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Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Nutrition clinique et métabolisme 27 (2013) 185–190 Article original L’autosondage naso-gastrique : une alternative à la gastrostomie et à la sonde à demeure. Règles et éducation thérapeutique du patient Self-insertion of naso-gastric tube: An alternative to gastrostomy or to the indwelling tube. Rules and Education Therapeutic Program Didier Quilliot , Aurélie Malgras , Camille Zallot , Béatrice Buisson , Élise Denis-Balle , Justine Krier , Olivier Ziegler , Florence Rio Unité d’assistance nutritionnelle, unité transversale de nutrition, service de diabétologie-maladies métaboliques et nutrition, CHU de Nancy-Brabois Adulte, 4, rue du Morvan, 54500 Vandœuvre-lès-Nancy, France Rec ¸u le 19 aoˆ ut 2013 ; rec ¸u sous la forme révisée le 20 aoˆ ut 2013 ; accepté le 30 aoˆ ut 2013 Disponible sur Internet le 9 octobre 2013 Résumé L’autosondage naso-gastrique est une alternative à la gastrostomie ou à la sonde à demeure. Les conditions de réalisation doivent être strictement définies : parcours d’éducation thérapeutique permettant aux patients d’acquérir les compétences et de réaliser ce geste sans appréhension. Le respect des contrindications et le contrôle de la bonne réalisation du geste doivent permettre de réaliser l’autosondage naso-gastrique dans les meilleures conditions de sécurité. La sonde utilisée doit être sans guide en raison de l’augmentation du risque de complication lors de la pose. Le parcours formalisé d’éducation n’est pas une simple information du patient. Il repose sur un diagnostic éducatif permettant de lever d’éventuels freins (anxiété, craintes. . .) et d’évaluer les capacités cognitives. Le parcours type mais individualisé comprend une étape de pose avec descriptions des phases du geste, une étape d’autosondage au cours de laquelle les gestes sont décrits par l’infirmière puis par un autosondage seul. L’évaluation finale des compétences est essentielle. L’autosondage naso-gastrique est un auto-soin qui présente toutes les caractéristiques d’un acte relevant de l’éducation thérapeutique permettant au patient de préserver autonomie et qualité de vie. © 2013 Publié par Elsevier Masson SAS. Mots clés : Nutrition entérale ; Auto-soin ; Sonde naso-gastrique ; Gastrostomie Abstract Self-administration of naso-gastric tube is an alternative to gastrostomy or to the indwelling tube. The conditions under which this act is done must be strictly defined. Therapeutic Patient Education (TPE) program enables patients to acquire skills and to perform this action without fear. Respect for contraindications and the monitoring should permit self-administration of naso-gastric tube in the safest conditions. The tube must be used without guide because of the increased risk of complications. The TPE program is not simple patient information. It is based on an educational diagnosis that helps to remove potential brakes (anxiety, fear. . .) and to assess cognitive abilities. The type program but individualized includes a step of administration by the nurse with descriptions of the phases, secondly, a self-administration, stage during which the actions are described by the nurse and lastly by the self-administration. The final assessment of skills is essential. The self-administration is a self-care that has all the characteristics of an act within a TPE program. The self-administration of naso-gastric tube contributes to maintain independence and quality of life of patients needing tube feeding. © 2013 Published by Elsevier Masson SAS. Keywords: Tube feeding; Self-care; Naso-gastric tube; Gastrostomy Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (D. Quilliot). 1. Introduction La nutrition entérale à domicile a connu un dévelop- pement considérable ces 20 dernières années [1]. La sonde naso-gastrique est la technique d’administration de prédilection 0985-0562/$ see front matter © 2013 Publié par Elsevier Masson SAS. http://dx.doi.org/10.1016/j.nupar.2013.08.002

L’autosondage naso-gastrique : une alternative à la gastrostomie et à la sonde à demeure. Règles et éducation thérapeutique du patient

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Nutrition clinique et métabolisme 27 (2013) 185–190

Article original

’autosondage naso-gastrique : une alternative à la gastrostomie et à la sondeà demeure. Règles et éducation thérapeutique du patient

Self-insertion of naso-gastric tube: An alternative to gastrostomy or to the indwelling tube.Rules and Education Therapeutic Program

Didier Quilliot ∗, Aurélie Malgras , Camille Zallot , Béatrice Buisson ,Élise Denis-Balle , Justine Krier , Olivier Ziegler , Florence Rio

Unité d’assistance nutritionnelle, unité transversale de nutrition, service de diabétologie-maladies métaboliques et nutrition,CHU de Nancy-Brabois Adulte, 4, rue du Morvan, 54500 Vandœuvre-lès-Nancy, France

Recu le 19 aout 2013 ; recu sous la forme révisée le 20 aout 2013 ; accepté le 30 aout 2013Disponible sur Internet le 9 octobre 2013

ésumé

L’autosondage naso-gastrique est une alternative à la gastrostomie ou à la sonde à demeure. Les conditions de réalisation doivent être strictementéfinies : parcours d’éducation thérapeutique permettant aux patients d’acquérir les compétences et de réaliser ce geste sans appréhension. Leespect des contrindications et le contrôle de la bonne réalisation du geste doivent permettre de réaliser l’autosondage naso-gastrique dans leseilleures conditions de sécurité. La sonde utilisée doit être sans guide en raison de l’augmentation du risque de complication lors de la pose. Le

arcours formalisé d’éducation n’est pas une simple information du patient. Il repose sur un diagnostic éducatif permettant de lever d’éventuelsreins (anxiété, craintes. . .) et d’évaluer les capacités cognitives. Le parcours type mais individualisé comprend une étape de pose avec descriptionses phases du geste, une étape d’autosondage au cours de laquelle les gestes sont décrits par l’infirmière puis par un autosondage seul. L’évaluationnale des compétences est essentielle. L’autosondage naso-gastrique est un auto-soin qui présente toutes les caractéristiques d’un acte relevant de

’éducation thérapeutique permettant au patient de préserver autonomie et qualité de vie. 2013 Publié par Elsevier Masson SAS.

ots clés : Nutrition entérale ; Auto-soin ; Sonde naso-gastrique ; Gastrostomie

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Self-administration of naso-gastric tube is an alternative to gastrostomy or to the indwelling tube. The conditions under which this act is doneust be strictly defined. Therapeutic Patient Education (TPE) program enables patients to acquire skills and to perform this action without fear.espect for contraindications and the monitoring should permit self-administration of naso-gastric tube in the safest conditions. The tube must besed without guide because of the increased risk of complications. The TPE program is not simple patient information. It is based on an educationaliagnosis that helps to remove potential brakes (anxiety, fear. . .) and to assess cognitive abilities. The type program but individualized includes atep of administration by the nurse with descriptions of the phases, secondly, a self-administration, stage during which the actions are described

y the nurse and lastly by the self-administration. The final assessment of skills is essential. The self-administration is a self-care that has all theharacteristics of an act within a TPE program. The self-administration of naso-gastric tube contributes to maintain independence and quality ofife of patients needing tube feeding.

2013 Published by Elsevier Masson SAS.

eywords: Tube feeding; Self-care; Naso-gastric tube; Gastrostomy

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (D. Quilliot).

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985-0562/$ – see front matter © 2013 Publié par Elsevier Masson SAS.ttp://dx.doi.org/10.1016/j.nupar.2013.08.002

. Introduction

La nutrition entérale à domicile a connu un dévelop-ement considérable ces 20 dernières années [1]. La sondeaso-gastrique est la technique d’administration de prédilection

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our les courtes durées alors que la gastrostomie est préféréeorsque la durée prévisible est supérieure à 1 mois. La nutri-ion entérale est souvent mise en place la nuit pour faciliter’alimentation orale diurne. Le patient est ainsi libéré de laontrainte du passage de la poche pendant la journée [2]. Leaintien d’une sonde à demeure, visible au niveau du visage

st un frein au maintien de la nutrition entérale, la gêne esthé-ique rappelle et affiche la maladie du patient, perturbe sa vieociale, professionnelle, personnelle et familiale [3]. La mise enlace d’une gastrostomie peut aussi être mal vécue notammenthez des personnes jeunes ayant des préoccupations esthétiquest souhaitant garder leur intégrité physique. Elle est aussi uneource d’anxiété pour l’entourage [4].

L’autosondage naso-gastrique peut être une alternative à ceseux techniques. Le patient, libéré de sa sonde dans la journée,eut mener une vie normale sans le statut et l’apparence d’un

malade », avoir le confort d’une alimentation orale, et préserver’image de soi aux yeux de sa famille, de ses proches ou dees collègues. Les pédiatres qui ont l’habitude d’apprendre auxarents à poser la sonde naso-gastrique à leur nourrisson sontrobablement les premiers à avoir appris l’autosondage à leurseunes patients. Néanmoins cette technique n’a été évaluée queans une seule étude descriptive montrant la faisabilité de laechnique [5].

L’autosondage naso-gastrique est un auto-soin qui présenteoutes les caractéristiques d’un acte relevant de l’éducationhérapeutique permettant au patient de préserver autonomie etualité de vie [6].

L’objectif de cet article est de décrire le protocole de soins et laémarche d’éducation thérapeutique visant à encadrer, sécurisert harmoniser la pratique de cette technique. Contrairement à laose de sonde naso-gastrique qui fait partie des actes infirmiers,’autosondage naso-gastrique ne figure pas dans la liste des actesnfirmiers et ne fait pas l’objet de recommandations.

. Prérequis : application de la démarche « éducationhérapeutique » (ETP) en nutrition entérale

L’éducation à l’autosondage naso-gastrique doit s’inscrireans une démarche d’ETP telle que décrite dans les recom-andations de la Haute Autorité de santé (HAS) : « l’éducation

hérapeutique du patient vise à aider les patients à acquérir ouaintenir les compétences dont ils ont besoin pour gérer auieux leur vie avec une maladie chronique » [6].Elle doit faire l’objet d’un parcours défini, formalisé, si pos-

ible reconnu par l’agence régionale de santé (ARS), et réaliséar une équipe pluridisciplinaire spécialisée et formée à l’ETPu sein de laquelle l’infirmière occupe une place prépondéranten particulier lors du diagnostic éducatif.

. Le parcours d’ETP

Le patient peut intégrer le parcours à la demande d’un service

ospitalier, d’un médecin de ville ou de réseau, d’un médecinpécialisé en nutrition ou d’un partenaire de soin (service dehirurgie, de gastro-entérologie. . .), à l’issue d’une consultation,’un hôpital de jour, ou d’une hospitalisation complète. •

métabolisme 27 (2013) 185–190

Un parcours type est défini mais il est adapté et personnaliséors du diagnostic éducatif. Le patient signe le consentementt recoit un formulaire d’information et le programme de seséances (date, heure, lieu et type de séance).

L’ensemble est défini dans le contrat entre le soignant quiéalise le diagnostic éducatif et le patient en fonction des prére-uis, des compétences à acquérir par le patient, de son lieu deésidence, de sa disponibilité.

.1. Les séances

Le programme comporte un choix de séances individuellesu collectives pour répondre à l’ensemble des compétences àcquérir par le patient et/ou sa famille.

Les thèmes des séances doivent permettre d’acquérir’ensemble des compétences d’auto-soins [7] et d’adaptation [8]n lien avec la technique enseignée.

Chaque séance fait l’objet d’une fiche descriptive comportantes objectifs d’apprentissage, le matériel, la méthode, les outils,’intervenant, le temps d’enseignement et une fiche d’évaluationermettant de suivre l’évolution au fil des séances.

.2. Les principaux thèmes des séances

Ces thèmes sont :

diagnostic éducatif ; hygiène ; découverte du matériel ; pose de la sonde ; préparation et pose de la poche ; débranchement ; retrait ; hygiène et surveillance ; conduites à tenir et prévention des complications ; auto-évaluation du patient.

.3. Les documents de suivi

Ces documents sont les suivants :

fiche d’information ; consentement du patient ; courrier au patient précisant le déroulement du programme ; courrier au médecin traitant et médecins spécialistes ; diagnostic éducatif répondant aux recommandations HAS,

permettant une connaissance globale du patient : histoireet vécu de la maladie, besoins, attentes, capacités cog-nitives émotionnelles et gestuelles, croyances de santé,aptitude au changement, ressources personnelles. . . Cela per-met la formulation des compétences à acquérir, à mobiliserou à maintenir, d’effectuer une évaluation psychoaffective

(dépression, locus de contrôle. . .) et d’identifier les ressourcesen regard des freins (ex : projet de retravailler, regard de lafamille. . .) ;

fiche d’évaluation initiale et finale.

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. Les conditions favorables à la réussite d’uneducation à l’autosondage

.1. Un climat de confiance

Comme pour tout autre acte d’ETP, le climat instauré dès leiagnostic éducatif conditionne le déroulement ultérieur éven-uel de l’éducation (voir Encadré 1). Cela implique que cet

Encadré 1: Les points clés de la réussite del’autosondage

1. Démarche dans le cadre de l’éducation théra-peutique :

• parcours formalisé d’éducation : l’éducationthérapeutique est à distinguer de l’informationdu patient ;

• le diagnostic éducatif : il permet de mettrele patient en confiance avec le soignant etavoir confiance en lui-même, il permet delever d’éventuels freins (anxiété, craintes. . .) etd’évaluer les capacités cognitives ;

• l’évaluation finale est essentielle : évaluationdes compétences d’auto-soins et d’adaptation.

2. Matériel : importance du choix de la sonde :

• sonde petite charrière (8–10 Fr), sans guide ;• sonde identique pour l’éducation et au domicile.

3. Un travail d’équipe pluridisciplinaire :

• impliquant l’équipe médicale, l’infirmière, ladiététicienne, éventuellement la psycholo-gue. . . ;

• lien avec le prestataire de service (évaluationdes pratiques à domicile, observance, difficul-tés rencontrées), en lien avec des personnesressources (conjoint, enfants, amis. . .).

4. Alliance d’un soin technique et relationnel :

• parcours type mais individualisé ;• discours unique ;• pluridisciplinarité (diététicienne, médecin, infir-

mière spécialisée, infirmière de secteur de soin,psychologue, assistante sociale. . .) ;

• continuité des protocoles : nécessité d’un livretde suivi (hôpital/domicile, infirmière spéciali-sée/infirmière de service/prestataire) ;

• finalité : qualité de vie, autonomie, préventiondes incidents et complications ;

• travail en réseau : suivi régulier (maladie chro-nique).

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ntretien soit programmé, annoncé et réalisé par une infirmièreormée à l’ETP, maîtrisant parfaitement l’approche relation-elle et la technique du soin, et ayant entièrement confiancen cette technique et en sa capacité à la faire acquérir au patient.lle exclut tout a priori sur la capacité éventuelle du patient

apprendre (qu’il s’agisse de savoir, savoir-faire ou savoirtre). L’expérience révèle que les patients qui s’adaptent etdhèrent le plus rapidement ne sont pas toujours ceux qu’onurait imaginés. Toutefois, des prérequis peuvent être définis,e qui permet d’éviter de proposer inutilement une éduca-ion si l’environnement du patient ne le permet pas (critères’exclusion).

Dès le diagnostic éducatif, l’infirmier peut déceler des obs-acles et apporter des réponses rassurantes aux peurs, croyances,eprésentations (vécu difficile de sondages naso-gastriques pré-édents, croyances sur la nutrition entérale, sur le trajet de laonde, la gêne. . .). Dès lors, des ressources précieuses peuventtre identifiées et servir de levier immédiat (image, autonomie,egard de la famille, reprise de travail, vie sociale, loisirs. . .)our guider le patient vers l’adhésion au programme, ou servire levier ultérieur lors du déroulement des séances.

.2. Variété des supports et méthodes pédagogiques

Les séances peuvent être variées (éducation individuelle,ollective) et proposer plusieurs méthodes (apports théoriques,émonstrations, manipulation par l’infirmier puis par le patient,etour d’expérience de patient. . .) et de multiples supportsmatériel de démonstration, livrets explicatifs, film. . .). Ellesoivent privilégier la participation active du patient et de saamille.

.3. Évaluation

Les outils d’évaluation permettent de suivre l’évolution desompétences du patient au fil des venues jusqu’à l’évaluationnale :

questionnaire de qualité de vie ; questionnaire sur l’image de soi ; suivi des paramètres nutritionnels (indice de masse corporelle

[IMC], poids, albumine, transthyrétine, bilan calorique) ; observance, tolérance, effets secondaires.

.4. Suivi

Un suivi rapproché et régulier du patient doit être organisé :uivi téléphonique, consultation, suivi et reprise d’éducation siesoin en dehors des séances programmées.

.5. Travail en réseau

L’ensemble des partenaires de soin doit être informéégulièrement de l’évolution du patient.

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. Les modalités de l’ETP autosondage

.1. Définition

L’autosondage naso-gastrique est la mise en place par leatient d’une sonde d’alimentation naso-gastrique pour la réali-ation d’une nutrition entérale à domicile.

.2. Population concernée

Les patients concernés sont ceux :

ayant une indication de nutrition entérale exclusive oucomplémentaire selon les recommandations [9] ;

ayant une nutrition entérale d’une durée prévisible dequelques semaines à plusieurs années ;

acceptant un programme d’ETP et ayant les capacités cogni-tives permettant d’intégrer les gestes et précautions à prendre.

.3. Contrindications à l’autosondage naso-gastrique

Les contrindications à l’autosondage sont :

troubles de la déglutition, chirurgie de la sphère ORL, anoma-lies anatomiques des fosses nasales, antécédents chirurgicauxde la base du crane ;

incapacité cognitive à l’éducation thérapeutique ; incompréhension du fait d’une barrière linguistique ; incapacité physique à réaliser un auto-soin ; refus de consentement d’entrée dans un protocole d’éducation

thérapeutique.

.4. Les étapes de la démarche

Les étapes de la démarche sont :

validation de l’indication médicale à l’ETP de l’autosondagenaso-gastrique ;

élaboration du diagnostic éducatif par l’infirmière permettantde définir le parcours éducatif ;

adhésion du patient au contrat thérapeutique : signature deconsentement ;

définition des modalités du parcours ETP en hospitalisationconventionnelle, en hôpital de jour ou en consultation externe,selon les capacités et les possibilités du patient ;

prescription médicale de la nutrition entérale.

.5. Matériel : sonde naso-gastrique sans guide

En première intention : sonde en silicone ou en polyuréthanee faible charrière (8 à 10 FR graduée) sans guide (code LPP193780). Les sondes en silicone, très souples peuvent être

lacées 30 minutes au réfrigérateur pour les rigidifier et ainsiaciliter la pose.

Les sondes avec guide sont contrindiquées en raison :••

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de l’augmentation du risque de perforation œsopha-gienne essentiellement au niveau crico-pharyngé [10]. Bienqu’exceptionnelle, cette complication semble plus fréquenteavec les sondes rigides, avec la répétition des poses et chezdes patients ayant des facteurs de risque (retard mental, pré-sence d’ostéophytes cervicaux, cardiomégalie, double arcsaortiques [11]) ;

le guide pourrait être utilisé par le patient pour déboucher lasonde en cas d’obstruction (risque de perforation ou de lésionstraumatiques) ;

la rigidité de la sonde augmente les risques de passage en sous-muqueux, notamment au niveau nasal, et peut favoriser lesérosions de la muqueuse, les ulcérations et les saignements.

.6. Éducation du patient : les spécificités de la démarchee soin

.6.1. Les étapes habituelles de la mise en place d’uneonde naso-gastrique

Les étapes habituelles de la mise en place d’une sonde naso-astrique sont les suivantes :

étape no 1 : information du patient ; étape no 2 : prescription médicale complète ; étape no 3 : préparation du matériel ; étape no 4 : pose de la sonde naso-gastrique ; étape no 5 : vérification de la position de la sonde après la pose

(radio) ; étape no 6 : fixation de la sonde naso-gastrique et vérification

de la position et la fixation des sondes au quotidien ; étape no 7 : soins d’hygiène et de confort ; étape no 8 : rincage de la sonde ; étape no 9 : administration des médicaments dans la sonde ; étape no 10 : changement de sonde ; étape no 11 : identification des complications et prévention ; étape no 12 : éducation du patient et de son entourage.

.6.2. Démarche de soin autosondage, les spécificités

.6.2.1. 1re étape : présentation du matériel au patient. Maté-iel qui sera utilisé à domicile :

seringue de 60 mL ; stéthoscope ; miroir ; lubrifiant : vaseline, eau, spray de silicone (si sonde en poly-

uréthane) ; ruban adhésif ; bouteille d’eau minérale.

.6.2.2. 2e étape : mise en place de la sonde par l’infirmier. Ilst néanmoins possible, en fonction du diagnostic éducatif, quee patient réalise lui-même la pose d’emblée, selon ses capacités

se prendre en charge (locus de contrôle interne) :

le patient est à jeun depuis 4 heures ; le patient est informé du déroulement de la pose ;

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l’infirmier se lave les mains au savon doux ou les désinfectepar friction avec une solution hydro-alcoolique en expliquantles modalités au patient ;

le matériel est exposé et organisé sur le plan de travail ; la longueur de la sonde est déterminée en mesurant la distance

« nez-oreille-creux épigastrique » + 15 cm sur un patient nonfléchi : un marquage est fait à l’aide d’un ruban adhésif ou lerepère gradué est mémorisé par le patient ;

on procède à un lavage de nez (instillation nasale), éventuel-lement on peut proposer une petite anesthésie locale nasalegrâce à un spray de xylocaïne ;

la sonde est lubrifiée ; la sonde est introduite dans la narine horizontalement et pous-

sée lentement ; le patient est encouragé à déglutir : pour cela, on lui fait sucer

l’embout d’une seringue remplie d’eau minérale ; la sonde est poussée progressivement jusqu’au repère sou-

haité ; la sonde est fixée à l’aide d’un ruban adhésif en 2 ou 3 points :

nez, joue, cou.

Après la pose : l’infirmier montre au patient comment contrô-er la position de la sonde dans l’estomac en vérifiant la présencees critères suivants :

absence de toux spontanée ; absence de bulle d’air lorsque l’extrémité de la sonde est

placée dans un verre d’eau ; la sonde est visible au fond de la gorge ; à l’injection d’air dans la sonde, des bruits hydro-aériques

sont entendus au creux épigastrique à l’aide du stéthoscope.

Remarque : l’auscultation permettra de rassurer le patient sura bonne position de la sonde (critère non absolu, faux positifs),ela implique de fournir un stéthoscope au patient.

Lors de la première pose : la bonne position de la sonde naso-astrique est contrôlée par une radiographie de l’abdomen etoupoles. La longueur de la sonde est notée sur le dossier deoins en s’aidant du repère gradué, repère que le patient noteraour les poses ultérieures.

.6.2.3. 3e étape : mise en place de la sonde par le patient :utosondage avec aide. Mise en place par le patient lui-mêmee sa sonde naso-gastrique sous l’observation de l’infirmier, quiccompagne le patient.

Le patient est assis ou debout, devant un miroir et procède àa pose de la sonde selon les modalités décrites précédemmentt vérifie la bonne position de la sonde :

repère sur la sonde ; contrôle par auscultation du creux épigastrique ; visualisation de la sonde en fond de gorge.

Le patient est amené à verbaliser ses impressions et à procéder une auto-évaluation.

Le retrait de la sonde est effectué sous l’observation de’infirmier.

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.6.2.4. 4e étape : mise en place de la sonde par le patient sanside. L’autosondage est réalisé par le patient sans aide mais’infirmier est présent en cas de nécessité. Cette étape permet’évaluer les compétences du patient.

.6.2.5. 5e étape : l’évaluation finale. L’évaluation est essen-ielle : elle porte sur les compétences d’auto-soins et’adaptation. Elle repose sur une grille d’évaluation qui reprendes différents points abordés :

le branchement/débranchement de la nutrition entérale ; l’installation du patient lors du passage de la nutrition enté-

rale ; l’importance de l’hydratation ; l’administration des médicaments ; les soins de pose de sonde naso-gastrique ; l’hygiène et le confort de la cavité buccale ; le confort et l’hygiène de l’état cutané au niveau du nez ; le positionnement de la sonde, la vérification au stéthoscope ; les conduites à tenir en cas de complication(s).

.7. Précautions et prise en charge des sondes

Il est indispensable d’utiliser le même matériel lors de’éducation et à domicile.

En l’absence de recommandation et d’étude spécifique,es sondes naso-gastriques sont changées tous les jours.our l’assurance maladie, la prise en charge de la sondeaso-gastrique ou naso-jéjunale est subordonnée au caractèreemboursable des forfaits 1 et 2 de nutrition entérale à domi-ile prévus aux références 1111902 et 1176876. Elle peut êtreumulée avec la prise en charge des forfaits 1 (1111902) et 21176876) de nutrition entérale à domicile. Néanmoins, il esttipulé que « les sondes en silicone ou en polyuréthane doiventtre changées une fois par mois ». Il n’est cependant pas préciséi elles peuvent être changées plus fréquemment. En l’absencee prise en charge, cette technique n’est donc possible qu’aprèsccord du prestataire pour intégrer le coût de la sonde dans leorfait hebdomadaire.

Il parait tout à fait possible de réutiliser les sondes, maisucune étude et aucune recommandation ne définit les moda-ités de nettoyage (protocole de lavage, condition de stockage,ombre de réutilisations. . .).

.8. Surveillance

La surveillance repose sur :

un suivi nutritionnel médical et par l’infirmière de l’unité ; un suivi de la nutrition entérale à domicile suivant l’arrêté

du 9 novembre 2009 et article L. 165-1 du code de la sécuritésociale.

. Conclusion

L’autosondage naso-gastrique est une alternative à la gastro-tomie ou à la sonde à demeure. Les conditions de réalisation

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oivent être strictement définies : parcours d’éducation théra-eutique permettant aux patients d’acquérir les compétencest de réaliser ce geste sans appréhension. La réussite dépendes compétences techniques du soignant (soins) mais surtoute ses aptitudes relationnelles et pédagogiques. L’instauration’une relation de confiance soignant–soigné est primordiale.ette démarche entièrement centrée sur le patient, et ses poten-

ialités d’apprentissage permet d’adapter l’attitude et la méthodeu soignant, selon le stade d’acceptation et d’aptitude au chan-ement. Le diagnostic est évolutif, s’adaptant au rythme duatient : savoir attendre, patienter, revenir en arrière si néces-aire, dans le respect de l’accompagnement du patient. Le respectes contrindications et le contrôle de la bonne réalisation dueste doivent permettre de réaliser l’autosondage naso-gastriqueans les meilleures conditions de sécurité.

éclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enelation avec cet article.

éférences

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