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Les arts décoratifs des peuples de la Côte Ouest Guy Lanoue, Université de Montréal, 2012

Les arts décoratifs des peuples de la Côte Ouest Guy Lanoue, Université de Montréal, 2012

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Les arts décoratifs des peuples de la Côte Ouest

Guy Lanoue, Université de Montréal, 2012

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Les noms mentionnés ici sont ceux traditionnellement utilisés dans les textes classiques. Plusieurs groupes ont cependant revendiqué leur «vrai» nom, pas celui «ethnologique» déformé selon la phonologie anglaise qui s’est établie comme norme au 19e siècle; voir PPT Les Peuples de la Côte Ouest pour les ethnonymes.

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Masque Bella Coola Masque Coast Salish

Les peuples de cette zone sont connus pour leurs arts décoratifs et pour leurs rituels et cérémonies très «théâtrales». Tous les groupes utilisent les masques lors de ces performances. Cependant, les peuples au nord de cette zone ont un style esthétique plus figuratif comparé à celui des peuples du sud, qui ont adopté un style plus abstrait.

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Masque kwakiutl (sud) Masque tsimshian (nord)

On voit ici la différence entre le réalisme du nord et l’abstraction du sud

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Masque Coast Salish Masque Swayxway – Cowichan

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Masque Tsonaqua – Kwakiutl

Le Tsonaqua, «monstre» cannibale (et féminin en dépit de la barbe) fait partie d’un système dualiste, selon Claude Lévi-Strauss, dont l’autre composant serait le Swayxway: le premier est aveugle (symbolisé par les orbites creuses), et le deuxième a des yeux protubérants et donc est doué d’une vision aigüe. Ces deux moments de la même métaphore seraient une référence au paradoxe: l’autonomie de la communauté (être symboliquement «aveugle» à l’Autre) est mieux protégée quand elle à de liens à l’Autre, qui permet à la communauté de «voir» les intentions belliqueuses du voisin. Les deux masques sont aussi liés par le fait de posséder de grandes bouches ouvertes, prêtes donc à «avaler» et à incorporer l’Autre.

Le style est beaucoup moins « géométrique » comparé aux autres exemples de l’art kwakwaka'wakw, mais cette entité n’est pas un symbole totémique comme l’est la majorité des représentations visuelles.

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Masque cérémonial – Kwakiutl

Plusieurs masques représentent des entités «totémiques», c.-à-d., un des principaux symboles phratriques ou claniques. Paradoxalement, les phratries et les clans sont dispersés, avec des représentants en plusieurs villages, tandis que le village, catégorie géographiquement isolée et politiquement autonome, est représenté par un ensemble de figures totémiques qui agissent «d’adresse». Chaque maisonnée s’identifie selon le même principe, et donc les mats totémiques sont le « numéro civique » de la maisonnée, affichant les symboles dont ses membres ont hérité le droit d’utiliser.

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Mats totémiques, village kwakiutl

Modèles de mats totémiques en argilite -- Haida

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Mats totémiques – Haida

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Les maisons étaient construites avec de grosses planches de cèdre. Ce bois est résistant à l’humidité et se taille facilement. Les maisons avaient deux niveaux, avec une plateforme à l’arrière. Les maisons étaient démontables, et en été les planches étaient transportées vers l’intérieur du territoire national. Le village principal était celui d’hiver, situé sur la côte ou sur un fleuve.

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Les maisons étaient orientées vers la mer, car le transport dans cette zone s’effectuait par l’eau. Ici, un village Haida, avec les mâts totémiques aussi orientés pour afficher les «adresses» des maisonnées aux invités.

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Masques kwakiutl (gauche) et tsimshian (droite)

Même avec des masques censés représenter des personnages mythiques de l’imaginaire (comme dans l’exemple tsimshian), on constate la différence avec le sud: les composants du visage sont placés sur des plans géométriques plus conformes à la réalité et ils ne sont pas séparés par l’utilisation de couleurs fortes. Le sud veut souligner la séparation des composants, le nord leur intégration

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L’art est un « commentaire » sur les paradoxes des modèles tsimshian et kwakiutl: l’art de ces derniers déclenche un dialogue avec le public, où il s’engage à recomposer l’image de ses composants, dont la singularité est soulignée par les couleurs fortes et les angles géométriques plus aigus (chaque composant est placé sur une superficie avec une pente unique par rapport aux autres composants). Les Tsimshian, par contre, présentent des ensembles plus composés, car leur modèle de leur société souligne formellement la séparation de ses composants (les clans).

Souvent décrite comme organisée selon les principes de symétrie bilatérale (où les deux moitiés de l’image sont des miroirs l’une de l’autre), la réalité visuelle est plus complexe. On parle également de représentation fendue, où les deux moitiés de l’image se rejoignent sur l’axe central (le « nez » de l’animal, comme dans cet exemple tsimshian, un ours). Il y a aussi la perspective « aplatie », où le museau est au centre, et les pattes aux marges de l’image (voie la diapo no, 14, boite haida). Ici, le dialogue implicite avec le spectateur l’engage à recomposer

http://www.serdar-hizli-art.com/anthropology_of_art/1722c660.jpg

les éléments au centre avec ceux aux marges pour créer un axe proche-loin (le museau au centre est « proche », la queue et les pattes sont « loin )»; ceci est une métaphore puissante de l’organisation sociale, où les personnes veulent être « ici » et « là », autonomes et liées aux voisins.

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Masque tsimshian

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Boite en cèdre – Haida

Ces boites étaient utilisées pour stocker le poisson séché. Les espèces dominantes de la région, surtout le saumon, suivent des rythmes précis. Ils sont donc conservés en les séchant ou les fumant et en les conservant dans la graisse ou de l’huile. Ces boites, généralement fabriquées d’un seul panneau de cèdre, parfois étaient utilisées comme cercueils. Les dessins sont une forme d’adresse ou signature, pour indiquer l’identité du propriétaire.

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Boite en argilite – Haida(contemporain; cette pierre se trouve uniquement dans le pays des Haida)

Cette boite est un bibelot et objet de musée. Elle n’est pas destinée à être utilisée.

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Plateau de potlatch en argilite -- Haida

Étant donné l’importance du potlatch pour établir un équilibre politique interrégional, il n’est pas surprenant que les plats de service soient décorés avec les symboles identitaires des hôtes. Les objets en argilite ont souvent été sculptés pour le marché d’échange.

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Cuillères de potlatch en argilite -- Haida

Les dessins élaborés et bien travaillés lançaient un message aux invités: les hôtes sont puissants puisqu’ils se permettent d’investir dans l’ornementation autrement «inutile». Dans un monde où la richesse s’accumule en fonction des capacités corporelles, un tel investissement est très chargé sur le plan sémiotique.

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Bol de potlatch en cèdre – TsimshianIci, il y a un jeu «fractal», avec l’objet comme synecdoque symbole du groupe, et

chaque composant de sa décoration est également signe de l’identité de l’hôte

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Bouclier cérémonial en cuivre - Tlingit

Le cuivre était d’origine indigène, obtenu en échange des peuples athapascan aujourd’hui situés autour de la ville de Yellowknife, qui a pris leur nom, justement, les «couteaux jaunes» parce qu’ils avaient une source de cuivre pur (probablement un météorite; il y avait d’autres sources dans le Grand Bassin). La partie inférieure de ces boucliers représente une bouche ouverte, donc ce symbole est sémiotiquement prêt à sauter sur les invités et les «manger», c.-à-d., les incorporer. Ces boucliers étaient non seulement précieux, ils représentaient le pouvoir «impérialiste» de la maisonnée.

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Couverture Tlingit

Ces couvertures étaient tissées du poil d’une espèce de chien élevé spécifiquement pour cette fin, mélangé avec du poil obtenu du chèvre de montagne. Leur fonction était de démontrer le pouvoir du groupe qui pouvait obtenir la matière première rare pour les tisser. Elles n’étaient pas utilisées pour tenir chaud les personnes, mais portées pendant les cérémonies.

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Au 19e siècle, la Compagnie de la Baie d’Hudson a commencé à offrir ses fameuses couvertures, qui étaient convoitées par les peuples de

cette région. Elles étaient des objets-clés dans le potlatch.

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Panneau décoré – Kwakiutl

On voit dans ces panneaux l’insistance du groupe sur la question d’identité: l’horreur du vide et un style «fractal» (où chaque composant reprend et reproduit les mêmes thèmes établis par l’ensemble`on peut générer l’ensemble par n’importe quel de ses composants) proclament à voix haute l’identité de la maisonnée.

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Façade de maison avec décoration de corbeau à l’entrée - Kwakiutl

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Pirogue taillée d’un seul tronc de cèdre

Les pirogues étaient le moyen de transport dominant.

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Pirogues, 19e siècle; ils étaient construits en tailles variées.

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Les bijoux sont des nouveautés, mais les artistes se sont inspirés des motifs traditionnels, même s’ils utilisent des matériaux nouveaux tels que l’argent ou l’or. Plusieurs de ces objets ciblent le marché euro-Canadien, mais d’autres sont destinés aux personnes locales. L’activité artistique est toujours une dimension très importante de l’identité sociale et politique. Ces peuples étaient parmi les premiers à s’opposer farouchement à la domination étrangère.

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