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Les deux bouts du bâton Jean-Pierre CENDRON Elan Sud’Aventure Roman

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Les deux boutsdu bâton

Jean-Pierre CENDRON

Elan Sud’Aventure

Roman

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© Elan Sud 2014Dépôt légal juin 2014ISBN: 978-2-911137-35-8Composition : Elan SudPhotos : tous droits réservés

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Jean-Pierre CENDRON

Les deux bouts du bâtonR o m a n

collection aventure

Elan Sud

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Un bâton a toujours deux bouts.Proverbe russe

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I

Dès que les grandes portes en verre,surveillées par deux soldats l’arme à la bretelle,s’étaient ouvertes, la chaleur s’était abattue surNicolas, l’enveloppant tout entier, le plongeantdans un bain de vapeur géant, bousculant l’idée,venue tout droit de ses lectures d’enfance, qu’ils’était faite du pays où il venait d’atterrir.

Pour lui, la Russie évoquait des steppesglacées où couraient des loups et des traîneauxtirés par des chevaux qui, dans des tourbillons deneige étincelante, faisaient retentir, en secouantleur encolure, des clochettes au son joyeux, maispas cette fournaise qui écrasait le parking del’aéroport de Moscou.

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Sur les conseils de Boris, il ne portait qu’unléger blouson en toile, mais c’était déjà trop, etson dos était inondé d’une sueur qui trempait sachemisette. Il mit ses lunettes de soleil et enlevason blouson. «Trop tard pour faire demi-tour,pensa-t-il. Tu aurais dû réfléchir avant. »

Comme tous les passagers du vol Aeroflot 341qui marchaient devant lui, Nicolas avait fait laqueue devant le guichet de la douane et avait étécontraint de se placer devant un panneau blanc surlequel étaient tracées des lignes noires horizontalesqui, aux habitués du solfège, avaient certainementévoqué une portée musicale. Pour les amateurs defilms policiers, dont Nicolas faisait partie, ellesavaient rappelé la scène dans laquelle la victimecherche à reconnaître le visage de son agresseur aumilieu d’un groupe de suspects, alignés en rangd’oignons le long du mur d’un commissariat de lapolice new-yorkaise, plusieurs d’entre eux n’étantd’ailleurs que des policiers, déguisés, pour lesbesoins de la cause, en gangsters.

Il avait calqué son attitude sur celle desvoyageurs qui le précédaient et avait fixé d’unregard vague le portrait en grand uniforme, lapoitrine barrée d’une rangée de médailles, deLéonid Brejnev, secrétaire général du Parti

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communiste de l’Union soviétique, accroché aumur derrière l’homme en uniforme bleu-gris àépaulettes jaunes qui le dévisageait avec un œilinquisiteur.

Nicolas avait bien essayé d’esquisser unsourire qui se voulait chaleureux et amical, maiscelui-ci s’était évanoui dès que le douanier avaitfroncé le sourcil en secouant la tête d’un airréprobateur. Après un long moment d’attente,l’homme en uniforme avait murmuré quelquesmots en russe sur un ton autoritaire, tendu la mainavec une lenteur que l’on sentait calculée etgratifié le touriste français debout devant lui d’unregard glacial. Puis il avait saisi un tamponhorodateur et l’avait abattu avec vigueur sur lapage adéquate du passeport, avant de rendrecelui-ci à son propriétaire, non sans l’avoirfeuilleté encore une fois pour un tout derniercontrôle, une ultime démonstration à l’intentiondu passager debout en face de lui, sans doutepour préfigurer la surveillance sans faille quiallait s’exercer sur lui pendant son séjour enUnion soviétique.

Un mélange d’odeurs de kérosène, de cendresfroides de cigarettes et de bitume chaud régnaitsur le parking de l’aéroport. Pendant que Nicolas

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attendait devant le guichet de la douane, lesnuages s’étaient amoncelés dans le ciel. Il repérafacilement le car de l’Intourist réservé à songroupe en voyant Raymond et Thérèse, à côtédesquels il était placé dans l’avion, déposer leursbagages dans la soute. C’était un vieux modèled’autocar qui ressemblait beaucoup à ceux qu’ilprenait, vingt ans auparavant, pour partir encolonie de vacances.

Il choisit une place au fond. Ses cuissescollèrent au plastique transparent qui recouvraitle siège. Les touristes français continuaient àmonter dans le car. Un homme, la trentainecomme lui, petit, mince, presque fluet, vints’installer quelques rangées plus loin. Nicolasavait déjà repéré dans l’avion sa tenue quisemblait sortir du pressing et tranchait sur celledes autres voyageurs.

Le premier coup de tonnerre retentit aumoment où une jeune femme blonde monta dansle véhicule. Elle commença à compter lespassagers puis vérifia quelque chose sur le papierqu’elle tenait à la main et fit signe au chauffeurde démarrer. Le déluge de pluie s’abattit sur lecar à la sortie du parking, provoquant des traînéesgrisâtres sur les vitres et noyant le paysage sousun flou aquatique.

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Le visage de Nicolas se reflétait sur le carreaurendu opaque par l’averse. «Qu’est-ce que je faisici ?» pensa-t-il en regardant son front déjà unpeu dégarni, ses yeux noisette et ses joues que lachaleur avait fait rosir. Il se souvenait encore dela rencontre avec Boris Mitrofanovitch, lecollègue qui enseignait le russe dans le lycée oùlui-même était professeur d’histoire-géographie.Elle s’était passée au café Le Khédive, avec sonflipper, sa banquette où s’entassaient les élèves,sa table du bout réservée aux professeurs dulycée, et son grand comptoir en zinc où Borisl’attendait souvent après les cours. Boris, avec sachevelure déjà grisonnante ; Boris, qu’ilconnaissait à peine ; Boris qui lui avait racontéses deux années à l’université de Moscou,comme lecteurde français ; Boris qui fumait dedrôles de cigarettes, qu’il appelait des Papirossi,avec un grand filtre creux en carton qu’il tordaitentre ses dents ; Boris qui lui avait offert un café,un mois avant les vacances, et lui avait dit :

« Ça te dirait d’aller faire un petit séjour àMoscou? Peut-être même plusieurs?

— Oui, bien sûr. Je suis toujours partant pourles voyages. Qu’est-ce qu’il faut faire ? Adhérerau Parti communiste?

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— Sûrement pas.— Il y a un risque?— Ça dépend.»

Des grandes barres d’immeubles en bétonscandaient une campagne plate, parsemée debosquets de bouleaux. L’autocar doubla plusieurscamions, puis une charrette tirée par deuxchevaux dont le conducteur s’abritait tant bienque mal sous une bâche de toile.

La jeune femme blonde se leva et souhaita labienvenue aux voyageurs dans un micro quicrachotait. Sa voix fut couverte par plusieurs coupsde tonnerre et par le bruit de la pluie sur le toit duvéhicule.

«Nous venons de passer devant le monument àla gloire de nos soldats pendant la Grande Guerrepatriotique1. Il marque le point le plus avancé del’offensive nazie sur Moscou, la capitale del’Union soviétique. Entre le mois d’octobre 1941et le mois de janvier 1942, près de 800 000 soldatsde l’Armée rouge trouvèrent la mort…»

Le tonnerre lui coupa à nouveau la parole. Àtravers la pluie qui redoublait, Nicolas distingua, lelong de l’autoroute, un grand monument en bronze.

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1Terme utilisé en Union soviétique pour désigner la Seconde Guerremondiale

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«Je m’appelle Nathalie, reprit la blonde, et jeserai votre guide pendant votre séjour àMoscou.»

Ce prénom fit sourire Nicolas. «La placeRouge était blanche/Devant moi marchait monguide/Il avait un joli nom mon guide,Nathaliiiiiiiiiiie…»

Combien de fois avait-il entendu cette chansonde Gilbert Bécaud sur le petit transistor qu’ilécoutait en cachette tout en faisant ses devoirs, auretour du lycée ? La Nathalie de l’Intouristcommentait le trajet, mais la pluie battante nepermettait pas de voir grand-chose. Lescrachouillis du micro rendaient ses parolespresque aussi incompréhensibles qu’une langueétrangère. Elle s’était mise à parler des réussitesincontestables de l’économie soviétique. Elleavait de jolies jambes, mises en valeur par unejupe serrée qui lui marquait un peu les fesses, unebelle poitrine et deux nattes blondes qui luidonnaient un air de matriochka, sans doute pourfaire couleur locale, pensa Nicolas.

L’autocar entra dans la ville et avançalentement sur une grande avenue. Une dame d’uncertain âge posa une question à Nathalie quicontinuait à parler. La pluie avait complètementcessé, mais la chaleur humide avait transformé

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l’intérieur du car en bain de vapeur. Dehors, deshommes en chemisette et des femmes en robed’été sortaient des porches des immeubles où ilss’étaient abrités. Nicolas essuya la sueur quicoulait dans ses yeux avec son mouchoir.

«Nous arrivons bientôt à l’Hôtel internationalde la jeunesse qui sera votre lieu d’hébergement.Merci de préparer votre passeport pour lesformalités à l’arrivée.»

« Il faut vraiment prendre un voyage organisé?avait demandé Nicolas à Boris, trois moisauparavant. Je ne peux pas réserver toutsimplement un billet d’avion et une chambre àl’hôtel ?»

En versant du thé dans sa tasse, Sonia, lafemme de Boris, lui avait répondu :

«Les séjours individuels sont autorisés. Maisles postulants n’obtiennent jamais leur visa. »

L’Hôtel international de la jeunesse était unegrande tour de béton sans âme et son hall avaitbeau être spacieux, il était encombré par desgroupes de touristes qui traînaient leurs bagagesou attendaient les clés des chambres. La guideramassa les passeports et s’approcha du comptoirderrière lequel se tenaient deux employés.

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Le petit homme élégant que Nicolas avaitrepéré dans l’avion, puis dans le car, se présentaà lui :

« Je m’appelle Bernard Claverie.— Nicolas Martineau.— Il n’y a que des chambres pour deux

personnes dans cet hôtel. Je n’ai pas envie d’êtreavec n’importe qui. Voulez-vous partager lamienne? Je ne vous gênerai pas beaucoup, ajoutal’homme en souriant, je ne suis pas là pour fairedu tourisme, mais pour voir ma fiancée.»

Lorsque la guide revint, Bernard Claverie luiglissa quelques mots à l’oreille et, une clé à lamain, indiqua à Nicolas que leur chambre setrouvait au quinzième étage. Pour éviter l’attenteaux ascenseurs, ils coururent en traînant leursbagages. Bernard Claverie lui précisa que lesétages élevés étaient les plus recherchés, à causede la boîte de nuit du rez-de-chaussée, ouvertejusqu’à trois heures du matin, mais surtout, trèsmal insonorisée !

Il posa sa valise sur le lit et commença àranger ses affaires. Nicolas, posté devant lafenêtre, regardait l’avenue, tout en bas, au pied dela tour. Il pensa à la photographie de Frédéric etLuisa devant la cordillère des Andes. Il l’avaitregardée pendant le vol entre Paris et Moscou,

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pour se donner du courage. C’était un talismanqu’il gardait précieusement dans son portefeuille.Le seul souvenir qui lui restait de ses deux amisles plus proches, ses âmes sœurs. Tous les deuxétaient partis à Santiago du Chili, le cœur pleind’espoir, combattre l’injustice et la misère. Ilsavaient disparu au moment du coup d’État dePinochet. Disparu? En quelques mois, Nicolasavait compris ce qui se cachait sous la banalité dece mot : Frédéric et Luisa étaient morts, sansdoute dans le grand stade de Santiago,probablement après avoir été sauvagementtorturés. Était-ce à cause d’eux qu’il avait acceptéla proposition de Boris et pris cet avion? Pourreprendre leur combat contre l’arbitraire etl’injustice ? Pourtant, il savait bien ce queFrédéric aurait dit s’il avait été encore là :« réflexe petit-bourgeois », « solution indivi-dualiste», « seule l’organisation des masses peutabattre le régime…»

«Et vous, l’interrompit Bernard Claverie, vousêtes venu à Moscou faire du tourisme?»

Nicolas se contenta de sourire sans répondre etcommença à défaire son sac de voyage.

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Il ouvre la boîte aux lettres, en sort uneenveloppe blanche sur laquelle est marqué sonnom, Nicolas Martineau, d’une écrituremalhabile. Il met l’enveloppe dans sa poche.C’est le matin, pourtant il fait déjà chaud. Hiersoir, au journal télévisé de France 2, lejournaliste a parlé de canicule.

Il traverse la rue de la Convention en courant.Il y a peu de voitures au mois d’août à Paris. À laboulangerie, il achète deux baguettes ; à lasupérette, un pack de bières et deux grandesbouteilles d’eau minérale. Il se dépêche.Monsieur Lopez va arriver. Il est toujoursponctuel, monsieur Lopez.

Quand Nicolas appuie sur le bouton d’appel del’ascenseur, monsieur Lopez est déjà là, en effet,accompagné de son ouvrier, un petit jeune auxcheveux roux, qui ne dit jamais rien. Ils montenttous les trois dans l’ascenseur. Nicolas pose lesbaguettes sur la table du salon et met les boissonsdans le réfrigérateur, installé dans la même pièce,la seule épargnée par les travaux.

Il s’assied dans un fauteuil recouvert d’unebâche en plastique. Il a déjà chaud. Il entendmonsieur Lopez et son aide qui s’activent dans la

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salle de bains, au fond du couloir. Ils doiventposer le carrelage. Deux jours que cela traîne,mais, avec cette canicule, Nicolas ne peut pasvraiment les blâmer de leur lenteur. Il repense àla lettre, la sort de sa poche, la pose devant lui,sur son pantalon.

Le téléphone sonne, comme tous les matins àla même heure. Il entend la voix de son fils,Jérôme, très excité, qui lui parle de la plage, de lapremière leçon de planche à voile qu’il vaprendre ce matin. Nicolas dit «Bon, c’est bien»,puis «Passe-moi ta mère.» Sa femme s’inquiètede lui. «Tu vas bientôt nous rejoindre?»

Il ne sait pas, ça dépend des travaux, ilsn’avancent pas aussi vite qu’il voudrait. « J’aipeur que ça avance encore moins vite si je ne suispas là. »

Nicolas demande des nouvelles de Paul, leurdeuxième fils, qui supporte mal la chaleur.Heureusement qu’ils sont au bord de la mer, tousles trois. Sa femme lui dit : «Tu me manques.» Ilrépond «Toi aussi. »

Il promet de venir les rejoindre le week-end.Nicolas raccroche. Il n’entend plus de bruit au

fond de l’appartement, rien que le roulement desvoitures sur la rue de la Convention, par lesfenêtres ouvertes en grand. Il soupire et regarde

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la lettre posée sur la jambe de son pantalon. Ungros cachet de réexpédition barre l’enveloppe.Nicolas l’ouvre. À l’intérieur, il y a une cartepostale, en couleurs, de la place Rouge àMoscou, avec, dans le fond, la muraille duKremlin.

Au dos de la carte, dans l’emplacement réservé àla correspondance, une seule phrase: Je serai àl’hôtel du Pont Neuf du 15 au 25 août. Il consulte samontre pour vérifier la date. On est le 24 août. Ilreprend l’enveloppe, essaye de déchiffrer les cachetsde la poste. Il y en a un qui est lisible, les autres sontà moitié effacés. La carte est arrivée en France le 16août 2003, à son ancienne adresse, rue Danville,dans le XIVearrondissement. Le retour au bureau deposte et la réexpédition à sa nouvelle adresse ontpris huit jours.

Il prévient monsieur Lopez qu’il s’absentepour quelques heures, qu’il va faire une course.Il enfile une chemise propre, un pantalon repasséet se précipite vers la station de métro.

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Du même éditeur :

Collection Elan Sud’Aventure

978-2-911137-03-7 : Toca León ! - Dominique LIN

978-2-911137-04-4 : De l’autre côté - Bruno ALBERRO

Prix Première Chance à l’écriture

978-2-911137-09-9 : Voix pour moi - Alicia FERTIG - 2008

978-2-911137-13-6 : En lisant Mona - Élise BLOT - 2009

978-2-911137-17-4 : Poussière d’écume - Sylvain RICCIO - 2010

978-2-911137-25-9 : Cernes pourpres - Jean BESSIERE - 2011

978-2-911137-33-4 : C’est aujourd’hui dimanche - Aurélie FREDY - 2013

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Cet ouvrage a été publié avec le soutien duConseil régional Provence-Alpes-Côte d’Azur

dans le cadre duPrix première chance à l’écriture*

Organisé par l’associationExpressions Littéraires Universelles

http://www.elansud.fr/elu/Prix.htm

* décerné à un auteur encore non édité par un jury composé deprofessionnels de la chaîne du livre (Elan Sud, auteurs, journalistes,libraires, bibliothécaires et professeurs) et de lycéens (lycée del’Arc à Orange).

Partenaires

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Éditions Elan Sud

233 rue de Rome - 84100 Orangehttp://www.elansud.fr

http://elansudeditions.over-blog.orgComposition : Elan Sud

Impression : France QuercyN° d’impression : 40725

Dépôt légal : juin 2014ISBN: 978-2-911137-35-8

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Prix : 17 €ISBN: 978-2-911137-35-8

www.elansud.fr/cendron

Accoudé au zinc du café Le Khédive, Nicolas vavoir sa vie basculer.

Pourquoi a-t-il accepté la proposition de BorisMitrofanovicht ? Amitié, convictions? Il seposera longtemps la question.

Nicolas Martineau, professeur d’histoire dansun lycée de banlieue parisienne, se retrouveimmergé dans l’univers très contrôlé de l’Unionsoviétique des années 1980 pour aider unefemme, celle que le transfuge Fédor Rijkov aquittée pour passer à l’Ouest.

Au royaume du KGB, chacun de ses pas sera suivijusqu’à la fin par un mystérieux personnage.

Enseignant, auteur d’ouvrages scolaires ensciences économiques et sociales, puisresponsable des ressources humaines dansde grandes institutions publiques, Jean-PierreCendron vit à Grambois. Très impliqué dansla vie associative et l’animation culturelle(théâtre, sculpture), il est aussi auteur denouvelles.Dans la collection Élan Sud’Aventure, ceroman a été primé en 2014 par le jury du Prixpremière chance à l’écriture.

Les deux bouts du bâton

Lauréat 2014