Le jeu, les jeux à l'école : quelques repères thé · PDF filecommunication ; le jeu et notamment les jeux de fiction sont une situation ... dans l'activité ludique, la dimension

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    Le jeu, les jeux l'cole : quelques repres thoriques

    1. Jeu et psychologie

    Outre les ouvrages cits en bibliographie, j'ai utilis pour cette partie les confrences de Georges Redde, professeur de psychologie l'universit de Bordeaux.

    1.1. Psychologie gntique, psychologie du dveloppement

    Henri Wallon, Jean Piaget, Jean Chteau ont tudi les tapes suivant lesquelles se dveloppe l'activit ludique de l'enfant.

    Le jeu d'exercice, ou jeu fonctionnel

    Au cours de ces activits se dveloppent les fonctions bio-psychologiques. Ce sont des exercices sensori-moteurs sans but apparent : tirer, secouer, taper, faire tourner, appuyer, soulever, transvaser ces actions sont rptes pour le plaisir du rsultat immdiat. Ce groupe ludique se diversifie avec le temps et s'tend des contenus verbaux : mots et sonorits rpts, cholalies, lallations, jeux de rimes, formulettes sans significations logiques L'enfant volue par ttonnements, explorations, manipulations, dplacements successifs. Il exerce et coordonne peu peu perceptions sensorielles, gestes; mouvements. Il dcouvre la ralit des formes d'actions sensori-motrices et se diffrencie peu peu des objets et des personnes qui l'entourent.

    Le jeu symbolique ou jeu de faire-semblant

    Il se met en place quand se dveloppe la fonction symbolique, c'est--dire partir du moment o, selon les linguistes, les enfants distinguent le signifiant du signifi, le mot de la chose. Ils permettent de jouer des rles, d'tre autre. Typiquement humain, le jeu symboliques est un travail sur l'espace pens, pas seulement sur l'espace peru. L'enfant se dtache peu peu de l'action et est capable de reprsentation mentale l'aide de signes et de symboles. Il attribue toutes sortes de significations aux objets, simule des vnements et des situations imaginaires, interprte des scnes vraisemblables ; il imite, reprsente, invente, reproduit. Les jeux de faire-semblant incitent l'enfant emprunter le langage de son personnage. Il y exprime ses sentiments et ses motions. Il exprimente les diffrentes tches spcifiques aux divers rles sociaux.

    Le jeu de rgles ou jeu rgles

    Ces jeux dbutent trs progressivement entre quatre et sept ans, se dveloppent surtout entre sept et onze ans sous formes de jeux de rgles concrtes lies l'action. Ils subsistent et se dveloppent encore chez l'adolescent et l'adulte, prenant alors une forme plus labore portant sur des raisonnements et des combinaisons purement logiques, des hypothses, des stratgies interiorises. Les jeux rgle s'organisent en fonction d'une convention entre les joueurs, en fonction d'une rgle accepte : ce sont des jeux qui engagent des groupes et qui ont un rle fondamental dans la socialisation. Ces groupes de jeu apparaissent en dernier car ils sont propres l'activit de l'tre socialis. Pour les psychologues gnticiens, le rle de l'activit ludique est dans la construction de l'individu. L'enfant se cre travers son action et l'activit ludique qui met en ordre

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    l'activit spontane permet au sujet de se construire. Selon Wallon, "le jeu est un moyen de se faire soi-mme" (De l'acte la pense).

    1.2. Perspective phnomnologique

    D'origine philosophique, elle apporte l'ide que l'activit ludique est intentionnelle, correspond une intention de la conscience. L'activit ludique est une activit "de luxe" ; on ne se limite pas, quand on joue, des ncessits purement biologiques. Ce luxe, pour les phnomnologues, est typiquement humain. C'est une activit intentionnelle, le joueur sort de ses orientations pulsionnelles et des orientations de ses besoins lorsqu'il joue. Les phnomnologues insistent sur le fait que l'homme est pour lui-mme un enjeu ou, selon la thse de Sartre, un projet. L'homme se projette devant lui, se donne un idal ; c'est parce que l'homme ne concide pas avec lui-mme que l'homme joue. Pour tudier l'activit ludique, il faut revenir au jeu, se demander ce qu'est le jeu ; on est alors amen se demander quelle est l'attitude de la conscience du joueur. On se rfrera aux ouvrages de nature psychologique et philosophique Le jeu (Synonyme S.O.R.) et Sous couleur de jouer : la mtaphore ludique (Jos Corti, 1989) de Jacques Henriot ainsi qu' Les jeux et les hommes ; le masque et le vertige (Gallimard, Folio-essais, 1967) de Roger Caillois. Dans ce dernier ouvrage, Caillois propose une classification des jeux et six caractristiques cette activit qui guideront notre rflexion. " Le jeu est une activit

    1. libre : laquelle le joueur ne saurait tre oblig sans que le jeu perde aussitt sa nature

    2. spare : circonscrite dans des limites d'espace et de temps prcises et fixes l'avance

    3. incertaine : dont le droulement ne saurait tre dtermin ni le rsultat acquis pralablement, une certaine latitude dans la ncessit d'inventer tant obligatoirement laisse l'initiative du joueur

    4. improductive : ne crant ni biens, ni richesse, ni lment nouveau d'aucune sorte et, sauf dplacement de proprit au sein du cercle des joueurs, aboutissant une situation identique celle de dbut de partie.

    5. rgle : soumise des conventions qui suspendent les lois ordinaires et instaurent momentanment une lgislation nouvelle, qui seule compte

    6. fictive : accompagne d'une conscience spcifique de cette ralit seconde ou de franche irralit par rapport la vie courante. "

    Caillois classe les jeux en quatre catgories :

    1. Agn : les jeux de comptition. Jeux de comptition pure, jeux de rflexion dans lesquels on se fixe une tche accomplir, on recherche la performance, la victoire sur l'autre ils correspondent une laboration de la violence, lui donnent des formes d'expression socialement acceptables, codifies. La violence s'adresse alors une reprsentation de l'autre, pas au corps de l'autre. Les jeux agnistiques utilisent l'nergie qu'utilise la violence mais en en codifiant les expressions. Pour la conscience du joueur, c'est gagner.

    2. Alea : les jeux de hasard. Ils permettent de rver une autre condition : c'est le sort qui dirige, c'est lui le seul responsable d'un ventuel chec. On y corrige les donnes de la nature. Pour la conscience du joueur, c'est la ngation du mrite, l'galisation des chances.

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    3. Mimicry : les jeux d'imitation. Ce sont des jeux o le joueur se dtache de l'autre, le copie distance, en fait une analyse critique. Il y a dans ces jeux quelque chose de caricatural qui dgage l'essentiel d'une structure. Pour la conscience du joueur, c'est tre autre.

    4. Ilinx : les jeux de vertige. Jeux dans lesquels le joueur dfie les contraintes qui lui sont imposes par sa condition, la nature, son environnement jeux de dfi, aux lois de la pesanteur, par exemple jeux de dbordements, jeux vertigineux, ils induisent une espce de triomphe sur soi, sur les contraintes de la ralit. Pour la conscience du joueur, il s'agit de viser dpasser les limites de la conscience humaine.

    1.3. Perspectives psychanalytiques

    O l'on peut se rfrer Sigmund et Anna Freud, Mlanie Klein, Philippe Gutton (Le jeu chez l'enfant, Larousse, 1973) D.W. Winnicott (Jeu et ralit, Gallimard, 1975) Dans le jeu, l'enfant se dpense et liquide de l'nergie psychique. Le jeu se situe dans un espace prcis : il y a un en-dea du jeu lorsque l'nergie psychique est insuffisante et un au-del du jeu lorsqu'il y a dbordement par l'excitation. Le jeu de l'enfant est le lieu naturel de l'laboration des conflits indispensables au dveloppement : conflits intra-personnels (du "devenir grand") et conflits interpersonnels (avec les parents les pairs, les adultes). Le jeu est un travail partir des conflits psychiques (libration, expression, extriorisation) pour les assumer, un travail indispensable la construction d'une personnalit. L'activit ludique au travers d'une transposition de la ralit, aide la construction de l'tre intime ; l'enfant, travers l'activit ludique, arrive assumer ses conflits, arrive l'panouissement. Le jeu apporte l'enfant la scurit, il est indispensable son quilibre. Il permet l'enfant d'tablir, de rtablir un quilibre dynamique. Dans le jeu s'labore un compromis entre les dsirs du "a" et les dfenses du "surmoi". Pour Erikson, le "moi" se dveloppe en interaction constante entre les forces de la maturation et les influences de l'environnement vers la formation d'une identit propre. Selon Georges Redd, les activits ludiques concrtisent l'harmonisation entre trois facteurs : les pressions instinctuelles, les expriences relationnelles et les comptences instrumentales et composent ainsi l'toffe d'une histoire personnelle dans un cadre culturel.

    2. Jeu et langage

    Pour jouer, il faut partager des significations communes. On peut se rfrer aux travaux de Mina Verba sur le partage de signification dans les jeux de fiction (Le jeu de fiction entre enfants de trois ans, PUF, 1991), ou aux crits de Jrme Bruner (Comment les enfants apprennent parler) On parle si on comprend quoi cela sert de parler, quoi sert d'affiner la communication ; le jeu et notamment les jeux de fiction sont une situation exprimentale de la communication ; dans le jeu, on ne risque rien, il y a plaisir de la rptition, plaisir de la matrise. Le jeu offre un espace l'intrieur duquel le "dire" fait exister une ralit, le jeu donne un pouvoir considrable au langage. C'est le langage qui fait exister la fiction, l'imaginaire. Dans le jeu, le langage est utilis dans sa dimension la plus performante dans toute la puissance du "pan, t'es mort" par exemple. Construire un jeu, c'est partager des significations communes car le jeu est une interprtation du rel, interprtation sur laquelle il faut un accord (moi, je serais et toi, tu ferais). Dan