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LES ECORCES D 'AGRUMES
POUR L'ALIMENTATION DU BETAIL
R. HUET et A. LEDERGERBER
SorulrarRE,I ntroduction
Composi t iot t chimiqne et valeur nutr i t ive
P ri paralion
Conservation
Introduction
Les usines de jus de fruits au Maroc tirent peu de profit des déchetsde préparation des jus d'agrumes ; le dépôt au voisinage des bâtiments,de calottes d'écorces et de pulpes, refus d'affinage, constitue un foyer d'in-fection, et le transport de ces déchets soit aux décharges publiques, soitdans un endroit éloigni grève l'exploitation de façon non négligeable.
Les calottes d'agrumes représentent environ 55 Vo du tonnage desfruits traités ; malgré quelques essais d'utilisation cette quantit3 ne diminuepas de façon sensible : en effet I'extraction d'huile essentielle n'éliminequ'une infime fraction des écorces et leur préparation pour la fabricationdes confitures, des pâtes d'albédo, ou des pâies d'orange dites < commi-nuted >, ne porte que sur quelques centaines de tonnes pour tout le pays;d'autre part, seules les écorces de citrons scnt recherchées pour la produc-tion des bioflavonoïdes.
Al Awamia, l l , pp. 61-69, avrl l 1964.
62 R. HUET ET A. LEDERGERBER
La transformation des écorces d'agrumes en aliments pour le bétail,couramment pratiquée en d'autres pays producteurs, n'a pas encore étéréalisée au Maroc. Elle présente cependant des perspectives séduisantes :elle utilise la totalité des calottes, éliminant ainsi les foyers d'infectionconstitués par les déchets, et fournit un aliment appréciable pour les bovinsdont elle permet l'élevage ; c'est donc un moyen de développer les ressour-ces alimentaires du pays et une source de profit qui permet d'abaisserle prix de revient des jus de fruit. On peut se demander pourquoi, malgrétous ces aspects favorables, une telle production n'a pas encore été envisa-gée. Une explication est habituellement avancée : étant donné le faibletonnage d'agrumes traités par chaque usine et le coût élevé de l'énergie,la préparation des écorces n'apparaît pas comme une source de profrtappréciable tout au moins dans l'immédiat.
Cependant les conditions de production seront vraisemblablementmodifiées au cours des prochaines années. La quantité de fruits disponi-bles pour la transformation va sensiblement progresser du fait de I'aug-mentation des surfaces plantées et aussi, sans doute, de l'augmentationrelative des écarts de triage. On signale en effet dans les Stations d'em-ballage la part croissante de fruits écartés de l'exportation par suite detaches ou de défauts de l'écorce dus aux prédateurs. Dans ces perspectives,les usines actuelles devront notablement augmenter leur production oufaire place à des usines plus importantes qui pourront se permettre lesinvestissements nécessaires au traitement des écorces de façon rentable.D'autre part l'élevage de bovins, au voisinage de I'usine, offrirait undébouché immédiat et contribuerait au développement du pays en créantde nouvelles ressources alimentaires.
Composition chimique et valeur nutritive des écorces d'agrumes
De I'examen des TasrElux I et II, il ressort que les écorces etdéchets d'oranges et de pomelos sont très riches en eau. Leur matièresèche est riche en glucides et pauvre en protides et en lipides.
Pour permettre la conservation des écorces et faciliter leur transport,il est apparu nécessaire de les dessécher: elles peuvent ainsi être entre-posées en atmosphère sèche sans risque de fermentation ou de moisissures.D'autre part, pour une valeur nutritive identique leur poids est réduit destrois quarts.
Ces déchets séchés, ou < pulpes séchées >> comme ils sont appelés auxUSA, très riches en glucides, peuvent fournir une part importante del'alimentation des bovins. Ils doivent cependant être complétés par desaliments riches en azote, comme le foin de luzerne, et en lipides, commeles sraines de lin ou de coton.
LES ÉCORCES D,AGRUI\{ES, ALIMENTS POUR LE gÉTNTL 63
On a comparé la valeur nutritive des pulp:s d'agrumes avec celle
des pulpes de betteraves [2]. Les vaches, dont le régime comprenait soit
des pulpes d'agrumes soit des pulpes de betteraves, fournissaient des
quantités égales de lait d'une môme lichesse en matières grasses. Cepen-
dant, le taux d'engraissement des vaches nourries avec des pulpes d'agru-
mes était légèrement plus faible. Les exp5rimentateurs conclurent que
pulpes d'agrumes et de betteraves étaient pratiquement identiques en valeur
nutritive, lorsqu'elles étaient utilisées comme source de glucides diges-
tibles.
Il a été signalé en Floride que la nutrition des vaches avec des pulpes
sèches de pomelos favorisait la sicrétion lactée l2l, toutefois ce fait n'a
pas toujours été v&ifié. Par contre, on peut craindre que le lait des
vaches qui reçoivent ces aliments ne présente une odeur particulière et
un goût amer. Divers éleveurs [2] ont signalé en effet que si I'on trempe(r5hydrate) les pulpes de pomelos avant I'ingestion, le lait acquiert ungoût très sensible, notamment si les pulpes sont données en grande
quantité peu avant la traite. Avec les écorces présentées sèches cet incon-
vénient disparaît. Un autre fait mirite d'être signalé I2l: les pulpes
s3ch3es gonflent dans I'estomac en présence de suc stomacal et d'eau. Il
est donc conseillé de les additionner d'aliments concentrés pour réduire le
volume ingéré.
Préparation
La dessiccation directe des écorces par évaporation de leur eau est
une opération trop dispendieuse pour être rentable. Aussi les écorcessont-elles soumises à un traitement préalable qui permet de réduire demoitié leur teneur en eau.
Après un broyage grossier au désintlgrateur, elles sont neutraliséespartiellement avec un lait de chaux à raison de 3 à 6 kg de chaux par
tonne d'écorces [ ] ; leur pH augmente alors et atteint 5 à 6. Elles jau-
nissent et leur texture physique se modifie. Les pectines transforméesen pectate de calcium perdent leur propriété de rétention vis-à-vis deI'eau. Par phénomène de synérèse la masse perd son eau de constitution,et il devient facile de s'en débarrasser soit par simple écoulement, soit,ce qui est plus rapide, par pression. Le < gâteau de presse > contientencore 1O à'75 Vo d'ea:u qui doivent être élimin:s par séchage. A ceteffet, on utilise souvent des fours cylindriques horizontaux, rotatifs, àair pulsé chauffé directement par un brûleur à mazout. La températurede I'air peut atteindre 100-110" C. Le chauffage à la vapeur, plus doux,s'est révélé peu efficace. Avec 8-12 tonnes d'écorces fraîches, on obtientI tonne d'écorces séchées [1].
64 R. HUET ET A. LEDERGERBER
Le jus d'écoulement ou de pression est récupéré quand les conditionsde rentabilité le permettent. Il est alors concentré en mélasses qui sontréincorporées aux écorces avant ou après séchage afin d'augmenter leurvaleur nutritive. La pasteurisation préalable des jus de presse et leur fil-tration s'avèrent nécessaires pour les concentrer sans encrasser les appa-reils.
Les écorces d'oranges étant pauvres en protéines, on peut les enrichiren matières azotées par ammonisation ou addition d'urée avant de réin-corporer les mélasses. L'ammoniac serait préférable car d'après Dup.Lrcuret al [3] << chaque kilogramme d'ammoniac réagissant forme l'équivalentde 5,15 kg de protéines brutes synthétiques. Chaque kilogramme d'uréen'équivaudrait qu'à 2,62 kg de protéines brutes >.
Un autre procédé mentionné par DuReIcNr consiste à remplacer lachaux par I'ammoniaque lors de la neutralisation des écorces [3]. Leprocédé, très séduisant, présente un inconvénient majeur: en effet, I'am-moniaque n'insolubilise pas les pectines comme la chaux et la pression desécorces neutralisées ne permet d'exprimer qu'une faible quantité d'eau.
Les essais réalisés dans notre laboratoire sont significatifs à cet égard.Des écorces hachées ont été neutralisées soit par une solution d'ammo-niaque à 5 Vo, soit par une solution de chaux à 5 7o. Dans un essaiannexe, on a mélangé chaux et ammoniaque (Tarrrlu V). Il apparaîtnettement que seul le traitement à la chaux permet d'extraire le maximumd'eau par pression. Le coût de séchage étant élevê, cette dernière consi-dération I'emporte sur l'amélioration de la qualité nutritive des écorcesséchées.
Conservation
Les écorces séchées, entreposées dans un local où I'humidité relativeest supérieure à 80 Vo, isquent de se réhydrater et de moisir, à plus forteraison quand elles sont enrichies en mélasses. Si elles contiennent 50 7ode mélasses, elles moisissent à partir de 70 Vo d'humidité relative [1] ;si elles sont enrichies en azote les moisissures se développent plus rapide-ment encore et on observe alors un brunissement rapide.
Des essais de conservation portant sur des écorces pressées mais nonséchées ont été réalisés dans notre laboratoire. Le schéma des opérationsest le suivant:
Déshydratation partielle classique par pression après chaulageAddition du jus en mélassesRéincorporation aux pulpes presséesEntreposage en sacs de polythène à différentes tempiratures: 0"C, tempé-rature ambiante de 22 à 25", 37" C.
LES ÉCORCES D,AGRUMES, ALIMENTS POUR LE SÉTETL 65
Les écorces pressées contenaient encore, après enrichissement avec25 % de mélasses, 57 % d'humidité. Protégées avec de I'acide sorbiqueà la dose de lo/t:,o elles se sont conservées, sans fermentation ni moisissure,aussi bien à 37'C qu'à 0"C. Tout au plus a-t-on observé, au bout d'unesemaine, un brunissement qui se développait à 37'C.
Le benzoate de soude s'est révélé d'un emploi moins sûr. Utiliséà la dose de 2,5"/nn,i l n'a pas empêché un développement de moisissuresau bout de 4 semaines à 37" C, et de 6 semaines à température ambiante'Des phénomènes de brunissement identiques à ceux que I'on a observésplus haut se produisaient.
Manuscrit déposé le 17.3.64
T.q.nr-E.lu I
Analyse d'écorces d'oranges fraîches
(Laboratoire de technologie des produits horticoles, Aïn Sebaa)
I I I I I I I V VDousr-E Gnosss Vlrsxcrl
TARocco PoRTUGATSE FrNe SeNcurNe Lerr
Matière sèche 24,4 23,8 25,0 26,8 27,0g p. cent
Humidité 75,6 76,2 75,O 73,2 73,0g p. cent
Sucres réducteurs 6,6 '1 ,2 7,4 8,4 6,0
g p. cent
Sucres totaux 8,4 9,0 8,8 11,0 8,0g p. cent
Saccharose 1,8 1,8 1,4 2,6 2,0g p. cent
Acidité 0,32 0,24 0,24 0,26 O,1Zg. acide citriquep. cent
Acide ascorbique 108 108 122 74 88mg p. cent
Cendres 590 566 542 698mg p. cent
66 R. HUET ET A . LEDERGERBER
' fast-elu l l
Analyse des déchets de pomelos []
CoNsrrrulnrs
PoM[Los oe Fl,olroEPovsros oe CeI-rnonNrn
écorce et pulpe en mélange%
écorceVo
pulpelo
Solides totaux
Cendres
Huile volatile
Acidité (acide citrique)
Fibres brutes
Protéines (N X 6,25)
Lipides (extraits à l'éther)
Sucres tot. en intervertis
Pentosanes
Protéines (en partie de calcium)
Naringine
t6,7 |
0,74
0,43
0,7 4
1 , 7 |
1 , 1 9
0,28
6,35
0,83
3 , 1 0
0,40
r 5,60
0,^t 5
0,63
1,44
1 ,05
0 , t 6
6,30
0,44
3,56
0 ,10
) ) o )
0,70
0,56
o,43
2,O0
1,63
4,23
8,68
l , f l
3 ,93
0,63
TnnLE.Au III
Analyse des déchets d'agrumes séchés [4]
CoNsrrtueNts PoURCENTÀGE
Cendres
Lipides bruts
Fibres brutes
Protéines brutes
Matières sèches
Extractif non azoté
A A
1 3,0
6,2
92,0
63.0
LES ÉCORCES D,AGRUMES, ALIMENTS POUR LE BETAIL 67
Tlnrnau IV
Composition de déchets de pomelos séchés [2]
ANALYSES1936-37
Vo1937 -38
VoI 93 8-39
%Moyenne
Vo
Humidité
Protéines brutes
Lipides bruts
Fibres brutes
Extractif non azoté
Calcium
Magnésium
Phosphore
12,0
6,0
5,0
I 1 , l
58 , I
) 7 )
0 , 1 6
0 , 1 2
10,5
6,8
7,4
I 3,0
5 4 ' )
3 ,13
o ' t )
0 ,13
1 1 , 5
6,4
4,2
1 3 , 1
5 R 4
1 , 5 7
0,06
0 , 1 1
11 ,0
6,4
5 5
t2 , r
56,9
2,34
0 ,12
0 ,12
TenrBeu V
Comparaison entre les traitements des écorces par la chaux
et Par I'ammoniaque
(solutions à 5 %)
TnerreN4pNr ors ÉconcBs o,;rt{";o* *i*
EXTRAITpH ou sBc DU
JUS JUSg p. cent
AZOTE TOTAL
écorces jus
Chaux à 80 ml/kg
Ammoniaque à 80 ml,zkg
Ammoniaque 40 ml/kg
Ammoniaque 40 rnl/kg
Chaux 2O ml/kg
Ammoniaque 30 ml/kg
Chaux 30 ml,ukg
50 mn
30 mn
30 mn
20 mn
15 mn
1 5 m n
1 5 m n
52
I J
27
36
, 1
6,5
9 ,3
6 , 1
7 ,4
1 \
1 ) O
1 3 , 5
14,2
13,6
r 3 ,3
1,63 0 ,59
4,07 3 ,32
2,1)9 2,34
298 2,'28
2,70 l , i 6
68 R. HUET ET A. LEDERGERBER
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. : tà ; i l r :r . , f ,{ l ;+:eb *t lo;"[- . ,L.,9 .d-" i .Jl r l ,^à"{ i t tL, ;oi-rt l
RÉsunaÉ
Au Maroc, les usines de jus de fruits ne tirent pas suffisamment partiedes déchets d'agrumes, écorces, pulpes et pépins. Les auteurs étudient lapossibilité de les transformer en aliments pour le bétail.
Les déchets d'agrumes riches en glucides sont déficients en protideset lipides. Différents procédés permettent de les enrichir en protides.
La conservation des dichets ne peut se rjaliser que par dessiccationcomplète ou par demi-dessiccation et addition d'antiseptique. L'acide sor-bique donne de meilleurs résultats que le benzoate de soude.
RESUMEN
Los residuos de agrios para la alimentaciôn del ganado
Las fâbricas de zumos de frutas en Marruecos no aprovechan bas-tantemente de los residuos de agrios : cortezas, pulpas y semillas. Losautores estudian la posibilidad de transformarlos en piensos para el ganado.
Estos residuos son ricos en glfrcidos pero contienen pocas proteînasy materias grasas. Varios métodos permiten de aumentar la proporciônde proteinas.
La conservaciôn no puede realizarse sino mediante la desecaciôncompleta o llegada a mediado, con adicidn de antipritrido. El âcido sorbicoda mejores resultados que el benzoato de sosa.
The fruit-juice factories in Morocco do not
citrus waste: peel, pulp and seeds. The authors
transform them into food for cattle.
Citrus waste is rich in carbo-hydrates but
and fats. Various methods permit to increase the
LES ÉCORCES D,AGRUMES, ALIMENTS POUR LE BETAIL 69
Sulruanv
Citrus waste for cattle feeding
make sufficient use ofstudy the possibility to
contains little proteinsproportion of proteins.
Waste storage can only be effected by complete desiccation or by
half-desiccation and adding of antiseptics, among which sorbic acid gives
better results than sodium-benzoate.
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1 .
2 .
J .
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