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Revue française d’allergologie 53 (2013) S45-S58 © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. *Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] Les acariens : biologie, écologie et actualités des allergènes moléculaires House dust mites: biology, ecology and relevant molecular allergens G. Pauli a , J.-C. Bessot b a Université de Strasbourg, Bâtiment Ancienne Ophtalmologie, Hôpital Civil, 1, place de l’Hôpital, BP 426, 67091 Strasbourg cedex, France b ARIALE, Bâtiment Ancienne Ophtalmologie, Hôpital Civil, 1, place de l’Hôpital, BP 426, 67091 Strasbourg cedex, France Résumé La taxonomie, la morphologie, le cycle biologique des acariens Pyroglyphides (dont font partie les Dermatophagoides) et des acariens de stockage (Acaridae, Glycyphagidae et Blomia tropicalis) sont rappelés. Leur anatomie est très voisine mais la fécondité des acariens de stockage est plus importante. L’humidité relative est le paramètre essentiel qui régule leur prolifération. La literie est la niche écologique privilégiée des Pyroglyphides qui se nourrissent de squames humaines ; les acariens de stockage se nourrissent de denrées alimentaires et ne sont pas exclusivement retrouvés dans le secteur agricole. Dans les régions tropicales Blomia tropicalis est un acarien de la poussière de maison. Depuis 1988 les connaissances moléculaires des allergènes des acariens se sont considérablement enrichies, leurs structures et leurs fonc- tions ont pu être précisées pour la majorité d’entre eux. 23 allergènes ont été identifiés. Les groupes 1 et 2 ont une homologie de séquence en AA de 85 % et sont des allergènes majeurs. Les groupes 4, 5, 7, 11, 14,15, 23 sont également des groupes importants. La liaison aux IgE des groupes 3, 8, 10, 20 est faible. Nombre d’allergènes ont une fonction biochimique: cystéine protéases pour les allergènes du groupe 1, amy- lases, sérine protéases par exemple. Der p 2 a une homologie de structure et de fonction avec MD-2, co-récepteur du récepteur TLR4, dont les LPS sont le ligand. Des réactions croisées ont été mises en évidence : majeures au sein d’une même famille, plus faibles entre allergènes de familles différentes. Les applications pratiques sont soulignées : explications des cosensibilisations, intérêt de l’épidémiologie moléculaire, permettant le choix des allergènes à utiliser pour le diagnostic, enfin utilisation future dans les désensibilisations spécifiques. © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots-clés : Allergènes ; Biologie ; Allergènes croisants ; Acariens Pyroglyphides ; Acariens de stockage ; Biologie-Blomia tropicalis. Abstract The taxonomy, anatomy, life cycle and ecology of Pyroglyphidae mites and strorage mites (Acaridae, Glycyphagidae, B.tropicalis) are described. Morphologies are quite similar but fecundity is superior in storage mites compared to the Pyroglyphides. Relative humidity is the main parameter, which regulates mite development. Bedding is the ecological niche of Pyroglyphidae which feed on human skin. Food products are the storage mites biotope from which they can spread in urban dwellings. B.tropicalis, in tropical regions is a true domestic mite. Since 1988, molecular knowledge has considerably increased and structures and functions have been determined for most of mite aller- gens. Of the 23 denominated allergens, the major IgE-binding has been reported for groups 1 and 2 accounting for 40-60% of the anti-house dust mite titers. Der p 1, 2, 4, 5, 7 allergens account for about 80% of the IgE-response. The IgE-binding to groups 3, 8, 10, 20 is low. Most allergens are proteolytic enzymes: Der p1 for instance is a cysteine protease. Der p 2 has structural homology with MD-2, a co-receptor of the Toll-like receptor (TLR4) whose ligand is LPS. Knowledge of the mite allergens structure has allowed better interpretation of cross reac- tions between allergens from the same family or from more distant families. Molecular epidemiology has allowed a better choice of allergen molecules useful for diagnosis and also for future immunotherapy. Key words: House dust mites; Allergens; Biology; Cross-reactive allergens; Pyroglyphidae allergens; Storage mite allergens; Blomia tropicalis.

Les acariens : biologie, écologie et actualités des allergènes moléculaires

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Page 1: Les acariens : biologie, écologie et actualités des allergènes moléculaires

Revue française d’allergologie 53 (2013) S45-S58

© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

*Auteur correspondant. Adresse e- mail : [email protected]

Les acariens : biologie, écologie et actualités des allergènes moléculaires

House dust mites: biology, ecology and relevant molecular allergens

G. Paulia, J.-C. Bessotb

aUniversité de Strasbourg, Bâtiment Ancienne Ophtalmologie, Hôpital Civil, 1, place de l’Hôpital, BP 426, 67091 Strasbourg cedex, France bARIALE, Bâtiment Ancienne Ophtalmologie, Hôpital Civil, 1, place de l’Hôpital, BP 426, 67091 Strasbourg cedex, France

Résumé

La taxonomie, la morphologie, le cycle biologique des acariens Pyroglyphides (dont font partie les Dermatophagoides) et des acariens de stockage (Acaridae, Glycyphagidae et Blomia tropicalis) sont rappelés. Leur anatomie est très voisine mais la fécondité des acariens de stockage est plus importante. L’humidité relative est le paramètre essentiel qui régule leur prolifération. La literie est la niche écologique privilégiée des Pyroglyphides qui se nourrissent de squames humaines ; les acariens de stockage se nourrissent de denrées alimentaires et ne sont pas exclusivement retrouvés dans le secteur agricole. Dans les régions tropicales Blomia tropicalis est un acarien de la poussière de maison.

Depuis 1988 les connaissances moléculaires des allergènes des acariens se sont considérablement enrichies, leurs structures et leurs fonc-tions ont pu être précisées pour la majorité d’entre eux. 23 allergènes ont été identifiés. Les groupes 1 et 2 ont une homologie de séquence en AA de 85 % et sont des allergènes majeurs. Les groupes 4, 5, 7, 11, 14,15, 23 sont également des groupes importants. La liaison aux IgE des groupes 3, 8, 10, 20 est faible. Nombre d’allergènes ont une fonction biochimique: cystéine protéases pour les allergènes du groupe 1, amy-lases, sérine protéases par exemple. Der p 2 a une homologie de structure et de fonction avec MD-2, co-récepteur du récepteur TLR4, dont les LPS sont le ligand. Des réactions croisées ont été mises en évidence : majeures au sein d’une même famille, plus faibles entre allergènes de familles différentes.

Les applications pratiques sont soulignées  : explications des cosensibilisations, intérêt de l’épidémiologie moléculaire, permettant le choix des allergènes à utiliser pour le diagnostic, enfin utilisation future dans les désensibilisations spécifiques.© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.Mots-clés : Allergènes ; Biologie ; Allergènes croisants ; Acariens Pyroglyphides ; Acariens de stockage ; Biologie-Blomia tropicalis.

Abstract

The taxonomy, anatomy, life cycle and ecology of Pyroglyphidae mites and strorage mites (Acaridae, Glycyphagidae, B.tropicalis) are described. Morphologies are quite similar but fecundity is superior in storage mites compared to the Pyroglyphides. Relative humidity is the main parameter, which regulates mite development. Bedding is the ecological niche of Pyroglyphidae which feed on human skin. Food products are the storage mites biotope from which they can spread in urban dwellings. B.tropicalis, in tropical regions is a true domestic mite.

Since 1988, molecular knowledge has considerably increased and structures and functions have been determined for most of mite aller-gens. Of the 23 denominated allergens, the major IgE-binding has been reported for groups 1 and 2 accounting for 40-60% of the anti-house dust mite titers. Der p 1, 2, 4, 5, 7 allergens account for about 80% of the IgE-response. The IgE-binding to groups 3, 8, 10, 20 is low. Most allergens are proteolytic enzymes: Der p1 for instance is a cysteine protease. Der p 2 has structural homology with MD-2, a co-receptor of the Toll-like receptor (TLR4) whose ligand is LPS. Knowledge of the mite allergens structure has allowed better interpretation of cross reac-tions between allergens from the same family or from more distant families. Molecular epidemiology has allowed a better choice of allergen molecules useful for diagnosis and also for future immunotherapy.Key words: House dust mites; Allergens; Biology; Cross-reactive allergens; Pyroglyphidae allergens; Storage mite allergens; Blomia tropicalis.

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1. Introduction

L’association entre sensibilisation aux acariens domes-tiques et maladies telles que l’asthme ou la rhinite allergique a été mise en évidence depuis plus de 40  ans. Dans la population générale, la prévalence des sensibilisations aux acariens se situe généralement entre 9 et 16 %. L’enquête sur la santé respiratoire de la Communauté européenne a confirmé ces données. Rassemblant les dosages d’IgE spé-cifiques dirigées contre les allergènes les plus courants chez plus de 13 000 adultes répartis dans seize pays différents, elle a mis en évidence une prévalence de la sensibilisation à Dermatophagoïdes pteronyssinus variant de 6,5 à 35 % avec une moyenne de 20,3 %. Dans l’étude ISAAC phase II, 15 % des enfants, âgés de 12 à 13 ans, à Strasbourg, étaient sen-sibilisés aux acariens domestiques. Cette revue fait le point sur la biologie, l’écologie et les allergènes moléculaires des acariens (1-3).

2. Les acariens : taxonomie et écologie

Les acariens comprennent environ 50  000 espèces qui peuplent les sols, la terre, les mousses, les plantes, les arbres et leurs écorces, les eaux stagnantes, les fonds marins, les nids d’oiseaux…, Parmi eux, les acariens domestiques ne représentent qu’une infime minorité. La grande majorité des acariens a un rôle utile en participant à la décomposition et au recyclage des matières organiques. Certains acariens sont des parasites stricts, d’autres des parasites accidentels ou intermittents, d’autres enfin tels les acariens domestiques des commensaux.

La découverte du rôle des acariens dans l’allergie à la poussière de maison remonte à un demi-siècle. C’est Voorhorst, Spieksma et Spieksma-Boozeman qui ont mis en évidence en 1964 une corrélation entre l’allergénicité des extraits de poussière de maison et leur richesse en acariens domestiques, notamment Dermatophagoïdes pte-ronyssinus. Cette découverte a été confirmée par d’autres équipes anglaises et japonaises…. En France, la recherche des acariens dans les poussières de maison a été réalisée à Strasbourg et dans la région marseillaise. Le rôle immuno-gène des extraits d’acariens a été rapidement prouvé chez l’homme et l’animal.

2.1. Taxonomie des acariens pyroglyphides de la poussière de maison

• Les acariens domestiques font partie de l’embranchement des arthropodes, qui comprend également les insectes. Les acariens possèdent huit pattes et n’ont pas d’ailes. Le métabolisme des acariens diffère de celui des insectes, ils excrètent de la guanine présente dans les particules fécales, ce qui est mis à profit dans l’Acarex-test, alors que les insectes produisent de l’acide urique.

• Les acariens font partie de la classe des arachnides comme les scorpions ou les araignées.• Quatre familles ont une importance capitale en allergie respiratoire : les Pyroglyphidae, les Acaridae, les Glycypha-gidae et les Echymyopopidae  ; la famille des Cheyletidae a un rôle plus accessoire. Les acariens de la poussière de maison («  house dust mites  ») appartiennent à la famille des Pyroglyphidae. Ils sont aussi appelés phanérophages en raison de leur mode alimentaire. Cette famille comprend 18 genres, notamment Dermatophagoïdes, Euroglyphus, Gymnoglyphus, Huguesiella, Hirstia, Malayoglyphus et Sturnophagoïdes et 48 espèces dont 13 sont présentes dans la poussière de maison.• Les espèces les plus répandues et les plus impliquées dans le domaine des allergies ORL et respiratoires sont les suivants.

– Dermatophagoïdes pteronyssinus («  le mangeur de peau sans ailes »). – Dermatophagoïdes farinae (Df), autrefois appelé

Dermatophagoïdes culinae. Df a été découvert dans les farines destinées à la nourriture des volailles mais est avant tout un acarien présent dans la poussière domes-tique et la literie. – Euroglyphus maynei arrive parfois en deuxième position

par ordre de fréquence dans les prélèvements de poussière domestique. Il devient en semi-altitude, entre 400 et 1 500 m, l’acarien domestique le plus souvent identifiable. E. maynei a été également retrouvé en grand nombre dans le Sud de l’Europe, en Afrique du Nord et en Australie. Son importance clinique est cependant mal précisée. – On inclut encore parmi les espèces les plus répandues,

Dermatophagoïdes microceras, le «  jumeau  » de Der-matophagoïdes farinae dont la morphologie, la biologie et l’écologie sont très proches. Il a été mis en évidence en Grande-Bretagne, en Suède, en Espagne et aux Etats-Unis. Un allergène majeur Der m 1 a été identifié. – Dermatophagoïdes siboney n’a été retrouvé qu’aux

Caraïbes, à Cuba, à Porto Rico. Sa ressemblance avec Dermatophagoïdes farinae est grande et l’on s’est demandé s’il n’avait pas été confondu, comme Dermato-phagoïdes microceras, avec Dermatophagoïdes farinae. – Cheyletus eruditus est un acarien prédateur des

acariens domestiques. Deux fois plus gros que les Der-matophagoïdes, il a un aspect de petit crustacé, équipé de redoutables palpes ravisseurs. Il avait été envisagé de l’utiliser dans la lutte biologique intégrée pour contrôler et réduire les populations d’acariens, malheureusement il émet probablement les mêmes allergènes que les aca-riens domestiques.

2.2. Taxonomie des acariens de stockage ou acariens non pyroglyphides

• Les familles des Acaridae et des Glycyphagidae com-prennent les acariens dits de stockage (« storage mites »),

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appelés aussi acariens des denrées alimentaires entreposées ou acariens détriticoles.• Les acariens de la famille des Acaridae comportent :

– Acarus siro, – Tyrophagus casei, qui ressemble au précédent, – Tyrophagus longior est lui aussi voisin des précédents ;

il est cependant rarement abondant, – Tyrophagus putrescentiae, l’acarien des denrées en

voie de putréfaction, est parfois présent en zone tempé-rée mais plus souvent en zone tropicale.

• La famille des Glycyphagidae comprend essentiellement Glycyphagus domesticus, Lepidoglyphus domesticus et Lepidoglyphus destructor.

2.3. Morphologie des acariens pyroglyphides et des acariens de stockage

A l’état adulte, les acariens ont un corps globuleux, d’un seul tenant, un exosquelette formant une carapace non seg-mentée, une cuticule variant selon les espèces, lisse, striée ou recouverte de spicules. La taille de ces acariens varie de 170 à 500 μm, les femelles ayant une taille plus importante que les mâles. Ainsi les Dermatophagoïdes dont la taille dépasse 1/3 de mm devraient être visibles à l’œil nu. S’ils ne le sont pas, c’est parce qu’ils sont translucides et inco-lores. Certains acariens de stockage peuvent être visibles à l’œil nu. Acarus siro a des pattes rougeâtres et lorsque les acariens de cette espèce sont rassemblés, ils forment en se déplaçant une masse grouillante de couleur cuivrée, qui devient apparente. De même, dans les entrepôts de denrées alimentaires, les acariens de stockage se présentent sous forme d’agrégats qui les font ressembler à une poussière vivante. Par ailleurs, ils n’ont pas d’odeur caractéristique et ne font pas de bruit.

Les acariens adultes possèdent 4 paires de pattes articu-lées, munies sur le dernier article de soies, de griffes ou de ventouses. Les acariens se déplacent à une vitesse qui a été évaluée à 1 cm par minute, soit plus d’un demi mètre à l’heure. On a pu constaté, après avoir coloré des acariens au rouge Soudan, qu’en une nuit certains acariens avaient changé d’étage. Les griffes et les ventouses constituent des systèmes d’accrochage et d’équilibrage au sein des fibres textiles. Tous ces acariens, acariens pyroglyphides et acariens de stockage, sont caractérisés par la présence d’un gnathosome, sorte de groin semi-mobile, qui porte une paire de chélicères, une paire de palpes, et au niveau duquel s’ouvrent la bouche et ses annexes. Les palpes ont un rôle essentiellement tactile mais ils pourraient également intervenir dans la capture des proies ou des aliments. Les acariens sont dépourvus de cer-veau, mais ils reçoivent de nombreuses informations grâce aux soies ou poils sensoriels encore appelés sensilles. Les sens de l’odorat et du goût sont également assurés par des sensilles olfactives et gustatives. Les acariens ne possèdent pas d’yeux mais peuvent percevoir des différences de lumi-

nosité ; ils aiment l’obscurité et fuient la lumière. Des clefs permettent de différencier et d’identifier différentes espères d’acariens selon la morphologie des épimères (sillons pro-longeant le départ des appendices buccaux, séparés, soudés en V ou en Y), la taille des pattes, la morphologie des organes génitaux, l’implantation des griffes. Chez la femelle il existe une striation cuticulaire, chez les mâles on note la présence d’un écusson hystérosomal. La fonction respiratoire et les échanges gazeux s’opèrent à travers la cuticule. C’est dans l’appareil digestif et notamment dans l’intestin moyen que la plupart des allergènes majeurs sont sécrétés puis excrétés avec les particules fécales.

2.4. Cycle biologique des acariens pyroglyphides de la poussière et des acariens de stockage

La durée de vie des acariens pyroglyphides est en moyenne de deux à trois mois et dépend des conditions de température ambiante. Les acariens s’accouplent une ou deux fois dans leur vie. La femelle de Dermatophagoïdes pteronyssinus pond 20 à 80 œufs. L’espèce Dermatophagoï-des farinae est plus prolifique  : 200 à 300 œufs. A partir de l’œuf, l’ontogenèse des acariens comporte 6 stases : une prélarve, une larve, trois nymphes (une protonymphe, une deutéronymphe, une tritonymphe) et un adulte ou imago. Il existe une diversité importante des modes évolutifs selon les espèces. De l’œuf à l’état adulte, la durée de développement des acariens pyroglyphides nécessite environ un mois. Elle est influencée à la fois par l’humidité relative et la tempéra-ture.

Les acariens de stockage se reproduisent selon un rythme accéléré et leur fécondité est nettement plus élevée que celle des acariens pyroglyphides. Ils pondent de 3 à 7 œufs par jour.

2.5. Écologie des acariens pyroglyphides de la poussière de maison et des acariens de stockage

Trois facteurs sont importants pour le développement des acariens :• un facteur crucial : l’humidité,• un facteur important : la température,• un facteur nécessaire, mais variable selon les espèces : la nourriture.

Si l’influence du climat extérieur est importante, expli-quant par exemple la disparition des acariens domestiques en altitude sèche et froide ou bien au contraire certaines répartitions spécifiques comme la présence de Blomia tro-picalis dans les zones tropicales, le rôle d’un microclimat approprié dans l’habitat, et tout particulièrement celui de la literie pour les Pyroglyphides, est primordial.

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2.5.1. Rôle de l’humidité

De nombreuses études ont montré que les conditions optimales de développement à 25°C étaient pour Dp de 70 à 80 % d’humidité relative, de 60 % pour Df et d’au moins 80 % pour les acariens de stockage. Humidité relative inté-rieure et température sont liées. Des abaques, précisant le développement optimal des acariens ou leur dessiccation en fonction de l’humidité et de la température sont disponibles. L’humidité relative critique, c’est-à-dire le pourcentage d’humidité relative en-dessous duquel les acariens ne peuvent pas survivre, est en théorie de 73 % pour Dp et de 70 % pour Df. Ces notions restent théoriques : en effet avec une humidité relative de 40 % on peut encore observer dans l’habitat une survie des Pyroglyphides pendant 8 à 9 mois. Les Dermatophagoïdes peuvent alors coloniser des zones microclimatiques favorables, plus humides, en particulier à la périphérie des matelas, et au niveau des bourres. Enfin, un apport d’air humide de trois heures par jour suffit à assurer les besoins en eau des Dermatophagoïdes, ainsi qu’à per-mettre leur reproduction.

Lorsque les conditions de température et d’humidité deviennent défavorables, ils sont capables de bloquer ou d’allonger leur stade de développement, intercalant un nou-veau stade après celui de la deutéronymphe qui est un stade quiescent de résistance avec arrêt des processus de nutrition et de reproduction. A l’état adulte, lorsque l’humidité et la température sont trop faibles, les acariens se regroupent côte à côte pour maintenir une chaleur suffisante et faire en sorte que la perte d’humidité de l’un soit recouvrée par l’humidité de l’autre.

L’humidité relative à l’intérieur de l’habitat dépend de la température et de l’humidité absolue, mais également du taux de renouvellement de l’air par la ventilation. On préco-nise une aération des pièces de 15 minutes deux fois par jour afin de réduire l’humidité relative. Cette mesure n’a cepen-dant pas d’intérêt dans les villes et les régions où l’humidité relative extérieure est en permanence élevée, comme dans le Nord-Ouest de l’Angleterre. De plus, l’humidité relative extérieure peut varier au cours de la journée.

La balance hydrique des acariens est précaire. Leurs apports hydriques sont obtenus par quatre mécanismes  : l’ingestion de nourriture, le métabolisme d’oxydation des hydrates de carbone et des lipides, l’absorption passive de l’eau à travers la cuticule et l’intervention de substances hygroscopiques provenant des régions péri-articulaires. Les pertes hydriques se font par la transpiration mais survien-nent également au cours de la reproduction, de la défécation et de l’excrétion. Les acariens peuvent réduire partiellement les pertes hydriques en secrétant un liquide huileux qu’ils pulvérisent sur leur cuticule. De façon indirecte, l’humidité est capitale pour une alimentation correcte car lorsque les acariens sont déshydratés, la sécrétion des glandes qui lubri-fient les plis de leur cavité buccale se solidifie et les empêche de s’alimenter.

2.5.2. Rôle de la température

Les acariens sont capables de supporter de fortes variations de température : -15°C et +40°C. Ils ne prolifèrent que diffici-lement en-dessous de 15°C, ils survivent mais se développent mal au-dessus de 35°C. La température optimale requise pour les cultures d’acariens est comprise entre 26°6C et 32°2C. Du fait de l’apport calorique humain, la température dans la literie peut passer de 20°C à 25 ± 3°C. Les acariens pyroglyphides n’aiment pas les sols lisses et froids, ils se développent plus lentement dans les tapis ou les moquettes recouvrant ce type de sols que dans les matelas et les canapés.

D’une manière générale, les acariens de stockage ont besoin, pour un développement optimal, d’une température voisine ou supérieure de celle des Pyroglyphides (30°C). Néanmoins, certains acariens de stockage peuvent supporter des températures plus basses. C’est ainsi qu’Acarus siro peut supporter une température de 4°C à condition que l’humidité relative soit au moins de 65 %.

2.5.3. Rôle de la nourriture

Les besoins quantitatifs et qualitatifs des Dermatopha-goïdes sont modestes. Les squames, les débris kératinisés, les phanères d’origine humaine ou animale, constituent l’aliment préférentiel des acariens phanérophages tels que Dermatophagoïdes pteronyssinus. La desquamation jour-nalière d’un être humain, soit environ 70 à 140 mg, suffit à nourrir plusieurs milliers d’acariens pendant trois mois. En réalité, une poussière contenant 11  % de protéines est suffisante pour assurer la survie des acariens. Des moisis-sures telles qu’Aspergillus penicilloides pourraient favoriser la croissance des acariens en prédigérant leurs squames  ; cependant les tentatives d’utilisation d’antifongiques dans la lutte contre les acariens n’ont pas tenu leurs promesses. Les exigences nutritionnelles de Df sont encore moins grandes ; cette espèce a pu être élevée sur de la pâtée pour chiens, de la gélatine, de la farine de seigle…. Les Dermatophagoïdes farinae cumulent donc plusieurs avantages par rapport aux Dermatophagoïdes pteronyssinus. Leur fécondité est plus importante, l’humidité relative dont ils ont besoin est infé-rieure, enfin leur nourriture est plus diversifiée. Ceci pourrait expliquer que dans certaines régions les Dermatophagoïdes farinae aient pris en partie la place des Dermatophagoïdes pteronyssinus.

Deux faits soulignent la moindre importance de la nour-riture par rapport à l’hygrométrie et à la température : d’une part l’analyse des échantillons de poussière montre une faune acarienne abondante dans des résidences secondaires occupées occasionnellement et où les squames humaines ne devraient être présentes qu’en quantité restreinte, d’autre part les prélèvements de poussière effectués en altitude sèche sont pauvres en acariens alors que la nourriture y est présente en quantité suffisante.

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Les acariens de stockage, notamment Glycyphagidae et Acaridae, sont de grands destructeurs de denrées alimen-taires. Ces acariens ont une prédilection pour les aliments conservés dans des lieux humides. Leur nourriture com-mune est constituée de grains, de paille, de fourrages, de farines, de semoules…. En dehors de cette alimentation de base, chaque espèce a une prédilection pour une nourriture particulière, ce dont témoignent certaines dénominations.• Acarus siro est le véritable acarien de la farine et des fromages (tomme de Savoie, mimolette, cantal, fromage du Puy-en-Velay dont la croûte est ensemencée avec ces acariens).• Tyrophagus casei est connu lui aussi pour infester les fromages dans lesquels il perce de petits trous.• Tyrophagus longior est voisin des deux précédents dont il partage les habitudes alimentaires.• Tyrophagus putrescentiae est présent en zone tempérée mais le plus souvent en zone tropicale. Il a besoin d’un degré d’humidité relative très élevé, supérieur à 80 %, et fait partie des acariens fongivores.• Lepidoglyphus destructor, initialement décrit comme l’acarien des silos à grains, des étables, semble parmi les Glycyphagidae l’acarien le plus souvent rencontré dans les poussières de maison en Europe. • Glycyphagus domesticus préfère les aliments riches en sucres, mais aussi les débris alimentaires d’origine animale ou végétale. • Blomia tropicalis a été mis en évidence dans des régions tropicales ou subtropicales. Initialement décrite dans des entrepôts où cette espèce se nourrissait de denrées alimen-taires diverses (grains, céréales…), elle est actuellement considérée comme un véritable acarien des poussières domestiques.

2.6. Sources et réservoirs des allergènes des acariens pyroglyphides de la poussière de maison et des acariens de stockage

La répartition des acariens dans l’habitat est directement liée aux conditions nécessaires à leur bien-être. Les Pyro-glyphides, espèces anthropophiles, recherchent des zones microclimatiques favorables par leur humidité relative et leur température. La literie, surtout lorsqu’elle n’est pas largement ouverte et aérée, retient la sudation, bénéficie de la chaleur corporelle et contient des squames humaines. Les Pyroglyphides sont des animaux de nids, de litières ou de literie. Leur réservoir principal est la literie : matelas mais aussi sommier tapissier, oreillers, traversins, draps, couver-tures et couettes. Il existe des réservoirs secondaires : tapis, moquettes, canapés, fauteuils rembourrés, peluches. D’une manière générale les acariens peuvent être présents dans tous les substrats textiles fibreux, ils se déplacent entre les fibres et les pores qu’elles délimitent, par lesquels passent l’air et la vapeur d’eau. Par ailleurs, les substrats textiles

amortissent également les écarts de température et d’humi-dité. Les acariens peuvent par exemple plonger à l’intérieur des matelas où ils peuvent être plus nombreux qu’en surface. Les tests de chauffage et de mobilité ont montré que le chauffage de la base d’un tapis ou d’autres supports textiles faisait remonter les acariens vivants à leur surface que l’on peut recueillir sur une feuille adhésive. Les vêtements peu-vent être contaminés, les jouets notamment les peluches, et même le cuir chevelu.

L’amélioration du confort de l’habitat, les mesures d’économie d’énergie, l’isolation ont probablement favorisé le développement des acariens. Le confinement, la présence de nombreux occupants vivant dans un espace restreint, entraînent une élévation des taux des allergènes des acariens.

En-dehors de la maison où l’on passe en moyenne 16 heures par jour, des allergènes des acariens ont pu être mesurés dans des lieux publics (écoles, cinémas, transports, crèches, hôpi-taux), le plus souvent cependant à des taux plus faibles.

Les acariens de stockage, en-dehors des zones où sont entreposées et stockées des denrées alimentaires, ont été décrits dans des endroits très divers  : toits de chaume, cannages, paquets de farine, aliments pour chiens, murs humides et moisis. A partir de ces sites où ils trouvent leur nourriture : moisissures et aliments, ils peuvent se répandre dans les habitats et peuvent être présents dans les cuisines, les placards, les salles de bains, les tapis humides, les fau-teuils et les canapés rembourrés.

2.6.1. Rôle clinique et particularités des acariens de stockage

La reconnaissance du rôle des acariens de stockage et de Blomia tropicalis dans l’asthme et les rhinites allergiques a été plus tardive que celui des acariens pyroglyphides. Les acariens de stockage ont tout d’abord été mis en cause dans des dermatites de contact professionnelles  : dermatite des boulangers provoquée par Acarus siro, « gale » des épiciers due à Glycyphagus domesticus,

En 1928, Dekker, qui fut le premier à établir une cor-rélation entre asthme et présence d’acariens, avait montré l’existence d’acariens de stockage  : Glycyphagus domesti-cus, Aleurobius farinae, Tyrophagus siro dans les literies de ses patients asthmatiques. Les modifications du cadre de vie, le basculement de l’habitat rural à l’habitat urbain et surtout une humidité relative abaissée à l’intérieur de l’habitat, ont par la suite davantage favorisé la prolifération des acariens Pyroglyphides par rapport aux acariens de stockage dans les milieux citadins. Le rôle des acariens de stockage semblait alors cantonné au secteur agricole et au milieu rural.

En 1968, le rôle allergénique potentiel des acariens de stockage est à nouveau soulevé  : les premières observations cliniques d’allergies respiratoires sont rapportées chez des fermiers écossais. Par la suite, les observations se sont multi-pliées principalement dans les régions froides, notamment en

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Scandinavie ; dans ces régions le bétail reste enfermé dans une atmosphère relativement chaude et confinée, dans des étables où sont stockés fourrages et grains, où les contacts avec les fermiers sont étroits et répétés.

En-dehors des fermiers, de véritables allergies profession-nelles ont été décrites chez des employés des silos à grains, chez des meuniers et des boulangers, chez des employés d’animalerie. Enfin, plus récemment le caractère ubiquitaire des acariens de stockage qui ne sont pas seulement l’apanage du milieu rural, mais peuvent aussi être présents en milieu urbain, a été redécouvert. Ainsi aux Etats Unis, 9,3 % de la population de l’Ohio, qu’il s’agisse de milieu urbain, subur-bain ou rural, est sensibilisée aux allergènes des acariens de stockage (Lepidoglyphus destructor et Tyrophagus putres-centiae). Des sensibilisations en milieu urbain ont été aussi rapportées en Autriche et en Angleterre. Plusieurs études effectuées en Espagne ont confirmé la présence d’acariens de stockage dans plus de 30 % des échantillons de poussière analysés.

Une place à part doit être réservée à Blomia tropicalis, espèce autrefois classée parmi les Glyciphagidae et récem-ment intrégrée dans la famille des Echymyopopidae. Blomia tropicalis est la source d’allergènes de l’environnement domestique dans les zones tropicales ou subtropicales où elle bénéficie d’une température et d’une humidité élevées : Argentine, Colombie, Venezuela, Pérou, Brésil, mais aussi Asie du Sud-Est, Malaisie, Taiwan, Singapour, Floride, Espagne.

Dans certains pays tels que la Colombie, Singapour, la Malaisie, Blomia tropicalis peut être l’acarien le plus souvent identifié dans les prélèvements de poussière. La prévalence des sensibilisations à Blomia peut être très élevée dans ces pays, plus de 90 % à Singapour, 85 % en Argentine. Plusieurs études ont montré que parallèlement à la sensibilisation à Blomia, un pourcentage élevé de patients étaient sensibilisé aux Dermatophagoïdes.

Chaque espèce d’acariens de stockage possède des aller-gènes communs à ceux de la même famille et des allergènes propres. Il existe une importante réactivité croisée entres les différents acariens de stockage Glycyphagus domesti-cus, Tyrophagus putrescentiae, Lepidoglyphus destructor, notamment par l’intermédiaire des allergènes du groupe 2. En revanche, la réactivité croisée avec Dermatophagoïdes pteronyssinus est faible, moins de 40  % d’identité de séquence d’acides aminés entre Der p 2 et les allergènes du groupe 2 des acariens de stockage.

2.6.2. Manifestations allergiques atypiques provoquées par les acariens de stockage et Blomia tropicalis

Ils peuvent être à l’origine d’allergies alimentaires sévères lorsqu’ils sont ingérés. De nombreuses observations ont été rapportées dans les zones tropicales ou subtropicales

où la température et l’humidité élevées favorisent la proli-fération de Blomia et des acariens de stockage. Le rôle des acariens pyroglyphides ne peut être exclu, la plupart des patients souffrant préalablement d’une allergie respiratoire aux acariens. Le début des symptômes est rapide  : chocs anaphylactiques fréquents, asthme, angio-œdème, rhinite, urticaire… Nombreux sont les aliments incriminés infestés par les acariens : crêpes, gâteaux, pizzas, pancakes (le « Pan-cake syndrome  »), pâtisseries à base de farine de blé qui serait le plus souvent en cause. Le nombre des acariens peut atteindre de 4 900 à 52 200.

Il a été proposé de garder le terme d’acariens de la pous-sière de maison (house dust mites) pour les Pyroglyphides et d’appeler acariens domestiques les acariens de stockage et Blomia tropicalis.

3. Les allergènes des acariens

3.1. Introduction

La majorité des allergènes des acariens ayant une impor-tance clinique ont vu leurs activités biologiques élucidées. Grâce aux banques de données, des associations entre des séquences d’allergènes et des protéines connues pour leur activité biologique ont pu être mises en évidence. Outre les séquences en acides aminés et la structure tridimension-nelle, les épitopes T ont pu être déterminés pour nombre d’allergènes. La commission de la nomenclature de l’Union internationale des sociétés d’immunologie (IUIS) a proposé d’uniformiser la dénomination des allergènes en utilisant les 3 premières lettres du genre de la source d’allergènes (Der pour Dermatophagoïdes par exemple), la première ou la deuxième lettre de l’espèce (exemple p pour pteronyssinus), enfin un nombre arabe reflétant soit l’ordre dans lequel l’allergène a été découvert, soit son importance clinique, soit les deux. Les allergènes qui ont des homologies importantes, sont phylogénétiquement très proches et ont une même fonction biochimique, ont été regroupés en différents groupes. C’est ainsi que les allergènes des acariens tels que Dermatophagoïdes pteronyssinus, Dermatophagoïdes farinae, Euroglyphus maynei, sont appelés individuellement Der p 1, Der f 1, Eur m 1, et collectivement ont été rattachés au groupe 1 des allergènes des acariens. Si des iso-allergènes ont été identifiés (allergènes ayant au moins 67  % d’identité de séquence des acides aminés), un suffixe allant de 01 à 99 est utilisé. Les iso-allergènes de Der p 1 seront ainsi nommés Der p 1.01, Der p 1.02, etc. Le terme d’isoformes ou variants s’applique à des variants polymorphiques du même allergène ayant une identité de séquence d’au moins 90 %. Ils sont désignés par deux nombres supplémentaires par rapport aux iso-allergènes, soit pour Der p 1 qui en compte 23 : Der p 1.0101 à Der p 1.0123.

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3.2. Description des allergènes des acariens

Les allergènes des acariens ont une masse moléculaire variant de 11 à 190 kDa. Ils constituent un système multi-allergénique de protéines ou de glycoprotéines. 23 allergènes différents, identifiés à partir des acariens pyroglyphides, des acariens de stockage et de Blomia tropicalis, ont reçu « l’im-primatur » de l’IUIS. L’inventaire des allergènes des acariens n’est probablement pas terminé. Par des techniques d’im-munochimie telle que l’immuno-empreinte, de nombreuses bandes protéiques se liant aux IgE des patients allergiques aux acariens ont été mises en évidence mais toutes n’ont pas ou pas encore été enregistrées par l’IUIS.

3.3. Provenance des allergènes des acariens

Les principales sources des allergènes des acariens sont les particules fécales qui s’accumulent dans la poussière domestique, les sécrétions salivaires, les débris de corps entier, les débris de cuticule, les débris cellulaires.

Les allergènes des différentes espèces d’acariens sont soit des enzymes, soit des protéines de liaison à l’actine, aux acides gras, au calcium, soit des protéines de fonction inconnue. La majorité des allergènes des acariens Pyroglyphides sont des enzymes  : cystéine-protéases, trypsines et chymotrypsines, amylases, collagénases, chitinases… Les enzymes digestives protéolytiques sont secrétées par les cellules bordantes de l’intestin moyen ; elles sont nécessaires à la dégradation et à la digestion des squames humaines et des aliments protéiques. Ces allergènes, de même que les aliments partiellement digérés, se retrouvent dans les fèces des acariens. Les acariens excrétent entre 20 et 40 particules fécales par jour, chacune contenant des taux de Der p 1 variant de 0,1 ng à 10 ng. 90 % des allergènes du groupe 1 proviennent des particules fécales. Ces particules fécales sont entourées par une membrane péritrophique chiti-neuse qui les empêche de se désagréger tout en permettant une élution rapide des allergènes. Les particules fécales peuvent s’accumuler dans la poussière. Les allergènes persistent après la mort des acariens, les acariens morts, les œufs, les larves sont aussi des sources d’allergènes. Les allergènes majeurs Der p 1 et Der f 1 sont détruits par une température de 60°, contrairement aux allergènes du groupe 2, protéines thermorésistantes qui ne s’altèrent pas à des températures de 100°C. Après l’extermination des acariens, les textiles restent des réservoirs d’allergènes et après 4 années l’activité de Der p 1 restait inchangée. La taille des particules portant les aller-gènes du groupe 1 des Pyroglyphides est égale ou supérieure à 10 μm. Ces particules qui sont lourdes ne sont mesurables qu’au cours d’activités ménagères (réfection du lit, passage de l’aspirateur…), mettant la poussière en suspension, elles retombent également rapidement. Les allergènes du groupe 1 ne sont pas seulement présents dans les particules fécales mais pouvent provenir des sécrétions salivaires et être portés par des particules d’un diamètre aérodynamique de l’ordre de 5 μm.

3.4. Allergènes du groupe 1 des acariens Pyroglyphides

Les allergènes du groupe 1 font partie des cystéines protéases, c’est-à-dire des enzymes « papaïne-like » de la même famille que les papaïnes végétales et la L-cathepsine. Der p 1 a une masse moléculaire de 25 kDa, sa structure primaire comporte 222 acides aminés. La structure tertiaire de Der p 1 a pu aussi être déterminée. La papaïne et la cari-caïne de la papaye, l’ananaïne et la broméline de l’ananas, l’actinidine du kiwi, ont des structures tertiaires très voisines des allergènes du groupe 1. Néanmoins, les homologies de séquence en acides aminés sont peu importantes, de 25 à 43,3 % entre différentes papaïnes et Der p 1. Ceci explique qu’il n’y ait pas de réactivités croisées cliniquement signi-ficatives entre Der p 1, Der f 1 et les papaïnes végétales. Parmi les allergènes de Dermatophagoïdes, Der p 1 a été le premier allergène cloné. Il s’agit d’un allergène majeur : 50 à 70 % des IgE spécifiques des patients allergiques à un extrait global de Dpt (Dermatophagoïdes pteronyssinus) ou de Df (Dermatophagoïdes farinae) se lient à Der p 1. Néan-moins, ces pourcentages peuvent varier considérablement d’une population à l’autre. L’identité de séquence des acides aminés d’une même famille est très proche. Der p 1 et Der f 1 ont une identité de séquence de 85 %. Entre Eur m 1 et Der p 1, l’homologie est de l’ordre de 80  %. Der p 1 est glycosilé mais il existe dans des conditions physiologiques une structure non glycosylée se présentant sous forme d’un dimère de 40 kDa. Une autre caractéristique de Der p 1 est son haut degré de polymorphisme, en rapport avec l’allélisme d’un gène unique codant pour Der p 1. Vingt trois variants ont ainsi été mis en évidence de Der p 1.0101 à Der p 1.0123. Comparé à Der p 1, le polymorphisme de Der f 1 est plus faible, ce qui suggère que le polymorphisme ne joue pas un rôle capital dans l’allergénicité. Der p 1 et Der f 1 sont abondants et fréquemment retrouvés à des taux élevés dans les poussières domestiques.

En ce qui concerne les acariens de stockage, il ne semble pas qu’ils possèdent des allergènes protéasiques, ils ne font donc pas partie du groupe 1. Certes un allergène de Blomia tropicalis, Blot 1, a été enregistré par l’IUIS, il n’a cepen-dant qu’une homologie de 35 % avec les autres allergènes du groupe 1 des Dermatophagoïdes.

3.4.1. Fonction des allergènes du groupe 1

Le rôle éventuel de l’activité enzymatique des allergènes du groupe 1 dans l’allergénicité des acariens a fait l’objet de multiples travaux. L’activité enzymatique de Der p 1 est liée à sa fonction protéasique.

Action sur la perméabilité de l’épithélium bronchique et les jonctions serrées

L’allergène Der p 1 est capable de modifier la perméabi-lité de la barrière épithéliale bronchique en engendrant une augmentation du passage de marqueurs protidiques à travers

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une monocouche de cellules épithéliales bronchiques en culture. Der p 1 peut cliver le domaines extra-cellulaires de l’occludine et des claudines qui, associées aux protéines intra-cellulaires ZO (Zona occludens), constituent un assemblage macromoléculaire protidique régulant la per-méabilité para-cellulaire, les jonctions serrées. L’action des protéases de Der p 1 a pu être démontrée par extrapolation pour des concentrations estimées proches de l’exposition journalière aux allergènes d’acariens. Ainsi, l’augmentation de la perméabilité transépithéliale résultant de la rupture des jonctions serrées favorise la traversée des allergènes et facilite l’accessibilité aux cellules dentritiques plaçant ainsi l’épithélium bronchique dans un rôle pivot de la physiopa-thologie de l’asthme.

3.4.2. Action sur les cellules épithéliales bronchiques en culture

Der p 1 induit la libération de médiateurs pro-inflamma-toires (IL6, IL8, Eotaxine et GM-CSF) et 1 majore également la production des récepteurs des chimiokines, de la famille CC et CXC. Cet environnement des chimiokines entraîne, in vitro, un recrutement de cellules dendritiques. Les activités pro-inflammatoires des allergènes protéasiques avaient été attribuées à l’activation des PAR (protease-activated receptors) et plus spécifiquement à ceux du type 2. En effet, PAR-2 est surexprimé au niveau de l’épithélium respiratoire des patients asthmatiques.

In vitro, sur des lignées épithéliales bronchiques, les premiers travaux avaient révélé que les allergènes d’acariens étaient capables d’induire une réponse inflammatoire en stimulant directement la libération de cytokines pro-inflam-matoires par la voie d’activation de PAR-2.

3.4.3. Action sur les lymphocytes B et T

Les observations in vitro ont conduit à proposer que l’allergène Der p 1, par le clivage spécifique à la surface des lymphocytes B humains du CD23, récepteur de faible affinité des IgE, pouvait majorer la production d’IgE. En effet, le CD23 et ses fragments solubles possèdent une activité immunorégulatrice de la synthèse d’IgE. Le clivage du CD23 provoquerait la suppression d’un mécanisme de régulation négative et l’activation de la production de CD23 soluble. Cependant, ce mécanisme n’a pas été confirmé par les études in vivo.

De plus, Der p 1 peut cliver la sous-unité α du récepteur de l’IL-2 (IL-2R ou CD25), présent à la surface des lym-phocytes T humains, ce qui provoque une diminution de la sécrétion d’INF-γ. L’IL-2R est essentiel pour la prolifération des cellules Th1, son clivage par Der p 1 pourrait orienter la réponse immunitaire vers un profil Th2. In vivo, dans un modèle murin, l’administration de Der p 1 renforce la

réponse Th2. Enfin, Der p 1 est également capable de cliver le CD40, entraînant une diminution de la production d’IL-12 par les cellules dendritiques. L’IL-12 joue un rôle majeur dans l’orientation des cellules T vers un profil Th1.

3.4.4. Autres actions de Der p 1

L’alpha1-antitrypsine qui protège les voies bronchiques des lésions inflammatoires produites notamment par les sérine-protéases est inactivée par Der p 1. Cette action est d’autant plus significative qu’elle est susceptible de potentialiser le rôle des allergènes possédant une activité sérine-protéase, tels que Der p 3 et Der p 9. De plus, Der p 1 inactive les inhibiteurs d’élastase, ce qui peut aggraver les dommages tissulaires engendrés par l’activation des polynucléaires neutrophiles.

Au total de nombreuses actions ont été attribuées à Der  p  1  : augmentation de la perméabilité bronchique, production de médiateurs inflammatoires, de cytokines et de chimiokines à action pro-inflammatoire, orientation de la réponse immunitaire vers un profil Th2. Ces actions n’ont cependant qu’un rôle adjuvant, facilitateur de la réaction IgE-dépendante. Les effets observés l’ont été essentielle-ment chez l’animal, en particulier chez la souris ou sur des cultures cellulaires, avec des taux de Der p 1 qui n’étaient probablement pas toujours réalistes. Par ailleurs, les aller-gènes à fonction enzymatique ne représentent que 40 % de l’ensemble des allergènes. De nombreux allergènes n’ont pas de fonction enzymatique, en particulier les allergènes du groupe 2, autres allergènes majeurs des Dermatophagoïdes.

3.5. Allergènes du groupe 2

Les allergènes du groupe 2 sont des allergènes d’une masse moléculaire de 14 à 18 kDa, se liant fortement aux IgE. Der p 2 et Der f 2 n’ont que 12 % de divergence dans leur séquence en acides aminés ; ils ne sont pas glycosylés. Eur m 2 a une identité de séquence en acides aminés de 82 %, à la fois avec Der p 2 et Der f 2. Les allergènes du groupe 2 comme ceux du groupe 1 sont des allergènes majeurs. Ces allergènes sont thermorésistants et ne s’altèrent pas jusqu’à des températures de 100°C. Ils se retrouvent essentiellement au niveau des fécès des acariens, mais aussi au niveau de la cuticule. Les allergènes du groupe 2 sont produits par des gènes uniques. De nombreux variants ont été décrits, Der p 2.0101 et Der p 2.0104 notamment. Ces variants sont représentatifs des variants de l’allergène naturel Der p 2. Der p 2, en raison de son absence de glycosylation, a pu être obtenu rapidement sous forme recombinée, le polypeptide recombiné ayant toute la réactivité de l’allergène naturel. Pendant longtemps, la fonction des allergènes du groupe 2 est restée hypothétique, jusqu’à ce que l’on découvre que son architecture était retrouvée dans des protéines ayant un

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domaine ML de liaison aux lipides. En 2009 des précisions majeures concernant la fonction de Der p2 ont été appor-tées ouvrant la voie aux fonctions d’autres allergènes de ce type. Der p 2 a une homologie de structure avec MD-2, qui appartient également à la superfamille des protéines présentant un domaine ML de liaison aux lipides. MD-2 se lie aux LPS et active la voie de signalisation du TLR4 (toll-like receptor 4) en se liant à l’ectodomaine de ce récepteur. Ainsi Der p 2, comme MD-2, est capable in vitro de se lier aux LPS, au TLR4, à MD-2 et au C14 suggérant que Der p 2 facilite l’agrégation de TLR4 nécessaire à son activation. En facilitant la signalisation par TLR4, Der p 2 pourrait jouer un rôle auto-adjuvant dans le développement de réponses immunologiques adaptatives. Comme pour Der p 2, il a été montré que Der f 2 était également capable de se lier aux LPS. Le fait que d’autres membres de la famille à laquelle appartient MD-2, présentant un domaine de liaison aux lipides, soient des aéro-allergènes, suggère que l’activité adjuvante intrinsèque de telles protéines pourrait présenter un mécanisme sous-tendant l’allergénicité.

3.6. Allergènes du groupe 2 des acariens de stockage

Certains allergènes du groupe 2 ont été décrits comme des allergènes majeurs pour les acariens de stockage : Lep d 2 anciennement Lep d 1 (Lepidoglyphus destructor), Gly d 2 (Glycyphagus domesticus), Tyr p 2 (Tyrophagus putrescentiae). Les homologies entre ces allergènes et ceux des Dermatophagoïdes du groupe 2 sont variables et peu importantes : Lep d 2 et Der p 2 : 36 %, Tyr p 2 et Der p 2 : 41 %, alors que les homologies de structure des allergènes du groupe 2 des acariens de stockage sont de l’ordre de 80 %.

3.7. Allergènes du groupe 3 (à fonction trypsine-like)

Les allergènes du groupe 3 ont un poids moléculaire de 30 kDa. Der p 3 et Der f 3 sont des sérine-protéases de type trypsine.

Le séquençage a montré que Der p 3 avait 233 résidus et une masse moléculaire de 25 kDa. Der f 3 et Der p 3 ont 81 % d’identité de séquence. Ce sont des constituants majeurs des particules fécales des acariens, mais ils sont aussi présents à faible concentration dans les corps des acariens. Il est également possible qu’ils puissent être dégradés.

Eur m 3 a 80 % d’identité avec Der p 3 et Der f 3, 75 % des résidus sont les mêmes pour les trois molécules. Comme pour Der p 1 il a été proposé que l’activité protéolytique puisse avoir quelque effet sur l’allergénicité. A partir du cli-vage du complément, les allergènes du groupe 3 produisent les anaphylatoxines C3a et C5a. Sur les cellules épithéliales, Der p 3 et Der p 9 peuvent provoquer la formation de cyto-kines pro-inflammatoires GM-CSF et éotaxine par activation de PAR-2 (protease activated receptor 2) dans un modèle

expérimental de cellules épithéliales bronchiques. De plus, les allergènes caractérisés par une activité sérine protéase (Der p 3, 6 et 9), présents dans les particules fécales tout comme Der p 1, peuvent également augmenter la perméa-bilité de l’épithélium bronchique par rupture des jonctions serrées en agissant sur d’autres sites de clivage que Der p 1. La concentration de ces allergènes dans l’environnement n’est pas connue. Leur liaison aux IgE est faible et ils ne constituent pas des allergènes importants.

3.8. Allergènes du groupe 4 (amylases)

Der p 4 est un allergène de 60 kDa et un des allergènes les plus importants après Der p 1 et Der p 2. Sa séquence est typiquement celle des alpha-amylases et sa structure modélisée est celle de la famille des 13 glycosyl-hydrolases. Les séquences entre Der p 4 et Eur m 4 ont 90 % d’identité, ce qui n’est pas retrouvé pour d’autres allergènes. Der p 4 et Eur m 4 ont 50 % d’identité avec les amylases des insectes, des mammifères et des mollusques. Der p 4 et Eur m 4 ont tous les deux des sites de glycosylation. La fréquence de liaison aux IgE pour les allergènes du groupe 4 est en moyenne de 40 %, variant de 25 à 46 %.

3.9. Allergènes du groupe 5 (fonction inconnue)

Der p 5 est un polypeptide, d’une masse moléculaire de 15 kDa, ayant une liaison de 40 % avec les IgE, ce qui le classe parmi les allergènes d’allergénicité moyenne. La fonction de cet allergène n’a pu être déterminée. Der p 5 ne semble pas abondant dans la poussière domestique ; à Tapei où les acariens Pyroglyphides sont abondants, Der p 5 est présent à des taux inférieurs à 100 ng/g de poussière. Der p 5 est secrété par les cellules épithéliales du tractus intestinal de Dermatophagoïdes pteronyssinus.

Blo t 5 de Blomia tropicalis est un allergène majeur de cette espèce. Il se lie à 70 % des IgE sériques. L’identité de séquence des acides aminés est de 43 % avec Der p 5, mais il n’y a cependant pas de réactivité croisée entre Blo t 5 et Der p 5.

Der p 21 a une identité de séquence de 40 % avec Blo t 5. La région C-terminale de Der p 5 a une séquence proche de Der p 21. Cependant, globalement Der p 21 et Der p 5 n’ont que 30 % d’identité.

3.10. Allergènes du groupe 6 (à fonction chymotrypsine)

Les allergènes du groupe 6 sont des protéines de 25 kDa purifiées à partir d’extraits de Dermatophagoïdes pteronys-sinus et Dermatophagoïdes farinae. Der p 6 contient les résidus catalytiques caractéristiques des sérine-protéases. Ils ne croisent pas sérologiquement avec les trypsines du

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groupe  3. Ce manque de réactivité croisée s’explique du fait de la faible identité de séquence entre les allergènes du groupe 6 et ceux du groupe 3. Entre Der f 6 et Der p 6, l’identité de séquence est de 75 %.

3.11. Groupe 7 (fonction inconnue)

Les allergènes du groupe 7 ont dans la hiérarchie des allergènes des acariens pyroglyphides, une allergénicité moyenne. Der p 7 se lie à 50  % des IgE spécifiques des sujets allergiques à un extrait global d’acariens. Son poids moléculaire est de 22 kDa, il a une glycosylation élevée et variable. L’allergène est retrouvé par immuno-empreinte au niveau des bandes de 26, 30 et 31 kDa. Les allergènes du groupe 7 sont labiles, ils ne sont présents qu’à de faibles concentrations dans les extraits d’acariens.

3.12. Groupe 8 (glutathion-S-transférase)

Der p 8 est un polypeptide faisant partie de la famille des glutathion-S-transférases constituées de 204 résidus et réagissant avec 40  % des IgE d’un extrait global de Dpt. Der p 8 n’est pas très abondant dans les extraits d’acariens. L’existence d’une réactivité croisée avec la glutathion-S-transférase de Blattella germanica, Bla t 5, a été discutée. Une réactivité croisée avec la blatte américaine serait plus vraisemblable.

3.13. Groupe 9 (sérine-protéase à activité collagénolytique)

Der p 9 est une sérine-protéase à activité collagénolytique différente de Der p 3 et de Der p 6. Son identité de séquence en acides aminés est de 38 % avec la trypsine de Der p 3 et de 40  % avec la chymotrypsine de Der p 6. Sa masse moléculaire est de 28 kDa. Comme Der p 3, les allergènes du groupe 9 sont capables d’induire la libération de GM-CSF et d’éotaxine par activation du récepteur PAR-2 sur des cellules épithéliales. Ils peuvent également augmenter la perméabilité de l’épithélium bronchique par clivage des jonctions serrées en agissant sur d’autres sites que Der p 1. Ces allergènes sont probablement importants, mais leur spécificité n’a pu être déterminée précisément.

3.14. Groupe 10 : tropomyosine

En raison de son rôle dans des fonctions vitales (contrac-tion musculaire, mobilité cellulaire), la tropomyosine a été hautement conservée au cours de l’évolution, elle est aussi largement distribuée parmi de nombreux invertébrés. La tro-pomyosine a une structure hélicoïdale ; elle est constituée de

deux hélices alpha enroulées l’une autour de l’autre. Il existe de nombreux isoformes. Le haut degré d’identité de séquence des AA des différentes tropomysines confère à ces molécules une qualité de pan-allergène responsable d’allergies croisées avec différents invertébrés. La prévalence de la sensibilisation à la tropomyosine chez les sujets allergiques aux acariens est faible en Europe, variant de 5,6 à 18 %, elle est élevée dans des régions d’endémie parasitaire telles que le Japon ou l’Afrique. Les nématodes (Anisakis simplex, ascaris…) et les trématodes ont en effet des allergènes croisants avec la tropomyosine des acariens. La tropomyosine des acariens peut être à l’origine d’allergies alimentaires croisées. La tropomyosine est en effet un allergène majeur des crustacés : langouste (Pan s 1), homard (Hom a 1), crabe (Cha f 1), écrevisse… Elle est également présente dans certains mollusques comme le calamar (Tod p 1), les huîtres (Cra g 1), les moules (Myt e 1). La tropomyosine des crevettes, longtemps considérée comme l’allergène majeur unique, est la tropomyosine de référence à laquelle les autres tropomyosines ont été comparées. Un dosage des IgE sériques vis-à-vis de la tropomyosine recombinante de crevettes est disponible en immuno-CAP (rPen a 1).

Quant à l’association allergie alimentaire aux escargots et tropomyosine d’acariens, elle est contestée et contestable. A la différence des tropomyosines de crustacés, elle n’a qu’une homologie de séquence en AA de 62 à 65 % avec la tropo-myosine des crevettes. Dans plusieurs études, l’analyse des sérums de patients allergiques aux acariens et allergiques aux escargots par immunoblot, innocente la tropomyosine.

La tropomyosine présente dans les Pyroglyphides (Der p 10, Der f 10) est également retrouvée dans les acariens de stockage (Lep d 10) et dans Blomia tropicalis (Blo t 10). L’homologie de séquence en AA de ces différentes tropo-myosines est majeure : 98 % entre Der p 10 et Der f 10, 94 % entre Der p 10 et Blo t 10.

Parmi les insectes, la tropomyosine a été identifiée chez les blattes  : Blattella germanica (rBla g 7) et Periplaneta americana (rPer a 7) qui ont entre elles une homologie de séquence de 96,5 % et sont considérées comme des aller-gènes majeurs des blattes. La tropomyosine est aussi un allergène de l’ordre des diptères : mouches et chironomides, un allergène de l’ordre des Thysanoures : lépismes ou petits poissons d’argent (Lepisma saccharina, rLep s 1).

3.15. Autres allergènes des acariens

3.15.1. Groupe 11 (paramyosine)

Il s’agit de protéines de masse moléculaire élevée (92-94  kDa). Le paramyosine est une protéine de structure du muscle des invertébrés. A Taiwan et Singapour une fréquence élevée d’IgE liées par la paramyosine de Dermatophagoïdes farinae, Dermatophagoïdes pteronyssinus et Blomia tropicalis a été montré. Les études effectuées avec Blomia tropicalis ont montré une liaison de 67 % des IgE à Blo t 11. Les allergènes

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naturels de ce groupe sont en partie dégradés et présents à de faibles doses : moins d’1 μg/ml. Les paramyosines sont pré-sentes dans des parasites (Taenia, Schistosome, Anisakis…), néanmoins les réactions croisées semblent improbables en raison de pourcentages d’identité faibles d’environ 35 %.

3.15.2. Groupe 12 (fonction inconnue)

Les allergènes du groupe 12 ont seulement été mis en évi-dence chez des acariens de stockage ainsi que chez Blomia tropicalis. Blo t 12 a un poids moléculaire de 14 kDa et une séquence de 124 acides aminés. Cette protéine lie les IgE de 50 % des sujets allergiques à un extrait global de Blomia tropicalis. Les allergènes du groupe 12 de Lepidoglyphus destructor et Blomia tropicalis ont une identité de séquence très forte et inhabituelle : 93 %.

3.15.3. Groupe 13 (protéine de liaison aux acides gras)

Ces protéines de liaison et de transport des acides gras représentent les 15es protéines les plus abondantes trouvées dans les extraits d’acariens. Elles font partie de la série des protéines provenant de la cuticule. Il est cependant rare que les patients produisent des IgE spécifiques vis-à-vis de cette protéine, aussi bien pour les Glycyphagidae que pour les Pyroglyphidae (Der f 13).

Le recombiné rBlo t 13 a un poids moléculaire de 14,8 kDa. Il ne se lie qu’à 10 % des sérums des patients aller-giques à Blomia tropicalis. Aca s 13 d’Acarus siro a une fréquence de liaison aux IgE de 23 %.

3.15.4. Groupe 14 lipotransférase : LLTP

Les allergènes du groupe 14 font partie de la famille des LLTP (large LTP) (protéines de transfert des lipides). Cette famille inclut les vitellogénines et les apoliphorines, ainsi que d’autres molécules du système de défense des insectes et des molécules intervenant dans l’hématopoïèse. Leur masse moléculaire est très élevée : 167 kDa. Il s’agit d’allergènes du corps des acariens qui peuvent se déliter en différents fragments. Leur séquence est très proche de celle des vitellogines des crustacés

La région C-terminale de Sarcoptes scabei et Blomia tropicalis montre une identité de séquence de 60 et 44 % res-pectivement, vis-à-vis de Der p 14, ce qui est important si l’on prend en compte l’éloignement taxonomique de ces espèces.

3.15.5. Groupe 15 (chitinase)

Les allergènes du groupe 15 sont des allergènes majeurs chez le chien. Chez l’homme, environ 70 % des IgE se lient

aussi à un recombiné rDer p 15. Ces allergènes sont présents dans l’intestin des acariens, mais ne passent pas dans les particules fécales.

3.15.6. Groupes 16 et 17 (gelsoline et protéines de liaison au calcium)

Les désignations de 16 et 17 ont été données pour la gelsoline et une protéine de liaison au calcium, chacune d’elles liant les IgE de 35 à 50 % des sera des patients allergiques aux acariens.

3.15.7. Groupe 18 (chitinase)

Der f 18 est une chitinase de 60 kDa qui est distincte de Der f 15, avec laquelle elle ne partage qu’une identité de séquence de 25 % ; on la retrouve dans l’intestin et pas dans les fèces Il s’agit d’un allergène important pour les chiens. Chez l’homme, Der f 18 lie 54 % des IgE, une réactivité plus importante a été rapportée pour Der p 18.

3.15.8. Groupe 19 (peptide antimicrobien)

La dénomination du groupe 19 correspond à un allergène de Blomia tropicalis, homologue d’un peptide antimicrobien mal défini, d’une masse moléculaire de 7 kDa et d’une faible allergénicité avec une fréquence de réactivité qui n’est que de 10 %.

3.15.9. Groupe 20 (arginine-kinases)

Le groupe 20 correspond à des arginine-kinases d’une masse moléculaire de 40 kDa. Il est surtout intéressant parce que sa séquence est hautement conservée chez d’autres invertébrés, 80 % d’homologie avec les crustacés, 75 % avec les insectes, 45 % avec des enzymes de mammifères. Il a été montré que la fréquence de liaison aux IgE était de 40 % chez les patients allergiques aux extraits globaux d’acariens, mais avec des taux d’IgE faibles.

3.15.10. Groupe 21 (fonction inconnue)

Le groupe 21 est constitué de protéines liant les IgE de 30  % des sérums des patients autrichiens. Leur séquence a des similitudes avec celles du groupe 5, sans qu’il y ait de réactivité croisée. Les allergènes du groupe 21 ont 26 % d’identité de séquence avec Der p 5 alors qu’il y a 38  % d’identité de séquence entre Blo t 21 et Blo t 5, et 44  % d’identité entre Der p 21 et Blo t 5. Der p 21 est localisé dans les cellules épithéliales intestinales, le lumen et les particules fécales de Dermatophagoïdes pteronyssinus.

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3.15.11. Groupe 22

Dans ce groupe ne figure que Der f 22 qui a 35 % d’iden-tité avec Der f 2. Il s’agit d’un allergène d’origine intestinale, dont les IgE se fixent à 50 % des sérums de patients aller-giques à un extrait global de Dermatophagoïdes farinae.

3.15.12. Groupe 23

C’est le dernier allergène décrit ; il a un poids moléculaire de 8kDa et s’apparente à des péritrophines. Il est reconnu par 74 % de patients allergiques aux acariens et a une très forte activité allergénique engendrant des taux d’IgE spécifiques comparables à Der p1 et Der p 2. Il est synthétisé dans le tube digestif et retrouvé dans les fèces mains en moindre quantité que Der p 2.

4. Réactions croisées

La connaissance de la structure des molécules allergé-niques des acariens purifiées ou clonées a permis de mieux comprendre les réactions croisées survenant chez des patients sensibilisés par des allergènes d’origines diverses : Pyroglyphidae, Glycyphagidae et Acaridae (acariens de stockage), Echimyopodidae (Blomia tropicalis).

On peut classer les réactions croisées en réactions intra-espèces, en réactions inter-espèces proches (exemple Der p 1 et Der f 1), en réaction inter-espèces plus éloignées appar-tenant à des familles différentes (Pyroglyphidae et acariens de stockage), entre espèces phylogénétiquement éloignées appartenant à un autre ordre voire un autre embranchement (crevettes et acariens par exemple). De manière générale, les réactions croisées entre deux allergènes sont liées aux pourcentages d’identité de leurs séquences en acides ami-nés (AA). Plus l’identité de séquences en AA entre deux allergènes est proche de 100 %, plus le risque de réactions croisées est élevé.

4.1. Réactions intra-espèces

La quasi-identité des protéines à l’intérieur d’une espèce est une caractéristique de l’espèce.

4.2. Réactions croisées inter-espèces

Les homologies de séquences en AA sont d’autant plus importantes que les espèces sont phylogénétiquement proches, à l’exception de pan-allergènes comme la tropo-myosine qui peut être retrouvée dans des espèces éloignées. Chaque espèce possède à la fois des allergènes communs qu’elle partage avec d’autres espèces, et des allergènes spécifiques qui lui sont propres. Le tableau 1 rapporte les homologies de séquences en AA entre les allergènes des

acariens Pyroglyphides, les acariens de stockage et Blomia tropicalis.

Les homologies de séquences entre Dpt et Df sont très semblables, le plus souvent supérieures à 80 %, de même qu’avec Dermatophagoïdes microceras et Dermatophago-ïdes siboney.

Euroglyphus maynei fait aussi partie des Pyroglyphidae ; du point de vue taxonomique cet acarien est moins proche que ne le sont Dp et Df.

Tableau 1

Homologies des séquences en AA (acides aminés) des acariens pyroglyphides, des acariens de stockage et de Blomia tropicalis.

Allergènes des acariens Identité de séquence

en AA

Réactivité croisée probable

Der p 1 et Der f 1 80-85 %  Oui

Der p 1, Der f 1 et Der m 1 80 %  Oui

Der p 1, Der f 1 et Eur m 1 76 % Oui

Der p 1, Der f 1 et Blo t 1 36 % Non

Der p 2 et Der f 2 88 % Oui

Der p 2, Der f 2, Eur m 2 82 % Oui

Der p 2 et Lep d 2 36 % Non

Der p 2 et Tyr p 2 41 % Non

Der f 2 et Tyr p 2 43 % Non

Gly d 2 et Lep d 2 80 % Oui

Der p 3 et Der f 3 81 % Oui

Der p 3, Der f 3 et Eur m 3 81 % Oui

Der p 3, Der f 3 et Blo t 3 48 % Non

Der p 4 et Eur m 4 90 % Oui

Der p 5 et Blo t 5 43 % Non

Der p 5 et Lep d 5 30 % Non

Der p 6 et Der f 6 76 % Oui

Der f 6 et Der p 3 37 % Non

Der p 6 et Blo t 6 58 % Non

Der p 7 et Der f 7 86 % Oui

Der p 7 et Lep d 7 29 % Non

Der p 8 et Bla g 5 25 % Non

Der p 9 et Der f 9 72 % Oui

Der p 9 et Blo t 9 56 % Non

Der p 9 et Der p 3 38 % Non

Der p 10 et Der f 10 98 % Oui

Der p 10 et Lep d 10 94 % Oui

Der p 10 et Tyr p 10 94 % Oui

Der p 11 et Der f 11 89 % Oui

Der p 11 et Blo t 11 78 % Oui

Lep d 12 et Blo t 12 95 % Oui

Der p 3 et Blo t 13 80 % Oui

Der p 3 et Lep d 13 79 % Oui

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4.3. Réactions croisées entre acariens pyroglyphides et acariens de stockage

Les acariens de stockage les plus représentatifs et les plus souvent rencontrés sont Lepidoglyphus destructor, Glycyphagus domesticus, Tyrophagus putrescentiae, Acarus siro, et plus rarement Chortoglyphus. On considère habituel-lement que Lepidoglyphus destructor est l’espèce prédomi-nante en Europe. Plusieurs espèces peuvent coexister dans un même espace pourvu que celui-ci assure aux acariens leurs trois besoins essentiels : protection, nourriture, repro-duction. La présence de Dermatophagoïdes pteronyssinus, même lorsque les acariens de stockage ou Blomia tropicalis sont abondants est quasi constante. La question se pose alors de savoir si la sensibilisation est due à des allergènes propres à chaque espèce ou à des allergènes croisants.

La comparaison des identités de séquences en AA entre Dermatophagoïdes et acariens de stockage est faible, tou-jours inférieure à 50 %, en-dehors de Der p 13 et Gly d 13, ou Der p 13 et Lep d 1.

Les identités de séquences entre différents acariens de stockage sont élevées  ; entre Tyr p 2, Gly d 2, Lep de 2  ; elles sont surtout le fait des allergènes du groupe 2.

5. Epidémiologie moléculaire

L’épidémiologie moléculaire permet de mieux connaître la prévalence des sensibilisations aux différents allergènes en fonction de l’âge, et surtout en fonction de la localisation géographique des populations étudiées.

5.1. En fonction de l’âge

Chez les enfants et chez les adultes ayant été sensibilisés dans l’enfance, la réactivité à Der p 2 et à un moindre degré à Der p 1 prédomine. La réactivité IgE vis-à-vis d’un, deux ou trois allergènes supplémentaires apparaît chez l’enfant âgé de plus de 3 ans. Chez les adultes dont le diagnostic de sensibilisation aux acariens est récent, les liaisons des IgE à Der p 1 et Der p 2 sont plus faibles, tandis qu’existent des IgE vis-à-vis d’autres allergènes tels que Der p 3 et Der p 4.

5.2. En fonction de la localisation géographique

Dans la majorité des études rapportées, Der p 1 et Der p 2 représentent des allergènes majeurs en Europe mais aussi dans d’autres continents Ainsi les groupes 1 et 2 sont recon-nus par 82 % des IgE des patients allergiques au Japon et en Australie les IgE anti-Der p 1 et anti-Der p 2 représentent la majorité des IgE anti-acariens. Néanmoins, des allergènes qualifiés d’intermédiaires tels que Der p 4, Der p 5 et Der p 7 ont aussi leur importance. La somme des IgE se liant à

Der p 1, Der p 2, 4, 5 et 7 représentent 80 % de la réponse IgE globale alors que Der p 4, 5 et 7 n’en représentaient que 30 %. La liaison des IgE aux groupes 3, 8, 10 et 20 est toujours basse, les liaisons aux IgE des groupes 6, 9, 13 et 17 sont également faibles.

La liaison aux IgE de 7 allergènes naturels et recombinés de Dermatophagoïdes pteronyssinus (nDer p 1, rDer p 2, nDer p 4, rDer p 5, rDer p 8, rDer p 10 et rDer p 14) a été étudiés sur des populations d’allergiques aux acariens d’Autriche, de France, d’Italie et de Suède. Dans ces quatre populations, nDer p 1 et rDer p 2 représentaient les aller-gènes majeurs avec des fréquences de liaison variant de 85 à 100 % pour nDer p 1 et de 63 à 96 % pour rDer p 2. Des différences étaient notées en fonction des populations étu-diées : les Italiens avaient la réactivité IgE vis-à-vis de Der p 7 la plus importante tandis que Der p 5 était plus souvent détecté par les Français. Les Suédois réagissaient avec une fréquence plus basse à l’allergène majeur rDer p 2 que les patients de France, d’Autriche et d’Italie.

Une étude effectuée en Australie chez les Aborigènes a montré que les sérums des Aborigènes réagissaient de façon prédominante avec Der p 4 et moins fréquemment avec Der p 1 et Der p 2. Des différences dans les profils de sensibi-lisation vis-à-vis des allergènes des acariens ont également été mis en évidence entre l’Europe et le Zimbabwe, ou en Colombie où la positivité des groupes 1 et 2 n’était que de 64 et 69 %.

Concernant Blomia tropicalis : rBlot t 5, allergène majeur de Blomia tropicalis est reconnu par 45 % des sérums des sujets allergiques à Blomia au Brésil contre 25 % seulement en Virginie.

6. Application au diagnostic de l’allergie aux acariens

Les différentes études rapportées ont pour but d’associer les allergènes des acariens les plus représentatifs afin d’avoir

Tableau 2

Homologies des séquences en AA (acides aminés) des acariens pyroglyphides, des acariens de stockage et de Blomia tropicalis.

Allergènes des acariens Identité de séquence en AA

Réactivité croisée probable

Der p 1 et Der f 1 80-85 %  Oui

Der p 1, Der f 1 et Der m 1 76 %  Oui

Der p 2 et Der f 2 88 % Oui

Der p 2, Der f 2, Eur m 2 82 % Oui

Der p 2 et Lep d 2 36 % Non

Der p 2 et Tyr p 2 41 % Non

Der p 5 et Blo t 5 43 % Non

Der p 10 et Der f 10 98 % Oui

Der p 10 et Lep d 10 94 % Oui

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la meilleure sensibilité diagnostique. La combinaison Der p 1 + Der p 2 permet de faire le diagnostic d’au moins 97 % des patients allergiques à Dermatophagoïdes pteronyssinus. Néanmoins, 50 % des patients réagissent vis-à-vis d’autres allergènes. L’adjonction de Der p 5 et Der p 7 apporte une sensibilité diagnostique de 100 %, tout au moins en Autriche, France et Suède.

7. Application à la détection des allergènes des acariens

dans l’environnement domestique

Deux catégories de tests ont été développées au cours des dernières années, en-dehors des méthodes de comptage et d’identification des acariens par des méthodes optiques. Il s’agit du dosage immunochimique des allergènes à l’aide d’anticorps monoclonaux dirigés contre les allergènes majeurs des Dermatophagoïdes, et de certains acariens de stockage, ainsi que du dosage de la guanine présente dans les fèces des acariens.

La guanine, catabolite final du métabolisme azoté des arachnides, présente dans les fèces d’acariens, est un marqueur utilisable pour la détection des allergènes des acariens, ceux-ci étant pour une large part, présents dans leurs fèces. L’Acarex-test®, basé sur le dosage semi-quan-titatif de la guanine est un test colorimétrique dont les résultats sont donnés en quatre classes. Différentes études ont montré que la classe 0 correspond à des quantités très faibles d’allergènes, alors que les classe 2 et 3 reflètent de fortes concentrations en allergènes dans les poussières. Pour 10  μg d’allergènes par gramme de poussière le test a une spécificité de 89  % lorsqu’il est de classe 2 et de 98,5  % lorsqu’il est de classe 3, la principale limitation est la classe 1 en raison de variations importantes des taux d’allergènes dans cette classe. Le test de la guanine détecte également les acariens de stockage.

Les techniques immunochimiques sont basées sur les techniques ELISA, faisant appel à des anticorps mono-

clonaux d’origine murine dirigés contre les épitopes des allergènes des acariens. Ces dosages ont été utilisés pour la quantification de Der p 1 et Der f 1 pour les espèces Der-matophagoides. La mise au point de nouvelles techniques où les anticorps spécifiques sont couplés à des microsphères fluorescentes (fluorescent multiplex array), a permis de mesurer concomitamment les allergènes Der p 1, Der f 1 et les allergènes du groupe 2, avec une limite de détection meilleure (0,06 mg/ml versus 0,5 mg/ml pour la technique ELISA) ; la possibilité de faire des dosages simultanés sur de multiples échantillons permet des études plus étendues des allergènes de l’environnement domestique.

Des dosages immunochimiques semi-quantitatifs avaient été mis au point antérieurement, utilisant soit des anticorps monoclonaux dirigés contre les allergènes du groupe 2 (Rapid-test*), des anticorps monoclonaux dirigés contre Der p 1 et Der f 1 (Dust screen® ), ou encore des anticorps polyclonaux (Aclotest®).

En conclusion, l’étude des différents allergènes des acariens s’allonge et se complète d’années en années. La connaissance des allergènes a des applications pratiques et cliniques : meilleure compréhension des réactions croisées, contribution à l’amélioration des diagnostics et de l’immu-nothérapie spécifique.

Déclaration d’intérêts

L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

Références

[1] Bessot JC, Pauli G. Mite allergens:an overview Eur Ann Allergy Clin Immunol 2011;43:141-56.

[2] Bessot JC, Pauli G. Les acariens et leurs allergènes : Biologie et écologie des acariens Rev Mal Respir 2011;28:227-39.

[3] Bessot JC, Pauli G. Les acariens et leurs allergènes : Les allergènes des acariens Rev Mal Respir 2011;28:475-95.