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L'avenir sera vert ou ne sera pas Rio+20, Sommet du développement durable BURUNDI ET RWANDA 50 ans après l’indépendance dimension LE JOURNAL DE LA COOPÉRATION BELGE N° 3 / 2012 • BIMESTRIEL MAI-JUIN-JUILLET 2012 • P308613 • BUREAU DE DÉPÔT BRUXELLES X

LE JOURNAL DE LA COOPÉRATION BELGE dimension · 26-27 Design for Impact 28-29 Youth are the future 30 Pr ix de la Coopération au Développement ... † Convention sur le Climat,

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L'avenir sera vert ou ne sera pasRio+20, Sommet du

développement

durable

BURUNDI

ET RWANDA

50 ans après

l’indépendance

dimensionLE JOURNAL DE LA COOPÉRATION BELGE

N° 3 / 2012 • BIMESTRIEL MAI-JUIN-JUILLET 2012 • P308613 • BUREAU DE DÉPÔT BRUXELLES X

sommaireMAI-JUIN-JUILLET 2012

6 >

Nous sommes tous des enfants de Rio

18/19 >

Burundi et Rwanda chiffres à l'appui

10/11/12 >

Palmier à huile :la déforestation va se poursuivre

Mwaro

Gitega

Muramvya

Bubanza

Kayanza NgoziCibitoke

Ruyiga

Cankuzo

Karuzi

Muyinga

Kirundo

Kibuye

Nyanza

RwamaganaKigali

Bujumbura

R.D.

CONGO

TANZANIE

Lac Kivu

4-5 RIO+20

8-9 “Rio+20 ne traite pas d’environnement mais d’économie”

13 Le secteur de l’énergie électrique se développe

14-15 Le sud se teinte de vert

16 Gaz à effet de serre :le monde à l’envers ?

17 Kigali tient beaucoup à sa verdure

20 Gros plan sur le secteur agricole au Burundi

21 Lutter contre la corruption pour attirer des investisseurs

22 Agaseke Amahoro

23 Visages du Burundi

24-25 Après la crise, le Burundi renouvelle son réseau routier

26-27 Design for Impact

28-29 Youth are the future

30 Prix de la Coopération au Développement

31 La vue sur la vie

32 Volontariat ouvolontourisme ?

33-35 Petite Dimension

36 Journées de la Coopération belge au développement

BURUNDIB NDIURRBUBURUNURBBBB

Mwaro

Gitega

Muramvya

Bubanza

Kayanza NgoziCibitoke

Ruyiga

Cankuzo

Karuzi

Muyinga

Kirundo

Kibuye

Byumba

Nyanza

RwamaganaKigali

Bujumbura

OUGANDA

R.D.

CONGO

TANZANIE

RWANDAN AR NDRWR

Lac Kivu

ou par mail à :[email protected]

Abonnementgratuit sur :www.dimension-3.be

RIO+20 Le Sommet vert,Pour un avenir durableet équitable

Burundi et Rwanda50 ans après l’indépendance

> DOSSIERS

2 MAI-JUIN-JUILLET 2012 I dimension 3

édit

o

dimension3

© FOTOLIA/Gunnar Assmy

Maintenant ou jamais !

L a Grèce sous guidance économique, l’Espagne, le Portugal, l'Italie sous surveillance… Alors que l’Europe se débat dans une crise économique majeure et s'interroge sur les moyens de “relancer l’économie”, les

questions environnementales qui refont ponctuellement surface – catastrophes, montée des eaux, famines, énergique, diminution des ressources naturelles – semblent loin des préoccupations politiques. Pourtant, économie et environnement sont deux sujets intimement liés, le premier étant le principal facteur de dégradation du second, le second étant indispensable pour le premier.

L’économie verte sera d’ailleurs le principal sujet de la conférence de Rio+20 ce 22 juin 2012, et méritera mieux qu'un simple “greenwashing” de l’économie. “Nous n’avons pas d’autres choix que de changer de paradigme de développement au niveau mondial. L’Europe doit continuer à développer son modèle social et ses exigences environnementales mais elle ne peut le faire isolément. La Conférence de Rio est l’occasion de s’engager collectivement pour plus de cohérence dans nos politiques afi n que le développement auquel chacun à droit soit le plus durable possible.” : le Ministre de la coopération y plaidera pour plus de cohérence entre l’économie, l’environnement, et la solidarité avec les pays du Sud.

Pour mieux prendre la mesure de l'importance de cette conférence, reportons-nous quelques décennies en arrière : qui aurait pu imaginer alors que le concept de “développement durable” se retrouverait au centre des débats ; que l'environnement deviendrait un enjeu social, politique, et même économique ; et que l'adaptation au changement climatique apparaîtrait comme le défi majeur du siècle ? Le tournant déterminant à ce propos a été opéré au Sommet de Rio en 1992. Il reste à espérer que les dirigeants de la planète réussiront à sortir des schémas économiques habituels de l’économie de profi t, et de son incitation à la (sur) consommation, pour que Rio+20 soit lui aussi un tournant positif, pour les générations à venir, au Sud comme au Nord.

Continuons dans la rétrospection. C’était il y a 50 ans : deux années après leur immense voisin, le Congo, le Burundi et le Rwanda accédaient à leur tour à l’indépendance. La fête fut, malheureusement, de courte durée. Des guerres sont passées par là, détruisant tout, les pierres, les hommes et les âmes. Si aujourd’hui les armes se sont tues, les défi s restent immenses, chiffres à l’appui, pour ces pays plus petits que la Belgique, plus densément peuplés par une population à 90 % rurale – et donc tributaire des terres arables, dont certaines à fl anc de collines sont incultivables.

Mais dans les campagnes, comme à Kigali ou à Bujumbura, les choses bougent et les deux pays affi chent aujourd’hui des taux de croissance à faire pâlir nos pays occidentaux. Le Rwanda est devenu un modèle en matière de lutte contre la corruption, de développement durable de sa capitale. Ces deux pays, deuxième et troisième par ordre d’importance parmi ceux qui bénéfi cient de l’aide belge, sont soutenus par la CTB dans des secteurs essentiels, qu’il reste à développer, comme les infrastructures routières et l’agriculture (Burundi), ou encore l’énergie (Rwanda).

Quelques grands chantiers et événements nous attendent donc, avec la conférence de Rio+20 et les fêtes d’indépendance du Burundi et du Rwanda, avant de profi ter des vacances. Rendez-vous en septembre !

LA RÉDACTION

dimension 3 I MAI-JUIN-JUILLET 2012 3

Périodique bimestriel de

la Direction Générale de la

Coopération au Développement

(DGD)

Rédaction :

DGD - DIRECTION PROGRAMMES

DE SENSIBILISATION

Rue des Petits Carmes 15

B-1000 Bruxelles

Tél. +32 (0)2 501 48 81

Fax +32 (0)2 501 45 44

E-mail : [email protected]

www.diplomatie.be • www.dg-d.be

Secrétariat de rédaction :

Elise Pirsoul, Jean-Michel Corhay,

Chris Simoens

Création et production :

www.mwp.be

Les articles publiés ne représentent

pas nécessairement le point de vue

offi ciel de la DGD ou du gouvernement

belge. La reproduction des articles est

autorisée pour autant que la source

soit mentionnée et qu'une copie de la

publication soit envoyée à la rédaction.

Dimension 3 paraît 5 fois par an tous les

2 mois sauf en été.

Imprimé sur papier 100 % recyclé.

Abonnement :

Gratuit en Belgique. À l’étranger

seulement la version électronique.

Voici 2 grands thèmes sur lequel s’articulera la conférence :• L’économie verte. Comment construire une économie verte qui conduise à

un développement durable et à la lutte contre la pauvreté ? Comment aider les pays en développement à atteindre le développement de façon durable ?

• Coordination internationale. Quelle institution ou structure mettre en place pour coordonner le développement durable ?

Et 7 domaines prioritaires dont il faudra tenir compte (voir photos) : emplois, énergie, ville, alimentation, eau, océans, catastrophes naturelles.

RIO+20

pour coordonner le développement durable ?

Et 7 domaines prioritaires dont il faudra tenir compte (voir photos) :emplois, énergie, ville, alimentation, eau, océans, catastrophes naturele lees.s

RIO+20

1. VILLES

2. CATASTROPHES

3. ÉNERGIE

Actuellement, la moitié de l'humanité

vit déjà dans les zones urbaines, et ceci

ne fera qu'augmenter. 828 millions de

personnes vivent dans des bidonvilles.

Chaque année, 250 millions de personnes sont

touchées par les catastrophes naturelles. Ce

nombre a doublé au cours des 15 dernières années.

La surpopulation, la pollution et le changement

climatique en aggravent encore l'impact.

2,7 milliards de personnes collectent l'énergie

nécessaire à la cuisson et au chauffage dans

leur environnement immédiat : bois, fumier,

résidus de récolte. 1,4 milliards de personnes

n'ont pas accès à l'électricité.

Ce 22 juin 2012, les pays du monde entier

se réuniront dans un sommet décisif pour

l’avenir de l’humanité. Vingt ans après

le Sommet de la terre de Rio de Janeiro,

Rio+20 marquera-t-il un nouveau tournant

vers le développement durable et la lutte

contre la pauvreté ?

6. OCÉANS

5. EMPLOIS

7. EAU

4. ALIMENTATION

Près de 200 millions de personnes

dans le monde - 6,2 % de la population

active - n'ont pas d'emplois, et 40 %

d'entre elles sont des jeunes.

2,6 milliards de personnes - dont 1 milliard

d'enfants - n'ont pas accès à l'assainissement.

Plus de 1 milliard de personnes vivent

sans eau directement potable. En 2050, au

moins 1 personne sur 4 vivra dans un pays

régulièrement en pénurie d'eau.

Nous ne trouverons bientôt plus de

poissons dans les océans, mais beaucoup

d'algues, de méduses et de plastiques.

En 2100 la détérioration des océans dû au

changement climatique se chiffrera à une

perte de 1500 milliards d'euros par an.

950 millions de personnes souffrent de

la faim dans le monde. Plus du double

sont défi cients en minéraux et vitamines.

186 millions d'enfants sont trop petits pour

leur âge, en raison de la malnutrition.

© L

aure

nt

Balle

sta

dimension 3 I MAI-JUIN-JUILLET 2012 5

Le Sommet de la Terre de Rio de Janeiro marquait en 1992 un tournant dans la

perception des interactions entre développement et environnement. Il offi cialisait

la notion, alors inédite, de “développement durable” et pointait les thèmes -

désertifi cation, climat, biodiversité, etc. - qui, 20 ans plus tard, sont plus que jamais

d’actualité. À la veille de Rio+20, retour sur ces grands principes.

ELISE PIRSOUL

Le développement durable (ou développement soutenable),

selon la défi nition le plus souvent citée, est “un développement

qui répond aux besoins des générations du présent sans

compromettre la capacité des générations futures à répondre

aux leurs.” Il s’agit d’un processus socio-écologique qui

vise la satisfaction des besoins humains tout en préservant

simultanément les milieux naturels. Le concept est entré dans

l’usage courant en 1987 suite à la publication du Rapport de la

Commission Brundtland.

ÉCOLOGIQUE

VIABLE

Schéma du développement durable : à la confl uence des “trois piliers du développement durable”.

UN DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE ET SOCIAL RESPECTUEUX DE L’ENVIRONNEMENT

DURABLE

ÉCONOMIQUEÉQUITABLE

SOCIAL

VIVABLE

(© Wikipédia / Johann Dréo

)

ONLINEwww.sei-international.org

La Déclaration de Rio

En proclamant la Déclaration de Rio, les principaux dirigeants de la pla-nète adoptaient 27 principes qui pré-cisent la notion de développement durable :“Les êtres humains sont au centre des préoccupations relatives au dévelop-pement durable. Ils ont droit à une vie saine et productive en harmonie avec la nature (principe 1). Pour parvenir à un développement durable, la protec-tion de l’environnement doit faire partie intégrante du processus de développe-ment et ne peut être considérée isolé-ment (principe 4).”

L’Agenda 21L’Agenda 21 était établi comme un vaste programme d’action visant à atteindre ce “développement durable” au XXIe siècle. Aujourd’hui encore, le programme Action 21 reste la réfé-rence pour la mise en œuvre du déve-loppement durable au niveau des territoires.La Conférence de Rio met également l’accent sur le rôle des différents acteurs du développement durable : femmes, jeunes et enfants, populations autochtones, ONG, collectivités locales, syndicats, entreprises, chercheurs, et agriculteurs.

Grands thèmesLa Conférence de Rio a donné lieu à l’adoption et la ratifi cation de quelques conventions et déclarations sur des grands thèmes du développement.

• Convention sur le Climat, qui affi rme la nécessité de réduire les émissions de gaz à effet de serre et qui a abouti à la signature en 1997 du Protocole de Kyoto.

• Déclaration sur les forêts.• Convention sur la biodiversité, qui

soumet l’utilisation du patrimoine géné-tique mondial à une série de conditions et présente une tentative normative en cette matière.

• Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertifi cation.

Nous sommes tous

6 MAI-JUIN-JUILLET 2012 I dimension 3

DÉVELOPPEMENT

DURABLE : SOYONS

COHÉRENTS

Soutenir l’agriculture paysanne en Afrique tandis que les

marchés du continent sont inondés de produits subvention-

nés, est-ce cohérent ? Comment prétendre aider les pays

en développement si les bénéfi ces offerts d’un côté par

des projets de développement sont anéantis de l’autre par

des politiques économiques ou environnementales défavo-

rables ? Ce sont des questions qui reviennent de plus en

plus dans les débats sur l’effi cacité de l’aide, et un point

sur lequel le gouvernement belge a résolu de se pencher

sérieusement.

“La conférence de Rio sera l’occasion de porter au niveau

mondial ce débat de la cohérence des politiques en faveur

du développement”, a déclaré le Ministre de la Coopéra-

tion au développement, Paul Magnette. La réalisation d’un

développement durable dépendra en effet des politiques

menées sur plusieurs fronts des défi s mondiaux : l’extrême

pauvreté, l’inégalité, la sécurité alimentaire, l’éducation, les

changements climatiques, la pollution des mers et océans

et les excès du monde fi nancier. L’architecture institution-

nelle doit être renforcée dans ce sens, défend le Ministre

de la Coopération, qui plaide pour un cadre de “cohérence

des politiques en faveur du développement” (CPD) et lance

les pistes pour une conférence interministérielle et une

commission interdépartementale de la CPD, ainsi qu’un

mécanisme qui analyse l’incidence des politiques sur le

développement.

La cohérence politique était le thème des Assises de la

Coopération au développement, événement qui a ras-

semblé les acteurs de la Coopération belge au développe-

ment ce 8 mai 2012. EP

© UN Photo / Michos Tzavaros

Une intervention à la Conférence des Nations Unies pour

l'Environnement et le Développement de 1992.

© d

ounia

road

trip

les enfants de Rio

dimension 3 I MAI-JUIN-JUILLET 2012 7

Nous n’héritons pas de la Terre de nos ancêtres, nous l’empruntons à nos enfants.

ANTOINE DE SAINT-EXUPÉRY

“Rio+20 ne traite pas d’environnement mais d’économie”

CHRIS VANDEN BILCKE, PROGRAMME DES NATIONS UNIES POUR L’ENVIRONNEMENT

Le bilan de deux décennies de développement durable, du Sommet mondial à Rio en

1992 à aujourd’hui, se présente de manière relativement positive, selon Chris Vanden

Bilcke du PNUE, le Programme des Nations Unies pour l’environnement. Ceci étant, une

révision profonde du modèle de croissance s’impose.

L’économie du

futur sera verte

ou ne sera pas.

Thons rouges captifs dans les fi lets d’un

thonnier-senneur. Les prises illégales comptant

pour plus de la moitié du total des prises, la

mise en place de quotas de pêche ne suffi t

pas à enrayer le déclin de l'espèce.

© Greenpeace

8 MAI-JUIN-JUILLET 2012 I dimension 3

Depuis une trentaine d’années, Chris Vanden Bilcke s’occupe de développement durable. Des années durant, il s’est

occupé de cette thématique au Service public fédéral Affaires étrangères. Et l’an dernier, il a été nommé directeur du Bureau de liaison du PNUE auprès de l’UE à Bruxelles. La rédaction du magazine MO* lui a posé quelques questions à l’occasion du prochain sommet Rio+20.

D’aucuns estiment que le concept

de développement durable dans

sa version 2012 est une boîte vide,

une occasion manquée.

Pour ma part, je le considère à 60% posi-tif et à 40% négatif. Le développement durable est devenu un concept, et l’impli-cation des chefs d’état et de gouverne-ment s’est incontestablement accrue. Pour s’en persuader, il suffi t de voir la Confé-rence de Copenhague sur le climat ou les débats tenus lors de l’ouverture annuelle de l’Assemblée générale des Nations Unies en septembre. En 1992, les pays en développement étaient encore fortement sur la défensive en matière de politique environnementale mondiale. Le titre de la Conférence de Rio de 1992 n’était pas le développement durable mais l’environ-nement et le développement. Les pays en développement n’étaient absolument pas convaincus qu’il était possible de concilier ces deux thèmes.Une étape importante a été franchie avec la création de la Commission du développe-ment durable (CDD), même si celle-ci s’est avérée être un échec. Elle n’a eu aucun impact sur les décisions politiques d’une instance infl uente comme l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agricul-ture (FAO). Elle se trouve aujourd’hui sur une voie de garage et doit être remplacée, soit en étant transformée en conseil, soit en étant intégrée dans le Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC). Par ailleurs, les sept objectifs fi xés à Johannes-burg et à réaliser dans un certain délai (entre autres, freiner la perte de biodiversité d’ici 2010) n’ont pas été atteints.

Pourtant au centre des débats à

Johannesburg, la consommation et

la production durables ont à peine

été développés au cours des dix

dernières années.

C’est la position des États-Unis qui est en cause. La Chine est passablement convain-cue de cette nécessité en raison de sa soif personnelle de matières premières. Les États-Unis ont fait des pieds et des mains pour que le texte soit modifi é. Au lieu de la ‘modifi cation’ des modes de consommation

et de production non durables, les États-Unis préféraient la ‘promotion’ des modes de consommation et de production durables, formulation beaucoup moins forte. Mais là encore, les États-Unis ont voulu remiser la thématique. Ce n’est qu’au cours de ces deux dernières années que le débat a refait surface, entre autres grâce à la Suède, qui l’a gardé constamment à l’ordre du jour. Et aussi grâce à la Belgique d’ailleurs.

Ce thème sera-t-il à nouveau

débattu à Rio en juin ?

Selon moi, deux thèmes que je considère comme cruciaux doivent absolument être traités à Rio : la production et la consomma-tion durables, et ‘au-delà du PIB’. Les tenants et aboutissants de la crise, de la croissance et du progrès sont mesurés uniquement en termes de produit national brut. Il faut corriger cette approche, et parler égale-ment de production et de consommation durables. Rio peut servir de catalyseur pour dissiper les résistances vis-à-vis de ces deux thèmes, et également pour accé-lérer le processus.

L’économie verte, voilà sur quoi

portera Rio. À quoi pouvons-nous

nous attendre ?

Chacun a sa propre conception du terme, et cela me préoccupe. Différentes visions seront certainement exposées à Rio. Le directeur du PNUE, Achim Steiner, et le Commissaire UE à l’environnement, Janez Potocnik, s’accordent à dire que l’économie

verte n’a rien à voir avec l’environnement, mais tout à voir avec l’économie, le cœur même de notre modèle social. Dans cette optique, la Conférence Rio+20 sera une conférence économique. L’économie du futur sera verte ou ne sera pas. Si on ne se rend pas compte que les analyses à courte vue centrées sur le PIB font fausse route, que nous devons axer nos efforts sur la production et la consommation durables et sur un usage plus économe des matières premières, si cela n’est pas repris dans les fondements du système économique, alors on va droit dans le mur.

L’économie verte est-elle pour vous

synonyme de croissance verte ?

Parler de croissance verte signifi e que, dans un certain sens, on veut rester en terre connue. Ce n’est pas une solution. Le concept d’économie verte crée implicite-ment un espace plus large pour la remise en examen du concept de croissance. Cette économie doit placer les ressources naturelles à la base de ses principes. Si cela se fait de manière cohérente, on sera abasourdis de découvrir qu’une grande part de ce que l’on a toujours qualifi é de croissance économique, n’est en fait que pure perte.La surpêche en est une bonne illustration. Un des sept objectifs fi xés à Johannesburg était de stabiliser d’ici 2015 les stocks de poisson au niveau correspondant au développement durable. Personne n’en a rien fait, alors que la perte est de l’ordre de plusieurs milliards d’euros. D’où l’importance cruciale de tenir compte de la nature. Le rapport de l’étude sur l’économie des écosystèmes et de la biodiversité (TEEB) a contribué grandement à cette nouvelle vision.

Ne risque-t-on pas que la nature

tombe du même coup aux mains

des groupes fi nanciers importants,

les Coca-Cola et les Nestlé ?

Je crois que les sphères de la société et de la politique sont pleinement conscientes du danger de la privatisation des biens com-muns (common goods) par le monde fi nan-cier. Les services de base comme l’eau et l’air ne seront pas abandonnés comme ça à des pratiques capitalistes.Ceci étant, la prestation de services, et par-tant la fi xation des tarifs par une multinatio-nale n’est pas nécessairement une mauvaise chose. La fi xation des prix peut être le juste milieu entre les visées privée et publique.

ALMA DE WALSCHE

Cet article est la version raccourcie (et traduite du néerlandais) de l’interview qui a paru dans www.MO.be, le website du magazine MO*, le maga-zine néerlandophone des news mondiales.

Les tenants et aboutissants

de la crise, de la croissance

et du progrès sont mesurés

uniquement en termes

de Produit national brut. Il

faut y remédier, en parlant

également de production et

de consommation durables.

CHRIS VANDEN BILCKE

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dimension 3 I MAI-JUIN-JUILLET 2012 9

“HUILE VÉGÉTALE : 15 % !”

L'AVIS DE LA NUTRITIONNISTE

Pour des raisons environnemen-tales en effet, les grands pro-ducteurs asiatiques d’huile de palme ne peuvent plus étendre

en toute liberté leurs plantations en Indo-nésie et en Malaisie, qui fournissent les quatre cinquièmes de la production mon-diale. Or, la demande en huile de palme des pays du Sud, Chine et Inde en tête, qui consomment plus de 80 % de la pro-duction, est en forte progression. Et au Nord, les États-Unis et l’Europe accroissent quant à eux leur demande de 13 % chaque année depuis 2000.L’industrie agro-alimentaire s’inscrit en chef de fi le de la demande avec 80 % de la consommation, suivie par l’industrie cos-métique, 19 %, et enfi n les carburants, 1 %. La consommation d’un Européen est d’en-viron 60 kg/an d’huile de palme, la consom-mation mondiale s’élevant à une vingtaine de kilos/an par personne.Cette huile est aujourd’hui la plus consom-mée au monde (plus de 30 % du total des huiles végétales produites), devant l’huile de soja (24 %), de colza (12 %) et de tournesol (7 %). La production a été mul-tipliée par deux tous les 10 ans depuis 30 ans pour atteindre près de 50 millions de tonnes cette année.Et suite à la croissance démographique et au développement des agro-carburants dans le monde, on prévoit une augmentation de la demande en huile de 30 % d’ici 2020.

DéforestationAu cours de la dernière décennie, ce sont chaque année 13 millions d’hectares de forêt qui ont été rasés de la surface de la planète, selon la FAO. Nul ne l’ignore plus, le binôme commerce du bois - exploitation du palmier à huile (Elaeis guineensis) est le premier responsable de ce désastre, orchestré par ces deux industries avec l’agrément des États.

Les palmeraies sont des monocultures cultivées sur des terres déboisées et exploitant une main d’œuvre bon mar-ché. Elles surexploitent et empoisonnent les réserves en eau, en utilisant engrais et des pesticides. Au bout de vingt ans d’exploitation, il ne subsiste plus rien qu’un sol dégradé.Les plantations familiales représentent encore 60 % du secteur des plantations à l’échelle mondiale. Le reste des pal-meraies sont exploitées essentiellement par de grands groupes d’envergure internationale, comme le malaisien Sime Darby, ou l’indonésien Sinar Mas, tous les deux sous le contrôle de capitaux chinois. Les multinationales occiden-tales de l’agro-alimentaire, comme Uni-lever (premier consommateur d’huile de palme au monde jusqu’en 2010), Procter

PALMIER À HUILE :LA DÉFORESTATION

VA SE POURSUIVRELe développement des plantations de palmiers à huile est à l’origine d’une déforestation

massive en Indonésie et en Malaisie, les deux premiers producteurs mondiaux. Dès à présent,

et après avoir contribué à l’essor des économies d’Asie du Sud-Est, le palmier à huile fait

son grand retour en Afrique.

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libab

a.c

om

Déforestation en Indonésie.

10 MAI-JUIN-JUILLET 2012 I dimension 3

Souvent mentionnée comme 'huile végétale', l’huile de palme est présente

dans une quantité impressionnante d'aliments préparés tels que les pizzas,

les viennoiseries, les biscuits et pâtisseries, les céréales petit-déjeuner et

barres de céréales, les confi series, les pâtes à tartiner…

Pour les industriels de l’agro-alimentaire, cette huile dispose en effet de deux

immenses atouts : son faible coût, et sa texture semi-solide (crémeuse) à tem-

pérature ambiante. Une propriété particulièrement intéressante, car pour obte-

nir des viennoiseries et autres biscuits moelleux et fondants, il est nécessaire

de les préparer avec une matière grasse semi-solide. En effet, si l’industrie

utilisait des huiles totalement liquides (à température ambiante), ces aliments

paraîtraient secs, les pâtes à tartiner seraient liquides, etc.

La consistance d’une matière grasse à température ambiante dépend de sa

composition en acides gras : plus elle contient d’acides gras saturés (AGS) -

pour schématiser, les “mauvaises” graisses -, plus elle sera solide. Ainsi, l’huile

de palme contient 50 % de ses graisses sous forme d’acides gras saturés, le

saindoux 40 %, le beurre 65 %, l’huile de coprah (coco) 90 %. Par contre, les

huiles liquides contiennent majoritairement des acides gras insaturés (qui ont un

effet neutre à positif sur la santé), telles que l’huile d’olive qui contient seulement

15 % d’AGS, l’huile de tournesol 11 %, ou l’huile de colza 8 %.

L’industriel n’a donc pas énormément de choix pour plaire au palais du

consommateur :

• Soit il utilise du beurre, onéreux, et contenant 50g. d’AGS par 100g.

• Soit il utilise des huiles liquides, majoritairement insaturées, qu’il doit hydrogé-

ner. Ce processus vise à transformer les acides gras insaturés en AGS, solidi-

fi ant ainsi la matière grasse (et augmentant évidemment la proportion d’AGS).

• Soit il préfère l’utilisation d’une huile à texture semi-solide, comme l’huile

de palme ou de coprah.

Ces trois options mènent de toute façon à une proportion d’environ 50 %

d'AGS dans les matières grasses incorporées aux aliments.

Comme nous venons de le voir, il est indéniable que l’huile de palme

contient beaucoup d'AGS. Le problème vient en outre de la piètre qua-

lité et de l'omniprésence de cette huile dans les aliments décrits plus

haut. D’autant que ces derniers ne nous apportent pas les vitamines, sels

minéraux, acides gras essentiels et autres précieux nutriments dont nous

avons besoin. Il faudrait de plus veiller à l’absence de matière grasse par-

tiellement hydrogénée dans les préparations, car elles peuvent se révéler

nocives pour la santé.

C’est à nous, consommateurs, de

réaliser que la plupart de ces produits

contiennent bien trop de graisse, et

qu’il faut donc en limiter la consom-

mation, qu’ils soient préparés tant

avec de l’huile de palme, que de

coprah, ou encore avec du beurre ou

autre.

MARIE VANDENBERGHE

Diététicienne, administratrice de

l’Union Professionnelle des diplômés

en Diététique

& Gamble, Nestlé ou Cargill se sont reti-rées de la production et font maintenant appel à ces fournisseurs.

L’Indonésie, pratiquement raséeEn Indonésie, 90 % des forêts ont été déboisés à cause du commerce du bois puis de la conversion en palmeraies. Selon une étude de la Banque Mondiale, 1,8 millions d’hectares de forêt vierge y sont rasés chaque année et, toujours selon cette étude, en ce qui concerne l’île de Bornéo, au rythme actuel, l’en-semble des forêts de plaine, hors zones protégées, auront disparu dans les 10 années à venir.Bien sûr, cette déforestation est respon-sable de l’expropriation des populations locales, qui les prive de leur principale ressource. Bien souvent, celles-ci n’ont d’autre choix que de céder leur territoire ancestral à des investisseurs étrangers qui s’installent avec l’aide des pouvoirs poli-tiques, voire de l’armée si nécessaire. Les rapports du World Rainforest Movement et

les associations comme Survival Interna-tional font état de menaces, de violences, de violations des droits de l’homme et de destructions de propriétés.Ces forêts sont pourtant le refuge d’une rare biodiversité (l’Indonésie abrite de 10 à 15 % des plantes, mammifères et oiseaux connus au monde). Certaines espèces animales, dont les emblématiques orangs-outans, les éléphants, et les tigres de Suma-tra, sont directement menacées de dispari-tion à court terme.En dépit de cela, et selon un rapport du WWF, le gouvernement prévoit encore un plan d’extension de 14 millions d’hec-tares dévolus à la plantation de palmiers à huile, investissant quant à lui 5,6 milliards de dollars pour créer la plus grande palmeraie du monde, d’une superfi cie de 1 million d’hectares. Et l’Association indonésienne des producteurs d’huile de palme a annoncé que les exportations augmenteront signifi cativement en 2012, tirées essentiellement par les besoins croissants des pays émergents.

L’Afrique, nouvelle frontière pour la culture du palmier à huile

Vaste réserve de terres fertiles, l’Afrique est aussi un grand marché de consom-mation d’huile de palme, et une tête de pont idéale vers les marchés du Maghreb et d’Europe. Nombre de gouvernements africains approchés par les industriels de la fi lière sont séduits par les revenus d’exportation potentiels. C’est pourquoi les projets d’implantation se multiplient depuis quelques mois.Le Singapourien Olam a monté avec le gou-vernement gabonais une co-entreprise qui vise à étendre le palmier à huile sur 300.000 hectares. Quant au Malaisien Sime Darby, après avoir obtenu une concession de 63 ans au Liberia, sur une surface équivalente, il envisage de s’implanter également au sud-ouest du Cameroun, où les communau-tés villageoises craignent la disparition de 60.000 hectares de forêt.Jusqu’en 1965, le Nigeria était le premier exportateur mondial d’huile de palme, dont il assurait 30 % des exportations mondiales

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Unité d'extraction d'huile de palme en Indonésie.

Fruits du palmier à huile.

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(un tiers de la production totale du pays). Mais, depuis 1985, la Malaisie a pris la première place et le Nigeria est devenu importateur. Aujourd’hui, le gouvernement souhaite relancer la fi lière mais les investis-seurs privés traînent les pieds.La Côte d’Ivoire possède également une palmeraie vieille d’un demi-siècle, compo-sée de 69 % de plantations villageoises et traditionnelles et 31 % de plantations indus-trielles. La fi lière y fait vivre directement ou indirectement plus de deux millions de personnes. Villageois et industriels pro-cèdent en ce moment au renouvellement des palmiers des friches existantes. Avec un rendement de quatre tonnes d’huile de palme par hectare (contre sept à neuf en Asie du Sud-Est), leur objectif est d’aug-menter la rentabilité, afi n de rattraper celle des pays asiatiques.Une forte demande intérieure et le faible volume de production par rapport aux géants du sud-est asiatique font que l’huile de palme ivoirienne pénètre diffi cilement les principales zones d’importations que sont l’Europe, l’Inde et la Chine. Et sur le marché interne et sous-régional, elle subit la concurrence déloyale des huiles importées frauduleusement.Dans les années 1920, c’est le Congo belge qui abritait la plus grande plantation, celle des frères Lever, qui ont donné leur nom à l’une des plus puissantes multinationales. Aujourd’hui l'opérateur en télécommunica-tion chinois ZTE s'est lancé sur 100.000 ha en RD Congo, via sa fi liale ZTE Agribusiness Congo. Lte palmier à huile revient donc en force en Afrique, d’où il provient, après avoir été implanté en Asie, avec les consé-quences que l’on sait.

Greenpalm, RSPO…L’huile de palme est privilégiée par les industriels pour ses propriétés chimiques et son faible coût par rapport aux autres huiles végétales (soja, colza, arachide), qui s’explique par le rendement du palmier à huile, en moyenne 10 fois plus élevé que celui du soja. Depuis quelques années toutefois, en raison de l’impact négatif des plantations de palmiers à huile sur l’envi-ronnement et de sa nocivité lorsqu’on la consomme de manière régulière pendant plusieurs années (voir encadré), elle sus-cite une méfi ance grandissante.Aussi, certains industriels de l’agro-ali-mentaire feraient à présent leur mea culpa. Diffi cile à croire toutefois… Ces géants de l’alimentation adhèrent au programme GreenPalm, qui leur propose de reverser la (plutôt modique) somme de 1 dollar par tonne d’huile utilisée pour la lutte contre la déforestation. Moyennant cela, l’entre-prise peut continuer à utiliser l’huile de

palme et s’offrir un label à moindre coût qui mentionne sur l’emballage : "Participe à la lutte contre la déforestation”. Il n’est donc pas indiqué "huile de palme durable”, une nuance qui échappe souvent au consom-mateur. Une fois de plus, on joue sur les mots.Par ailleurs, dès 2004, les acteurs du sec-teur et les ONG se sont réunis au sein d’une Table ronde sur l’huile de palme durable(RSPO) pour défi nir les critères de dura-bilité de la production d’huile de palme : il s’agissait d’un premier pas en vue d’une régulation de ce marché. Il faut néanmoins en signaler les plus grands absents, sans qui aucune avancée ne pourra se faire : les entreprises agro-alimentaires chinoises et les gouvernements en général.Selon certaines associations, cette RSPOs’apparente à du greenwashing. En 2009, Greenpeace a notamment publié un rap-port intitulé “La face cachée de Sinar Mas”, dénonçant les pratiques illégales de cette entreprise en matière de déforestation (absence de permis de déboiser, aucune évaluation des impacts environnemen-taux, destruction de tourbières), dans le même temps que deux autres de ses fi liales, dont Smart visée par l’ONG, parti-cipent à la RSPO.La CTB, l’Agence belge de développement, concluait ainsi son rapport de 2011 sur l’huile de palme dans les échanges mon-diaux : “Aujourd’hui l’huile de palme certifi ée durable ne représente que 7,5 % du marché. Son avenir s’avère radieux, mais la question est de savoir quelle sera la qualité de cette certifi cation. L’huile ‘ségréguée’ - toute l’huile est certifi ée et tracée du début à la fi n de la chaîne -, la seule à pouvoir être vraiment qua-lifi ée de durable, ne représente qu’une petite part de ces 7,5 % et peine à trouver preneur.

Quant à l’huile de palme ‘bio’, il s’agit d’un marché très étroit (0,2 %). Enfi n, l’huile de palme ‘équitable’ est, pour sa part, encore très loin d’inonder le marché. Dans un communi-qué du 18 mars 2010, FLO, qui rassemble de nombreuses organisations de labellisation ‘équitable’ dont Max Havelaar, explique qu’il n’existe pas de standard de commerce équi-table pour l’huile de palme qui soit reconnu internationalement. Ceci n’empêche toutefois pas des produits alimentaires reconnus équi-tables pour d’autres éléments de leur compo-sition d’en contenir.”Le rapport “Arnaque à l’huile de palme durable” (2011) des Amis de la Terreindique : “Aujourd’hui, force est de constater que les importations européennes d’huile de palme ont continué d’augmenter malgré les annonces de quelques entreprises et de la grande distribution d’en arrêter la commer-cialisation. […] Le principal moteur des impor-tations d’huile de palme en Europe est en réa-lité le développement des agro-carburants.”Selon cette association, “l’essentiel de la pro-duction européenne de colza et de tournesol a été détourné vers les agro-carburants et, en substitution, les industriels de l’agro-alimen-taire et d’autres secteurs ont augmenté les importations d’huile de palme.”Dès lors, concernant l’huile de palme ‘durable’ et la RSPO, “Les critères sont trop faibles […] et cette certifi cation est d’abord utilisée pour ne pas remettre en cause le problème fondamental de surconsomma-tion dans les pays riches.” Plutôt que de tabler sur l’illusoire développement d’une monoculture d’exportation durable, il serait sage, pour les pays occidentaux, de réduire leur trop grande consommation d’huile, mais également de se tourner vers des huiles plus locales.

JEAN-MICHEL CORHAY

Certaines espèces

animales, dont les

emblématiques

orangs-outans, sont

directement menacées

de disparition à

court terme.

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12 MAI-JUIN-JUILLET 2012 I dimension 3

Nous regardons la télévision et parvenons à charger les batteries de nos téléphones sans diffi culté”, confi e Dona-

tien Ndorayabo, habitant du district de Rubavu, à l’Ouest du Rwanda. Il habite tout près de la minicentrale électrique de Keya. Cette unité de production d’électri-cité produit 2,2 MW (3 % de l’électricité produite au Rwanda).Selon Jean Berchmans Bahige, chef de station à Rubavu de l’établissement public EWSA (Energy, Water and Sani-tation Authority), plus de 80 familles ont accédé à l’électricité grâce à cette mini-centrale. Les centres de santé de Biruyi, Kivumu, Kimbiri et Nyamyumba, comme les bureaux de l’administration locale, les centres de négoce et les églises, sont éclairés.

La construction de la minicentrale hydro-électrique de Keya ainsi que celles de Nkora et Cyimbili dans la même région ont été financées par la Coopération belge (11 milliards de FRW). Le gouver-nement belge a par ailleurs promis 55 mil-lions d’euros pour le développement du secteur énergétique du pays dans les quatre prochaines années.Dans les quatre prochaines années, 27 mil-lions d’euros iront à l’énergie géother-mique, 17 à l’accès à l’énergie, 6 pour la promotion de l’implication du secteur privé dans la production de l’énergie, et 5 pour le renforcement des capacités du ministère des Infrastructures, d’après M. Jean-Yves Saliez, représentant local de la CTB.Sept mini et micro-centrales contribuent

à 17,75 % de l’électricité pro-duite. Mais seulement 10,8 % de la population rwandaise accède au courant électrique, selon les dernières statistiques.

Miser sur l’énergie renouvelable

Afi n de permettre à plus de Rwandais d’y accéder, le ministère des Infrastruc-tures explore d’autres sources d’éner-gie. D’après Emmanuel Hategeka, directeur au sein du projet d’exploita-tion de l’énergie géothermique, deux sources hydrothermales pourraient être exploitées au Nord du pays, à Karisimbi et Kinigi. M. Hategeka confi e que “(…) d’ici septembre nous pour-rons forer jusqu’aux sources. Les travaux seront réalisés par une société chinoise”.Selon les prévisions, ces sources pour-raient fournir plus de 700 MW. Le gouvernement compte en extraire au moins 300 MW. L’un des partenaires du projet est la Coopération belge.

Outre la construction de barrages hydro-électriques et de lignes d’interconnexion, la Coopération belge au développement a financé l’extension de lignes élec-triques en milieu rural, notamment dans la province de l’Ouest, et la ligne Kigali-Kiyumba, longue de 84 kilomètres, dans la province du Sud.Le gouvernement rwandais a aussi com-mencé à exploiter le gaz méthane du lac Kivu. Une unité d’extraction a été installée par la société israélienne Ludan Enginee-ring. Un gazoduc, à 350 m de profondeur, transporte le gaz jusqu’à la centrale de Rubavu où il est transformé en électricité.Un projet de 25 MW d’électricité produite avec le gaz méthane, par Contour Glo-bal, est en construction près de Kibuye. Ici aussi, le gouvernement belge, via sa Banque de développement (BIO), intervient pour 10 millions d’euros.D’après M. Laurent Sibomana, directeur technique de la plateforme d’extraction, la centrale de Rubavu injecte chaque jour au moins 26 MW dans le réseau national. Actuellement, 1 kW coûte plus de 120 FRW (0,25 dollar) pour les clients ordinaires et 105 FRW pour les usines.Selon M. Sibomana, les réserves de gaz du lac Kivu seraient énormes : 39 mil-liards de m3 exploitables. Et, d’après un technicien du ministère des Infrastruc-tures, “le gaz se renouvelle à un rythme de 120 millions de mètres cubes par an, ce qui en fait une ressource pratiquement inépuisable.”

SOLANGE AYANONE

Infosud Belgique-Syfi a Grands-Lacs

1 Entre 50 et 500 kW pour une micro-centrale et

500 kW et 10 MW pour une mini-centrale, selon la

catégorisation la plus courante.

Le secteur de l’énergie électrique évolue au Rwanda avec la construction de mini-

et micro-centrales électriques1. Mais une grande partie des Rwandais demeure sans

électricité. Pour y pallier, géothermie et ressources gazières sont testées.

Le secteur de l’énergie électrique se développe

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dimension 3 I MAI-JUIN-JUILLET 2012 13

N ous avons parfois l’impression que les habitants du Sud se soucient peu de l’environnement. Or souvent, ils n’épuisent le sol ou ne déforestent que par pure nécessité : c’est une question de survie. De nombreuses initiatives axées sur la création d’emplois voient ainsi le jour.magasins spécialisés dans

la vente ou la location de produits solaires.

LE SUD SE TEINTE DE VERTDes toits comestibles, du vieux papier journal comme

matière première de superbes objets artisanaux, des arbres

pour nourrir les poissons du lac Tanganyika…

C’est frappant : ils sont de plus en plus nombreux dans le

Sud à prendre des initiatives en faveur de l’écologie. Voici

les projets de quelques-uns de ces pionniers.

Lumière durable

L’ONG Bapesu de Christian Tabifor (Cameroun) a pour objectif de protéger l’environnement

tout en venant en aide aux plus démunis. “La pauvreté est la principale cause de dégrada-

tion de l’environnement en Afrique noire, explique Tabifor. Et la dégradation de l’environne-

ment, comme par exemple la désertifi cation, entraîne à son tour plus de pauvreté.” Dans le

cadre d’un projet-pilote, l’ONG a distribué des kits solaires dans deux villages dépourvus

d’électricité : des lampes rechargeables grâce à l’énergie solaire, des panneaux solaires,

des connecteurs téléphoniques… Désormais, les enfants peuvent faire leurs devoirs le soir

et les habitants ne doivent plus abattre des arbres pour éclairer leur maison. Ils peuvent

en outre exercer des activités génératrices de revenus après la tombée du soir. Plus tard,

Bapesu offrira ses services aux habitants d’autres villages afi n de les aider à ouvrir des

petits magasins spécialisés dans la vente ou la location de produits solaires.

Toits verts

comestibles

En Colombie, de nombreuses per-

sonnes sont amenées à migrer en rai-

son de phénomènes environnementaux

(les fortes pluies par exemple) ou pour

trouver un lieu plus sûr. Mais une nou-

velle lutte pour la survie s’engage dans

les villes vers lesquelles elles conver-

gent. Face à cette situation, Carolina

Forero de l’université Javeriana (faculté

d’écologie) a décidé d’agir. “Nous

devons mettre nos connaissances au

service de ceux qui en ont besoin afi n

qu’eux aussi puissent mener une vie

décente”, explique-t-elle. Elle a appris

à 100 familles de Soacha à cultiver des

légumes bio sur leur toit : laitue, épi-

nards, radis, oignons, ou encore per-

sil. Les légumes sont semés dans des

bouteilles en plastique recyclées reliées

entre elles par des tuyaux qui amènent

de l’eau de pluie. Chaque toit peut

compter jusqu’à 576 plants, qui sont

récoltés tous les deux mois. Une telle

activité est très importante compte tenu

du prix élevé des denrées alimentaires.

Les toits permettent également de cap-

ter des eaux qui, autrement, contribue-

raient à l’érosion. “Et ce n’est pas tout,

poursuit, ravie, Rosa Murillo qui a cinq

enfants, il fait bien plus frais dans la

maison depuis que nous cultivons des

légumes sur le toit.”

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14 MAI-JUIN-JUILLET 2012 I dimension 3

Des arbres pour nourrir les poissons

Le changement climatique ne provoque pas que des sécheresses, des inondations ou des

ouragans dévastateurs. Il peut également engendrer une diminution de la force des vents.

C’est le problème auquel sont confrontés les innombrables pêcheurs qui tirent leurs reve-

nus de la pêche sur le lac Tanganyika. Normalement, le vent assure un brassage important

des eaux du lac. Ce brassage fait remonter les substances nutritives des profondeurs (qui

peuvent atteindre 1.800 mètres) jusqu’aux poissons qui vivent plus haut. Ces dernières

années, le vent n’a cessé de faiblir. Dès lors, la nourriture ne remonte plus vers la surface

et les poissons meurent de faim. La production de poisson a déjà baissé de plus de 30 %

et un million de pêcheurs risquent de perdre leur emploi. Dix millions de personnes se

retrouvent ainsi menacées de famine. Deo Baribwegure (Tanzanie) n’attend pas la réac-

tion des autorités pour agir. Il est déterminé à planter, coûte que coûte, des arbres sur

les rives afi n d’augmenter la quantité de nutriments dans les eaux périphériques du lac. Il

entend également sensibiliser la population locale et la communauté internationale. “Si les

pêcheurs doivent comprendre l’importance des arbres et de la pêche durable, nous devons

aussi éveiller les consciences, de par le monde, quant aux conséquences concrètes et

néfastes du changement climatique”, explique-t-il.

Des abeilles pour

protéger la forêt

En 2010, après avoir travaillé des années

durant pour diverses organisations

non gouvernementales internationales

telles que World Vision, Yedityah Mella

(Indonésie) a fondé sa propre ONG, Tri

Mutiara Foundation. Dans le district

reculé de Polen, elle vient en aide aux

agriculteurs pauvres et peu scolarisés.

De manière ludique, notamment, elle les

sensibilise à l’importance de préserver

la forêt et de lutter contre les incendies

et l’abattage illégal. Mais surtout, elle

leur enseigne l’apiculture et la récolte

du miel. Cette activité est une source de

revenus pour les agriculteurs, qui com-

prennent d’emblée qu’ils ont besoin de

la forêt pour la pratiquer. “Et ça marche,

se réjouit Mella. Je remarque que les

gens se soucient de la forêt et que les

abeilles se portent bien.”

Tirer un revenu

des déchets

Il y a quelque temps, un typhon frappait durement

la province de Benguet (Philippines), où habite la

tribu Ibaloi. Les membres de cette dernière se

sont vu proposer un travail écologique par Sole-

dad Valencia, qui leur a appris à tisser à l’aide

de bandes de vieux papier journal. Paniers, sacs,

objets décoratifs, meubles : petit à petit, l’activité

a permis de développer un bel artisanat et est

une source de revenus pour les habitants, princi-

palement les femmes les plus démunies. Depuis,

Valencia a reçu d’innombrables distinctions, dont

celle de la ville de Baguio qui récompense le meil-

leur produit recyclé. Les articles sont également

vendus en Europe et aux États-Unis.

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CHRIS SIMOENS

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dimension 3 I MAI-JUIN-JUILLET 2012 15

L e concept d’’atténuation’ ren-voie aux mesures destinées à réduire la quantité de gaz à effet de serre. Et ce, de différentes

manières : empêcher la déforestation, reboiser, réduire les émissions de gaz à effet de serre des usines, des voitures, etc.

Du SEI à l’ONU, et autres sourcesLe renommé Stockholm Environment Institute(SEI) a été chargé par Oxfam de procéder à l’analyse comparative des mesures d’atté-nuation. L’institut a utilisé quatre sources dignes de confiance : le Programme des Nations unies pour l’Environnement (PNUE), le McKinsey & Company Climate Desk, l’expert en climatologie Dr. Frank Jotzo, et l’organisation Climate Action Tracker.

Le pollueur paie… trop peuDans son rapport fi nal, le SEI considère les pays occidentaux comme respon-sables à 75 % des émissions historiques, et à 60 % des émissions actuelles. Ces pays disposent par ailleurs de ressources fi nancières plus importantes que celles du tiers-monde. Or, les quatre sources consultées indiquent que les pays en développement se sont engagés à fournir davantage d’efforts d’atténuation que leurs plus riches antipodes. Entre autres choses, il est fort probable que, d’ici 2020, le Bré-sil, l’Afrique du Sud, l’Inde et la Chine (le groupe BASIC) auront davantage, et de loin, réduit leurs émissions par rapport aux États-Unis, à l’Europe, au Japon, au Canada, à l’Australie, à la Nouvelle-Zélande et à la Russie. Ceci est d’autant plus choquant si l’on considère que ces pays ont “exporté”une partie de leurs émissions de gaz à

effet de serre vers les pays en développe-ment, en y faisant fabriquer leurs produits, de plus en plus souvent du reste.Brigitte Gloire, experte Climat et Dévelop-pement durable auprès d’Oxfam, apporte quelques exemples de mesures d’atténua-tion. “Il y a tout d’abord le Brésil et l’Indonésie qui prennent de nombreuses mesures pour lutter contre la déforestation”, explique-t-elle. “Les Chinois veulent quant à eux utiliser d’ici 2020 le double de l’énergie renouve-lable qu’ils utilisent aujourd’hui. Ils renforcent également les normes d’effi cacité énergé-tique applicables aux bâtiments et appareils, et les usines insuffi samment effi caces éner-gétiquement sont fermées. Par ailleurs, les

Chinois veulent davantage de forêts sur leur territoire. L’Inde a mis en place le ‘National Action Plan on Climate Change’, qui prévoit une augmentation de la production annuelle de panneaux photovoltaïques de 1.000 MW, et le placement de systèmes solaires ther-miques d’au moins 1.000 MW. D’autres mesures doivent permettre d’améliorer l’effi -cacité énergétique des villes et communes, du secteur agraire et de la construction, et des secteurs industriels à forte consommation d’énergie. Les appareils effi caces énergéti-quement bénéfi cient d’avantages fi scaux. Les Indiens recherchent également une mobi-lité plus économe en énergie : les voitures doivent consommer de moins en moins, les transports publics sont encouragés…”

Renverser la vapeurTrois des sources du SEI laissent entre-voir dans quelle mesure les engagements actuels en termes d’atténuation permet-traient d’éviter le dépassement du seuil dangereux de 2 °C de réchauffement. Toutes trois concluent que la hausse des températures sera plus élevée : elle oscille-rait entre 2,5 et 5 °C. Une partie de l’explica-tion réside bien entendu dans les maigres efforts fournis par les plus gros pollueurs. Ceci étant, les efforts des pays en déve-loppement seraient encore insuffi sants. Ils doivent recevoir davantage d’aide tech-nique et fi nancière de manière à pouvoir accroître le nombre de mesures d’atténua-tion. Telle est la conclusion du rapport.

KOEN VANDEPOPULIERE

Le changement climatique est dû principalement aux gaz à effet de serre émis par les pays

industrialisés, souvent occidentaux. Et ce sont les pays en développement qui souffriront

le plus des retombées. La conclusion semble évidente : les plus gros pollueurs doivent

fournir le plus d’efforts pour inverser la tendance. C’est sans compter avec le renommé

Stockholm Environment Institute pour qui la réalité est toute autre.

LES GROS POLLUEURS PAIENT TROP PEU

ONLINEwww.sei-international.org

Brigitte Gloire à la Conférence des Nations Unies

sur le changement climatique, fi n 2011, Durban,

Afrique du Sud.

GAZ À EFFET DE SERRE :LE MONDE À L’ENVERS ?

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16 MAI-JUIN-JUILLET 2012 I dimension 3

À chacun ses arbres ! Désor-mais, à Kigali, chaque pro-priétaire doit en posséder au moins cinq sur sa parcelle.

Écoliers et enseignants, agriculteurs et commerçants se ruent sur les plants pour entourer leurs éta-blissements de cein-tures vertes. À l’école, chaque enfant prend soin au quotidien d’un arbre et le voit gran-dir avec lui. Pour les ménages et les centres scolaires, on préco-nise les arbres fruitiers. Les villageois, quant à eux, recherchent le bois de chauffe ou de construction : cyprès, greveria, eucalyptus…On prend soin des arbres, et cela doit se savoir. De grands établissements tels SULFO, l’usine de savonnerie de Kigali, étiquettent fièrement leurs protégés. Devant l’usine, les petits cyprès, pins ou sapins oscillent : “arbres SULFO”, est-il inscrit.Les commerçants, eux, rivalisent de zèle dans l’entretien des arbres qu’ils ont plantés devant leurs magasins. “J’ai dû engager un ouvrier qui doit bien arro-ser mes arbres, car pendant la période de chaleur ils apportent de la fraîcheur

dans ma parcelle et l’embellissent”, se félicite un grossiste du quartier com-mercial. “Au bout du compte, ces arbres contribuent à faire de la publicité pour les commerçants”, remarque un agent du

ministère des Ressources naturelles.Publicité, également, pour Kigali : “Il faut embel-lir l’image de la ville car c’est la porte d’entrée du pays !”, s’exclame ainsi un responsable du district de Nyarugenge. Cet engoue-ment est une aubaine pour Norman Gatarayiha, ingénieur horticole de 61

ans, qui se dit “fi er d’avoir décoré la ville de Kigali, l’un de mes plus grands clients”. Presque tous les arbres ainsi que les fl eurs le long des routes et dans la plupart des villas de la capitale viennent de sa pépinière. Depuis près de 20 ans, Gata-rayiha fait germer des plants qu’il vend désormais à prix d’or.

De lourdes amendesMême si les arbres jalonnent les rues des villes, personne n’y touche. Car les abî-mer, accidentellement ou non, peut coûter jusqu’à 1.700 dollars d’amende. “Quand il s’agit d’argent, les gens respectent les

interdits”, estime un responsable de la ville. Certaines routes de Kigali ont de quoi impressionner les visiteurs : une trentaine de kilomètres de quatre voies sont sépa-rées par des terres-pleins plantés de cen-taines de palmiers, et débouchant sur des ronds-points fl euris.De la verdure et de l’hygiène. Depuis cinq ans, les infractions relatives à la pro-preté dans la ville ont été codifi ées, avec des amendes allant de 1.500 à 80.000 Frw (2,5 à 130 dollars). Uriner en ville, par exemple, est passible d’une amende de 1.500 Frw, de même que cracher dans la rue. Jeter des ordures au mauvais endroit coûte 40.000 Frw, soit 65 dollars. Des entreprises de nettoyage balayent les avenues tous les jours.Kigali a triplé sa superfi cie en 15 ans ; depuis 1994, la population a été multipliée par quatre et atteint 1 million d’habitants. Édifi ces imposants et villas aux plans exo-tiques surgissent. Les maisons grimpent à l’assaut des collines. Mais malgré cette politique volontariste d’embellissement, beaucoup reste à faire : les installations électriques et d’eau potable restent insuf-fi santes et en mauvais état, et 90 % des routes sont encore en terre battue.

ALBERT-BAUDOUIN TWIZEYIMANA

Infosud Belgique - Syfi a Grands Lacst

Au lendemain du génocide de 1994, constructions et énergie domestique ont

dévoré les forêts. Aussi, en 2003, le gouvernement a entamé à Kigali une politique

volontariste de reboisement et d’embellissement.

Kigali tient beaucoup à sa verdure

À l’école, chaque

enfant prend

soin au quotidien

d’un arbre

et le voit grandir

avec lui.

BURUNDI ET RWANDA

50 ANSD’INDÉPENDANCE

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Burundi et Rwandachiffres à l'appuiLe Burundi et le Rwanda : voici 50 ans que ces deux pays d’Afrique centrale accédaient à l’indépendance. S’en suivit une histoire

souvent houleuse, jalonnée de violents confl its internes, et enfi n la reconstruction des structures étatiques et du tissus social.

Aujourd’hui, si les deux jeunes Etats affi chent des renouveaux importants et des taux de croissance de l’ordre de 4 et 7 %, ils

n’ont pas terminé de se reconstruire et doivent faire face aux défi s engendrés par l’intense pression démographique sur les terres

arables et au manque de ressources énergétiques. Panorama actuel de ces vieux compagnons de la Coopération belge, à travers

les visages, paysages, défi s et espoirs des “Mille Collines” situées au cœur de la région des Grands Lacs.

DONNÉES HISTORIQUES

XVe siècle 1899 1914 1966 1973 19931er juillet

1962

Conquête par les éleveurs Tutsis (Ouganda, Ethiopie) du territoire occupé par les agriculteurs Hutus et les Pygmées

Le Rwanda-Urundi devient colonie allemande

La Belgique reçoit un mandat sur le Rwanda et le Burundi

Le capitaine Michael Micombero détrône le dernier mwami (roi), Ntare V, et proclame la république

Massacre de Hutus (350.000 victimes)

Premier Président élu démocratiquement, Melchiro Ndadaye, est assassiné 100 jours après sa prise de fonction, guerre civile (200.000 victimes)

Indépendance

DONNÉES HISTORIQUES

1914 1959 1963 1973 1990 19941er juillet

1962

Conquête par les éleveurs Tutsis d'Ouganda et d'Ethiopie du territoire occupé par les agriculteurs Hutus et les Pygmées

Le Rwanda-Urundi devient colonie allemande

La Belgique reçoit un mandat sur le Rwanda et le Burundi

Les Hutus détrônent le roi Tutsi –guerre civile

Grégoire Kayibanda devient le premier Président

Arrivée au pouvoir du général Habyarimana après un coup d'état

Guerre civile menée par le Front Patriotique Rwandais(= réfugiés Tutsis)

Génocide après l'assassinat du général Habyarimana (800.000 victimes).

Juillet 1994 :le pasteur Bizimungu devient Président et Paul Kagame ministre de la Défense et Vice-président

Indépendance

1899XVe siècle

Population : .............................................. 10,9 millions

Superfi cie : .................................................26.338 km²

Capitale (2009) : ................... Kigali, 909.000 habitants

DémographieDensité : .......................................... 415 habitants/km²

Population 2050 : .................................... 23,1 millions

Nombre d'enfants par femme : ..............................4,6

Population urbaine : ............................................ 19 %

Santé et développementEspérance de vie : .......55 (hommes : 54, femmes : 57)

Mortalité infantile (< 5 ans) pour 1.000 ................50

Taux de transmission du VIH (2009) : ............... 2,9 %

Médecins pour 1000 (2005) : ............................. 0,024

Alphabétisation (2003) : ................................... 70,4 %

Usagers internet (2009) : ............................... 450.000

PolitiqueRégime politique : république, présidentiel, multipartitePrésident : ................................................Paul Kagame

ÉconomiePIB (2010) : ......................................540 USD / habitant

Croissance économique : .................................. 8,6 %

Emploi (2001) : agriculture .................................. 90 %,industrie et services .................... 10 %

Pourcentage de la populationavec moins de 2 USD/jour (2000/2009) : ........... 90 %

Principaux produitsd'exportation : café, thé, peaux de bêtes, minerai d'étain

Source principale d'énergie : ..............hydroélectricité

RWANDA

Population : .............................................. 10,2 millions

Superfi cie (terres) : ...................................25.680 km²

Capitale (2009) : ...........Bujumbura, 455.000 habitants

DémographieDensité : .......................................... 367 habitants/km²

Population 2050 : .................................... 27,1 millions

Nombre d'enfants par femme : ..............................6,4

Population urbaine : ............................................ 11 %

Santé et développement Espérance de vie : .......57 (hommes : 56, femmes : 59)

Mortalité infantile (< 5 ans) pour 1000 : .................66

Taux de transmission du VIH (2009) : .............. 3,3 %)

Médecins pour 1000 (2006) : ...............................0,03)

Alphabétisation (2003) : ................................... 59,3 %

Usagers internet (2009) : ............................... 157,800

PolitiqueRégime politique : république, présidentiel, multipartite

Président : .........................................Pierre Nkurunziza

ÉconomiePIB : .............................................400 USD par habitant

Croissance économique (2011) : ....................... 4,2 %

Emploi (2002) : agriculture ................................ 93,6 %industrie ..................................... 2,3 %services .................................... 4,1 %)

Pourcentage de la populationavec moins de 2 USD/jour (2000/2009) : ......... 94 % )

Principaux produitsd'exportation : . café, thé, sucre, coton, peaux de bêtes

Source principale d'énergie : ..............hydroélectricité

BURUNDI

18 MAI-JUIN-JUILLET 2012 I dimension 3

OUGANDA

R.D.CONGO

TANZANIE

Bururi

Mwaro

Gitegagagat

MuramM

aLac Tanganyikanga a

Bubanzaaa

Kayanzaay NgoziCibitoke

RuyigaRRuy

Cankuzouu

Karuziuzuz

MuyingaMuM

Kirundo

RutanaR

MakambaM

Kibuye

Byumba

Nyanza

RwamaganaKigali

Bujumbura

OOUUGGAANNDDAA

R.D.CONGOO

TANZANIE

Lac KivuK

SANTÉ(55 millions)

ÉNERGIE(55 millions)

DÉCENTRALISATION (28 millions)

AUTRE(22 millions)

D(

17,5 %

)

34,4 %

s)

34,4 %

13,8 %

AUTRE(42 millions)

AGRICULTURE(49 millions)

SANTÉ(25 millions)

ENSEIGNEMENT(22 millions) 16,7 %22,8 %

27,9 % 32,6 %

367hab./km2

363hab./km2

26.338 km2 27.834 km2 30.528 km2

415hab./km2

10,9 millions d’habitants

RWANDA BURUNDI BELGIQUE

10,2 millions d’habitants 11 millions d’habitants

AUTRE(42 millions)

AGRICULTURE(49 millionsns)

SANTÉ(25 millions)

ENSEIGNEMENT(22 milliioonons) 16,7 %22,8 %

)

27,9 % 32,6 %

2000 2005 2010

Fin de la guerre civile – accord de paix entre rebelles Hutus et le Président Buyoya

Nouvelle constitution – élections – l'ex-chef rebelle Pierre Nkurunziza devient Président

Réélection de Pierre Nkurunziza

Tous les chiffres concernent l’année 2011, sauf mention contraire.

Sources : Population reference bureau (www.prb.org), CIA FActbook (www.cia.gov) et l'Institut National de Statistique du Rwanda.

2000 2003 2009

Paul Kagame devient Président

Premières élections présidentielles après le génocide –Paul Kagame reste au pouvoir

Adhésion au Commonwealth

Coopération au développement

avec la Belgique

Aide publique totale (APD) : .......56,7 millions d'euros

Programme de coopérationgouvernementale 2011-2014 : ....160 millions d'euros

Coopération au développement

avec la Belgique

Aide publique totale (APD) : ..........45 millions d'euros

Programme de coopérationgouvernementale 2010-2013 : ....150 millions d'euros

BURUNDI ET RWANDA

50 ANSD’INDÉPENDANCE

dimension 3 I MAI-JUIN-JUILLET 2012 19

P arent pauvre du budget géné-ral de l’État (10 % en 2012), le secteur agricole est l’un des piliers majeurs de l’économie

du Burundi. Bon an mal an, sa contri-bution au PIB oscille en effet autour de 50 % selon les données (2011) du ministère burundais de l’Agriculture et de l’Élevage. Aujourd’hui, le niveau de productivité laisse encore à dési-rer : l’agriculture est essentiellement

de subsistance et tenue à bout de bras par une population massivement rurale (90 %). Et l’accroissement de la popula-tion accentue l’émiettement des exploi-tations (moyenne inférieure à 0,5 ha.).

La relance de la coopération suscite une certaine embellie

Pour ‘booster’ ce secteur, le Burundi compte surtout sur des appuis extérieurs. Mais la crise sociopolitique qui, une décennie durant, a secoué le pays, avait entraîné le gel de la coopération, préjudi-ciable à l’épanouissement de ce secteur vital pour le pays. Le montant des enga-gements des aides extérieures au secteur de l’agriculture atteindrait 670 milliards de FBU sur la période 2012-2017. Ces appuis attendus s’inscrivent dans le cadre de la mise en œuvre du Plan national d’in-vestissement agricole (PNIA). “C’est un cadre de cohérence et de coordination des investissements dans le secteur agricole pour les six prochaines années”, a déclaré Odette Kayitesi, ministre de l’Agriculture et de l’Élevage. La part de la Belgique dans ce vaste chantier est considérable.

Deuxième bailleur bilatéral du Burundi après la France (2010), elle contribue à renforcer le secteur agricole dans le pays. “Le portefeuille de coopération belgo-burundaise a été relancé il y a quelques années, et l’engagement de ce pays dans le secteur agricole est remarquable ; cela concerne notamment le renforcement institutionnel du ministère en charge de l’Agriculture, de l’Institut des sciences agronomiques, ISABU, sans oublier le déve-loppement agricole dans les provinces de Cibitoke, Ruyigi et Kirundo”, témoigne Pierre Bayubahe, ingénieur agronome. Ainsi, dans le souci de préserver les acquis des projets antérieurs, l’Agence belge de développement (CTB) a mis en place le Programme d’appui institu-tionnel et organisationnel au secteur agri-cole (PAIOSA), depuis septembre 2011. Financé à hauteur de 49 millions d’euros, ce programme vise à appuyer l’émer-gence et le développement d’une pro-fessionnalisation agricole, et un renforce-ment des autorités sectorielles.

SILVÈRE HICUBURUNDI

Infosud Belgique - Syfi a Grands Lacs

GROS PLAN SUR LE

SECTEUR AGRICOLE

AU BURUNDI

Plus de 90 % de la population

dépend directement de l’agri-

culture au Burundi. Mais ce

secteur est miné par l’émiet-

tement des exploitations,

en raison notamment de la

pression démographique et

la faible productivité. Avec le

soutien de ses partenaires,

dont la Belgique, le Gouverne-

ment s’efforce de requinquer

ce secteur névralgique.

BURUNDI ET RWANDA

50 ANSD’INDÉPENDANCE

© Info

sud

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yfi a

20 MAI-JUIN-JUILLET 2012 I dimension 3

À l’entrée des tribunaux de Kigali, une affiche avertit : “Nous punissons la corrup-tion. Si nos agents se laissent

corrompre ou tentent de corrompre, nous demandons votre concours pour les dénoncer.” Jusque dans les salles d’au-dience, on peut lire : “Luttons contre la corruption. La corruption est bannie des tribunaux.” Deux fois par an, l’offi ce du médiateur national, l’Ombudsman, publie la liste des coupables de ce délit condam-nés en dernier ressort.Début 2009 a été mis en place le Conseil consultatif anti-corruption, composé de représentants des différentes agences de l’État. L’Ombudsman coordonne ses activités. Sa mission principale : garder un œil vigilant sur l’usage des fonds publics. “Le Rwanda a pris pour cheval de bataille la tolérance zéro contre la corruption. C’est pourquoi, la lutte contre ce fl éau concerne aussi ceux qui étaient considérés comme des intouchables (les proches du parti au pouvoir, NdlR)”, explique un offi cier de la police judi-ciaire de Kigali.Ainsi, des hauts respon-sables de l’État ont rejoint en prison ceux des ins-tances de base. Chaque année, la Cour suprême réserve une semaine au traitement prioritaire de dossiers de malversation financière. Transparency International, l’organisa-tion internationale enga-gée dans la lutte contre la corruption, a pris acte et classé en 2011 le Rwanda 4e en Afrique et 49e au niveau mondial en ce qui concerne la lutte anti-corruption.

Instances de base encore rongées

Le rapport de l’Ombudsman de 2011 montre que 53 % des cas sont enregis-trés dans les instances de base, 43 % dans l’appareil judiciaire et 28 % dans les marchés publics. Pour un activiste des droits de l’homme de Kigali, “Trop d’instances sont dirigées par des gens qui doivent rendre des services béné-voles.” D’après lui, “(…) c’est les inci-ter à la corruption”, avant d’ajouter : “Les dirigeants des entités administra-tives de base (Imidugudu), les conci-liateurs (Abunzi) qui jugent toutes les affaires fi nancières jusqu’à trois millions Frw (5.400 dollars), les ‘juges intègres’ (Inyangamugayo) des juridictions popu-laires Gacaca qui peuvent condamner à la perpétuité, sont quasiment contraints de toucher les pots de vin, car ils passent beaucoup de temps à remplir leurs tâches sans rien percevoir.”

Des services en ligne qui encou-ragent les investisseurs

Depuis près de cinq ans, un étranger peut demander et obtenir son visa par Internet sans passer par les agents des services d’immigration. Le certifi cat d’enregistre-ment d’une compagnie commerciale peut s’obtenir également en ligne ; les marchés publics sont publiés et les critères de sélec-tion dévoilés. “Les services en ligne évitent le contact du demandeur de service avec un agent qui peut le contraindre à la corrup-tion”, explique un agent du ministère de l’administration locale. Un opérateur éco-nomique asiatique, qui vient de démarrer son entreprise à l’Est du pays, partage cet avis : “J’ai obtenu tous les documents obliga-toires sans avoir affaire à un agent de l’État. Et quand un homme d’affaires est sûr qu’il ne sera pas toujours obligé de donner des pots de vin, il est rassuré…”, témoigne-t-il.

ALBERT-BAUDOUIN TWIZEYIMANA

Infosud Belgique- Syfi a Grands-Lacs

Le Rwanda a pris

pour cheval de bataille

la tolérance zéro contre

la corruption. C'est

pourquoi la lutte contre

ce fl éau concerne

aussi ceux qui étaient

considérés comme

des intouchables.

La lutte contre la corruption, cheval de bataille du gouvernement rwandais,

rend la justice plus fi able et attire des investisseurs. Mais le mal n’est pas

encore éradiqué dans les instances de base.

pour attirer des investisseurs

LUTTER CONTRE LA CORRUPTION

BURUNDI ET RWANDA

50 ANSD’INDÉPENDANCE

dimension 3 I MAI-JUIN -JUILLET 2012 21

Les Uduseke1, petits paniers en sisal tissé, sont de plus en

plus nombreux à s’inviter dans le quotidien et surtout à trôner

sur les étagères et autres livings-rooms en Afrique et en

Occident. Mais quelle est leur histoire ? D’où tirent-ils cette

notoriété ? Reportage à Kigali chez African Handicraft.

AGASEKE

AMAHORO

I l y a encore quelques années, les Uduseke n’étaient rien de plus que… des paniers. Fonctionnels, utiles pour transporter vivres et

denrées – farine ou haricots… “Leur fabri-cation était l’apanage des femmes rurales”, nous explique Mukanyarwaya Euphrasie, une des confectionneuses, chez African Handicraft, de ces paniers fabriqués à base de sisal, une plante dont les fi bres résis-tantes sont prisées en vannerie. “L’Agaseke se confectionne en une semaine”, précise Mukeshimana Félicité.Avant la colonisation, les jeunes fi lles sui-vaient un enseignement traditionnel obli-gatoire de confection des petits paniers. Avec l’arrivée des Belges, souligne Fran-çois Ingabire, l’un des responsables du projet African Handicraft, “les jeunes fi lles ont quitté la cuisine pour aller en classe, et cette transition a eu pour conséquence directe l’abandon de l’enseignement du tissage.” Mais ces petits paniers de la forme d’une hutte ont subsisté. “Nos mères et nos grands-mères, en plus d’y mettre des vivres, les utilisaient comme des endroits secrets, ce qui attisait sou-vent la curiosité des hommes”, raconte Euphrasie. “Une espèce de jardin réservé aux femmes !”, surenchérit Mukarugira Esperance en souriant.

Les paniers de la paixAujourd’hui, qui confectionne les Udusekeet pourquoi les voit-on partout à Kigali ? Euphrasie sourit avant de répondre : “De nos jours, l’Agaseke Amahoro représente le nouveau visage du Rwanda à l’extérieur

de nos frontières.” Après le génocide et ses conséquences tragiques, les Udusekesont en effet devenus Uguseke Amahoro, c’est-à-dire les “Uduseke de la Paix”. Une autre dimension s’est ajoutée : désormais, l’activité de confection réunit des femmes rurales et citadines dont la plupart sont des rescapées du génocide qui étaient à la recherche de travail.L’un des objectifs d’African Handicraft, coopérative artisanale imaginée en 2009 et lancée en 2011, fut de raffermir et de consolider le secteur artisanal tout en promouvant une autre image du Rwanda. “C’est ainsi que nos petits paniers ont commencé à attirer les touristes et qu’ils se sont retrouvés en dehors de nos frontières, ajoute Euphrasie. Nous sommes plus d’une quarantaine de femmes à être orga-nisées en coopérative, et nous travaillons quotidiennement à la confection des Udu-seke, ici chez African Handicraft. C’est vous dire l’étendue et la place qu’occupent ces paniers dans nos vies !

Symboles du Rwanda nouveauÀ l’heure actuelle, dans les rues de Kigali, il est devenu diffi cile, voire impossible de ne pas croiser un Agaseke sur son chemin.

Véritable symbole du Rwanda nouveau, on les trouve partout… À peine les portes de l’aéroport franchies, ces paniers sont vantés sur des affi ches publicitaires dans toute la ville, dans les hôtels ou autres commerces. Quant aux produits dérivés, ils sont légions… Des boucles d’oreilles aux dessous de plats en passant par les boules de Noël customisées en sisal, tout y passe. Même les billets de banque ! L’Agaseke fi gure en effet sur l’emblème national du Rwanda, reproduit sur les nou-velles coupures de 5.000 francs rwandais depuis 2009.Certains prétendent même que le suc-cès de ces petits paniers aurait suscité l’appétit reproducteur de l’industrie chinoise… Info ou intox ? Ce qui est sûr, c’est que le gouvernement rwandais a réagi en exigeant que chaque Agaseke, et ses produits dérivés, soient estampil-lés du label “Made in Rwanda”…

WENDY BASHI

Infosud Belgique - Syfi a Grands Lacs

1 Agaseke se dit pour un petit panier, Uduseke est

le pluriel d’Agaseke et Ibiseke se dit pour un panier

d’une plus grande taille que la normale.

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ents

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22 MAI-JUIN-JUILLET 2012 I dimension 3

BURUNDI ET RWANDA

50 ANSD’INDÉPENDANCE

Dans les couloirs de l’ambassade du Burundi où elle travaille à présent, vous la remarqueriez à peine. À l’instar de ses sœurs burundaises, elle est humble, elle parle prudemment et doucement. Pourtant, c’est une star dans son pays ; il n’existe pas un Burundais qui ne la connaisse. Dramaturge, comédienne, conteuse, écrivain, politicienne, militante… Si elle est reconnue comme l’une des plus grands écrivains burundais, elle a le plus souvent mis sa plume et ses sages paroles au service de la paix de son pays.

L’histoire douloureuse de son pays, la guerre civile qui a duré 10 ans, elle l’a vécu au premier plan. “Mon mari a été attaqué dans notre maison et laissé pour mort pendant

la guerre. Il a ensuite dû fuir vers la Belgique. Moi, en attendant, j’ai continué à jouer

à cache-cache pendant les situations dangereuses, jusqu’à ce que je le rejoigne en

Belgique, fi n des années ‘90.” Mais elle ajoute : “Je vis ici mais mon âme est au

Burundi. Je retourne régulièrement au pays, quand je suis invitée.”

Lorsqu’on lui demande comment elle est passée d’artiste à militante, elle explique : “Mon crédo c’est ‘parler ensemble’, car la grande part des problèmes (NDLR : les confl its ethniques et massacres) que nous connaissons au Burundi vient du fait

qu’on n’exprime pas assez nos ressentis. Alors quand ça sort, ça explose. Nous

avons une culture du ‘pleurer dedans’, de frustrations inexprimées, de vengeances

ruminées.” C’est ainsi qu’avec sa troupe elle a joué des pièces de théâtre sur le sida ou les violences faites aux femmes ; elle a écrit et diffusé le feuilleton radiophonique Umubanyi niwe muryango (“Nos voisins, c’est notre famille”), pour la tolérance et la réconciliation ethnique, qui est rapidement devenu une institution au Burundi, et d’autres feuilletons ensuite ; elle a participé à une caravane pour la paix projetant des fi lms dans les villages pour inviter la population à s’exprimer.

De son pays, elle a vu également l’évolution positive : “La sécurité s’est vraiment améliorée,

même si des gens meurent encore, et la précarité de la majorité de la population rend

tous les dérapages possibles. Mais j’ai de l’espoir et je vois des signes encourageants : les

derniers réfugiés sont rentrés au pays, et maintenant les étudiants qui ont eu une bourse

d’étude en Belgique décident de rentrer au pays après leur thèse.”

Mais Marie-Louise ne s’arrête pas pour autant : “Je suis encore très impliquée dans

les activités culturelles en faveur du Burundi : j’écris des pièces pour des associations.

La semaine dernière je suis allée avec mon groupe de danse folklorique au “Beau

vélo de Ravel” (NDLR : l’émission radiophonique de la RTBF, qui se déroulera en octobre au Burundi). J’ai participé avec une association suisse à la mise sur pied

d’une anthologie de textes sur les écrivains des 3 pays (Burundi,Rwanda et Congo).

Et enfi n, je cherche à publier un nouveau livre, une sorte de roman historique,

l’histoire d’une femme pendant la guerre civile.”

Visages du BurundiMarie-Louise et Sybille : deux artistes burundaises. La première a traversé et marqué

l’histoire douloureuse de son pays ; la seconde a le visage de la nouvelle garde énergique,

créative, et pleine de promesses. Si elles vivent à présent en Belgique, leur regard est

tourné au-delà des mers vers la paix et le développement de leur pays.

Elle est chanteuse depuis sa plus tendre enfance, productrice, ensuite, cinéaste aussi… du haut de ses 29 ans, Sybille peut se vanter d’avoir une sacrée expérience et encore beaucoup d’énergie à revendre.

“Mon rêve, c’est de devenir chanteuse avec une reconnaissance internationale”, avoue Sybille. Elle cite “Miriam Makeba” ou “Angélique Kidjio” : “Ce sont des

femmes qui ont du talent et qui s’en servent pour apporter quelque chose à leur

pays. Car je ne me vois pas que dans un rôle d’interprète : je rêve de voir rayonner

la culture burundaise bien au delà de ses frontières. Pour cela, il faut créer des

projets à standard international.”

Et ce ne sont pas des vœux pieux ; au Burundi, Sybille s’occupe activement de l’ONG Menya Media qui fait de la production culturelle et de l’éducation communautaire. Pour mieux atteindre son but, elle a décidé de faire une formation de haut niveau en la matière et vient de terminer un master en production audiovisuelle en novembre 2011. Elle a immédiatement enchaîné avec la production d’une émission  socioculturelle pour

Télé Bruxelles, intitulée “Un Peu de Tous”. “Maintenant, je vais rentrer au Burundi et

il faudrait que je me mette à la production

cinématographique “pure” mais c’est très

difficile au Burundi car ce secteur est

encore à l'état embryonnaire.”

“Je me sens chez moi en Belgique car on

ne me regarde pas comme une étrangère.

J’aime tout ici, sauf le climat. Mais l’idéal,

pour moi, c’est de vivre au Burundi et

de venir ici pour un petit travail à durée

déterminée. Pour l'instant, j'ai encore

besoin de collaborer avec des professionnels pour accumuler plus d'expérience, et

nouer des contacts afi n de mener à bien les projets au Burundi."

Car pour Sybille, le lien est très clair entre la culture et le développement : “d’abord

la culture a une fonction de divertissement : les gens ont besoin de se détendre,

et en particulier dans mon pays ; une fonction économique aussi, car la culture

est créatrice d’emplois ; une fonction éducative enfi n : la culture fait passer des

messages, refl ète les problèmes d’une époque, fait réfl échir.”

Et si vous vous aventurez à demander si elle a des projets…, vous risquez de ne jamais terminer la conversation ! Au programme : développer Menya Media et des nouveaux projets, ouvrir une radio musicale pour faire la promotion de la musique burundaise et, qui sait, si son vœu se réalise, ouvrir un centre de formation audiovisuelle…

Marie-Louise Sybille

Je ne me vois pas

que dans un rôle

d'interprète : je rêve de

voir rayonner la culture

burundaise bien au

delà de ses frontières.

© S

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ille

Et vous savez quoi ? L’émission que Sybille produit a fait un numéro sur Marie-Louise, vous pouvez le voir à 

http://www.telebruxelles.net/portail/emissions/magazines-a-voir-en-ligne/un-peu-de-tous/17902-120212-marie-louise-du-burundi

Quant à Sybille, vous pouvez la voir et écouter ses chansons “GAHUNGA WA NDORE” et “KARIRE” sur YouTube.

ELISE PIRSOUL

dimension 3 I MAI-JUIN-JUILLET 2012 23

L a mairie de Bujumbura ne gère qu’une cinquantaine de kilomètres de routes sur les 12.000, dont 2.000 revêtus, qui

parcourent le Burundi. Les routes classées (c’est-à-dire qui sont nationales, commu-nales ou provinciales) sont normalement

entretenues par l’Office burundais des routes. Les collectivités locales sont, elles, chargées de la gestion et la maintenance du réseau non classé. Mais la décennie de guerre civile (1993-2002) qui a marqué le pays avait mis en veilleuse la quasi-totalité des travaux d’entretien.

APRÈS LA CRISE, Mal entretenu et détruit durant la longue crise dont

se remet le pays, le réseau routier renaît au Burundi.

À Bujumbura, la capitale, les routes des quartiers popu-

laires, pavées grâce aux fi nancements de la Belgique et de

l’UE, sont plus salubres. Et ces travaux de voirie emploient

beaucoup de main-d’œuvre.

À partir de 2002, les institutions internatio-nales ont repris leurs activités d’assistance dans ce secteur. “C’est dans ce cadre que la Banque mondiale, la Banque africaine de développement et la Belgique fi nancent l’aménagement des routes pavées dans les grandes villes du pays”, précise Eusèbe Miburo, ancien cadre au ministère en charge des Travaux publics. À Bujumbura, plus de 40 km de routes ont été refaits, dont 15 km par la seule Coopération belge. À Kirundo, par exemple, à 200 km au Nord de Bujumbura, la route nationale traversant la ville et reliant le Rwanda a été refaite, et 6 km de rues pavées sont pré-vus. En tout, les programmes relatifs au pavage représentent 21 millions d’euros d’investissement pour la CTB.

Les riverains se frottent les mainsDans les quatre coins de Bujumbura, la population urbaine salue ainsi les projets d’aménagement des routes par pavage, débutés en 2008. Le visage de la ville est littéralement transformé, en particulier dans les quartiers populaires ou périphé-riques. Ce pavage présente de nombreux avantages : “Depuis que les routes sont pavées en commune urbaine de Bwiza, la circulation est plus fl uide et on ne voit plus de ces fl aques d’eau usée qui abritaient des moustiques, sources de malaria. Le quartier est nettement plus propre qu’avant”, fait remarquer Philippe Ndayahoze, qui tient une échoppe au marché de Jabe dans cette commune. L’idée d’une salubrité retrouvée est sur toutes les lèvres. “Après les travaux de pavages de ses rues, le Quar-tier VI de la commune urbaine de Ngagara a été surnommé ‘quartier suisse’ en raison de sa propreté…”, ajoute Lise Kaneza, lycéenne du même quartier.Le côté pratique des pavés n’est pas oublié, comme en témoigne Artur Muhuzenge, expert en construction de routes : “Ces

Ce sont des travaux à

haute intensité de main-

d’oeuvre et, par conséquent,

des centaines de personnes

ont été engagées pour

amasser les pierres, les

tailler dans les carrières, puis

les placer dans les rues.

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24 MAI-JUIN-JUILLET 2012 I dimension 3

LE BURUNDIrenouvelle son réseau routier

routes pavées ont une grande durabilité, entre trente et quarante ans, leur entretien est plus aisé, on peut les ouvrir et les refer-mer pour insérer des réseaux souterrains d’eau, d’électricité ou de téléphone. Sans oublier la vitesse limitée dans les quartiers résidentiels”, fait-il remarquer.

Alléger le chômage et booster l’activité économique

Salubrité, commodité, mais aussi emploi. “Nous constatons que ces projets de pavage contribuent à réduire la pauvreté par la création d’emplois et la distribution de revenus à la population”, ajoute ainsi Eusèbe Miburo. Comme par enchante-ment, l’essaim de nombreux jeunes au chômage qui, ça et là, avaient l’habitude de s’agglutiner sur les ligalas (‘coin de la rue’, ou ‘sous le manguier’), a disparu, absorbé par ces travaux. “Ce sont des travaux à haute intensité de main-d’œuvre et par conséquent, des centaines de per-sonnes ont été engagées pour amasser les pierres, les tailler dans les carrières, puis les placer dans les rues, etc.”, témoigne, désirant garder l’anonymat, un chef des travaux rencontrés dans la commune urbaine de Kamenge.Bémol : du travail, oui, mais qui reste cepen-dant précaire. La “réduction de la pau-vreté” est relative. “Les entreprises ont sou-vent recours à des journaliers embauchés à la tâche, ou pour des périodes courtes, de quelques jours à un mois”, explique Anicet Niyuhire, qui a pris part aux tra-vaux de pavage des rues en commune urbaine de Bwiza. Même situation pour la pléthore de tailleurs de pavés embauchés dans les carrières disséminées autour de Bujumbura. “Plutôt que de pousser les prix à la hausse, les entrepreneurs ou leurs intermédiaires peu scrupuleux profi tent de la pauvreté des tailleurs de pierre, même constitués en association, pour acheter à vil prix”, commente Gervais Ndayongeje, un de ces tailleurs.

La population promet de mettre la main à la poche

Mais il n’y a pas que la création d’emploi qui s’inscrit dans la foulée de ces travaux. “Il faut souligner le développement du savoir-faire

des populations riveraines en matière de construction et d’entretien de routes ou de pistes, ainsi que l’appropriation des infras-tructures d’utilité publique par la population locale et son corollaire, le meilleur entretien des ouvrages”, se réjouit un des conseil-lers communaux de Cibitoke, municipalité de Bujumbura.Appropriation qui est censée se déve-lopper par l’implication fi nancière de la population. Le 19 avril dernier, sur un double appel de la mairie de Bujumbura et de la CTB, les médias locaux ont dif-fusé en boucle un spot invitant les habi-tants des communes urbaines de Kinama, Kamenge et Cibitoke (nord de Bujum-bura) à apporter une contribution aux tra-vaux en cours dans leurs quartiers. Mon-tant attendu : 30 000 francs burundais par ménage, soit quelque 20 dollars. “Cette contribution a toujours été exigée dans les différents quartiers dont les routes ont été pavées. Ceci dans le souci d’amener

la population bénéfi ciaire à s’approprier ces infrastructures. Cependant cet effort citoyen est estimé en fonction des moyens et du standing du quartier en question”, a déclaré, désirant garder l’anonymat, un responsable administratif de la commune urbaine de Kinindo.Par ailleurs, ces travaux auront eu un autre avantage : celui de mettre fi n à une certaine urbanisation anarchique de la grandissante ville de Bujumbura. “Pendant les travaux, certaines maisons érigées quasiment en pleine rue ont été détruites pour dégager la nouvelle route afi n de permettre un trafi c plus fl uide et un entretien plus aisé. C’est ainsi que ceux qui construisent dans les nouveaux quartiers périphériques laissent suffi-samment de la place pour les routes”, conclut Salvator Ndayirorere, ingénieur en génie civil.

SILVÈRE HICUBURUNDI

Info sud Belgique-Syfi a Grands-Lacs

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dimension 3 I MAI-JUIN-JUILLET 2012 25

BURUNDI ET RWANDA

50 ANSD’INDÉPENDANCE

I l y a à peine quelques années, Olivier DeWolf était lui-même étudiant en ‘Conception de pro-duits industriels’ à la Haute École

de la province de Flandre occidentale (Howest). Pour son travail de fi n d’études, il s’est rendu au Pérou avec sa compagne anthropologue. Là-bas, il a travaillé dans les domaines de l’énergie renouvelable et du développement d’un habitat sain. “Une révélation”, selon DeWolf. “Nous nous sommes rendu compte qu’un concepteur pouvait, en collaborant étroitement avec les communautés locales, imaginer des solutions améliorant les conditions de vie (co-création). À cet égard, la combinaison entre un concepteur et un anthropologue était tout simplement idéale !”Il est crucial de bien connaître les besoins et les usages de la population locale, ainsi que les matériaux et les connais-sances dont elle dispose. De Wolf : “Pre-nez l’exemple d’une couveuse. Il semble s’agir d’un appareil techniquement com-plexe qui, par ailleurs, est souvent importé. Par contre, les voitures sont omniprésentes. Dès lors, ne peut-on pas fabriquer des couveuses à partir de pièces détachées automobiles ? Cela s’est avéré possible, grâce à la ‘couveuse Toyota’. Les phares génèrent la chaleur, le système d’alarme peut être incorporé, etc. Le coût est infé-rieur à 1.000 euros et l’appareil peut être réparé partout.”Les entreprises, les ONG, les organisa-tions du 4e pilier et les autorités locales sont souvent à la recherche de solutions

innovantes et durables pour venir en aide aux habitants du Sud. Seulement, elles sont insuffi samment informées sur les capacités d’un concepteur (de produits) industriel. C’est pourquoi DeWolf a proposé un projet-pilote au sein de l’ Howest : le projet Design for Impact, dont il a donné le coup d’envoi en septembre 2011.Depuis lors, nombre de concepts créa-tifs sont nés de l’imagination des étu-diants. En outre, ils répondent tous à des demandes formulées par diverses entreprises et organisations (voir les exemples). DeWolf est un homme com-blé. “Nous sommes sur la bonne voie avec notre innovation qui s’inspire de besoins humains et non de la technologie.” Voilà qui prouve qu’un métier technique

n’est pas forcément ennuyeux. Design for Impact peut donner libre cours à sa créativité afi n de trouver des solutions durables à des besoins très concrets rencontrés par les populations du Sud. Le design peut donc exercer un impact social. “Ouverture, dimension sociale, production locale, échange de connais-sances et co-création, conception sur mesure et durable : tels sont les aspects qui caractérisent le projet.”

CHRIS SIMOENS

À Courtrai, des étudiants créatifs conçoivent des produits en collaboration

avec le Sud. Ce projet pilote a été baptisé Design for Impact par son initiateur,

Oliver DeWolf, et intéresse certaines entreprises et ONG.

DESIGNIMPACT

FOR

ONLINEwww.designforimpact.be

design-for-impact.blogspot.com

26 MAI-JUIN-JUILLET 2012 I dimension 3

DESIGN

Ouverture, dimension

sociale, production locale,

échange de connaissances

et co-création, conception

sur mesure et durable :

tels sont les aspects qui

caractérisent le projet.

OLIVER DEWOLF

L’ONG philippine Pagtambayayong

Foundation – par le biais du jumelage entre les villes de Courtrai et Cebu – était à la recherche d’un emballage bon marché et réutilisable permettant aux clients d’emporter chez eux du riz et d’autres denrées cultivés biologiquement. L’étudiant Floris Ampe a développé un seau à cet effet. Le seau en question est un emballage réutilisé de mayonnaise et de yaourt. Les poignées sont tissées à l’aide de déchets de papier adhésif. Le projet est actuellement en phase de test. L’ONG a mis 200 exemplaires en vente afi n d’évaluer l’accueil réservé au produit.

Santo Toribia est une école pour enfants handicapés située dans l’un des faubourgs les plus pauvres de la ville de Trujillo (Pérou). Ne bénéfi ciant d’aucune subvention publique, l’école était à la recherche d’une source de revenus combinée à un outil éducatif qui permettrait de développer les aptitudes des enfants. L’étudiant Bob De Troy a imaginé de petites fardes en écorce de palmier, chacune de ces fardes contenant l’image d’un enfant. Si la fabrication de ces fardes donne aux enfants l’opportunité d’apprendre des techniques nouvelles (telles que le pressage du bois), elle renforce également leur confi ance en soi et leur indépendance. Elle leur donne, à proprement parler, un visage. Les fardes sont vendues dans les écoles de Trujillo.

TPVision souhaitait développer un poste de télévision (Philips) adapté pour les pauvres – la base de la pyramide (‘base of the pyramid’, ou BOP) – en Inde. 80 % de la population y vit avec moins de 2 dollars par jour. Si ces personnes ne peuvent s’offrir de maison ou de voiture, elles n’entendent toutefois pas se passer de télévision. L’étudiant Ruben De Baere a mis au point un poste de base dépourvu de tout accessoire superfl u.

TELEVISION FOR BOP

CASH FOR TRASH

DESIGN FOR INCLUSION

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dimension 3 I MAI-JUIN-JUILLET 2012 27

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Toutes les photos: © Design for Impact – HOWEST

CONFÉRENCE À BRUXELLES

Le Palais d’Egmont a accueilli ces 19 et 20 mars une conférence internationale de l’UNRWA

intitulée “Engaging youth : Palestine refugees in a changing Middle East”. L’agence onusienne

avait invité une délégation d’une vingtaine de jeunes réfugiés palestiniens afi n d’infl uencer la

formulation des futurs projets de l’UNRWA. Ils se sont exprimés devant un parterre de person-

nalités du monde arabe et d’Europe, comme Didier Reynders, Salam Fayyad, Catherine Ashton,

Martin Schulz, les Ministres des Affaires étrangères de Jordanie et de Palestine, ainsi que le

Secrétaire général de la Ligue arabe. Infos : http://www.engagingyouth.eu

Ils sont nés et ont grandi dans des camps de réfugiés, comme leurs parents avant eux.

Une grande part a étudié, beaucoup, mais ne trouvera pas de travail, ni dans le camp, ni à

côté, et vivra de l’aide humanitaire. Et pourtant ces jeunes constituent presque 30 % des

5 millions de réfugiés peuplant les camps de Palestiniens à travers le Moyen Orient. Une

bombe à retardement ou un énorme potentiel…

are theFUTUREYOUTHJeunes réfugiés palestiniensBombe à retardement ou énorme potentiel ?

Vivre entre les mursNaplouse, ville historique au cœur de la Cisjordanie, loin des frontières israéliennes - mais entourée de check-points - tout est calme, et pourtant, la violence est latente. Elle est là, visible sur les murs, les nombreuses affi ches de jeunes martyrs, le regard angélique et l’arme au poing entouré de mères en pleurs ; elle est dans les rues, les tombes de combattants sur lesquels jouent les enfants, passent les jeunes qui se rendent à leurs cours. Le souve-nir de combats et d’un long blocus de la ville hante les ruelles. La violence et la frustration aussi car on sait qu’il n’y a pas d’avenir ou bien si peu, que si l’on étudie, on n’est pas sûr de trouver un travail, parce que tout déplacement est compliqué à cause de ces ‘foutus’ check-points, parce que le marché éco-nomique palestinien est réduit à peau de chagrin – les exportations ont chuté depuis le mur et les contrôles. Parce qu’après 60 ans de camps, être réfugié n’est plus un passage mais presque une identité. On étouffe. Comment devenir un adulte épanoui face à ces “murs” phy-siques, moraux, mentaux, a fortiori lorsqu’on est jeune plein d’énergie, avec un avenir à

construire ? L’UNRWA, l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens a décidé de faire cette année un focus sur les jeunes réfu-giés palestiniens. Si l’agence est la première

à dire que la solution passe par la réso-lution du confl it israélo-palestinien, sur le terrain il faut aussi panser les plaies et ouvrir les horizons. Car en attendant, la population continue de croître dans les camps et, parmi eux, 30 % ont entre 18 et 29 ans...

Jeunes réfugiés cherchent avenir

“En 48, leur village occupé par les Israéliens, mes grands-parents vinrent à Gaza pour une semaine. Mais malheu-reusement, ils ne retournèrent jamais. Mon père a grandi dans un camp de réfugiés ; moi je vis à Gaza ville, je viens de terminer un master en business et administration. Je suis lectrice à l’uni-versité et maintenant je travaille pour une association d’enfants-sourds. J’ai de la chance d’avoir trouvé du travail car mes amis qui sont diplômés comme moi envoient des centaines de lettres de candidatures mais ne reçoivent pas de réponses. Même si j’ai plus de chances que mes amis, je vis dans une

situation d’insécurité…” Si Yasmine, jeune et brillante, a beaucoup de chance par rap-port à ses camarades, le climat d’insécurité permanent et la limitation des mouvements n’en demeurent pas moins une source de frustration importante. “Je vis à Hébron. Jérusalem est à 20 km de ma ville, il faut nor-malement ½ h. pour s’y rendre mais en ce moment cela prend 2 h., à cause des check-points”, témoigne Ahmed. Tareq, réfugié en Jordanie, est quant à lui ingénieur tout juste diplômé : “J’ai trouvé un job dans un pays du Golfe mais il m’est interdit de m’y rendre.” Dans certains pays, en particulier au Liban,

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lise P

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28 MAI-JUIN-JUILLET 2012 I dimension 3

des droits humains fondamentaux sont niés. “J’étudie l’ingénierie mais je sais qu'en tant que réfugiée, je ne pourrai travailler. Com-ment imaginer mon avenir ? Un jour je suis étrangère, un autre réfugiée, je n’ai même pas d’identité établie alors que je suis née au Liban”, soupire Faten.

Potentiel et frustrationYasmine, Ahmed, Tareq et Faten ont été choisis par l’UNRWA pour faire partie d’une représentation de jeunes Palesti-niens afi n d’infl uencer la formulation des futurs projets de l'agence onusienne. Les jeunes (18-29 ans) représentent la majo-rité de la population des camps de réfu-giés et ils sont le capital humain de demain

pour la communauté. Et c’est à la fois une population particulièrement vulnérable et pleine de promesses…Porté par une population jeune et sans emploi, le Printemps arabe aura montré l’énergie positive et l’énorme potentiel de changement que peuvent amener les jeunes en Afrique du Nord et au Moyen Orient. En Palestine, plus encore que dans les autres pays arabes, beaucoup de ces jeunes ont fait des études - dans un camp de réfugiés, il n’y a pas beaucoup à faire, les jeunes dédient donc une grande partie de leur temps à leur formation -, certains sont

sur-diplomés, mais un quart sont condam-nés au chômage, voire 39 % dans la Bande de Gaza. Quand ils trouvent des jobs, ils sont en général en dessous de leur niveau, avec des conditions et salaires insoutenables. “Les jeunes Palestiniens ont les mêmes aspi-rations que les jeunes du monde entier” et ils y ont droit, c’est à partir de cette constata-tion que Filippo Grandi, Commissaire géné-ral de l’UNRWA, a promis d’être cette année particulièrement attentif aux jeunes, “from spring to spring”, avec la promesse de se rencontrer un an plus tard.

ELISE PIRSOUL

L’UNRWA, l’agence des

Nations Unies pour les

réfugiés palestiniens,

a été instituée aux len-

demains des premières

occupations israéliennes,

et supposée temporaire.

60 ans plus tard, la situa-

tion des Palestiniens s’est considérable-

ment dégradée et l’UNRWA pourvoit à la

plupart des services publics de base dans

une Palestine privée de véritable Etat et

d’autonomie. l’UNRWA fait aujourd’hui

fonctionner environ 700 écoles qui garan-

tissent l’égalité des genres, 137 cliniques,

fait la gestion des camps et des infras-

tructures, offre l’aide humanitaire et l’aide

d’urgence. Ces dernières années, face au

blocage et la dégradation de la situation

dans la Bande de Gaza, à la montée des

prix de l’énergie et alimentaire, les charges

de l’UNRWA se sont alourdies. Le budget

général de l’organisation accuse un défi cit

de 125,8 millions de dollars pour 2012. La

contribution belge à l’UNRWA a considéra-

blement augmenté ces dernières années :

elle était d’environ 6.300.000 euros en 2009

et de 9.500.000 euros en 2012. EP

* tous les chiffres

datent de janvier 2012

Jordanie

Liban

Syrie

Cisjordanie

Bande de Gaza

Total: 5.115.755

Champs des opérationsPopulation réfugiée par territoire*

réfugiée

1.217.519

874.627

510.444465.798

2.047.367

BANDE DE GAZA

JORDANIE

CISJORDANIE

GOLAN

ISRAËL

SYRIE

LIBAN

Camps de réfugiés

MER MÉDITERRANÉE

• 874.627 personnes enregistrées

• 19 camps

• 98 écoles

• 42 centres de santé

• 2.047.367 personnes enregistrées

• 10 camps

• 172 écoles

• 24 centres de santé

• 510.444 personnes enregistrées

• 9 camps

• 118 écoles

• 23 centres de santé

• 465.798 personnes enregistrées

• 12 camps

• 68 écoles

• 28 centres de santé

• 1.217.519 personnes enregistrées

• 8 camps

• 243 écoles

• 21 centres de santé

Tombe de martyr, dans une rue

de la ville de Naplouse.

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dimension 3 I MAI-JUIN-JUILLET 2012 29

TERRITOIRES PALESTINIENS

Le Musée d’Afrique centrale à Tervuren

a été, le 16 mars 2012, le cadre de la

traditionnelle cérémonie de remise du Prix

de la Coopération au Développement.

Celui-ci récompense les chercheurs et les

étudiants qui, par leur travail scientifi que,

fournissent une contribution prometteuse

à la recherche de solutions en matière de

développement durable.

L’hôpital Sendwe sert comme structure hospitalière de référence pour la province

du Katanga. L’auteur y a passé plusieurs mois, observant et interrogeant soignants,

patients, ainsi que les membres de leurs familles. Il utilise ses observations des

patients pour analyser qualitativement les relations entretenues entre les différents

acteurs impliqués dans la relation soignants-soignés.

L’auteur montre la similitude des interactions et tensions entre agents hospi-

taliers et patients avec celles qui existent entre fonctionnaires administratifs

et administrés. Mais, en ce qui concerne l’hôpital, du résultat de ces inte-

ractions peut dépendre la vie ou la mort des patients.

Malgré sa spécifi cité, les situations et relations entre soignants et soi-

gnés rencontrées à l’hôpital Sendwe sont typiques d’autres institutions

hospitalières du pays, voire de l’Afrique. L’approche d’une investigation

socio-anthropologique en milieu hospitalier n’est pas habituelle. Ce travail

démontre, néanmoins, qu’une telle recherche peut fournir de précieux

éléments sur lesquels baser une réforme des modes de gestion des hôpi-

taux et des soins en pays africains.

JMC

Ce mémoire s’inscrit dans le cadre d’une enquête de la Katholieke Universiteit Leu-

ven, de la Universiteit Antwerpen et de la Soikone University en Tanzanie, portant sur

la diffusion de la peste bubonique en Tanzanie. Cette maladie est encore présente

à travers le monde, mais souvent dans de petites zones isolées.

Marianne Hubeau y examine s’il existe un lien entre la diffusion de la peste et

l’utilisation de l’espace par les hommes. Elle a constaté que la peste appa-

raissait davantage dans des villages où les hommes étaient actifs dans un

plus vaste périmètre autour du village, et dans le voisinage de lieux où les

habitants collectaient le bois à brûler. Ces derniers éléments doivent à présent

être étudiés plus en détail.

Mais d’ores et déjà, l’enquête a montré que la diffusion de la peste n’est pas

seulement le résultat de l’environnement naturel dans une région, mais aussi de

la manière dont les hommes utilisent cet environnement. Cette information est

intéressante pour l’estimation des risques et pour la mise en place de campagnes

de prévention dans les montagnes de l’Usambara et les autres régions de Tanzanie

touchées par la peste. JMC

Kakudji KyunguLauréat du Prix 2012 dans la catégorie ‘Chercheurs’, Aimé Kakudji Kyungu, de la République démocratique du Congo, est boursier de l’Agence belge de dévelop-pement CTB (il a été reçu docteur en Sciences politiques et sociales à l’Université libre de Bruxelles en 2010). Le titre original de sa recherche est : “Sendwe Mining”, Socio-anthropologie du monde social de l’Hôpital à Lubumbashi (RD Congo).

Marianne HubeauMarianne Hubeau, bioingénieure en Aménagement du Territoire et des Forêts à la Katholieke Universiteit Leuven, est quant à elle lauréate du Prix 2012 dans la catégorie ‘Etudiants’. Le titre original de sa recherche est : Land use and human activity patterns in relation to the plague disease in the West Usambara Mountains, Tanzania (Utilisation des sols et modèles d’activités humaines en relation avec la peste dans la région montagneuse de l’Usambara occidental, Tanzanie).

Le Prix de la Coopération au Développement a été instauré en 1998 à l’initiative de la Coopération belge au développement, afi n d’encou-rager les étudiants et les jeunes chercheurs à s’intéresser à la coo-pération internationale, à contribuer au développement durable et à la lutte contre la pauvreté dans le Sud. Y sont admises les thèses de fi n d’études du niveau licence/maîtrise, les thèses de doctorat, ou encore les publications.

Les prix consistent en une ligne de crédit de 15.000 euros pour le cher-cheur lauréat, et une ligne de crédit de 5.000 euros pour tout étudiant lau-réat, qui peuvent leur permettre de poursuivre des activités de recherche (stages, acquisition d’équipements scientifi ques) ou le développement de leur carrière (participation à des congrès, formations, etc.).

2012

Le Prix de la Coopération

Développementau

ONLINEwww.devcoprize.africamuseum.be

30 MAI-JUIN-JUILLET 2012 I dimension 3

RECHERCHE

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D ans le cadre des Journées

de la Coopération belge au

développement, l’association

Lumière pour le monde a

présenté, du 27 avril au 9 mai au Bota-

nique à Bruxelles (voir encore en page 36),

une exposition du photographe Dieter

Telemans (Prix 'De Spiegel' 2009) sur la

cécité et ses conséquences en Afrique.

Les photographies ont été réalisées dans

les hôpitaux ophtalmologiques et les ins-

tituts pour aveugles où Lumière pour le

monde est active dans la lutte contre la

cécité et l’amélioration de la qualité de vie

des personnes handicapées visuelles, et

la défense des droits des personnes han-

dicapées en Afrique.

Cette exposition était accessible aux per-

sonnes aveugles grâce à l’audio-descrip-

tion, une technique utilisée principalement

au théâtre et permettant de rendre per-

ceptibles, par la parole, des effets visuels.

ONLINEwww.lightfortheworld.be

dimension 3 I MAI-JUIN-JUILLET 2012 31

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La vue sur la vieUne exposition sur et pour les personnes aveugles

Qui ?Pierre De Hanscutter,

informaticien, ancien coopérant

pour United Nations Volunteers

au Vietnam. Fondateur de

l’ONG SJ Vietnam et directeur

de l’association de jeunesse

Service Volontaire International.

Quoi ?1.600 projets de volontariat pour

jeunes adultes accessibles au

plus grand nombre dans plus de

70 pays, y compris en Belgique.

Pourquoi ?Parce que le volontariat et le

monde associatif d’ici et là-bas

sont à la base de la citoyenneté

active et du développement.C onsultant en informatique, un

job stable et bien payé, j’avais une vie plutôt confortable, mais ce n’était plus vraiment

ce que je recherchais. Je voulais me rendre utile et découvrir de nouveaux horizons. À l’appel de la Coopération belge, je suis parti au Vietnam, un peu par hasard. Je ne connaissais du Vietnam que quelques fi lms sur la guerre… Sur place, le choc culturel fut immense : j’étais tel un cosmonaute sur une planète inconnue. Pour m’intégrer, j’ai alors décidé de rejoindre une association de volontariat locale. À l’époque, l’association travaillait à la création de la première mai-son de jeunes à Hanoï destinée aux enfants vivant sur le Fleuve Rouge. Et puis, un jour, on a décidé d’ouvrir nos projets à des volon-taires internationaux : le premier chantier international au Vietnam était né ! Quelques mois plus tard, nous inaugurions SJ Viet-nam, la première association de volontariat international gérée par et pour des jeunes locaux. Sans la Coopération belge tout cela n’aurait jamais pu exister…

Pas de tourismeIl convient ici de le préciser tout de suite : une association de volontariat n’a abso-lument rien à voir avec le volontourisme, ou “tourisme humanitaire”, qui est un nou-veau concept commercial très lucratif, et que je résume comme ceci : “Voir et aider les pauvres, pour 2.000 euros” !

C’est justement parce que nous avons pu observer les dégâts provoqués par ce genre de tourisme que nous avons décidé de venir en Europe. Ainsi, pour en donner un exemple : ces sociétés font venir de jeunes idéalistes pour, selon leur programme, “enseigner le français aux Vietnamiens”… Pendant deux semaines, sans la moindre qualification ! Tandis qu’ils chantent “Frère Jacques” aux élèves de la classe, l’instituteur, lui, se tait. C’est que l’agence a fait un “don” au directeur de l’école, prière alors d’être gentil… Et deux semaines plus tard, on réenvoie un nouveau car de “touristes humanitaires”enthousiastes, venus jouer à l’instituteur. Mais, professeur de français, cela ne s’im-provise pas, c’est un métier ! Ces jeunes reviendront défi nitivement dégoûtés…

Travailler avec les locauxLes chantiers internationaux n’ont rien à voir avec ce tourisme, ce sont des projets destinés à des jeunes de 18 à 30 ans qui vont aller travailler avec des volontaires locaux. Un chantier, c’est avant tout une aventure, une expérience, un appren-tissage de la vie en communauté, et un magnifi que échange culturel. Le volonta-riat n’est pas un produit touristique !À ses débuts, lorsque, de façon inédite, notre association de jeunesse du Sud est venue s’implanter au Nord, on nous interrogeait : mais que venions-nous faire

là ? Mais pour nous, le monde associa-tif en Asie a aussi quelque chose à nous apporter : un autre dynamisme, une autre approche… Et fi nalement, cela marche plutôt bien : cette année, plus de 300 jeunes sont partis à l’étranger. Et des Vietnamiens sont même venus en Belgique participer à des projets de volontariat !Notre premier credo, c’est qu’un jeune sans expérience est tout à fait capable de partir en volontariat. Nous sommes une associa-tion de jeunesse, nous voulons rendre le volontariat international accessible à tous. Pour nous, l’important est la motivation, l’en-vie d’apprendre et de partager. Nous cher-chons des jeunes pour plus de 70 pays, y compris en Belgique…Quant aux jeunes qui rêvent de partir comme coopérants, je leur dis “Allez-y !”Mais soyez patients, et ne rêvez pas trop : partir n’est pas toujours aussi romantique qu’on se l’imagine. Et n’hésitez pas à acquérir une première expérience via les chantiers internationaux !

VOLONTARIAT OU

VOLONTOURISME ?

Le volontariat international attire de plus en plus de jeunes. Pour le meilleur et parfois pour le pire.

ONLINEwww.servicevolontaire.org

32 MAI-JUIN-JUILLET 2012 I dimension 3

PARTENAIRES

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dimension 3 I MAI-JUIN-JUILLET 2012 33

Petite Dimension

RAPPORT ANNUEL 2011de la Coopération belge au développement

L a première partie de ce rapport dresse un tableau des tendances, crises et événements importants dans le cadre desquels les principales activités de la Coopé-ration belge au développement ont été organisées en

2011.Quelles réformes la DGD entreprend-elle en interne pour garantir son rôle de plaque tournante de la Coopération belge au développement dans un monde en pleine évolution ? Quelles sont les crises humanitaires qui ont requis notre aide ? Com-ment l'aide publique au développement (APD) évolue-t-elle en Belgique ? À quels secteurs donnons-nous la priorité dans les nouveaux accords de coopération avec le Rwanda, le Viet-nam et les Territoires palestiniens occupés ? Comment la DGD contribue-t-elle à renforcer l'assise sociétale de la coopération au développement en Belgique ? Quel rôle la Belgique a-t-elle joué au Sommet de Busan sur l'effi cacité de l'aide ? Le chan-gement climatique menace-t-il le développement ? De quelle manière soutenons-nous les populations arabes dans leur espoir retrouvé de justice et de démocratie ? Qu'apprenons-nous de l'évaluation des projets bilatéraux de la CTB et des diverses plateformes de connaissance ?

La seconde partie est quant à elle intégralement consacrée aux Objectifs du Millénaire 4 et 5. Nous montrons comment la Bel-gique contribue à la lutte contre la mortalité infantile (OMD 4) et à l'amélioration de la santé des mères (OMD 5). Com-ment ce combat est-il mené ? Avec quelles méthodes et dans quelles perspectives ? Tout ceci est expliqué au moyen d'une petite douzaine de projets réalisés, fi nancés ou soutenus par la Coopération belge au développement. Ces projets sont notam-ment mis en œuvre au Bangladesh, en Bolivie, en RD Congo, au Mali et au Rwanda.

Le Rapport annuel 2011 montre les

résultats obtenus par la Coopération

belge au développement dans dans la

lutte contre la pauvreté.

Le Rapport annuel 2011 est disponible en français, néerlandais et anglais. Vous pouvez commander un exemplaire en envoyant un mail à [email protected].

Vous pouvez aussi consulter le rapport sur www.dg-d.be

ONLINEwww.fondoindigena.org

34 MAI-JUIN-JUILLET 2012 I dimension 3

Petite Dimension

LA BELGIQUEdégage 2 millions d’euros pour les pays du Sahel

Du 21 au 26 avril 2012 s’est tenue à Doha (Qatar) la 13e

conférence de la CNUCED (Conférence des Nations

Unies sur le commerce et le

développement).

Le document fi nal a confi rmé le rôle

de cette institution des Nations Unies

dans la mise en place d’une approche

cohérente du commerce et du déve-

loppement, axée sur l’intégration des

pays en développement dans l’écono-

mie mondiale. L’accent a été mis sur

les aspects fi nanciers, les technolo-

gies, les investissements et le déve-

loppement durable. Le ministre de la

Coopération au développement Paul

Magnette était sur place pour défendre

le rôle de la CNUCED.

La CNUCED continue à

soutenir les pays en développement

L a sécheresse menace la sécurité alimentaire de plus de 10 millions d’habitants du Sahel. Notre pays a dès lors décidé d’allouer 2 millions d'euros. 1,25 million d’euros iront à l’UNICEF pour le fi nancement de son projet WASH (eau, assainissement et

hygiène) au Burkina Faso, au Niger et au Mali. Le Mali et la Mauritanie bénéfi cieront d’une aide de 750.000 euros via le PAM (Programme alimentaire mondial). Outre l’aide d’urgence, la priorité sera également donnée au fi nancement de diverses solutions destinées à garantir la sécurité alimentaire à long terme.

C e programme vient en appui à des initiatives propres des com-munautés indiennes en matière d’éco-tourisme et de sécurité

alimentaire. Tout cela dans un modèle de développement innovateur qui prône une vie

en harmonie avec les autres êtres humains et l’environnement, et une exploitation équili-brée des richesses de la nature.En plus de la contribution belge, la réunion a pu mobiliser 400.000 dollars à partir du capi-tal disponible auprès de la Banque Interamé-ricaine de Développement pour soulager la situation fi nancière précaire du Fonds suite à la crise fi nanci ère mondiale.Le Fonds Indigène est un forum permettant aux peuples autochtones d’Amérique latine et des Caraïbes de se concerter avec les repré-sentants de leurs gouvernements. L’Espagne, le Portugal et la Belgique sont les pays euro-péens qui en font partie.

Lors d’une réunion du Fonds

Indigène à Bruxelles en mars

2012, la Belgique a promis 2

millions d’euros pour consolider

le programme Buen Vivir

(Vivre bien).

LA BELGIQUECONTINUE À SOUTENIR

LE FONDS INDIGÈNE

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ONLINEwww.unwater.org (rapport)

www.worldwaterforum6.org (forum)

dimension 3 I MAI-JUIN-JUILLET 2012 35

ErratumUne erreur s’est glissée dans

notre dernier numéro

L’auteure de l’article Quand l’ambulance

ne vient pas (en page 10 du n° 2/2012)

appartient à l’ONG Rode Kruis-Vlaande-

ren - au lieu de CICR - dont le website

est http://ihr.rodekruis.be. Nos excuses

encore à l’auteure et l’organisation !

E n raison, notamment, du change-ment climatique, plus de 75 pays – principalement des pays pauvres d’Afrique et d’Asie – seront confron-

tés dès 2020 à de graves pénuries d’eau douce. C’est ce qui ressort du dernier Rapport mondial sur l’eau, présenté en mars 2012 à Marseille lors du Forum mondial de l’eau. Le rapport plaide pour une vaste collaboration entre les gestionnaires des eaux, les gouver-nements, les ONG et les entreprises et ce, au niveau local, national et international.Le forum a réuni 35.000 personnes – chefs d’État, ministres, experts, ONG, jeunes… – pour réfl échir sur la menace qui pèse sur

l’or bleu. Comment fournir à chacun un accès à l’eau et à des installations sanitaires, un droit de l’homme universel depuis 2010 ? Comment mieux protéger l’eau ? 1.400 pro-positions ont fait l’objet de plus de 100 enga-gements concrets, qui seront tous abordés lors de la conférence Rio+20. À quelques kilomètres de là, le Forum mondial de l’eau alternatif militait contre la privatisation de l’eau potable.

Plus d’un milliard de personnes

n’ont pas accès à de l’eau

potable. Or, du fait de la

croissance démographique

mondiale, la consommation

d’eau ne fera qu’augmenter.

Pouvons-nous sauver

l’or bleu ?

Forum mondial de l’eau Baisse généralisée

de l’aideLes volumes globaux de l’aide

publique au développement (APD)

pour 2011 ont diminué de 2,17 %

par rapport à 2010. Avec 0,53 %, la

Belgique se situe à présent à la sep-

tième place en termes de pourcen-

tage de l'APD par rapport au PNB.

• Le groupe de 0,7% (Danemark, Luxem-

bourg, Pays-Bas, Norvège et Suède) tient

le cap, même si leur APD a également

régressé en 2011, hormis celui de la

Suède. 16 pays du CAD ont vu leur APD

baisser. La baisse totale a atteint 2,17%.

• La Belgique fait partie de la série des pays

qui ont enregistré un recul. Dans l’ordre:

la Grèce (-39%), l’Espagne (-32%), le

Japon, l’Autriche et la Belgique (-13%).

En Belgique, l’APD s’élève à 0,53% du

PNB par rapport à 0,64% en 2010.

• En 2011, les institutions de l'UE ont enre-

gistré une baisse de 6%, principalement

due au report de l’aide budgétaire en

raison des dialogues politiques toujours

en cours.

• L’APD pour l’Afrique du Nord a crû de

0,9%, mais a reculé de 0,9% pour

l’Afrique subsaharienne.

DGD - DIRECTION GÉNÉRALE

COOPÉRATION AU DÉVELOPPEMENT

Rue des Petits Carmes 15 • B-1000 Bruxelles

Tél. +32 (0) 2 501 48 81 • Fax +32 (0) 2 501 45 44

E-mail : [email protected]

www.diplomatie.be • www.dg-d.be

E n marge de ses récentes Assises, et pour la première fois cette année, la Coopéra-tion belge au développement a organisé les Journées de la Coopération belge au développement. Leur but, au-delà de leur mission d’information, était de sensibili-ser le public, et surtout les jeunes qui cherchent des réponses à leurs questions et

des moyens de s’impliquer. Trois semaines durant, du 25 avril au 15 mai 2012, huit organismes issus du secteur associatif ou universitaire ont mis sur pied un programme inédit et original de sensibilisation à travers les nouvelles technologies, la photographie, les réseaux sociaux, ou encore des actions dans l’espace public.Les thèmes mis plus particulièrement à l’honneur pour ces premières Journées de la Coo-pération belge au développement ont été la santé maternelle et la mortalité infantile, deux des huit Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) défi nis par les Nations Unies en 2000 et auxquels adhère la Belgique.

Les huit organismes initiateurs du programme de ces Journées étaient : Aide au Développement Inter-national (ADI), la Fondation ABEO, Handicap International, Louvain Coopération, Lumière pour le Monde Belgique, l’association GREEN, l’association SENSOA, et l’Université de Gand (UGent) - International Centre for Reproductive Health (ICRH). Autre partenaire du projet, le Musée royal de l’Afrique centrale

à Tervuren, a offert une réduction sur son prix d’entrée durant les 3 semaines des Journées.

LA VUE SUR LA VIEExpo photo

LUMIÈRE POUR LE MONDEdu 27/04 au 09/05 - Le Botanique à Bruxelles

www.lumierepourlemonde.be

WELCOME TO LIFEExpo photo

HANDICAP INTERNATIONALdu 09/05 au 29/05

Parc de Bruxelles

www.welcometolife.be

CHAQUE MAMAN COMPTE !Campagne contre la mortalité maternelle

(autour de la Fête des Mères)

SENSOAle 10/05 - Bruxelles, Parlement fédéral

le 11/05 - Gare Centrale de Bruxelles,

Antwerpen-Centraal, Gent-Sint-Pieters

le 15/05 - Kunstencentrum Vooruit, Gent

www.elkemamatelt.be

Journées de la Coopération

belge au développement

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