Le démarrage :

outil de performance et de démédication

Anouk DRONNEAU – Chêne Vert Conseil

Introduction

Le poids vif d’un poussin va au minimum doubler les 5 premiers jours de sa vie (muscle pectoral et

tube digestif surtout).

Une alimentation décalée, même de 48 heures, aura des effets néfastes sur le développement de

l’animal et l’acquisition de l’immunité. En pratique, le délai avant accès à l’alimentation est de 10 à

60 heures. C’est pourquoi, une fois arrivés à l’élevage, les animaux doivent trouver des conditions

optimum qui les stimuleront à se déplacer vers les points d’alimentation et d’eau le plus rapidement

possible.

Plus l’animal va consommer de manière précoce, plus il va améliorer l’efficacité de sa digestion

(augmentation du poids et diminution de l’indice de consommation). Son aptitude à se défendre

contre d’éventuels agents pathogènes (baisse de la mortalité et des traitements antibiotiques) sera

accrue, et ce au moins jusqu’à 21 jours d’âge (Dibner, 1998).

L’étude menée en 2013-2014 par Selvet (Durot A.L., 2014) sur « Les facteurs de risque et

conséquences du démarrage en élevage de poulets de chair de souche ROSS Evolution », a mis en

évidence une relation entre le ratio Poids à J7/Poids à J0 et les performances finales du lot, entre le

Poids à J7 et les performances finales du lot et la Mortalité à J7 et la Mortalité finale du lot.

Source : Noy Y. et Sklan D., 1999, J. Appl. Poultry Res. Source : Sklan D. et Noy Y., 2000, Poultry Sciences

Source : Dibner et al., 1998, J. Appl. Poultry Res. Source : Uni et al., 1998, Poultry Sciences

L’audit Démarrage va donc objectiver tous ces paramètres d’élevage par des mesures. Car l’éleveur

fait ce qu’il pense bon, mais il peut rentrer dans une routine ou être confronté à des dérives de

réglage, des usures de matériel, un changement de type de production ou tout simplement

l’évolution de la génétique.

L’intérêt de cet audit est non seulement individuel, mais aussi collectif. L’accumulation de données

permet de mettre en évidence des facteurs de risque récurrents, des modifications des

recommandations, des informations sur la qualité des issus (éléments précieux pour les couvoirs) et

l’évaluation du retour sur investissement des différentes actions proposées.

L’idée est donc « Mesurer pour Objectiver ». Cela sous-entend donc d’être en possession d’outils

adaptés aux mesures qui seront à faire, qu’ils soient bien étalonnés et bien utilisés.

Le déroulement d’un audit Démarrage :

-Première partie : avant l’arrivée des animaux.

Cette étape démarre environ 2 heures avant l’arrivée des oiseaux. Seront évalués :

le confort thermique : les recommandations sont propres à chaque espèce, mais de manière plus précise encore, elles peuvent varier en fonction de l’âge des reproducteurs. Il ne faut ni trop de chaleur, ni trop peu. La température dans le bâtiment doit être homogène afin d’offrir la même chance à tous. La température de litière, liée directement à la durée du préchauffage est essentielle au vu de la petite taille des animaux et de l’importance de la surface de contact entre lui et le sol. La corrélation entre la température de démarrage et le GMQ des 7ers jours de vie des poussins a été clairement démontrée (Laborie J., 2012).

la qualité de l’air ambiant : une oxygénation correcte doit être apportée et les gaz de combustion évacués. Le taux d’hygrométrie ne doit ni être trop élevé, ni trop bas (au risque de déshydrater les oiseaux).

l’accessibilité maximum à l’eau et à l’aliment. Cela sous-entend de contrôler que le matériel soit adapté et bien utilisé, de confirmer que les aliments soient appétant et que l’éclairement permette aux oiseaux de bien voir les différents éléments.

Les écarts les plus fréquemment rencontrés sont :

Les sondes de température et surtout d’hygrométrie mal étalonnées.

Des sondes trop hautes, non représentatives de la température ressentie par les animaux.

Des bâtiments insuffisamment ventilés avec des taux en CO2 trop élevés et des taux en O2 trop bas.

Photo 2 : Mesure des gaz

Photo 1 : Etalonnage des sondes

Photo Chene Vert Conseil

Photo Chene Vert Conseil

Manque de papier avec peu d’aliment au sol disponible, assiettes profondes et peu remplies.

Canalisations d’eau sales (50%), manque de matériel d’abreuvement surtout dans des systèmes de production où la densité dans les bâtiments est élevée, des débits d’eau souvent trop faibles ou trop élevés.

Préchauffage insuffisant

Luminosité faible (capots sales et usure des néons).

Dans l’étude Selvet 2013-2014, il a été démontré que certains facteurs d’élevage étaient

particulièrement déterminants dans la réussite du démarrage (poids et/ou mortalité), comme par

exemple :

-une eau potable et des canalisations propres (p 0,01)

-un préchauffage de 49 à 72 h (p 0,04)

-des mangeoires accessibles dès J0 (Mangeoires polyvalentes multi-âges) (p 0,09)

-Deuxième partie : l’arrivée des animaux.

Photo 6 : Endoscopie de canalisations d’eau (encrassement par du biofilm)

Photo Chene Vert Conseil

Photo 5 : Endoscopie de canalisations d’eau

Photo 3 : Evaluation de l’âge d’accès à l’aliment

Photo 4 : Aliment non accessible à J0

Schéma : Durée de préchauffage des bâtiments

Photo Chene Vert Conseil Photo Chene Vert Conseil

Photo Chene Vert Conseil

L’objectif à cette étape va être de rompre le moins possible la chaîne de chaleur et de les décharger

avec un minimum de stress.

Seront donc observés :

le maintien des températures de confort dans le camion, lors du déchargement, à l’extérieur et dans le bâtiment.

la qualité du déchargement et l’état des animaux. Sur le terrain, nous pouvons rencontrer deux types de déchargement, qui ont chacun des avantages et des inconvénients résumés dans le tableau ci-dessous :

l’état des oiseaux (morts en caisse, poids individuels …)

L’étude Selvet 2013-2014 a démontré que certains critères de qualité des poussins étaient

déterminants dans la réussite du démarrage (poids et/ou mortalité), comme par exemple :

-une bonne qualité bactériologique des poussins (≤ 10 organes avec E. Coli NT ou ≤ 1 organe

avec E. Coli typable) (p 0,009)

-une absence de morts en caisse (p 0,155)

-Troisième partie : après l’arrivée des animaux.

Le délai entre la mise en place et cette visite dépend l’espèce étudiée et … de l’heure d’arrivée des oiseaux.

Elle permet de se rendre compte :

de la répartition des animaux

Photo 7 : Déchargement de poussins par remorque aménagée

Photo Chene Vert Conseil

Photo 8 : Pesées individuelles d’un échantillon de poussins

Schéma : Histogramme des pesées de poussins

de mesurer à nouveau certains paramètres qui évoluent suite à la présence des animaux ou à certaines modifications déjà apportées par l’éleveur

d’évaluer le suivi de l’éleveur Les jabots sont palpés afin de déterminer leur niveau de remplissage et leur texture.

Conclusion

Comment savoir si un démarrage est réussi ? Nombreux sont les éleveurs qui ne se basent que sur la

perte des « 2% gratuits ». Mais aujourd’hui, est-ce suffisant face aux contextes économique et

sociétal, sous-entendant aussi une réduction de l’utilisation des antibiotiques.

Il est donc évident que seule la mortalité est insuffisante pour en juger. Le tableau ci-dessous résume

les différents paramètres dont il faut tenir compte :

Schéma : Répartition des poussins Schéma : Nombre de passages de l’éleveur

Schéma : Purges quotidiennes des canalisations

L’audit de démarrage va permettre d’identifier les facteurs de risques propres à son élevage et de les hiérarchiser.

Vient le temps ensuite d’estimer les modifications nécessaires à l’amélioration, que ce soit en termes de prise de conscience, de temps, d’organisation ou d’investissement matériel.

Comme nous montrent les différentes enquêtes et études menées à ce sujet, la marge de progrès est encore énorme.

Alors, qu’on se le dise, produire aujourd’hui et demain, c’est et ce sera « Investir pour prévenir, plutôt que dépenser pour guérir » Dr Drouin.

Bibliographie

BIGOT K. et al, Prod.Anim., 2001, 14(4), 219-230

DIBNER et al.. Early Feeding and Development of The Immune System in Neonatal Poultry. Applied Poultry Sciences, 1998, 425-436

DUROT A.L.. Démarrage en élevage de poulets de chair de souche ROSS Evolution :

facteurs de risques et conséquences. Mémoire de Fin d’Etudes, Master Biologie, Agronomie, Santé, Rennes. 2014

LABORIE J.. Déterminants et conséquences d’un bon démarrage en poulet de chair standard. Thèse de doctorat vétérinaire, Faculté de Médecine, Nantes, Oniris. 2012

La Plume Verte – Chêne Vert Conseil N° 38, mars 2015

NOY Y. et SKLAN D.. Different Types of Early Feeding and Performance in Chicks and Poults. J. Applied Poultry Sciences, 1999, 16-24

Ross Broiler Handbook 2014

SKLAN D. et NOY Y.. Hydrolysis and Absorption in the Small Intestins of Posthatch Chicks. Poultry Sciences, 2000, 79 :1306-1310

UNI et al.. Posthatch Development of Mucosal Function in the Broiler Small Intestine. Poultry Sciences, 1998, 77 :75-82