Le Sentier de Allah

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    AbdulKarm Jossot

    Et le sentier d'Allah

    Le 16 avril 1866, naissance de Gustave Henri Jossot, Dijon. Artiste peintre et crivain, caricaturiste de

    talent. N d'une famille bourgeoise, il s'loigne deson milieu pour se consacrer la peinture et audessin. Toute sa rvolte passe par le trait de sescaricatures qui prennent pour cibles les institutionsde la socit : famille, arme, justice, glises, coles,etc. Jossot, profondment libertaire, refuse pourtantl'tiquette d'anarchiste. Ses premiers dessins sont publis vers 1891 dans Le rire, puis dans L'assietteau beurre, Le diable (anticlrical), Les tempsnouveaux, etc. La besogne du caricaturiste neconsiste pas faire tressauter sous le rire les bedaines des brutes, mais semer dans les cerveauxqui pensent les ides libratrices (in Le foetusrcalcitrant).

    A partir de 1907, il abandonne le mode d'expressionet s'tablis en 1911 en Afrique du Nord, en Tunisie.En 1913 il se converti l'islam et prend le nom deAbdulKarm, ensuite il devnt un disciple du CheikhAhmed al-Alawi.

    Il tait un prcurseur assez audacieux. Lislam deJossot est prsent par A. Berque comme uneraction de lme contre la civilisation mcaniste .Il disait aussi que cet Islam soufi tait le faitd'Europens dsireux dune rgnrescencemtaphysique. Ces tres-l ne trouvaient plus dansun certain sentimentalisme catholique, je le dis en prsence de frres chrtiens, une nourriture vraimentspirituelle. Il faut aussi ajouter que le christianisme,qui se prsente comme un message damour et decharit, saccommodait bien du colonialisme.

    Le Docteur Marcel Carret nous rapporte sa rencontreavec AbdulKarm Jossot dans la zawiya deMostaganem: "Certains fqaras d'origine occidentale

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    sous les palmiers, devant la cathdrale ;machinalement je lve les yeux sur le Pre ternelqui, dans un geste bnisseur, semble chauffer sesmains de pierre au-dessus du portail-salamandre ; puis, pouss par un dsir pervers de dcouvrir, encette glise, dinfmes bondieuseries qui me

    mettront hors de moi, je suis les Tunisois qui serendent la messe : je gravis les marches et jerentre.

    la laideur de ce temple o la lumire pntrecrment, chassant le mystre ! Il est vrai que lesfidles ne paraissent pas venir l pour spandre enDieu : ils sont, pour la plupart affligs dune foi banale, dune foi mesquine qui se contente demenues pratiques et de petites dvotions, dune foianmie, chlorotique.

    Sitt le seuil franchi, ils trempent le bout de leursdoigts dans le bnitier, esquissent un signe de croixexpditif, un peu honteux, presque imperceptible ;ils attirent eux une chaise sur laquelle ils appuientles genoux et les coudes ; pendant quelquessecondes ils inclinent la tte avec une componctionsimule, puis se redressant, ils jettent des regardscirculaires, adressant des sourires, des signes, dessaluts discrets leurs connaissances.

    Cest la foi bourgeoise, la foi machinale, hrditaire.Combien peu, parmi ces pratiquants, paraissentrongs du dsir de Dieu ! Quils sont rares ceux quiclament lidal, les embrass qui voudraient ravir le ciel ! (Violenti rapiunt illud).

    Soudain les orgues se mettent jouer : de leurstuyaux schappent des accords tonitruants qui se prolongent en ondes rythmiques dans les hauteurs dela nef. Des nappes dharmonie montent, stendent,

    stirent, sallongent, serpentent dans le vide, planent sur lassistance endimanche et lentementsabaissent sur elle ; mais cette musique trop allgrenenveloppe pas les fidles dans une pieuse suavit ;elle ne les magntise point par la douceur des sons,ne les amollit pas en une langueur mystique.

    Bientt lautel sestompe derrire un nuagedencens ; des chants slvent et leur arabesque, quisenchevtre dans les volutes de fume odorifrante,mont en tournoyant vers les votes sacres, se mle

    aux notes quexhalent les orgues, puis avec elles se perd l-haut, tout l-haut, dans le baricolage hurleur des verrires multicolores.

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    Durant ce tapage musical javais regard autour demoi et javais t surpris de reconnatre plusieurs personnages dont les opinions matrialistes taientavres. Que venaient-ils chercher en ce lieu ? Le plaisir quils pouvaient prendre laudition du prdicateur dominical, dont le cabotinage tai t fort

    apprci Tunis, ne suffisait pas mexpliquer leur prsence ; javais une intime persuasion quilstaient l pour autre chose : pour sassurer, par exemple, que toutes les lumires taient rellementteintes dans le grand ciel vide.

    Et voil que, du haut de la chaire, tombaient des paroles dont se dlectait en moi le paresseux, lerveur, lartiste : elles proclamaient que la sciencena jamais pu fournir une explication plausible du besoin de croire, latent en chacun de nous ; que leseul progrs est lvolution psychique ; que notreraison est bien peu de chose puisquelle ne peutsidentifier avec lAbsolu.

    Le prdicateur parlait de la lumire du cur :- Toutes nos facults squipollent, nonait-il, etquand le cur affirme, lesprit ne peut nier.

    Il dvoilait lindigence des intellectuels chez qui lecur nest pas en quilibre avec le cerveau.

    Autour de moi flottaient des fluides de pit ; des prires rdeuses me frlaient, cherchaient me pntrer. Je leur avais ferm au nez les portes demon me ; mais elles se faufilaient insidieusement par les interstices et rveillaient les vieux souvenirsendormis de mon enfance mystique : le charme deschants liturgiques, la griserie de lencens, toute lafascination de la magie crmoniale.

    Lambiance influait sur moi, je me pris regretter la

    foi perdue, mais en me rendant bien compte que jamais plus, peut tre, je ne ressaisirais le levier laide duquel on soulve les montagnes.

    Jhabitais Tunis depuis quelques semainesseulement : javais quitt Paris, cur par les milleet un dboires de la vie dartiste, fatigu par le tohu- bohu occidental, en proie un commencement deneurasthnie, et jtais venu demander ma gurison Notre Pre le Soleil qui rutile au ciel dAfrique.

    Ayant renonc peindre, je lisais beaucoup. Or il est remarquer que si nous nous trouvons dans unecertaine disposition desprit, les livres idoines la

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    renforcer viennent deux-mmes se placer sous nosyeux, comme sils taient apports par dinvisiblesmains.

    Le souvenir du serment que javais entendumincitait philosopher, mditer sur le sens de la

    vie, rechercher la cause de toutes causes qui, ElleSeule Est sans cause. Alors, comme enchantement,saccumulrent sur ma table de travail les ouvragesdes grands mystiques : Saint Jean de la croix,Molinos, madame Guyon, Sainte Thrse, JacobBhme, dautres encore.

    Jeus bientt la pense farcie de leurs lucubrationset, naturellement, le laissait transparatre dans mesentretiens. Un fervent catholique, qui je meconfiai, me proposa de me faire connatre unreligieux capable de mclairer. Jacceptai : il meconduisit Carthage, chez les pres blancs.

    Jeus une longue discussion avec le moine qui ilme prsenta : je demandai celui-ci de me fournir lexplication des mystres ; il me rpondit que jedevais me contenter de croire sans comprendre.

    - Mais, lui objectai-je dans lancien et dans lenouveau testament abondent des fictions, lesallgories, les symboles.

    - Non, rpondait-il froidement : prenez tout lalettre.

    Aprs avoir considr avec stupeur cetincomprhensif, je lui tirai ma rvrence et me fismusulman.

    Cest que lIslam sans mystres, sans dogme, sansclerg, presque sans culte, mapparaissait comme la

    plus rationnelle de toutes les religions ; je ladoptais,estimant que la crature na pas besoin de passer par lintermdiaire des prtres pour adorer son Crateur.

    Ds que fut connue ma conversion, la pressearabophobe fulmina contre moi, non pas que lonsindignt rellement de me voir abandonner lombre de la croix pour pntrer dans la clart ducroissant ; mais je mvadais avec ostentation demon poque et de ma race, je flanquais un coup de pied dans tout ce que lOccident rvre, cela ctaitinadmissible.

    Pitres psychologues, les acphales coloniaux ne

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    devinaient pas que les cause profondes quimavaient pouss embrasser lislamisme ;limpudent qui venait de les scandaliser eutvolontiers dambul dans la vie sans arborer dtiquette ; ils men imposrent une : ils metraitrent doriginal.

    Cette qualification dont shonore tout indisciplinest, pour la tourbe des ilotes, reprsentative de la pire ignominie : ne pas agir comme tout le monde,ntre pas conforme, se singulariser dune faonquelconque, se sparer du troupeau, mpriser lamajorit, est un forfait tellement exorbitant que lelgislateur drout sest abstenu de le mentionner dans le code, vitant ainsi de lui infliger une pnalit.

    On finit par classer laffaire en dcrtant que laconversion dAbdulKarm tait une conversiondartiste .

    Je relve lexpression :

    Et bien ! Soit, messieurs ! Seulement il faudrait nousentendre : vos prjugs de provinciaux tardigradesme sont connus : je sais que vous tes rests laconception dix-huit cent-trentarde de Henry Mrger et que, pour vous, lartiste est un abracadabrant personnage, un bohme tout mchur deromantisme. En votre jargon simpliste conversiondartiste signifie que la purile envie de porter un burnous mincita seule changer de religion. Vous jaugez ma mentalit avec vos mesures. Remisez vosfaux poids pour ne point vous leurrer : je prfrevous renseigner moi-mme.

    Conversion dartiste ! Vous ricanez et vous necomprenez pas que cest prcisment cela le miracle.

    Pour prcher une me desthte. Allah ne pouvaitemployer quun appt : le Beau. Il ma donc saisit par mon cot faible : il ma montr la pauvret saintedes nomades ; Il ma fait entendre les cantilnes quemodulent les bdouines quand la guerba sur lpaule, elles vont puiser leau la source ; dans lecalme des soirs Il a fait lentement dfiler devant moides caravanes ; Il ma offert le repos sous les palmiers Pour me charmer le Gnreux a composdes jeux de lumires et des harmonies de couleursadmirables qui mont plong dans lextase ; durantle jour son soleil a flamboy sur moi ; pendant lanuit ses toiles ont illumin mes songes. Puis, du

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    fond du Sahara, Il a fait accourir une puissancemystrieuse, une force enveloppant, irrsistible : lesouffle de lislam ma prostern, pantelant, sur lesable des dunes ; alors jai clam lattestationmillnaire des croyants : Allah Est le Plus Grand .

    Cette exaltation apaise, jai repris mon existencecoutumire ; mais bientt des beauts nouvellesravivaient mon enthousiasme tandis que les laideurseuropennes macheminaient vers le granddgot .

    Un des principaux facteurs de mon abjuration fut lafatigue que me cause la trmulation ponantaise.Regardez-vous roumis ! Considrez votre dmence !Vous courez votre affaires, absorbs par lespoir dulucre, sans cesse agit, fivreux, inquiet. Vos visagessont contracts par les soucis dargent ou dilats par des satisfactions basses. Si vos traits napparaissent pas anxieux et crisps, ils sont distendus par unehilarit bruyante, enlumins par les ripailles et les beuveries. Jamais de calme sur vos masques dechair, jamais trace dimpassibilit ou de quitude ; ilest rare de rencontrer parmi vous une tte grave etmajestueuse comme on en voit tant chez les arabes.Rien nclaire vos faces de damns ; aucune idecalme et reposante ne sest incruste en voscerveaux surmens. Innombrables types sanscaractre vous vous groupez en troupeaux etgrouillez dans les cafs, les cinmas, les dancings,les beuglants, les bureaux, les usines et les casernes.Vous vivez une existence frntique, hallucinatoireet dmoniaque, une vie hors nature qui vous rendhorriblement malheureux, mais dont vous vousenorgueillissez pourtant et que vous appelez Civilisation .

    Voulant marracher votre enfer et mattirer Lui,

    Allah me fit prendre un chemin que nul ne parcourut. Quand je songe aux tranges tapes o je bivouaquai, il me faut faire appel au peu dhumilitdont je dispose pour ne point me considrer commeun lu.

    Cest que je me revois, perplexe, plantant un pointdinterrogation devant lobscure racine du mal ;essayant de stigmatiser les vices de mescontemporains par la dformation de leurs traits ;cherchant partout les tares ; poussant la vrit toute

    nue contre les bourgeois pudibonds ; dmasquantlimprobit des honntes gens ; fustigeant la lubricitdes hommes vertueux ; faisant descendre de leurs

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    pidestaux les hautes crapules ; emberlificotant mes bons hommes dans la tarabiscotage detirebouchonnantes arabesques pour amplifier lesexpressions abjectes ou cyniques de leurs visages ;imprgnant ma rtine deffroi et dcoeurement ;emmagasinant en ma vision interne, une abondante

    provision de cauchemars.Pendant trente ans je neus dyeux que pour leslaideurs qui posaient devant moi, et quand, bout deforces, extnu, satur jusqu la vomiturition, je jetai mon crayon, alors le Clment, leMisricordieux me suggra lide de passer la mer pour venir mouiller dans le havre islamique.

    Vous avez raison ; cest bien une conversion dartisteque la mienne ; cest le P.P.C de quelquun qui atoujours trouv que les enthousiasmes des sauvages blancs taient injustifis et qui ne sest pas adapt leur agitation, leurs laideurs, leursmensonges.

    Un an aprs ma conversion, les peuples, en tatcomplet divresse patriotique, vomissaient du sang.La dmence occidentale avait atteint son paroxysme.

    Loin du carnage, jabandonnais peu peu le planexotrique sur lequel je mtais tout dabordrfugi ; je mlanais par-del les formesextrieures et scrutais lhermtisme islamique.

    Javanais peu dans mes cherches, mon ignorance dela langue arabe ne me permettant pas de consulter les livres qui traitent du soufisme et aucune traditionde ces ouvrages nayant t faite en franais.

    Or, un jour, je reus la lettre que voici :

    Monsieur,

    Je suis arabe et mon intention premire a t de vouscrire en ma langue ; japprends que, malgr vosefforts, vous la balbutiez peine. Je rdige donc malettre en franais.

    Le monde musulman discuta longtemps la valeur devotre conversion. Le premier jai compris que voustiez sincre ; mais peut-tre pour vous comme pour le philosophe du doute Guyau :

    Cesser de se tromper ce ne serait plus vivre .

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    Vous ne pouvez pas tre tout fait religieux : voustes franais, par consquent inapte embrasser unereligion quelconque. Et cependant je voudrais vousvoir plus musulman ; vous goteriez alors la joie deltre dune faon complte. Quand mes loisirs me le permettront, jclairerai votre religion sur ma

    religion tant ignore par ceux-l mme qui ont la prtention de vous lenseigner.

    A vous voir vtu de larchaque et noble costumeoriental, on simaginerait que vous nen avez jamais port dautre : il nest pas jusqu votre physionomiequi ne soit devenue idalement arabe, mais votredmarche parfois vous trahit ; un rien attire votreattention et vous fait hter le pas ; on reconnat alorsle franais frivole.

    Les vtements arabes vous sient parce que vous les portez en artiste ! Les paroles de langlais dans leFaustin de Goncourt, me reviennent la mmoire et,sans nulle intention de vous blesser, je vous le jure, je me prends murmurer : vous ntes quartiste,vous ntes que cela ! .

    Vous avez renonc peindre pour crire : celasappelle aller dun mal un autre. Cette activitcrbrale ne pourra jamais vous procurer ce quevous cherchez : la paix. Quand on embrasse lareligion musulmane on ne joue plus avec le feu.Faites comme moi : ne croyez pas votreintelligence ; ne pensez jamais. Je sais que je vousdemande de limpossible.

    Je suis pour limpersonnalit ; je suis pour lesacrifice des sentiments personnels. LE je si cher aux latins, caractrise bien cette race appele disparatre : son agitation causera sa perte. Lislamest immobile ; le constater tel, Renan simaginait

    lavilir. Limmobilit cest lternit, le progrs tue ;la civilisation a une fin.

    Jai honte, monsieur, de paratre raisonner : je suisennemi de la pense ; je mprise mes connaissances profanes ; je ne veux jamais avoir confiance en elles.Ainsi je jouis dun bonheur immense. Et, comme jene suis pas goste, je dsire le partager avec vous.

    crivez-moi donc poste restante au nom de Ghazaliet postez-moi toutes questions quil vous plaira.

    Je vous prie de mexcuser si je signe dun pseudonyme ; jai pour cela de trs srieux motifs.

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    Ghazali.

    Javais des motifs non moins srieux pour ne pasrpondre un inconnu : ma conversion mavaitsignal la vigilance des autorits, en cette priode belliqueuse ma correspondance tait minutieusement

    examine par la censure. Lanonyme scripteur tait peut-tre un policier qui me tendrait des piges, me poserait des questions auxquelles ma brutalefranchise me ferait rpondre dune faoncompromettante.

    Nanmoins jtais intrigu : par certains passagesque jai jug bon de supprimer, cette lettre dcelaitchez son auteur une large connaissance des thorieshermtiques. Il ny avait Tunis quun seul arabequi pouvait lavoir rdige : ctait un nomm Kh

    Jallai le trouver : il me donna sa parole quil nemavait pas crit, et nous cherchmes vainementensemble qui pouvait tre le pseudo ghazali.

    Je profitai de mon entrevue avec Kh pour lequestionner sur le mysticisme musulman, luidemandant de mindiquer le processus quil mefallait suivre pour recevoir linitiation soufie .

    - Je nai pas qualit pour vous la confrer, merpondit-il ; mais quand vous serez mr, vousrencontrerez infailliblement le matre qui fera clater en vous la germination des graines mystiques etvous gratifiera de lillumination.

    - Qui est ce matre ?

    - Il se drobe, sans doute, sous une forme des plushumbles : il peut tre le marchand de gteaux quevous frlez dans la rue, ou bien lafricain qui vous

    masse au bain maure, ou mme le mendiant qui vousdemande laumne. Il suffira que son regardrencontre le votre pour que stablisse entre lui etvous la communication tlpathique.

    Mais vous tes dj sur la voie ; vous connaissezcertaines pratiques : les mthodes respiratoires etlentranement de concentration mentale enusage chez les oculistes. Bien quil ne mappartienne pas de vous initier au soufisme, je vais, du moins,tenter de vous veiller. Prtez-moi votre attention.

    Alors le mystagogue me conseilla de la sorte :- Vous ne connatrez Allah que par la mditation de

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    Mohammed (PSL). Cela revient dire que lon nesaurait atteindre lAbsolu sans une pralableimmersion dans la Conscience Universelle. Mais pour contempler une abstraction il faut la concrter.Matrialisez donc celle-ci en lui faisant revtir laforme du Prophte, puisque de tous les hommes ce

    fut lui qui manifesta lme du Monde avec le plusdintensit. Travaillez activement dessiner en vousson icne ; efforcez-vous de sentir sa prsence ; persuadez-vous quil vous voit quil vous entend,quil connat vos penses. Entretenez-vous avec lui ;interrogez-le ; coutez ses rponses : au dbut ellesseront formules par votre inconscient ; peu peuelles vous arriveront dailleurs.

    A vivre en perptuel commerce avec lEnvoydAllah, vous finirez par le rencontrer dans vosrves, un beau jour il vous rendra visite en pleinveille : durant le dhikr il surgira devant vous,dans la mme posture que la votre, ses genouxtouchant vos genoux, il vous regardera en souriant etvous le contemplerez sans frayeur. Alors, devantcette apparition qui reproduira vos moindres gestes,vous comprendrez que Mohammed cest vous-mme.

    Une fois rsorb en la Conscience Universelle, votre Ego devra encore ascendre : il lui faudra monter,monter toujours jusqu lultime degr initiatique oMohammed, se transfigurant pour la seconde fois,devant Ahmed.

    Telle est la voie troite qui mne la connaissance.Bien que la plupart des musulmans ne souponnentmme pas lexistence de ce chemin secret, vous pouvez le suivre sans crainte : cest la Tarqa, lesentier dAllah.

    Jeus avec Kh dautres entretiens au coursdesquels il seffora de dessiller ma vue intrieure :- Il ne suffit pas, mapprenait-il, de savoir que lmeSuprme habite en vous ; il faut encore que vous enayez la conviction, et cette certitude que lon appellela foi vous ne lacquerrez que par lexprience.

    Vous pouvez fort bien connatre thoriquement lanation sans pour cela savoir nager : cest seulementen vous jetant leau que vous apprendrez vousmaintenir la surface. De mme vous ignorez ce

    quest livresse si vous navez jamais bu jusqutituber.

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    Il est donc indispensable que vous viviez en Dieu,que vous le dcouvriez en toutes choses ; maisauparavant il vous faut Le chercher en vous-mme.Cest vous que vous trouverez. Se sentir (en) Dieu !Quel meilleur expdiant pour chapper lhorreur dtre un homme ?

    Introduisez lide de Dieu dans chacune de vos penses, dans chacun de vos mouvements, danschacune de vos actions : si vous parlez ou si vouscoutez, si vous tes assis ou si vous marchez, sivous buvez ou si vous mangez, si vous riez ou sivous pleurez, pensez Lui.

    Persuadez-vous bien quAllah Est en vous. Que SaPrsence devienne pour vous une inexpugnableobsession !

    Cest lautosuggestion ? Qui prtend le contraire ?Les ides que nous crons sont des (tres vivants).Crez Dieu en vous-mme.

    Pour arriver ce rsultat il existe un nombre infinide voies : Ghazali, le plus clbre des soufis prtendquon en compte autant que de souffles. Autrementdit : les directives spirituelles varient selon lesindividus.

    La religion catholique noffre que les deux sentiers prconiss par son Christ : lamour et la souffrance.Ils existent aussi dans lIslam sotrique, mais encompagnie dune multitude dautres.

    La voie la plus facile, celle que suivent la plupart desadeptes, cest labandon. Rien dtonnant cela puisque le mot Islam est le nom daction du verbe(aslama) qui signifie : sabandonner.

    Abandonnez-vous ; ne faites plus votre volont propre ; obissez la volont dAllah : si vousavancez la main pour tremper votre plume danslencre, dites-vous que ce nest pas votre vouloir quidirige vos doigts vers lencrier, mais quils y sont pousss par une volont plus puissante que la vtre.

    Votre corps est loutil dAllah : Il le manie saguise, reposez-vous et laissez oprer votre Matre.

    Quand un musulman avance sur le sentier, sa premire tape est le dtachement : il se dtache detout, renonce tout. Il lui reste ensuite svader desoi-mme : nul ne peut natre a nouveau sil ne

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    dans les plantes, jusque dans les cailloux. Il aimetout. Peu importe alors quil soit juif, chrtien oumusulman : sa religion est lamour.

    Kh est mort. Sil ma simplement veill sansme pousser davantage, cest que sa mission se

    bornait l. A cette poque je ntais pas prt : jenavais pas atteint ltat de conscience qui devait me permettre daller plus loin ; il tait crit quun autreviendrait me prendre o lui mavait laiss, car lematre se prsente toujours au moment opportun.

    Des matres, il en existe partout, sur toute la surfacedu globe, dans toutes les religions et mme endehors des religions : que ce soient les gourous duBrahmanisme, les Mahatmas du Bouddhisme, lesdirecteurs du catholicisme, les ples de lIslam, oudes philosophes ignors, partout se trouvent desvolus qui ont reu la charge de faire avancer leursfrres sur le sentier.

    On peut, la rigueur, sy aventurer seul, sans guide,en ne faisant partie daucune secte, mais combien plus pnible est la marche ! Que le danger nousguette qui ne sont pas redouter sous la protectiondu matre.

    La mort de Kh laissa dsempars deux de sesdisciples. Je ne les frquentais pas ; ils prouvrentle besoin de se rapprocher de moi pour sentretenir des choses spirituelles. Trs vivement attachs audfunt, ils avaient vcu dans son intimit, et sa perteles plongeait dans le dsarroi.

    Ctaient un franais et une franaise convertiscomme moi la religion du Prophte : (MlleMyriam Crno et Mr Djaffar Eugne Taillard).

    Je les vis frquemment : ils staient lancs cur perdu dans lIslam et en observaient avec une grandeferveur toutes les obligations. Trs bon arabisant,Djaffar (traducteur au tribunal de Tunis) possdaitdes manuscrits anciens traitant du soufisme : il lestudiait et dcouvrait parfois dans ces parcheminsquelques luminosits quil projetait dans mestnbres. Quand sayida Myriam, vritable sainte,elle me communiquait un peu de sa foi ardente ; elleme rconfortait quand je tombais dans la scheresse.

    Tous deux se rendaient compte de leur impuissance avancer sur la tarqa sans le secours dun guide.Quand ils firent la connaissance du secrtaire dun

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    Cheikh Algrien, si Mohammed Lad leur parla deson matre et ce quil leur donna la conviction que leCheikh tait un haut initi. Ils formrent le projetdaller le trouver et me dcidrent de lesaccompagner.

    La mentalit occidentale est rfractaire laconception du matre : Barrs a fait, sur ce sujet,une tude impartiale mais errone.

    La Tarqa nest pas, proprement parler, une voie plus ou moins pnible : cest une successiondtats de conscience de plus en plus levs. Lematre, lui, est parvenu au summum de cette sriedtats : il fait participer ses disciples sesacquisitions spirituelles.

    Mais pour cela le disciple doit se livrer lui sansrestriction : le matre ne peut donner quau proratade la faon dont on se donne de lui : il estindispensable que le cur du disciple se mette audiapason du cur du matre, que ces deux cursvibrent lunisson ; alors la fusion qui sopre esttelle que le disciple voit le matre en lui-mme, quele matre se mire en son disciple. Plus tard le discipledcouvrira en son matre le Prophte, plus tardencore Allah.

    Nous partmes Myriam, Djaffar et moi, pour aller passer quelques temps auprs du Cheikh Ahmed BenMustapha Ben Aliwa (en 1924).

    Le moqaddam de la zawiya vint nous cueillir ladescente du train et marcha devant nous pour nousmontrer la route. A pied nous traversmesMostaganem.

    Quand nous fmes cinquante mtres de la demeure

    du Cheikh situe lextrmit de la ville arabe, lemoqaddam se mit chanter dune voix forte et plusieurs reprises : La ilaha illAllah . Cest lafaon dont les alawiyyas annoncent la venue desvisiteurs de marque. Il ouvrit la porte dun jardin aufond duquel nous attendait le salon de rception. Nous nous dchaussmes et nous accroupmes sur des tapis.

    Quelques instant aprs, si Ahmed entrait, trs grand,trs droit ; il nous salua.

    Cdant leur motion Djaffar et Myriam clatrenten sanglots. Moins mu, et surtout moins

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    dmonstratif, je restai impassible.

    Le Cheikh prit place ; dun geste il nous invita limiter ; un serviteur apporta du th et des gteaux.

    Aprs stre tamponn les paupires, Djaffar nous

    servit dinterprte.Mes deux compagnons semblaient prendre un prodigieux intrt au dessins du tapis, car ils ne lesquittaient pas des yeux ; mais, moi, jexaminais lematre ; lui aussi me dvisagea ; nos regards secroisrent.

    Si Ahmed Ben Aliwa est g de cinquante six ans : ila une belle tte de Christ douloureux et tendre. Salongue barbe offre cette particularit que, noire sur le menton, elle est blanche sur les joues. Le visagemaigre, asctique, a une expression hautaine etferme. Ds que les paupires se lvent, ellesdcouvrent des yeux rieurs ; les lvres charnuessentrouvrent en un sourire trs doux ; lhomme qui parle est tout diffrent de celui qui se taisait ; lesmots schappent de sa bouche avec volubilit ; detemps en temps les phrases sont coupes dun iyahakka sidi ? (Nest ce pas sidi ?) Quteur dapprobation.

    Puis, quand la parole sarrte, le sourire se fige brusquement ; le visage se ferme en mme tempsque sabaissent les paupires ; le masque reprend sarigidit hiratique.

    Sentant que nous tions reints par notre longvoyage, le Cheikh abrgea lentrevue : cettechambre, nous dit-il, est celle que je vous airserve ; vous voici chez vous. Il nous salua denouveau et sortit.

    Jexaminai le local : un plafond, des murs, desnattes, des matelas, des coussins ; Myriam et Djaffar,encore sidrs, regardaient toujours la porte par otait sorti le matre. Je les secouai et les engageai procder notre installation.

    On apportait nos valises : nous les ouvrmes et nousen tirmes des costumes arabes. Un quart dheure plus tard nous tions transforms.

    Nous tombions en pleine fte annuelle desalawiyyas : de toutes parts accouraient les fuqras . Il en venait de tous les coins de

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    lAlgrie ; il en arrivait mme de Tunisie et lonattendait un grand nombre de Riffains. Nous allionstre environ six mille, car cette anne lescompagnies de chemin de fer avaient consenti tousles alawiyyas une rduction de cinquante pour centsur le tarif.

    Mais voici le Cheikh qui entre chez nous, touttroubl ; il tend Djaffar des lettres et tlgrammes :interdiction a t faite aux gens du Riff de passer lafrontire ; dans la province de Constantine leshabitants des communes mixtes des Bibans et deLafayette sont consigns par les Khalifats qui ontordre de ne pas laisser partir sous peine dedestitution. Quelques fuqras, ayant voulu enfreindrecette dfense illgale, ont t jets en prison ; lundeux se plaint dtre expos en plein soleil du matinau soir ; un autre est priv de nourriture et onlempche de faire ses prires.

    Nous sommes consterns ; mais bientt nous nousrvoltons et lun de nous propose de partir Alger pour protester auprs du Gouverneur Gnral.

    Le Cheikh approuve et part avec nous. Nous passonsune nouvelle nuit en chemin de fer ; le lendemainmatin nous nous prsentons au bureau duGouverneur. Celui-ci tant en cong, nous sommesreus par un quelconque rond de cuir. Aprs avoir cout nos dolances, ce fonctionnaire veut biennous apprendre que, la famine tant imminente, leGouvernement a cru devoir interdire lexode desKabyles pour empcher de dpenser futilement leursconomies.

    En entendant cela, je bondis et je demande si leGouvernement oserait employer pareil procd vis--vis des franais. Je mattire cette rplique :

    - En loccurrence il ne sagit pas de franais, maisdarabes.

    - Vous tablissez donc une diffrence entre eux ? Les balles allemandes nen faisaient pas.

    Le remplaant du Gouverneur me dcoche un regardmauvais et ne rpond rien. Il daigne cependant nousfaire remarquer que le Gouvernement ne saurait trerendu responsable des svices exercs sur nos frreset quil faut en accuser les autorits locales. Sur nosinstances il nous promet douvrir une enqute.Le lendemain nous tions de retour Mostaganem.

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    Pendant notre absence, dautres plerins taientarrivs. On en comptait tout de mme trois mille.Dans un immense terrain, qui fait face la zawiya,on avait dress des tentes sous lesquelles ilssentassaient en sections : ici les gens de Tlemcen etde Bne (Annaba) ; l ceux dOran ; plus loin ceux

    de Philippe-ville (Chlef).Toutes les villes et tousles douars taient reprsents. Beaucoup avaientapport de grands samovars en cuivre et faisaient leth en plein air.

    Escort par Djaffar et par moi, le Cheikh passait aumilieu des groupes, sarrtait ici et l, trouvant pour chacun une bonne parole. Tous les yeux taient braqus sur le matre et sur les deux convertis quiltraitait ouvertement en amis ; sur nous rejaillissaitlamour que les fuqras alawiyyas lui ont vou.

    On a souvent et abondamment crit sur lesconfrries musulmanes : on la toujours fait en se plaant lextrieur alors quelles auraient d treexamins de lintrieur ; peu nombreux sont leseuropens qui ont pu, comme moi, pntrer dans unezawiya en qualit dhte qui rien nest cach.

    Si lon veut tudier srieusement les confrries, il estindispensable de connatre leur origine, de remonter au dbut de lIslam. Le Prophte enseignait lafoule lexotrisme islamique ; mais il avait unedoctrine secrte, prolongement de la premire, etdont son gendre Ali tait le dpositaire : Je suis laville de la science, se plaisait-il rpter ; cest Aliqui en est la porte. Ceux qui voulaient entrer sadressaient donc Ali.

    Au commencement de lHgire, tous les savants,tous les docteurs, tous les ulmas des mosques pratiquaient et enseignaient la doctrine sotrique ;

    lIslam tait son apoge spirituel. Mais souslinfluence du luxe effrn des Abbassides, lesmurs se relchrent, les croyances aussi. Lesulmas ne reconnurent plus lsotrisme et se mirent perscuter les initis. Ceux-ci quittrent Bagdad etse rfugirent dans les montagnes ; ils se vtirent delaine blanche ; on les dsigna ds lors sous le nomde soufis , le mot souf signifiant : laine.

    Un musulman demandait-il entrer parmi eux ? Ilscommencrent par larracher son milieu ; lui

    coupaient barbe et moustaches ; lui rasaient la tte ;le revtaient dun dguisement burlesque ; luiconseillaient de se livrer mille excentricits. Alors,

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    sil lui arrivait de laisser chapper quelques bribesdes enseignements quil avait reus, personnenattachait dimportance ses paroles que lonconsidrait comme sortant de la bouche dun fou. Ilvitait ainsi la perscution.

    Bientt les soufis devinrent trs nombreux ; desconfrries se fondrent. Chacune de ces associations pieuses avait sa tte un matre initiateur. Quand unde ces matres mourrait, il arrivait frquemment queson successeur se montre inapte propager ladoctrine dans son intgralit ; la vrit smiettait, se perdait, et peu peu cessait dtre promulgue.

    Beaucoup de chefs de confrries en arrivant ne plus considrer leurs fonctions que comme unmoyen de vivre grassement des ziyaras offertes par leurs adeptes.

    De nos jours la plupart des confrries sont diriges par des jouisseurs qui ne songent qu se procurer facilement le bien-tre matriel. Recherchant lesfaveurs gouvernementales, ils fournissent enchange certains renseignements, rendent desservices . Ces tristes personnages ont des intrtscommuns avec les ulmas des mosques (souslinfluence du wahhabisme). Jaloux de leurs prrogatives, ces deux derniers prtendent quelsotrisme ne repose sur aucune base srieuse ; ilsle dclarent contraire la religion et dcrtrent queseule lorthodoxie fait foi.

    Aussi quand, par extraordinaire, surgit un matreinitiateur tel que le Cheikh actuel des alawiyyas, toutle monde crie haro sur lui et sur ses disciples ; onmet tout en uvre pour le dnigrer et le combattre :cest un gte-mtier.

    Si Ahmed Ben Aliwa, en effet, ne soccupe pas de politique ; il ne recherche pas les honneurs et resteindpendant ; il nexige de ses adeptes aucunecotisation annuelle et refuse leurs offrandes. Cest unsoufi hautement initi qui se contente de prparer lesmes de ses fuqras leurs destines futures, ceretour signal par le Qoran : dAllah vous tes partis ; Lui vous retournez (nous appartenons Allah et Lui nous retournons).

    Lintelligence la plus lucide serait impuissante dcouvrir le chemin qui conduit aux rgionssuprieures ; le cur seul peut en trouver laccs etcest sur lui que notre Cheikh bien aim impose ses

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    mais pleines de bndictions.

    De nombreuses attestations prouvent que, grce ses exhortations, des confrries entires, vritablesrepaires de bandits, sont maintenant pacifies et queleurs habitants ont tous t transforms en honntes

    gens incapables de commettre la plus lgre peccadille.

    Il ne faut pas confondre la confrrie des alawiyyasavec les autres sectes religieuses dont lesenseignements nont rien dsotrique : elle serattache directement celle des darqwas par unefiliation spirituelle comportant seulement troistransmissions de matres disciples devenus matres leur tour.

    Quant la confrrie bien connue des darqwas, elleremonte, par ses prceptes et ses mthodesdentranement, au grand matre initiateur sidi AbilHassan A-Chadhili qui, Tunis, vers la fin duquatrime sicle de lHgire, guidait des disciplessur le sentier de la saintet.

    Ainsi, de matre, nous est parvenue le dpt occulteet sacr dont sidi Ali Ibn Abi Talib, gendre duProphte, fut le premier gardien.

    Le surlendemain de mon arrive, le Cheikh medemanda de prparer un discours en franais et de le prononcer devant les fuqras assembls. Jeus beaume rcuser en lui affirmant que je ne possde pas ledon oratoire, il tenait son ide et nen voulut pasdmordre. Je me mis au travail.

    Quand jeus termin, jallai, en compagnie de monmatre et ami, flner parmi mes coreligionnaires :tous savaient que jtais lhte de leur chef : tous

    voulaient membrasser. Mes bons frresmtouffaient ; jamais mes lvres ne staient posessur tant de barbes rudes ; jamais mes joues navaientt baises par tant de bouches masculines. Mais cestreintes taient tellement sincres, je me sentaisentour de tant damour que je nprouvais aucundgot serrer contre moi le burnous loqueteux dun bdouin famlique, rendre celui qui le portait sesfraternelles accolades.

    Vint la nuit : des lumires sallumrent ; les fuqrasse grouprent en une seule assemble et entonnrentleurs chants dont la plupart des refrains ramenaientle message du Prophte : L ilha illAllah (rien

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    nexiste, Dieu Seul Est).

    A la suite du Cheikh nous fmes une troue dans leur compacit : il nous fallut enjamber des personnesaccroupis, nous appuyer sur un genou ou sur unepaule ; on en profitait pour nous saisir et nous

    embrasser la main. Nous prmes place terre, en pleine foule. Tous les yeux taient braqus sur nous :il y avait l dtranges ttes de majdoubs dsorbits, mais aussi de beaux et calmes visagesrefltant le srnit de lillumin.

    Cette nuit-l, jai laiss volontairement sombrer ma personnalit dans lme collective ; jai balanc letorse de gauche droite et de droite gauche pour suivre le rythme de la qacda que, sur un modeaigu, criait un gosse dune dizaine dannes et je mesuis surpris chantonner le refrain clam par troismille gosiers.

    Ah ! Que jtais loin de Paris, de ses cnacles, de sescoteries ! Quinze ans dj se sont couls depuisque, pour la premire fois, jai prononc la chahda ; mais jamais je nai aussi profondmentressenti lorgueil et la joie dappartenir lIslam.

    Et cela je ne laurais pas prouv si je ne mtaisaffili la confrrie des alawiyyas.

    Dun signe de la main le Cheikh fit taire leschanteurs ; il se pencha vers moi et me pria de prononcer mon allocution.

    Bien que je fusse en proie au trac du dbutant, je melevai et ce fut nanmoins dune voix forte et assureque je dbitai ce qui suit :

    Alhamdoulillah !

    Matre ! Frres

    Ce soir je prends la parole en public pour la premire fois et comme tout ce qui marrive revtune apparence paradoxale, il est divertissant deconstater que je mexprime en franais devant plusieurs milliers dauditeurs dont la plupartignorent ma langue. Mais je suis bien tranquille :mes frres alawiyyas me comprendront ; ils prteront peu dattention aux vocables que ma bouche profre ; par contre, ils constateront queleurs curs et le mien vibrent lunisson. Peu leur importeront, ds lors, les paroles, qui senvolent.

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    On vous a dit que je viens de Tunis ; je viens de bien plus loin : jarrive de la rgion tnbreuse o lesmes errent, dsempares, la recherche didal. Jesuis un vad de lenfer occidental : durant delongues annes je fus ballott par les remous delagitation moderne ; jeus des transports despoir

    fou suivis de crises angoisses ; je crus et je doutai ; je lus, je priai ; puis je retombai dans lagnosticisme.

    Cependant Allah nabandonnait pas son lu : pour mamener Lui, Il me poussa dans des cheminsdtourns : devant mon me dartiste, devant monme blouie, Il fit miroiter les splendeurs orientales ; lassoiff de justice que je suis Il dvoila lesiniquits qui se commettent sur le terre africaine ; lperdu dinfini, Il montra les minarets desmosques.

    Il plaa sur ma route un soufi qui mveilla. Cetiniti mavait appris que le matre accourt toujoursquand on lappelle. Je men suis souvenu lheurede la dsesprance et jai tendu dans le vide mes bras suppliants. Quelques jours aprs je recevais lavisite de sidi Mohammed Lad Chrif. Nous nousassmes dans mon jardin, au bord de cette admirable baie carthaginoise quencadrent des collinesviolaces. Durant toute une aprs midi sidiMohammed Lad me parla de son matre en termesenthousiastes que je lui demandai si ce matreconsentirait maccepter pour disciple.

    Sidi Mohammed me conseilla de madresser directement au Cheikh ; je me mis en route pour venir le trouver et voil comment il se fait que jesuis ce soir parmi vous.

    Maintenant que vais-je faire ? Que suis-je venuchercher ici ? Tout simplement la mthode

    dentranement qui me mettra en tat dIhsan.On distingue, vous le savez, trois degrs dans lareligion : lIslam, lIman, lIhsan. Celui qui se tientau premier degr est le croyant non pratiquant,mouslim (musulman) ; au deuxime degr il observeles obligations cultuelles etdevient moumen (croyant) ; enfin, au troisimedegr il avance dans la ralisation de lunit : cestun soufi.

    Parvenu ce stade, laide dun matre lui devientindispensable. O le dcouvrir ce matre ? Certes pasdans la camarilla des mosques, car les gens qui la

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    composent ignorent le premier mot de lsotrismeislamique. Quand je cherchais le matre je ne letrouvais pas ; lorsque je lai appel il ma envoyson disciple prfr et lui a confi la mission de meconduire auprs de lui.

    Me voici ses pieds, parmi vous, fuqras mes frres,et jamais je nai prouv daussi intensessensations ; jamais je ne me suis senti immerg danstant de bont, dans tant damour. Il me seradsormais difficile de vivre ailleurs. Je vais bienttretourner en mon Bordj de sidi BouSad ; jespre ne pas y rester longtemps et revenir ici terminer mes jours en paix, en vivant lardente vie intrieure dumystique, en rptant inlassablement le Nom Divin :Allah ! Allah !

    Ayant fini, je maccroupis de nouveau aux cots duCheikh ; les chants reprirent et continurent jusquce que sur un nouveau signe de si Ahmed BenAliwa, tous les fuqras se turent brusquement et semirent debout.

    Beaucoup dentre eux se dbarrassaient de leurs burnous et les jetaient autour de nous. Bientt nousfmes isols par une muraille de vtements. Presssles uns contre les autres, chacun tenant dans sa mainla main du voisin, flchissant lgrement les genoux,les fuqras commencrent le dhikr . De milliersde poitrines sexhalaient des sons farouches,terrifiants. Une sorte daspiration, qui semblait tiredes ventres, tait suivie dun renvoi rauque, et celarecommenait sur un rythme deux temps,sacclraitParfois un cri jaillissait de la foulehaletante ; ctait un majdoub qui tombait,terrass, ne pouvant supporter la puissance de lasyllabe quil profrait, le Hou final de Allahou .

    Et ctait hallucinant de se trouver en pleine nuit,emprisonn comme je ltais, dans un espace troitde quelques mtres, entour dune masse compactede plusieurs milliers de bdouins exalts qui poussaient toujours, avec une frnsie de plus en plus vhmente, leur terrifiant Hou, Oh ! .

    Le Cheikh leva la main. Comme par magie,lincantation sarrta net ; il eut un silence dequelques secondes. Aprs quoi, sur une nouvelle

    cadence et trs doucement, trs lentement,repartirent les exclamations simultanes : Hou !Hou ! Hou ! Hou !... Bientt elles se ralentirent,

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    saffaiblirent de plus en plus, steignirent

    La foule se disjoint ; des mains prestes semparrentdes burnous qui nous entouraient, dmolirent lamuraille des vtements.

    Enfin dlivrs nous nous levmes et traversmes lecampement. Les fuqras regagnaient leurs tentes. Ilme fallut encore me laisser baiser les mains, les joues et rpondre aux salutations et aux accolades.

    Durant trois jours que dura la fte, le Cheikh fut fortaccapar ; mais quand et disparu le dernier des plerins il put nous consacrer la plus grande partiede son temps.

    Nous allions quotidiennement le rejoindre au bordde la mer, au pied dune falaise, un endroit o ilfaisait construire une maisonnette qui devait luiservir de rsidence estivale.

    Les ouvriers qui travaillaient cette constructiontaient tous des fuqras attachs la zawiya ; tous portaient au coup le chapelet des alawiyyas. Quandnous nous descendions le sentier menant la mer, ilsen trouvait toujours un pour nous apercevoir deloin et pour annoncer notre arrive par unretentissant : L ilha illAllah ! . Le Cheikhvenait notre rencontre, nous conduisait sous unetente quil stait fait dresser proximit duchantier : nous nous accroupissions sur des tapis ; onnous servait du th parfum la menthe et lon nousapportait aussi de rouges tranches de pastques.

    Si Ahmed Ben Aliwa nous parlait de son matre al-Bouzaydi, nous contait comment il lavait connu.Lui tait tout jeune et dj affili aux assawiyyas.Ayant cess de sy adonner, il continuait cependant,

    pour se distraire, charmer des serpents.Un jour al-Bouzaydi se trouva devant lui et lui parlaainsi :- On ma dit que tu fascines et que tu domptes tousles reptiles ; je serai curieux dadmirer ton talent.

    - Rien de plus simple, rpondit le jeune Ahmed ;demain jirai chercher un serpent dans la montagneet lui ferai excuter des tours devant toi.

    Il vint en effet le lendemain avec une petite vipre etla fit travailler devant al-Bouzaydi.

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    - Cest fort bien, concda celui-ci ; mais ta vipre est petite. Pourrais-tu dompter un serpent plus gros ?

    - La taille ny fait rien : je me charge de dresser tousles serpents, si gros quils soient.

    - Pourtant, repris al-Bouzaydi, il en est un, vritablemonstre, dont tu aurais moins facilement raison.Veux-tu que je te la nomme ? Cest ton nafs , tanature infrieure. Cest elle quil faut dompter, cesont tes passions que tu dois vaincre. Tu sais quil ya deux sortes de guerre sainte ? La petite et lagrandeLa premire est le combat quon livre auxinfidles ; la seconde est la lutte contre soi-mme.

    - A partir de ce jour, continuait le Cheikh, al-Bouzaydi me prit comme disciple et voici ce quilmenseigna :

    L'infini ou monde de l'Absolu, que nous concevonsextrieur nous, est au contraire universel et existetel aussi bien en nous-mme qu'au dehors. Il n'y aqu'un monde : c'est celui-l.

    Ce que nous considrons comme le monde sensible,le monde du fini ou temporel, n'est qu'un ensemblede voiles cachant le monde rel. Ces voiles sont nos propres sens qui ne nous donnent pas la visionexacte des choses, mais qui, au contraire, enempchent et limitent la pleine perception : nos yeuxsont les voiles de la vraie vue ; nos oreilles un voilede l'oue vritable, et ainsi des autres sens. Pour serendre compte de l'existence du monde rel, il fautfaire tomber ces voiles que sont les sens ; il faut ensupprimer tout fonctionnement, fermer les yeux, se boucher les oreilles, s'abstraire du got, de l'odorat,du toucher. Que reste-t-il alors l'homme ? Il resteune lgre lueur qui lui apparat comme la lucidit

    de sa conscience. Cette lueur est trs faible causedes voiles qui l'entourent ; mais il y a continuit parfaite entre elle et la grande lumire du Mondeinfini. C'est dans cette lueur que se concentre alors la perception du cur, de l'me, de l'esprit, de la pense.

    Le dhikr du Nom divin, du Nom de l'Infini Allah est comme le va-et-vient qui affirme lacommunication de plus en plus complte jusqu'l'identit (entre) les lueurs de la conscience et lesblouissantes fulgurations de l'Infini. Cettecontinuit tant constate, notre conscience peut, par le dhikr , couler en quelque sorte, se rpandre

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    dans l'Infini et fusionner avec lui au point quel'Homme arrive se rendre compte que seul l'infiniest, et que lui, l'Homme conscient, n'existe quecomme voile.

    Une fois cet tat ralis, toutes les lumires de la Vie

    Infinie peuvent pntrer l'me du soufi et le faire participer la Vie Divine ; il est en droit de s'crier Je suis Allah ! . L'opration qui lui reste poursuivre est si subtile, tellement dlicate, qu'il estncessaire que l'esprit soit dgag des proccupations de tous genres et que le cur restevide.

    Ainsi palabrait notre Cheikh jusqu lheure duMaghrib. Quand le disque rouge du soleilsenfonait dans la mer, un faqr lanait lappel la prire. Tous les ouvriers abandonnaient leur travailet nous allions nous mler eux ; nous nousalignions sur des nattes grossires, derrire leCheikh qui faisait fonction dimam.

    La prire termine, nous remontions en compagniedes fuqras maons, le sentier abrupt qui escalade lafalaise et tous nous rentrions la zawiya.

    Le Cheikh me dclara :- Vous tes suffisamment avanc sur le chemin de laconnaissance : il ne vous reste plus qu obtenir lillumination, c'est--dire llargissement deconscience qui vous permettra de raliser par lecur ce que vous avez crbralement acquis. Pour cela rsinez-vous entrer en khalwa .

    - Quest ce que la khalwa ? Lui demandai-je.

    - Cest une cellule dans laquelle je place lercipiendaire aprs quil ma jur de ne pas en sortir,

    sil le faut, avant quarante jours. Dans cet oratoire,son unique occupation est de rpter, sans arrt, jour et nuit, le Nom Divin, en prolongeant chaque fois ladernire syllabe jusqu puisement du souffle.Auparavant, il doit rciter soixante quinze mille foisla formule de la chahda . Durant la journe ilobserve un jeun rigoureux quil rompt seulement lesoir.

    - Combien de temps reste-il enferm ?

    - Certains fuqras obtiennent lilluminationsoudaine, au bout de quelques minutes ; il en estdautres pour qui cela ncessite plusieurs jours ;

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    dautres plusieurs semaines. Je connais un faqr quilattendit huit mois. Chaque matin il rintgrait lakhalwa en me disant : mon cur est encore tropdur , finalement ses efforts furent rcompenses.

    Mon dpart eut lieu quelques jours aprs. Quand on

    vint me prvenir que lheure tait arrive, je melevai pour prendre cong du Cheikh avec qui jeconversais. Lui aussi se mit debout et me dit :

    - Nous ne nous quittons pas encore : je vais vousaccompagner un peu pour ne pas fatiguer le cheval. Nous marcherons jusqu ce que la voiture sorte dusable et arrive sur la route.

    Dehors, dans la nuit, les fuqras attachs lazawiya, au nombre dune trentaine, nous attendaient.Un cortge se forma dont je pris la tte au cot duCheikh ; immdiatement derrire nous staient placs Mohammed Lad, Myriam et Djaffar qui, eux,restaient encore quelques temps auprs du matre.Venaient ensuite le moqaddam de Tlemcen et celuide Mostaganem ; puis, en un groupe impact,suivaient les trente fuqras ; le break qui devait meconduire la gare, fermait la marche et ses deuxlanternes allumes clairaient fantastiquement notre petite troupe.

    Nous avancions en silence. Soudain le moqaddam deTlemcen lana dans la nuit les premires notes dunchant dont les paroles sont d un pote connu.Aprs chaque couplet son confrre de la zawiyareprenait le refrain que Djaffar me traduisit :

    Allah ! Cest Toi que nous allons !

    Nous allons Toi Allah !

    Cette marche nocturne faisait sourdre en nous une poignante tristesse ; derrire moi jentendaissangloter mes trop sensibles compagnons.

    Quand on fut hors du sable, on fit halte. Le Cheikhme tendit la main ; puis je me tournai vers lesfuqras. Tous voulurent mtreindre et membrasser une dernire fois. La lueur des lanternes me permitde constater que beaucoup dentre eux avaient lesyeux humides. Mohammed Lad, Djaffar et Myriammontrent avec moi dans le break pour maccompagner jusqu la gare ; le cocher toucha lecheval de son fouet ; japeru encore, dans la zonelumineuse, des mains claires qui sagitaient ; puis

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    tout rentra dans la nuit.

    Maintenant que je ressasse, distance, la retraite que je fis Mostaganem, je constate que lenseignementdu Cheikh est le plus simple, mais aussi le plus sr,de ceux qui me furent donns ; pour aller au Pre les

    chrtiens passent par le fils, les thosophes par lelogos ; Khlui-mme, me conseilla de mattacher Mohammed pour quil me conduise Allah.

    Le Cheikh des alawiyyas, lui ne propose aucunintermdiaire ; par sa mthode chacun a la facultdascendre lultime sommet et cette mthodeconsiste simplement rpter : Allah ! Allah ! .

    Tous les mystiques pratiquent la concentrationmentale cest un exercice qui exige une grande persvrance ; beaucoup renoncent sy adonner parce que la tnacit ncessaire leur fait dfaut. Avecla mthode Alawi, lesprit se concentre sans effortsur le mot que les lvres prononcent : cest enclamant le Nom Divin, en layant constamment la bouche, en le dessinant en lettres gigantesques dansson cur, que le prgrin de linfini avance sur le Sentier dAllah .

    AbdulKarm Jossot

    Faqr Alawi

    Ce qui va suivre est un article crit par AbdulkarimJossot paru dans le magazine El Morchidn6/Janvier1947

    Qu'est-ce qui est ternel en vous?

    Voyons, donnez-vous la peine de rflchir; neregardez pas autour de vous, mais en vous. Qu'ydcouvrez-vous, en plus de vos organes? Rien ? Entes-vous bien sr?

    Qui donc anime ces organes ? Qui fait circuler votresang et battre votre coeur ? C'est la vie.

    Avant votre naissance, il y avait des hommes sur laTerre. Avant la naissance de la Terre, d'autres plantes tournoyaient dans l'espace illimit.

    La VIE a donc toujours t; Elle est ; Elle seratoujours.

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    Vous voyez bien qu'il y a quelque chose d'ternel envous.

    La VIE n'est pas simplement mouvement ainsi quele prtendent les savants matrialistes; Elle est aussiintelligence et amour.

    Vous ne nierez pas que ces trois hypostases de laVIE-UNE rsident en vous puisque vous tesrobuste, intelligent et affectueux.

    Elles sont aussi en moi et dans tous les autreshommes, ainsi que dans les animaux, les plantes etmme les cailloux. Mais elles ne se laissent percevoir que dans la proportion o la forme qui leur tient de tabernacle est capable de les reflter.

    La VIE est dans tout. Elle est tout.

    Votre corps lui sert d'instrument; c'est par lui qu'Ellese manifeste. C'est Elle qui agit en vous ; Elle tire lesfils qui vous font gesticuler; Elle sme dans votrecerveau des ides; Elle s'exprime par votre bouche.

    Monsieur ..., vous pensez que c'est vous qui pensez ? Non; c'est la VIE qui pense en vous. En vous Elle semeut; en vous Elle a son tre.

    Quand des mots sortent de vos lvres; c'est Elle quiles profre. Il se peut que vous disiez des btises :cela vous arrive quelque fois. C'est que votrecerveau n'est pas au point. Il dforme ce qu'il estcharg de transmettre; le verbe ne se manifeste danstoute sa splendeur qu' l'aide d'un cerveau puissamment organis.

    La VIE est vous, et vous tes Elle. Le jour o Elle seretirera de votre corps, celui-ci, n'tant plus soutenu,

    tombera, et les cellules qui le composent sedsagrgeront. Mais elles se regrouperont pour constituer de nouvelles formes dans lesquelles laVIE s'introduira nouveau.

    Ainsi tourne ternellement la roue de la VIE.

    Puisqu'Elle est l'Intelligence Infinie, la VIE estforcment consciente. Cette Conscience Suprme,toujours parcequ'Elle est Infinie, est galementomnisciente, omniprsente, omnipotente...

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    Sources et bibliographies:

    Ephmride anarchiste

    le rayonnement spirituel du Cheikh al-Alawi sur l'occident

    La Vie

    Les souvenirs du Docteur Marcel Carret

    Le sentier d'Allah, d'AbdulKarm Jossot

    http://ytak.club.fr/avril3.html#Jossothttp://al.alawi.1934.free.fr/modules.php?name=Content&pa=showpage&pid=22http://al.alawi.1934.free.fr/modules.php?name=Content&pa=showpage&pid=22http://adlania1.free.fr/lavie.htmlhttp://al.alawi.1934.free.fr/modules.php?name=Content&pa=showpage&pid=62http://al.alawi.1934.free.fr/modules.php?name=Content&pa=showpage&pid=22http://al.alawi.1934.free.fr/modules.php?name=Content&pa=showpage&pid=22http://adlania1.free.fr/lavie.htmlhttp://al.alawi.1934.free.fr/modules.php?name=Content&pa=showpage&pid=62http://ytak.club.fr/avril3.html#Jossot