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La NuIt RwaNDaISE N°3 1 Jeanine Munyeshuli BarBé le génocide des Bagogwe note de lecture : Le massacre des Bagogwe, un prélude au génocide des Tutsi, Rwanda (1990 - 1993), Diogène Bideri, l’harmattan, 2009 Le génocide des Bagogwe est le plus souvent mentionné comme anecdotique. Grâce au livre de Diogène Bideri, on en prend la mesure. On comprend qu’en fait le génocide avait pleinement com- mencé dès 1990, dès le début de l’intervention française. Faut-il rap- peler que le camp de Bigogwe, principal camp d’entraînement fran- çais au Rwanda, est au cœur de la zone génocidaire ? « L’extermination de ce groupe humain marginal a été le coup d’es- sai du génocide : c’était, en 1991, un “test en grandeur réelle”, une mise au point des méthodes qui seront utilisées en 1994 », écrivait Jean-Paul Gouteux. Il y a environ un an, jour pour jour, Diogène Bideri 1 me faisait parvenir le bon à tirer de son ouvrage à paraître chez l’Harmattan. C’est avec beau- coup d’émotion que j’aborde ce manuscrit en première lecture. Je l’ai, depuis, intégralement relu deux fois. Et je n’ai eu de cesse de découvrir des points précis sur lesquels ce petit ouvrage jette un éclairage inédit. Les Bagogwe, dernière grande communauté tutsi du nord du rwanda 2 Derrière ce récit, je lis d’abord le témoignage pudique d’un rescapé sur l’extermination des siens. Diogène Bideri est un Mugogwe 3 , né à Busogo, en commune de Mukingo. C’est à la mémoire des siens exterminés entre 1990 et 1993 que ce livre est dédié. Son ouvrage commence par un bref retour en arrière historique.

Le génocide des Bagogwe

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Jeanine Munyeshuli Barbé Le génocide des Bagogwe Note de lecture :Le massacre des Bagogwe, un prélude au génocide des Tutsi, Rwanda (1990 - 1993), Diogène Bideri, l’harmattan, 2009 Le génocide des Bagogwe est le plus souvent mentionné comme anecdotique. Grâce au livre de Diogène Bideri, on en prend la mesure. On comprend qu’en fait le génocide avait pleinement commencé dès 1990, dès le début de l’intervention française. Faut-il rappeler que le camp de Bigogwe, principal camp d’entraînement français au Rwanda, est au cœur de la zone génocidaire ? «L’extermination de ce groupe humain marginal a été le coup d’essai du génocide : c’était, en 1991, un “test en grandeur réelle”, une mise au point des méthodes qui seront utilisées en 1994 », écrivait Jean-Paul Gouteux.

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La NuIt RwaNDaISE N°3 1

Jeanine Munyeshuli BarBé

le génocide des Bagogwe

note de lecture : Le massacre des Bagogwe, un prélude

au génocide des Tutsi, Rwanda (1990 - 1993),

Diogène Bideri, l’harmattan, 2009

Le génocide des Bagogwe est le plus souvent mentionné commeanecdotique. Grâce au livre de Diogène Bideri, on en prend lamesure. On comprend qu’en fait le génocide avait pleinement com-mencé dès 1990, dès le début de l’intervention française. Faut-il rap-peler que le camp de Bigogwe, principal camp d’entraînement fran-çais au Rwanda, est au cœur de la zone génocidaire ?« L’extermination de ce groupe humain marginal a été le coup d’es-sai du génocide : c’était, en 1991, un “test en grandeur réelle”, unemise au point des méthodes qui seront utilisées en 1994 », écrivaitJean-Paul Gouteux.

Il y a environ un an, jour pour jour, Diogène Bideri1 me faisait parvenirle bon à tirer de son ouvrage à paraître chez l’Harmattan. C’est avec beau-coup d’émotion que j’aborde ce manuscrit en première lecture. Je l’ai,depuis, intégralement relu deux fois. Et je n’ai eu de cesse de découvrir despoints précis sur lesquels ce petit ouvrage jette un éclairage inédit.

Les Bagogwe, dernière grande communauté tutsidu nord du rwanda

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Derrière ce récit, je lis d’abord le témoignage pudique d’un rescapé surl’extermination des siens. Diogène Bideri est un Mugogwe3, né à Busogo,en commune de Mukingo. C’est à la mémoire des siens exterminés entre1990 et 1993 que ce livre est dédié. Son ouvrage commence par un brefretour en arrière historique.

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2 La NuIt RwaNDaISE N°3 • JEaNINE MuNyESHuLIu BaRBé, Le génocIde des Bagogwe

Les Bagogwe, nous explique Bideri, sont «�des�descendants�des�Tutsi�qui�sesont�séparés�du�royaume�central�aux�XVII-XVIIIème�siècles,�restant�à�l’écart�de�lahiérarchie�politique�établie�par�les�autres�Tutsi�»4. Se déplaçant avec leur bétaille long de la crête Congo-Nil, ces pasteurs nomades auraient quitté leshautes terres du Budaha – région de Kibuye – pour s’installer par petitsgroupes vers le Nord du pays, aux pieds des volcans et à la lisière de la forêtde Gishwati. Cette colline rocheuse entre Gisenyi et Ruhengeri, c’est la col-line de Bigogwe, dite aussi ibere rya Bigogwe, la mamelle de Bigogwe. Il y alà de grands pâturages et le climat est propice à l’élevage des bovins.

Pendant plus d’un siècle, volontairement coupés5 du pouvoir central dupays, les Bagogwe préservent un mode de vie traditionnel très peuinfluencé par la cour royale. À cette période de relative paix pré-coloniale,succèdera l’occupation allemande et le joug belge, sous lesquels les coloni-sateurs mèneront la vie dure aux Bagogwe. Ils sont alors dépossédés de leurspâturages pour créer le « Parc national albert »6 et dans ce qu’il leur restede terres, les voilà contraints à cultiver le pyrèthre7. avec l’instauration du« umugogoro » l’administration coloniale exige des Bagogwe un approvi-sionnement gratuit en lait et en viande de bœuf. C’est ainsi que les vastesterritoires du Bigogwe se réduiront comme peau de chagrin tandis que lestroupeaux de bovins sont décimés par nourrir les armées et l’administra-tion coloniale.

Ce paisible peuple d’éleveurs, qui avait jadis les moyens de vivre en quasiautarcie, est brisé et privé de ce qui a fait son essence8. Fin des années19509, les Bagogwe sont devenus une peuplade marginalisée et considéréecomme arriérée. Dès 1963, comme tous les tutsi, les Bagogwe sont persé-cutés, leurs maisons sont incendiées. Certains réussissent à s’enfuir vers leZaïre voisin avec leur bétail. une petite partie, demeurée au Rwanda, sur-vit aux pogroms et va subir des humiliations encore plus cinglantes.L’ouvrage de Bideri rend compte en détail du sort que la premièreRépublique de Kayibanda a réservé aux tutsi, les Bagogwe en tête10.

C’est à cette même époque que des familles de tutsi, venues du centreet du Sud, se réfugient au Nord, dans la paroisse de Nyundo où elles serontpar la suite assassinées sur ordre du Président Kayibanda. Début 1973, peuavant l’accession de Habyarimana au pouvoir, la situation est relativementcalme dans les provinces du Nord mais les tutsi persécutés dans le reste dupays transitent par Ruhengeri et Gisenyi pour se réfugier à Goma dans l’ExZaïre. C’est alors que des mesures sont prises pour mettre à contributionles bourgmestres de ces régions.

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En mars 1973, le travail��commence, les maisons des tutsi de Rwankelisont incendiées. Les paroisses avoisinantes de Busogo et autres lieux decultes deviennent des refuges pour les tutsi. Le 5 juillet 1973, JuvénalHabyarimana, alors ministre de la Défense pendant la présidence deGrégoire Kayibanda, prend le pouvoir par un coup d’état. Né dans la petitecommune de Karago, comme son épouse et bon nombre de dignitaires deson régime, il est originaire de la région de Gisenyi. Géographiquement, leBigogwe est, pour ainsi dire, enclavé dans le fief de l’akazu11. C’est dans lesannées 80 que naîtra le réseau, dit « réseau zéro », à l’origine du massacredes Bagogwe.12

Les Bagogwe en tête de peLoton d’exécution des tutsi

Le cœur de l’ouvrage de Bideri, c’est la trame historique des massacresdes Bagogwe entre 1990 et 1993. Le lecteur parcourt horrifié, les unes aprèsles autres, la quasi totalité des communes du Nord-Est du Rwanda.

1er Octobre 1990, le Front� Patriotique� Rwandais (FPR)13 attaque par leNord du pays. Les Bagogwe, déjà réduits au rang de sous-citoyens, ne sedoutent pas que leur extermination systématique et annoncée14 va commen-cer. Le prétexte est tout trouvé pour mener à terme l’entreprise de répres-sion des tutsi déjà bien entamée. La proximité géographique du Bigogweavec la région du Bushiru, d’où sont originaires les membres de l’akazu etautour duquel sont situés de nombreux camps militaires, fait des Bagogweune cible idéale. Ils seront les premiers tutsi à être exterminés très métho-diquement. Des incidents sont provoqués pour contribuer à l’ambiancedéjà délétère. une technique fréquemment utilisée sera celle de la lettre dedénonciation anonyme que les enseignants hutu retrouvent dans les écoles.Les Bagogwe seraient des suppôts du FPR, il faut les liquider.

La propagande anti tutsi est tellement efficace que le Bigogwe est qua-drillé, il y a des barrières tous les deux kilomètres, les Bagogwe ne peuventmême plus fuir le pays, ni même souvent quitter leur commune, ils atten-dent leur tour, résignés. En 1992, la population des Bagogwe, estimée àcent mille personnes dans un recensement de 1990, est à moitié décimée,avant d’être complètement réduite à néant en 1994. Parmi les victimes,dont le récit de la mise à mort est documenté dans cet ouvrage15, il faut citerle nom d’augustin augusti – oncle de Bideri – mort fusillé dans les locauxde sa commune natale de Mukingo. On retrouve de nombreux membres desa famille et des familles apparentées dans la fameuse liste rouge publiée dès199016 et détaillée à la fin de l’ouvrage.

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Ces listes attestent à la fois du caractère planifié des massacres – elles ontété préalablement fournies par des génocidaires avérés17– et du courageinouï des responsables des journaux rwandais qui ont les premiers brisésl’omerta sur ce génocide dès 199118. À titre de comparaison, si les Bagogweétaient des Européens, une bonne partie des personnes recensées porte-raient le même nom de famille19. En préambule, Bideri l’historien et spécia-liste du droit, affirmait déjà «�Mal�connue,�sans�doute,�au�Rwanda,�l’ampleur�ducrime�sur�les�Bagogwe�ne�s’est�révélée�que�progressivement.�Il�fut�un�génocide�ordi-naire� puisqu’il� n’eut� pas� de� suite� et� que�même� aujourd’hui� le�monde� n’en� gardequ’un�vague�souvenir.�La�présence�des�troupes�étrangères,�l’attitude�des�troupes�fran-çaises�en�particulier,�a�été�déterminante�pour�tester�que�le�génocide�des�Tutsi�pou-vait�être�opéré�sans�que�les�puissances�tutélaires�du�Rwanda�n’interviennent.�»20

une répétition généraLe du scénario de 1994

Dans la période 1990-1993, la chasse impitoyable au tutsi est menéejusque dans les coins les plus reculés du Nord du Rwanda. Ces annéesconstituent une période charnière dans l’engagement de l’armée françaiseau Rwanda. C’est là que l’ouvrage de Bideri se recoupe avec tous les docu-ments qui vont nier ou établir l’implication française dans le génocide destutsi du Rwanda.

Quelques exemples : En Octobre 1990, c’est sous le regard bienveillantdes para commandos de l’opération Noroît que les massacres de Kibilira (àpartir du 11 octobre) vont se dérouler. En janvier 1991, environ 1000Bagogwe sont tués dans les préfectures de Ruhengeri et Gisenyi. Ces vic-times innocentes n’ont aucun lien avec le FPR ! Cette même année, laFrance accroît son aide financière et devient le premier bailleur de fonds duRwanda. Sur le plan de l’armement, la dépense explose littéralement :armes à feu, lance-roquettes, mortiers, mitrailleuses, radars, mines anti per-sonnelles sont exportés de France vers le Rwanda21.

La nuit du 22 au 23 janvier 1991, le raid du FPR sur la ville deRuhengeri22 dans le Nord marque une nouvelle étape dans l’interventionmilitaire française au Rwanda. Le premier détachement d’assistance mili-taire et d’instruction (DaMI) s’implante à Ruhengeri, en mars 1991, pourrenforcer l’opération Noroît. Le rapport de la commission d’enquêteMucyo23 fait état de l’implication française dans le génocide lors des opéra-tions lancées par ces dami.24 Durant cette période de nombreux témoi-gnages attestent de l’implication française dans les camps militaires duNord où les militaires français forment les futurs miliciens Interahamwe. Lerapport Mucyo relate les témoignages d’anciens miliciens formés dans les

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camps de Bigogwe et de Mukamira. Le témoignage de Ntirenganyaabdumalk, chauffeur de taxi moto de Gisenyi en est une parfaite illustra-tion. «�Il� a� commencé� par� recevoir� une� formation� paramilitaire� dans� le� stadeUmuganda�de�la�ville�de�gisenyi.�ensuite,�il�a�été�envoyé�dans�le�camp�Bigogwe.�Ila�eu� lui�aussi�pour� instructeur� le�capitaine Bizumuremyi�et�un�militaire� françaisappelé�Francisco�:�“on�nous�a�appris�comment�rechercher�l’ennemi,�ils�nous�disaientque�l’ennemi�est�le�Tutsi.�Ils�nous�ont�demandé�de�repérer�l’ennemi�afin�que�lorsquela�guerre�commencerait�l’on�puisse�l’identifier.” ».25

Sur la formation des miliciens, le rapport Mucyo récapitule ainsi : «�desmilitaires� français,� vraisemblablement,� des� éléments� du�daMI,� ont� participé� dèsfévrier�1992�au�démarrage�du�programme�de�“défense�civile”�qui�avait�pour�but�deformer�une�milice�de�civils�dont�l’un�des�objectifs�était�de�les�préparer�à�tuer�les�civilstutsi� de� leur� localité.� À� la� même� époque,� ils� ont� aussi� commencé� à� former� desInterahamwe� professionnels� dont� notamment� les� membres� du� groupe� d’élite“Turihose”.�La�formation�des�Interahamwe�avec�la�participation�active�de�militairesfrançais�a�été�systématique,�elle�s’est�effectuée�dans�l’ensemble�des�camps�militairesoù�œuvraient�les�éléments�du�daMI,�et�elle�semble�avoir�été�continue�du�début�del’année�1992�jusqu’à�la�fin�de�l’année�1993,�moment�du�départ�des�troupes�fran-çaises�du�Rwanda.�»

a posteriori, il ne fait aucun doute que le génocide des tutsi commenceavec les massacres des Bagogwe de 1990 à 1993.

En février 2009, lors de la présentation du livre de Diogène Bideri à lapresse et à la classe politique rwandaises, la Commission Nationale deLutte contre le Génocide (CNLG) a pris acte de la démonstration que l’ou-vrage établit. La décision de le rééditer avec comme titre «�le�génocide�desBagogwe�» a été prise. Il sera traduit en Kinyarwanda et en anglais. Il a éga-lement été décidé d’ériger une stèle à la mémoire des victimes Bagogwedans la région qu’ils habitaient.

Hommage postHume à La mémoire de Jean carBonare

Le 24 Janvier 1993, quiconque a vu le passage télévisé de Jean Carbonaresur France� 2 dans le journal de Bruno Masure s’en souvient ! JeanCarbonare revenait d’une brève mission au Rwanda où il avait dirigé lacommission internationale d’enquête sur les violations des Droits del’homme au Rwanda (CIE). La CIE était diligentée par la FIDH, HumanRights�watch et d’autres organisations de lutte pour les droits de l’hommeafricaines. Ce rapport, même s’il est jugé tardif26, a été une référence detaille pour l’ouvrage de Bideri.

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Le rapport de la CIE, dit Bideri «�montre�minutieusement�les�mécanismes�desmassacres�et�décrit�les�techniques�utilisées�par�les�auteurs�de�massacres.�Il�identifieclairement�les�responsables�des�massacres.� sur�la�question�du�génocide,�les�rappor-teurs�étaient�explicites�:�“L’horreur�de�la�réalité�observée�par�la�commission�estompeen�fin�de�compte�l’importance�du�débat�juridique�sur�la�qualification�de�génocide.de� nombreux� Tutsi,� pour� la� seule� raison� qu’ils� appartiennent� à� ce� groupe,� sontmorts,�disparus�ou�gravement�blessés�ou�mutilés�;�ont�été�privés�de�leurs�biens�;�ontdû�fuir�leurs�lieux�de�vie�et�sont�contraints�de�vivre�cachés�;�les�survivants�vivent�dansla� terreur”�»27. Ce sont les conclusions de ce rapport qui déclenchent uneenquête de l’ONu dirigée Mr B.w. Ndiaye, rapporteur spécial. Sa missionsur le terrain durera une semaine, du 8 au 17 avril 1993. Le rapporteur spé-cial précise «�les�victimes�des�attaques,�des�Tutsi�dans�l’écrasante�majorité�des�cas,ont�été�désignés�comme�cible�uniquement�à�cause�de�leur�appartenance�ethnique,�etpour�aucune�autre�raison�objective.�»28

Pendant son séjour au Rwanda, Jean Carbonare a pu interviewer Janvierafrika, un ancien membre de l’escadron de la mort alors en prison. Sontémoignage en dit long sur la nature des crimes qui se commettaient à l’en-contre des tutsi. Carbonare transmet les témoignages filmés à BrunoDelaye, le « Monsieur afrique » de l’élysée qui ne s’en émeut pas outremesure.

Souvenons-nous encore de l’interview de Jean Carbonare au NouvelObservateur du 4 août 1994. Il s’écrie : «�J’ai�eu�deux�grands�chocs�dans�ma�vie.Le�premier,� lorsque� j’ai�découvert,�en�algérie,�qu’on�avait� institutionnalisé� la� tor-ture.�et�le�deuxième,�en�janvier�1993,�quand�j’ai�vu�les�instructeurs�français�dansles� camps� militaires� de� Bigogwe.� c’est� là� qu’on� amenait� des� civils� par� camionsentiers.� Ils� étaient� torturés� et� tués,�puis� enterrés�dans�une� fosse� commune.�» JeanCarbonare alerte la France en vain. Il avait les preuves irréfutables du géno-cide des Bagogwe, et la suite lui a donné raison. En 1994, le génocide destutsi s’étend à tout le pays au vu et au su de la communauté internationale.

Plus de dix ans plus tard, dans son pavé raciste et négationniste29, PierrePéan se lance dans une entreprise de démolition du témoignage courageuxde Jean Carbonare.

arrêtons-nous un bref instant sur les deux chapitres que Pierre Péanconsacre à Jean Carbonare.

Du chapitre 7, intitulé « une étrange curée droit-de-l’hommiste contreHabyarimana », relevons tout d’abord, page 127 : «�en�quelque�quatorze�jours,Jean� carbonare� va� “tout� comprendre� du� Rwanda”.�»� Etrange procédé, pourPierre Péan l’enquêteur, que de ne point citer la source de sa citation !

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Carbonare en sait suffisamment pour qualifier les exactions en cours, et lemoins que l’on puisse dire c’est que le rapport de la CIE est très détaillé.Péan ne s’en prend pourtant pas au rapporteur spécial de l’ONu dont lamission sur le terrain est plus courte et dont les conclusions convergentavec celles de la CIE. Péan passe également sous silence les dénonciationscourageuses des associations rwandaises30 des droits de l’homme.

Page 127 toujours : «�en�revanche�la�recherche�de�fosses�communes�et�de�char-niers�se�révèle�très�décevante,�malgré�le�travail�de�l’équipe.�La�lecture�du�rapport�decelle-ci,�très�factuel,�est�à�cet�égard�bien�plus�instructive�que�le�rapport�principal.�ontété�trouvés�:�un�squelette�dans�la�grotte�n°2�sur�le�site�de�Bigogwe,�mais�rien�sur�lessites�des�cinq�autres�grottes�visitées;�rien�dans�les�huit�grottes�du�site�de�Kareba;�riensur�les�deux�fosses�situées�derrière�la�maison�communale�de�Kinigi�(…)�».

Le procédé qui consiste à s’appesantir sur le contenu des grottes estd’une malhonnêteté inouïe qui consiste à faire croire au lecteur que lesgrottes sont les seuls charniers de ce site. Hélas, sur le site de Bigogwe, partrois fois, le rapport de la CIE est cité par Bideri dans le chapitre «�le�campmilitaire�abattoir�de�Bigogwe�»31. Ce sont les enquêteurs dirigés par Carbonarequi ont découvert la fosse commune de Kanzenze. Ce charnier se situe dansle Bigogwe même !

Page 127 encore : «�Rien� sur� le� site� des� cinq�autres� grottes� visitées.�» Sur cepoint précis, l’ouvrage de Bideri apporte des informations supplémentaires.Dans le camp militaire de Mukamira, le charnier des grottes Nyaruhongafut découvert après 1994 grâce aux témoignages de Hutu qui avaient parti-cipé aux massacres des Bagogwe.32 Le désespoir était tel dans ce camp deMukamira, que les Bagogwe qui n’avaient pas d’autre option que d’atten-dre résignés leur exécution prochaine, avaient parfois le courage de se pen-dre. Le récit du suicide du dénommé Segikeri est tout simplement glaçant33.Il s’est tout de même trouvé quelques cyniques pour stigmatiser la propen-sion au suicide des Bagogwe !

Du chapitre 8 intitulé «�Les�fables�de�Jean�carbonare,�président�de�survie�»,plusieurs affirmations de Pierre Péan peuvent être balayées mais retenons-en une en particulier.

Il s’agit des propos de l’ancien ministre de la défense James Gasana quePierre Péan fait siens lorsqu’il affirme, à la page 155 : «�Il�n’y�avait�pas�deFrançais�installés�au�centre�commando�de�Bigogwe.�»

Dans l’ouvrage de Bideri, pages 91 à 94, le chapitre entier «�Les� soldatsfrançais�dans�les�camps�militaires�de�Mukamira�et�Bigogwe�» est un démenti cin-glant à cette affirmation. Ces trois pages sont largement documentées par

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le rapport de la Mission d’information parlementaire sur le Rwanda(MIPR) présidée par Paul Quilès.

Citons notamment : «�Les� premiers� éléments� du�daMI� s’installèrent� le� 29mars�1991�à�l’université�de�nyakinama�près�de�Ruhengeri. “L’instruction�s’effectuedans�les�camps�suivants�:�les�camps�de�base�à�Mukamira�(…)�;�le�centre�commandode�Bigogwe.”�»34

Citons encore le témoignage de Jean-Bosco Habimana, chefInterahamwe et ex-caporal des FaR, enregistré par Georges Kapler : «�Là�oùj’étais�dans�le�Bigogwe,�les�Français�nous�avaient�formés�en�nous�disant�que�c’étaitpour�aller�combattre�l’ennemi�et�le�seul�ennemi�était�le�Tutsi.�Jusqu’au�moment�oùnous�avons�tué�les�Bagogwe�qui�habitaient�dans�le�coin.�c’était�des�Tutsi,�ils�ont�ététués�après�l’arrivée�des�Français,�qui�n’ont�strictement�pas�réagi�alors�que�c’était�euxqui�nous�avaient�appris�à�faire�autant�de�mal.�»35

Citons enfin le témoignage du général à la retraite Jean Varret dans sonaudition devant la MIPR. Le général était le chef de la Mission militaire decoopération d’octobre 1990 à avril 1993. Il affirme que «�la�mission�d’instruc-teurs�se�déroulait�en�dehors�de�la�ville�dans�deux�camps.�Les�instructeurs�vivaientdans�ces�camps�avec�les�jeunes�officiers�et�les�jeunes�recrues.�»36 Pierre Péan auraitpu se donner la peine de consulter le rapport de la MIPR pour puiser lesinformations sur la présence militaire française dans ce camp, à la source sije puis dire !

Jean Carbonare s’est éteint avant d’avoir eu connaissance de l’ouvrage deBideri. Ils ne se connaissaient même pas. Je me plais à imaginer que ce livrelui aurait apporté quelque baume au cœur face aux propos intentionnelle-ment blessants de Pierre Péan.

Ceci dit, ils jettent davantage le discrédit sur Pierre Péan lui-même quesur qui que ce soit d’autre. L’armée française elle-même ne tire aucunegloire d’être si lamentablement défendue !

La Justice en question

Le troisième mérite de l’ouvrage de Diogène Bideri est de pointer dudoigt quelques acteurs majeurs du génocide des Bagogwe qui demeurentimpunis. Citons le cas de Pierre tegera, l’un de ceux sur qui pèsent de trèsfortes présomptions de culpabilité dans la réalisation du génocide desBagogwe. Il est originaire de Kibilira, en préfecture de Gisenyi, où il a dirigéle Programme National d’amélioration de la Pomme de terre (PNaP). Cebrave Mr�Patate – c’est son surnom rwandais, Kirayi – était membre desescadrons de la mort et président d’honneur des Interahamwe de Kibilira.La justice rwandaise37 le poursuit pour crime contre l’humanité, pour exter-

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mination et, alternativement assassinat. Pierre tegera résiderait actuelle-ment à Nice.

En Septembre 2008, l’OFPRa (Office français de protection des réfugiéset apatrides) a débouté son recours en vue de l’obtention du statut de réfu-gié, considérant qu’il y a des raisons sérieuses de penser qu’il a commis uncrime contre la paix, un crime de guerre ou un crime contre l’humanité.

Les rescapés Bagogwe ont dénoncé d’autres bourreaux, Rwandais etFrançais38, dont les noms restent à porter devant la justice. Grâce à cette his-toriographie, ils disposent enfin d’un témoignage solide. C’est le vœuqu’émet Diogène Bideri dans la conclusion de son ouvrage.

En kinyarwanda, cette monographie pourrait tenir en une phrase :«ntabapfira� gushira� hasigara� iminsi� yose� uzabara� inkuru.�» autrement dit,aucune tentative d’extermination n’est jamais totalement aboutie, il sub-siste toujours un rescapé pour en témoigner. En plus d’être un témoignagepersonnel, l’ouvrage de Bideri participe à la mémoire collective du géno-cide des tutsi du Rwanda. Ce crime d’état – commis avec la complicité trèsdirecte des militaires français présents sur le terrain des opérations – a com-mencé dès 1990, à l’encontre des populations Bagogwe et s’est poursuivi,ininterrompu jusqu’à l’apocalypse de 1994.

notes

1. Diogène Bideri travaille actuellement au Rwanda (au sein de la Commission de la Luttecontre le Génocide, au ministère de la Justice et comme professeur de droit à l’université).Il a créé la Fondation Ntarama, pour la mémoire et l’histoire. Il est titulaire de nombreusesdistinctions académiques dont un doctorat en Droit international public de l’université deStrasbourg.2. au Nord du Rwanda, les seules populations tutsi sont les Bagogwe et les Bahima quihabitaient la région du Mutara. Ils seront également exterminés dès 1990.3. Le préfixe “umu” ou “mu” - gogwe signe le singulier alors que le “aba” ou “ba” - gogwesigne le pluriel.4. Diogène Bideri, Le�massacre�des�Bagogwe,�un�prélude�au�génocide�des�Tutsi,�Rwanda�(1990� -1993), page 26.5. S’abritant derrière les forêts, les Bagogwe tentent ainsi de se protéger des seigneurs deguerre qui sévissent à la fin du règne – parsemé de conflits - du roi Ndahiro Cyamatare(1477-1511).6. actuel Parc National des Virunga, créé en 1925 à l’initiative du naturaliste américain Carlakeley. Ce parc sera élargi en 1929, rognant sur l’espace vital des êtres humains.Habyarimana réutilisera l’argument de la préservation de la nature (Parc de l’akagera) pourinterdire aux tutsi exilés de retourner au Rwanda.7. C’est l’administrateur belge qui introduisit dans les années 30, la culture des fleurs de

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10 La NuIt RwaNDaISE N°3 • JEaNINE MuNyESHuLIu BaRBé, Le génocIde des Bagogwe

pyrèthre destinées à l’exportation. Il choisit les régions d’altitude du Nord et du Nord-Est.Les champs de lave de la région des Volcans constituent un riche terreau. Les fleurs de pyrè-thre du Rwanda ont la particularité de présenter l’un des taux les plus élevés en pyréthrine,ce puissant insecticide naturel. L’usine SOPyRwa se trouve toujours à Ruhengeri. 8. Il faudrait des bibliothèques entières pour dire le rapport à la vache qu’entretenaient lesBagogwe et les tutsi en général. La vache est au cœur du lien sociétal et de la cosmogonierwandaise.9. En 1957, le futur président de la première République du Rwanda, Grégoire Kayibandapublie le “Manifeste des Bahutu”, un texte fondateur de sa politique ethniste. Peu après naîtle Parmehutu, parti politique basé sur la même idéologie. En 1962, soutenu par l’adminis-tration coloniale et l’Eglise catholique, Kayibanda accède au pouvoir. La discrimination destutsi devient légale et leur persécution une pratique courante et encouragée. Le but est deles pousser en dehors du Rwanda afin de laisser le pays aux seuls Hutu. C’est le début d’unevague d’exils de tutsi vers les pays limitrophes que sont le Burundi, l’ex-Zaïre et l’Ouganda.10. Diogène Bideri, op.cité, pages 37-40.11. L’akazu, littéralement petite maison, regroupe des membres de l’élite militaire et civile prin-cipalement issus des communes Karago et Giciye. C’est le noyau du pouvoir occulte qui contrôlele pays. On y retrouve un grand nombre de membres de la famille du couple présidentiel.12. Diogène Bideri, op.cité, pages 45-56. On trouve la genèse du réseau Zéro selon la termi-nologie de Christophe Mpfizi ancien directeur de l’organisme d’Etat qui contrôle l’informa-tion (ORINFOR) qui a rédigé un rapport relatant le plan d’extermination des Bagogwe dansles années 90.13. Le FPR est à l’époque un mouvement constitué en grande partie de tutsi en exil.14. Diogène Bideri, op.cit., page 11. La citation de Hassan Ngeze de la revue extrémisteKangura, du 24 sptembre 1991, est des plus éloquentes: «�ces�dits�Bagogwe�ou�Falacha�(…)�ontcependant�intérêt�à�se�convertir�à�une�vie�civilisée�des�autres�Rwandais�(…)�avant�qu’il�ne�soit�trop�tardpour�eux.�a�90%,�ils�ont�été�repérés�(…).�Le�31�octobre�c’est�la�fête�de�Rwigema,�mort�comme�les�morts,tandis�que�le�lendemain�c’est�la�Toussaint.�a�eux�de�choisir�leur�tour…�»�15. Ibid., pages 77-81.16. Ibid., pages 52 : “Les�responsables�avaient�dressé�une�liste�de�personnes�à�rechercher�et�à�arrêter,notamment� gasahane,� Kaderevu,� Kabango,� segahwege,� Rudatinya,� Bukumba,� Biniga,� sabini,Mutanguha,�ndayambaje,�gihoza,�Karyango,�Bahiza,�Bernard,�Kabanda�et�ngango.�a�l’issue�de�laréunion�de�1990�les�Tutsi�dont�les�noms�figuraient�sur�la�liste�ont�été�arrêtés�puis�relâchés.�La�guerrea�repris�en�1991�et�il�s’est�tenu�une�seconde�réunion�à�l’issue�de�laquelle�les�mêmes�personnes�ont�étéarrêtées�et�tuées.”17. Citons ici Juvénal Kajelijeli, ancien bourgmestre de Mukingo dont un compte-rendud’audience au tPIR a permis de recenser environ 80 familles (soit plus de mille personnes)exterminées dans des conditions effroyables. Cf. tPIR compte-rendu de l’audience du 5décembre 2001, p. 27 (Procès Kajelijeli). Ce document est une des sources les plus fréquem-ment citées dans l’ouvrage. au tPIR, Kajelijeli a été condamné à la peine maximale qui aété commuée en appel à une peine de 45 ans d’emprisonnement. Les détails de son incul-pation sont consultables sur de nombreux sites, notamment http://www.trial-ch.org/fr/trial-watch/profil/db/facts/juvenal_kajelijeli_25.html. 18. Diogène Bideri, op. cité, page 125, note de bas de page. Il s’agit des journaux RwandaRushya N°10 Kanama, août 1991 et Le tribun du peuple N° 6, Septembre 1991. 19. Il me vient à l’esprit un souvenir de vacances aux Baléares. au moment de l’appel à l’en-trée du bateau, seuls les touristes ne portent pas le nom de Marì ou une variante Marì-Marì.L’idée ici, est que la population Bagogwe est constituée de familles apparentées soit par un

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ancêtre commun soit par le biais des mariages, soit les deux. une façon courtoise de se pré-senter entre tutsi, est de décliner son arbre généalogique et il n’est pas rare que deux per-sonnes aux noms bien distincts se retrouvent apparentées.20. Ibid., page 23.21. La France était le principal fournisseur d’armes et d’équipements militaires au Rwanda.Voir : Mel McNulty « French arms, war and genocide in Rwanda », Crime, Law & SocialChange, pages 105-129, n°33, 2000.22. Diogène Bideri, op. cité, pages 91-94 lire le chapitre « Les soldats français dans les campsmilitaires de Mukamira et de Bigogwe »23. Il s’agit de la commission rwandaise chargée de rassembler les éléments de preuves mon-trant l’implication de l’état français dans la préparation et l’exécution du génocide destutsi, on la désigne communément du nom de son président, commission Mucyo. aumoment où Bideri remet son manuscrit à son éditeur, le rapport Mucyo n’a pas encore étépublié.24.Les conclusions du rapport de la Commission Mucyo pages 46 à 51 sont particulière-ment accablantes sur la participation française directe dans les combats.25. Rapport Mucyo, page 6126. Diogène Bideri, op. cité, pages 99-103, “une enquête internationale tardive”. Il est ànoter que les enquêteurs internationaux débarquent en janvier1993, alors que depuis deuxans les populations Bagogwe se font exterminer de façon continue. Dans la presse belgepourtant, dès 1991, le journal L’instant, dans son édition du 20 juin, dénonçait les massa-cres. 27. Ibid., page 101.28. Ibid., page 102. a l’instar de la CIE, les conclusions convergentes du Rapporteur spécialde l’ONu ne déclencheront aucune poursuite pénale.29. Pierre Péan, Noires fureurs, blancs menteurs, Editions Fayard, 2005.30. Citons en particulier l’association Kanyarwanda fondée par le physicien mugogwe FidèleKanyabugoyi. Dans une publication de Janvier 1991, il établit une liste exhaustive des vic-times Bagogwe et qualifie le premier, les massacres des Bagogwe de Ruhengeri et Gisenyi degénocide. Kanyabugoyi sera 31. Diogène Bideri, op. cité, pages 83 -88 32. Ibid., page 53 .33. Ibid., page 69 “Il�y�a,�dans�la�vie,�des�situations�pires�que�la�mort.�La�mort�peut�même�semblerune�libération.�Qui�connaît�le�drame�de�cet�homme�qui�s’est�pendu�au�moment�où�les�tueurs�venaientl’exécuter�?�Qui� le� sait�?� se� suicider,� à� ce�moment-là,� était� une� issue� pour� échapper� aux� atrocités.L’espoir�de�survie�était�nul.�Face�à�une�mort�certaine�et�cruelle,�certains�Bagogwe�préféraient�se�pen-dre�plutôt�que�de�se�laisser�découper�à�la�machette” Le récit du suicide de Segikeri se poursuit surcette page. En 1994 également, de nombreux tutsi ont “choisi” cette fin là.34. Ibid., page 92. Note de bas de page, MIPR, tome I (pages 146-148).35. ibidem36. Diogène Bideri, op. cité, page 93.37. Ibid., page 54.38. Ibid., page 124. Bien avant les conclusions de la commission Mucyo et sans citer de nom,Bideri conclut : “La�présence�des�instructeurs�français�apparaît�comme�un�appui�moral�et�matérielau�régime�rwandais.�La�complicité�entre�le�daMI�et�les�tueurs�devrait�être�établie.�certains�instruc-teurs�français�auraient�assisté�aux�tortures�et�aux�massacres�des�Bagogwe.�Il�faudrait�identifier�les�per-sonnes�impliquées�particulièrement�dans�ces�actes.�celles-ci�pourraient�être�poursuivies�en�vertu�du�droitinternational�humanitaire�.” Il y a des dispositions spéciales sur l’imprescriptibilité des crimescontre l’humanité.