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le shofar REVUE MENSUELLE DE LA COMMUNAUTÉ ISRAÉLITE LIBÉRALE DE BELGIQUE SYNAGOGUE BETH HILLEL BRUXELLES N° d’agréation P401059 DÉCEMBRE 2007 — N°289 / KISLEV/TEVET 5768 Hanouka, trois origines, trois enseignements. Rabbi Dahan a 70 ans.

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le shofarr e v u e m e n s u e l l e d e l a c o m m u n a u t é i s r a é l i t e l i b é r a l e d e b e l g i q u e

s y n a g o g u e b e t h h i l l e l

b r u x e l l e s

N° d’agréation P401059 Décembre 2007 — n°289 / Kislev/TeveT 5768

Hanouka, trois origines, trois enseignements.

Rabbi Dahan a 70 ans.

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revue mensuelle de la communauté israélite libérale de belgique

EDITEUR RESPONSABLE :

Rabbin Abraham Dahan

RéDAcTRIcE EN chEf :

Jacqueline Wiener

cOMITé DE RéDAcTION :

Rabbi Abraham Dahan, Rabbi

floriane chinsky, Ralph Bisschops,

Serge Boruchowitch, Gilbert

Lederman, Philippe Lewkowicz,

Jacqueline Wiener, Emmanuel Wolf

ONT EGALEMENT cOLLABORé A

cETTE LIvRAISON :

Naomi Aguilera, David cepolowicz,

Monique Ebstein, Josiane Goldschmidt,

Shmuel Lison, Zahava Seewald, Anne

Simon, Nathan Selik, Samuel vlodaver

et Serge Weinber

MISE EN PAGE :

www.inextremis.be

n°289 Décembre 2007 /

Kislev/TeveT 5768

N° d’agréation P401059

Le Shofar est édité par la

cOMMUNAUTé ISRAéLITE LIBéRALE

DE BELGIQUE A.S.B.L.

N° d’entreprise : 408.710.191

Synagogue Beth hillel

80, rue des Primeurs,

B-1190 Bruxelles

Tél. 02 332 25 28

fax 02 376 72 19

www.beth-hillel.org

[email protected]

cBc 192-5133742-59

RABBINS : Abraham Dahan

et floriane chinsky

cONSEIL D’ADMINISTRATION :

Avishaï Ben David, Ralph Bisschops,

Patrick Ebstein, Paul-Gérard Ebstein,

Ephraïm fischgrund, Josiane

Goldschmidt, Gilbert Lederman,

Philippe Lewkowicz, Willy Pomeranc,

Elie vulfs, Serge Weinber, Jacqueline

Wiener, Emmanuel Wolf.

Les textes publiés n’engagent que

leurs auteurs.

Photo de couverture :

Ralph Bisschops

Photos :

Ralph Bisschops et Serge Weinber

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Sommaire 05 eDiTOriAlL’union fit la forcepar Jacqueline Wiener

le mOT Du PrésiDeNT La lumière de Hanouccah hier et aujourd’huipar Philippe Lewkowicz

JuDAÏsmeHanouka, trois origines, trois enseignementspar rabbi Floriane chinsky

Etre un bon technicien ou un bon créatif? Petites suggestions pour un allumage pas comme les autrespar rabbi Floriane chinsky

A la mémoire de Geoffrey King z"l, extraits de textes

Rabbi Dahan a septante ans!Par ralph bisschops, Dr. phil.

Nos Bné Mitsva, Naomie Aguilera, Daniel Cepolowicz, Nathan Selik et Samuel Vlodaver

Morale contemporaine et éthique juivePar le rabbin rayner

AgeNDA

cOmmuNAuTéCarnet

A propos du dialogue judéo-chrétienpar Jacqueline Wiener

De notre Talmud Torapar Josiane Goldschmidt

Pour aimer la vie au présent, au passé et demainpar Anne Simon

Résonance théologique de la musique juive cantoriale par Shmuel Lison Hazanut à Beth Hillel: Zahava Seewald Myriam Fuks rencontre son temps par Serge Weinber André Chouraqui z"lpar monique ebstein

Saul Friedländerpar monique ebstein Lu pour vouspar monique ebstein

Quelques nouvelles d’Israël et d’ailleurs

Au Musée Juif de Belgique: Sarah et ses frèrespar Jacqueline Wiener

Un peu d’humour

Informations utiles

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Pour l’organisation de vos Simhot

Un nom: Solange!

Un numéro: 0497.57.47.27!

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le shofar

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Est-ce incongru de se demander si la vision en direct sur le petit écran des mains votantes flamandes tendues de concert avec celles au geste peu étrangement éloigné du signe nazi, le mercredi 7 novembre 2007, pourrait, d’une certaine façon, être mise en perspective avec le choc psychologique que dut être, pour les Juifs non hellénisés de la Judée grecque anti-que, l’annonce de l’introduction d’une statue de Zeus au visage similaire à celui d’Antiochus IV dans le Temple de Jérusalem, voici quelque deux mille cent septante quatre ans ? Certainement. Sauf à comprendre, à partir des chemine-ments intellectuels par lesquels nos Sages ont muté les évènements politiques d’alors en célébration d’un « petit » « miracle » très dis-cret mais tellement chargé de sens, combien même pour nos jours, la mise en exergue du retour de la Lumière revêt une importance fondamentale, aussi bien dans la conduite des affaires publiques que dans la relation individuelle à autrui. Le Temple purifié, la Ménora rallumée n’auraient aucune signification sans la conscience, sans l’exigence que la pensée hu-maine doit refuser son asservissement. A Hanoukka, la lueur scintillante derrière la vitre des maisons juives qu’aperçoivent les passants, et qui est là pour montrer la persé-vérance de ceux qui pensent autrement face à ceux qui imposent leurs propres concep-tions, a une portée universelle. Aujourd’hui, lorsqu’en Belgique, nous dis-posons nos hanoukkiot devant nos fenêtres pour rappeler que l’huile pure découverte dans le Sanctuaire permettant la lumière de la Menora qu’un seul jour brûla finalement huit fois plus longtemps, c’est donc aussi pour dire que la norme, la croyance, l’opi-nion, la sensibilité, la culture ou la langue de

l’un ne doit jamais, ne peut jamais faire fi du respect infini de l’autre ; c’est pour dire que la différence, la particularité, l’altérité englo-bées fondamentalement en un souci commun de bien-vivre ensemble à la fois collectif et individuel est le meilleur rempart contre l’obscurantisme, le dogmatisme et l’idéolo-gie fanatiques qui débouchent immanqua-blement sur une uniformisation si chère aux dictatures.Or donc, que l’on soit partisan des flamin-gants, des fransquillons, des brusselaires ou des Belges-à-la-Papa ; que l’on soit centriste, de gauche, de droite ou de nulle part ; que l’on découvre les propos de Jules Destrée comme parole de prophétie ou non ; que l’on se sente peu ou prou concerné par la vie politique de notre pays, il ne peut, il ne doit échapper à personne que les coups de buttoir de l’ex-trême droite flamande portent hélas actuel-lement efficacement leurs fruits. Le résultat d’un sondage paru le mois dernier dans le quotidien flamand « De Standaard » est édifiant, à cet égard. En effet, à la ques-tion de savoir s’ils approuvaient les déclara-tions du président du N-Va Bart De Wever, un des grands argentiers des mains votantes dont question ci-dessus, qualifiant de « gra-tuites » les excuses sur la participation de la ville d’Anvers à la Shoa exprimées par le Bourgmestre Patrick Janssen, 63,86% des sondés répondirent par l’affirmative… Voilà donc démasqué, en un rapprochement rapidement construit, l’homme-Babel au sentiment nationaliste exacerbé, discours populiste et dessein éhontément destructeur réunis, perché au sommet de cette toute pe-tite chose si peu enfouie et tellement révéla-trice de tout le reste: la haine du Juif. Aux premiers temps de l’indépendance de la Belgique, le 8 septembre 1831, Léopold Ier,

L’Union fit la forcePar Jacqueline Wiener

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éDiTOriAl

à l’occasion de son discours au Sénat et à la Chambre réunis en séance plénière, exhorta le pouvoir législatif à voter des projets de loi qui, développant les principes posés dans la Constitution, feraient jouir les Belges « d’une plus grande somme de liberté qu’aucun autre peuple d’Europe ». La Belgique d’alors fut le pays du modernis-me par excellence Les Belges, enfin libérés du joug séculaire des grandes puissances, s’ébrouaient en un joyeux épanouissement économique et so-cial. Et parmi eux, les Juifs n’étaient pas en reste d’ailleurs, eux qui se voyaient rejoindre par des coreligionnaires des pays limitrophes à qui ce vent de liberté offrait la perspective uni-que d’une réelle intégration et où participation à la vie scientifique, artistique ou politique na-tionale ne procédait guère de vains rêves. L’Union fit la force de ce petit Etat indépen-dant sans mémoire propre de nature à lui conférer une fierté nationale particulière. Par la suite, la cohésion nationale où l’affron-tement entre catholiques et libéraux, puis

entre Flamands et francophones vint régu-lièrement s’échouer en un compromis « à la belge » suscita la confiante curiosité des Na-tions. La guerre scolaire, la question royale, le dé-ménagement forcé vers Louvain-la-Neuve ou les Fourons furent autant de houleux défis auxquels les démocrates du Royaume surent toujours trouver une apaisante parade. L’Union fit la force et sa consécration ultime fut d’ériger Bruxelles au rang de capitale de l’Europe.Les actuels drapeaux belges brûlés, conseillers communaux malmenés, menaces à l’encontre de personnes s’exprimant dans leur langue maternelle sont autant de symp-tômes d’une gravité sans précédent, dès lors que le cordon sanitaire autour de l’extrême droite belge de Flandre a été dénoué, le 7 no-vembre dernier. En cette fête de Hanoucca 5768, les points lumineux à huit branches éparpillés entre Anvers, Bruxelles, Liège, Gand ou Charleroi orneront particulièrement fort à propos les contours multi-culturels de notre pays… ■

Le site de Beth Hillel est ouvert

Découvrez le sur : www.beth-hillel.org

Vous y trouverez e.a. l’agenda, les parashot, des infos, des photos et plein d’autres choses utiles.

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en écrivant à[email protected]

Bonnes visites

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le shofar

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par Philippe Lewkowicz

Hanouccah célèbre le double miracle d’une victoire militaire et de l’huile qui dura huit jours.Le premier miracle a eu une large portée, tant du point de vue espace, la région de Jérusa-lem, que du point de vue des personnes impli-quées, toute la nation.Le second miracle a eu lieu dans un espace dé-fini et confiné - un espace réservé dans le tem-ple - et a eu peu de spectateurs, les Cohanim, qui assuraient le service dans le sanctuaire.Si disparates que soient ces deux éléments, il existe entre eux un lien fort. La révolte des Hasmonéens sur les Grecs était un acte de résistance, une résistance à l’assimilation, une revendication à conserver son identité. Le peuple juif ne refusait pas la civilisation grecque en tant que telle, bien au contraire, le plus souvent, cette civilisation inspirée par les plus grands savants était fon-dée sur une démarche scientifique et poursui-vait un but «honnête».Le problème s’est posé quand l’occupant a voulu instaurer ses lois et, en même temps, refuser toute autre approche, culture ou reli-gion. La spécificité existentielle - et par voie de conséquence spirituelle - d’Israël menaçait d’être anéantie par l’hégémonie culturelle que les Séleucides voulaient imposer sur tous les territoires qu’ils contrôlaient déjà politique-ment et militairement, dont la Judée.Le message de la Grèce dont il est question à Hanouccah, c’est le message de la science comme objectif suprême. C’est le message d’un monde fondé sur des lois, un monde exis-tant pour des lois, un monde de choix techni-ques, un monde de rentabilité.La lumière juive représente une autre voie : celle d’un monde qui n’est pas uniquement di-rigé par des lois scientifiques, mais également par la morale et l’éthique. Et là où il y a de

l’éthique, il y a la possibilité d’un choix : faire ou ne pas faire une action ! Dire à quelqu’un ce que l’on pense ou pas ? Punir ou pas ? Pardon-ner ou pas ?Dans le monde antique, le monde juif et le monde grec sont tous deux arrivés à des som-mets dans la pensée humaine. Cela n’a pas em-pêché la confrontation entre ces deux entités naturellement antagonistes.Et le temple, à l’époque, était d’une certaine manière le centre de la nation, il l’inspirait. Du temple émanait « la lumière », symbole de l’étude, de la conscience, du questionnement. En permettant la victoire militaire, D’ieu a permis le maintien de cette conscience.La fiole d’huile est le symbole d’une petite lu-mière, d’un petit espoir qui subsiste. Un espoir de paix au milieu des guerres. C’est pourquoi la tradition juive se souvient de Hanouccah, non pas comme la fête d’une victoire politique, mais comme celle d’une victoire de l’esprit.Aujourd’hui, à Beth Hillel, comme dans tou-tes les communautés juives, on se souvient de l’importance de cette petite lumière. Et aujourd’hui il faut se rappeler que cette flam-me est toujours nécessaire. En Belgique, com-me au Tibet ou partout dans le monde où les politiques oublient trop souvent l’importance de ces valeurs fondamentales que sont la li-berté, la démocratie, la tolérance, le respect de l’autre.Cet enseignement ancien est tellement ac-tuel que nous ne pouvons pas l’ignorer, nous le disons à nos élèves du Talmud Torah, nos rabbins le disent dans leurs sermons. Cet enseignement guide nos actions dans nos re-lations avec les autres communautés. Cet en-seignement est un des engagements de Beth Hillel dans la société. Hag sameah ■

le mOT Du PrésiDeNT

La lumière de Hanouccah hier et aujourd’hui

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JuDAÏsme

Hanouka, entre toutes les fêtes, illustre l’at-tachement du peuple juif à sa tradition, une tradition de vie, porteuse de vie, adaptée à nos vies.Absente de la Bible, à peine évoquée dans la michna, Hanouka nous apparaît pour la pre-mière fois dans le Talmud. Une braïta (source tanaïtique), citée dans le traité chabat du Tal-mud babylonien (21b) présente le lien entre la célébration et l’allumage de bougies.Hanouka est, selon le Talmud lui-même, qui trouve son origine dans un phénomène na-turel impressionnant : le raccourcissement des jours. Il est essentiel de se mettre dans la peau des générations précédentes. L’amoin-drissement de la luminosité et du temps d’ex-position au soleil nous influence tous, parfois de façon imperceptible ou subliminale. Il nous est facile aujourd’hui, pour peu que nous en prenions conscience, d’allumer une lampe ou une bougie. La situation était toute autre dans le passé. L’absence de l’électricité rendait l’éclairage très difficile, très fragile et très peu confortable. La lumière vacillante des bougies elle-même constituait un luxe. Le Talmud va jusqu’à poser la question du choix à opérer si on ne dispose pas de l’argent né-cessaire pour se procurer à la fois les bougies de Hanouka et le vin du kidouch du chabat !

Ne pas laisser nos jours se raccourcirLorsque petit à petit, dans notre univers phy-sique, dans notre univers familial, dans notre univers personnel, la lumière diminue, il est important d’en prendre conscience. C’est le premier message de Hanouka. Cette prise de conscience, pourtant, peut faire peur. Le Talmud fait remonter cette pre-

mière angoisse à Adam Harichon, le premier humain. Voyant les jours raccourcir, torturé de culpabilité face à la faute qui l’avait chas-sé du jardin d’Eden, Adam vit sa fin venir. Il s’imagina disparaître dans l’obscurité, poursuivi par la faute de la consommation du fruit de l’arbre de la connaissance. Il en-treprit alors, nous dit le Talmud, de jeûner et de prier. Quand vint l’époque du mois de tévèt, il observa le rallongement des jours, il se dit qu’il s’agissait du fonctionnement nor-mal du monde, et se consacra à huit jours de fête (avoda zara 8a). C’est avec la renaissance des jours qu’Adam pu reprendre sa vie. C’est ainsi que naquit la fête. La première origine de la fête serait liée à la nature, et à son in-fluence sur nos sentiments et comportement. Allumer les lumières de Hanouka permet de nous situer en harmonie avec la nature, sans nous laisser dominer par elle, de ne pas lais-ser nos jours se raccourcir et notre univers se réduire comme une peau de chagrin. Ne pas laisser nos fêtes disparaître Hanouka a également une raison historique, souvent ignorée. Les livres des Machabées, livre apocryphe qui ne nous est parvenu qu’à travers la traduction des Septante retrace l’épopée des makabim, de Matatiahou et de ses fils, leaders de la révolte. Il y est relaté qu’une fois le temple reconquis et remis en état, chacun a regretté de n’avoir pu y célé-brer la fête de soukot. Le deuxième livre des makabim raconte :« Ils ont célébré dans la joie, huit jours comme la fête de soukot, se souvenant que quelques temps auparavant ils avaient passé les jours de soukot dans les montagnes et les cavernes

Hanouka, trois origines, trois enseignements

Par rabbi Floriane chinsky

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le shofar

comme des animaux. Pour cette raison ils ont décoré avec des bâtons et des branches qu’on pouvait trouver à cette saison et avec des palmiers dattiers ils ont loué Dieu qui avait soutenu leur action dans la purification de son sanctuaire. » (makabim II, 10 :6-7) La deuxième origine de la fête est donc his-torique. La situation de Sion comme terre conquise et les conditions de la révolte avaient empêché la célébration de soukot. Notre peuple, qui ne renonce jamais, a su re-créer cette fête avec les moyens du bord, hors saison. Notons au passage que ce « soukot chéni » n’a pas pu obéir aux règles habituel-les de la fête. Cela n’a pas empêché le peu-ple de la célébrer et de témoigner ainsi son amour pour la tradition. C’est une deuxième leçon de la fête : ne jamais renoncer, ne pas se laisser démoraliser par l’impossibilité de célébrer nos fêtes, tenter de « reconquérir le sanctuaire » en réunissant les conditions qui nous permettront de poursuivre notre tradi-tion, et, lorsque le sanctuaire est reconquis, ne pas l’ériger en vérité pétrifiée et idolâtre, mais témoigner de notre amour pour la tradi-tion de façon créative.

Nous rappeler que notre réussite ne dé-pend pas de nos moyensHanouka, et cette partie de l’histoire est la plus connue, possède également un fondement légendaire, psychologique et symbolique. Il s’agit du miracle de la fiole d’huile, qui a permis à la ménora (lampe à sept branches utilisée au temple) de brû-ler pendant huit jours avec une toute petite quantité d’huile. Ainsi, une sorte de méno-ra à huit branches (comme les huit jours de hanouka) plus chamach, que l’on nomme « Hanoukia », a fait son apparition au qua-trième siècle. Encore une fois, il s’agit de ne pas se laisser décourager par la petitesse de nos moyens.

Si nous n’avons qu’un peu d’huile, utilisons-là, partageons cette lumière, laissons là nous éclairer, et elle ne viendra pas à s’éteindre.Pour cette année, nous pouvons retenir de cette fête si belle et si simple trois qualités qui nous accompagneront pendant ces huit jours, et espérons-le au delà : la lucidité et la conscience, la créativité dans l’expression de notre amour, l’espoir. ■

11, Place G. Brugmann • 1050 Bruxelles

Tél: 02/346.33.55 • Tél: 02/343.94.82

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LECOBEL

VOtrE agEnCE immOBiLièrE

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JuDAÏsme

D’année en année, nous allumons les lumiè-res de Hanouka. Au-delà de la simple habi-tude, de la perpétuation de nos souvenirs d’enfance, de la mémoire de nos parents ou grands parents, au-delà de la beauté de ces petites bougies brillant au cœur de l’hiver, comment pouvons-nous ranimer pour de vrai la flamme de l’identité que ces bougies symbolisent ?Comment pouvons nous garder cette flamme de la créativité des Makabim, flamme qui est à l’origine de tant de bonheur familial au fil des générations ?

Les questions techniquesBeaucoup d’entre nous se posent des ques-tions à propos de la « technique d’allumage ». Une maman m’a même demandé récemment, avant d’allumer les bougies du chabbat, par laquelle elle devait commencer ! C’est dire si Hanouka approche ! C’est dire combien le bon accomplissement des commandements nous est cher !C’est dire aussi combien nous craignons parfois de commettre des erreurs ou des impairs. Pourtant, cette crainte n’est ni justi-fiée, ni souhaitable. C’est au contraire la joie d’être ensemble qui doit rester centrale dans ces petits gestes pleins de sens que la tradi-tion nous propose. Pour nous aider à dévelop-per l’aspect joyeux de nos coutumes, un peu d’étude permet de s’assouplir, de se rassurer, d’apprendre encore une fois que notre tradi-tion est plurielle, et que quand on y met du cœur, on ne peut pas faire de réel faux pas.

Être un bon technicien ou un bon créatif ? Petites suggestions pour un allumage pas comme les autres

par rabbi Floriane chinsky

La « technique » porte la conscienceLa question est une bonne question. En effet, la « technique », la « procédure », la façon dont nous agissons et non pas seulement ce que nous faisons, illustrent notre approche de la vie, notre philosophie, nos valeurs. La tradition juive nous éduque à croire en no-tre pouvoir d’action sur le monde. Ce pouvoir s’exprime dans chacun de nos gestes, de telle sorte que chaque détail est susceptible de re-vêtir une grande importance. Cela ne signifie pourtant pas qu’il n’y ait qu’une seule façon de bien agir, au contraire. Cela signifie seule-ment que notre façon d’agir a un impact psy-chologique, symbolique et social. Cet impact, nous préférons en avoir conscience, pour l’utiliser pour le bien. Pour éviter la peur de mal faire, les blocages, le découragement, la routine, les disputes concernant la meilleure façon d’allumer, vous pouvez décider d’ouvrir l’horizon du chemin juif et de vous intéresser aux différentes pos-sibilités concernant cet allumage. Vous trou-verez en encadré la procédure « classique » que la plus part des juifs contemporains à Bruxelles utilisent.

Ouvrir le champ des possibles et le chant du sensPour l’instant, intéressons-nous à la braïta talmudique concernant l’allumage :« Le commandement de Hanouka, c’est une bougie pour chacun et sa maisonnée. Pour ceux qui embellissent le commandement (méhadrin) c’est une bougie par personne.

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le shofar

Les «embellisseurs des embellisseurs» : l’école de Chamaï affirme : « Le premier jour il en allume huit, à partir de là, on va en di-minuant » ; l’école de Hillel affirme : « le pre-mier jour il en allume une, à partir de là, on va en rajoutant ». » (babli chabat 21b)En nous penchant sur cette braïta, on consta-te que nous avons le choix entre différentes possibilités :• Allumeruneseulebougieparmaison,cha-

que jour, pendant huit jours. C’est une façon de témoigner, à la suite des

makabim qui ont fêté Hanouka en rempla-cement de soukot, qu’il ne faut jamais re-noncer. Vous affirmerez, à la suite de Adam harichon, qu’il faut prendre soin de notre qualité de vie et ne pas nous laisser contrô-ler par les changements naturels, tels le raccourcissement des jours, qui pourraient nous toucher et nous affaiblir. Vous affirme-rez aussi l’importance de la famille en tant qu’unité, puisque une bougie suffit pour tous. Vous témoignerez également de la simplicité des commandements et la com-préhension des rabbins puisque une bougie suffit, puisque chacun peut faire partie du commandement et de la fête facilement, quels que soient ses moyens (voir l’article « trois origines, trois enseignements »).

• Allumer chaque jour unebougie par per-sonne est une autre possibilité.

Vous affirmerez ainsi que cette lumière de Hanouka vous est particulièrement chère, non seulement en tant que groupe familial, mais aussi pour chaque membre de la fa-mille individuellement. Vous témoignerez également l’importance pour chaque mem-bre de la famille d’être reconnu dans la lu-mière qu’il apporte au groupe. Notons au passage que selon la halaHa (fondée sur Babli chabat 23a), les femmes sont tenues d’allumer les bougies exactement au même titre que les hommes, de telle sorte qu’elles peuvent même exempter les hommes en al-lumant en leur nom. Il est donc tout a fait possible de faire participer femmes et filles à cette manière d’allumer qui souligne l’im-portance de la participation de chacun.

• Allumercomme l’écoledeHillel, rajoutertoujours une bougie, comme l’espoir qui va toujours en grandissant, développer l’âme.• Allumer comme Chamaï, un nombre de

bougies égales aux jours qui restent jusqu’à la fin de la fête, développer la conscience.

• AllumerenutilisantuneHanoukia, lampe spéciale à 8 branches plus chamach, dont la première est attestée au 4ème siècle et dont l’usage se répand au Moyen-âge. Vous vous associerez ainsi aux développements postérieurs du chemin juif, vous contribue-rez au développement culturel du judaïs-me, soutiendrez les artistes de « judaica », qui travaillent à créer les beaux objets qui accompagnent nos belles coutumes. En créant vous-même votre Hanoukia, vous serez de façon directe un artisan ou un artiste de la culture juive. Veillez dans ce cas à ce qu’on retrouve votre œuvre dans quelques siècles…

Il existe de nombreuses coutumes liées à Hanouka. Vous pouvez également les faire entrer dans votre célébration et vous inscrire à votre façon, dans la continuité de l’histoire juive qui a poursuivi son chemin depuis cette lointaine braïta du traité chabat : Coutumes classiques :• Chanter en hébreu ou en français des

chants traditionnels comme hanérot ha-lalou et maoz tsour, des chants israéliens (téléchargeable sur notre site, www.beth-hillel.org)

• Mangerdeslévivot-latkes et des soufganiot.• Organiserun festindemets lactésà l’oc-

casion d’un allumage entre amis comme le font les sefardim.

• Joueravecunesévivon-dreidel.• Allumerdesbougiesdecireoud’huile,co-

lorées ou blanches, éléments qui sont ve-nus s’ajouter postérieurement à la fête.

Nouvelles tendances :• Allumernonpasavecdesbougiesdecire,

mais avec de petits récipients contenant de l’huile, si possible d’olive.

• Utiliser de petites boites transparentesqui protègent les bougies des intempéries, lorsqu’on met la Hanoukia à l’extérieur.

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JuDAÏsme

• Lirele«livredeJudith»ouracontersonhistoire. Judith est une héroïne associée à la fête de Hanouka, à la révolte des mac-chabées, une Ester de la fête des lumières.

• Créersoi-mêmeuneHanoukia imprégnée du symbolisme que vous-même attachez à la fête.

• Inviter des amis pour un allumage desbougies thématique.

• Participer ou vous impliquer dans l’al-lumage communautaire, contribuer à la construction sociale d’un judaïsme vivant.

Permettre à chacun d’amener sa vision propre à la construction de l’édifice juifComme le dit le Deutéronome (chap.30 v.14) : « Cette chose est très proche de toi, elle est dans ta bouche et dans ton cœur pour la réa-liser. » Il nous appartient donc de conjuguer ces différentes possibilités1. Nous pouvons en discuter en famille, avec nos enfants et amis, avec nos apikorsim, nos laïcs, nos réfractai-res à la tradition ou nos réfractaires au plu-ralisme, et même avec ceux qui s’imaginent que notre tradition est monolithique. Ne lais-sons personne affirmer que « c’est comme ça et pas autrement ». Si les makabim avaient agi de la sorte, cette fête si parlante et aimée n’existerait pas. Pour nous rassurer, l’étude est meilleure conseillère que l’enfermement et la rigidité. La solidarité, la vie communau-taire, la vie familiale, la beauté de nos cou-tumes, l’étude, nous portent et nous rendent forts et authentiques, fidèles à notre tradition dans l’amour, la volonté et la liberté. Il est temps d’inviter nos amis à partager le plaisir de cette façon traditionnelle de partager un judaïsme vivant.

Le message de Hillel, notre message, comme celui de Hanouka, est celui de la conscience, de la confiance, de l’espoir, de la flamme vi-vante. Ranimer pour de vrai la flamme de l’identité, c’est mettre sur le devant de la scène la question du pluralisme et de la res-ponsabilité.Hag Ourim SaméaH.

L’allumage « classique » Pour mieux connaître le sens des fêtes de façon géné-

rale, il est conseillé de se référer à l’excellent « Diction-

naire Encyclopédique du Judaïsme » au éditions Cerf/

Robert Laffont.

On achète une Hanoukia, lampe à huit branches plus une séparée, ainsi que de pe-tites bougies qui brûlent environ une demi heure.On dispose le chamach à l’endroit réservé à cet effet, et la bougie du premier jour tout à droite. Le deuxième jour on rajoute la bou-gie du deuxième jour à sa gauche, etc…À la tombée de la nuit, on place la Hanoukia près de la fenêtre, chacun allume son cha-mach, on récite les bénédictions concernant l’allumage :- BarouH ata adonaï élohénou mélèH

haolam acher kidechanou bémitsvotav vétsivanou léhadlik ner chel Hanouka. (Bénis sois-tu Eternel notre Dieu, Roi du monde, qui

nous a sanctifiés par tes commandements et nous a

commandé d’allumer les bougies de Hanouka.)

- BarouH ata adonaï élohénou mélèch haolam chéassa nissim laavoténou bayamim haèm bazeman hazé. (Bénis

sois-tu Eternel notre Dieu, Roi du monde, qui a fait

des prodiges pour nos ancêtres à leur époque, en ce

temps là.)

- (Premier soir : BarouH ata adonaï élohénou mélèH haolam chéhéHéyanou vékiyé-manou véhiguianou lazéman hazé. Bénis

sois-tu Eternel notre Dieu, Roi du monde, qui nous a

fait vivre, qui nous a maintenu et qui nous a fait attein-

dre ce moment.)

On allume les bougies en commençant par celle du jour, c’est-à-dire celle située la plus à gauche.On chante (imprimez notre livret de chant que vous trouverez en ligne sur notre site), on mange des pâtisseries cuites à l’huile qui rappellent l’histoire de la fiole d’huile ou des mets lactés qui rappellent l’héroïsme de Ju-dith, on joue à la toupie, on raconte des his-toire, on reste en famille autour des bougies de Hanouka. ■

1 Vous êtes invités à me faire part du résultat de ces discussions…

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le shofar

Why I am a progressive Jew – Shofar n°177 février 1996 - ...”I believe that our most important function as human beings is tikkun olam, the repair of the world. I should like to be able to say that Jews do this better. However, I have no evidence that the average Jew is any better or any worse than the average Sikh, the ave-rage Christian, the average Moslem or the average atheist. I do feel, perhaps subjecti-vely, that Judaism leads more naturally to a desire to improve the lot of our fellow human beings… My training requires me to make decisions and to form an opinion based on the eviden-ce and the experience which I have, rather than to accept uncritically the views on what in French is called a “maître à penser”. As a university teacher I have always encouraged students to believe that, failing proof to the contrary, the professor is usually wrong. The evidence on which I base my views and my

A la mémoire de Geoffrey King z˝ l Extraits de textes

Nous reproduisons ci-dessous quelques extraits de textes parus dans le Shofar sous la plume du professeur Geoffrey King qui nous fit l’honneur d’en diriger l’équipe de rédaction durant deux années, de juin 1996 à l’été 1998. Nous garde-rons de cette période le souvenir ému d’un homme à l’humour d’outre-Manche décapant et qui exprimait ses convictions -aux accents souvent féministes- d’une voix tonitruante qui restera longtemps gravée dans nos mémoires. Puissent ses filles, à travers ces quelques lignes, trouver ici le témoignage de no-tre gratitude pour tout l’ouvrage accompli avec compétence et dévouement par leur père au sein de la synagogue Beth Hillel durant de nombreuses années.

Jacqueline Wiener

actions includes not only what I have heard, what I have seen and what I have read but also inspiration which I hope comes from God…I cannot accept that God gave his laws, in the form of the Pentateuch, to Moses on Si-nai and then switched off all communication with human. There is a tendency in orthodox Judaism to believe that the older an idea is, the more important it is. Thus, the Penta-teuch is more important than the prophets… and modern thinkers have little or nothing useful to say. I believe in progressive revela-tion. God speaks to each one of us if we are only prepared to listen. While we must learn from our predecessors and stand, as it were, on their shoulders, each of us has a duty to study, to listen to the word of God and to de-cide for herself/himself what is important for being a good Jew…I should like to quote here the late Rabbi Is-rael Mattuck who, when told that the Liberal

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JuDAÏsme

Judaism is a religion of convenience, said: “Yes. “Convenience” comes from the Latin con venire –to come with. Liberal Jews do indeed try to come with God, to come with the time”…I believe in the importance of study. However, if we study the works of the sages without applying the results of this study to our lives we might as well live as monks or nuns as we would be taking from God without giving anything in return… It seems to me that, if we study only to improve our minds and not with the aim of tikkun olam, we are guilty of what the late rector of the Catholic Univer-sity of Leuven described as intellectual mas-turbation…”

Pessach : fête de la liberté ? – Shofar n° 179 avril 1996- « Dans la Haggadah, on nous enjoint d’en-seigner à nos enfants que nous étions des étrangers au pays d’Egypte et qu’il faut ac-cueillir l’étranger chez nous… Abram était parti en Egypte parce qu’il y avait la fa-mine à Canaan (Gen.12 :10) ; actuellement, on l’appellerait un immigré économique. Aujourd’hui, dans l’Union Européenne, on a tendance, pour des raisons diverses, à refu-ser l’entrée à de tels immigrés et aux deman-deurs d’asile. Dans plusieurs pays de l’U.E, il existe des projets de loi qui, s’ils étaient adoptés, augmenteraient encore les difficul-tés qu’ont les candidats immigrés à s’établir dans les pays de l’U.E. En effet, si de telles lois avaient été en vigueur il y a un siècle, le grand-père du ministre de l’intérieur de mon propre pays, lui-même juif, n’aurait pu s’installer au Royaume-Uni. Est-ce que tout cela nous regarde ? Après tout, ces réfugiés ne sont pas des nôtres… La paix est indivi-sible. La liberté l’est aussi. Il faut que nous, en tant que communauté, soutenions les protestations contre l’ostracisme. J’entends dire : « protester, c’est ce que font les gau-chistes et les révolutionnaires ; nous som-mes des gens bien et nous devons nous tenir à l’écart ».

Il y a deux ans, j’étais en Allemagne pour la semaine de fraternité entre juifs et chré-tiens. Quelques jours plus tôt, des logements de travailleurs immigrés avaient été incen-diés par des néo-nazis. J’ai eu l’honneur de pouvoir assister à une des manifestations antiracistes qui ont eu lieu ce week-end là, dans beaucoup de villes allemandes. Quand j’ai demandé à une dame catholique si elle allait participer à la manifestation, elle m’a répondu : « Non, ce sont tous des gauchis-tes ». Elle faisait partie des « gens biens ». C’était ces « gens biens » qui, plutôt que de s’associer avec ceux qui luttaient contre les nazis, avaient permis à ces derniers de venir au pouvoir… »

Juifs et chrétiens en Allemagne – Shofar n° 200 juillet/août 1998- « Chaque année, le « Deutsche Koordinie-rungsrat » DKR organise la « Semaine de la Fraternité » en Allemagne. Il s’agit de la fra-ternité entre chrétiens et juifs. Cette pratique a commencé en République Fédérale Alle-mande où les habitants sont, depuis bien des années, sensibilisés aux atrocités nazies et à l’acquiescement tacite d’une grande partie de la population vis-à-vis de ces actes. La men-talité était autre en république Démocratique Allemande et en Autriche où ce sentiment de culpabilité collective n’existait pas. Dans le premier cas, « parce que tous les nazis avaient été éliminés par les Soviétiques et il ne restait que des « innocents » », et dans l’autre, parce que « tout ce qui s’y était passé était la faute des envahisseurs nazis contre le gré de la population ». Depuis la réunifica-tion de l’Allemagne, les « länder » orientaux s’associent à la Semaine de la Fraternité et organisent eux-mêmes des activités dans ce cadre… Nous avons assisté à l’ouverture de la Semai-ne à Marburg, au cours de laquelle le rabbin Prof.Peter Levinson parla du libre choix : chacun de nous doit choisir entre le bien et le mal et personne d’autre ne peut faire ce choix à notre place…

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le shofar

Nous étions aussi présents à la consécration de la synagogue restaurée de Roth, petit village d’environ 600 habitants situé à une dizaine de kilomètres de Marburg. Cette sy-nagogue avait échappé aux feus de la Kris-tallnacht parce que cela aurait endommagé les bâtiments contigus. La question avait été posée : « à quoi pour-rait servir une synagogue s’il n’y a plus de Juifs ? » Un musée risque de donner l’impres-sion de quelque chose d’éteint, comme les na-zis souhaitaient le faire en créant un musée de Judaïsme à Prague. Par contre, un lieu où on pourrait expliquer, surtout aux enfants

des écoles, ce qui est arrivé aux copains de classe de leurs grands-parents ou arrière-grands-parents, qui y priaient et qui habi-taient les mêmes rues, semblait beaucoup plus parlant que des chiffres… Le fils américain d’un des survivants a of-fert dix kippot et dix siddourim allemand/hébreu, afin que si dix adultes Juifs se trou-vent à la synagogue, on puisse prévoir un office. Des enfants de l’école communale ont allumé 43 bougies en souvenir des qua-rante-trois membres de cette communauté, mortes dans la Shoah… » ■

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JuDAÏsme

La fête d’anniversaireLa surprise fut totale. Rabbi Dahan ne se dou-tait de rien lorsqu’il entra dans la salle de prière le dimanche 9 septembre à 13 heures. La salle était pleine à craquer. La com-munauté entière de Beth Hillel s’y était réunie pour fêter son septantième an-niversaire. L’émotion fut forte, à certains moments, même en overdose. Cela avait été un tour de force de faire venir Rabbi Dahan à la synago-gue ce dimanche midi là, où il n’avait aucu-nement l’intention de se rendre. Le dimanche matin, il avait assisté à l’inauguration d’une pierre tombale à Anvers. Emmanuel (‘Manu’) Wolf était venu le chercher pour le ramener à la maison. Arrivés à Bruxelles, Manu dit soudainement, in-voquant une raison obscure, qu’il devait se rendre d’urgence à la synagogue mais qu’il avait oublié la clef et il demanda à Rabbi Dahan de lui ouvrir la porte. Le plan se déroula comme prévu. Pour couron-ner les quarante ans de dévouement à notre synagogue, la communauté de Beth Hillel lui offrit un kos de kiddouche. Décidément, les membres de notre communauté aiment Rabbi Dahan de tout cœur.

Aimer et faire aimer le judaïsmeC’est peu dire que cette reconnaissance soit mé-ritée. Tout d’abord parce que Rabbi Dahan est rabbin pendant chaque minute de sa vie. Il a tou-jours du temps à vous ac-corder. Je lui ai souvent demandé si sa disponi-bilité inconditionnelle au service de la commu-

nauté de Beth Hillel ne le fatiguait pas trop. Il répond qu’il aime ce qu’il fait et que faire aimer le judaïsme, c’est son bonheur. Un jour, il m’a dit quelque chose de très émouvant qui me semble indiquer le fil conducteur de sa vie: « Chaque fois que j’étudie, chaque fois que j’aime, chaque fois que je fais aimer, je re-signe le contrat avec Dieu, c’est comme

si j’étais au Sinaï.»1 On le croirait volon-tiers.

Sommes nous « dahanistes » ?Il y a des gens qui disent que nous sommes une syna-

gogue « dahaniste ». Une telle affirmation est saugrenue, car elle sous-entend que Rabbi Dahan aurait établi une doctrine. Il ne l’a pas fait ; il n’a jamais eu l’ambition de faire avaler aux autres des idées faites de toutes pièces. Un rabbin est un interprète – au sens

Rabbi Dahan a septante ans !Par ralph bisschops, Dr.phil.

1 Toutes les citations qui figurent dans cet article ont été prises des interviews déjà enregistrés en vue de la publication d’un

livre qui retracera le cheminement de la pensée de Rabbi Dahan.

« Chaque fois que j’étudie, chaque fois que j’aime, chaque fois que je fais aimer, je re-signe le contrat

avec Dieu, c’est comme si j’étais au Sinaï. » Rabbi A. Dahan

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le shofar

musical – de la tradition. Or il existe d’innombrables fa-çons de jouer la même par-tition, seuls les très grands interprètes musicaux en sont conscients. Le génie de Rabbi Dahan consiste à per-cevoir une mélodie jamais entendue auparavant à l’œuvre dans les ré-cits de la Bible et de la Michna. Bien entendu, beaucoup, même la plupart de ce qu’il dit se retrouve également ailleurs, chez d’autres commentateurs, chez d’autres rabbins. La partition reste la même. Et néanmoins, les commentaires de Rabbi Dahan sont en même temps tellement différents, tellement nouveaux qu’à les entendre, on croirait le ciel s’ouvrir pour la première fois. Ce n’est pas une question d’originalité. En enseignant, Rabbi Dahan n’émet pas des idées nouvelles, il dit tout simplement ce que son oreille inté-rieure entend quand il ouvre une page de la Torah ou du Talmud. Ainsi travaillent les ar-tistes. Et à en croire un philosophe allemand, le vrai génie réside dans l’art de ne rien in-venter et de s’éclipser dans l’écoute attentive et soutenue.

La tradition orale selon Rabbi DahanQuelle est la mélodie qu’il entend? On ne peut pas résumer une manière de commen-ter les textes comme on résume une doc-trine. Mais il existe quelques constantes. Dans l’optique de l’exégèse orthodoxe, la fonction primordiale de la tradition orale (Torah she-baal peh) consisterait à faire harmoniser les contradic-tions contenues dans la Torah. Celle-ci serait intrinsèquement parfaite et « descendue du ciel ». Pour Rabbi Dahan aussi, la Torah est descendue du ciel, à cette différence près qu’il la ressent comme un météorite brûlant et angoissant. Une pierre brute qu’il s’agit de

sculpter. Ce sculptage, c’est l’œuvre de la tradition orale. Pour utiliser ses propres mots: «Le midrash m’a ap-pris qu’il faut construire le texte, pour que le texte nous construise.» Un des thèmes qui illustrent

la spécificité de la lecture de Rabbi Dahan par rapport à celle de l’orthodoxie courante est l’interprétation de l’histoire de Ruth la Moa-bite. L’orthodoxie enseigne que Ruth aurait pu rejoindre le peuple juif parce que le verset (Dtn. 23, 4) : « L’Ammonite et le Moabite ne seront pas admis dans l’assemblée du Sei-gneur » ne se réfèrerait qu’aux descendants mâles de ces tribus. Comme cette restriction est une donnée talmudique et non pas bibli-que, la tradition orale apparaît ici comme une manière de préserver l’autorité de la Torah . Pour Rabbi Dahan, par contre, l’insertion de livre de Ruth dans le canon biblique fut une acte de contestation contre la condamnation en bloc d’un peuple entier et un signal sans équivoque de la part des rabbis que nos vies, «c’est nous qui la gérons.» Dans le même es-prit, il dit : « Dieu, à la limite, c’est nous qui le suscitons, qui le faisons naître par le chemin que nous choisissons.»

Témoin d’un passé heureuxNombreux sont ceux qui ont perçu Rabbi Abraham Dahan comme pro-vocateur de l’ortho-doxie. Il a pourtant

toujours précisé qu’il ne visait qu’une certai-ne orthodoxie. Ce n’est certainement pas l’or-thodoxie oxygénée dans laquelle il a grandi au Maroc. Comme beaucoup de grands per-sonnages, il n’est pas dans l’air du temps et encore moins à l’avance de son temps. Rabbi Dahan est le témoin d’un passé heureux où la mouvance théocratique était inexistante et où être juif signifiait, avant tout, avoir une

« Dieu, à la limite, c’est nous qui le suscitons, qui le faisons naître par le chemin que nous choisissons.»

Rabbi A. Dahan

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JuDAÏsme

« tête claire. » Bien en-tendu, il est tributaire du vocabulaire anti-autori-taire des années soixante, dans la mesure où celui-ci exprime la soif de la li-berté. Alors que le tradi-tionalisme guette surtout la déviance de la norme, Rabbi Dahan a reconnu très tôt que la tenta-tion d’obéissance religieuse peut être aussi forte et aussi destructrice que celle qui mène à l’assimilation. La valorisation excessive de la notion du « joug de la Torah » le met mal à l’aise. « Évidemment » dit-il «dans toute loi, il y a une restriction, mais quand ces limita-tions deviennent tellement exacerbées qu’el-les deviennent caricaturales, elles détruisent l’objet même de leur existence. L’éclat de la lumière ne traverse plus. »

La pulsion vers l’humainPar le terme « dahanisme » l’on désigne, bien entendu, également sa manière de vivre et d’ enseigner le Judaïsme Libéral. Il aurait moins dérangé s’il avait débité les déclarations so-lennelles et exsangues de certaines autori-tés du mouvement Reform. On ne sait quoi penser d’un Rabbin soi-disant libéral qui n’a jamais caché à personne son enracinement dans le judaïsme sé-farade. Là encore, son talent d’inter-prète surprend et émerveille. Comme certains pianistes qui savent révéler le génie de sonates que l’on croirait ternes, Rabbi Dahan a confé-ré au Judaïsme Libéral un lyrisme qui ne lui semblait pas inhérent. A l’écouter, on oublie le développement cahoteux de ce mouve-ment qui se fit dans des pays protestants, sous des ciels nordiques et nuageux, pour ne retenir qu’une pensée qui coule de source et qui est l’élan même de l’âme juive, sa « pul-sion vers l’humain ». Elles sont rares, les per-sonnes qui savent vous expliquer le Judaïsme

Libéral d’une telle manière. Ici encore, le terme « daha-nisme » sonne faux. « Da-hanien » irait déjà mieux, comme par exemple le mot « fellinien » (pour le cinéaste F. Fellini) : il dési-gnerait un regard posé sur les choses. Un regard, dont

on ne peut qu’espérer qu’il fasse école.

Le rite intérioriséLe rite, c’est le solfège de la religion. Il n’y a que les charlatans qui prétendent que l’hom-me peut devenir meilleur tout en brûlant les étapes. Le mouvement libéral a parfois cédé à la tentation d’abroger les directives de la tradition. C’est un piège que, peut-être grâce à sa très vaste connaissance talmudique, Rabbi Dahan a contourné. Tout en se refu-sant à l’utilisation du terme « halakha » pour désigner son approche, Rabbi Dahan tente avant tout de dégager le sens originel des lois qui consiste, à ses yeux, dans le « sculptage progressif de l’être humain ». C’est ce qui donne à sa manière de vivre le judaïsme un caractère « dépouillé », qui déroute certains. C’est un judaïsme intériorisé qui se passe des gestes et surtout de l’ostentation. « L’intério-risation » est un des maîtres-mots du Judaïs-

me Libéral, mais je me suis souvent de-mandé ce qu’il veut dire concrètement. Ce n’est que grâce à Rabbi Dahan que cette notion d’inté-riorisation, avec la-

quelle on jongle aisément mais qui en réalité est très difficile à saisir, a pris corps à mes yeux. Mais c’est aussi un idéal presque im-possible à atteindre, comme en témoignent les mots suivants, où il semble laisser tout derrière lui: « Qu’est-ce que c’est la tradition ? Ce sont les repères ; il n’y a pas de mots. Mais rien n’est neutre. Il n’y pas un instant vide. L’instant le plus vide n’est pas vide. Dans cha-que chose, il y a un frémissement. » ■

« Rabbi Dahan a conféré au judaïsme libéral un lyrisme

qui ne lui semblait pas inhérent »

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le shofar

Dracha de Samuel Vlodaver… « Ma paracha s’appelle émor, tirée du livre du Lévitique, le troisième des 5 livres de la To-rah. Elle parle de deux types de choses très différentes: d’une part, elle détaille les règles que les prêtres doivent suivre. D’autre part, elle parle des différentes fêtes observées par le peuple juif.La première partie est assez surprenante. C’est un peu compliqué, ces règles semblent très strictes et étranges pour les hommes d’aujourd’hui. Il m’a fallu pas mal de réflexion pour comprendre le sens de certaines de ces règles, et quelques unes me posent encore pro-blème.Le prêtre, par exemple, ne peut pas enterrer son père ou sa mère. Comment dans ce cas là, peut il rendre un dernier hommage à ses parents? Est ce qu’on ne dit pas dans les dix commandements, ou dans plutôt les dix paro-les, «honore ton père et ta mère»? (Exode et Deut). Le devoir d’honorer ses parents est un commandement que l’on comprend bien et qui est très important. Le rédacteur du Lévitique aurait-il oublié ce qui est écrit dans l’Exode et le Deutéronome?C’est vrai, notre torah est pleine de contradic-tions, elle prend vraiment tout son sens quand on l’étudie à la lumière de l’enseignement oral, tout ce qui est transmis, sans être écrit, au cours des générations. Je ne pense pas que le rédacteur du Lévitique ait oublié le 5 ème commandement. Je pense qu’il a voulu ré-pondre à un principe plus important. Rappe-lons qu’il s’agit d’un cas particulier, celui des Cohanim. Leur rôle est tellement important que cela justifie cette exception. Le Cohen a des responsabilités très importantes, on peut avoir besoin de lui à tout moment, il est le ga-rant et le protecteur de la dynamique de vie. Aujourd’hui comme autrefois, il nous arrive de ne plus savoir quoi faire de nos vie, on peut

Nos Bné Mitsva

être déprimé, on peut en avoir marre, perdre espoir. Les problèmes nous font parfois tout abandonner. Comment réussir à remonter la pente? Comment redevenir ami avec ma vie? Chacun a sa propre façon.Une de ces façons est d’aller voir un psy et jus-tement, les Cohanim sont un peu les psys de l’époque. Je voudrais l’être plus tard. De toute façon, cela ne peut pas se faire seul et dans le temps, le Cohen était la personne toujours disponible pour aider. C’est pour cela qu’il ne peut pas être en contact avec la mort.Le Cohen n’a pas qu’un rôle de psy, il a aussi un rôle de professeur. Il doit faire en sorte que les gens n’aient pas besoin de venir le voir trop souvent pour résoudre des problèmes graves. Mieux vaut prévenir que guérir. C’est aussi à ça que servent les fêtes qui sont mentionnées à la fin de ma paracha.Chabbat, le 7eme jour de la semaine ,le jour de repos, un jour qui est fait pour se détendre et évacuer le stress accumulé pendant la se-maine. Mais chabbat est aussi une marque de notre liberté car quand on était esclaves en Egypte, on n’avait pas le droit d’avoir des jours de repos. Justement, la fête suivante est pes-saH, la liberté, la sortie d’Egypte.Rabbi Chinsky m’avait posé une question à ce sujet là: est-ce plus important pour un peuple d’être libre ou d’être créé? Je pense que c’est les deux: cela ne sert à rien d’être créé si nous ne sommes pas libres. La période du Omer, qui est expliquée ensuite, est celle où on amenait les prémices des récoltes au Temple, où on se réjouissait du travail accompli et où on en fai-sait profiter les autres.Chavouot, ensuite, rappelle le don de la Torah sur le mont SinaÏ. C’est bien d’être créé, c’est bien d’être libre; mais il faut aussi avoir quel-que chose à faire, un but. Fixer ce but, c’est quelque chose de progressif. Mon but à moi, c’est de plus m’impliquer religieusement.

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JuDAÏsme

Roch Hachana et Yom Kipour, c’est un nou-veau départ, c’est un moment où on essaye de se faire pardonner et de se pardonner à soi-même les fautes que l’on a commises. On le fait en s’excusant auprès des personnes qu’on a blessées, en comprenant son erreur et en la réparant.Avec ces fêtes, on essaye de se créer une vie pleine de liberté, d’amitié et de sens. Les fêtes appartiennent à tout le monde. Contrairement au statut de Cohen, elles sont accessibles à tous.Pour conclure, je voudrais citer le midrach de Rabbi Chimon bar YoHai. Il dit justement qu’il y a trois couronnes qui ornent la tête des enfants d’Israël: celle de la Torah, celle de la prêtrise et celle de la royauté. Bien qu’il y ait des rois, des prêtres et des sages, chacun doit considérer qu’il a la dignité d’un roi, l’impor-tance d’un prêtre et la capacité d’atteindre la sagesse. D’après Rabbi Natan, de ces trois couronnes, la plus importante est la ...quatriè-me: celle de la bonne renommée. C’est le fait d’avoir une bonne réputation, d’être reconnu comme quelqu’un de droit… » Dracha de David Cepolowicz …. « VAYERA signifie : il lui apparut. Dieu ap-paraît à Avraham le troisième jour suivant sa circoncision dans les plaines de Mamré. Avra-ham voit trois hommes et leur offre l’hospita-lité. L’un des voyageurs (qui sont en fait des anges) lui annonce que dans un an, sa femme, Sarah, donnera naissance à un fils. Sarah qui avait entendu leur conversation rit, comme Avraham dans la paracha précédente. Dieu dit à Avraham qu’il a l’intention de détrui-re les villes de Sodome et Gomorrhe car elles sont corrompues. Avraham plaide en faveur des deux villes et s’accorde avec Dieu que si il trouve dix justes, il ne détruirait pas les villes. Seul Loth accueille avec hospitalité les deux anges et les protègent de la foule hostile. Il lui révèle que les villes vont être détruites et qu’il doit fuir avec sa famille. Il lui dit également que personne ne doit se retourner au cours de leur fuite au risque de se transformer en statut de sel.

La femme de Loth se retourna et fut transfor-mée en statue. Loth et ses deux filles se réfu-gient à Tsoar, dans une caverne, croyant être les seuls survivants de la terre ; elles partagent la couche de leur père et mettent au monde deux fils qui seront les pères des nations de Moav et D’amon. Avraham s’en va à Guerah où règne Avimeleh et fait passer Sarah pour sa sœur qui se fait enlevée par Avimeleh. Dieu avertit ce dernier qu’il doit rendre Sarah à son époux sans quoi il mourra. Dieu se souvient de sa promesse et donne un fils à Sarah : Isaac (qui signifie rira, en Hébreux : yitshak ).Isaac est circoncis à huit jours ; Avraham a, alors, cent ans et Sarah nonante ans. Avra-ham chasse Agar et Ismaël à la demande de Sarah. Dieu avait dit à Avraham : « Tout ce que dira Sarah, écoute sa voix ». Il avait également promis qu’Ismaël serait le père d’une nation. Dieu vient donc au secours d’Ismaël et d’Agar et les sauve du désert en leur montrant un puit. Dieu veut mettre Avraham à l’épreuve en lui demandant de sacrifier son propre fils Isaac sur le Mont Moriah.Isaac est liée sur l’autel et au moment où il va le sacrifier, une voix lui commande de s’ar-rêter et lui dit : « Maintenant, je sais que tu crains Dieu ! ». Avraham apprend alors la naissance de Re-becca, fille de son neveu Bethouel. Rebecca deviendra l’épouse de Isaac, la chaîne de la tradition est nouée.Je vais maintenant vous parler d’un sujet qui m’a surpris et un peu choqué : la lutte d’Avra-ham en faveur de Sodome et Gomorrhe.Je me suis demandé pourquoi et comment Dieu peut-il faire une telle chose ? Pourquoi le dit il à Avraham, pourquoi la bible nous le dit, pourquoi nous le dit il ? Je pense que c’était pour tester Avraham, pour voir si il le laisserait faire ou si il dirait quelque chose. Pour voir donc si Avraham s’oppose à lui, c’est important car dans les villes il y a des vies humaines.Nous avons trouvé comme réponse que juste-ment, pour préserver des vies humaines, on DOIT transgresser tous les autres commande-ments. Il y a d’autres exemples de villes me-

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nacées de destruction : Jonnas qui annonce la destruction de Ninive et finalement les habi-tants prennent consciences du problème et le corrigent. On lit ça à Kippour.C’est vrai, j’ai été choqué de la destruction des villes, mais Avraham aussi a été choqué.Mais alors pourquoi on nous raconte cette histoire ? C’est parce que c’est important d’être choqué par ça, sinon cela veut dire qu’on ne chérit pas la vie humaine. Pour moi, la vie humaine est le plus important . Je pense qu’à la fin, Avraham comprend qu’il n’ a pas le choix, parce que les gens sont trop méchants.Je me suis demandé pourquoi Avraham ne dit rien quand il s’agit de son fils, d’un innocent ? Il se fatigue plus pour des étrangers que pour son fils, plus pour des criminels que pour un innocent ? Je pense que pour son fils, il se sent plus obligé, il a confiance en Dieu car il sait que Dieu veut qu’il ait une descendance et que Dieu veut le tester et non la mort de son fils.Il se sent obligé également parce que c’est une affaire personnelle. C’est parfois plus fa-cile de défendre les autres que de se défendre soi-même. Par exemple, pour faire partie d’un groupe, on essaye de trouver des points com-muns. Dans certains groupes, il faut prouver son courage en faisant comme les autres des choses terribles, comme en frappant d’autres personnes, voler, … en faisant des choses contre la loi.Dans un groupe comme ça, ce qui est coura-geux c’est de dire NON.Mais comment Avraham peut-il s’intégrer au groupe des nations ? En acceptant leur règle qui consiste a sacrifier son enfant à Dieu ? Mais Avraham doit-il le faire ? Dieu lui dit de le sacrifier ; Avraham prouve ainsi qu’il en est capable tout comme les autres. Mais il a sur-tout le courage de s’arrêter au bon moment et d’ouvrir un autre chemin pour les nations. Il faut savoir s’arrêter et refuser les comporte-ments destructeurs, la vie passe avant tout. Ma conclusion est que si Avraham ne proteste pas pour son fils alors qu’il parle avec Dieu à propos de Sodome et Gomorrhe, c’est parce qu’il comprend que son épreuve est nécessaire

pour imposer l’interdit de sacrifier son enfant à un Dieu.Donc encore une fois, la vie humaine est le plus important.Je vais maintenant vous parler du rire. Pour moi, le rire intérieur d’Abraham n’est pas celui de l’étonnement. Son rire est un rire de joie à l’annonce d’une descendance.Néanmoins, il avait un doute…Le rire de Sarah était un rire de joie et de fé-licité, celui d’une guérison d’une stérilité, un rire de plénitude. En revanche, le rire de ses voisins est peut-être un rire de jalousie, et ce-lui d’Ismaël est un rire amer : il doit mainte-nant partager l’affection de son père avec son nouveau demi-frère.En conclusion, pour moi, le rire c’est impor-tant : il permet d’avoir du recul sur soi et dans la vie, il aide à avancer ».

Dracha de Naomi Aguilera … « Ma Paracha se nomme Toledoth. Toledot signifie génération, enfantement, transmis-sion de l’identité juive.Elle raconte une partie de la vie d’Isaac et de sa femme Rebecca lorsqu’ils vivaient chez les Philistins.Isaac avait 2 fils : Esaü et Jacob. Jacob, le jumeau cadet était un homme bon qui vivait dans les tentes. L’enseignement oral nous dit qu’il aimait l’étude. Esaü, était un chasseur, un homme des champs. Il n’avait pas le goût pour les études. Il avait deux femmes qui n’avaient pas la sympathie d’Isaac et de Rebecca.Ma Paracha raconte comment Isaac voulut donner, à la fin de sa vie, sa bénédiction à son fils. Pour lui, elle revenait à son fils Esaü.Isaac pensait qu’Esaü, fils aîné, était digne de recevoir cette Bénédiction. Esaü était un homme qui obéissait à son père et donnait tous les signes d’être un bon fils et semblait donc digne de recevoir cette béné-diction. Or, sa mère Rebecca, en pensait tout autrement. Elle estimait que le plus jeune frère jumeau, Jacob, devait recevoir cet hommage car il en était plus digne. Il était plus proche de l’ensei-gnement d’Abraham.

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JuDAÏsme

Jacob aimait les valeurs morales, spirituelles.Esaü aimait tout ce qui se rapportait aux cho-ses matérielles.Peut être qu’en tant que femme et maman, elle savait mieux lire dans le cœur de ses fils ? Je crois que les papas peuvent avoir ce don aussi ; mais ce qui me fait plaisir dans ce pas-sage ; c’est de voir combien la femme joue un rôle important…. Et que son avis ne compte pas pour…des prunes !!Rebecca, réussit donc à changer le cours de l’histoire. Elle prépara un repas délicieux et déguisa Jacob pour que celui-ci ressemble à son frère. Isaac était très vieux et aveu-gle. Et Isaac, tout grand homme qu’il fut, se trompa.C’est en effet à Jacob que reviendra la béné-diction paternelle. Son frère Esaü réussit, après, à recevoir une bénédiction matérielle. Avoir des biens, c’est en fait très agréable, et on recherche tous cela, moi y compris. La volonté d’Esaü est bien compréhensible. Seu-lement, elle devient négative si on passe tout son temps à vouloir récolter des choses et des richesses. C’est justement cela, l’idolâtrie, quand les choses comptent plus que les gens. Notre tradition nous enseigne que le respect de la personne est le plus important.Isaac a reçu une bénédiction qui demande un effort moral pour pouvoir la conserver. Mais en réfléchissant, elle est bien plus intéressan-te. Il s’agit de conserver et de transmettre nos valeurs et notre histoire.Il semble étrange que Rébecca ait agi de façon différente de ce que prône la tradition, selon laquelle le fils aîné reçoit la bénédiction. Il semble étrange que ce soit une femme qui ait pris la décision. Si j’avais été à la place de Ré-becca, ce n’est pas sûr que je l’aurais fait, je n’y aurais peut-être pas pensé, je ne l’aurais peut-être pas osé. Les femmes de la Bible sont vraiment des pionnières !Rebecca prend vraiment ses responsabilités, elle oblige presque Jacob à agir. Elle veut que l’héritage juif passe par Jacob. Cet héritage est-il vraiment une bénédiction ? A travers

l’histoire, le peuple juif a vécu des moments terribles.Rebecca pense que c’est malgré tout une bé-nédiction, mais pour le cas où ce serait une malédiction, elle est prête à assumer. Lorsque Jacob craint que la mise en scène tourne mal, Rebecca lui répond : « Je prends sur moi ta malédiction, mon fils, obéis seulement à ma voix et va me chercher ce que je te dis. » (Gen. 27 : 13) Elle est prête à porter la bonne partie de l’histoire et à supporter les difficultés. Pen-dant 21 ans, son fils sera loin d’elle. Pendant 21 ans, elle se demandera si elle a eu raison et si la bénédiction a porté ses fruits. 21 ans plus tard Jacob reviendra, il aura pris le nom d’Israël, et Rebecca saura enfin qu’elle a eu raison et que la bénédiction s’est accom-plie.C’est un peu comme la BM : il faut prendre ses responsabilités. On devient adulte, on n’est plus vraiment le « chouchou à sa maman ». Moi personnellement, en faisant ma BM, j’ai fait un peu comme Rébecca en osant faire quelque chose d’un peu novateur. L’avenir du peuple juif repose sur les jeunes, autant les filles que les garçons, et je suis contente de compter désormais dans la communauté… » Dracha de Nathan Sélik … « Ma paracha se trouve dans la Genèse cha-pitre 14. Elle s’appelle « leH leHa ». LeH leHa veut dire : pars pour toi, cela ressemble à oleH qui veut dire aller. Elle raconte l’histoire des Patriarches, depuis le départ d’Abram jusqu’à sa circoncision et son changement de nom d’ « Abram » en « Avraham ». La tradition nous enseigne que quand on change de nom ou de lieu, on change de vie, on a une nouvelle chan-ce, on commence quelque chose de nouveau. Ce n’est pas pour rien qu’Avraham sera le fon-dateur des trois monothéismes. Ca veut dire que quand on part, comme Abram, d’un endroit qu’on connaît pour un endroit inconnu, on doit aller quelque part mais on ne sait pas où, ça peut faire peur car on ne sait pas où on va s’arrêter. Voici les différentes étapes du voyage d’Abra-ham : Premier étape : Abram, Saraï et Lot

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quittent Haran et partent pour une destina-tion inconnue qui sera la terre de Canaan Deuxième aventure d’Abram : Abram ar-rive en Canaan, il descend en Egypte. Là, il se rend compte que Saraï, sa femme, est d’une grande beauté. Il a peur que Pharaon veuille épouser Saraï et le fasse assassiner. Il demande alors à Saraï de dire qu’elle est sa sœur. Quand ils entrent en Egypte, Pharaon veut prendre Saraï pour femme mais Dieu envoie des plaies sur la maison du pharaon. Ce dernier comprend alors que Saraï était la femme d’Abram et leur demande de partir. Troisième voyage : Abram remonte vers Ca-naan. Des disputes commencent entre les bergers d’Abram et ceux de Lot. Pour évi-ter cela, Abram dit à Lot : « Séparons-nous ; si tu vas à droite, j’irai à gauche ; si tu vas à gauche, j’irai à droite ». Lot s’installe à So-dome et Gomorrhe, sur les rives du Jourdain. Quatrième voyage : Lot est fait prisonnier de guerre. Abram va délivrer Lot. Le roi de Jérusa-lem, Melkitsédek, va à sa rencontre et le bénit, en disant « Béni soit Abram par le Dieu Suprême ». Cinquième voyage : Ce voyage n’est plus un voyage dans l’espace mais dans l’identité. Abram avait 99 ans quand Dieu lui annonce qu’il doit changer son nom de « Abram » en « Avraham » et que « Saraï » ne doit pas être appelée « Saraï » mais « Sarah ». Dieu lui dit qu’il doit également se circon-cire, lui et tous les hommes de sa famille, comme signe de l’alliance qui l’unit à Dieu. Dieu dit à Abraham que Sarah aura un fils l’année suivante, et qu’il s’appellera ItsHak. Abraham (comme Sarah dans la paracha Vayéra) rit à l’annonce de cette nouvelle. Les voyages, le changement de nom, la cir-concision, sont des signes de la possibilité de changer, de créer quelque chose de nou-veau, d’avoir une nouvelle descendance : ItsHak, le deuxième de nos Patriarches. L’Alliance, c’est exactement ça : être comme Dieu capable de créer le monde. Même quand on ne croit pas en Dieu, on peut comprendre que l’homme a une capacité merveilleuse de création. Nous construisons des ordina-

teurs, des téléphones, la chirurgie, etc… Pour ma part, je ne suis pas certain de croi-re en Dieu. Pour dire « je crois en Dieu », il faudrait déjà savoir ce que ça veut dire « Dieu » ; or on ne connaît pas son nom, que seul le grand prêtre prononçait ! De plus, il est interdit de se faire des images de Dieu, interdit de le définir ! D’ailleurs, je veux vous lire le verset 7 du chapitre 17 de notre paracha : « Vehakimoti èt briti béyni oubey-neHA … liyot léHa lélohim…»La traduction du rabbinat français dit : « Cet-te alliance établie entre moi et entre toi et ta postérité dernière, je l’érigerai en alliance per-pétuelle étant pour toi un Dieu comme pour ta postérité après toi ». Qu’est-ce que cela si-gnifie, « étant pour toi un dieu » ; cela veut-il dire que notre dieu n’est pas « THE » dieu, mais qu’il joue le rôle d’un dieu ? En hébreu on dit « liyot léHa lélohim », et on peut aller plus loin encore que le rabbinat et traduire « étant pour toi ‘comme’ un dieu ». Comme un dieu, mais pas vraiment un dieu. Car notre « dieu » est différent de celui des autres nations. Ce en quoi je crois est aussi différent de ce qu’on imagine quand on dit le mot « dieu ». Ce en quoi je suis certain de croire, c’est en la liberté humaine. Justement, le premier des Dix Com-mandements est celui là : « Je suis l’Eternel ton dieu qui t’ai fait sortir du pays d’Egypte, de la maison des esclaves ». Justement, Abraham est un symbole extraordinaire de la liberté. On l’appelle Abraham haivri, fils de ever, celui qui traverse. Justement, je suis un Hébreu. Le troisième patriarche est Jacob qui change lui aussi de nom et devient « Israël ». Justement, je suis un enfant d’Israël. Le peuple juif a traver-sé le temps, l’espace, les épreuves, en n’étant non pas des Juifs errants mais des Juifs voya-geurs. De même, la halaHa, « loi juive » est sur la même racine que le mot haliHa « chemine-ment ». En devenant « fils du commandement », bar mitsva, je deviens « enfant du voyage » ! En chemin, on avance pour aller à une destina-tion. Quand on fait sa bar mitsva, on passe de l’enfance à une plus grande maturité, et c’est aussi un cheminement très important… » ■

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JuDAÏsme

Commençons par nous demander quelle est, au juste, l’importance de l’éthique dans le ju-daïsme. Il y a deux opinions à ce sujet, celle des Prophètes, d’une part, celle des Phari-siens et des rabbins, d’autre part.

Primauté de l’éthiqueSelon l’opinion des Prophètes, que le judaïsme libéral a réaffirmée à l’époque moderne, le Dieu d’Israël, qui est aussi le Dieu de l’humanité, est essentiellement un Dieu moral. Comme le dit Abraham: «Celui qui juge toute la Terre ne fe-rait-Il point justice?» (Genèse 18:25). Donc, c’est une conduite juste qu’Il exige avant tout de ceux qui Le ser-viraient. Comme l’a dit le psalmiste: «L’Eter-nel est juste et Il aime ce qui est juste» (Psaumes 11:17). Et comme l’a dit Jérémie: «Que le sage ne tire pas gloire de sa sagesse, que le puissant ne tire pas gloire de sa puissance, que le riche ne tire pas gloire de sa richesse; mais que celui qui se glorifie tire gloire du fait qu’il Me connaît et Me comprend, que Je suis le Seigneur qui exerce la bienveillance, la justice et la vertu sur terre» (Jérémie 9: 22-23).

Selon cette conception, tout le reste est se-condaire. Le rituel, par exemple, peut avoir une certaine importance, mais il ne s’agit pas d’une importance du même ordre. Il n’est pas,

comme l’éthique, partie intégrante de la ré-ponse à la question: qu’est-ce que Dieu attend de nous? Tous les Prophètes ont fustigé le peu-ple parce qu’il se préoccupait trop des sacrifi-ces et d’autres rites, et ont ensuite proclamé ce qui compte vraiment pour Dieu: «Que la justice coule comme l’eau et la vertu comme un courant ininterrompu» (Amos 5.24); «Je désire l’amour et non le sacrifice, et la connais-sance de Dieu plutôt que l’holocauste» (Osée 6:6); «Cessez de faire le mal, apprenez à faire le bien, recherchez la justice, corrigez l’op-

presseur, défendez l’orphelin, prenez le parti de la veuve» (Isaïe 1:16-17); «On t’a fait connaître, ô homme, ce qui est bien; et que te de-

mande le Seigneur, si ce n’est d’agir selon la justice, d’aimer la bonté et de marcher hum-blement avec ton Dieu? (Michée 6:8).

Voilà pour la conception des Prophètes, qui peut être résumée de la façon suivante: bien que d’autres facteurs tels que le rituel puis-sent être importants comme moyens d’attein-dre le but, les seules valeurs fondamentales sont d’ordre éthique.

L’autre conception est pharisienne et rabbi-nique; c’est donc, à l’époque moderne, celle du judaïsme orthodoxe. Ici, la position n’est

Morale contemporaine et éthique juive

Par le rabbin John rayner1

1 Ce texte, écrit en 1986 par John Rayner, rabbin de la Liberal Jewish Synagogue de Saint-John’s Wood à Londres, est extrait

de l’Anthologie du judaïsme libéral, paru à l’occasion du trentenaire du MJLF

« Le Dieu d’Israël, qui est aussi le Dieu de l’humanité, est

essentiellement un Dieu moral »

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pas simple. Car, selon cette conception, nous avons une Tora révélée par Dieu qui com-prend 613 commandements. Beaucoup de ces derniers, bien sûr, sont de nature éthi-que, mais certes pas la totalité; cependant, ils sont tous obligatoires au même titre, et, bien que les rabbins parlent de «mitsvoth ha-mourot» de «mitsvoth kaloth», c’est-à-dire de commandements plus ou moins impor-tants, il n’existe pas de principe clairement défini qui permette de les différencier. A la question: «Qu’est-ce que le Seigneur attend de vous?», les Prophètes ont répondu: «Sois juste et miséricordieux», et les rabbins ont répondu: «Obéis aux 613 mitsvoth!»

Néanmoins, les rabbins se sont montrés en plusieurs occasions conscients de la primau-té de l’éthique. Il est important de noter, par exemple, que chaque fois qu’ils ont tenté de donner la quintessence de la Tora, ils l’ont fait invariablement en termes d’éthique. Ils ont dit qu’il s’agis-sait d’aimer son prochain comme soi-même et de faire la paix dans le mon-de, et d’autres gé-néralisations de cet ordre. Il convient également de noter que les péchés énumérés dans les différentes confes-sions de la liturgie de Yom Kippour sont pres-que exclusivement des péchés contre la loi morale plutôt que contre la loi rituelle. On ne doit donc pas pousser le contraste trop loin. Je souhaite simplement mettre en évidence le fait que la prééminence donnée à l’éthique sur le rite est plus marquée dans le judaïsme libéral que dans le judaïsme orthodoxe.

Ethique et LoiMais il existe une autre différence entre les deux approches qui est de plus grande im-

portance pour notre sujet. D’un point de vue orthodoxe, toutes les questions concernant le bien et le mal trouvent leur réponse dans la Halakha, la législation; réciproquement, tout ce que la Halakha a à dire sur de tels su-jets est ipso facto la plus haute expression de l’éthique juive. Puisque la Tora est divine et que la Halakha est l’interprétation qui fait autorité, comment pourrait-il en être autre-ment? Dans le judaïsme orthodoxe, donc, la Loi et l’éthique vont de paire. Il ne reconnaît pas une éthique indépendante de la Halakha qui puisse, à l’occasion, être en désaccord avec la Halakha. Celle-ci est elle-même l’ulti-me arbitre; il n’y a pas d’autorité supérieure à elle, et si votre conscience n’est pas d’accord avec elle, alors c’est votre conscience qui est dans l’erreur. La Halakha ne doit pas être dé-

terminée en fonction de nos jugements moraux; c’est la Halakha qui déter-mine ce que doivent être nos jugements moraux. Par consé-quence, quand les rabbins traitent de problèmes éthiques, ils le font presque toujours en termes halakhiques. Sou-vent, malheureuse-ment, ils prêtent plus d’attention au rituel

qu’aux problèmes éthiques.

Selon nous, la Tora est le fruit d’une interac-tion dynamique entre la Révélation divine et l’interprétation humaine. Par conséquent, la Tora – et la tradition qui en découle – est un ensemble d’enseignements qui croît, se développe, qui a fait beaucoup de progrès significatifs au cours de l’Histoire, mais qui n’est jamais éthique ; il est évident que nous scrutons d’abord notre tradition juive, car elle renferme une grande sagesse; elle est – et sera toujours – notre principale source et notre principal guide. Mais nous ne l’abordons pas

« A la question: «Qu’est-ce que le Seigneur attend de vous?», les

Prophètes ont répondu: «Sois juste et miséricordieux», et les rabbins

ont répondu: «Obéis aux 613 mitsvoth!»

Néanmoins, les rabbins se sont montrés en plusieurs occasions

conscients de la primauté de l’éthique »

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JuDAÏsme

thodoxe. Il en est ainsi parce que le problème de la volonté de Dieu, en tout sujet, est tou-jours en principe une question ouverte et non fermée; et, bien que dans la recherche d’une ré-ponse, nous attachions une grande importance au verdict de la tradition juive, telle qu’elle est cristallisée dans la Halakha, nous nous sen-tons dans l’obligation de faire entrer dans le débat également d’autres considérations. Pour

nous, les questions «qu’est-ce qui est conforme à la Tradi-tion?» et «qu’est-ce qui est juste?» sont intimement liées, mais non, en fin de compte, identiques. Il arrive parfois que les conclusions auxquelles nous parvenons soient

en désaccord avec la Halakha rabbinique tra-ditionnelle. Alors, si nous les formulons avec la précision qui s’impose, elles peuvent devenir partie intégrante d’une nouvelle Halakha libé-rale. ■

en présupposant que ce qu’elle a à dire doive, dans chaque cas et en tous cas, être exact. Nous l’abordons d’une manière particulière, avec respect, mais non sans esprit critique.

Nous sommes intéressés par la Halakha, qui représente une magnifique tentative de tra-duire les valeurs du judaïsme en préceptes capables de régler en détail la conduite de tous les jours. Mais nous sommes encore plus intéressés par ce qui se cache der-rière la Halakha: ce qu’étaient les modes de raisonnement, les motivations éthiques et les circonstances historiques qui ont incité les rabbins à légiférer comme ils l’ont fait. […]Une quête permanente

Le processus tout entier est donc beaucoup plus compliqué pour nous qu’il ne l’est pour l’or-

« Nous sommes intéressés par ce qui se cache derrière la

Halakha: ce qu’étaient les modes de raisonnement, les motivations

éthiques et les circonstances historiques qui ont incité les rabbins

à légiférer comme ils l’ont fait »

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AgeNDA

DECEMBRE 2007/JANVIER 2008 / KISLEV/TEVET 5768Samedi 1er décembre 2007 – 21 Kis-lev 5768 – VAYECHEV10h30: Office Lundi 3 décembre 200720h00 à 21h30: Cours Adultes: Notre Ju-daïsme, pensée et pratiquesavec Rabbi Chinsky

Mardi 4 décembre 2007 : EREV HA-NOUCCAAllumage de la première bougie de Ha-noucca

Mercredi 5 décembre 2007: HANOUC-CA I.14h15 à 16h45: TALMIDI17H00: Fête de HANOUCCA18H30: allumage de la 2ème bougieVoir annonce séparée page 54

Jeudi 6 décembre 200720h00: Midrach dans le texte avec Rabbi Abraham Dahan

Vendredi 7 décembre 2007: HANOUC-CA III.20h00: Office de Kabbalat ChabbatSuivi d’un Dîner Chabbatique après l’of-fice Samedi 8 décembre 2007 – 28 Kislev 5768 – MIKETS – HANOUCCA IV.10h30: Office

Lundi 10 décembre 2007: ROCH HO-DECH TEVET – HANOUCCA VI.20h00 à 21h30: Cours Adultes: Notre Ju-daïsme, pensée et pratiquesavec Rabbi Chinsky Mercredi 12 décembre 200714h15 à 16h45: TALMIDI

Vendredi 14 décembre 200720h00: Office de Kabbalat ChabbatOneg Chabbat offert par Renée Zinque

Samedi 15 décembre 2007 – 6 Tevet 5768 - VAYIGASH10h30: Office

Lundi 17 décembre 200720h00 à 21h30: Cours Adultes: Notre Ju-daïsme, pensée et pratiquesavec Rabbi Chinsky

Mercredi 19 décembre 200714h15 à 16h45: TALMIDI

Jeudi 20 décembre 200720h00: Midrach dans le texte avec Rabbi Abraham Dahan

Vendredi 21 décembre 200720h00: Office de Kabbalat Chabbat

Samedi 22 décembre 2007 – 13 Tevet 5768 - VAYEHI10h30: Office Bar Mitsva Ruben SIMONART

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DECEMBRE 2007/JANVIER 2008 / KISLEV/TEVET 5768Lundi 24 décembre 2007PAS DE COURS ADULTES avec Rabbi Chinsky

Mercredi 26 décembre 2007PAS DE TALMIDI

Vendredi 28 décembre 200720h00: Office de Kabbalat Chabbat

Samedi 29 décembre 2007 – 20 Tevet 5768 – CHEMOT10h30: Office Lundi 31 décembre 2007PAS DE COURS ADULTES avec Rabbi Chinsky

Mercredi 2 janvier 2008PAS DE TALMIDI

Vendredi 4 janvier 200820h00: Office de Kabbalat Chabbat Samedi 5 janvier 2008 – 27 Tevet 5768 - VAERA10h30: Office

Lundi 7 janvier 200820h00 à 21h30: Cours Adultes: Notre Ju-daïsme, pensée et pratiquesavec Rabbi Chinsky

Mardi 8 janvier 2008 : ROCH HODECH CHEVAT

Mercredi 9 décembre 200714h15 à 16h45: TALMIDI

Jeudi 10 janvier 200820h00: Midrach dans le texte avec Rabbi Abraham Dahan

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cOmmuNAuTé

CarnetNaissance:Le petit Ilan Sezer est né le 25 octobre 2007. A ses parents, Angélique et Turgay Sezer Dziersgowski MAZAL TOV!

Bné Mitsva:Le 22 décembre 2007 – Paracha Vayehi: Ruben Simonart

Mariage: Le 28 octobre 2007 a été célébré le mariage de Laurence Brenig et Serge Cohen y Escaloni. Aux jeunes mariés nous adressons notre plus chaleureux Mazal Tov.

Décès z"lNous avons appris avec beaucoup de tristesse le décès, le 8 novembre dernier, de Rina Angel-Levy, maman de notre amie Gisèle Toledo. A Gisèle et Erol, à leurs enfants et à la famille, nous tenons à dire ici toute notre sympathie. Nous venons d’apprendre le décès le 13 novembre dernier de Suzanne Creusen, maman de notre ami Luc Bourgeois. A Luc et à la famille, nous voulons exprimer notre plus profonde sympathie.

envie de nous écrire ?

de participer à la rédaction du Shofar ?

n’hésitez pas et contactez nous !

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cOmmuNAuTé

Ainsi que nous l’avons déjà à plusieurs repri-ses souligné dans le Shofar, le monde chré-tien manifeste de plus en plus fréquemment des liens fraternels à l’égard du judaïsme et ce avec, souvent, une curiosité et une empa-thie marquées. La Shoah, cet « évènement le plus important du XXème siècle », pour reprendre les termes papaux, n’est certainement pas étrangère à ce phénomène. Le dernier acte marquant, dans le sens de l’intérêt de plus en plus significatif de l’Eglise pour sa religion mère est intervenu récem-ment.Cela se passa au début du mois de septem-bre dernier, à l’occasion d’une cérémonie or-ganisée à la Judenplatz, dans le centre de la capitale autrichienne, devant le monument de béton érigé à la mémoire des 65 000 Juifs d’Autriche exterminés par les Nazis.Il pleuvait. Le pape Benoît XVI se recueillait, priait. Ce silence dura une dizaine de minu-tes. En présence des dirigeants de la petite communauté juive locale. Dans l’avion qui le conduisit de Rome à Vien-ne quelques heures auparavant, en présence de journalistes, Benoît XVI exprima le fait que sa visite à ce mémorial marquait « la tristesse, la repentance et l’amitié » des ca-tholiques envers leurs « frères juifs » en ces termes1: « Mon voyage n’est pas un voyage politique, c’est un pèlerinage, comme je l’ai dit. Ce sont seulement deux jours ; seul le pèleri-nage à Mariazell était prévu initialement ;

maintenant, nous avons, non sans raison, le temps pour aller aussi à Vienne pour ren-contrer différents composants de la société autrichienne. Des rencontres avec les autres confessions et religions ne sont pas prévues immédiatement, dans ce si bref séjour ; seul un moment devant le monument de la Shoah pour montrer - disons-le - notre tristesse, no-tre repentir et aussi notre amitié envers les frères juifs, pour avancer dans cette grande union que Dieu a créée avec son peuple. Dans l’immédiat, donc, de tels messages ne sont pas prévus. C’est seulement au début, lors de la rencontre avec le monde politique, que je voudrais parler un peu de cette réalité qu’est l’Europe, des racines chrétiennes de l’Europe, du chemin à prendre. Mais il est évident que nous faisons toujours tout en nous appuyant sur le dialogue, soit avec les autres chrétiens soit également avec les musulmans et avec les autres religions; le dialogue est toujours présent : c’est une dimension de notre action, même si en cette circonstance, il ne va pas être tellement exprimé à cause du caractère spécifique de ce pèlerinage… »Déjà lors d’une visite à Auschwitz en mai 2006, le pape avait qualifié la Shoah de «cri-me sans équivalent dans l’Histoire».En accueillant le pape en cette matinée là de septembre 2007, le président autrichien, Heinz Fischer, affirma quant à lui que l’Autri-che devait « reconnaître les heures sombres » de son histoire et le cardinal Schönborn, ar-chevêque de Vienne, non seulement souligna, quant à lui, les racines juives du christia-

A propos du dialogue judéo-chrétien

Par Jacqueline Wiener

1 Conversation avec les journalistes de Benoît XVI du vendredi 7 septembre 2007 sur le site officiel du Vatican, source de la

traduction : http://eucharistiemisericor.free.fr/index.php?page=0809076_interview

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nisme (« Pierre était juif. Les apôtres étaient juifs, Marie est juive et Jésus, son fils notre Seigneur, l’est aussi à travers elle»), mais rap-pela également la participation d’une partie de ses compatriotes aux exactions nazies. Coïncidence ou conséquence, que ces pro-pos ? s’est aussitôt interrogé Moise Rah-mani. Car son dernier ouvrage, la «Lettre à un frère»2, sorti de presse le 25 août, fut expédié au Vatican le jour même. Or ce li-vre implore Benoît XVI d’exprimer un réel amendement à l’enseignement du mépris et à l’accusation de peuple déicide car le pape « est le seul qui ait autorité pour (l’) impo-ser, du Vatican jusqu’à la plus petite église du plus petit village, en tout pays du globe » et que ce faisant, l’antisémitisme –et son co-rollaire, l’antisionisme-, seraient ainsi réel-

2 Lettre à un frère, Moïse Rahmani, Ed. de l’Institut Sépharade Européen, 2007, 127 pages.

lement battus en brèche, même au-delà du monde chrétien. Nul ne peut répondre dans un sens ou l’autre à cette question brûlante pour l’auteur. Quoi qu’il en soit, il est troublant, comme le relève assez judicieusement Moïse Rahmani lui-mê-me, de savoir qu’a été rétabli par Benoît XVI un missel datant de 1962 au contenu anti judaï-que prononcé ; qu’une messe dite tridentine, dont le texte latin rédigé en 1570 et mention-nant que « les Juifs vivent dans l’aveuglement et les ténèbres », peut dorénavant être redite ; que la perspective de la béatification du Pape Pie XII, personnage aux zones d’ombre réel-les, n’est guère réjouissante.Mais à l’égard de ces actes là, des voix s’élè-vent dans le monde chrétien également, pour les contester… ■

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Chers amis, La rentrée du Talmud Torah nous a amené 55 enfants, ce qui est un suc-cès ! Ce nombre pourrait enco-re augmenter car chaque semaine, nous avons de nouvelles inscriptions.Contrairement à l’année précédente, beaucoup de parents accompagnent leurs enfants jusqu’à la synagogue elle-même, au lieu de les déposer à l’entrée, ce qui est encore un succès. Il est fonda-mental pour nous en tant que synagogue de les accueillir. Pour cela, nous remercions notre président Philippe Lewkowicz pour la grande bouilloire électrique qu’il a mise à notre dis-position et qui nous permet d’offrir des bois-sons chaudes. Certains parents ont proposé qu’on installe un canapé pour le Hall, ce qui serait plus « gemütlich » que de boire du café debout ! Voilà qui est fait grâce à la magni-fique générosité d’un de nos membres! C’est important pour nous d’avoir les parents avec nous, de parler avec eux de leurs enfants, qu’ils apprennent à connaître Beth Hillel et puissent nous rejoindre en tant que membres sur le long terme.

De notre Talmud Tora Par Josiane Goldschmidt

Voici quelques semaines, nous avons eu notre pre-mière formation. Tous les enseignants étaient présents, ainsi que Sa-muel Lison, notre hazan à Kippour, qui fait doré-navant aussi partie du Talmud Tora, ce qui est magnifique car il a toutes les qualités requises d’un bon professeur. Nathalie Narcisz a aussi rejoint l’équipe en début d’année et constitue une recrue enthousiaste et positive. La formation a permis à tous de voir plus claire-ment la notion de « tefila »

que les professeurs doivent transmettre à leurs élèves, et l’importance de l’accord entre la parole et les actes dans notre tradition. Elle a permis de souder et de dynamiser l’équipe. Merci à tous ! Notre projet entre dans cette même dynami-que d’intégrer les parents et les enseignants à la communauté. C’est ainsi que nous avons organisé un premier dîner chabbatique de Talmidi le 16 novembre dernier.Nous investissons une grande énergie dans ces projets ; moi en tant que Directrice et Rabbi Chinsky en tant que Rabbin, nous espérons qu’ils seront toujours de plus en plus fructueux et nous nous réjouissons de votre aide. ■

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Nous aurons le bonheur d’être ensemble, le 8 mai 2008, pour célébrer le 60ème anniversaire de la création de l’Etat d’Israël. De l’aéroport international Ben Gourion, nous allons directement,- à Jérusalem, à l’hôtel Dan Panorama Au programme : L’arrivée à Tel Aviv, le jeudi 8 mai à 14h30, nous permet de nous rendre au

- Kotel, et, de visiter les Tunnels en soirée et fin d’après midi.

- Cette visite est « envoûtante et mystique », des rabbins se relaient jour et nuit, pour prier, dans ce lieu proche du Saint des Saints.

Vendredi 9 mai, - Nous visiterons le nouveau Yad Vachem et les

musées de la ville nouvelle.

Pour aimer la vie au présent, au passé et demain

Par Anne Simon

Nous vivrons Kabbalat Shabbat dans une com-munauté libérale, et le Shabbat au Kotel, selon le souhait manifesté par nos Rabbins. Au coucher du soleil, à ne pas rater, prières et chants du Shabbat, au Kotel

Samedi 10 mai, - Promenades dans les quartiers de la vieille

ville, où ont eu lieu d’importantes fouilles ar-chéologiques,

- le cardo : visite de la partie à ciel ouvert et de l’autre, qui se trouve sous des bâtiments mo-dernes ; il était l’ancien axe nord-sud de l’épo-que romaine.

Pour les personnes qui souhaitent retourner au Kotel, le jour de Shabbat vous invite à y vi-vre des moments exceptionnels, le Kidouch y est célébré avec une émouvante ferveur et

VENEZ DECOUVRIR L’HISTOIRE, NOTRE HISTOIRE, EN TERRE D’ISRAELDu 8 au 18 Mai 2008

« Je dédicace ce voyage à notre, Rabbi Abraham Dahan, qui a toujours élevé l’âme de chaque membre de notre Communauté.Il m’a confié l’organisation de notre voyage, en souvenir du voyage dans les Communautés Juives Rhénanes- voir le Shofar n°240 et 243Quelques années et évènements se sont écoulés…Vous êtes venu vers moi, Cher Rabbi, vous m’avez honorée d’autres mitsvot, pour no-tre Communauté, dont ce voyage en Israël et Yom HaShoah, transmises par notre Pré-sident, Philippe Lewkowicz.

J’ai peint, jours et nuits, pour sublimer la douleur de la perte d’un être cher, J’ai exposé, pour faire un don aux enfants du Nord d’Israël, vous étiez là, toujours à mes côtés, à vous, je ne pourrai rien refuser, ma reconnaissance sera infinie… Vous avez créé et conduit notre belle com-munauté de toute votre âme, de toute votre énergie, de toute votre science, de tout votre cœur. Et, de tout mon cœur, maintenant, j’espère que ce beau voyage, nous allons avec vous, Rabbi, le partager »

« Si vous le voulez, ce ne sera pas un rêve… »Théodore Herzel

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chaleureuse générosité : distribution de vin et gâteaux à tous et à toutes !

Dimanche 11 mai,- Nous prendrons la route vers le désert de Judée, en passant par Jéricho, lieu de scènes bibliques, Qumran, où furent découverts les manuscrits de la mer Morte abrités au Sanc-tuaire du Livre, du Musée d’Israël, que nous aurons visité, selon votre choix, le vendredi ou samedi à Jérusalem.

Nous longerons la mer Morte vers Massada, site impressionnant, entre les déserts de Ju-dée et du Néguev. Nous lirons l’extraordinaire récit de l’histo-rien Flavius Josèphe et d’autres théories fai-sant suite aux fouilles, quant à l’origine de son aménagement en forteresse. L’importance de Massada est dans son histoire : lieu de la ré-volte juive et de sa défense désespérée, c’est comme une mitsva de monter à son sommet, de marcher de long en large, sur ce plateau chargé de symboles, de regarder au loin et tout autour le fabuleux paysage qui entoure une inoubliable et tragique histoire. Après une halte-repos-déjeuner, nous conti-nuons notre route vers le Neguev. Sa capitale, Beer Sheva, ou sept puits, ou Beer Shava, « Puits, du Serment » ( Gn 21 : 22-34)A 40 km au sud de Beersheva, nous arrivons à Sde Boker, devant l’université qui porte le nom de David Ben Gourion.Ici est le but de notre voyage dans le Neguev, et nous approchons de la date anniversaire, le 14 mai 1948, de la déclaration de l’indépendance de l’Etat d’Israël, prononcée par David Ben Gourion à Tel Aviv. Il est élu Premier ministre et ministre de la Défense. En novembre 1953, il démissionne et avec son épouse, s’installe dans le kibboutz de Sdé Boker dans le désert du Néguev. Il fut un des pères fondateurs de l’Etat d’Israël ; il revient à la politique et conti-nue de vivre dans son kibboutz. Nous allons dîner et passer la nuit dans un kib-boutz, dans le désert du Néguev, dans une par-tie de notre histoire ; pour une nuit, nous allons rêver, y vivre et peut-être, espérer y retourner. Il y a maintenant bientôt 4 ans que j’ai vécu

cette belle aventure là-bas même ; je regardais le ciel, une étoile filait et comme une enfant, un vœux j’ai fait… j’espère de tout cœur avec vous partager cet indéfinissable bonheur.

Lundi 12 mai,- Visite de la maison de Ben Gourion, et plus au sud, nous verrons, faisant face à une vue extraordinaire, sur les sommets du Neguev, les tombes du couple, sur lesquelles deux da-tes sont gravées, dont celle de leur arrivée en Israël.

Le rêve de Ben Gourion était de transformer le désert en verger…- Reprise de la route vers Tel Aviv (peut- être en train !)

Mardi 13 mai- Musée de l’indépendance : - écouter le discours émouvant de la déclara-tion d’indépendance d’Israël, proclamée par David Ben Gourion, le 14 mai 1948.

- Promenades dans la rue Bialik et visite du musée Reuven Rubin, peintre israélien et de la Maison du grand poète Bialik ; ensuite, le boulevard Ben Gourion vers la mer et la mai-son de David Ben Gourion.

- Visite du musée de la Diaspora.

Mercredi 14 mai, - Nous prendrons la route vers le Nord, nous logerons au Kibbutz Kfar BlumAu programme: du mercredi 14 mai, du jeudi 15 mai, du vendredi et samedi 17 mai : - Safed, Tibériade: Tombeaux de Maïmonide

et de Rabbi Meir Baal Hanes - le Golan: site archéologique du village de

Katzrim et de sa Synagogue construite au IVème siècle.

- Journée nature en collaboration avec avec le KKL et l’inauguration du bosquet Beth Hillel

- Kabbalat Shabbat et Shabbat dans un Mos-hav

Dimanche 18 mai, retour à Tel Aviv, - Temps libre avant le départ de 16h et arrivée

à Bruxelles à 21h30 ■

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Les lignes suivantes constituent un essai, une quête de sens dans l’univers musical.La musique religieuse juive utilise des textes issus le plus souvent du Tanakh (Torah-Né-viim-Kétouviim) ou de la littérature mystico poétique comme, par exemple, le Lekha Dodi que nous chantons tous les Erev Shabbath.La musique, et particulièrement la musique re-ligieuse, se doit de se fondre dans le texte afin d’épouser pleinement son sens et son impact émotionnel. Il est important de tenir compte de la prosodie afférente à la langue utilisée. On reproche par exemple à Mozart une utili-sation perfectible de l’italien dans ses opéras.Pensons à la prosodie magnétique et enivran-te de notre Rabbi Dahan dont la voix apaise l’âme et réjouit le cœur. Si nous prenons le fil de l’histoire et des générations, un des premiers grands compositeurs juifs qui nous soit par-venu depuis le légen-daire roi David fut le violoniste Salomone Rossi.Il était à l’apogée d’un courant réformateur qui avait commencé dès le début du XVe siècle, vi-sant à offrir une musique d’art attractive au judaïsme. Et cette idée circulait dans cer-taines communautés d’Europe occidentale et ce, contre la résistance des communautés juives qui ne voulaient pas entendre parler du monde extérieur. Je parle bien du XVIe siècle et toute coïn-cidence serait fortuite, bien sûr, avec aujourd’hui...

Certains musiciens s’essayèrent même à concilier les traditions juives et chrétiennes, tel Salomone Rossi (de son vrai nom Salo-mone Me-ha-Adumin), qui écrivit une série de psaumes polyphoniques (dans la tradition occidentale) pour l’usage de la synagogue (Ha ShirimAsher Li Sh’lomo - 1623).Un mouvement se constitua avec l’aide de quelques rabbins éclairés (celui de Modène, celui de Venise). Il ne dura pas longtemps.Sachez que c’est grâce au baron de Rothschild que la musique de Rossi nous est parvenue car il acheta, 200 ans plus tard, au hasard de ses voyages, les manuscrits enfin retrouvés de ce compositeur. La première édition moderne aura lieu en 1876, et le doux rossignol des sy-nagogues, depuis, se fait à nouveau entendre.

Étrange va-et-vient de la musique. Les chants religieux chrétiens primitifs sont directement issus des chants hé-braïques primitifs, et les nouvelles musi-ques judéo baroques

proviennent directement de Monteverdi.La musique de Rossi souleva bien des indigna-tions dans la communauté juive, et des oppo-sants venaient manifester en interrompant les offices bruyamment et violemment. Car cette musique était jouée et chantée dans les offices juifs. Elle ne l’est plus dans un monde synago-gal fermé à la musique de son époque.La bataille faisait donc rage dans sa commu-nauté entre conservateurs et modernes. Cer-taines congrégations avaient utilisé un orgue, un orchestre, des chorales. Les conservateurs

Résonance théologique de la musique juive cantoriale

Par Shmuel Lison

La musique, et particulièrement la musique religieuse, se doit de se fondre dans le texte afin d’épouser pleinement son sens et son impact

émotionnel

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venaient hurler lors de ses offices pour les ar-rêter.Salomone Rossi était au centre de ces contro-verses pour avoir utilisé et édité des musiques en se conformant à l’harmonie occidentale de la toute nouvelle musique de la Renaissance.Dans la préface à ses oeuvres, il disait que chanter la gloire de Dieu était déjà annoncé dans la bible avec harpes, cymbales, trom-pettes dès le Roi David.Protégé par le rab-bin de Venise il put continuer. Et puis, la gloire de Monteverdi, son ami et son maî-tre, rendit sa musique évidente et reconnue. Mais la plupart des synagogues refusèrent sa musique comme impie, car trop italienne.Au XIXe siècle sous l’influence de l’opéra romantique, des compositeurs comme Le-vandowsky, Alman, Sulzer, Birnbaum, Naum-bourg, Barkan etc… offrirent aux grands hazzanim une littérature musicale suscepti-ble de donner la pleine mesure de leurs talents musicaux et vocaux. Ana Tavo, que Zahava Seewald et moi-même, nous avons partagé avec vous lors de l’office de Kippour, est l’une de ces œuvres musicales qui incarnent le mieux cette puissance dramatique empreinte de pathos et d’émotions.L’artiste lyrique est généralement en symbiose avec son instrument, il se départit rarement de son armure sonore, construite avec patien-ce pendant de nombreuses années, à la suite de remises en question mentales, psychologi-ques et physiologiques. On ne chante pas dans le même esprit lorsque l’on va à la rencontre de sa voix comme ténor ou comme baryton… La problématique se développe davantage en-core lorsque la couleur vocale, le timbre, la tessiture, les passages, les climax d’intensité se positionnent à mi-chemin entre le ténor et le baryton. L’équilibre entre le chant lyrique et les exigences de la Hazzanut est parfois ins-table.

Je me souviendrai toujours du conseil reçu dans l’avion qui me menait en Israël : Souve-nez-vous que la musique et la religion ne font pas toujours bon ménage…Restez libre, restez vous même !Ou encore le message d’adieu reçu avant de quitter le Kibboutz Tzuba : Shmulik, n’oublie jamais que ta voix est ton meilleur passe-

port…Les notions d’esthé-tique musicale, com-me les conceptions du Beau et du Bon, sont totalement sub-jectives; elles sont le fruit d’un consensus social, culturel et cultuel. La Hazza-

nut Askhénaze et italienne permettent de dé-ployer le geste vocal dans toute son amplitude et dans tous les registres de l’émotion.La problématique qui s’offre au compositeur de musique sacrée s’articule autour de trois éléments parfois antinomiques : d’une part, la liberté d’expression de l’impulsion artistique ; d’autre part, le souci d’écrire une œuvre mu-sicale dont la portée transcende le réel ; par ailleurs, le souci d’immédiateté, d’accessibi-lité de l’œuvre. Levandowsky et Naumbourg au XIXe siècle ont bien intégré ces trois diffi-cultés. Des lignes mélodiques agréables, utili-sant des motifs typiques de la musique juive chromatismes, secondes diminuées etc…. Ces lignes mélodiques se voient augmentées d’une harmonisation tonale non fuguée. Le choral protestant aura une influence certaine sur les œuvres chorales des compositeurs de la réforme musicale juive en Allemagne au XIXe siècle. C’est pourquoi la littérature juive du XIXe siècle requiert l’accompagnement d’un instrument comme un orgue ou un piano. Les recherches archéologiques du XIXe siècle ont mis en évidence la présence de l’ancêtre de l’orgue dans le Temple de Jérusalem. De cette découverte à la réalité musicale, le pas allait être franchi. Dès lors, toutes les grandes syna-gogues européennes se dotent au XIXe siècle d’un orgue à tuyaux. La synagogue de la rue

La musique de Rossi souleva bien des indignations dans la communauté juive, et des

opposants venaient manifester en interrompant les offices

bruyamment et violemment

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de la Régence en est un bel exemple. Malheu-reusement, l’orthodoxie est passée par là …Seules les communautés libérales ou mas-sorti qui ont une certaine liberté hallakhique peuvent encore utiliser le trésor musical de l’époque romantique.Au terme de l’office de Kippour, un ami a épin-glé avec pertinence le mélange d’influences dont je témoigne : ashkénaze, sépharade et italienne. Comme l’a dit le Grand Rabbin Si-truk lorsqu’on lui posa la question s’il était as-hkénaze ou sépharade, celui-ci répondit : « Je suis juif… » Cette affirmation me convient parfaitement, n’en déplaise à certains.J’ai tenté de rester fidèle à certains aspects de Hazzanut italienne que j’ai connu lors des deux années passées dans la petite commu-nauté israélite de Ferrara. J’habitais au 101 via Mazzini, la synagogue était trois maisons plus loin. Le rabbino capo Luciano Caro avait une voix claire et bien impostata comme seuls les Italiens peuvent l’avoir. La lecture de la Torah était merveilleusement limpide. L’articulation de la langue de l’opéra était au service de la plus vieille tradition du monde. J’attire l’at-tention de nos lecteurs qu’un disque vient de paraître qui apporte des témoignages sonores de la tradition cantoriale de la communauté de Torino d’où est issu le Rabino Luciano Caro.Je voudrais remercier le Rabbi Dahan pour son immense patience. Je voudrais remercier le Rabbi Chinsky pour son enthousiasme et sa gentillesse et, enfin, je souhaite remercier tout particulièrement et du plus profond du cœur Da-vid Baltuch qui m’a permis cette Téshouva spirituelle et musi-cale - revenant parmi vous. La présence vocale, musicale et humaine de ma collègue Zaha-va Seewald me fut particulière-ment précieuse et agréable.J’espère de tout cœur pouvoir continuer cette merveilleuse expérience communautaire, spirituelle et musicale mais pour cela nous avons besoin de vous ! Si vous savez chanter, si vous

chantez juste, dans une chorale, dans une aca-démie, que vous savez tenir une ligne mélodi-que, alors : manifestez-vous après du Rabbin Chinsky ou de Catherine. Il est nécessaire de pouvoir fédérer le temps et les énergies d’au moins une pe-tite vingtaine de personnes pour com-mencer un chœur : sopranos, altos, ténors, baryton-basses. Les voix d’hommes sont généralement les plus difficiles à trouver. Un traitement de faveur sera dès lors accordé à tous les hommes qui pourront mettre à dis-position quelques heures de leur temps…Ce sera l’occasion de vider quelques bières (sauf à Pessah où l’on passe à la Vodka) à la suite de la répétition hebdomadaire et, surtout, de se retrouver à l’occasion des offices. Par ailleurs, un projet de Makela d’enfants est en gestation avec Ganenou de la 5ème primaire jusque la Rhéto.Le mouvement libéral belge, fondé par notre Rabbi Dahan, s’est doté d’une Shoule impor-tante, d’un Talmud Torah actif et dynamique, d’une femme rabbin moderne et dévouée ; offrons-lui une identité musicale de qualité, fruit de la tradition musicale of Reform ju-daïsm dont nous sommes les héritiers.Seul on ne peut rien, ensemble on peut tout…Je vous souhaite à tous et à toutes haag sa-meach. ■

S.L

Quelques mots encore pour attirer votre attention sur la pu-blication d’un double CD réalisé en hommage au grand can-tor Ben Barouk (Jacques Chalude) né Yitshak Zaludkowski (1914-1997) Cette magnifique initiative fut réalisée grâce à la bienveillance du Musée Juif de Belgique et en particulier de sa conservatrice Zahava Seewald.Les merveilleuses qualités vocales et musicales d’Yitshak Zaludkowsky témoignent d’un monde qui disparut petit à petit des synagogues à la fin des années septante à la suite de la radicalisation des mentalités religieuses consistoriales. Ben Barouch fut collègue et ami de Léon Algazi (1890-1971), directeur des temples consistoriaux en France et professeur au séminaire de Paris.A côté de sa carrière de Hazzan, Jacques Chalude fut un chanteur d’opéra possédant une voix de basse chantante particulièrement appréciée, en France notamment.

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Les fidèles de Beth Hillel ont découvert le ma-gnifique timbre de voix de Zahava Seewald, à l’occasion des fêtes de Tichri. Beaucoup la connaissent surtout pour son travail au sein du Musée Juif de Belgique; moins nombreux savent ses compétences musicales. Mais qui se cache donc derrière cette sonorité féminine ?Zahava Seewald est née à Anvers dans un milieu où le yiddish est la langue véhiculaire et où le chant ashkénaze religieux en hébreu est omni-présent. Après des études d’histoire de l’art, elle étudie le chant classique et commence simulta-nément une recherche sur le chant traditionnel juif. En 1990, elle crée le groupe « Mosaic » et sort un premier disque. Deux années plus tard, elle crée un second groupe, « Psamim », avec le désir de retracer le chant ashkénaze peu connu. Un deuxième album sort : « Ashkenaz songs ».Le new-yorkais John Zorn commande au groupe un CD qui sort en 1999 , « Abi Gezint », composé de chansons orientales en hébreu, en judéo es-pagnol et des chants en yiddish. Peu après, Zahava Seewald sort un troisième album : « Ashkenaz songs II Work and Revolu-tion » présentant des chansons yiddish abor-dant la thématique du travail. Elle collabore avec l’écrivain flamand Eriek Ver-pale et participe aussi à plusieurs concerts avec l’ensemble de musique contemporaine QO2. En 2002, le Beursschouwburg lui commande un concert de musique juive religieuse du 13e siècle et en 2003, elle prépare un nouveau répertoire, « Musique juive d’Orient » et collabore avec, en-tre autres, avec Michaël Grébil, joueur d’oud. Un nouvel enregistrement sort en mars 2003: « Koved, a tribute to Martin Weinberg » rassem-blant des chants en yiddish, en hébreu et en judéo-espagnol. Elle reçoit, par ailleurs, deux commandes de John Zorn pour collaborer à des CD de compilation dont l’un est un hommage au compositeur Sasha Argov (2003) et l’autre, la re-

Hazanut à Beth Hillel : Zahava Seewald

prise de compositions de John Zorn lui-même, « The Unknown Massada ».Fin 2004, un nouveau CD intitulé « Scorched lips » voit le jour par l’ensemble « Zohara » créé par la chanteuse et Michaël Grébil. Ce dernier ouvrage se veut plus personnel, lais-sant une part plus importante à la création de mélodies nouvelles autour de la poésie en hé-breu ancienne et contemporaine où l’élément traditionnel passe à l’arrière plan. C’est grâce à notre ami David Baltuch, ami de lon-gue date de Zahava Seewald, que Beth Hillel a pu décider de faire appel à cette dernière pour les of-fices de Roch Hashana et Kippour, cette année.A-t-elle eu des hésitations, avant d’accepter cette tâche ? « J’ai été enthousiaste dès le début, assu-re-t-elle, même si j’ai éprouvé quelques peurs sur la réaction d’un public juif, qui est toujours plus difficile qu’un public non juif sur le patrimoine musical qu’il connaît. On a un peu l’impression de jouer devant sa famille… »Cette première expérience de hazan, comment l’a-t-elle vécue ? « J’ai fréquenté la synagogue orthodoxe pendant toute mon enfance jusqu’à l’âge de 20 ans tous les shabbatot ainsi que les jours de fête. Le hazzan de la synagogue s’appe-lait Malik, c’était une très belle voix et sa présen-ce était fondamentale pour moi car il incarnait pour moi la fonction essentielle d’intercesseur et de celui qui permet d’entrer dans la prière, dans la dévotion et dans l’émotion. J’étais donc très émue de retrouver ce monde-là, de plus en étant à la place du hazzan ! »Même si Zahava Seewald regrette quelques « cassures », à savoir qu’il serait préférable que le hazzan puisse aussi dire plusieurs prières, elle recommencerait volontiers l’expérience l’année prochaine, à condition de pouvoir chanter plus car pour elle, chanter c’est d’abord entrer en re-lation avec l’Absolu. Voilà qui nous ravirait ! ■

JWH.

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Myriam Fuks rencontre son temps

Par Serge Weinber

Nombre d’entre vous ont déjà entendu parler de Myriam Fuks: Myriam c’est cette chanteuse Yiddish de Bruxelles, de la place du jeu de Bal-le. Chacun d’entre nous l’a croisée au détours de l’un ou l’autre concert communautaire au cours desquels reviennent à nos cœurs ces mélodies que nos parents et grands-parents aimaient à fredonner ou lors de l’un de ses ré-citals où elle nous fait revivre les scènes des Shtetl de Pologne, de Bessarabie ou d’Ame-rika! Des émotions qu’elle recrée devant nous – et nous transmet - avec une conviction in-tacte et une proximité digne des récits d’Isaac Bashevis Singer ou de l’éternel Violon sur le Toit de Jerry Bock et Sheldon Harnick.

Myriam, ce sont aussi des Shabbats ‘portes ouvertes’ où ‘vient qui veut’: du jeune étu-diant voulant remplir son estomac en pé-riode d’examen à Madame l’ambassadeur du Maroc…

Nous avons l’impression que Myriam fait par-tie de nos vies depuis si longtemps et comme à propos d’une amie d’enfance, nous ne nous questionnons plus sur sa trajectoire tant elle nous semble familière

Et pourtant, force est d’admettre que le mon-de change de plus en plus vite, nous vivons à l’ère de la mondialisation et alors que la musi-que klezmer jouit d’un regain extraordinaire, aucune relève ne se fait jour pour la chanson traditionnelle yiddish.

Myriam est l’une des toute dernière grande chanteuse qui préserve par sa voix mer-veilleusement grave et expressive un héri-tage musical des plus essentiels: celui du monde juif ashkénaze des derniers siècles en Europe Centrale et de l’Est et (quasi) to-talement détruit par l’une des grande tragé-dies du XXème siècle, la Shoa.

La connaissance de ce monde est en train de disparaître complètement à tout jamais. Nous connaissons les évènements tragi-ques qui ont frappé les différentes com-munautés juives du monde au cours de ces siècles, mais connaissons-nous vraiment la vie de tous les jours de ces communautés, leur humour, leurs soucis, leurs espoirs, leurs traditions ? Tout ce monde, Myriam Fuks parvient à nous le rendre presque pal-pable, elle nous donne l’impression de pou-voir encore le toucher, le caresser…

Au début des années 1950, plus de dix quotidiens imprimaient encore en Yiddish rien qu’à New York, aujourd’hui à peine la moitié d’un seul subsiste (le reste des tex-tes étant en anglais et en hébreu). Le reste de cette culture détruite1 a été pour son malheur partiellement abandonnée après la Deuxième Guerre Mondiale : les Juifs se sont ensuite tournés vers l’hébreu, le Yid-dish représentant implicitement la langue des ‘victimes’.

1 d’où proviennent pourtant certains de nos plus grandes figures.

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Si chaque Juif a un devoir de mémoire, il aura à cœur de découvrir ce qu’a été la vie des gé-nérations qui l’ont précédé. Notre immense chance, c’est qu’une femme au sein de notre communauté maintient vivant, pratiquement seule, leur répertoire musical populaire. Une vie entière consacrée à la défense de cette part de notre culture.

De part le monde, il ne reste vraiment que quelques grands chanteurs et chanteuses à pouvoir défendre et restituer avec talent le répertoire Yiddish. Pas plus d’une poignée.

A l’aube du 21ème siècle, Myriam nous restitue un véritable trésor. Non seulement elle possè-de cette capacité unique à nous faire revivre ces chansons, ces ambiances, ces joies et ces malheurs, cet humour ! Mais son talent, re-connu même aux quatre coins du monde, doit enfin être apprécié à sa juste valeur: Myriam est tout simplement une immense chanteuse. La nouvelle Anthologie2 qui lui est dédiée, permet de se rendre compte de l’immense artiste qu’elle est. La translittération et la tra-duction rendent cette anthologie accessible à tous ceux qui voudraient (re)découvrir les saveurs et les thèmes des grandes chansons

du répertoire yiddish. La voix et le talent de Myriam permettent d’en recevoir pleinement l’impact émotionnel.

Myriam est comédienne et le réalisateur fran-çais Claude Miller a fait appel à ses talents pour jouer dans son dernier film « Un Se-cret » - qui reprend une de ses interprétations - au côté de Patrick Bruel, Cécile de France, Ludivine Sagnier et Julie Depardieu.

Myriam, c’est également une trajectoire de femme juive relaté dans son nouveau livre : ‘Un Jour Je Me Suis Rencontrée’3. Beaucoup, surtout ceux de la « deuxième génération » se retrouveront dans ce portrait, parfois impudique, de cette femme à la recherche de son identité, de celle de sa sœur et de la véritable histoire de sa mère adorée. Ce livre nous fait partager les réponses d’une femme, d’une fille, d’une mère, d’une artiste à certai-nes questions actuelles et même essentielles : quels fardeaux émotionnels nos parents – de la génération de la guerre - n’ont pu éviter de nous transmettre ? Comment ne pas re-produire ces comportements ? Myriam nous apporte son parcours personnel comme une thérapie partagée et réussie. ■

Shofar est heureux de permettre à ses lecteurs, aux membres de Beth Hillel, de se procurer le cd de myriam Fuks avec une réduction de 40% soit au prix de 12 € au lieu de 20 €.

Une partie de cette somme sera reversée à Beth-Hillel Faites-vous ce plaisir et offrez le autour de vous .. Sis a mehaye..

Versement sur le compte de Beth Hillel n° 192-5133742-59

avec la mention « cd – Myriam Fuks »

2 Anthology of a Yiddishe Mama, Editions Avanticlassic (www.avanticlassic.com), ref : 5414 706 1028-2

3 Editions N.V. Wuesenberg & Diestfeld : ISBN : 978-2-9600700

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André Chouraqui z˝ l.Par monique ebstein

Il est mort le 9 juillet 2007 à Jérusalem, un mois avant d’atteindre 9O ans. Sa dis-parition a été relativement discrète et n’a pas fait les grands titres des journaux. Et pourtant cet homme a accompagné durant toute sa vie le cheminement du peuple juif. La faible médiatisation de sa disparition met en évidence l’importance toute relative qu’il faut accorder aux louanges funéraires décernées par la presse, car elle oublie sou-vent de remarquables personnalités pour en encenser d’autres dont la notoriété est par-fois davantage sujette à caution.

André Chouraqui naquit le 11 août 1917 à Aïn Témouchent en Algérie. Sa première langue maternelle fut l’arabe, la deuxième le français et sa lan-gue «paternelle» fut l’hébreu. Bâtisseur de ponts entre les trois cultures qui l’avaient nourri dès son en-fance, il oeuvra sa vie durant pour le rap-prochement de tous les hommes qui se réclamaient de l’une d’elles.

Il eut une vie bien remplie. Après des étu-des de droit à Paris et une thèse de doctorat sur la Création de l’Etat d’Israël, il exerça de 1945 à 1947 les fonctions d’avocat puis de juge à la Cour d’appel d’Alger. En 1948 il ob-tint le titre de docteur en droit international public de l’Université de Paris.

Secrétaire général adjoint de l’Alliance Israélite Universelle de 1947 à 1953, il en deviendra le Délégué permanent sous la présidence de René Cassin et le restera jusqu’en 1982. Il sera également le Président de l’Alliance Fran-çaise à Jérusalem.

En 1958, il s’installe en Israël, et sera, de 1959 à 1963, le conseiller du Président du Conseil, David Ben-Gourion. Elu en 1965 Vice-Maire de Jérusalem, il assistera Teddy

Kollek jusqu’en 1973. A un certain mo-ment, on songea à lui pour être le Président de l’Etat, mais ce fut Navone que l’on choisit parmi les personnes pres-senties. Cependant, plus que par ses fonc-

tions publiques, André Chouraqui est avant tout connu pour avoir été un homme de paix et de réconciliation. C’est ce dont il était venu parler au Palais des Congrès de Bruxelles où j’ai eu la chance de l’entendre, il y a plus de trente ans. Petit et assez trapu, ses yeux vifs et brillants brûlaient comme

André Chouraqui avec le Dalaï Lama au couvent San Miniato (Florence)

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un feu dans son visage, et attestaient par leur flamme la sincérité de son discours.

Il laisse une oeuvre qui témoigne de sa pro-fonde spiritualité. Son tra-vail le plus important est sans conteste la traduc-tion intégrale, à partir de leur langue originale, de la Bible, du Nouveau Tes-tament et du Coran, sans oublier celle des «Devoirs du coeur» de Bahya Ibn Paqûda à partir de l’arabe. Cette oeuvre monumenta-le n’a pu se faire sans l’aide d’une équipe de collabora-teurs qu’il dirigeait, véri-fiant lui-même page après page, et en plusieurs étapes, le résultat de leur travail. Grâce à lui, nous avons aujourd’hui une traduction directe de nos textes saints de l’hébreu en français; elle cherche à garder dans notre langue latine tout le génie et les particularismes de l’hébreu sémitique. En toute connaissance de cause André Choura-qui a fabriqué des néologismes qui au début parurent contestables, mais qui à présent sont reconnus et même devenus célèbres. Je voudrais seulement citer deux exemples: l’ad-jectif «rahamim» traduit normalement par «miséricordieux» qui devient chez lui «matri-ciel», puisque «rehem» signifie «matrice» en hébreu, et sa traduction très poétique de «Ha ma’ariv aravim» «t» que nous pouvons lire dans notre sidour à tous nos offices.

André Chouraqui nous laisse également des livres qui sont des témoignages de sa pen-

sée et de ce que représentait pour lui le fait d’être Juif: «Ce que je crois» (1979), «Retour aux racines» (1981), et son livre à grand suc-cès: «L’Amour plus fort que la mort» (1990).

Très malade depuis de longs mois, il avait pré-paré son discours fu-néraire dans lequel il a tenu à célébrer «la joie de vivre, mais aussi la joie de mourir lorsque l’on a eu une vie accom-plie».

Pourquoi André Choura-qui est-il tombé dans un relatif oubli ? peut-on se demander à juste titre.

N’est-ce pas un signe manifeste et attristant du fait que de nos jours la voix des hommes de paix fait moins recette que les discours de violence, de discorde et de haine ? ■

***

Parmi les nombreux livres d’André Choura-qui, notre bibliothèque ne possède actuelle-ment que:

- «Les dix commandements aujourd’hui» - «Théodore Herzl» - «Vivre pour Jérusalem».

Si vous pouvez nous aider à l’enrichir, nous vous en serions reconnaissants, car la plu-part des titres sont épuisés.

André Chouraqui avec Pierre Mendès-France (Jérusalem)

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Saul FriedländerPrix de la Paix, décerné en 2007 par les Libraires allemands

Pavel Friedlaänder naquit à Prague le 11 octobre 1932. Ses parents voulurent se réfugier en Suisse, mais craignant d’être ar-rêtés avec leur fils, ils décidèrent de le cacher dans un internat ca-tholique, en France, non loin de la frontière. Comme en 1942, les douaniers suisses ne laissaient entrer que les femmes enceintes et les familles accompagnées d’en-fants, les Friedländer ne correspondaient plus aux critères d’admission. Ils furent re-foulés en France et déportés.

Dans son internat, Pavel devenu Paul fut baptisé et reçut une instruction chrétienne. Mais lorsqu’en 1946, il apprit que ses parents avaient été assassinés à Auschwitz, il revint au judaïsme et Paul devint Saul. (Change-ment de nom hautement symbolique !)

En 1948, Saul quitta la France pour se rendre en Israël, où il s’engagea activement dans les combats du mouvement sioniste. Après avoir obtenu un doctorat en Histoire, il alla aux Etats-Unis. Dans les années 1980, il devint un militant de la cause pacifiste et depuis lors il soutient le mouvement «La Paix mainte-nant». Il est actuellement professeur d’histoi-re à l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA), ainsi qu’à l’université de Tel-Aviv.

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Friedländer est réputé être l’un des principaux historiens de la Shoah et du nazisme. Son ouvrage récent, mais aussi le plus connu, est «L’Allemagne nazie et les Juifs» (Das Dritte Reich und die Juden), dont le 1er volume «Les

années de persécution» (1933-1939), avait déjà paru en 1997. Il a publié, en octobre 2006, un 2ème tome consacré aux «Années de l’exter-mination» (1939-1945). Ce volume n’est pas encore traduit en français. C’est à l’occasion de sa présentation à la «Foire du Livre» de Francfort que le «Prix de la Paix des Libraires Allemands», a été attribué à son auteur.

Ce prix prestigieux, la plus haute récompense qu’un écrivain puisse recevoir en Allemagne, est décerné depuis 1950. En 2005, il avait ho-noré l’écrivain turc Orhan Pamuk, qui obtint un an plus tard le Prix Nobel de littérature.

Saul Friedländer reçut ce prix, le 1er octobre dernier à Francfort, dans l’Eglise St-Paul, illuminée de soleil pour l’occasion, et en présence du Président de la République Fé-dérale, Horst Köhler. Les applaudissements qui saluèrent le discours prononcé par l’his-torien furent tout d’abord réservés, puis de-vinrent de plus en plus chaleureux pour se terminer en «standing ovation».

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Dans son discours Friedländer lut des pas-sages extraits des dernières lettres écrites en 1942 par ses parents et par des membres de sa famille avant d’être assassinés dans les camps. «Il est clair pour moi que ce prix m’est accordé en grande partie en raison de la thé-matique de mon travail. C’est pourquoi j’ac-cepte avec une grande humilité cet honneur,

dont la signification va bien au-delà de toute prestation individuelle», a-t-il déclaré.

Le jury de ce prix a voulu saluer «le conteur épique de l’histoire de la Shoah, de la persé-cution et de la destruction des Juifs à l’épo-que de la terreur nazie en Europe» ■

Bibliographie:

•Hitler et les États-Unis, Genève,éd. Droz, 1963

•Pie XII et le Troisième Reich, éd. du Seuil, 1964 (postface dAlfred Grosser

•Kurt Gerstein ou l’ambiguïté du bien, Castermann, Paris, 1967

•Réflexions sur l’avenir d’Israël, éd. du Seuil, 1969

•L’Antisémitisme nazi : histoire d’une psychose collective, Seuil, Paris, 1971

•Histoire et psychanalyse, éd. du Seuil, 1975

•Reflets du nazisme, éd. du Seuil, 1982

•Visions of apocalypse: end or rebirth ?, Londres-New York, Holmes et Meier, 1985

•Probing the limits of representation: nazism and the final solution, CambridgLondres, Harvard University Press, 1992 (direction)

•Quand vient le souvenir, Seuil-Point, Paris, 1998, L’Allemagne nazie et les juifs, t.1, Ed.: Seuil, 1997, ; le tome 2 est sorti en anglais (Nazi Germany and the Jews, 1939-1945: The Years of Extermination) en 2007.

• Les Juifs et XXe siècle : dictionnaire critique, Calmann-Lévy, Paris, 2000,

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Isha, Dictionnaire des femmes et du ju-daïsme.Pauline BebeEd. Calmann-Lévy

Une des caractéristiques du judaïsme li-béral est sa position vis-à-vis de la femme qu’il considère en tout comme l’égale de l’homme. Seul le judaïsme libéral ordonne des femmes rabbins. Pauline Bebe, rabbin d’une des communautés juives de Paris, a été ordonnée en 1990. Elle est l’auteur d’un livre récent, déjà commenté dans ces pages «Qu’est-ce que le judaïsme libéral?»

Auparavant, elle avait déjà écrit Isha (la femme) pour évoquer le regard que la tra-dition juive porte sur les «femmes». Ce li-vre se présente comme un dictionnaire qui, en des chapitres très courts, dépeint des figures féminines de la Bible allant des ma-triarches jusqu’à Abigaïl, Jezabel ou Tamar. Il étudie aussi de nombreux sujets pou-vant intéresser spécialement les femmes, comme par exemple: les commandements positif, la bat-mitswa, l’état de femme céli-bataire, mariée ou divorcée, la procréation et la contraception.

Dans son introduction, Pauline Bebe dit bien que son livre, loin d’être exhaustif se veut plutôt «une palette représentative de la tradition à la fois biblique, aggadique et halakhique». Elle affirme qu’il ne veut en rien être une apologie de la femme, car ce serait une autre façon de lui faire une place à part. Elle essaie de porter un regard à la

fois compréhensif et critique sur la place de la femme dans la tradition juive. Or notre tradition doit certes être comprise et étu-diée telle qu’elle était à l’origine car elle est notre héritage, mais c’est à nous de la faire évoluer et de l’adapter à l’époque où nous vivons. «C’est grâce à cette évolution que le judaïsme a pu survivre.» Et de conclure ainsi son introduction: «J’aimerais que ce livre soit une source d’inspiration pour ces hommes et ces femmes qui veulent voir évoluer le judaïsme parce qu’ils l’aiment.»

***

La Grande Fauchaison,Trilogie roma-nesque, traduite du YiddishOser WarszawskiEd. Denoël

«La Grande Fauchaison» rassemble pour la première fois cette trilogie d’Oser War-szawski qui jusqu’à présent n’avait pas été publiée en français. L’auteur retrace les avatars de la Grande Guerre et l’écho qu’elle eut dans les monde juif et allemand de l’époque. Au fil des pages, il dissèque le quotidien des uns et des autres. Il décrit la société jusqu’au moment où elle bascule dans l’absurde et l’horreur, et où elle se dis-sout pour laisser place à un désordre tantôt sombre, tantôt burlesque. L’auteur dépeint avec tendresse et lucidité la vie des shtetls de Pologne et des quartiers juifs de Varso-vie, mais aussi la bourgeoisie nationaliste et raciste, adulant le Kaiser et participant à une guerre dénuée de sens. Son style très

Lu pour vous ces livres qui sont disponibles à la Bibliothèque de Beth Hillel

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personnel fait de «La Grande Fauchaison» un monument de la littérature yiddish.

Oser Warszawski, né en 1898 près de Var-sovie, quitta la Pologne dans les années 20 pour Berlin, Londres puis Paris. Il participa activement à la vie littéraire et artistique de la capitale. En 1942, passant alternati-vement de résidence forcée en résidence surveillée, il se réfugia à Rome où il fut arrêté en 1944 par la police fasciste. Livré aux Allemands, il fut déporté et assassiné à Auschwitz le 10 octobre de la même année. Il est une des figures centrales de la culture yiddish du siècle dernier.

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Explorations TalmudiquesGeorges HanselEd. Odile Jacob

Georges Hansel est mathématicien et pro-fesseur émérite à l’université de Rouen. Gendre d’Emmanuel Lévinas, il a, parallè-lement à ses travaux scientifiques, mené de longues recherches sur l’exégèse juive.

Dans un livre clair, Georges Hansel veut présenter le Talmud, son inspiration et ses principes de base. En effet mal connue, cet-te oeuvre collective a été engendrée par la réflexion de générations entières de nos Sa-ges. L’auteur essaie de nous faire prendre conscience que le Talmud est le résultat de la tentative difficile de traduire un idéal spirituel élevé dans notre comportement quotidien.

Je ne résisterai pas au plaisir de vous citer la dernière phrase de la conclusion: «Rabbi Haïm de Volozin comptait ses livres parmi ses «amis». L’un de ces amis a une place pri-vilégiée. Ami fidèle d’entre les fidèles, il est certes un peu secret, il a tendance à cacher son jeu et il est de tempérament bourru. Mais à ceux qui l’interrogent avec détermination, il s’ouvre affectueusement, généreusement,

et il a tant à leur dire ! Voulez-vous vraiment savoir son nom ? Je vais vous le dire. C’est un nom commun devenu nom propre. En français, on l’appellerait Etude, mais il pré-fère son nom hébreu : Talmud.»

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Commentaire sur le Sefer YetziraSaadia GaonEd. Verdier, Collection «Les Dix Paroles»Le Sefer Yetzira est le plus ancien traité hébraïque de cosmogonie où l’on traite ex-clusivement de la formation du monde. At-tribué par la tradition à Abraham, puis par les cabalistes médiévaux à Rabbi Aqiba, on estime cependant qu’il fut composé entre le 3ème et le 6ème siècle. Sadia Gaon (882-942), un des plus grands représentants du judaïs-me gaonique, entreprit vers la fin de sa vie de le paraphraser en arabe et de le commen-ter. Alors que le texte original est réputé être un texte mystique, le commentaire de Saadia Gaon fait appel à la philosophie et à la raison. Sans doute a-t-il voulu commenter le Sefer Yetzira, parce que ce livre était à son époque le premier et le seul de la littérature rabbinique qui traitait spécialement de la création du monde, et c’était là un problème brûlant et controversé, débattu très tôt par Philon, les Pères de l’Eglise, et les péripaté-ticiens tant chrétiens que païens. Ces débats se prolongèrent jusqu’à l’époque de Saadia par la voix des philosophes musulmans, or un esprit cultivé ne pouvait manquer d’ap-porter son tribut à la question. Le Commen-taire de Saadia voulut défendre la doctrine de la création ex nihilo contre ceux qui la réfutaient. Il le fit par la voie de la raison alors que les philosophes grecs l’avaient in-voquée contre elle. La création demeure un mystère. Faut-il tenter de l’élucider, ou faut-il le voiler en adoptant une attitude résolu-ment mystique ? Saadia Gaon fait toujours appel à la raison, et jamais il ne cède à l’obs-curité du texte.

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Ce peuple. L’existence juive.Leo BaeckEd. Armand ColinLe rabbin Leo Baeck (1873-1956) fut une figu-re emblématique de la communauté libérale d’Allemagne, et par la suite des Etats-Unis et du Royaume-Uni. Nous avons acheté ce «livre-testament» parce qu’il vient de paraî-tre en français, traduit par Maurice-Ruben Hayoun. Mais nous présenterons une bio-graphie plus détaillée de Leo Baeck et nous commenterons plus amplement et de façon plus chronologique son oeuvre dans un des prochains numéros du Shofar.

Pour ceux qui cependant seraient impa-tients de lire ce dernier livre, qu’ils sachent dans quelles circonstances il fut écrit. Le 27 janvier 1943, Leo Baeck alors âgé de 70 ans fut déporté à Theresienstadt, il y demeura jusqu’en mai 1945 lorsque le camp fut libéré par l’armée rouge. Pendant toute la durée de son internement, il fut le soutien moral de ses co-détenus. Travaillant avec eux durant la journée, il les réunissait souvent le soir pour leur parler des sujets les plus divers, leur per-mettant ainsi de garder une vie intellectuelle et de préserver leur dignité humaine.

La première partie de Ce peuple. L’existence juive a été écrite dans le camp même de Thé-resienstadt, et doit être considérée comme ayant été un moyen de combat constant pour la survie de l’être humain dans un univers cruel et barbare. La deuxième partie du livre a été écrite en des temps différents, mais son auteur nous dit que tout en étant un livre en soi, il fait cependant partie du précédent car lui aussi nous entretien de ce peuple, lui aus-si nous parle de l’existence juive.

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Eclipse d’Etoiles et Eli suivi de Lettres et d’Enigmes en FeuDe Nelly Sachs, Traduction de Mireille GanselEd. VerdierCes poèmes ont été commentés dans un ar-ticle paru dans le Shofar du mois de septem-bre

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Lettre à un frèreMoïse RahmaniEd. de l’Institut Sépharade EuropéenCe petit livre d’environ 120 pages ne veut sans doute rien ajouter de nouveau aux bi-bliothèques remplies de livres sur l’antisémi-tisme. Mais l’auteur a voulu, sous forme d’une lettre au Pape Benoît XVI, exprimer avec ses tripes son angoisse devant l’antisémitisme, cette bête que l’on croit parfois morte et qui toujours se réveille d’un sommeil que l’on croyait définitif.

Cet ouvrage sera certainement très utile à tous ceux qui, devant enseigner ou écrire, voudront trouver rapidement les citations, ti-rées du Premier ou du Deuxième Testament, qui fondent ou récusent l’antisémitisme reli-gieux.

Moïse Rahmani, bien connu du Yishouv bruxellois est né au Caire. Sa famille fut for-cée au départ en 1956, et elle fait partie du million de réfugiés des pays arabo-musul-mans. Auteur de plusieurs ouvrages, il est aussi le rédacteur en chef de la revue «Los Muestros, la Voix des Sépharades» qui, de-puis 1990, défend la langue et la tradition ju-déo-espagnoles. ■

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L’Etat d’Israël s’apprête à fêter ses 60 ans. Les célébrations y seront placées sous le signe de la jeunesse et les enfants seront au centre des festivités. Plus que le passé, c’est ainsi l’ave-nir du pays qui sera mis en exergue. En août 1897 se déroulait à Bâle le premier congrès sioniste au cours duquel Herzl fut élu président de l’Organisation sioniste mon-diale dont l’objectif était de reconstruire un foyer national sur la terre ancestrale d’Eretz Israel. Dans son Journal, à la date du 3 sep-tembre 1897, Herzl écrivit : « A Bâle, j’ai fondé l’Etat des Juifs. Si je di-sais cela à voix haute aujourd’hui, un éclat de rire universel me répondrait. Dans cinq ans peut-être, dans cinquante ans sûre-ment, chacun pourra s’en rendre compte» Cent dix ans plus tard, l’Etat d’Israël existe et «est tellement dynamique et vivant que personne ne peut prévoir la direction que les choses vont prendre. Nous vivons dans un pays qui se remet en question à chaque instant, un pays qui n’est jamais satisfait de lui-même». Cette phrase est empruntée à un article sur l’art contemporain israélien publié en août dernier dans le magazine de Brussels Airli-nes, There, glissé dans les dossiers de fau-teuils de sa flotte aérienne.

***

Le docteur Aribert Heim figurait encore en deuxième position, sur la liste des dix crimi-nels de guerre nazis les plus recherchés pu-bliée en 2006 par le Centre SimonWiesenthal. Le «boucher de Mauthausen» fut arrêté le 15 mars 1945 par les Américains, effectua deux ans de travaux forcés dans une saline, puis fut

relâché en 1947, probablement en échange d’in-formations. Après avoir vécu quelques années en bon père de famille et pratiqué la médecine en qualité de gynécologue à Baden-Baden, Heim disparu en 1962 lorsque la police allemande s’apprêta à l’arrêter mais que prévenu de son arrestation imminente, il parvint à lui échapper. On l’aperçu ensuite en Egypte, travaillant pour la police de Nasser, puis en Uruguay, dans un sanctuaire d’anciens SS exfiltrés, en Amazonie, à Ibiza. En 2005, Heim était encore donné rési-dent au Chili. La police criminelle du Land de Bade-Wurtemberg, suivie de l’Autriche la même année, lança un nouvel avis de recherche assorti d’une récompense pour sa capture. Cette traque n’aurait plus de raison d’être : Heim serait mort fin 1982, capturé au Canada, «jugé» et exécuté à l’île de Santa Catalina au large de la côte ca-lifornienne, par l’organisation clandestine « La Chouette ». Celle-ci s’était donnée pour mission de traquer et d’arrêter les derniers grands crimi-nels nazis réfugiés clandestinement en Améri-que du Nord et du Sud. Ses membres étaient tous fils ou petits-fils de survivants de la Shoah. Le mot d’ordre de La Chouette était «Sou-viens-toi, ne pardonne pas, poursuis-les pas à pas». Ce qu’elle fera jusqu’à sa dissolution, à la fin des années 1980, une fois son objectif principal atteint. Le dirigeant de « La Chouette », survivant des camps, avait été victime du docteur Heim qui, à Mauthausen, pratiquait la vivisection, sans anesthésie, sur des détenus, leur reti-rant les organes l’un après l’autre, pour noter leur temps de survie…

*** A propos de l’attentat de la rue Copernic, la pro-babilité de voir extradé vers la France pour y

Quelques nouvelles d’Israël et d’ailleurs

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être traduit en justice le terroriste présumé en être l’auteur est quasi nulle. Celui-ci, d’origine libanaise, a obtenu la nationalité canadienne. Or le Canada est connu pour sa réticence à ex-trader ses nationaux suspectés de crimes com-mis à l’étranger.Aux difficultés procédurales s’ajoute le fait que s’ils n’ont jamais baissé les bras, les poli-ciers français savent qu’il leur faudrait produire des éléments de preuve matériels (empreintes, ADN...) qui, vingt-sept ans après l’attentat, sont difficiles à obtenir. La famille du cinéaste israé-lien Micha Shagrir, qui a perdu sa femme Aliza, alors âgée de 42 ans, dans l’explosion continue de réclamer justice et à l’intention de saisir les autorités israéliennes de cette affaire « pour en savoir plus » Le 3 octobre 1980, Micha Shagrir était en va-cances à Paris avec son épouse et leur benja-min Haggai, 15 ans et demi. Ce soir-là, Aliza avait voulu passer rue Copernic avec son fils pour amener des friandises libanaises à une amie. Elle fut tuée sur le coup ; son fils échappa à la mort par miracle.En 2001, le cinéaste israélien rencontra un poli-cier français qui lui affirma que Paris ferait tout pour retrouver les assassins ; on lui parla alors de deux hommes vivant respectivement en Al-lemagne et… en Belgique. Deux ans plus tard, Micha Shagrir s’entretint à son contact français. Rien n’avait, depuis lors, bougé, mais ce dernier lui répéta que l’enquête ne serait jamais abandonnée.

***Selon le quotidien français « Le Figaro », en octobre dernier, le président polonais, Lech Kaczynski, a décoré 53 personnes, la plupart polonaises, pour avoir sauvé des Juifs durant la Seconde Guerre Mondiale. Le journal précise, par ailleurs, qu’un tiers des Roumains n’a jamais entendu parler de la Shoa et que seul un tiers de la population est conscient de ce que le génocide des Juifs concerne également leur pays.

*** La plus grande synagogue d’Allemagne, bâti-ment inauguré en 1904 puis incendié par les

Nazis et laissé à l’abandon sous la République Démocratique Allemande, a rouvert ses portes à Berlin. Situé dans le quartier de Prenzlauer Berg, la synagogue, d’une capacité de 1.000 places assises, a fait l’objet d’une restauration complète qui a duré sept ans. Comme nombre d’autres édifices liés au judaïsme, elle avait été incendiée le 9 novembre 1938, durant la « Nuit de Cristal ».Le ministre allemand de l’Intérieur, Wolfgang Schäuble, a assisté à la cérémonie de réouver-ture de la synagogue berlinoise. Parmi les per-sonnes présentes se trouvait une femme de 85 ans, Rita Rubinstein, qui refusait jusque-là de remettre les pieds en Allemagne, après avoir fui les persécutions nazies. Ses parents s’étaient mariés dans cette syna-gogue en 1905 et elle s’y rendait régulièrement elle-même dans son enfance.

***

L’Unesco vient de s’engager à garantir la pé-rennité de la mémoire de la Shoah et de lutter contre le négationnisme. A l’origine, l’idée d’ins-crire l’histoire et la mémoire de la Shoah ainsi que la lutte contre le négationnisme parmi l’héri-tage mondial et les programmes d’éducation de l’Unesco avait été proposé par Israël, l’Australie et les Etats-Unis. Ensuite, de nombreux autres pays ont apporté leur soutien à ce projet. Pour l’ambassadeur d’Israël, il s’agit d’un tournant historique qui va au delà du symbole : « Cela va permettre de faire vérifier ce qui est écrit dans certains manuels scolaires. (…) En prenant cet-te décision, l’Unesco prouve aussi qu’elle est une organisation qui avance dans le bon sens. »

*** L’Union Libérale Israélite de France célèbre son centenaire et organise, à cette occasion, une semaine de festivités, en ce début du mois de décembre, au cours desquelles des tables rondes sont consacrées principalement au Ju-daïsme libéral en France. A noter la présence, parmi les orateurs, de Jacques Attali, François Zimeray ou encore Alexandre Adler. ■

JWH

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Ils sont trois Kaliski. Sarah, Chaïm et René. Obsédés par la tragédie de l’Histoire. Hantés par la Shoah.Sarah, c’est la sœur. Elle est artiste peintre et écrit. Ses tableaux racontent l’humain, les Juifs, les morts. Ses textes dessinent l’écrivain Marguerite Yourcenar, Rimbaud, le sombre Céline. Et au détour de cet enche-vêtrement de littérature et d’art pictural, une porte ouverte sur une chambre et des lits vi-des. Ceux d’enfants disparus.Chaïm, c’est l’aîné. Lui, il raconte la Shoah à travers le prisme de Bruxelles. En sortes de bandes dessinées et écritures à la Flupke. Et pour mieux transmettre cette douloureuse mémoire, il aligne aussi des scènes à l’encre de chine en processions d’Ottomans, Khmers Rouges, sbires de Milosevic, sans oublier les Hutus, bien sûr. René, c’est l’auteur dramatique de la fratrie. Pièces de théâtre sur fond de fascisme, es-sais portant sur Israël sont au menu d’une œuvre magistrale dont certains textes ont été portés à l’écran. Voilà donc tous les ingrédients artistiques de cette extraordinaire famille créatrice servis

Au Musée Juif de Belgique : Sarah et ses frères

Par Jacqueline Wiener

au plaisir des visiteurs qui découvrent la nou-velle exposition du Musée Juif de Belgique*. « Sarah et ses frères » est mise en scène par un excellent Christian Israël dont le talent nous a été révélé à l’occasion de la précé-dente exposition, « Trajectoire et espaces juifs », transformée pour l’heure en exposi-tion permanente.Le commissaire en est le professeur Jacques Sojcher.Ouverte au public depuis le 12 octobre der-nier, l’exposition a été emménagée dans les espaces récemment rénovés du deuxième immeuble dont le musée a la jouissance, à l’arrière de la bâtisse à front de la rue des Mi-nimes. « Sarah et ses frères » fermera ses portes, en principe, le 25 février 2008. Elle sera agrémentée d’activités muséales ponctuelles, telles les excellentes conféren-ces des « mardis du musée » dont nous vous recommandons la lecture de la programma-tion sur le site www.museejuif.be. Rendez-vous à ne manquer sous aucun pré-texte : c’est une exposition magnifique ! ■

* 21 rue des Minimes à Bruxelles.

Heures d’ouverture de l’exposition et de la cafétéria : tous les jours, de 10 à 17 heures excepté Shabbat.

Entrée : 5 euros (seniors, étudiants et groupes : 3 euros/enfants en dessous de 12 ans : gratuit)

Visites guidées : 60 euros (dimanche : suppl. 10 euros)

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le shofar

Fatigués de porter le fardeau de la Loi, lassés d’être le peuple élu et d’en payer le prix fort, les Juifs décident de rompre l’Alliance et de déposer tous leur livres au pied du Mont Sinaï. Ils viennent de partout, les bouquins s’entas-sent et finissent par dépasser le sommet de la montagne. Dieu apparaît aux Juifs et, abasourdi, Il ton-ne et gronde: «Mais enfin, je ne vous ai jamais donné tout ça !»

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The Bus from Bnai Brak to Jerusalem, was nearly full with all Hassidim. At the last Bnai Brak stop, a pretty young girl in a skimpy out-fit boards the bus. With no seat left she has to sit next to a Hassid. He squirms a while, then reaches into hisknapsack and hands her an apple.«What’s this?» she inquires.«An apple.»«Why did you give me an apple?» she per-sists. «Because until Eve ate the apple, she didn’t realize she was naked!» The next morning, she again boards the same bus making the same run to Jerusalem. She is better attired, and sits next to the same Hassid, and hands him an apple.«What’s this?» he asks suspiciously.«An apple,» she shoots back.«Why an apple?» he inquires.«Because until Adam ate the apple, he didn’t know he had to work for a living.»

***

Un peu d’humour Salomon court tellement de tous côtés pour son activité professionnelle que très fré-quemment, il éprouve de réelles difficultés à dénicher une synagogue dans le patelin où il se trouve. Ce jour là, il éprouve un besoin important d’arrêter un instant son ouvrage et de s’en aller prier. Mais comme de synago-gue, il n’y en a point, il décide qu’une église fera l’affaire : près tout, l’omniprésence divi-ne ne signifie-t-elle pas que Dieu est partout? Il entre donc dans l’église du coin, arrime fermement son yarmulke sur son crâne, s’en-veloppe dans son talith et commence à prier. Le curé entre à ce moment là par une porte dérobée, de dirige vers le centre de l’estrade, manifestement prêt à commencer l’office et lève lentement les bras en signe de bienvenue aux fidèles. Mais il interrompt son geste, au son d’un murmure peu discret en provenance de la zone où prie Salomon. Au bout de quel-ques instants d’attente appuyée, le prêtre s’exclame : « Les non catholiques sont priés de sortir s’il vous plaît ». Salomon continue à psalmodier. « S’il vous plaît, les non catho-liques pourraient-ils sortir ? » Personne ne bouge et Salomon prie toujours. Finalement excédé, l’officiant sort d’une voix tonitruan-te : « Est-ce que TOUS les Juifs pourraient sortir, s’il vous plait ? ». Salomon se redresse brusquement, ôte prestement talith et yar-mulke. Puis d’un preste pas, se dirige vers une niche, y attrape la statuette de Jésus bébé qui était déposée entourée de bougies odorantes, cale l’enfant de bois sous son bras et lance à la cantonade : « Viens mon petit, ils ne veulent plus de nous ici ! »

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