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37 Economie 23 novembre 2014 | Le Matin Dimanche Contrôle qualité Publicité «Il n’est pas nécessaire d’être un hôtel merveilleux pour être aimé des touristes» Voyages Les commentaires laissés sur TripAdvisor sont devenus un enjeu majeur de l’industrie hôtelière. Brian Payea, l’un des responsables du site, détaille le fonctionnement de ce système. Marie Maurisse Brian Payea est responsable des relations avec l’industrie de l’hôtellerie chez TripAdvisor, premier site mondial de com- mentaires touristiques. Avec 354 millions de dollars au troi- sième trimestre 2014, la firme américaine a vu son chiffre d’af- faires augmenter de près de 40% par rapport à 2013, mais son revenu net baisser de 4%. L’homme était à Crans-Monta- na cette semaine, dans le cadre du 60e anniversaire de l’école des Roches, qui organisait un sommet sur les défis du secteur hôtelier. Rencontre. Sur la côte anglaise, un hôtel a facturé 150 fr. de plus à un couple qui avait écrit sur TripAdvisor que l’établissement était un «taudis puant et pourri». Qu’en pensez-vous? C’est juste incroyable. Com- ment peut-on faire ça à ses clients? Sans compter qu’ils auraient dû se douter que cela allait se savoir… Mais pour les hôteliers, avoir un mauvais commentaire est un vrai cauchemar… Savez-vous quelle est la note moyenne sur notre site? 4.2 sur 5. Cela veut dire que la grande majorité des commentaires sont positifs. Après, malgré les ef- forts de l’établissement, cer- tains clients restent mécon- tents. Parfois, la personne a eu un vol affreux, un voyage en train horrible et un conducteur de taxi désagréable. En plus, elle a appelé ses enfants et la conver- sation s’est mal passée. Alors ce soir-là, elle ne pourra être heu- reuse nulle part! Mais ce n’est pas juste que cette personne se défoule sur TripAdvisor… C’est un jeu à sommes égales: tout le monde joue selon les mê- mes règles. Cela peut tomber sur n’importe quel établisse- ment, n’importe où dans le monde. Quel est le secret pour obtenir de bonnes notes sur votre site? Une étude de l’Université Cor- nell montre que plus l’hôtel a de commentaires, plus son score va augmenter. Donc, d’abord, il faut encourager ses clients à donner leur avis. D’autant que cela incitera l’établissement à s’améliorer. Je dois dire aussi qu’il n’est pas nécessaire d’être un hôtel merveilleux pour être aimé des touristes. Des tonnes d’établissements situés près d’une autoroute, d’un aéroport ou perdus au milieu de nulle part font un carton, même plus que des enseignes de luxe. Un motel perdu attire plus de clients qu’un hôtel de luxe? En fait, un mauvais commentai- re est toujours subjectif: il n’est que le reflet d’une inadéquation entre ce que le client vit et ce qu’il s’attend à vivre. Evidem- ment, ce doit être au minimum propre et accueillant. Le reste doit correspondre à ce qu’il cherche. Certaines personnes adorent arriver à l’hôtel sans voir personne, s’enregistrer avec une machine et aller tranquille- ment se coucher. D’autres veu- lent faire la conversation au pro- priétaire! Fin octobre, vous avez lancé votre nouvelle option de recherche où l’internaute peut donner des critères aussi précis que «branché» ou «pour les homosexuels». Quel est l’intérêt de cette personnalisation? Eviter les mécontents! Nous voulons que chaque recherche soit adaptée aux préférences de chacun. Quelqu’un veut un bou- tique hôtel? Il clique sur le critè- re et nous le retenons. S’il aime particulièrement le groupe Ac- cor, on va le faire remonter dans ses résultats, pour qu’il n’ait pas à le chercher dans 50 pages. TripAvisor utilise donc ces outils communément appelés «Big Data»? Bien sûr. Nous analysons le comportement de nos visiteurs sur Internet. Tout cela nous sert à mieux les connaître et à mieux savoir quoi proposer. Si vous savez mieux que le client ce qui lui faut, alors dans quelques années, il n’y aura plus de voyageur mécontent de son hôtel, non? Nous discutons beaucoup avec les acteurs du secteur pour qu’ils comprennent la logique: pour un hôtel de luxe en Valais, avec peu de chambres, mais des ser- vices haut de gamme, cela ne sert à rien d’avoir 60 000 vues par semaine sur sa page. 20 000 vues suffisent largement pour vendre ses chambres. Ainsi, il évite d’attirer des personnes qui recherchent autre chose et sont des mécontents potentiels. Il vise ainsi beaucoup mieux sa ci- ble! Mais pour ça, les hôtels doivent jouer le jeu et être parfaitement honnêtes sur leur présentation. Absolument. Si l’hôtel est un peu vieillot et que les photos le présentent sous un jour très mo- derne, alors ses responsables peuvent être sûrs que les com- mentaires négatifs vont affluer. Il n’est pas rare que les hôteliers publient de faux commentaires pour faire remonter leur note. Comment les traquez-vous? Chez nous, on appelle ça du «boosting». C’est une violation claire de notre règlement et nous y sommes très attentifs. Si nous tombons sur un cas ou que quelqu’un nous rend attentifs à un commentaire, nous menons une enquête. Nous avons une équipe de plusieurs centaines de personnes, actives partout dans le monde, qui se consacrent spé- cialement à ce problème. Plus l’internaute reste sur votre site, plus il réserve ses vacances en ligne, et plus vous gagnez de l’argent, c’est bien ça? Si le trafic est mieux converti, alors tout le monde est content. Qu’appelez-vous «convertir le trafic»? C’est quand l’internaute décide de réserver son voyage à partir de TripAdvisor. Une fois qu’il a choisi son hôtel, combien de temps attend-il avant de réser- ver et de payer? Notre but est de réduire ce temps au minimum Maintenant, s’il sélectionne un hôtel, il verra apparaître un en- cart qui mentionne les sites de voyage avec lesquels réserver. U « Bien sûr. Nous analysons le comportement de nos visiteurs sur Internet. Tout cela nous sert à mieux les connaître et à mieux savoir quoi proposer » Brian Payea, responsable chez TripAdvisor des relations avec l’hôtellerie Brian Payea, responsable des relations avec l’industrie de l’hôtellerie chez TripAdvisor, était l’un des invités du 60e anniversaire de l’Ecole hôtelière Les Roches. Maxime Schmid Haro sur toutes les déductions fiscales ! «Les privilèges fiscaux pour les personnes physiques sont illicites.» Cette disposition de l’initiative sur l’imposition d’après la dépense, Christian Levrat veut l’inscrire dans la Constitution. Et s’attaquer à nos déductions fiscales: déductions pour la prévoyance vieillesse, les primes d’assurance-maladie, les enfants – tout est remis en question! Le chef du PS lors du Congrès du 28 juin 2014 à Winterthour: «... les déductions fiscales [...] doivent être supprimées dans toute la mesure du possible ... »

Le Matin Dimanche Nov 2014

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37Economie23 novembre 2014 | Le Matin Dimanche

Contrôle qualité

Publicité

«Il n’est pas nécessaire d’être un hôtel merveilleux pour être aimé des touristes»Voyages Les commentaires laissés sur TripAdvisor sont devenus un enjeu majeur de l’industrie hôtelière. Brian Payea, l’un des responsables du site, détaille le fonctionnement de ce système.

Marie Maurisse

Brian Payea est responsable desrelations avec l’industrie del’hôtellerie chez TripAdvisor, premier site mondial de com-mentaires touristiques. Avec354 millions de dollars au troi-sième trimestre 2014, la firmeaméricaine a vu son chiffre d’af-faires augmenter de près de40% par rapport à 2013, maisson revenu net baisser de 4%.L’homme était à Crans-Monta-na cette semaine, dans le cadredu 60e anniversaire de l’écoledes Roches, qui organisait unsommet sur les défis du secteurhôtelier. Rencontre.

Sur la côte anglaise, un hôtel a facturé 150 fr. de plus à un couple qui avait écrit sur TripAdvisor que l’établissement était un «taudis puant et pourri». Qu’en pensez-vous?C’est juste incroyable. Com-ment peut-on faire ça à sesclients? Sans compter qu’ilsauraient dû se douter que celaallait se savoir…

Mais pour les hôteliers, avoir un mauvais commentaire est un vrai cauchemar…Savez-vous quelle est la notemoyenne sur notre site? 4.2 sur5. Cela veut dire que la grandemajorité des commentaires sontpositifs. Après, malgré les ef-forts de l’établissement, cer-tains clients restent mécon-tents. Parfois, la personne a euun vol affreux, un voyage entrain horrible et un conducteurde taxi désagréable. En plus, ellea appelé ses enfants et la conver-sation s’est mal passée. Alors cesoir-là, elle ne pourra être heu-reuse nulle part!

Mais ce n’est pas juste que cette personne se défoule sur TripAdvisor…C’est un jeu à sommes égales:tout le monde joue selon les mê-

mes règles. Cela peut tombersur n’importe quel établisse-ment, n’importe où dans lemonde.

Quel est le secret pour obtenir de bonnes notes sur votre site?Une étude de l’Université Cor-nell montre que plus l’hôtel a decommentaires, plus son score vaaugmenter. Donc, d’abord, ilfaut encourager ses clients àdonner leur avis. D’autant quecela incitera l’établissement às’améliorer. Je dois dire aussiqu’il n’est pas nécessaire d’êtreun hôtel merveilleux pour êtreaimé des touristes. Des tonnesd’établissements situés prèsd’une autoroute, d’un aéroportou perdus au milieu de nullepart font un carton, même plusque des enseignes de luxe.

Un motel perdu attire plus de clients qu’un hôtel de luxe?En fait, un mauvais commentai-re est toujours subjectif: il n’estque le reflet d’une inadéquationentre ce que le client vit et cequ’il s’attend à vivre. Evidem-ment, ce doit être au minimumpropre et accueillant. Le restedoit correspondre à ce qu’ilcherche. Certaines personnes adorent arriver à l’hôtel sansvoir personne, s’enregistrer avecune machine et aller tranquille-ment se coucher. D’autres veu-lent faire la conversation au pro-priétaire!

Fin octobre, vous avez lancé votre nouvelle option de recherche où l’internaute peut donner des critères aussi précis que «branché» ou «pour les homosexuels». Quel est l’intérêt de cette personnalisation?Eviter les mécontents! Nousvoulons que chaque recherchesoit adaptée aux préférences dechacun. Quelqu’un veut un bou-tique hôtel? Il clique sur le critè-

re et nous le retenons. S’il aimeparticulièrement le groupe Ac-cor, on va le faire remonter dansses résultats, pour qu’il n’ait pasà le chercher dans 50 pages.

TripAvisor utilise donc ces outils communément appelés «Big Data»?Bien sûr. Nous analysons lecomportement de nos visiteurssur Internet. Tout cela nous sertà mieux les connaître et à mieuxsavoir quoi proposer.

Si vous savez mieux que le client ce qui lui faut, alors dans quelques années, il n’y aura plus de voyageur mécontent de son hôtel, non?Nous discutons beaucoup avecles acteurs du secteur pour qu’ilscomprennent la logique: pourun hôtel de luxe en Valais, avecpeu de chambres, mais des ser-vices haut de gamme, cela nesert à rien d’avoir 60 000 vuespar semaine sur sa page. 20 000

vues suffisent largement pourvendre ses chambres. Ainsi, ilévite d’attirer des personnes quirecherchent autre chose et sontdes mécontents potentiels. Ilvise ainsi beaucoup mieux sa ci-ble!

Mais pour ça, les hôtels doivent jouer le jeu et être parfaitement honnêtes sur leur présentation.Absolument. Si l’hôtel est unpeu vieillot et que les photos le

présentent sous un jour très mo-derne, alors ses responsablespeuvent être sûrs que les com-mentaires négatifs vont affluer.

Il n’est pas rare que les hôteliers publient de faux commentaires pour faire remonter leur note. Comment les traquez-vous?Chez nous, on appelle ça du«boosting». C’est une violationclaire de notre règlement etnous y sommes très attentifs. Sinous tombons sur un cas ou quequelqu’un nous rend attentifs àun commentaire, nous menonsune enquête. Nous avons uneéquipe de plusieurs centaines depersonnes, actives partout dansle monde, qui se consacrent spé-cialement à ce problème.

Plus l’internaute reste sur votre site, plus il réserve ses vacances en ligne, et plus vous gagnez de l’argent, c’est bien ça?Si le trafic est mieux converti,alors tout le monde est content.

Qu’appelez-vous «convertir le trafic»?C’est quand l’internaute décidede réserver son voyage à partirde TripAdvisor. Une fois qu’il achoisi son hôtel, combien detemps attend-il avant de réser-ver et de payer? Notre but est deréduire ce temps au minimumMaintenant, s’il sélectionne unhôtel, il verra apparaître un en-cart qui mentionne les sites devoyage avec lesquels réserver. U

«Bien sûr. Nous analysons le comportement de nos visiteurs sur Internet. Tout cela nous sert à mieux les connaître et à mieux savoir quoi proposer»Brian Payea, responsable chez TripAdvisor des relations avec l’hôtellerie

Brian Payea, responsable des relations avec l’industrie de l’hôtellerie chez TripAdvisor, était l’un des invités du 60e anniversaire de l’Ecole hôtelière Les Roches. Maxime Schmid

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Haro sur toutes lesdéductions fiscales !«Les privilèges fiscaux pour les personnes physiques sont illicites.»Cette disposition de l’initiative sur l’imposition d’après la dépense,Christian Levrat veut l’inscrire dans la Constitution. Et s’attaquer ànos déductions fiscales: déductions pour la prévoyance vieillesse, lesprimes d’assurance-maladie, les enfants – tout est remis en question!

Le chef du PS lors du Congrès du 28 juin 2014 à Winterthour :« ... les déductions fiscales [...] doivent être supprimées dans toutela mesure du possible ... »

30 novembre 2014hoehere-steuern-nein.ch/fr