Les banques, premières de classe ? Toutes y aspirent. Quant au comment

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    L'industrie bancaire en dbat

    forward a rcemment runi autour de la

    table huit minences grises du secteur

    financier afin de connatre leur vision du

    rle jou par les banques dans la sant

    de notre tissu conomique. Lindustriebancaire a-t-elle tir les leons de la

    crise financire de 2008. Ou, en d'autres

    termes, le monde de lentreprise et l'en-

    semble de la socit dans son sillage

    a-t-il des soucis se faire pour 2012 ?

    Les banques,premires declasse ?Toutes y aspirent.Quant au comment...

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    Dans ce dossier

    Restaurer la confiance

    Les banques et les autorits de surveillance

    dbattent de notre bien-tre conomique

    Vers une scission entre banques

    de dpt et banques d'investissement

    Des cots accrus pour les clients ?

    Responsabilisation de la politique bancaire

    Comment regagner la confiance ?

    TEXTE JOHAN VAN PRAETPHOTO DANIEL RYS

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    QUI EST ASSIS AUTOUR DE LA TABLE ?1. Max Jadot, CEO de BNP Paribas Fortis ; 2. Filip Dierckx, prsident de la Fdration belge du secteur financier (Febelfin) ; 3. Jean-Pierre

    Paelinck, secrtaire gnral de la World Federation of Investors Corporations (WFIC) ; 4. Rudi Bonte, mandataire spcial pour le contrle bancaireauprs de la Banque nationale de Belgique ; 5. Olivier Marquet, directeur gnral de la Banque Triodos Belgique ; 6. Koen Schoors, professeur

    dconomie lUniversit de Gand ; 7. Jean-Paul Servais, prsident de lAutorit des services et marchs financiers (FSMA). 8. Le modrateur,

    Stephen Fidler, est journaliste spcialis dans le domaine conomique et financier au Wall Street Journal.

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    La deuxime faillite virtuelle de Dexia

    en trois ans ne prouve-t-elle pas que

    le secteur nest pas en mesure de

    sassainir seul ?

    J.-P. Paelinck: Les investisseurs ont t dusaprs la premire crise. Dus de nous, parce que nous ma-trisions trop peu certains mcanismes. Mais dus aussi descadres dirigeants de certaines banques qui, sans connais-

    sances suffisantes, ont pris des risques dont ils ne matrisaient pasla porte. Nous savons dsormais que mme des rgles et des lgis-lations strictes noffrent aucune solution tant que les banques nemettent pas en uvre des stratgies qui tiennent dment comptede la ralit conomique et des valeurs relles.

    K. Schoors : La crise bancaire tait essentiellement due au su-rendettement. On ne peut continuer accrotre nos dettes, ce nest

    pas une solution long terme. Le dfi consiste supprimer pro-gressivement cet endettement, restaurer la solvabilit et la cr-dibilit, et mettre durablement en place un nouveau systme fi-nancier. Esprons que ce processus ne nous fera pas basculer dansune nouvelle crise.

    M. Jadot : Nous devons revenir lessence de lactivit bancaire.Et pour ce faire, on ne saurait agir la lgre. Car lindustrie ban-caire est imbrique dans le tissu conomique ; elle nexiste pas endehors de tout contexte. Tous les acteurs doivent uvrer ensemble une solution, ce qui exige du temps.

    O. Marquet : Le travail dune banque consiste recueillirlpargne et rinvestir dans lconomie cet argent dont les parg-

    nants peuvent momentanment se passer. Elle doit galementprter aux entrepreneurs des crdits suffisants pour stimuler ladynamique conomique. Dans le mme temps, lpargnant sou-haite obtenir la garantie que ses conomies seront protges et as-

    La crise aurait-elle t aussi grave si le secteur bancaire avait t pilot par davantage de femmesne serait-ce que parce que ces dernires ne se laissent pas uniquement guider par la dictature deschiffres bruts ? Nous ne le saurons sans doute jamais. Proposons donc demble notre premier thme nos huit invits (tous masculins).

    Restaurerla confi ance

    A la veille

    dune nouvelle refi nancire

    Les banques et les autorits

    de surveillance dbattent

    de notre bien-tre conomique

    Lautorit de surveillancedoit jouer un rle intgr

    dans la rgulation du systmebancaire Rudi Bonte (BNB)

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    sures. Enfin, il faut protger les banquiers contre eux-mmes, afindviter quils ne prennent des risques inconsidrs en vue de fairedu rendement.

    J.-P. Servais : En tant quorganisme de surveillance, nous nousconcentrons entre autres sur trois thmatiques : garantir un cli-mat bancaire stable, encourager les banques se concentrer surleur cur de mtier et protger linvestisseur et le consommateurpour quils aient nouveau confiance dans les institutions et lesmarchs financiers.

    R. Bonte : Les modles conomiques actuels sont dpasss. Cestpourquoi lautorit de surveillance doit jouer un rle intgr dansla rgulation du systme bancaire encore plus que par le pass ettre en mesure de refrner la stratgie dbride des banques. Pource faire, nous nous attachons surveiller la gouvernance et plus

    prcisment la responsabilit des conseils dadministration, le rledu gestionnaire des risques et la rmunration du management.

    La rgulation, dans sa forme actuelle, est-elle

    suffisamment efficace pour viter une crise financire

    comme celle de 2008-2009 ?

    K. Schoors : Les rgles de Ble II (voir encadr) visaient amli-orer la gestion des risques. Mais le secteur a renvers les choses etutilis ces rgles pour minimaliser le cot des capitaux au lieu derduire les risques. Sur le papier, le capital sans risque augmente,certes, mais, en ralit, les fonds propres chutent 3% peine. Onconstate le mme phnomne avec Ble III. Par ailleurs, ces nor-mes stimulent la demande de capital sans risque alors que la partde fonds propres est dramatiquement faible. Si lon souhaite rel-

    lement renforcer la stabilit du secteur, on doit favoriser des fondspropres vraiment sains et des rgles simplifies. cause de cettelgislation incroyablement complexe, les grandes banques parvi-ennent toujours contourner les rgulateurs. Nombre de banquesne comprennent mme pas leurs propres modles inter-nes : sur quelles bases les rgulateurs pourraient-ils, dslors, les valuer ?

    R. Bonte : Les rgles deviennent effectivement de plusen plus complexes et parfois contre-productives. Il estfondamental que les rgulateurs comprennent bien la di-mension qualitative avant dapprouver un modle de ris-que interne. Dans le dbat sur lintrt ou non de Ble II,

    on oublie souvent lincidence des exigences qualitatives :nous contrlons si les rsultats concrets du modle sontconformes au profil de risque et la stratgie de risque dela banque et nous pouvons imposer un capital supplmen-taire si le modle doit tre corrig. Encourags par la r-gulation europenne, nous faisons de plus en plus souventnotre propre valuation pour dterminer lampleur destampons de capitaux quune banque doit mettre en placeen fonction de son profil de risque.

    Vous prnez donc une simplification. Les rgles

    doivent-elles tre les mmes pour toutes les

    banques (level playing field) ?

    R. Bonte : Bon nombre dacteurs demandent une application an-

    ticipe des rgles de Ble III. Celles-ci augmentent considrable-ment les tampons de capitaux. Je me demande o les banques irontchercher cet argent en ces moments difficiles pour renforcer leursfonds et continuer soutenir lconomie.

    BLE I, II ET IIILe Comit de Ble sur le contrle bancaire se compose de reprsentants des

    diffrentes banques centrales et autorits prudentielles des marchs finan-

    ciers. Ble I (1988, complt en 1996) obligeait les banques conserver 8%

    de leurs actifs risqus en fonds propres. Lexigence de capital tait la mme

    pour tous les actif s, indpendamment du risque. tant donn que les banques

    se sont mises agir de plus en plus pour leur propre compte et sengager

    dans des activits dinvestissement, la vulnrabilit a augment avec le risquedu march (en raison du fait que les banques disposent de moins de dpts ou

    dargent plac en gage). Ble II (2004) a en partie rpondu la nouvelle ralit

    et a introduit des exigences minimales en fonction des risques. Mais celles-ci

    se sont, elles aussi avres, insuffisantes pour freiner la crise. Les rgles ont

    t dpasses par les innovations financires. Les banques ont ainsi cr des

    produits placs hors bilan (off-balance), comme les Credit Default Swaps, les

    swaps sur les taux dintrt, les options, etc. Les rgles de Ble III imposent

    de nouvelles normes plus strictes en matire de capitaux et de fonds, accom-

    pagnes dune exigence supplmentaire en fonction dun ratio de levier, o

    les actifs doivent tre valus en fonction des fonds propres. Un rglement

    spar amliore le contrle des liquidits.

    Croyez-moi, lorsque les banquesse mettent trembler, cest toutelconomie qui en est secoueMax Jadot (BNP Paribas Fortis)

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    forwardnovembre 2011

    M. Jadot : Demander aux banques de doubler leurs tampons decapitaux en un claquement de doigts aura des consquences surle financement de lconomie. Les banques prennent parfois, cest

    vrai, de gros risques, en raison des nombreux mcanismes de finan-cement rciproque mais, au final, elles financent aussi lconomierelle et les pouvoirs publics. Et si, cause dune introduction troprapide des nouvelles rgles, cela ne savre plus possible, les con-squences seront incalculables pour notre conomie, notre emploi,notre comptitivit Je prvois alors une hausse des cots du crditavec tous les effets ngatifs que cela peut avoir pour la croissanceconomique et un passage acclr au financement par le marchsil ny a pas de 'level playing field'.

    J.-P. Servais : Si lon exige des conditions quitables pour sim-plifier la rglementation, il convient de se demander si les tats-Unis seront prts imposer les rgles de Ble III 8.000 banques,

    comme cest le cas en Europe, et pas seulement aux 20 acteursprincipaux. Le respect des rgles dquit va donc bien au-del delharmonisation de toutes les banques europennes. Ble III est unervolution copernicienne en ce sens quon y utilise pour la premirefois une approche standardise dun ratio deffet de levier, o lesactifs risqus sont valus en fonction des fonds propres. Autrementdit, plus le risque est grand, plus le tampon de capitaux doit treimportant. Et cela doit tre appliqu au niveau du G20.

    F. Dierckx : Que les rgles prvoient un tampon de capitaux de 5ou de 9%, la vraie question consiste savoir quelles actions le mar-ch financier doit entreprendre pour convaincre le consommateuret les entreprises quil peut rsister aux chocs venir. Le volumedu tampon de capitaux ne reprsente quun seul des lments de

    rponse.

    K. Schoors : Ce raisonnement ne tient pas la route !

    M. Jadot : Mais si. Jen veux pour preuve un exemple concret : unentrepreneur demande un prt long terme parce quil souhaiteinvestir dans une activit ltranger. Au mme moment, il achteavec ses rserves de liquidits des obligations dtat allemandes.Cela prouve que la confiance est essentielle pour le rtablissementdu secteur, bien plus que les garanties de tampons de capitaux.Nous devons nous montrer trs prudents concernant la faon dontnous prsentons les choses. Car, lorsque les banques se mettent trembler, cest toute lconomie qui est secoue.

    K. Schoors : Si les activits se situent 100% et la constitutionde rserves 3%, un tout petit choc suffit balayer votre capital.Cela na rien voir avec la confiance. Je ne peux imaginer une seuleentreprise saine qui fasse des affaires dune manire aussi risque.

    F. Dierckx : La crise de certaines banques navait rien voir avecleur solvabilit, mais bien avec la perte de confiance. a me poseproblme si nous voluons dans une direction o le rendementsur le capital devient un rendement sur le capital sur les services.Conserver davantage de capital signifie que cet argent ne peut pastre utilis dautres fins, ce qui entrane donc, par dfinition, unrendement plus faible sur les fonds investis. En mme temps, enraison des tampons de capitaux plus importants, obtenir un crdit

    revient plus cher et certaines banques ne pourront plus jouer leurrle conomique de prteur. Si lon continue rduire le rendement,je suis convaincu que lactivit bancaire diminuera, avec toutes lesconsquences que cela implique pour lconomie.

    Le lgislateur belge doitimposer une scission entre

    banques de dpt et banquesdinvestissement

    Olivier Marquet (Banque Triodos Belgique)

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    O

    livier Marquet: Nous devons protgerles banquiers contre eux-mmes. Pendantla crise des annes 30, le prsident Roose-

    velt avait introduit le Glass-Steagall Act,qui interdisait aux banques de spculer enBourse avec les conomies des citoyens. Il me parat urgentque le lgislateur belge sans attendre lEurope ou les rgulateurs impose une scission entre les banques de dpt et les banquesdinvestissement ou banques casino. Les deux activits doiventtre distinctes, car lpargne est une activit forte intensit decapital, mais moins rentable, et les grandes banques auront, sinon,systmatiquement recours des produits risqus pour augmenterleur rendement. Nombre de chefs dentreprise sont dailleurs favo-rables une nouvelle application du Glass-Steagall Act.

    F. Dierckx : Largument le plus fort en dfaveur dunescission porte sur les cots accrus quune telle sparation

    entranerait pour les clients, savoir les entrepreneurs.tant donn que le financement interne ne sera plus possi-ble, les banques dinvestissement devront payer davantagepour rassembler leur capital.

    K. Schoors : Daccord, une sparation cote de largent(cest dj le cas au sein dune seule et mme banque). Les

    activits risques seront plus chres. Ce qui est une bonne

    chose. Dailleurs, si jtais une entreprise et que je devais

    choisir entre des cots faibles, rpartis dans le temps, ou une

    avalanche de cots cause de la crise, je nhsiterais pas.

    R. Bonte : Nous devons rectifier les attentes des clients.

    Eux aussi doivent prendre conscience quils doivent payerle prix normal pour certaines activits. Cela incitera gale-ment normaliser les bnfices.

    O. Marquet : On ne peut pas restaurer la confiance despargnants, des entreprises et mme des pouvoirs publicsen maintenant en vie, de gr ou de force, des banques di-nosaures. Les banques doivent changer radicalement, tanten termes de dimension que de modle dentreprise. Lesmonstres internationaux sont vous disparatre en raisonde leur taille et de la montagne de rgles complexes nces-saires pour tenter de les surveiller. On a besoin dun modlebancaire du type small enough to fail, dont la dimensioncontraint une bonne gestion. Si cela ne se fait pas laide

    de rgles ou de lois, ce sera lpargnant ou lentrepreneurqui exigera lui-mme des modles plus transparents et quicomparera et choisira des banques dont il a limpressionquelles grent son argent de manire sre. Tout comme il

    Vers une scissionentre banques dedpt et banques

    dinvestissement

    VERS UN CREDIT CRUNCH ?Les entrepreneurs doivent-ils redouter une rarfaction des crdits offerts,

    ce que lon appelle dans le jargon un credit crunch ? Selon Max Jadot, il ny

    a pas eu de resserrement du crdit en Belgique pendant la crise. Les ban-

    ques ont toujours pu faire appel des dpts bon march. Mais, surtout,

    la demande de crdit tait faible pendant la crise, et elle lest toujours au-

    jourdhui. Mme si la demande augmentait, les banques belges disposent

    lheure actuelle dune capacit suffisante. Olivier Marquet acquiesce. Ilrgne aujourdhui une forte concurrence entre les banques pour off rir aux

    entreprises les prts les moins chers possible. Les taux dintrt qui tai-

    ent en hausse juste aprs la crise sont nouveau en train de baisser.

    Plus le risque est lev, plus

    le produit cote cher. Nest-cepas l la logique que noussouhaitons finalement ?Koen Schoors (Universit de Gand)

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    forwardnovembre 2011

    value et choisit lui-mme son mdecin de famille. Non pas enfonction des rgles que les pouvoirs publics imposent ce m-decin, mais bien en fonction de la confiance que ce dernier lui

    inspire en raison de ses connaissances et de ses comptences.

    M. Jadot : Dans la nature, les petits et les grands animauxvivent cte cte. Les uns et les autres meurent en permanence.De mme, les caixas espagnoles locales ont pris de mauvaisesdcisions de crdit, par exemple. Je prfre des tampons de capi-taux plus importants lintroduction dun nouveau Glass-Ste-agall Act. Car qui nous dit que le client sera mieux servi avecdeux nouveaux univers ?

    Quest-ce quun rendement convenable ou un bnfice

    normal pour une banque ?

    O. Marquet : Le compte est vite fait : 9,5 10% de capitaux

    de catgorie 1 (capital ou fonds propres de base dont la banquedispose et avec lesquels elle peut compenser les pertes), 2% demarge oprationnelle et un ratio cots/revenus denviron 70%.Ce qui reprsente un retour de 6 7%. Autrement dit, je prfreune petite banque solide et bien intgre avec un rendementstable une banque dinosaure qui comporte des risques.

    J.-P. Paelinck : Un rendement de 6 7% est-il suffisant pourattirer des capitaux ? Un demi-pour cent de plus ou de moinschange peu de choses laffaire si lon pense aux pertes colos-sales qui risquent dtre causes par la crise de leuro. Les in-vestisseurs ont une peur bleue des consquences dune faillitepartielle de la Grce sur les banques. Ce ntait dailleurs pastrs malin dinsister autant sur ces pertes. Soyons justes, ce sont

    aussi les investisseurs qui ont accru le sentiment de panique parle pass. On cre ainsi un problme de liquidit plutt que desolvabilit.

    F. Dierckx : Pour en revenir au march belge, notre pays estle royaume des pargnants. Presque toutes les banques rassem-blent plus de dpts quelles ne prtent dargent aux entrepriseset aux particuliers. Il faut partir de cette diffrence. Autrefois,ce capital tait surtout investi dans des obligations dtat qua-siment sans risques. Ou il servait financer lexpansion inter-nationale de la banque. Cest devenu aujourdhui une loi co-nomique que dessayer de rentabiliser ce capital excdentaire.Non ?

    K. Schoors : Mais il ny a pas de capital excdentaire. Les ban-ques sont devenues dpendantes de leur liquidit et ont ouvertdnormes quantits de prts les unes auprs des autres.

    O. Marquet : Il existait peut-tre encore un excdent de d-pts il y a vingt ans, jusqu ce que les banques se mettent vendre des produits dinvestissement leurs clients. Ce nest unsecret pour personne que les banques belges ont dtourn denombreux dpts vers des produits dinvestissement dits horsbilan (voir encadr), ce qui les a rendues dpendantes des prtsinterbancaires. Si les banques avaient conserv un excdent dedpts denviron 20% et lavaient investi dans des produits fai-bles risques, nous naurions peut-tre jamais connu une crise

    financire aussi grave dans notre pays.

    Le respect des rglesdquit va bien au-del de

    lharmonisation de toutes lesbanques europennes

    Jean-Paul Servais (FSMA)

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    J.-P. Servais: Il serait intressant dtu-dier le lien statistique entre les mau-

    vaises performances des banques et la

    faiblesse de leurs structures de gouver-

    nance. Le conseil dadministration doit

    tre en mesure de critiquer les infor-mations transmises par le management. Cest

    essentiel pour les organismes de surveillance et

    les auditeurs. Tout commence par une gestiondes risques solide, sre et critique. Il serait er-

    ron de croire que le lgislateur et lautorit de

    contrle peuvent prendre la place du comit

    de direction et du conseil dadministration en

    ce qui concerne la gestion de la banque. Il y a

    donc encore beaucoup faire pour parvenir

    une meilleure responsabilisation de la politi-

    que bancaire interne. La FSMA a dj pris de

    nombreuses initiatives dans le domaine de la

    surveillance des produits, des codes de conduite et de la protection

    du consommateur financier.

    R. Bonte : Nous, rgulateurs, adoptons encore une attitude tropdiscrte et osons trop peu insister pour connatre les projets com-

    merciaux cachs des banques. Quelle est leur stratgie interne

    pour atteindre leurs objectifs, quelles lignes directrices reoivent

    les services commerciaux ? Il est parfois effrayant de constater la

    pression laquelle les vendeurs sont soumis pour couler certains

    produits. Les banques doivent comprendre que certaines prati-

    ques ne sont pas honorables. Faites le test : demandez un produit

    dinvestissement thique dans certaines banques. Vous serez sur-

    pris des propositions quon vous fera.

    F. Dierckx : Certains CEO mettent effectivement encore troplaccent sur la rentabilit. Mais lattention se dplace lentement

    vers la satisfaction du client. Je souhaite souligner, par ailleurs,

    que les banques belges ont supprim le risque de levier plus ra-pidement que leurs consurs europennes. Grce, par exemple,

    la politique de rmunration qui a vu le jour en Belgique. Il y

    a cependant encore du travail faire pour arriver un meilleur

    quilibre.

    J.-P. Paelinck : On dit que la National Westminster Bank sestpanouie et dveloppe au moment o ses cadres dirigeants ont

    reu une plus faible rmunration. La Royal Bank of Scotland, en

    revanche, a commis les faux pas les plus grotesques au moment o

    ses cadres dirigeants ont empoch des rcompenses royales. Les

    rmunrations extravagantes attirent parfois les mauvais mana-

    gers, ceux qui sont plus proccups par leurs primes que par la

    sant de la banque.

    O. Marquet : Toutes les banques belges parviennent trs bien fournir des crdits. Nous nous matrisons souvent et il y a une

    marge derreur minimale. Le problme est que dealers et traders

    Responsabilisation

    de la politique bancaire

    La crise de certaines banquesnavait rien voir avec leur

    solvabilit, mais bien avec laperte de confiance Filip Dierckx (Febelfin)

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    nont pas fait preuve du mme professionnalisme au cours des dix

    dernires annes. Leurs normes divergent fortement. Les traders

    se sentent intouchables, mais le vent tourne...

    R. Bonte : Ne sous-estimez pas le rle des cadres dirigeants.

    Lacte a beau tre initi par le trader, cest au final la direction

    de la banque qui donne le feu vert ou non en matire dexposition

    aux risques.

    Y a-t-il des conflits dintrts entre les pouvoirs publics et

    le secteur financier ? Les pouvoirs publics jouent, en effet,

    le rle de rgulateur, de demandeur de crdit, de donneur

    daide et dactionnaire de la banque

    J.-P. Servais : Il ne peut y avoir de conflit dintrts que si lon a

    le choix entre diffrentes solutions. Laide accorde aux banques

    par les pouvoirs publics fin 2008 et dbut 2009 tait la bonne et la

    seule solution possible.

    K. Schoors : Les pouvoirs publics ont recul devant les probl-

    mes, en partie parce que, en tant quactionnaire de la banque, ils

    espraient quils se rsolvent deux-mmes. Cette attitude consti-

    tue, selon moi, un conflit dintrts flagrant.

    O. Marquet : Que doit-on dcider lorsque lon est la fois pou-

    voir public et actionnaire, au moment o des conditions de ris-

    ques doivent tre associes des garanties publiques ? Comment

    rsoudre ce dilemme ?

    Les rgles noffrent aucunesolution si les banques netiennent pas compte de laralit conomiqueJean-Pierre Paelinck (WFIC)

    55L'industrie bancaire en dbat