signale que la proposition formulée ici n’est plus un souhait mais un réel besoin, et ce pour l’ensemble de la communauté des SHS.

Le clivage entre cette perspective et la situation actuelle rappelle à nouveau le problème de ségrégation disciplinaire dans le monde univer- sitaire, évoqué par Thomas Lebarbé, Éric Ferrante ou Géraldine Castel. Paul Girard de MediaLab parle alors de la “ contradiction de l’hybri-dation ” : l’hybridation des champs de pratiques peut s’avérer dangereuse (en amenant frustration et complexité), mais elle représente à la fois précisement ce dont nous avons besoin dans les collaborations en humanités numériques.

Nicolas Henchoz et Yves Mirande, fondateurs de l’EPFL+ECAL Lab — laboratoire regroupant les écoles d’ingénieur (EPFL) et d’art (ECAL) de Lausanne, afin de mettre en place des projets collabo- ratifs — le rappellent également dans leur ouvrage Les ruptures fertiles :

« Il est important de ne pas tomber dans la confusion. À chacun son métier. Il y a une tendance où tout le monde sait tout. Le truc le plus dangereux, c’est quand le designer fait de l’ingénierie et inversement. Les outils sont devenus accessibles, mais ils ne donnent pas le regard, la culture, le métier ».

Gestion du temps et de l’espace

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74 henChoZ, Nicolas et mirande, Yves, Les ruptures fertiles : design et innovation disruptive, Suisse, Lausanne : Presses Polytechniques et Universitaires Romandes, 2014.

Un autre aspect fondamental et très pragmatique de la collaboration est la gestion du temps et de l’espace. Il ressort, comme je l’ai évoqué au début de ce mémoire, que le plus important est que chacun des collaborateurs intègre le processus de travail dès le départ. Au fur et à mesure de son avancement, le projet perd en maléabilité, et il devient de plus en plus difficile de venir s’y greffer, avec ses outils, méthodes etc.

Mais il existe d’autres façons, basées sur la gestion du temps et de l’espace qui permettent sur le long terme d’instaurer un climat propice à la collaboration.

Le MediaLab de Sciences Po Paris est une bonne référence en la matière. Ce laboratoire de recherche en sciences humaines et sociales — mais aussi d'étude sur les méthodologies de recherche — réunit des ingénieurs, des chercheurs en SHS et des designers. Ces acteurs se divisent en deux catégories : les structures de recherche (comprenant les chercheurs et leurs étudiants, dont les projets scienti-fiques dirigent les pratiques du laboratoire) et les structures d’appui à la recherche (qui comprennent les designers et les ingénieurs). Cela rejoint ce que nous avons évoqué plus tôt, sur le fait que cer- tains acteurs font de la recherche et d’autres font partie du processus de recherche. Au vu des croisements inter-disciplinaires quotidiens qu’impliquent sa structure, le MediaLab a mis en place un certain nombre d’initiatives afin faciliter les collaborations. Le cadre du MediaLab étant assez spécifique, il ne sera pas possible de transposer ces dispositifs dans tous les contextes, mais il reste tout de même intéressant de les mentionner.

Au niveau de l’organisation spatiale : pas de ségrégation par discipline dans salles de travail. Les personnes y travaillant sont invitées à changer régulièrement d’espace afin de se rencontrer et de mieux se connaître — au niveau personnel (ce qui semble pertinent) et au niveau profes-sionnel. Ainsi, de la même façon que les designers de VÉgA observaient les égyptologues pour mieux les comprendre, il semble stratégique de faire co-habiter des personnes de disciplines différentes dans leur

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75 Graves, Guillian (ENSCI) & mélo, Michka (EPFL), Versus ? : cahier de laboratoire, Mémoire de fin d’études à l’ENSCI-les Ateliers, volume 2/2, 2012, p.140.

environnement de travail.Au niveau de l’organisation temporelle, des événements hebdoma-

daire rythment le laboratoire. Des déjeuners collectifs sont organisés chaque semaine, permettant aux différents acteurs d’échanger (plan personnel), ainsi que des séminaires, tous les mardis, au cours desquels une personne (peut importe la discipline) vient présenter ses recherches.

Ces dispositifs d’organisation laissent penser, au-delà de leur perti-nence sur l’aspect professionel, que le plan personnel n’est pas indifférent, car le plan humain, même s’il est peu abordé dans ce mémoire, reste un aspect essentiel de tout travail collaboratif.

2 — Les outils

Mais tout le monde n’est pas designer-codeur, littéraire-programmeur, ou sociologue-designer et il faut bien commencer quelque part (sans expérience). À cette fin, les acteurs des humanités numériques ont expérimenté, au fur et à mesure de leurs collaborations, un certain nombre d’outils, adaptés pendant le processus collaboratif. En voici quelques-uns.

Langage : le lexique

« Un outil, deux vocabulaires = problème » — Versus ? Chaque discipline possède dans son lexique une part de notions spéci-fiques, ce qui peut rapidement poser problème, et être la source d’incom-préhensions. Ce type de difficulté n’étant pas propre aux collaborations en humanités numériques, j’évoque une collaboration incluant des sciences dures (et non des SHS), car l’exemple du projet Versus ? me parait particulièrement pertinent.

Versus ? est un cahier de laboratoire documentant une expérience qui s’est déroulée à l’EPFL+ECAL Lab, entre un designer d’objet (Guillian Graves) et un scientifique (Michka éelo). Deux objets ont été produits à la suite de ce travail : une bouilloire et son système de chauffe.

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63 quelles solutions  ?

76 Les ruptures fertiles : design et innovation disruptive, op. cit., p.54.

77 Versus ? : cahier de laboratoire, op. cit., p.140.

78 Ibid., p.141.

79 Ibid., p.141.

Au-delà de l’aspect classique du carnet de laboratoire, « chacun [y]exprime à tour de rôle l’évolution du projet, ses incompréhensions, ses doutes ». Dans le cadre de cette collaboration, c’est souvent le designer qui va être amené à apprendre des nouveaux termes, que le scientifique illustre par des métaphores non scientifiques. Les deux partenaires soulèvent des questions communes telles que : « Qui doit s’adapter à qui ? » ou « Comment rendre accessible le langage scientifique aux concepteurs ? ». Ils émettent enfin l’idée de « travailler sur un système de représentation des termes nécessaires » à la compréhension du langage scientifique par le designer.

Le cahier présente dès le départ un glossaire commun : une liste de mots partagés dans les deux disciplines, mais qui prennent un sens (légèrement ou très différent) selon la discipline. On y trouve des termes spécifiques au projet comme la distinction entre bionique, biophysique et biomimétisme, mais aussi des réflexions sur des notions plus globales telles que démarche ou problématique (pour les sciences dures, elle est tirée de la transposition d’une observation sur un système, tandis que pour le design, elle est tirée des observations contextualisées à un environnement humain - il y a une différence d’échelle). Revenons à présent au contexte des humanités numériques, avec

Coupe de la bouilloire Nautile réalisée par Michka Mélo et Guillian Graves à la suite de Versus ? Source : http://bigbang-project.com

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VERSUS ?CAHIER DE LABORATOIRE

La limite technologique limite le design ?

Après avoir émis plusieurs hypothèses sur les problématiques que nous pourrions aborder (substitution de matières premières, consommables, matériaux de construction, etc.), nous nous sommes confrontés au problème de la limite technologique. Bien que de nombreux principes biomimétiques existent, ils ne se sont révélés l’être que théoriquement ou en phase de recherche. Or, comment concevoir de tels objets si nous n’avons pas ou peu accès aux informations liées à ces technologies ? J’ai pour habitude de ne jamais me donner de limites au cours d’un projet, il doit forcément exister une solution ou une « pirouette » qui nous permettrait d’arriver au résultat souhaité. Mais lorsque l’on parle de technologie, je ne peux malheureusement plus aborder les questions posées avec le même raisonnement logique. Comment contourner ce problème ? Comment le designer peut-il contourner au maximum cette limite ?

Trouvailles du jour :

. Greenloop. Le projet CO2SolStock consiste à transformer les émissions de CO2 issues de la combustion des énergies fossiles en roche solide. C’est suite à la découverte de cette fonction de biominéralisation chez un micro-organisme « construisant » les roches des falaises de craie que cette transformation devient possible. http://www.co2solstock.eu/

Guillian

Aujourd’hui, Jeudi 15 septembre, Paris

Pages 14 et 15 de Versus ?.Disponible en ligne : https://issuu.com/guillian_graves/docs/versus

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VERSUS ?CAHIER DE LABORATOIRE

Définitions.

Commençons par définir le concept même de biomimétisme. Devons-nous le définir au sens de Janine Benyus et al., comme distinct de la bio-utilisation ou de la bioassistance ? Nous optons finalement pour les définitions suivantes :Bio-inspiration : ensemble des approches s’inspirant du fonctionnement des systèmes vivants.Bionique : approche bio-inspirée visant à produire des systèmes artificiels technologiquement performants en s’inspirant des systèmes vivants.Biomimétisme : approche bio-inspirée visant à produire des systèmes artificiels environnementalement performants en s’inspirant des systèmes vivants. Nous entendons « environnementalement performant » comme « performant au sens du développement durable ».

En design, la problématique est humaine. Alors qu’en science, elle peut-être de tout type, en design, la problématique se rapporte directement à une question humaine. Par exemple, les problématiques que j’avais imaginées, telles que l’auto-assemblage ou la création d’un NanoBioFabLab ne sont pas des problématiques au sens du design. Une problématique sera plutôt : comment écrire ? Comment s’habiller ? Comment s’asseoir ? En clair, comment répondre à un besoin humain ?

Réflexion autour de l’outil.

Avant notre rencontre, je m’interrogeais sur la forme de l’outil de conception que nous souhaitons développer comme une synthèse de notre approche. Après discussion, nous nous sommes entendus sur une cartographie à cinq dimensions :

Une entrée « problématique »Une entrée « taxonomie des fonctions du vivant »Une entrée « principes du vivant »Une entrée « écologie industrielle »Une entrée « bioéthique »Les deux dernières sont arrivées plus tard dans la réflexion.

Limite technologique. Après notre rencontre sur la notion de problématique, nous en avons listé quelques-unes, telles que la substitution du papier, la bio-production de l’encre, ou l’auto-assemblage de la nacre dans le but de confectionner des objets. Nous avons poursuivi cette phase exploratoire par une brève recherche et nous nous sommes assez vite heurtés à une barrière technologique assez problématique. Presque aucune information sur la salive des guêpes, qui semble être importante dans la diversité des qualités de papiers obtenues (par contre, une excellente clé d’identification des nids selon l’espèce...). Difficile également de trouver de l’information précise et technique sur l’encre ou la nacre et les bio-procédés liés à ces matériaux.

Michka

Aujourd’hui, Jeudi 15 septembre, Paris

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80 Échanges avec Anthon Astrom (designer-codeur chez A/Z Studio), octobre 2018.

81 Ibid.

Anthon Astrom, membre fondateur d'A/Z studio. Ce studio travaille principalement sur des objets hybrides, entre imprimé et numérique, questionnant l’articulation du numérique et des autres champs de pratiques. Dans nombre de leurs projets, Lucas Zimmer et Anthon Astrom travaillent en collaboration avec d’autres disciplines — par exemple des documentalistes dans le Werkbank, Library Research Project. Ce travail a été réalisé à la suite d’un workshop réflexif sur les pratiques des utilisateurs dans les bibliothèques. Il prend la forme d’un système permettant de mémoriser la mise en place d’un espace de travail évolutif — avec un corpus, des notes, des scans d’images, des liens entre les textes etc. — tout en gardant une trace de son évolution. Ce système est à la fois physique (par l’utilisation des livres de la bibliothèque) et numérique (dans l’implémentation du corpus par saisie automatisée).

Pour Anthon Astrom, la question du lexique se pose d’ores et déjà en interne dans leur propre studio « entre vision, concept, design et programmation ». Il confirme la nécessité d’établir un lexique : « Dès les débuts de la collaboration, un vocabulaire commun émerge naturellement. En échangeant les premières idées, certaines nécessitent des analogies (un mouton, une forêt, une histoire, etc.), et celles-ci ont tendance à subsister jusqu’à la fin du processus. C’est très utile, car cela permet de faire référence à une discussion entière grâce à un seul mot ».

Thomas Lebarbé confirme lui aussi ce problème en parlant à nouveau de sa collaboration avec Cécile Meynard. Pour lui, un effort considérable est nécessaire de chaque côté, pour l’établissement de ce qu’il appelle un “ terrain commun ”. Cela se traduit concrètement par l’édification d’une liste de concepts partagés. Il donne l’exemple du terme corpus, qui prend une signification sensiblement différente selon la discipline — ce que les deux collaborateurs ont mis deux ans à réaliser.

En SHS :

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67 quelles solutions  ?

82 Source : http://www.cnrtl.fr/definition/corpus.

83 Journée d’étude Métamorphoses numériques des objets culturels : le carnet de recherche.

84 THATCamp Paris 2012 : Non-actes de la non-conférence des humanités numériques, op. cit., p.98.

« Corpus : Recueil réunissant ou se proposant de réunir, en vue de leur étude scientifique, la totalité des documents disponibles d’un genre donné, par exemple épigraphiques, littéraires, etc. ».

Et en informatique :« Corpus : Ensemble de données exploitables dans une expérience d’analyse ou de recherche automatique d’informations ».

Il semblerait nécessaire de dresser une liste de termes, fréquemment utilisés dans les humanités numériques, dont les significations divergent sensiblement selon les disciplines.

Format : le carnet

Le carnet de recherche constitue également un outil de communi-cation et de documentation qu’il me semble important d’évoquer et d’observer, afin d’identifier sa place possible dans la collaboration. Lors d’une journée d’étude sur le carnet de recherche numérique à Avignon, les différents intervenants se sont accordés à dire que le format du carnet de recherche, peu importe la forme qu’il prend (et nous en analyserons quelques-unes par la suite) permet une liberté dans l’écriture et une libération de la pensée.

Le sujet fut également évoqué lors du THATCamp Paris 2012, dans un atelier intitulé Comment écrire pour un carnet de recherche : « l’écriture sur un carnet offre un espace de liberté, de la visibilité, une lecture-écriture-conversation interdisciplinaire et pouvant parfois sortir de l’entre-soi académique et la possibilité à un discours réflexif, individuel ou collectif, de se déployer, notamment du fait de la place assumée de la subjectivité et de sa position intermédiaire entre com- munication orale et écrite ».

Cette pratique autorisant une émancipation des codes académiques, elle pourrait peut-être permettre également un détachement des codes propres à chaque discipline.

De plus, ce format d’écriture incite à accepter l’imperfection, mais

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85 Oriane Deseilligny lors de la journée d’étude Métamorphoses numériques des objets culturels : le carnet de recherche, op.cit.

aussi à écrire à chaud afin de cristalliser la pensée à un moment précis. Cela semble être un moyen adapté de transmettre une pensée qui ne se veut pas nécessairement objective ni définitive. Parallèlement, la trace que permet le carnet est intéressante en terme de documentation du processus de travail. Quels sont les différents formats de carnets de recherches ?

Le carnet de recherche est une pratique très ancienne de forma- lisation de la pensée par l’écriture, déployée sur la page, qui a valeur de trace. Aujourd’hui, le basculement qui s’est opéré entre le carnet papier et le carnet numérique n’est pas anodin. Oriane Deseilligny, enseignante-chercheuse en Sciences de l’Information et de la Com- munication parle de « violence faite au corps » par le bascsulement de l’écriture papier à l’écriture numérique. Pour elle, malgré une mutation des pratiques, l’usage de l’ordinateur vient toujours dans un second temps, plutôt dans une phase de reprise des notes manuscrites. La notion de “ traitement de texte ” implique plus d’exigence dans l’organisation et la rédaction de ses notes, qui sont valorisées par l’éditorialisation. Pour autant, l’idée de partage semble presque inhérente au carnet numérique. C’est pourquoi, je parlerai ici uniquement de formes numériques de carnet, même si elles corres-pondent potentiellement à la prolongation d’une notation manuscrite antérieure. On peut distinguer plusieurs types de carnets numériques à but collaboratif, dont les trois suivants :

Le carnet de recherche privé — écriture individuelle Le terme privé signifie ici qu’il n’y a pas de publication pendant le processus, et que l’écrit a pour seul objectif de mémoriser ou partager sa vision avec celui ou ceux à qui l’on enverra le document. L’ouvrage Versus ? est un très bon exemple de ce type de carnet. Un entretien avec Michka Mélo (ingénieur du projet) précise qu’avant de publier l’objet final (Versus ? ), les deux collaborateurs s’échangeaient leurs écrits par e-mail environ une fois par semaine. Dans le dernier chapitre de leur ouvrage, ils effectuent un retour sur le medium du carnet à travers quelques réflexions :

« Ce journal nous aura été d’une aide précieuse. Du point de vue de la

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86 Versus ? : cahier de laboratoire, op. cit., p.352.

87 Ibid, p.158.

collaboration, écrire et partager ce document nous a permis, à tous les deux, de prendre du recul sur nos réflexions et questionnements quotidiens. Plus encore, il nous a permis de nous introduire un peu dans la tête de l’autre, de cerner son raisonnement et ses métho-dologies de travail, afin de mieux nous comprendre et de mieux agir ensemble ».

Ils restent cependant ouverts sur la question de ce format et émettent l’idée que même si l’ « écrit semble de base la meilleure solution, on peut imaginer d’autres formes d’échanges ». Par exemple des graphes avec des points de convergence et de divergence des processus de travail (avis, logiques, méthodes).

Le carnet de recherche public — écriture individuelle Le terme public indique ici que l’écriture fait régulièrement l’objet d’une publication en ligne, offrant une véritable documentation du processus, partagée à plus grande échelle. La plateforme hypotheses. org par exemple, offre la possibilité d’ouvrir des carnets de recherche individuels ou collectifs en ligne et d’y publier individuellement ce que les chercheurs nomment communément des “ billets ” (soit des articles). Une url pérenne est alors créée pour identifier et partager ses écrits.

Céline Guilleux, travaillant au secteur éditorial d’hypotheses.org, a souligné, lors de la journée d’étude à Avignon, que ce format pose encore certains problèmes : notamment le fait qu’il est impossible de signer un article à plusieurs. Immédiatement, cela me parut être un écueil, notamment en SHS, au vu des problèmes de reconnaissance évoqués plus tôt (une publication sur laquelle n’apparait pas le nom d’un chercheur qui y a participé sera pénalisante pour la carrière de ce dernier). Pour en avoir le cœur net, je posai la question. Céline Guilleux expliqua tout d’abord que ce problème est du au fait que le modèle d’hypothèses.org repose sur une librairie wordpress, ce qui implique une structure fixe, assez pratique, mais aussi limitée en terme de possibilités et de fonctionnalités — dont nous avons ici un parfait exemple. Sur ce point, on pourrait imaginer des alternatives à wordpress telles que processwire, qui présente globalement les mêmes fonction-

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88 Oriane Deseilligny lors de la journée d’étude Métamorphoses numériques des objets culturels : le carnet de recherche, op. cit.

nalités tout en étant beaucoup plus modulable. Elle expliqua ensuite que la plupart des chercheurs n’ont pas (forcément) conscience du statut du carnet, et de la reconnaissance potentielle qu’il peut engendrer. On observe une fois encore la « resistance des modèles de reconnaissance institutionnels ».

Actuellement, les chercheurs qui rencontrent ce problème mettent en place des solutions telles que la création d’un compte commun avec tous les noms des participants ou alors l’inscription d’un seul nom d’auteur et la mention de tous les autres dès le début du billet. Cela produit alors des effets qu’il serait sans doute intéressant d’analyser, tels que la perte de recherche par auteur dans la base de données.

Le carnet de recherche à écriture collective — privé ou public Un autre format existe, offrant la possibilité aux écrits de s’entre-mêler, et permettant un réel croisement entre les différentes perspectives. Il s’agit de plateformes d’écriture collective, telles que framapad.org ou encore yourworldoftext.org, éditeurs de texte en ligne, sur lesquels chacun peut écrire dans un même espace et en même temps (les inter-ventions sont différentialisées ou pas, par des couleurs par exemple).

Ces formats offrent la possibilité d’un vrai dialogue, chacun est libre d’intervenir sur ce qu’ont écrit les autres, d’y ajouter des réflexions et références, mais aussi d’éditer les textes. Cette alternative semble être la plus propice à un affranchissement des codes académiques et à un échange libre entre les participants. La différence avec les autres formats est que ce type de carnet n’a généralement pas vocation à être publié par la suite ; on voit rarement des publications partagées à partir de ces plateformes. Il s’agit donc plutôt d’un outil préparatoire.

Pour framapad, l’accès peut être public (ce qui implique que tout intervenant peut potentiellement participer à l’écriture) ou privé (nécessitant un mot de passe et requérant l’identification de ceux qui écrivent). Ce type de plateforme, beaucoup utilisé à l’ÉSAD•Valence et dans les THATCamp par exemple, permet de travailler dans des temporalités très instantanées (prises de notes collectives) ou beaucoup

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plus étirées (ajout de références et de réflexions individuellement plus tard).

Le carnet de recherche (numérique) semble donc être un outil utile pour dynamiser les échanges dans la collaboration, et les rendre plus structurés et explicites.

Organisation spatiale et temporelle

Je reviens à présent sur les questions de temps et d’espace mentionnées plus tôt, pour les étudier cette fois non plus sur le long terme, mais sur des formats courts. Le MediaLab rencontre ces questions à plusieurs échelles. Les workshops à courte temporalité mis en place par le laboratoire sont, pour ses acteurs, l’occasion d’expérimentations quant aux questions de temps et d’espace.

Robin De Mourat évoquait ainsi les Datasprints du MediaLab en suggérant tout d’abord un dispositif qui permet de passer par différents niveaux d’intimité. Par exemple, on passe d’un regroupement par équipe autour de petites tables, à des procédés qui demandent aux gens de lever la tête et de s’intéresser à ce que font les autres groupes, afin d’avoir une vision plus globale du workshop. Ces jeux d’échelles et de fragmentation temporelle permettent de maintenir une horizontalité et d’éviter les rapports de force entres les acteurs.

De façon plus expérimentale, Robin De Mourat mentionna un dispositif qu’il commençait à mettre au point, mais qu’il n’avait pas encore testé : celui-ci consiste à créer des jeux de rôles, grâce aux chaises sur lesquelles sont assis les participants. Il imaginait ainsi une place pour la personne qui documente (prise de photos, de notes etc.), une place pour la personne sceptique, une place pour la personne chargée de proposer des alternative etc. Chacun jouerait tour à tour les différents rôles. En gardant toujours à l’esprit que cela doit rester constructif pour les acteurs du workshop, et ne doit en aucun cas représenter une contrainte.

Il semble que de tels évènements représentent le format le plus

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adapté pour expérimenter de nouveaux systèmes, qui pourraient ensuite potentiellement s’appliquer à plus grande échelle. L’ensemble de la communauté des humanités numériques devrait accorder un temps de reflexion à l’organisation spatiale et temporelle lorsque des ateliers de ce type sont mis en place. La question du lieu et de son aménagement ne devrait pas être prise à la légère, comme c’est probablement souvent le cas. Les principes qui émergeront de ces recherches pourront poten-tiellement apporter une forme de réponse aux problèmes rencontrés dans les processus collaboratifs.

Dénominateur commun

Une dernière solution consisterait à trouver ou construire un objet tangible comme centre de discussion, qui soit réduit dans sa forme mais compréhensible par les différents acteurs. Ensuite, chacun serait capable d’en développer le principe dans sa propre discipline.

Par exemple, retournons à Diana Maynard qui évoquait le problème de compréhension, d’une part du besoin des chercheurs en littérature par les ingénieurs — et d’autre part de ce que les ingénieurs sont en me- sure de produire pour les chercheurs. Elle propose suite à ces échanges que les chercheurs commencent par donner des exemples concrets sur des échantillons de textes. Ainsi, le chercheur produit un objet sommaire qui montre ses attentes en terme de résultats textuels, et le programmeur peut en déduire quelle logique, propre à sa pratique, doit être adoptée.

De la même façon, les designers de VÉgA évoquent l’importance qu’a eu le choix des médiums d’échanges entre les historiens et eux lors de la création de l’interface. Aux premières réunions de co-conception, ils amenaient des papiers de couleur, ciseaux, crayons, fluos, gommettes etc. Après avoir passé une phase un peu ironique des historiens, ces derniers comprennent que grâce à ces outils, les questions liées à leur intérêt professionnel vont rester au centre de la table.

« Nous ne sommes pas en train de nous demander ce qui va être

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89 Entretien avec Nicolas Chauveau.

90 Échanges avec Anthon Astrom.

faisable en terme d’informatique, si la couleur ou la typographie sont adaptées, mais nous parlons du fond, des fonctions, de la hiérarchisation des informations, du contenu ».

Pour Nicolas Chauveau, l’outil informatique ou les graphismes générés sur ordinateur, formeraient à ce stade une barrière. Ce type de médium — papier, crayons — permet au contraire de donner une chance à l’interlocuteur d’intervenir dans l’élaboration du projet. On voit émerger ici l’aspect pédagogique du design.

Anthon Astromm d’A/Z Studio confirme cette idée en expliquant que « le plus gros défi est de créer une vision commune. En tant que designers, nous sommes très à l’aise avec la pensée visuelle, et la production de design lors de brainstormings. Il en est tout autrement pour les personnes qui ne possèdent pas cette pensée visuelle. Si nous avons une idée et la proposons sous une forme au design raffiné, le chercheur se concentre la plupart du temps sur le visuel plutôt que sur l’idée. Alors qu’à nos yeux, un design initial n’est que la suggestion d’un concept, il est souvent perçu par le chercheur comme une proposition finie ».

Le designer doit donc mettre de côté un moment ses réflexes consis- tant à produire rapidement des formes visuelles (de prime abord son atout principal par rapport aux autres disciplines), ou les amener avec précaution, pour éviter qu’ils ne prennent le dessus sur le contenu proposé par les ingénieurs et les chercheurs. Avec cette réserve, on commence à distinguer un véritale rôle trandisciplinaire du design, au-delà de sa simple participation en tant qu’acteur dans la collaboration.

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Images extraites de la vidéo Le projet VÉgA — Vocabulaire de l’Égyptien Ancien, disponible en ligne : https://vimeo.com/129106152Ces photos documentent les réunions collaboratives organisées par Intactile Design, et les outils utilisés.

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91 Source : Larousse Français 2018.

3 — L’impact du design au moment précis de la collaboration

Tentons d’éclaircir les apports du design dans le processus collaboratif. Il est important de recontextualiser cette réflexion : ajouter un champ de pratique supplémentaire aux humanités numériques implique forcément des collaborations plus complexes (au moins dans un premier temps). Plus deux, mais trois types de logiques, méthodes et pratiques différents. Aujourd’hui certains chercheurs et ingénieurs qui ont pris l’habitude de travailler ensemble collaborent très bien, et leur imposer d’intégrer un designer à leurs équipes bousculerait très certainement leurs habitudes. Cela pourrait entraîner une dégradation et/ou un ralentissement des processus de collaboration qu’ils ont réussi à instaurer. De plus, faire appel à un designer signifie investir d’autres moyens, autant au niveau économique que temporel.

Mais c’est précisément pour les raisons énoncées par Anthony Masure ou Johanna Drucker évoquées plus tôt (1.2), qu’il me semble important d’observer ces possibles apports au moment précis de la collaboration. L’objectif n’est pas ici de mettre le design sur un piedestal mais bien de voir en quoi sa présence serait constructive, malgré les efforts d’intégration supplémentaires qu’il suppose.

Le design non plus comme discipline … ... mais comme « in-discipline »

Le fait que le terme « champ de pratique » ait — la plupart du temps — remplacé celui de « discipline » dans ce mémoire n’est pas anodin. Le design constitue certes une discipline au sens étymologique du terme : « Branche de la connaissance pouvant donner matière à un enseignement ». Il peut être enseigné, et j’en suis moi-même une disciple. Pourtant, il semble que définir le design comme une discipline revient à le figer dans un cadre de références. Alors, certains parlent plutôt du design en tant qu’ « in-discipline ». Mais qu’implique ce terme ?

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92 BihaniC, David, Data Design. Les données comme materiau de création, Paris, Gallimard, coll. Alternatives, 2018.

93 Gentès, Annie, The in-discipline of design : bridging the gap between humanities and engineering, Suisse, Springer, coll. Design Research Foundations, 2017, p.213.

94 Ibid, p.238.

95 Ibid, p.213.

David Bihanic par exemple, considérant le design comme une in-discipline, le définit comme un champ ni stabilisé ni limité, qui « permet de traverser plusieurs champs et de les faire dialoguer ».

Il y a quelques mois, Annie Gentès précise cette pensée dans son ouvrage The In-Discipline of Design : Bridging the Gap Between Humanities and Engineering.

« La plupart des designers revendiquent que leur discipline est multidisciplinaire et transversale, et que le basculement d’une discipline à l’autre est ce qui définit le design ». La notion de basculement employée ici peut être rapprochée du « paradoxe d’hybridation » décrit par Paul Girard. Le basculement d’une discipline à l’autre, qui représente pour Annie Gentès le propre du design, correspond peut être à la faculté du designer de pratiquer l’hybridation dans un sens positif.

« Le design […] crée de nouveaux objets au sein et entre les disci-plines, qui affectent et transforment leurs concepts et méthodes. C’est cette déconstruction et la composition des disciplines, ces dynamiques et échanges génératifs entre disciplines, que je choisis d’appeler le “ design comme in-discipline ” ». Ici, les termes concepts et méthodes semblent éclairer les raisons qui induisent cette faculté d’hybridation des designers. Ces derniers sont en effet habitués à se saisir des logiques et méthodes des autres disciplines et développent une plus grande facilité à repérer précisement où celles-ci se situent, et ont par conséquent une vision plus juste de l’écart qui sépare leurs pratiques de celles des autres.

« L’“ indiscipline ” qu’est le design n’est pas seulement utile aux pratiques des designers, mais constitue précisement la raison d’être du design en tant que discipline de conception ». Ainsi, le recul qui caractérise la notion d’in-discipline chez Annie Gentès est une des raisons pour lesquelles le designer va pouvoir jouer un rôle de médiation à certains endroit de la collaboration — évidemment entre les autres disciplines et lui-même mais peut être également entre les chercheurs et les ingénieurs. Restons vigilants toutefois sur la notion d’« in-discipline » qui fleurit aujourd’hui dans de nombreux domaines, et que le design n’est pas le

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96 huyGhe, Pierre-Damien, Contre-temps : De la recherche et de ses enjeux. Arts, architecture, design, Paris, B42, 2017.

seul à revendiquer. On trouve, de la même façon, des textes décrivant le théâtre, l’ingénierie et de nombreux champs nouveaux dans le monde de la recherche comme des in-disciplines. Pia Pandelakis parle plutôt du design comme champ hybride, à la fois dans ses pratiques et dans son héritage critique. La notion d’« hybridité » qu’elle emploit rejoint également le principe d’« hybridation » évoqué par Paul Girard.

... mais comme méthode critique

Les méthodes du design sont employées dans le design thinking : l’appli-cation des méthodologies de projets du design, à d'autres champs.

Historiquement, cette pensée vient du design research dans les années 1960, une recherche portée par des industriels pour savoir à quel endroit de la recherche pouvait intervenir le design (design en, avec, sur, évoqués par Pierre-Damien Huyghes mais aussi par d'autres avant lui). Le design research était utilisé afin d’arriver à faire travailler ensemble, grâce aux méthodologies du design, les différents corps de métiers présents dans une même entreprise, à la façon d’un liant interdisciplinaire. Aujourd’hui de nombreuses méthodes sont apparues dans la continuité de ces idées. Elles sont plus ou moins pertinentes, mais montrent dans leur principe que les méthodes du design sont un atout pour l’aspect inter-disciplinaire des humanités numériques.

Le design comme ensemble de pratiques, avec ses outilset ses spécificités

De façon plus pragmatique à présent, le design est un ensemble de pratiques qui possède ses outils et ses spécificités. Le design graphique par exemple, implique des questions de couleurs, de choix typographiques, de relation texte/image, de données dans l’espace ou encore de data-visualisation. Ces pratiques prennent appui sur la pensée visuelle mentionnée plus tôt comme l’un des atouts majeurs du designer. Cet atout pourrait-il apporter à la cohésion inter-disciplinaire ?

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97 Qu’est-ce que qu’un designer : objets, lieux, messages, op. cit., p.20.

La pensée visuelle chez le designer : un outil de communication

« Le dessin n’est jamais un but en soit pour le designer (sauf s’il est illustrateur). Il s’agit plutôt d’un moyen permettant d’arriver à cette fin qu’est la fabrication, moyen dont le contenu expressif sert strictement à la communication requise ». Tout d’abord, tâchons d’examiner la question de la pensée visuelle chez le designer, sans parler du potentiel manque de culture visuelle chez les autres acteurs.

L’image permet de passer à un niveau d’abstraction supérieur à l’écrit, et de faire saisir plus rapidement un concept. Ce déplacement vers un niveau d’abstraction plus élevé estompe le clivage entre les différentes disciplines. On pourrait imaginer, à la façon d’Isotype, produire des lexiques visuels qui reposent sur des pictogrammes, ou des schémas, s’adaptant à chaque projet.

La pensée visuelle chez les autres acteurs : Échapper aux rapports de force

On imagine, à présent, d’insuffler la pratique de cette pensée visuelle dans les humanités numériques. « En temps que designer, on assume que les visuels produits soient “ artisanalement raffinés ” en fonction d’un argument, d’une perspective interprétative. Cela passe par le statut de l’image et la façon dont elle est présenté ». Le designer joue avec les registre de présentation et de lecture d’une image notamment en créant des images dont le statut visuel correspond à l’état de certitude ou d’ouverture qu’il veut transmettre.

Les échanges avec Nicolas Chauveau montrent bien que sa place de designer lui permet d’avoir conscience de la façon dont les objets produits (maquette en papier vs. mock-up numérique) vont s’inscrire dans les logiques des chercheurs et être correctement perçus par ces derniers. Ce serait beaucoup demander aux autres disciplines

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98 Entretien avec Robin De Mourat (designer au MédiaLab), décembre 2018.

99 d’iGnaZio, Catherine et F. klein, Lauren, Feminist Data Visualization, Octobre 2016 [Traduit de l’anglais].

d’introduire ce même recul dans la production de leurs images, mais peut-être qu’une mutation est possible au niveau de leur pratique de lecture.

Catherine D’Ignazio, professeure en visualisation de données et médias civiques, affirme ainsi que l’« on manque souvent d’outils permettant une réflexion critique sur la politique et l’éthique de la représentation. Et comme le grand public est plutôt facile à impres-sionner avec des graphiques, la “ data visualisation ” acquiert un grand pouvoir réthorique. Quand bien même nous savons rationnellement que ces images ne représentent pas “ le monde entier ”, nous avons tendance à l’oublier, et à accepter les graphiques comme des faits ».

Aujourd’hui, un sens critique est assez communément développé par les spécialistes dans la lecture des images, mais il est important, particulièrement dans les humanités numériques, d’accroître ce recul. Car le terme pouvoir employé par Catherine D’Ignazio est directement rattaché aux rapports de force susceptibles de s’installer entre les acteurs et de faire échouer les collaborations.

Ainsi, sensibiliser les chercheurs et les ingénieurs à la pensée visuelle (et à la lecture des images) permettrait probablement d’éliminer une partie des rapports de force qui s’opèrent à travers les images dans les processus collaboratifs.

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Les datascapes du MediaLab

Une belle illustration de tous ces rôles que peut prendre le design dans la collaboration prend forme dans la place qu’ont les designers au sein du MediaLab.

Au nombre de deux (Robin de Mourat et Donato Ricci), les designers graphiques du MediaLab font officiellement partie de la catégorie des appuis à la recherche. Ils sont « designers de recherche », ce qui se traduit en pratique par un croisement entre designer opérationnel (UX notamment) et un accompagnement à la définition de méthodes de recherche (ce qui n’est pas sans rappeler la question du design comme méthode).

Leur rôle consiste d’une part à fournir des outils ou à proposer des approches qui relèvent du design à tous les stades et dans tous les aspects des projets. D’autre part, ils essaient d’organiser des infrastruc-tures et des moments de rencontre engageant plusieurs acteurs d’une question dans une démarche de production de connaissance collective (activité de recherche propre aux designers).

Au sein du laboratoire, il existe deux dispositifs de collaboration de format court : les datasprints, dont nous avons parlé plus tôt et les datascapes, sur lesquels nous nous attarderons ici. Les datascapes sont des workshops autour des questions de méthodes de recherche et de conception en collaboration.

Des chercheurs ont accès à une source de données, avec une idée assez vague de ce qu’ils cherchent, et plutôt que de faire appel à des ingénieurs-programmeurs qui vont analyser les données de leur côté, l’objectif est de mettre en place une interface conçue pour explorer le corpus selon leur question de recherche. Le fait de concevoir le design de ce site impose aux chercheurs de préciser la perspective adoptée sur leur corpus et les questions exactes qu’ils souhaitent se poser. Le site web réalisé devient à la fois l’objectif et le point de jonction de toutes les activités qui vont faire évoluer la recherche ; une pierre

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angulaire entre les disciplines mais également une trace de la colla- boration. De plus, l’interface créée une source consultable pour les autres chercheurs.

Quel rôle jouent précisement les designers dans les datascapes ? Parfois il s’agit simplement de concevoir les interactions des interfaces. Mais la plupart du temps, les designers ont en charge toute l’organisation de l’atelier et la médiation entre ses acteurs.

Cela consiste entre autres à faire circuler des images, de manière à faciliter la compréhension. Typiquement, Robin De Mourat m’explique que les rapports entre ingénieurs et chercheurs ont souvent besoin d’être ajustés par la médiation entre les lexiques.

Le rôle des designers va alors consister à traduire le concept d’un acteur dans le langage d’un autre. Cela peut prendre la forme d’images, de représentations (on retrouve ici la pensée visuelle), mais aussi souvent d’un travail purement verbal : être dans le questionnement et dans la reformulation, ce qui suppose une veille permanente.

On voit ici se dégager un rôle de médiateur qui inclut et dépasse la question de la pensée visuelle, et rejoint l’idée de champ hybride. Le rôle qu’occupe le designer dans ces collaborations est lié à une définition essentielle de ce qu’est un designer. La question des processus collaboratifs pose des difficultés depuis le début des humanités numé- riques, et le designer est en mesure, grâce à des capacités qui lui sont propres, de faire avancer les choses ; et ce en se trouvant progressive- ment une place parmi les autres acteurs, place qui sera peut-être amenée à évoluer au fil de son intégration aux humanités numériques.

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. Conclusion

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83 conclusion

Un des premiers éléments qui ressort de ce mémoire est le nombre surprenant de personnes qui ont été prêtes à échanger avec moi autour de cette problématique. Toutes les personnes que j’ai contactées — et elles ne sont pas toutes mentionnées au sein-même du texte — ont accepté de me faire part de leur expérience ou de leur avis.

Est-ce seulement le fruit du hasard ou de la chance ? Je pense que cela traduit également un besoin dans le quotidien de tous les praticiens des humanités numériques. Peut être également un manque de documentation, et d’occasions d’échanger à ce sujet. Certains interlocuteurs sont allés jusqu’à me demander des ouvrages et projets de références, car ils souhaitaient se documenter sur la question.

Ainsi, la forme écrite que prend ce mémoire ne devrait être que le début de quelque chose de beaucoup plus concret, matériel (une plateforme ?) ou immatériel (un mouvement ? une invitation aux échanges ? une organisation ?).

Il semble y avoir deux urgences. D’une part la nécessité de mettre en place un objet qui permette de partager collectivement et de se documenter sur la question des collaborations dans les humanités numériques. Certaines alternatives évoquées dans ce mémoire paraissent intuitives ; mais d’autres, plus anecdotiques, pourraient certainement, une fois appliquées, favoriser les processus collaboratifs.

D’autre part, la nécessité d’intégrer plus largement les designers à la communauté des humanités numériques semble de plus en plus partagée. D’un point de vue théorique, c’est quasiment chose faite. Mais le vrai problème se situe au plan pratique.

À travers les différents exemples sollicités dans ce mémoire, j’espère convaincre les chercheurs et les ingénieurs qui le liront du rôle très pragmatique que peut prendre le design dans les humanités numériques — en essayant de compléter l’aspect plus théorique des écrits ayant traîté le sujet avant moi.

Je m’adresse à présent aux designers. Essayons de nous libérer des carcans qui nous enferment dans la théorie, et attelons-nous à mettre en place toutes ces possibilités en pratique. Allons à la rencontre de ceux qui, à défaut de connaître nos activités, seront potentiellement ouverts à ce que nous leur proposerons, et curieux de nos apports possibles.

Je sais bien que certains ont déjà fait la démarche, et que ce n’est pas toujours simple. Il y a un manque de formation des designers aux types de projets rencontrés en humanités numériques, conséquence directe d’une faible demande.

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Je propose donc à l’ensemble de la communauté deux axes de la mise en œuvre :

Tout d’abord de rejouer, en France, le modèle de Schaeffer décrit par Diana Maynard. S’il faut commencer quelque part, la figure de l’université me semble favorable, étant donné qu’elle regroupe tous les futurs acteurs des humanités numériques. Proposer d’expéri- menter le travail inter-disciplinaire dès le stade des études me semble un moyen judicieux d’initier l’expérience, mais également de tester un certain nombre d’outils évoqués dans ce mémoire. Bien entendu, pour ce type de dispositifs, les designers devront être conviés — et potentiellement invités à aider en terme d’organisation et de médiation.

En parallèle, il est essentiel d’apprendre à se connaître, et à comprendre nos disciplines mutuelles. Si le designer n’est pas intégré dès le début du processus de travail, alors il sera difficile pour lui de faire changer les choses. L’alternative qui s’offre à nous consiste à anticiper le problème, en trouvant des façons de toucher les acteurs qui ne se posent pas encore la question du design.

Cela passera alors par des rencontres, des discussions, des confé-rences ou encore des workshops autour de la question — sans pour autant que ces événement ne lui nécessairement soient dédiés. En effet, cette problématique pourrait aussi trouver sa place dans des moments de rencontres existant déjà aujourd’hui.

Et si nous persévérons, nous verrons potentiellement se former plusieurs formes de passerelles. D’une part entre les humanités numériques et ceux qui bénéficient de ses objets — questions de diffusion et d’éditorialisation. D’autre part, entre ses différents champs de pratiques (chercheurs en SHS, ingénieurs et designers). Enfin entre la place théorique du design et sa mise en pratique dans les humanités numériques.

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85 humanités numériques et design

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. Bibliographie

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Ouvrages et articles

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moholy-naGy, László, Peinture Photographie Film, Nîmes, Éditions Jacqueline Chambon, 1993.

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bibliographie

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Entretiens réalisés

Nicolas Chauveau, designer chez Intactile Design. Août 2018 Johannes krtek, designer pour Zotéro et Tropy (par e-mails). Septembre 2018

Thomas leBarBé, enseignant-chercheur en humanités numériques à l’UGA. Octobre 2018

Anthon astrom, programmeur-designer chez studio A/Z (par e-mails).Octobre 2018

Michka mélo, ingénieur et auteur de Versus?.Novembre 2018

Robin de mourat, designer au MediaLab.Décembre 2018

Marc douGuet, enseignant-chercheur en humanités numériques à l’UGA.Janvier 2019

Entretiens disponibles dans leur intégralité sur l'annexe en ligne :

http://esad-gv.net/designgraphique/_archives_etudiants/DNSEP_2019/Laura_Piccolo/passerelles_annexe

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Journées d’étude

Journée d’étude Publier la recherche proposée par le CNAP le 9 novembre 2017 aux Beaux-Arts de Paris — d’après le compte-rendu dispo-nible sur : http://www.cnap.graphismeenfrance.fr/article/paris-compte-rendu.

Journée d’étude Métamorphoses numériques des objets culturels : le carnet de recherche, organisé par l’Agorantic le 22 novembre 2018 à l’Université d’Avignon.

THATCamp UGA, Open data and Freeware : Researchers in the humanities and social sciences share their experience, proposée par l’UGA les 14 et 15 juin 2018 à Valence.

Journée d’étude Contributions du design à la production des savoirs, le 19 décembre 2013 à l’École Normale Supérieure de Lyon — d’après le compte-rendu de DE MOURAT Robin (voir p.94).

Journée d’étude DHnord 2018 – Quelles collaborations au sein des structures dédiées aux humanités numériques ? à la MESHS du 15 au 17 octobre 2018 — vidéo disponible sur : https://live3.univ-lille3.fr/video-etudes/dhnord-2018-quelles-collaborations-au-sein-des-structures-dediees-aux-huma-nites-numeriques.html.

Journée d’étude Cinédesign à l’Université Toulouse Jean Jaurès, octobre 2016 — vidéo disponible sur : https://www.canal-u.tv/producteurs/ universite_toulouse_ii_le_mirail/journees_d_etudes_seminaires_rencontres_debat/cine_design.

bibliographie

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Webographie

http://adho.org

http://esthetique-des-donnees.editions-b42.com

http://books.openedition.org/

http://www.epfl-ecal-lab.ch

http://ciret-transdisciplinarity.org

http://modesofexistence.org

https://registries.clarin-dariah.eu/courses/

http://vega-vocabulaire-egyptien-ancien.fr

https://ahnenslyon.hypotheses.org

http://www.davidbihanic.com

http://cahier.hypotheses.org

http://benfry.com

https://medialab.sciencespo.fr/

https://www.ted.com/talks/hans_rosling_shows_the_best_stats_you_ve_ ever_seen

http://www.martingrandjean.ch/analyse-de-reseau-thatcamp-et- communaute-des-humanites-numeriques-francophones/

http://manuscrits-de-stendhal.org

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Passerelles — Travailler ensemble dans les humanités numériquesLaura Piccolo

ÉSAD • ValenceDNSEP Design GraphiqueFévrier 2019

TypographiesLÿno (Jean) — dessinée par Karl Nawrot and Radim.Scala — dessinée par Martin Majoor.Neue Haas Grotesk — dessinée par Christian Schwartz.Noto Sans — créée par Monotype et Google.

Merci àL’équipe enseignante de l’ÉSAD•Valence : Alexis Chazard, Dominique Cunin, Nicolas Flory, Marie Gaspar, Annick Lantenois, Gilles Rouffineau, Samuel Vermeil, Florian Veydarier, Tom Henni.

La team DG5 :Agathe, Ariane, Baptise, Julian, Justine, Maia, Marion, Morgane, Sina et Solène.

Toutes les personnes avec qui j’ai pu échanger :Anthon Astrom, Nicolas Chauveau, Marc Douguet, Johannes Krtek, Thomas Lebarbé, Anthony Masure, Michka Mélo, Robin De Mourat.

Mes copains Clémence, Lissana, Amandine, Maxime et David de m’avoir accompagnée depuis 2014.

Juliette de m’avoir aidée et Thomas de m’avoir supportée.

Achevé d’imprimerle 15 février 2019

sur les presses de l’ÉSAD•Valenceen 8 exemplaires

colophon

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