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MAI 2015

Le véritable bilan de TOTAL( la face cachée)

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5,9 milliards d’euros de dividendes seront redistribués par Total à ses actionnaires. Derrière cette belle plus-value financière, se cache une autre réalité : celle des gigantesques coûts sociaux et environnementaux que génère l’activité de la 5ème compagnie pétrolière mondiale

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  • MAI 2015

  • SOMMAIRE

    Chiffres cls 4

    Les cots sociaux et environnementaux du ptrole et du gaz 6

    Gaz et ptrole de schiste : une contestation mondiale 8

    Forer toujours plus loin et plus profond ? 10

    Quelle transition nergtique pour Total ? 12

    Pratiques sociales 14

    Finances et fiscalit : beaucoup de questions irrsolues 16

    Le ptrole et le gaz, bndiction ou maldiction pour les pays producteurs ? 18

    Devant les tribunaux 20

    RAPPORT PUBLI PAR LOBSERVATOIRE DES MULTINATIONALES ET LES AMIS DE LA TERRE FRANCE, AVEC LE SOUTIEN DATTAC FRANCE.

    AUTANT QUE POSSIBLE, CE RAPPORT MENTIONNE LA POSITION DE TOTAL SUR LE FAITS EN QUESTION ET SA RPONSE AUX CRITIQUES QUI LUI SONT ADRESSES.

    NOUS AVONS SOLLICIT L'ENTREPRISE POUR COMBLER LES LACUNES VENTUELLES, MAIS ELLE N'A PAS SOUHAIT RPONDRE NOS QUESTIONS.

  • TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL CONTRE RAPPORT I 3

    T otal est le plus gros gnrateur de bnfi ces au sein du CAC 40 avec prs de 5,9 milliards deuros de dividendes redistribus aux actionnaires. De ceci et dautres informations relatives la performance fi nancire de lentreprise, il est abondamment question dans les rapports et documents que la direction de Total remet, le 29 mai, ses actionnaires et aux mdias lors de son assemble gnrale. Y sont joliment prsents de dynamiques courbes ascendantes, des tmoignages de collaborateurs enthousiastes, des baromtres de responsabilit sociale et des initiatives volontaristes en faveur du dveloppement durable. Les questions qui fchent, les critiques potentielles, les parts dombres de lactivit ptrolire et ses lourdes cons-quences en sont dment expurges.

    Ce rapport alternatif vise combler cette lacune. Son objectif est de mettre en lumire dautres aspects, parfois moins reluisants, des activits de Total en France et dans le monde, de relayer les questionnements et les critiques des travailleurs, des organisations de la socit civile et de lopinion publique. En se plaant autant que possible du point de vue de ceux employs, commu-nauts concernes, contribuables, simples citoyens qui nont gnralement pas voix au chapitre lorsquil sagit de discuter de la stratgie des entreprises, mais qui en supportent les cots sociaux et environnementaux.

    De par son activit de compagnie ptrolire et gazire la 5me mondiale , Total affi che, linstar de ses concurrents, un lourd bilan en la matire. Lentreprise exploite des sources dnergies parmi les plus polluantes, le ptrole issu des sables bitumineux au Canada par exemple. Et na pas banni des pratiques reconnues depuis longtemps comme nfastes, comme le torchage du gaz au Nigeria. En Europe, en Argentine ou en Algrie, Total fait face des contesta-tions sociales de plus en plus importantes contre le recours la fracturation hydraulique, ncessaire lextraction du gaz de schiste, mais qui fait peser, entre autres, de gros risques de pollutions sur les ressources en eau. Alors que sa production ptrolire dcline depuis dix ans, plutt que de vritable-ment dvelopper les nergies renouvelables, Total affi che sa volont de forer toujours plus loin et plus profond, quitte fragiliser lArctique, menacer des parcs naturels africains, multiplier les risques de mare noire en forant les sous-sols ocaniques au large de lAngola ou du Brsil.

    Ces activits de plus en plus risques vont de pair avec des stratgies dinfl uence, de lobbying et doptimisation fi scale pour le moins critiquables: lobbying intensif, en particulier au sein des institutions europennes Bruxelles, pour freiner la transition vers les nergies renouvelables ou empcher des rgula-tions environnementales; refus de rendre transparent les contrats signs avec des gouvernements marqus par des affaires de corruption massive; achats de concessions dans des zones de confl its ou occupes par dautres tats; recours des fi liales situes dans des paradis fi scaux et judiciaires Et quand la catastrophe survient ou quune affaire de corruption clate, la Justice peine rompre limpunit dont bnfi cient de fait les grands groupes comme Total.

    La compagnie ptrolire franaise fait aussi partie des 90 entreprises mon-diales qui ont le plus contribu historiquement mettre des gaz effet de serre dans latmosphre, dont la concentration est en train datteindre son ultime limite. Au vu de lurgence climatique, cest le cur mme de lactivit de Total qui suscite donc des questions, alors que de plus en plus dacteurs fi nanciers souhaitent dtourner leurs investissements des nergies fossiles (ptrole, gaz et charbon). Les salaris de lentreprise risquent den supporter les consquences. On le voit bien: les normes bnfi ces fi nanciers gnrs par Total au profi t de ses actionnaires induisent de gigantesques cots sociaux et environnementaux supports par tous. Ce rapport vise ouvrir un dbat qui ne peut plus tre rserv aux cercles restreints des directions dentreprise.

  • Sources Les chiffres sont tirs du Document de rfrence 2014 de Total sauf : [1] La Tribune/Facta: http://www.latribune.fr/economie/france/remunerations-des-dirigeants-du-cac-40-hausse-de-10-en-2014-472331.html. [2] Mediapart : http://www.mediapart.fr/journal/france/180114/climat-mediapart-dresse-la-liste-des-dix-plus-gros-pollueurs-en-France. [3] The Guardian: http://multinationales.org/90-entreprises-responsables-de. [4] Le Parisien : http://www.leparisien.fr/economie/total-pas-un-centime-d-impot-mais-un-cheque-du-sc-de-80-meur-17-10-2014-4220769.php. [6] Registre de transparence de lUnion europenne. [7] Transparency international : http://www.transparency.org/whatwedo/publication/transparency_in_corporate_reporting_assessing_worlds_largest_ companies_2014.

    2014 20132012

    CHIFFRES CLS

    257 037 M$

    251 725 M$

    236 122 M$

    CHIFFRE DAFFAIRE

    15 772 M$

    14 292 M$

    12 837 M$

    RSULTAT NET AJUST(PART DU GROUPE)

    29 475 M$

    34 431 M$

    30 509 M$

    INVESTISSEMENTS BRUTS

    DIVIDENDES PAR ACTION

    2,34

    2,38

    2,44

    FINANCES

    SOCIAL

    CLIMAT

    FISCALIT

    TRANSPARENCE

    EXPLORATION ET PRODUCTION

    RMUNRATIONS

    La rmunration correspondant aux fonctions de prsident et de directeur gnral au titre de 2014, en lgre baisse par rapport lanne prcdente.

    3 420 713

    5 866 068 904 LES DIVIDENDES PROPOSS AU TITRE DE LEXERCICE 2014.

    4 857 098 Le montant du package total , y compris lattribution dactions et doptions, de rmunration d Christophe de Margerie au titre de lanne 2014 [1]

    96 603 Les dpenses moyennes par salari en 2014, y compris les charges sociales, en hausse par rapport aux annes prcdentes.

    100 307 SALARIS EN 2014, DONT 32,5% EN FRANCE.

    Le nombre dannes conscutives de baisse de la production de ptrole de Total. Cette production stablit 1,034 million de barils par jour en 2014.

    2,944 MILLIARDS $En rsultat oprationnel, le montant de la dprciation dactifs de Total en 2014 dans le secteur des gaz non conventionnels aux tats-Unis, en Chine, au Venezuela et en Algrie

    10

    24,5%La proportion des liales consolides de Total ne disposant pas dune reprsentation des travailleurs.

    58%Le taux de redistribution des rsultats de Total ses actionnaires en 2014, en hausse continue par rapport 2012 et 2013, alors que le chiffre daffaires et le rsultat net sont en baisse.

    31,1%La part des femmes dans lentreprise en 2014. La part des femmes cadres nest que de 24,5%.

    9,1%La proportion des missions totales de CO2 de la France dont Total tait responsable en 2012 (derniers chiffres disponibles)[2].

    La part du groupe Total dans les missions mondiales de gaz effet de serre entre 1751 et 2010[3].

    0,00LE MONTANT DE LIMPT SUR LES SOCITS ACQUITT PAR TOTAL EN FRANCE EN 2010, 2012 ET 2013 [4]. Le montant des crdits dimpts acquis par Total pour son exercice 2013 au titre du crdit impt recherche (CIR) et du crdit impt comptitivit emploi (CICE) en France [4].ENTRE 2 500 000 ET 2 999 999 Les dpenses directes de lobbying dclares par Total Bruxelles pour 2013 et 2014[6]. Le chiffre ne concerne que les oprations du bureau de Total auprs de lUnion europenne, et non les autres formes de lobbying. Le montant dclar au registre parlementaire du lobbying en France parat peu srieux (entre 0 et 10 000 euros).

    3,9/10 Lvaluation par lONG Transparency international du niveau de transparence de Total, ce qui la place derrire ses paires ENI, Shell, BP, ExxonMobil, Occidental, Rosneft, Petrobras et Ecopetrol. Total obtient une note honorable en termes de politique anti-corruption, mais une mauvaise note sur sa transparence organisationnelle et un zro point en ce qui concerne le reporting pays par pays [7].

    79 M

    La baisse des effectifs de Total en France de 2007 2014 (32 297 contre 37 612 en 2007).

    4 I CONTRE RAPPORT TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL

  • Sources Les chiffres sont tirs du Document de rfrence 2014 de Total sauf : [1] La Tribune/Facta: http://www.latribune.fr/economie/france/remunerations-des-dirigeants-du-cac-40-hausse-de-10-en-2014-472331.html. [2] Mediapart : http://www.mediapart.fr/journal/france/180114/climat-mediapart-dresse-la-liste-des-dix-plus-gros-pollueurs-en-France. [3] The Guardian: http://multinationales.org/90-entreprises-responsables-de. [4] Le Parisien : http://www.leparisien.fr/economie/total-pas-un-centime-d-impot-mais-un-cheque-du-sc-de-80-meur-17-10-2014-4220769.php. [6] Registre de transparence de lUnion europenne. [7] Transparency international : http://www.transparency.org/whatwedo/publication/transparency_in_corporate_reporting_assessing_worlds_largest_ companies_2014.

    2014 20132012

    CHIFFRES CLS

    257 037 M$

    251 725 M$

    236 122 M$

    CHIFFRE DAFFAIRE

    15 772 M$

    14 292 M$

    12 837 M$

    RSULTAT NET AJUST(PART DU GROUPE)

    29 475 M$

    34 431 M$

    30 509 M$

    INVESTISSEMENTS BRUTS

    DIVIDENDES PAR ACTION

    2,34

    2,38

    2,44

    FINANCES

    SOCIAL

    CLIMAT

    FISCALIT

    TRANSPARENCE

    EXPLORATION ET PRODUCTION

    RMUNRATIONS

    La rmunration correspondant aux fonctions de prsident et de directeur gnral au titre de 2014, en lgre baisse par rapport lanne prcdente.

    3 420 713

    5 866 068 904 LES DIVIDENDES PROPOSS AU TITRE DE LEXERCICE 2014.

    4 857 098 Le montant du package total , y compris lattribution dactions et doptions, de rmunration d Christophe de Margerie au titre de lanne 2014 [1]

    96 603 Les dpenses moyennes par salari en 2014, y compris les charges sociales, en hausse par rapport aux annes prcdentes.

    100 307 SALARIS EN 2014, DONT 32,5% EN FRANCE.

    Le nombre dannes conscutives de baisse de la production de ptrole de Total. Cette production stablit 1,034 million de barils par jour en 2014.

    2,944 MILLIARDS $En rsultat oprationnel, le montant de la dprciation dactifs de Total en 2014 dans le secteur des gaz non conventionnels aux tats-Unis, en Chine, au Venezuela et en Algrie

    10

    24,5%La proportion des liales consolides de Total ne disposant pas dune reprsentation des travailleurs.

    58%Le taux de redistribution des rsultats de Total ses actionnaires en 2014, en hausse continue par rapport 2012 et 2013, alors que le chiffre daffaires et le rsultat net sont en baisse.

    31,1%La part des femmes dans lentreprise en 2014. La part des femmes cadres nest que de 24,5%.

    9,1%La proportion des missions totales de CO2 de la France dont Total tait responsable en 2012 (derniers chiffres disponibles)[2].

    La part du groupe Total dans les missions mondiales de gaz effet de serre entre 1751 et 2010[3].

    0,00LE MONTANT DE LIMPT SUR LES SOCITS ACQUITT PAR TOTAL EN FRANCE EN 2010, 2012 ET 2013 [4]. Le montant des crdits dimpts acquis par Total pour son exercice 2013 au titre du crdit impt recherche (CIR) et du crdit impt comptitivit emploi (CICE) en France [4].ENTRE 2 500 000 ET 2 999 999 Les dpenses directes de lobbying dclares par Total Bruxelles pour 2013 et 2014[6]. Le chiffre ne concerne que les oprations du bureau de Total auprs de lUnion europenne, et non les autres formes de lobbying. Le montant dclar au registre parlementaire du lobbying en France parat peu srieux (entre 0 et 10 000 euros).

    3,9/10 Lvaluation par lONG Transparency international du niveau de transparence de Total, ce qui la place derrire ses paires ENI, Shell, BP, ExxonMobil, Occidental, Rosneft, Petrobras et Ecopetrol. Total obtient une note honorable en termes de politique anti-corruption, mais une mauvaise note sur sa transparence organisationnelle et un zro point en ce qui concerne le reporting pays par pays [7].

    79 M

    La baisse des effectifs de Total en France de 2007 2014 (32 297 contre 37 612 en 2007).

    TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL CONTRE RAPPORT I 5

  • LE COT SOCIAL ET ENVIRONNEMENTAL DU PTROLE ET DU GAZLe ptrole et le gaz sont au cur des conomies industrialises. Leur exploitation a donn naissance aux plus grosses entreprises mondiales, dont les revenus dpassent ceux de bien des tats. Cette accumulation de richesse a aussi un cot social et environnemental considrable, qui nest le plus souvent pas support par les entreprises et leurs actionnaires, mais par les citoyens des pays o ces fi rmes oprent.

    Le delta du Niger constitue un cas emblmatique des cots sociaux et environnementaux drama-tiques de lexploitation du ptrole et du gaz. Violences, pollution de lair et de leau et dplacements forcs sont le lot quotidien des 30 millions dhabi-tants de la rgion, qui cohabitent avec plusieurs milliers de kilomtres de pipelines et des centaines de puits de forage. Lesprance de vie ny dpasse pas 43 ans ! Les activits de Shell ou ExxonMobil au Nigeria sont depuis plu-sieurs dcennies lobjet de dnoncia-tions publiques et, dans certains cas, de poursuites judiciaires internationales.

    Total est galement prsente dans le delta du Niger. Sur le territoire du peuple Egi, o Total opre depuis 1962, accidents, pollutions, violences et manifestations sont aussi une ralit quotidienne. Si lentreprise vante ses relations cordiales avec les habitants de la zone, ses critiques laccusent de mener une stratgie de division

    des communauts. Ils dnoncent le peu defforts de Total pour remdier limpact environnemental et sani-taire de ses activits et disent souf-frir de l accaparement croissant de leurs terres depuis 2006, Total ayant besoin dtendre ses oprations. De nombreuses familles attendent aussi dtre indemnises suite la contami-nation de leurs cultures par un accident majeur sur le champ gazier Ibewa de Total en 2012.

    Le recours de Total au torchage du gaz est particulirement dnonc. La pra-tique consiste brler, pour des raisons purement conomiques, le gaz schap-pant dans latmosphre lors des forages ptroliers, avec pour consquence daug-menter encore les missions de gaz effet de serre de ces oprations. La pollution de lair qui en rsulte entrane des pluies acides. Le torchage du gaz est normalement interdit au Nigeria depuis 1984, mais Total comme ses concur-rentes - continue y recourir, en faisant

    valoir quelle bnfi cie des autorisa-tions requises (lesquelles nont jamais t rendues publiques). Le groupe sest content dengager depuis plusieurs annes une politique de rduction pro-gressive du torchage hors dmarrage . Avec ses concurrents, il vient dannon-cer larrt du torchage en 2030.

    Pour ces raisons, Total a t nomine en 2014 au prix Pinocchio, organis par les Amis de la Terre.

    AU NIGERIA, LES COMMUNAUTS PAIENT LE PRIX DE LEXPLOITATION PTROLIRE ET GAZIRE

    GABON : LE SPECTRE DE LA POLLUTION PTROLIRETotal est lun des principaux oprateurs ptroliers actifs en Afrique, avec une position domi-nante en Angola, au Gabon ou au Congo. Dans ces pays o la rgulation environnementale fait largement dfaut et o les multinationales ont nou des relations troites avec les gou-vernants, la question du cot cologique du ptrole reste igno-re. Les citoyens doivent subir au quotidien limpact dactivits dont ils ne voient que rarement les bnfi ces. Le problme de la pollution ptrolire refait ainsi rgulirement surface au Gabon. En dcembre 2014, le syndicat gabonais ONEP dnonce une pollution aux hydrocarbures survenue sur deux sites offshore de Total. Quelques semaines plus tard, des nappes de ptrole sont dcouvertes sur le littoral de Port-Gentil. Les habitants accusent Total, qui possde des installa-tions proximit. Lentreprise nie toute responsabilit.

    6 I CONTRE RAPPORT TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL

  • Total est un acteur majeur des sables bitumineux de lAlberta, au Canada. Lexploitation de cette ressource a connu une forte croissance depuis le dbut des annes 2000. Elle se caractrise par des missions leves de gaz effet de serre, de 23% 50% suprieures celles du ptrole conven-tionnel. Elle a aussi un impact dvas-tateur sur lenvironnement, entranant le dfrichement de vastes portions de fort borale, la surexploitation des ressources hydriques, ainsi quune pollution de lair, des sols et des eaux qui pourrait avoir des consquences jusquen Arctique.

    Lexploitation des sables bitumineux est aussi extrmement coteuse. Mme au moment o le cours du ptrole tait encore lev, Total a abandonn son projet dusine de traitement des bitumes Voyageur pour des raisons de cots, essuyant au passage de lourdes pertes. Plus rcemment, Total a gale-ment suspendu son projet Joslyn. Ces suspensions sont lies des facteurs conomiques et non des considrations environnementales.

    En Alberta, Total dtient encore des actifs dans les projets Surmont et Northern Lignts, ainsi que dans le projet Fort Hills en cours de dveloppement. Total est galement active dans lexploitation des sables bitumineux du Venezuela.

    Au Canada et aux tats-Unis, la contes-tation des sables bitumineux sest cris-tallise autour des projets doloducs gants, comme le Keystone XL, destins acheminer le ptrole de lAlberta vers les marchs internationaux. Les sables bitumineux sont galement au centre de la contestation de laccord de commerce entre Union europenne et Canada en phase fi nale de ngociation, ainsi que de la mise en uvre de la directive euro-penne sur la Qualit des carburants. Dans tous ces dossiers, Total a pes pour favoriser larrive des sables bitumineux sur le march europen.

    LES SABLES BITUMINEUX CANADIENS,UNE DES SOURCES DNERGIE LES PLUS POLLUANTES QUI SOIENT

    MYANMAR : PREMIRE MANIFESTATION CONTRE LEXPLOITATION PTROLIRE ET GAZIREAprs en avoir demand sept fois lautorisation en vain, les rsidents de Kanauk ont fina-lement obtenu le feu vert des autorits du Myanmar pour organiser une manifestation en mars 2014la premire ciblant lindustrie ptrolire et gazire depuis la libralisation du rgime. Kanauk est situe sur le parcours dun gazoduc acheminant vers la Thalande la production de gise-ments offshore. Les manifestants demandent aux entreprises impli-ques, dont Total, de goudronner leurs routes, accusant les nuages de poussire provoqus par le pas-sage des camions daffecter leur sant. Ils nont pas fait grand chose pour rgler nos problmes depuis 20 ans , accuse un moine bouddhiste interrog par la presse. Total a promis de tenir compte des dolances des manifestants et indique avoir mis en place de nombreux programmes sociaux au Myanmar.

    TANG DE BERRE (BOUCHES-DU-RHNE)En novembre 2014, des pluies dilu-viennes provoquent le dbordement des bassins de rtention de la raffi ne-rie de La Mde, provoquant une pollu-tion aux hydrocarbures de ltang de Berre, un site class Natura 2000 mais expos des pollutions de tous ordres en raison des sites industriels qui len-tourent. Dnonant une catastrophe cologique , la Ligue pour la protec-tion des oiseaux demande louverture dune enqute publique. Les critiques dnoncent notamment linsuffi sance des bassins et labsence dun plan de prvention des risques lis aux inondations.

    ESTUAIRE DE LA SEINE (SEINE-MARITIME)Une importante fuite de brut sur un oloduc de Total est signale en mai 2014 dans lestuaire de la Seine. Cette fuite affecte directement une zone humide proche dune rserve naturelle. La faune et la fl ore sont souilles, et des interrogations persistent sur la pollution long terme des nappes phratiques. Plusieurs mois plus tard, les associa-tions dnoncent encore le manque de transparence de Total et la dmission des autorits publiques, qui ont enti-rement dlgu la gestion de la crise lentreprise : Personne ne semble avoir pris les mesures ncessaires pour ana-lyser les consquences relles de cette fuite de ptrole dans la dure!, accuse lun de ces militants.

    BASSIN DE LACQ (PYRNES-ATLANTIQUES)Ancien site dexploitation gazire, le bassin de Lacq sest engag dans une reconversion industrielle oriente vers la chimie, autour dentreprises comme Total. Dans un arrt davril 2015, la Cour des comptes alerte le gouver-nement franais sur les risques sani-taires et environnementaux de cette reconversion, attirant son intention sur plusieurs accidents qui auraient pu tre graves sur les lignes ferro-viaires du site. Les juges de la rue Cambon recommandent damliorer la scurit des transports, de rgle-menter les quotas dmissions des rejets industriels potentiellement dan-gereux, de renforcer le contrle de ltat et de mieux encadrer la scurit sanitaire.

    EN FRANCE AUSSI

    TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL CONTRE RAPPORT I 7

  • GAZ ET PTROLE DE SCHISTE : UNE CONTESTATION MONDIALEEn France et partout dans le monde, Total affiche sans complexe son souhait de dvelopper les hydrocarbures dits non conventionnels comme le gaz de schiste impliquant le recours la technique controverse de la fracturation hydraulique. Partout, ces projets se heurtent une vive rsistance sociale. Malgr leurs affirmations contraires, ni Total ni les autres firmes ptrolires et gazires nont encore fait la dmonstration quil tait possible dexploiter ces ressources sans risques environnementaux majeurs.

    ATMOSPHRE DE FAR WEST EN ARGENTINE

    DANS LE SAHARA ALGRIEN, DES QUESTIONS SUR LE RLE DE TOTAL

    Encourages par autorits argen-tines, les majors ptrolires se ruent sur la province de Neuqun, en Patagonie, pour exploiter les gaz et ptrole de schiste. Total y a accumul onze concessions. Cest lun de ses princi-paux investissements dans le secteur des gaz non conventionnels, et lun des seuls endroits du monde o Total soit directe-

    ment oprateur. Lexploitation des gaz de schiste fait lobjet dune forte opposition de divers secteurs de la socit, depuis les tudiants jusquaux paysans en passant par les indignes Mapuche et les autres habitants traditionnels de la rgion. Des manifestations organises par la coa-lition des opposants ont t rprimes par les forces de lordre. Au centre de

    la contestation, lemprise territoriale croissante des forages ptroliers (le gaz de schiste requiert bien plus de forages que le gaz conventionnel) et le risque de surexploitation et de pollution de leau, une ressource aussi prcieuse que rare dans la province.

    Dans un tel contexte, Total ne semble pas sembarrasser de prcautions puisque, profitant dune lacune juridique et de la complaisance des autorits, lentreprise entreprend des forages par fracturation hydraulique au cur mme de laire naturelle protge dAuca Mahuida. En dcembre 2014 encore, Total a annonc un nouveau projet pilote empitant sur cette aire naturelle. Les associations dnoncent galement de nombreuses irrgularits dans les tudes dimpact environnemental et labsence de prise en compte et de consultation des popu-lations locales.

    Depuis la fin de lanne 2014, la ville dIn Salah dans la rgion saha-rienne de lAlgrie est le thtre de manifestations contre le gaz de schiste. La compagnie nationale alg-rienne (Sonatrach) a annonc procder des forages exploratoires utilisant la fracturation hydraulique proximit de la ville. Le risque de pollution des res-sources en eau reprsente une menace fatale pour les habitants. Les manifes-tations trouvent rapidement un cho national et international, sur fond de contestation dmocratique du pouvoir

    algrien, accus davoir accord son feu vert au gaz de schiste pour donner des gages aux multinationales ptrolires, sans vritable dbat public.

    Officiellement, seule la Sonatrach est responsable des forages incrimins, mais sur place, les spculations vont bon train sur limplication de Total. Dautant que les dirigeants franais ont multipli les dclarations ambigus sur limplica-tion dentreprises franaises dans le sec-teur du gaz de schiste en Algrie. Total est officiellement partie prenante de la

    concession dAhnet, o les forages sont censs avoir t raliss. Mais quelques semaines aprs le dbut des manifes-tations, lentreprise annonce soudain sen tre retire six mois auparavant, en raison dun dsaccord fiscal avec ltat algrien. Total reste implique dans une autre concession de tight gas dans le Sud algrien, Timimoun, dont lexploitation ncessite le recours la fracturation hydraulique. Elle refuse de confirmer si elle a procd des fractu-rations hydrauliques en Algrie, que ce soit Timimoun ou Ahnet.

    8 I CONTRE RAPPORT TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL

  • EN AUSTRALIE, MENACE SUR UN PATRIMOINE MONDIAL DE LHUMANIT

    EUROPE : MIRAGE POLONAIS, BLOCAGE AU DANEMARK, ESBROUFE AU ROYAUME-UNI

    Il est beaucoup question des projets de dveloppement du charbon en Australie, et des menaces que les nouveaux terminaux dexportation feraient peser sur la Grande Barrire de Corail, classe au patrimoine mondial de lhumanit. On parle moins des termi-naux gants de gaz naturel liqufi , dont les risques sont pourtant similaires.

    Gladstone LNG est un projet intgr de lentreprise australienne Santos dont Total est partenaire hauteur de 27,5%. Il comprend un terminal de liqufaction et dexportation situ dans le port de Gladstone, dans la zone de la Grande Barrire de corail, un gazoduc de plu-

    sieurs centaines de kilomtres et un ensemble de gisements de gaz de couche (coal seam gas), un gaz non conventionnel extrait au moyen de la fracturation hydraulique.

    Les effets de la construction des ter-minaux gaziers de Gladstone sur len-vironnement ctier et sur la Grande Barrire de corail sont trs mal connus, en raison notamment de la complai-sance des autorits australiennes. Des incidents majeurs ont eu lieu en 2011-2012, entranant dimportantes mor-talits de poisson et de tortues. Les consquences des passages frquents dnormes tankers risquent dtre dra-

    matiques pour les rcifs coralliens et les espces quils abritent.

    Le dveloppement du gaz de couche suscite lui aussi une opposition gran-dissante en Australie, qui ne concerne pas seulement les cologistes mais aussi les milieux agricoles. Lusage grande chelle de la fracturation hydraulique par Total et Santos pourrait porter atteinte au Grand Bassin artsien, limmense nappe phratique dont dpend une grande par-tie de lAustralie pour son approvisionne-ment en eau. Santos a dj t mise en cause dans plusieurs affaires de pollu-tions, notamment autour de la fort de Pilliga en Nouvelle-Galles-du-Sud.

    Offi ciellement, Total estime tou-jours possible dexploiter le gaz de schiste en Europe dans des conditions acceptables. Mais la liste des pays o lentreprise peut encore esp-rer en faire la dmonstration ne cesse de se rduire, sous leffet conjugu des contestations locales, de laction des rgulateurs et de la gologie.

    En avril 2014, Total annonait son retrait de sa seule concession de gaz de schiste en Pologne, en raison du caractre dce-vant des forages exploratoires. Si le gou-vernement polonais a beaucoup mis sur le dveloppement des gaz de schiste, en soutenant activement la cause de lindustrie au niveau europen, la plu-part des entreprises intresses se sont aujourdhui retires du pays.

    Au Danemark, Total dtient deux permis pour des forages exploratoires de gaz de

    schiste. Dbut 2015, aprs de multiples pripties administratives, Total annon-ait en fanfare le dbut de sa campagne de forage, malgr les blocages organi-ss par la population locale, inquite pour ses ressources en eau. Hlas pour lentreprise, le gouvernement danois a suspendu au bout de deux jours les op-

    rations de Total, qui aurait utilis une substance chimique non autorise.

    Le gouvernement conservateur britan-nique a lui aussi pari gros sur le gaz de schiste et sest pos en alli indfectible des industriels au niveau europen. Total a annonc dbut 2014 un investissement de nature essentiellement symbolique dans une concession de gaz de schiste au Royaume-Uni. Pour beaucoup dob-servateurs, il sagissait surtout pour Total denvoyer un message au gouvernement franais, qui refuse toujours de lever son moratoire sur la fracturation hydraulique malgr les pressions des lobbies indus-triels. Entre-temps, la rvolution du gaz de schiste annonce au Royaume-Uni parat sur le point de svaporer avant mme davoir commenc.

    ELDORADO AVORT EN SIBRIEEn pleine crise ukrainienne, Total signe un accord avec le groupe russe Lukoil en vue de lexploitation de ptrole de schiste en Sibrie, dans la formation de Bajenov. Au mme moment, les dirigeants de lentreprise multiplient les pressions sur le gouvernement franais pour minimiser limpact des sanctions vis--vis de la Russie. L'exploitation tait alors annonce ds 2015 . Le projet est silencieusement suspendu par Total quelques mois plus tard peine, sous leffet des sanctions occidentales.

    TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL CONTRE RAPPORT I 9

  • FORER TOUJOURS PLUS LOIN ET PLUS PROFOND ?

    Confronte au dclin des rserves conventionnelles de ptrole et de gaz, Total a choisi de se lancer dans une politique de dveloppement de formes dextraction toujours plus coteuses, plus polluantes et plus risques. Cette politique, critique par certains comme une fuite en avant, inclut lextension de lextraction ptrolire et gazire dans des zones cologiques critiques et fragiles, comme lArctique. Malgr un effort dinvestissement sans prcdent, cette stratgie sest rvle un chec.

    Dimportants gisements offshore ont t dcouverts au large des ctes brsiliennes. Lun des plus prometteurs, le gisement Libra, a t attri-bu en 2013 un consortium emmen par la compagnie publique brsilienne P e t r o b r a s dont Total dtient 20%. Il est situ sous une paisse couche de sel, sous 2000 mtres deau et plus de 5000 mtres sous le fonds de locan. Le gouvernement brsilien et Petrobras ont choisi daller vite dans lexploita-

    tion de ces gisements offshore, lesquels requirent des investissements consi-drables en raison de conditions go-graphiques et gologiques extrmes. Ceci a entran dimportantes difficul-ts de financement, et dans certains

    cas la banqueroute des entreprises br-siliennes concernes. Comme ailleurs, Total ne cesse dinsister sur la ncessit

    de rduire les cots de lexploitation du pre-sal brsilien.Pour linstant, Petrobras garde au moins 30% des parts de chaque gisement ainsi que le monopole de la direction op-rationnelle. Mais cette entreprise est

    aujourdhui au cur dun vaste scandale de cor-ruption, extrme-ment politis, qui vise directement la prsidente Dilma Roussef. Certains observa-

    teurs y voient une excuse pour libraliser davantage le secteur ptrolier brsilien et rduire la part de ltat dans Petrobras.

    LES INCERTITUDES DE LOFFSHORE PROFOND AU BRSIL

    LES COTS DEVIENNENT TROP LEVS. DES PROJETS 50 MILLIARDS DE DOLLARS VOUS FONT PENSER : EST-CE QUE CE NEST PAS DE LA FOLIE ?

    CHRISTOPHE DE MARGERIE AU FORUM CONOMIQUE MONDIAL DE DAVOS, JANVIER 2014

    10 I CONTRE RAPPORT TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL

  • GRANDS LACS AFRICAINS : FORAGE PTROLIER DANS DES PARCS NATURELS ? En RDC, dans la rgion des Grands lacs, Total dtient une concession ptrolire qui empite sur le parc naturel de Virunga, une zone de confl it qui est galement lun des derniers habitats prservs des gorilles de montagne. Confronte une campagne interna-tionale de grande ampleur, Total sest engage ne pas oprer de forages dans le primtre de sa concession concidant avec le parc. Lattention sest alors dplace vers lentreprise britannique Soco, qui dtient elle aussi une concession dans la zone et dont la position est bien plus ambigu.

    Mais de lautre ct de la frontire, il en va tout autrement. Total dtient galement des concessions sur lautre rive du Lac Albert, en Ouganda. L aussi, cette zone dopration concide avec un parc natu-rel exceptionnel, le Murchinson Falls National Park. Celui-ci abrite un grand nombre despces animales emblma-tiques et menaces: lphants, rhinoc-ros, girafes, lions, lopards, chimpanzs Mais Total ne semble pas prte renon-cer y extraire du ptrole.

    Outre les risques environnementaux (reconnus par les responsables de Total eux-mmes), les projets de dveloppe-ment ptrolier dans cette rgion de lOuganda sont galement critiqus en raison datteintes allgues aux droits des populations traditionnelles locales, de risque de pollution de leau dans une zone cruciale en amont du Nil, et de par-tage inquitable des revenus.

    KASHAGAN, LE PLUS IMPORTANT GISEMENT PTROLIER DEPUIS 30 ANS, IMPOSSIBLE EXPLOITER ?Kashagan est le nom dun gisement de ptrole offshore en mer Caspienne, dans les eaux territoriales du Kazakhstan, considr par certains comme la plus importante dcouverte ptrolire depuis 30 ans, avec des rserves esti-mes entre 9 et 16 milliards de barils. Le consortium en charge de son exploita-tion associe plusieurs majors ptro-lires, dont Total (16,81%).

    Les conditions dextraction du ptrole de Kashagan sont extrmement diffi -ciles, puisque le brut est pig 4200 mtres sous le sol marin, trs haute pression, avec une teneur leve en sulfure dhydrogne. Les quipements souffrent des variations extrmes de temprature que connat la rgion.

    Beaucoup dobservateurs se demandent si lexploitation de ce gisement, dun cot astronomique, sera jamais ren-table. Le projet a fi nalement t mis en service en 2013 aprs plusieurs annes de retard et dimportants dpasse-ments budgtaires. Mais il a t mis larrt au bout de quelques mois en raison de la dcouverte de fuites de gaz. Le gouvernement kazakh rclame

    plus de 500 millions deuros damende au consortium de Kashagan, accus davoir brl le gaz qui schappait, entranant une importante pollution.Le Kazakhstan prvoit dsormais un redmarrage en 2016. Pour nous, cest la dernire chance, a comment Patrick de la Chevardire, directeur fi nancier de Total.

    ANGOLA : UN FORAGE PROFOND 16 MILLIARDS DEUROS Total a fi ni par dcider, en avril 2014, de se lancer dans le projet Kaombo en Angola. Ce projet en offshore profond, 300 kilomtres des ctes, dont le bud-get slve 16 milliards deuros (il tait initialement de 20 milliards deuros) est crucial pour Total, dont la production en Angola ne cesse de baisser. La mise en service est prvue pour 2017.

    Paralllement, linauguration de lusine de liqufaction Angola LNG, opre par Chevron et dont Total dtient 13,6%, dj retarde dun an, a t repousse au second semestre 2015, voire jusquen 2016, aprs une nouvelle srie dinci-

    dents. Cest une dception, com-mente un dirigeant de Total. Chevron, de son ct, assure avoir tir les leons des incidents rptition qui ont marqu la mise en service de cette unit gante de liqufaction, dun cot de 10 milliards de dollars.

    ARCTIQUE RUSSE : UN MGAPROJET GAZIER CONTRE VENTS ET MARES Les projets de prospection ptrolire offshore de Shell en Arctique sont sur le point dtre relancs malgr les incertitudes sur la sret de ces forages et les risques environnemen-taux majeurs quils prsentent.

    Christophe de Margerie, ancien PDG de Total, avait dclar en 2012 son opposition lexploitation ptrolire en Arctique: Du ptrole au Groenland serait une catastrophe. Une mare noire ferait trop de dgts pour limage de la compagnie. Pourtant, en avril 2014, un bateau de lONG environ-nementale Greenpeace ciblait un navire-citerne russe transportant du ptrole extrait en Arctique et achet par Total. Greenpeace avait alors dnonc lhypocrisie complte du groupe franais.

    Pour ce qui est du gaz, la pollution occasionne par ces activits est moins visible que pour le ptrole. Total dtient notamment des int-rts dans le secteur du gaz dans la zone Arctique de la Russie: le gise-ment de Chtokman, dtenu avec Gazprom et dautres partenaires, qui a t suspendu pour des raisons de cots excessifs, et surtout le mgapro-jet Yamal LNG avec Novatek, dans la pninsule de Yamal.

    Ce projet est srieusement affect par la crise diplomatique ukrainienne et les sanctions occidentales contre la Russie. Total a choisi pour linstant de sy accrocher cote que cote, malgr la crise et les diffi cults de fi nance-ment. Lentreprise na pas hsit brandir la menace dun appel des capitaux chinois pour pouvoir conti-nuer dvelopper le projet.

    NOUS N'AVONS PAS TROUV LES LPHANTS QUE NOUS CHERCHIONS,

    ARNAUD BREUILLAC, RESPONSABLE DE LA PRODUCTION ET DE L'EXPLORATION

    TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL CONTRE RAPPORT I 11

  • 12 I CONTRE RAPPORT TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL

    QUELLE TRANSITION NERGTIQUE POUR TOTAL ?Du fait de son activit, Total est lun des principaux metteurs de gaz effet de serre au niveau mondial. Lentreprise se dclare pleinement consciente des enjeux du changement climatique. Malgr ces belles dclarations, le groupe na pas vritablement rduit ses missions, et continue miser sur le dveloppement de nouvelles sources fossiles. Pire encore, il est accus de faire la promotion du gaz auprs des dcideurs politiques, au dtriment dune vritable transition nergtique base sur un dveloppement ambitieux des nergies renouvelables.

    COMMENT TOTAL INFLUENCE LES LOBBIES EUROPENS DES NERGIES RENOUVELABLES... POUR MIEUX FAVORISER LE GAZ

    C omment une major ptrolire et gazire comme Total peut-elle se retrouver la tte des principaux lobbies europens des nergies renou-velables? Apparemment, dans le but de sassurer que les objectifs europens en matire de transition ner-gtique resteront extr-mement modestes, et ne nuiront pas ses intrts dans le dveloppement du gaz.

    Total contrle deux siges sur huit (directement et via sa filiale SunPower), dont celui de prsident, au conseil dadministration de lEPIA (European Photovoltaic Industry Association),

    principal porte-parole du secteur de lnergie solaire au niveau europen. Aux cts de plusieurs autres firmes europennes ayant surtout des int-

    rts dans les nergies fossiles, Total sige aussi au conseil dadministration de son homologue pour lolien, lEWEA (European Wind Energy Association). Selon le quotidien britannique The

    Guardian, cette politique dentrisme a pour objectif ultime de dfendre le gaz comme complment aux nergies renouvelables: LEWEA avait aupara-

    vant dfendu un objectif de 45% dnergies renou-velables dans le mix ner-gtique europen en 2030, mais au moment crucial, les reprsentants de toutes les grandes entreprises au conseil dadministration () se sont opposs une cible suprieure 30% ().

    Dans le pass, lassociation de lolien avait publiquement argument quil tait non seulement possible, mais ncessaire aprs 2030, datteindre 100% dnergies renouvelables.

    LOLODUC KEYSTONE XL DOIT TRE CONSTRUIT. CEST MAINTENANT AUX TATS-UNIS DE FAIRE UN EFFORT.

    CHRISTOPHE DE MARGERIE, FORUM CONOMIQUE DE DAVOS, JANVIER 2014,

  • TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL CONTRE RAPPORT I 13

    UN CHAMPION DU GAZ DE SCHISTE EN FRANCE ET EN EUROPE

    Depuis 2011, les milieux cono-miques multiplient les initiatives pour revenir sur linterdiction de la fracturation hydraulique en France, travers colloques, confrences de lAcadmie des sciences, rapports parlementaires ou de think tanks. Les reprsentants de Total fi gurent en bonne place dans ces efforts. Son lobbying a suscit la controverse plusieurs reprises par le pass. En 2012, Total a fi nanc un voyage de journalistes fran-ais au Texas, la suite duquel les titres concerns avaient publi des articles favorables au gaz de schiste, sans men-tionner la relation avec Total.

    Total tente notamment de contourner la rsistance suscite par les gaz de schiste en mettant laccent sur dhypo-

    thtiques techniques alternatives la fracturation hydraulique, pour linstant purement chimriques.

    En France, les industriels ont rcem-ment lanc un centre dinformation et de documentation sur les gaz de schiste, le Centre de documentation sur les hydro-carbures non conventionnels , destin fournir des informations factuelles en vue de promouvoir la cause des gaz de schiste et lever le blocage franais... Ce centre a t cr linitiative dun groupe dentreprises, parmi lesquelles Total, ainsi que GDF Suez, Technip ou Vallourec.

    En 2012, lONG Corporate Europe Observatory, base Bruxelles, dnon-ait dans un rapport des institutions europennes assiges par les

    grandes entreprises gazires. Ce rap-port recense un grand nombre dv-nements et dinitiatives organiss pour soutenir la cause du gaz de schiste au niveau europen, dont on retrouve sou-vent parmi les parties prenantes Total. Franois-Rgis Mouton, dlgu aux affaires europennes de Total, prside Gas Naturally, le lobby europen du gaz regroupant les associations profession-nelles des producteurs, des transporteurs et des distributeurs de gaz en Europe. Gas Naturally est lorganisateur de lEuropean Gas Week, le grand vnement annuel de lindustrie, qui accorde souvent un large place aux gaz non conventionnels. Total fi gurait initialement parmi les fi nanceurs du site pro-gaz de schiste mis en place par lindustrie, Shale Gas Europe, mais ce soutien semble avoir t suspendu.

    BIOMASSE : LE CHOIX CONTROVERS DE LA BIOLOGIE DE SYNTHSEEn matire dnergies renouvelables, Total affi che ses ambitions dans le sec-teur de la biomasse. Ce terme dsigne des activits souvent controverses pour leur impact environnemental et leurs bnfi ces douteux en termes de rduction globale des missions de gaz effet de serre, comme le dveloppe-ment des agrocarburants sur des terres auparavant destine la production ali-mentaire. Dans le cas de Total, ce terme renvoie aussi au pari de la biologie synthtique, un domaine controvers des biotechnologies consistant crer ou recrer des organismes vivants synthtiques en laboratoire des fi ns industrielles. Lentreprise franaise a nou un important partenariat cet effet avec la socit Amyris, promet-tant de construire de vritables usines

    vivantes, optimises pour fermenter des sucres et pour produire des [agro-carburants]. Les critiques estiment que la biologie de synthse, en plus de favoriser la privatisation dorga-nismes vivants via des brevets, com-porte des risques biologiques, sanitaires et environnementaux mal matriss.

    LE MIRAGE DU STOCKAGE DU CARBONELa capture et le stockage souterrain du CO2 (ou CCS) est encore parfois prsent par les dfenseurs des nergies fossiles comme la solution miracle lenjeu climatique. Mais cette technologie est extrmement coteuse et pose des pro-blmes non rsolus de risques de fuites et daugmentation de lactivit sismique. Total avait expriment la capture-s-questration du CO2 sur un ancien puits

    gazier Lacq (Pyrnes-Atlantiques), mais a mis fi n cette exprimentation au bout de trois ans. Elle aura permis de squestrer 50000 tonnes de CO2, dans un puits qui avait produit presque un million de tonnes de gaz. Depuis, Total a mis ses projets en sommeil. Les lobbies conomiques europens ont tent rcemment de relancer le CCS, en essayant den faire supporter les cots par la puissance publique.

    UN LEADER DU SOLAIREEn 2011, Total faisait lacquisition de SunPower, une entreprise californienne spcialise dans le photovoltaque, pour un milliard deuros. SunPower a survcu la crise du secteur solaire et une chute vertigineuse de son cours en Bourse. La fi liale de Total a une position de leader sur le march du solaire aux tats-Unis et dveloppe aujourdhui des projets dans dautres pays, comme lEspagne, la Chine ou le Chili. Cette activit reste toutefois marginale en termes dinvestissements et de chiffres daffaires au niveau du groupe. Total ne communique pas de chiffre pr-cis sur ce point, mais les investissements de la branche Marketing & Services, qui englobe les nergies nouvelles et les activits de distribution la pompe, ne reprsentaient que 6% des investisse-ments globaux de lentreprise en 2014. Et ces 6% sont alls dans leur majorit au dveloppement de stations-services.

    GAZ EFFET DE SERRE : UNE RDUCTION EN TROMPE LIL Le rapport 2014 du CDP (Carbon Disclosure Project) pointe du doigt la faiblesse des efforts consentis par Total et ses consurs franaises en matire de rduction de leurs missions de gaz effet de serre. De 2013 2014, les missions dclares baissent globalement de 2%. Cette baisse est essentiellement due des change-ments de primtres de dclaration au sein des 5 entreprises responsables, en France, des trois quarts des missions industrielles: Total, GDF Suez, EDF, Lafarge et ArcelorMittal. Ainsi, Total justifi e une baisse de 2 points de ses missions par son dsengagement dans le secteur des engrais, selon le CDP. Idem pour Lafarge ou GDF Suez. Chez EDF et ArcelorMittal, les missions ont augment. On attend encore un vritable changement chez les industriels franais.

  • PRATIQUES SOCIALESTotal vient de signer un accord cadre mondial avec les syndicats internationaux en vue de garantir le respect des droits des travailleurs dans tous les pays dopration du groupe, qui compte 100307 employs, dont les deux tiers hors de France. Total est nanmoins active dans des pays qui ne reconnaissent pas les droits syndicaux, et est accuse ailleurs de rpression syndicale et de recours abusif la sous-traitance. En France, ce sont les pertes progressives demploi et les dlocalisation qui proccupent lopinion, comme lillustre le nouveau plan de restructuration du raffi nage annonc il y a quelques semaines.

    RESTRUCTURATION DU RAFFINAGE EN FRANCE

    Total a dvoil en avril 2015 son plan de restructuration de ses activits raffi nage en France, aprs la fermeture de la raffinerie des Flandres Dunkerque en 2010. Lentreprise voque une surcapacit en France et en Europe et souhaite y rduire sa capacit de raffi nage de 20% dici 2017.

    Deux usines de raffi nage sont princi-palement concernes, celle de Donges (Loire-Atlantique) et celles de La Mde (Bouches-du-Rhne). Total a annonc 400 millions deuros dinvestissements dans la premire, tandis que la seconde sera reconvertie dans la production dagrocarburants. Pour Patrick Pouyann, directeur gnral de Total, ces annonces dmontrent notre engagement pour faire vivre lindustrie lourde en France

    et en Europe. Total sest engage ce quil ny ait pas de licenciement ni de mobilit contrainte. 180 postes seront

    toutefois supprims La Mde, par le biais de dparts anticips en retraite et de mesures de reclassement.

    Pour certains syndicalistes, la situation du raffi nage en France refl te surtout les choix dinvestissement de Total, qui aurait privilgi les sites ltranger pour des raisons de moins-disant social et environnemental. Total supprime des emplois aprs avoir vers 7 mil-

    liards de dividendes ses actionnaires et avoir bnfici de 200 millions daides publiques travers le CICE et le crdit impt recherche. Et pourtant, les investissements ne sont pas faits en France mais ltranger , accuse Medhi Rachid, reprsentant de la CGT bas La Mde.

    TOTAL SUPPRIME DES EMPLOIS APRS AVOIR VERS 7 MILLIARDS DE DIVIDENDES SES ACTIONNAIRES ET AVOIR BNFICI DE 200 MILLIONS DAIDES PUBLIQUES

    EN ANGLETERRE AUSSITotal a aussi annonc en fvrier 2015 la suppression de 180 emplois et la rduction de la production de la raffi nerie de Lindsey, dans le Lincolnshire.

    RECONVERSION DE LA RAFFINERIE DE LA MDE : UN SIMPLE AFFICHAGE ?Dans le cadre de son plan de restructuration du raffinage en France, Total a annonc la reconversion de la raffinerie de La Mde vers les nergies vertes, avec notamment la mise en place dune raffi nerie dagrocarburants. Les syndicats dnoncent un projet relevant de laffi chage, loin dtre prenne et qui ne permettra pas de pr-server lemploi sur le site. Selon eux, les investissements annon-cs par Total (200 millions deu-ros) ne sont pas signifi catifs lchelle qui est celle du secteur ptrolier. En outre, selon eux, la production prvue sur La Mde (des agrocarburants de premire gnration) sera forcment limi-te et vite dpasse du fait des nouvelles rgles europennes et de larrive de nouvelles gn-rations de carburants verts.

    14 I CONTRE RAPPORT TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL

  • IndustriALL a sign en janvier 2015 un accord-cadre international avec Total. Depuis quand est-il en ngociation?Il avait dj eu des discussions en vue dun accord-cadre il y a plusieurs annes, mais les syndicats internatio-naux ont choisi de ne pas le signer, en raison des activits de lentreprise au Myanmar, alors sous un rgime mili-taire. Suite la normalisation de la situation dans le pays, nous avons dcid quil tait dsormais possible de signer un accord.

    IndustriALL, qui a sign plus de 40 accords-cadres avec des rmes mul-tinationales, a rcemment adopt une nouvelle politique visant rendre le contenu de ces accords davantage protecteurs pour les travailleurs. Laccord sign avec Total corres-pond-il ces nouveaux critres?Lhistoire des accords-cadres mon-diaux est trs rcente, pas plus dune vingtaine dannes. Chaque anne, nous en signons, et nous nous effor-ons dobtenir des provisions plus robustes, des normes plus fortes, des mcanismes de mise en uvre plus avancs. Le texte de laccord avec Total contient probablement les dis-positions parmi les meilleures ce jour.

    Que prvoit-il en termes de suivi et de mise en uvre?Il y aura un comit responsable du suivi et de la mise en uvre avec plusieurs reprsentants syndicaux. Ces dispositions semblent assez fortes. Reste voir comment elles

    seront effectivement mises en uvre. Traduire ces dispositions dans la ra-lit sera un dfi , mais je suis raison-nablement optimiste.

    Quels sont les pays o Total est pr-sent que lon peut considrer comme des points chauds pour les droits des travailleurs?Les rgions que nous avons particu-lirement lesprit sont lAsie-Paci-fi que notamment lIndonsie et le Myanmar - et lAfrique. Nous travail-lons actuellement avec nos affi lis sur la meilleure manire dutiliser laccord-cadre pour renforcer les droits des travailleurs et le taux de syndicalisation dans ces pays. Total a une forte prsence en Afrique, et lac-cord-cadre mondial attire beaucoup dattention et dintrt de la part des syndicats l-bas. Je pense que lac-cord-cadre avec Total sera un outil utile sur le terrain.

    Quen est-il de lArabie saoudite, o Total augmente sa capacit de raf- nage, alors que le groupe la rduit en France?Bien entendu, nous allons nous effor-cer de faire en sorte que les disposi-tions de laccord-cadre mondial soient appliques dans tous les pays o Total opre. Mais lArabie saoudite et les autres pays du Golfe sont des pays notoirement diffi ciles pour le mou-vement syndical. Il ny a presque pas de prsence syndicale, et les lgis-lations nationales ne le permettent souvent pas. Cest un problme qui ne concerne pas uniquement Total.

    POLMIQUE SUR LE MANAGEMENT AU NIGERIAUn confl it entre Total et un syn-dicat a-t-il dbouch sur la grve nationale de dcembre 2014, qui a paralys le secteur ptrolier nig-rian et entran une pnurie des-sence dans le pays? Les syndicats entendaient dnoncer lincurie du gouvernement dans un contexte de chute du prix du ptrole, ainsi que les violations du droit du tra-vail par les oprateurs ptroliers, notamment le recours gnralis la sous-traitance. Il semble cepen-dant que ltincelle qui a enfl amm le confl it soit la dcision du mana-gement de Total au Nigeria de muter un leader syndical de Port Harcourt Lagos, puis de la licencier. Selon les syndicats, il sagissait dune mesure de rpression syndicale, et Total naurait pas respect sa pro-messe initiale de rintgration de lemploye concerne. Pour Total, cette employe aurait initialement demand sa mutation, puis serait revenu sur sa dcision aprs avoir collect son indemnit de transfert.

    GRVE AU GABON lappel du principal syndicat du secteur, lONEP, un mouvement de grve a paralys les activits ptrolires au Gabon en dcembre 2014. Les syndicalistes dnonaient les pratiques des grands groupes comme Total et de leurs entreprises sous-traitantes, et rclamaient la rintgration de salaris licencis. Le mouvement a provoqu un dbut de pnurie dessence dans le pays. Le Gabon, comme le Congo, pour-rait tre lune des principales victimes des rductions dinves-tissement annonces par Total et ses pairs en raison de la chute du cours du ptrole. Certains obser-vateurs craignent des vagues de licenciements.

    ENTRETIEN AVEC KEMAL ZKAN, SECRTAIRE GNRAL ADJOINT DINDUSTRIALL, LA FDRATION SYNDICALE INTERNATIONALE DE LINDUSTRIE.

    LACCORD CADRE MONDIAL SIGN AVEC TOTAL EST LUN DES MEILLEURS CE JOUR

    CHEZ TOTAL, IL NY A PAS QUE LES PATRONS QUI MEURENT Le groupe Total a t endeuill en 2014 par le dcs de son PDG Christophe de Margerie, dans un accident davion en Russie. Pour la CGT, cest aussi loccasion de rappeler que la scurit dans les transports (), ainsi que sur nos installations indus-trielles, nest pas garantie, occulte souvent par les principes fi nanciers. () Combien de salaris perdent leur vie en venant la gagner sans que cette question ne soit aborde souvent quen termes de cots? () Cest ce pourquoi la CGT milite en permanence dans les instances reprsentatives du personnel. Mais force est de constater que () larbitrage entre objectifs fi nanciers et scurit est encore trop souvent fait au dtriment de la sant et scurit. En 2013, on comptait 15 accidents du travail mortels au sein du groupe Total, dont 7 dans les usines du groupe. En 2014, Total dclare 9 accidents mortels.

    TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL CONTRE RAPPORT I 15

  • FINANCES ET FISCALIT : BEAUCOUP DE QUESTIONS IRRSOLUESTotal est depuis plusieurs annes lobjet de controverses en France du fait quelle ne verse pas dimpts sur les socits malgr des bnfices parmi les plus hauts du CAC 40. Les critiques y voient un exemple doptimisation fiscale illgitime. Sous la pression, Total a dcid cette anne de publier une liste complte de ses filiales et dengager une politique de retrait des territoires considrs comme des paradis fiscaux. Mais cette dmarche parat encore trs partielle et incomplte.

    Total, la plus importante entre-prise franaise, sest trouve au centre de controverses rptes du fait quelle ne paie pas dimpts sur les socits dans le pays depuis plu-sieurs annes malgr des bnfices se chiffrant en milliards et des dividendes record: 14,3 milliards de dollars de bn-fices ajusts en 2013 (dont 50% verss en dividendes), 15,8 milliards de dollars en 2012 (dont 43% en dividendes), deux annes o Total na pas pay dimpt sur les socits en France. Une situation paradoxale qui parat une illustration clatante des pratiques doptimisation fiscale des grandes entreprises aux dpens des tats o ils oprent. Les cri-tiques pointent aussi le fait que Total bnficie daides publiques ainsi que de plusieurs millions de crdits dim-pts via les dispositifs du crdit impt

    recherche (CIR) et du crdit impt com-ptitivit emploi (CICE). Pour ne rien arranger, la trsorerie de Total a t dplace Londres en 2013.

    Les dirigeants de Total font valoir que lactivit du groupe en France est dfi-citaire, et que Total sacquitte de 950 millions dimpts et de taxes diverses dans notre pays par an. Les critiques stonnent nanmoins quil ne soit pas rellement tenu compte du fait que Total, quand bien mme elle est active partout dans le monde, est une entre-prise dirige depuis la France. Dans les calculs financiers, la valeur ajoute issue des savoirs, de lexpertise, de la proprit intellectuelle et de la matrise douvrage des cadres de Total est-elle localise en France, et dans quelles proportions? Plus largement, la distribution officielle

    du chiffre daffaires de Total corres-pond-elle effectivement la rpartition gographique de ses activits indus-trielles et de leur valeur ajoute? En labsence dune vritable transparence financire et fiscale, il nest pas possible de savoir exactement ce quil en est. titre dexemple, le magazine Capital calculait en octobre 2014 que Total avait conomis prs de 50 millions deuros dimpts sur les socits en France en plaant des fonds en Belgique et en bnficiant ainsi du rgime dits des intrts notionnels.

    Dans le contexte de lannonce du plan de restructuration de lactivit raffinage de Total en France, le directeur gnral Patrick Pouyann, a annonc fin avril 2015 que le groupe paierait nouveau limpt sur les socits dans le pays en 2014.

    CONTROVERSES SUR LES IMPTS PAYS PAR TOTAL EN FRANCE

    16 I CONTRE RAPPORT TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL

  • DES AIDES PUBLIQUES EN GRANDE-BRETAGNE POUR FORER EN MER DU NORD En mars 2015, Total et dautres majors ptrolires et gazires ont rclam et obtenu des crdits dimpts suppl-mentaires du gouvernement britannique afi n de pouvoir maintenir leurs opra-tions en Mer du Nord malgr la chute du cours du ptrole. Selon les chiffres rassembls par des ONG britanniques, ces mmes entreprises avaient pour-tant profi t des cours lev du brut pour engranger des bnfi ces confortables jusquen 2014, avec un taux moyen de retour sur investissement de 33% - lar-gement de quoi compenser les pertes annonces ces derniers mois. Les majors ptrolires bnfi ciaient dj daides publiques (crdits dimpts compris) trs consquentes. Total aurait ainsi reu en tout 528 millions de livres sterling daides diverses du gouvernement britannique entre 2009 et 2014, loin devant ses concurrentes Statoil ou Chevron.

    PARADIS FISCAUX : UNE OPRATION TRANSPARENCE TRS PARTIELLEObjet de soupons rcurrents sur ses pra-tiques fi scales, le gant ptrolier franais a dcid dbut 2015 de rendre publique la liste de ses 903 fi liales consolides, y compris celles qui sont situes dans des juridictions secrtes comme les Bermudes ou les les Caman.

    La publication par Total dune liste intgrale de ses fi liales constitue un progrs dans la mesure o, auparavant, lentreprise ptrolire ne mentionnait

    quenviron 180 fi liales dans ses rapports annuels. Nanmoins, 60% des 50 plus grandes entreprises europennes et un peu moins de la moiti du CAC 40 publiaient dj une liste intgrale de leurs fi liales en 2013.

    Selon Total, 19 de ses filiales sont implantes dans des territoires pouvant tre considrs comme des paradis fi s-caux, en loccurrence les les Bahamas, Bermudes et Caman. Le nouveau direc-teur gnral de Total, Patrick Pouyann, a annonc que son entreprise travaillait se retirer de ces territoires.

    Linitiative reste toutefois en de de ce que demandent les associations ddies la justice fi scale et la transparence des industries extractives. Total utilise ses propres critres pour dcider quel pays peut tre considr comme un paradis fi scal, alors quil existe dj des listes cet effet. Sur la base de la liste tablie par le Tax Justice Network - la plus exigeante-, ce ne sont pas 19, mais

    178 fi liales de Total qui sont situes dans des juridictions secrtes!

    Les paradis fi scaux ne sont pas seu-lement des les exotiques loignes. Ils peuvent aussi tre de pays grands ou moyens, y compris en Europe, qui ont mis en place des dispositifs fi scaux avantageux destins attirer les entre-prises. Cest le cas, selon le Tax Justice Network, de lIrlande, de la Suisse, du Luxembourg et des Pays-Bas.

    En outre, cette liste est publie sans aucune information sur le chiffre daffaires, les bnfi ces ou le nombre demploys de chacune des fi liales. Ce reporting pays par pays, revendica-tion historique de la socit civile de plus en plus reprise dans les institu-tions internationales, constitue le seul moyen vritable dy voir clair dans les fl ux fi nanciers internes au groupe.

    BRAS DE FER FISCAL AU GABONEn fvrier 2014, le ministre de lcono-mie gabonais adressait Total Gabon un avis de redressement fi scal de 805 millions de dollars, suite un contrle effectu sur la comptabilit relative aux annes 2008, 2009 et 2010. Un redres-sement que Total a immdiatement caractris comme dnu de tout fondement. Le sujet a envenim les relations entre Total et ltat gabonais, qui dtiennent respectivement 58% et 25% de Total Gabon, et pris des allures de crise diplomatique. Un compro-mis a fi nalement t trouv, car Total a annonc en novembre la fi n de son redressement, sans prciser si elle avait vers de largent ltat gabonais.

    Outre les critiques relatives aux critres de Total pour considrer un pays comme un paradis fi scal et labsence dun reporting pays par pays, la liste com-plte de ses fi liales publie par le groupe Total ne lest apparemment mme pas.Des lments rassembls par Bureau van Dijk, partir de la base de donnes Orbis suggrent la prsence dune trentaine de fi liales supplmentaires de Total aux Pays-Bas que lentreprise na pas intgres sa liste offi cielle. Dans la plupart des cas, il semble sagir de fi liales de fi liales. Il nest pas possible den savoir plus sur la nature de leur activit et sur les informations fi nancires qui sy rapportent. Cela illustre encore une fois la nature superfi cielle de lexercice de transparence auquel assure se livrer Total. Le groupe exerce souvent ses activits travers un empilement de fi liales. Une analyse du site OpenOil a ainsi tabli quentre la socit mre Total et ses activits oprationnelles au Nigeria, il y avait pas moins de quatre entits dans trois pays diffrents.

    LES FILIALES OUBLIES PAR TOTAL

    TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL CONTRE RAPPORT I 17

  • LE PTROLE ET LE GAZ, BNDICTION OU MALDICTION POUR LES PAYS PRODUCTEURS ?Dans les pays producteurs, et en particulier dans ceux qui subissent les effets de la pauvret, de la corruption et de labsence de dmocratie, le ptrole et le gaz peuvent se rvler une maldiction, dans la mesure o ils entranent pollutions, violences et accaparement des richesses par une petite lite. Prsente aux quatre coins du monde, Total est accuse comme tout le secteur extractif de ne pas contribuer suffisamment au dveloppement humain des pays o elle opre et de nouer des relations troites avec des gouvernements autocratiques.

    CONTRATS DE TOTAL LTRANGER : LA TRANSPARENCE OUI, MAIS POUR PLUS TARD

    La France et lUnion europenne ont rcemment adopt de nou-velles dispositions en matire de transparence des industries extrac-tives, en introduisant notamment une obligation de divulgation des paiements effectus au bnfice de gouver-nements trangers. Total a dclar sans ambages son opposition cette nouvelle lgislation. Nous sommes pour la transparence, nous sommes trs actifs dans lInitiative pour la Transparence dans les Industries extractives.. Mais cette directive europenne pose des pro-blmes de conflit avec les lgislations locales quand celles-ci interdisent la publication des donnes , [et] elle cre une distorsion de concurrence avec les

    entreprises non-europennes qui ny seront pas soumises, a comment Jean-Franois Lassalle, directeur des affaires publiques du gant ptrolier franais.

    Les ONG contestent lexistence de lgislations interdisant formellement la diffusion de ces informations fiscales dans des pays comme la Chine, lAn-gola, le Cameroun ou le Qatar. Certaines entreprises ptrolires ont publi leurs

    paiements dans ces pays sans que en ptir, comme par exemple la norv-gienne Statoil, initialement en Angola et dsormais dans tous les pays o elle opre. Pour ce qui est de la distorsion de concurrence, les rticences des entreprises extractives sont surtout fortes dans les pays o sappliquent des rgimes dits de contrats de partage de production, car la fiscalit sy ngocie au cas par cas. Or le fait de ngocier les conditions de taxation dans des contrats tenus gnralement secrets est vivement critiqu par la socit civile. Les associations dnoncent notamment les exemptions fiscales que les entreprises peuvent obtenir, ainsi que les risques de corruption quand les impts font lobjet de tractations confidentielles.

    Si la loi finalement adopte en France introduit effectivement lobligation pour toutes les entreprises extractives et forestires franaises (ou cotes en France) de rendre publics les impts, taxes et autres revenus quelles versent aux gouvernements des pays dans lesquelles elles oprent, partir de 100

    000 euros, le texte reste plus prudent sur la question des sanctions. Une publica-tion trompeuse ou errone nest punie que de 3750 euros damende, pouvant tre assortis dune diffusion publique de la sanction. Rien dinsurmontable pour des groupes comme Total.

    NOUS SOMMES POUR LA TRANSPARENCE, NOUS SOMMES TRS ACTIFS DANS LINITIATIVE POUR LA TRANSPARENCE DANS LES INDUSTRIES EXTRACTIVES.. MAIS CETTE DIRECTIVE EUROPENNE POSE DES PROBLMES [...]

    18 I CONTRE RAPPORT TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL

  • PROCDURES CONTRE LOUGANDA ET LARGENTINEPour rgler ses dmls fi scaux, les traits bilatraux dinvestissement et leurs mcanismes de rsolution des litiges entre tats et investisseurs, ou ISDS, sont bien pratiques. Ces mca-nismes au centre de la controverse sur le trait de libre-change entre Europe et tats-Unis (Tafta) per-mettent Total de poursuivre lOu-ganda devant un tribunal arbitral priv par le biais dune fi liale nerlandaise. Total et son partenaire Tullow esti-ment quelles ont droit une exemp-tion fi scale, ce que le gouvernement ougandais conteste, argumentant que le ministre qui a valid ce montage nen avait pas rellement le pouvoir.Total a dj eu recours ces mca-nismes darbitrage dans le cadre dune procdure initie contre lArgentine. Larbitrage a t rendu en faveur de Total, pour un montant estim 300 millions de dollars. LArgentine a initi une procdure dannulation.

    TOTAL CONTESTE AU YMENBien avant le confl it actuel, les acti-vits de Total au Ymen se sont trouves plusieurs reprises la cible de contestations sociales, ainsi que de menaces de groupes arms. Dimportantes manifestations ont eu lieu au dbut de lanne 2014, emme-nes par des fi gures du mouvement

    dmocratique qui avait renvers en 2012 lancien dictateur Ali Abdallah Saleh. Les manifestants dnon-aient la teneur des contrats signs par Total (mais aussi GDF Suez et le coren Kogas) et ltat ymnite sous le rgime de Saleh, accusant les entreprises davoir dlibrment sous-estim le prix de vente du gaz ymnite sur le march mondial, et de ne reverser quune partie infi me des revenus gnrs ltat. Le nou-veau gouvernement rclamait alors une hausse du prix de vente de son gaz naturel liqufi , ce quil a obtenu du coren Kogas mais non des deux parties franaises.

    GRANDES MANUVRES AU SOUDAN DU SUDHistoriquement, Total dtenait tous les droits sur une immense concession ptrolire de 120000 kilomtres carr sur un territoire qui appartient dsor-mais au pays nouvellement cr du Soudan du Sud. Les autorits du nou-vel tat ont souhait diviser ce bloc en plusieurs lots, contre la volont de Total. Les ngociations sont encore en cours, alors que le violent confl it qui secoue ce pays a entran linter-ruption de toute activit ptrolire. ExxonMobil, qui stait un temps associe Total, a annonc son retrait dbut 2014. Les ONG estiment quil est prfrable quaucun contrat ptrolier ne soit sign en priode de confl it, car ils dbouchent gnralement sur des termes moins avantageux pour les gouvernements et leurs citoyens.

    Le fonds souverain norvgien, action-naire de Total, a annonc dbut 2014 quil allait se pencher sur les activi-ts de Total au Sahara occidental, territoire occup par le Maroc depuis prs de qua-rante ans, afi n de vrifi er leur conformit avec son code thique.

    Total bnfi cie dune licence couvrant une zone offshore de plus de 100000 kilomtres carrs (la surface du Portugal) au large du Sahara occidental, le bloc Anzarane. Originellement octroye en 2002 par le gouvernement marocain, elle vient dtre renouvele, pour des opra-tions de reconnaissance. Lentreprise franaise souligne navoir pas encore, ce jour, dpos de demande de ralisation de forages exploratoires.

    Selon les dfenseurs des droits du peuple sahraoui - notamment lONG Western Sahara Resources Watch (WSRW, Veille sur les ressources naturelles du Sahara occidental)-, les licences octroyes Total et dautres fi rmes ptrolires et gazires sur le territoire sahraoui par le gou-

    vernement marocain sont illgales du point de vue du droit international. Ils estiment mme que Total contribue dans les faits, en collaborant avec un gouvernement doccupation, dl-gitimer la lutte pour lautodtermina-tion du peuple sahraoui. Aucun tat ne reconnat la souverainet revendique par le Maroc sur le Sahara occidental.

    En rponse lannonce du fonds sou-verain norvgien, Total a dclar Reuters que ses activits offshore au Sahara occidental, comme dans dautres rgions o [elle opre], sont en ligne avec le droit et les standards internationaux applicables fi gurant dans [son] Code de conduite, en parti-culier ceux lis aux droits humains. Une opinion juridique trs controver-se rendue sous lgide de lONU, dite Opinion Corell, entrouvre la porte loctroi de concessions ptrolires et gazires au Sahara occidental par le Maroc, condition que celles-ci bnfi -cient aux populations locales et quelles soient consultes. Ce que dmentent vigoureusement les opposants..

    QUE FAIT TOTAL AU SAHARA OCCIDENTAL ?

    TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL CONTRE RAPPORT I 19

  • 20 I CONTRE RAPPORT TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL

    DEVANT LES TRIBUNAUXTotal sest retrouve au fi l des annes la cible de nombreuses allgations de violations des droits humains, de pollution ou encore de corruption. Le groupe a t au centre de plusieurs affaires judiciaires de grande ampleur, depuis celle de lErika en France au procs ptrole contre nourriture concernant l'Irak, en passant par les poursuites relatives aux relations entre Total et la junte militaire birmane. Selon ses dtracteurs, le groupe a su profi ter des lacunes du droit franais et international pour se tirer bon compte de ces procs.

    TOTAL ET LES AFFAIRES : UNE ILLUSTRATION DES LACUNES DU RGIME JURIDIQUE APPLICABLE AUX MULTINATIONALES

    Au printemps 2015, lAssemble nationale adoptait une pre-mire loi sur la responsabilit juridique des multinationales fran-aises en matire de droits humains, qui doit main-tenant tre examine par le Snat. Un premier pas historique pour les dfen-seurs des droits humains, obtenu malgr les pres-sions des lobbies cono-miques. Ceux-ci avaient russi faire chouer une premire version de la loi, plus contraignante pour les entreprises et davantage protectrice pour leurs vic-times directes et indirectes.

    Pour les associations actives sur ces questions, peu dentreprises franaises illustrent mieux que Total le besoin dune

    telle loi. Le cur du problme est que les multinationales parviennent le plus souvent, en jouant de leur structuration juridique, chapper toute poursuite

    pour les atteintes aux droits humains ou lenvironnement occasionnes par leurs activits dans des pays tiers.

    Ainsi, dans les annes 1990, les ONG avaient dnonc les activits de Total au Myanmar, son soutien fi nancier la junte militaire, et des cas de recours au travail forc. Des procdures judiciaires

    sont lances en France et en Belgique, sans succs. En 2006, Total bnfi ce dun non-lieu en France au motif que les faits de travail forc ltranger ne

    sont pas sanctionns par le droit franais. Lentreprise a nanmoins conclu un accord lamiable avec ses accusateurs et leurs soutiens.

    Total, comme ses pairs, continue privilgier les initiatives volontaires et non contraignantes en matire de protection des droits humains et de responsabilit sociale des entreprises. Ce type dinitiatives na pourtant manifestement pas contri-bu rduire le nombre de contro-verses affectant les activits de Total dans le monde.

    TOTAL BNFICE DUN NON-LIEU EN FRANCE AU MOTIF QUE LES FAITS DE TRAVAIL FORC LTRANGER NE SONT PAS SANCTIONNS PAR LE DROIT FRANAIS.

  • TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL CONTRE RAPPORT I 21

    ERIKA, AZF : INTROUVABLE RESPONSABILIT ENVIRONNEMENTALE EN FRANCE ?

    En France, les affaires du naufrage de lErika et de laccident indus-triel AZF Toulouse illustrent aussi leur manire la diffi cult mettre en cause juridiquement les groupes comme Total pour les problmes cau-ss par leurs fi liales ou dans le cas de lErika par un navire quils ont affrt.

    Il y a un peu plus de quinze ans, la mare noire provoque par le naufrage du ptro-lier Erika au large des ctes franaises provoquait un immense dsastre co-logique dont le cot pour la socit se chiffre en centaines de millions deuros. Au terme dune saga judiciaire rebondis-sements, la Cour de cassation a confi rm la responsabilit pnale et civile de Total en tant quaffrteur de lErika. Total avait tent de sexonrer de sa responsabi-lit civile, et donc de lobligation lgale de verser des dommages et intrts, en invoquant une convention internationale. Total cope galement dune amende de 375000 euros au titre du prjudice colo-gique. La disproportion entre ce montant

    modeste lamende maximale possible et lampleur des dgts occasionns par la mare noire a pouss le lgislateur renforcer le droit franais sur ce point.

    En 2001, lusine chimique AZF explosait dans la banlieue de Toulouse, faisant 31 morts et 2500 blesss. En 2012, la Cour dappel de Toulouse condamnait la socit Grande Paroisse, fi liale de Total et exploitant de lusine AZF, mais relaxait le

    groupe Total lui-mme et ses dirigeants. En raison dun problme de confl it din-trts dune des magistrates, la dcision de la Cour dappel a t casse en janvier 2015 suite un pourvoi de Total, et laffaire renvoye devant la Cour dappel de Paris. Lassociation des familles endeuilles AZF Toulouse, qui a dpos une plainte pour entrave la justice, dnonce la volont du groupe Total de () troubler la manifestation de la vrit.

    AUTRES AFFAIRES...

    PTROLE CONTRE NOURRITURE EN IRAK : LAFFAIRE SERA REJUGETotal est galement poursuivie dans le cadre de laffaire ptrole contre nour-riture, pour avoir particip un vaste systme de contournement, moyen-nant le versement de pots-de-vin, du programme mis en place par lONU pour attnuer les effets de lembargo amricain contre lIrak entre 1992 et 2002. Tous les prvenus ont t relaxs en premire instance en juillet 2013, mais le parquet a fait appel de cette relaxe concernant Total, dont lavocat a dnonc un acharnement judiciaire.

    TOTAL RENVOY DEVANT LES TRIBUNAUX POUR DES FAITS DE CORRUPTION EN IRANEn novembre 2014, Total a t renvoy en correctionnelle pour corruption dagents publics trangers dans le cadre de contrats passs avec lIran. En cause, le versement allgu de pots-de-vin en vue de lobtention de droits dexploita-tion de champs ptroliers et gaziers en

    Iran au cours des annes 1990 et 2000. Poursuivie aux tats-Unis pour la mme affaire, Total avait accept en 2013 de verser prs de 400 millions de dollars damende dans le cadre dun rglement lamiable avec la justice amricaine.

    ENQUTE SUR LA LIBYEUne enqute est en cours en France pour des versements allgus de pots-de-vin en Libye en vue de lobtention dun contrat gazier. Il sagit dune ramifi cation de lenqute sur laffaire Karachi.

    AFRIQUE DU SUD : PRESSION SUR LE GOUVERNEMENT POUR CONTINUER POLLUERNatref, une joint-venture de Total avec Sasol, a annonc son inten-tion de poursuivre le gouvernement sud-africain en raison de lintroduc-tion de normes plus strictes de qua-lit de lair. Ces nouvelles rgulations auraient pour effet de limiter forte-ment les missions toxiques autori-ses dans certaines zones sensibles, comme celles o se situent les usines

    ptrochimiques de Sasol et Natref. Les nouvelles normes avaient pour-tant t fi xes en consultation avec lindustrie. Selon les environnemen-talistes sud-africains, cette procdure risquait dentraner un retour 20 ans en arrire en matire de lutte contre la pollution de lair en Afrique du Sud. Sasol et Natref ont rcemment abandonn les poursuites aprs avoir obtenu un dlai supplmentaire de 5 ans pour se mettre en conformit.

    CONTENTIEUX APRS LA POLLUTION DU PORT DE DJIBOUTIEn septembre 2014, la Cour suprme de Djibouti condamne Total et lentreprise Oil Libya payer 150 millions deuros damende suite une grave pollution du port de Djibouti survenue en 2000. peine la sentence prononce, les fi liales locales de Total se sont dclares en cessation de paiement. La justice dji-boutienne affi rme avoir dcouvert les preuves que cette insolvabilit a t dlibrment organise, via des dtour-nements dactifs au profi t de la maison mre entre 2011 et 2014.

  • LES AMIS DE LA TERRE FRANCE

    La Fdration des Amis de la Terre France est une association de protection de lHomme et de lenvironnement, but non lucratif, indpendante de tout pouvoir politique ou religieux. Cre en 1970, elle a contribu la fondation du mouvement cologiste franais et la formation du premier rseau cologiste mondial Les Amis de la Terre International prsent dans 76 pays et runissant 2 millions de membres sur les cinq continents. En France, les Amis de la Terre forment un rseau dune trentaine de groupes locaux autonomes, qui agissent selon leurs priorits locales et relaient les campagnes nationales et internationales sur la base dun engagement commun en faveur de la justice sociale et environnementale.

    Contact : Les Amis de la Terre France 2B, rue Jules Ferry 93100 MontreuilTl. : 01 48 51 32 22 Fax : 01 48 51 95 12Mail : [email protected] Site web : www.amisdelaterre.org

    PRINCIPAUX RAPPORTS ET CAMPAGNES DES AMIS DE LA TERRE SUR TOTAL :

    Rapport spcial sur les impacts de Total en Egiland, recueil de tmoignages au Nigeria, novembre 2014 :http://www.amisdelaterre.org/rapportEgiland2014.htmlRepousser les limites la rue vers les gaz et huiles de schiste en Patagonie argentine, rapport, mai 2014 :http://www.amisdelaterre.org/rapportargentineTerres de schiste, documentaire, mai 2014 : www.terresdeschiste.frPublications et campagne Sables bitumineux, toujours plus loin, toujours plus sale ! (2010-2014) : www.amisdelaterre.org/sablesbitumineuxMadagascar : nouvel eldorado des compagnies minires et ptrolires, rapport, novembre 2012 : http://www.amisdelaterre.org/rapportmadagascarCampagne CRAD 40, les bnfi ces sans les dgts, octobre 2012 : http://www.amisdelaterre.org/CRAD-40-Les-benefi ces-sans-les.html

    TOUS LES ARTICLES DE LOBSERVATOIRE DES MULTINATIONALES SUR TOTAL : http://multinationales.org/Total-25

    LOBSERVATOIRE DES MULTINATIONALES

    LObservatoire des multinationales est un mdia dinformation et dinvestigation sur les activits des grandes multinationales franaises, et plus gnralement sur les enjeux de responsabilit des entreprises et de dmocratie conomique. LObservatoire ralise et publie des enqutes et des reportages sur limpact social et environnemental et le rle politique des grands groupes franais, aussi bien en France qu ltranger. Il mne galement un travail de veille plus large sur ces questions. Le site de lObservatoire des multinationales propose des tableaux de bord sur les grands groupes franais ainsi que des dossiers thmatiques sur des sujets comme lnergie nuclaire, leau, les accords de commerce, le textile ou les paradis fi scaux. LObservatoire des multinationales est un projet de lassociation Alter-mdias, qui publie galement le site dinformations environnementales et sociales Basta ! www.bastamag.net

    Contact : Alter-mdias - 5 avenue Paul Langevin - 93100 MontreuilTel : 09 52 83 22 46Mail : [email protected] Site web : www.http://multinationales.org

    22 I CONTRE RAPPORT TOTAL : LE VRITABLE BILAN ANNUEL

  • Mai 2015 Licence Creative Commons BY-NC-ND

    Rdaction: Olivier Petitjean Mise en pages: Guillaume Seyral Remerciements: Juliette Renaud, Ivan du Roy, Wilfried Maurin, Thomas Coutrot, Colin Roche, Anne-Sophie Simpere, Emma Vickers, Kemal zkan, Lonie Guguen, Nanna Clifforth, Anne Schuit, David Deng, George Boden, Marie-Laure Guislain.

    Le soutien dAttac France sinscrit dans le cadre de la campagne Les RequinsPour savoir plus : http://www.lesrequins.org

    Photos : Stakeholder DemocracySuncore EnergyObservatorio Petrolero Michael Holt Conatzer visual Kris Krug Eric Vazzoler Peter Kirkeskov RasmussenJonathan Barsook Total Out NowEmmanuel HuybrechtsRudolph Fehr / CC BY-ND 2.0

  • LES NORMES BNFICES FINANCIERS GNRS PAR TOTAL AU PROFIT DE SES ACTIONNAIRES INDUISENT DE GIGANTESQUES COTS SOCIAUX ET ENVIRONNEMENTAUX SUPPORTS PAR TOUS.

    CE RAPPORT VISE OUVRIR UN DBAT QUI NE PEUT PLUS TRE RSERV AUX CERCLES RESTREINTS DES DIRECTIONS DENTREPRISE.