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HAL Id: hal-01878310 https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01878310 Submitted on 20 Sep 2018 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Copyright Les facteurs d’adoption des services bancaires islamiques en Tunisie Souheila Kaabachi To cite this version: Souheila Kaabachi. Les facteurs d’adoption des services bancaires islamiques en Tunisie. Management & Sciences Sociales, Kedge Business School, 2012, Performance et entreprise responsable, pp.105-121. hal-01878310

Les facteurs d'adoption des services bancaires islamiques

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HAL Id: hal-01878310https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01878310

Submitted on 20 Sep 2018

HAL is a multi-disciplinary open accessarchive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents, whether they are pub-lished or not. The documents may come fromteaching and research institutions in France orabroad, or from public or private research centers.

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, estdestinée au dépôt et à la diffusion de documentsscientifiques de niveau recherche, publiés ou non,émanant des établissements d’enseignement et derecherche français ou étrangers, des laboratoirespublics ou privés.

Copyright

Les facteurs d’adoption des services bancaires islamiquesen Tunisie

Souheila Kaabachi

To cite this version:Souheila Kaabachi. Les facteurs d’adoption des services bancaires islamiques en Tunisie. Management& Sciences Sociales, Kedge Business School, 2012, Performance et entreprise responsable, pp.105-121.�hal-01878310�

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Les facteurs d’adoption desservices bancairesislamiques en Tunisie

À la lumière de la théorie de la diffusion de l’innovation de Rogers (1995) et d’uneétude quantitative menée sur un échantillon de 239 individus, non utilisateurs de l’offrebancaire islamique, cet article vise à déterminer les facteurs influençant l’adoption desservices bancaires islamiques par la clientèle bancarisée tunisienne. Les résultats mon-trent que l’avantage relatif perçu de ces services bancaires et leur compatibilité avecles croyances, les valeurs, les habitudes bancaires et les besoins financiers des individussont les principales variables qui motivent leur adoption. En revanche, la complexitéperçue des produits et des services et une incertitude élevée liée à leur usageexpliquent la réticence des individus à les choisir. Cette recherche exploratoire con-tribue à l’enrichissement des travaux appliquant la théorie de la diffusion de l’innova-tion de Rogers au contexte des services bancaires islamiques. Elle met l’accent sur lanécessité pour les banques islamiques de procéder à une meilleure éducation des indi-vidus dans le domaine de la finance islamique et de communiquer davantage sur lesbénéfices distinctifs de leurs services et sur leur mode de fonctionnement.

Mots clés : finance islamique en Tunisie, adoption des produits bancaires islamiques, théorie de ladiffusion de l’innovation, banques islamiques.

Introduction

Avec une progression annuelle avoisinantles 20 %, un total d’actifs estimé à 1,7trillion de dollars en 2013 et pouvantatteindre 3,4 trillions d’ici 2018 (WIBCR,2013–20141), la finance islamique susciteun intérêt croissant à travers le globe. Lesrécentes crises financières etéconomiques et la transformationsociopolitique de nombreux pays dans lesillage du printemps arabe ont accélérél’expansion de ce secteur dans les paysdéveloppés à l’image de l’Europe, la

Russie ou encore l’Amérique du Nord,mais aussi dans les pays émergentscomme le Pakistan, l’Inde ou encorel’Afrique du Nord.

Bien que l’émergence de la financeislamique en Afrique du Nord remonteaux années 70 avec la fondation de MitGhamr Savings Bank en Égypte, unecoopérative d’épargne et de créditrespectant la Charia, l’évolution de ce

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Souheila Kaabachi Enseignant-chercheur en Marketing, European Business School [email protected]

1. 2014,www.ey.com/...World_Islamic_Banking_Competitive.

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secteur reste timide voire embryonnaire et sapart de marché ne dépasse guère les 5 % dutotal des actifs bancaires. En 2011, la BanqueAfricaine de Développement (BAD) indiqueque « le classement de l’actif bancaireislamique dans les pays musulmans de laMéditerranée est très peu honorable et sapart dans l’actif total est nettement à latraîne ». Elle estime les parts respective del’Égypte, de la Tunisie et de l’Algérie entermes d’actifs conformes à la Charia à 4,9 %,2,2 % et 1,1 %. D’ailleurs, le taux d’adoptiondes services bancaires islamiques restemarginal dans ces pays et avoisine les 2 %(Demirguc-Kunt et al., 2013). Si la politiqueattentiste de ces pays envers la financeislamique et le manque de soutien législatifont fortement entravé la croissance de cesecteur, au lendemain du printemps arabe, lasituation est en train de changer. La demandepour les services bancaires islamiques croîtsignificativement et les gouvernementsaffirment leur volonté de profiter desbienfaits de ce nouveau système pourstimuler la croissance économique de leurspays.

Cette recherche exploratoire s’intéresse toutparticulièrement à la Tunisie, un pays danslequel la finance islamique a vu le jour en1983 et qui offre, grâce à la présence d’unedemande potentielle importante pour cesnouveaux services bancaires, estimée à 28,5milliards de dollars d’ici 5 ans (ThomsonReuters, 2013), des opportunités d’expansionsignificatives pour ce secteur. Durant lapériode de transition, le gouvernementtunisien prend conscience des enjeuxéconomiques et sociologiques de la financeislamique pour le pays et met en place desstratégies plus concertées pour ledéveloppement de ce secteur. Il voit à traversl’instauration de ce système financier,l’opportunité de stimuler la croissanceéconomique, de réduire le déficit budgétairede l’État mais surtout le chômage,notamment celui des jeunes diplômés.

Ce nouveau contexte postrévolutionnairereprésente une opportunité pour les

institutions financières islamiques quicherchent à accroître leur part de marché.Stimuler la demande de la population pourleur offre bancaire, impose à cesétablissements de comprendre au préalableles besoins de leurs clients potentiels, leursperceptions et attitudes mais aussi leursattentes en termes de produits, de services etd'information. En ce sens, cette recherches’intéresse à la problématique de l’adoptiondes services bancaires islamiques en Tunisieet vise à identifier, à la lumière de la théoriede la diffusion de Rogers (1995), les facteursqui déterminent le choix de ces nouveauxservices par les individus.

Nous nous intéressons dans le cadre de cetterecherche aux non-utilisateurs des servicesbancaires islamiques. Le choix de cetéchantillon se justifie par le fait que cettecible constitue actuellement une partimportante de la clientèle bancairetunisienne et pourrait représenter à termeune cible potentielle pour les banquesislamiques. En effet, Demirguc-Kunt et al.(2013) estiment le taux d’usage des servicesbancaires islamiques en Tunisie à 2 %.L’étude Thomson Reuters (2013) montrequant à elle qu’il existe un intérêtconsidérable pour cette nouvelle offrebancaire de la part de ceux qui n’y ont pasrecours, les clients des banquesconventionnelles semblant particulièrementintéressés par ces nouveaux servicesbancaires.

Cet article se compose de six parties. Lapremière partie vise à présenter brièvementla finance islamique, ses principes ainsi queses techniques de financement. Nousanalyserons dans une deuxième partiel’expérience de la Tunisie dans le domaine dela finance islamique et nous dresserons unbref historique de l’évolution de ce secteur.En nous basant sur la théorie de la diffusionde l’innovation de Rogers (1995, 2003), nousétablirons dans la troisième partie le cadreconceptuel ainsi que les hypothèses derecherche. La composition de l’échantillon etla méthodologie de recherche sont

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présentées dans la quatrième partie. Nousdiscuterons les principaux résultats dans unecinquième partie. Les implicationsmanagériales, les limites et les voies futuresde recherche seront exposées dans ladernière partie.

La finance islamique : principes ettechniques de financement

Contrairement au modèle conventionneldont la pratique des taux d'intérêt constituele principal moteur, le système financierislamique s’organise autour de mécanismes,d’institutions et de produits qui doiventrespecter l’ensemble des principesphilosophiques édictés par la loi islamique (laCharia). Au nombre de cinq, ces derniersenglobent un certain nombre de restrictionset d'obligations auxquelles les banquesislamiques doivent se conformer au cours deleur processus d'intermédiation bancaire. Cesprincipes sont :

- L’interdiction de perception et de versement de l'intérêt (l’usure) : le principefinancier de l’islam étant que le revenu doit récompenser l’effort, les penseursmusulmans estiment que les intérêts,revenus générés par les prêts accordés nerentrent pas dans cette catégorie. En cesens, les banques islamiques ne peuventrecevoir des intérêts sur les fonds qu’ellesmettent à la disposition de leurs clients, nirémunérer leurs dépôts sur la base d’untaux d’intérêt.

- La prohibition des contrats incertains et spéculatifs (le gharar) : les banquesislamiques sont tenues de proposer à leursclients des contrats transparents, clairs etexplicites. Les éléments fondamentaux de lavente relatifs à l'objet tels que la qualité, laquantité, le prix et la date de livraisondoivent être connus avec certitude le jourde sa conclusion.

- L'obligation d'investissement dans des activités légales et éthiques, créatrices de

valeur ajoutée : il est interdit aux banquesislamiques de développer une activitécommerciale dans des secteurs contraires àl'éthique et à la morale (la pornographie, lesboissons alcoolisées, les jeux de hasard etl'exploitation de la viande de porc...) et decollaborer avec des entreprises détenantdes participations ou des relationscommerciales avec des établissementsfaisant commerce dans ce type d'activités.

- Le partage équitable des pertes et des profits entre cocontractants : les risques, lesprofits et les pertes ne peuvent d'aucunemanière être supportés par une seule partiecomme c’est le cas pour le financementconventionnel basé sur l'intérêt pré-déterminé mais doivent au contraire êtrepartagés entre les parties prenantes afin delégitimer la rémunération issue du projetd’investissement ;

- L'adossement de toutes transactions à un actif tangible, émanant de l'économieréelle : les systèmes de vente à découvert,les produits dérivés (options, swaps) et lescontrats d’assurance traditionnels sontcontraires à la loi islamique.

En outre, les banques islamiques ontl’obligation de créer et de gérer des caissesde solidarité appelées caisses du Zakat. LeZakat est l’un des cinq piliers de l’Islam. C’est une aumône obligatoire que tout musulmanest tenu de payer chaque annéeproportionnellement à la valeur de sarichesse. Le but du Zakat est d’assurer lajustice sociale à travers une redistributionéquitable des ressources entre les membresde la communauté. Les banques islamiquesont pour mission d’assurer le prélèvement du Zakat et son investissement dans le financement de projets caritatifsmajoritairement dans le domaine de la santéet de l’éducation. Le système bancaireislamique implique ainsi un engagementsocial, il alloue une attention particulière àl'utilité des projets qu'il finance et auxbénéfices sociaux et environnementaux queces derniers procurent à l’ensemble de lasociété.

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En vue de conformer leurs produits etservices aux enseignements de la Charia, lesbanques islamiques ont développé unensemble de mécanismes et des techniquesde financement spécifiques.

On distingue d'une part, les outilsparticipatifs impliquant un partenariatd’investissement entre la banque et sonclient et un partage équitable des pertes etdes profits entre eux selon des ratiospréétablis : la Moudaraba et la Moucharakasont les deux formes de contratscaractérisant cette méthode.

D’autre part, les instruments de financementde dette. Ceux-ci s’appliquent aux opérationsde vente et de location de biens sur la based’une marge fixe, la rémunération de labanque représente dans ce cas une partie duprix de vente. Ils font intervenir des modes definancement tels que la Mourabaha, la Ijara(crédit–bail) et le Istisna'a. Force est deconstater que la pratique des modes definancement axés sur le partage des pertes et

des profits (3P) par les institutions bancairesislamiques reste très limitée au profit desmodes de financement à revenu fixe,largement dominants dans les portefeuillesde ces dernières. Les financements sontconcentrés à hauteur de 70 % voire 80 % surla technique de la Mourabaha (Iqbal, 1997).

La finance islamique en Tunisie :genèse, évolution et potentialités

Le secteur financier tunisien est de petitetaille et dominé principalement par lesbanques qui représentent 80 % du total desactifs financiers en 2011. Depuis quelquesannées, le secteur bancaire tunisien abritedeux modèles, d'un côté, les banquesconventionnelles, largement dominantes eten place depuis une cinquantaine d'années,de l'autre, les banques islamiques, récenteset peu nombreuses sur le marché. En effet, lesecteur bancaire islamique tunisien, en placedepuis 1983, est très modeste. En 2012, letotal des actifs financiers islamiques estestimé à 1,07 milliard de USD, soit 2 % du

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Tableau 1Les contrats de financement islamique

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total des actifs financiers (Thomson Reuters,2013). Actuellement, deux principaux acteursse positionnent sur ce secteur et sonthabilités à proposer une offre bancaireislamique au marché local de détail : Al-Baraka Bank Tunisie à l'origine off-shore etconvertie depuis janvier 2014 en institutionfinancière islamique on-shore et la banqueZitouna, première institution financièreislamique de détail locale en activité depuis2009.

L’implantation en 1983 sur le territoiretunisien d'une banque off-shore du Moyen-Orient, la banque saoudienne Beit EttamouilSaoudi Tounsi connue sous le nom de la BESTBank (Al-Baraka Tunisie depuis 2010) marqueles premiers pas de la Tunisie vers la financeislamique. Par crainte de perturber l’équilibrepolitique du pays, la Tunisie a émis desréserves à l’égard du développement de cesecteur, voire pratiqué un certain attentisme.En effet, en 1985, la BEST Bank fut autoriséeà exercer en on-shore, à condition que sesdépôts ne dépassent pas un pour cent deceux de la totalité du système bancairetunisien, une restriction qui a fortementlimitée sa croissance. En 2008, la Tunisieautorise sur son territoire l’installation d’unedeuxième banque islamique émiratie off-shore, Noor Bank. Malheureusement,l’expérience de cette institution a été peuconcluante et de courte durée. En 2012, NoorBank a décidé de cesser ses activités enTunisie.

Poussée par une demande locale significativepour les services bancaires islamiques et unbesoin important de capitaux pour ledéveloppement de son économie et soninfrastructure, la Tunisie fait en 2009 sonentrée effective dans l’industrie de la financeislamique avec la fondation de la banqueZitouna2. Cette institution financièreislamique de détail locale propose auxparticuliers, aux professionnels et auxentreprises une panoplie de comptes detransaction, de dépôt et de placements ainsique des solutions de financement enconformité avec les principes de la financeislamique.

Consciente de la présence d’une demandeimportante et encore inassouvie de lapopulation pour les services bancairesislamiques en Tunisie, Al-Baraka Tunisie émeten 2012 son souhait de se convertir enbanque islamique on-shore. En 2014, elle futautorisée par la Banque Centrale de Tunisie àservir, au même titre que la banque Zitouna,le marché local en produits financiersislamiques.

Le dernier rapport publié par ThomsonReuters (2013) atteste du fort potentiel dedéveloppement des services bancairesislamiques en Tunisie. Il met en avant laprésence d'une forte demande de la part dugrand public pour ces nouveaux servicesbancaires. Celle-ci est estimée à l'horizon de2018, à 40 % du total des actifs financiers, cequi représente 28,5 milliards de dollars. Pourprofiter de ce potentiel, le défi desinstitutions financières islamiques réside,d’une part, dans leur aptitude à vaincre lesobstacles majeurs qui ralentissent leurexpansion (une instabilité politique, l’absencede cadre réglementaire financier islamiqueexhaustif et une faible connaissance etcompréhension de la finance islamique, sesprincipes et ses modes de financement par lapopulation) et, d’autre part, dans leurcapacité à comprendre en profondeur lecomportement des clients potentiels et leurattitude à l’égard de leur offre bancaire.

Revue de la littérature

La littérature a identifié communément uncertain nombre de variables influençant lechoix des services bancaires islamiques parles individus comme la religion, la réputationet l’image de l’institution financière, laqualité de service (confidentialité, rapiditédes transactions, compétence du personnelen contact), les coûts et la profitabilité des

2. Après la révolution, la Banque Centrale s’appropria labanque qui avait été créée par un proche de l’ancienprésident.

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produits et services ou encore l’influencesociale (Gerrad et Cunningham, 1997 ; Naseret al., 1999 ; Erol et al., 1990 ; Haron et al.,1994 ; Dusuki et Nurdianawati, 2007 ;Metawa et Almossawi, 1998). En tant quenouvelle offre bancaire et donc innovationfinancière, des travaux récents (Thambiah etal., 2011, 2012 ; Echchabi and Hassanuddeen,2012 ; Thambiah et al., (2011,2012) ; Jamshidiet Hussin, 2013) se sont basés sur la théoriede la diffusion de l’innovation (Rogers, 2003)et plus particulièrement sur la perception descaractéristiques de ces services bancaires parles individus pour expliquer leur adoption.Cette recherche s’inscrit dans la continuité deces travaux et vise à identifier, en utilisant lathéorie de la diffusion de l’innovation deRogers (2003), les facteurs qui influencentl’adoption des services bancaires islamiquespar la clientèle bancaire tunisienne.

La théorie de la diffusion de l’innovation

Le modèle du processus d’adoption et dediffusion d’innovations de Rogers (1995,2003) est à la base de la plupart des étudessur la diffusion et l’adoption des innovationstechnologiques dans le domaine des sciencessociales.

Rogers (1995) définit une innovation comme« toute idée, pratique ou objet perçu commenouveau par un individu ou toute autre unité d’adoption », et sa diffusion « comme le processus par lequel celle-ci estcommuniquée à travers certains canaux, dansle temps et parmi les membres d’un systèmesocial donné ». L’auteur considère quel’adoption de l’innovation, c’est-à-dire samise en œuvre et son utilisation par un grandnombre d’individus, détermine sa diffusion.

La décision d’adoption de l’innovation suit unprocessus en cinq phases allant de laconnaissance de l'innovation, jusqu'à sonacceptation totale et définitive par l’individu :- la connaissance est une prise de conscience

de l’existence de l’innovation, de ses bénéfices et de son mode defonctionnement,

- la persuasion se réfère à l’attitude favorable ou défavorable développée par l’individu àl’égard de cette innovation. Celle-ci dépendde la manière dont il évalue les avantages etles inconvénients du nouveau produit ouservice et de la façon dont celui-ci répond àses besoins,

- la décision est visible lorsque l’individu s'engage dans des activités qui aboutissentau choix d’adopter ou de rejeterl’innovation,

- la mise en œuvre s’établit lorsque l’individu utilise l’innovation au quotidien et l’évalue,

- la confirmation survient lorsque l’individu renforce son choix d’adoption ou de rejetde l’innovation.

Rogers (1995) considère que les carac-téristiques de l’innovation influencent savitesse de diffusion. Celles-ci sont au nombrede cinq :- l’avantage relatif, le degré avec lequel une

innovation est perçue par les « adopteurs »potentiels comme étant meilleure quel’idée à laquelle elle se substitue,

- la compatibilité, le degré selon lequel l'innovation est perçue comme cohérenteavec les croyances, les valeurs, les normessociales, les expériences antérieures et lesbesoins des adopteurs potentiels,

- la complexité qui se réfère au degré avec lequel une innovation est perçue commedifficile à comprendre et à utiliser,

- l’observabilité qui est la capacité d’observer facilement les résultats d’une innovation,

- la facilité d’essai qui prend en compte la possibilité de tester préalablementl’innovation.

Plusieurs recherches (Tornatzky et Klein,1982 ; Kolodinsky et al., 2004 ; Agarwal etPrasad, 1998 ; Phuangthong et Malisuwan,2008) montrent l’influence déterminante de

7. « Le cadre conceptuel d’une approche interculturelles’organise autour de quelques principes : la placeaccordée au sujet dans les interprétations et lesperceptions […] le retour du “ je ” […], le troisième axe destructuration est la tension universalité/singularité. »(Abdallah-Pretceille, 2011, p. 100)

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l’avantage relatif, de la compatibilité et de lacomplexité sur l’adoption d’une innovation. Àces caractéristiques viennent s’ajouterd’autres attributs tels que le risque perçu etl’incertitude associée à l’innovation. Plusieursauteurs (Zaltman et Lin, 1970 ; Midgley etDowling, 1978 ; Ostlund, 1974 ; Frambach,

1993 ; Rogers, 1995) proposent d’intégrerl’incertitude dans les recherches sur lescaractéristiques de l’innovation. Selon eux,cette variable intervient à toutes les étapesdu processus décisionnel de l’adoption del’innovation.

Une étude qualitative a été menée auprès d’un échantillon de trente clients bancarisés non-utilisateurs des produits bancaires islamiques, âgés de 25 à 60 ans et résidant dans la région dugrand Tunis. L’analyse de ces entretiens réalisés en face à face, en juillet-août 2012, a permisd’analyser la perception de l’offre bancaire islamique par ces clients potentiels. Les résultatsmontrent que les individus reconnaissent la conformité à la Charia comme l’avantage principal desservices bancaires islamiques : « Je pense que le seul élément positif qui joue en faveur de cesystème bancaire est la pratique religieuse et rien d'autre ». Malheureusement, les potentialitésfinancières et éthiques du système bancaire islamique sont particulièrement ignorées par lesinterviewés.

Trois principaux freins à l’usage des services bancaires islamiques ont été identifiés :

1) une faible connaissance des principes et du fonctionnement des services bancaires islamiques par les individus : « J'ai entendu parler de la banque islamique, mais j'avoue ne pas connaître lefonctionnement de ces banques dans le détail, c’est un système qui gère l’argent des citoyens auquotidien comme les autres banques mais dans le respect du droit musulman, la Charia ». « Jene connais pas tous les principes mais le plus important est l'interdiction de l'intérêt, considérécomme illicite selon les préceptes de l'islam ».

2) leur complexité perçue : « Je sais que la banque islamique propose les mêmes produits bancaires en termes de comptes courant et d'épargne que la banque conventionnelle mais avec quelquesspécificités (pas d'intérêt pour le compte courant et une rémunération convenue d'avance pourle compte d'épargne). En ce qui concerne les techniques de financement, je ne connais pas grand-chose, c'est très technique et difficile à comprendre ».

3) l’incertitude qu’ils génèrent. L’adoption de l’offre bancaire islamique est source d’incertitudes pour les individus. Ces derniers émettent des doutes sur l’aptitude des produits à tenir leurspromesses en termes de performance et de fiabilité, en particulier sur la réalité de leurconformité religieuse : « Ces produits bancaires sont purement marketing, le fonctionnement estle même que l’offre bancaire classique, les noms des produits ont seulement été modifiés pourrassurer les clients », « J'ai des doutes sur la conformité charaïque, le fonctionnement desproduits n'est pas le même dans chaque pays », « Il existe encore un manque de cohérence etd'harmonisation évident qui crée encore la confusion et le doute sur la fiabilité de ces produits ».

Les individus considèrent également que l’adoption des produits bancaires islamiques peut causerdes réactions négatives de la part de leur entourage « Mes amis et ma famille fréquentent lesbanques conventionnelles depuis une trentaine d’années et considèrent que les produits bancairesislamiques sont destinés exclusivement à des personnes qui accordent beaucoup d’importance aurespect des croyances religieuses dans leur vie quotidienne ».

Encadré 1étude qualitative, méthodologie et résultats

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Un nombre important de travaux ontappliqué la théorie de la diffusion de Rogers(1995) au domaine des services financiers,notamment au contexte du e-banking ouencore du mobile banking, en revanche, peude recherches à l’instar de celles de Yusof(1999), Thambiah et al. (2011), Echchabi etHassanuddeen (2012) ont tenté d’utiliser cemodèle pour expliquer l’adoption desservices bancaires islamiques par lesindividus. Les résultats de ces étudesempiriques montrent que :- l’avantage relatif de ces nouveaux services, - leur compatibilité avec les croyances

religieuses, les valeurs éthiques, le style devie, les habitudes bancaires et les besoinsfinanciers des individus,

- leur complexité perçue, - l’incertitude et le risque perçus liés à leur

adoption,- l’observabilité de leur performance sur le

court terme et enfin,- leur facilité d’essai influencent leur usage par les clients.

À la lumière de la revue de la littérature etdes résultats d’une étude qualitative menéesur un échantillon de 30 individus, nousconsidérons dans le cadre de cette rechercheque la décision des individus d’adopter lesservices bancaires islamiques est influencéepar les caractéristiques perçues de l’offrebancaire islamique, soient son avantagerelatif, sa compatibilité, sa complexité et lerisque perçu lié à son usage.

L’avantage relatif

Cette variable est reconnue comme un desmeilleurs déterminants de l’adoption d'uneinnovation dans plusieurs contextes derecherche (Tonartzy et Klein, 1982 ; Gerrardet Cunningham, 2003 ; Rogers, 2003).L’estimation de cet avantage relatif peut êtreexprimée en termes de bénéfices (rentabilitééconomique, valorisation sociale, utilité fortede l’innovation, visibilité rapide voireimmédiate des résultats de l’innovation) etde coûts (coût faible de l’innovation, gain de

temps et d’effort). La littérature analysant lecomportement des individus à l’égard desbanques islamiques montre que les individusévaluent les bénéfices des services bancairesislamiques à travers leur dimensionspirituelle, financière et éthique. En effet, s’ila été démontré que la religion est l'un desprincipaux motifs d'usage de l'offre bancaireislamique par les individus (Haron et al., 1994; Naser et al., 1999 ; Ahmad et Haron,2002 ),il n’en demeure pas moins que la profitabilitédes produits (taux de rendement élevé), leurscoûts (compétitivité des prix, frais bancairesfaibles), leur viabilité sur le long terme(minimisation des risques et résistance auxcrises financières) et leur dimension éthique(partage équitable des pertes et des profits,investissement dans des secteurs productifscréateurs d'emplois et distribution équitabledes ressources entre les membres de lasociété) se révèlent être également desfacteurs déterminants pour les individus(Bashir, 2012 ; Amin, 2008 ; Amin et al.,2011).

Les travaux de Thambiah et al. (2011, 2012)et de Echchabi et Hassanuddeen (2012)montrent que la supériorité religieuse,financière et éthique de l'offre bancaireislamique est le facteur qui détermine le plusfortement son usage par les individus. En cesens, notre première hypothèse est lasuivante :

H1 : L’avantage relatif perçu des servicesbancaires islamiques influence positivementleur adoption par les individus.

La compatibilité perçue

Pour favoriser l’adoption et la diffusion d’uneinnovation, celle-ci doit être compatible avecles valeurs, les pratiques courantes et lesbesoins des utilisateurs potentiels (Tonartzyet Klein, 1982 ; Yusof, 1999; Gerrard etCunningham, 2003). Ram et Seth (1989)attribuent la résistance des consommateurs àl’adoption d’une innovation à des barrièresfonctionnelles et psychologiques. Les

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premières apparaissent lorsque les individusperçoivent que le nouveau produit ou serviceoccasionne des changements importantsdans leurs habitudes et pratiques, lessecondes s’observent lorsque l’innovation estperçue comme incompatible avec leurscroyances et leurs valeurs. Dans le contextedes services bancaires islamiques, les travauxde Thambiah et al. (2011, 2012) et deEchchabi et Hassanuddeen (2012) validentune relation positive entre la compatibilitéperçue de l’offre bancaire islamique etl’intention des individus de l’adopter.

La complexité perçue

La théorie de la résistance du consommateuraux innovations considère la complexitéperçue comme une barrière d’usage quiengendre le rejet d’une innovation par lesindividus (Ram et Seth, 1989). Un lien négatifentre la complexité perçue et l'adoptiond’une innovation a été établi par plusieursrecherches (Yusof, 1999; Gerrard etCunningham, 2003 ; Gerrard et al., 2006 ). Lacomplexité d’une innovation est étroitementliée à sa facilité d’utilisation (Davis et al.,1989; Gerrard et Cunningham, 2003 ; Rogers,2003). Ainsi, plus la technologie est complexeet plus elle sera perçue comme difficilementutilisable par les individus. Des travaux dansle domaine du e-banking montrent que lacomplexité technologique influencenégativement la facilité d’usage perçue duservice et l’intention des individus del’adopter (Ndubisi et Sinti, 2006 ; Gerrard etal., 2006). Dans le contexte des services

bancaires islamiques, les travaux deThambiah et al. (2011, 2012) reconnaissent lacomplexité perçue comme un frein àl’adoption de cette nouvelle offre bancairepar les individus et valident une relationnégative entre les deux variables. Ainsi,

H3 : La complexité perçue des servicesbancaires islamiques influence négativementleur adoption par les individus.

Le risque perçu

Le risque perçu consiste en la perceptiond'une incertitude relative aux conséquencesnégatives potentiellement associées à unealternative de choix (Volle, 1995). En ce sens,cette variable influence fortement la décisiondes individus d’adopter une nouvelle idée, unservice, un produit ou une technologie(Midgley and Dowling, 1978 ; Ostlund, 1974 ;Ndubisi et Sinti, 2006). Plusieurs recherches(Ostlund, 1974 ; Ram et Sheth, 1989, Gerrardet Cunningham, 2003) reconnaissent le risqueperçu comme une forte barrière à l’adoptiond’une innovation. Ainsi, plus le risque perçuest élevé et moins les individus auronttendance à accepter l’innovation. Dans ledomaine des services bancaires islamiques,les travaux de Yusof (1999), Thambiah et al.(2011), Echchabi et Hassanuddeen (2012)établissent l’impact négatif du risque perçusur l’adoption de ces nouveaux services parles individus. Ils attribuent cette perception

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La complexité perçue

L’avantage relatif perçu

L’intention d’adopter les

Services Bancaires Islamiques

Le risque perçu

La compatibilité perçue

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H2 : La compatibilité perçue des produits bancaires islamiquesinfluencent positivement leur adoption par les individus.

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de risque à la nouveauté des produits et àleur intangibilité illustrée par la difficulté desindividus à les tester préalablement et àobserver leur performance sur le courtterme. Yusof (1999) considère les doutesrelatifs à la fiabilité des produits en termes deconformité religieuse comme un facteur derisque supplémentaire pour les individus.

Dans le cadre de cette recherche, nousconsidérons que les individus évaluent lerisque perçu par l’estimation des pertesassociées à leur décision d’adopter cesnouveaux services bancaires. Celles-ci sontd’ordre fonctionnelles (doute sur la fiabilitédes produits), sociales (réactions négativesde l'entourage) financières et psychologiques(impact sur l'image de soi).

H4 : Le risque perçu des services bancairesislamiques influence négativement l’intentiondes individus de les adopter.

Méthodologie de Recherche

Composition de l’échantillon et outils de recueil des données

Afin d’identifier les facteurs influençantl’acceptation des services bancairesislamiques par la clientèle bancairetunisienne, nous avons réalisé d’avril à août2013 une enquête auprès d'un échantillon de

300 clients bancarisés non encore utilisateursde l’offre bancaire islamique. Pour pouvoircollecter les données, nous avons sollicitél'aide de responsables d'agences bancairesconventionnelles, situées dans le grand Tunis,qui ont accepté de distribuer le questionnaireà leur clientèle. Le questionnaire administrévise à déterminer la perception descaractéristiques de l'offre bancaire islamiquepar les individus à travers l’évaluation dequatre variables clés : l’avantage relatif desproduits, leur compatibilité, leur complexitéet enfin, le risque perçu associé à leuradoption. Au total 239 questionnaires se sontrévélés exploitables. L'échantillon final estcomposé de 64 % d'hommes et 36 % defemmes, un large pourcentage desrépondants (47,28 %) est âgé de 25 à 34 ans.Le niveau d'instruction universitaire (51,05 %)ainsi que les cadres et les professionsintellectuelles supérieures (41,84 %) sont lesplus représentés.

L'opérationnalisation des construitscomposant le modèle conceptuel s'estappuyée sur des échelles de mesurepréexistantes dans la littérature consacrée àla problématique de l’adoption desinnovations, en particulier au domaine du e-banking. Des recherches académiquesanalysant l’attitude et le comportement desindividus à l’égard des banques islamiquesnous ont permis d’adapter l’ensemble de cesinstruments de mesure au contexte de notre

Figure 1Le Modèle conceptuel

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étude (voir Annexe). Une échelle de Likert encinq points allant de tout à fait d'accord (1) àpas du tout d'accord (5) a été utilisée pourévaluer la plupart des concepts étudiés.

La validation des construits

La validation des instruments de mesures'est effectuée en deux étapes :

- une analyse factorielle exploratoire, plus précisément une analyse en composanteprincipale (ACP) via le logiciel SPSS 18 a étéréalisée afin de tester la structure sous-jacente des différents concepts. Commeindiqué dans l’Annexe, les résultats de l'analyse factorielle réalisée pourl'ensemble des construits confirment lecaractère unidimensionnel des échellesavec une variance expliquée supérieure auseuil minimum de 50 % et une qualité de représentation satisfaisante pourl'ensemble des items (des communalités etdes poids factoriels supérieurs à 0,5) (Hairet al., 1998).

- une analyse confirmatoire menée sous Amos 18 a permis d'apprécier la qualitéglobale de l'ensemble des instruments demesure et de vérifier leur fiabilité et leurvalidité à travers l'estimation de l'alpha de

Cronbach, et du rho de la validitéconvergente (Fornell et Larcker, 1981).Comme mentionné dans l’Annexe lesqualités psychométriques des construitssont jugées satisfaisantes, elles assurentune fiabilité (Alpha de Cronbach) supérieureà 0,7 ainsi qu’une validité convergente au-dessus de 0,5.

Analyse et discussion des résultats

Afin de valider la qualité globale du modèleconceptuel et les hypothèses de recherche,nous avons utilisé la méthode des équationsstructurelles. L'examen des indicesd'ajustement indique que le modèle présenteun degré d'ajustement aux donnéesempiriques plutôt satisfaisant. En effet, leCMIN /df (399,092/302=1,321) est inférieur à5, le GFI (0,897) et le AGFI (0,861) sontlégèrement en dessous de 0,9. Le NFI (0,903)et le CFI (0,974) sont supérieurs à 0,9. LeRMSEA (pclose) (0,037(0,991)) =0,05(Jöreskog, 1969).

Les résultats obtenus permettent de validerl’ensemble des hypothèses, ils montrent quel’avantage relatif des services bancairesislamiques (ẞ=0,442 ; t=2,938) (H1) et leurcompatibilité avec les besoins, les valeurs etle style de vie (ẞ=0,419 ; t=5,561) des

!"! Relations de causalité! !! T de Student! P

(associé)! Validation!

#$! AV !! I! 0,442! 2,938! 0,000***! Validée!

#%! COM !! I! 0,419! 5,561! 0,000***! Validée!

#&! COMP !! I! -0,232! -3,081! 0,003**! Validée!

#'! RP !! I! -0,211! -2, 351! 0,018**! Validée!

Tableau 2Validation des hypothèses de recherche

Note : AV : avantage relatif, COM : compatibilité, RP : risque perçu, REP : réputation, CO : connaissance, COMP : complexité, I : intention d’adopter.Note : ** p < 0.05; *** p < 0.001, β : Coefficients de régression standardisés

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individus (H2) influencent significativementet positivement leur adoption. En revanche,la complexité perçue (ẞ=-0,232 t=-3,081)(H3) et le risque perçu associé à l’usage deces nouveaux services (ẞ=-0,211 t=-2,351)(H4) influencent négativement leuracceptation par les individus.

L’avantage relatif perçu

Il apparaît comme une variable déterminantepour l’adoption des services bancairesislamiques par les individus. Ce résultatdémontre que les adopteurs potentielsprocèdent, dans un premier lieu, àl’évaluation des avantages de ces nouveauxservices. En d’autres termes, à uneestimation de leurs bénéfices et de leurscoûts comparativement aux solutions definancement classiques. Ainsi, plus lesservices bancaires islamiques sont perçuscomme étant conformes à la Charia,financièrement profitables (taux derendement élevé), compétitifs en termes deprix, équitables (partage des risques et desprofits) et éthiques et plus ils ont une chanced’être adoptés par les individus. Ce résultatconcorde avec les travaux de Thambiah et al.(2011, 2012), de Echchabi et Hassanuddeen(2012) et montre que les banques islamiquesne peuvent plus se limiter uniquement àl’argument religieux pour commercialiserleur offre mais qu’elles doivent mettreégalement l’accent sur la diversité desavantages procurés par leurs produitsnotamment leur profitabilité et leurdimension éthique, ce qui leur permetd’affirmer leur différenciation par rapportaux banques conventionnelles et d’attirerune cible plus large pour augmenter leur partde marché.

La compatibilité des services bancairesislamiques avec les croyances et les habitudes

La compatibilité des services bancairesislamiques avec les croyances religieuses, lesvaleurs éthiques, le style de vie, les habitudes

bancaires et les besoins financiers desindividus est le second critère sur lequel cesderniers fondent leur décision d’adoptercette offre bancaire. En effet, plus lesindividus perçoivent que les servicesbancaires islamiques sont cohérents avecleurs valeurs, épousent leur style de vie, leurshabitudes bancaires et répondent à leursbesoins financiers et plus ils serontprédisposés à les accepter. Ce résultat rejointles travaux de Thambiah et al. (2011,2012) etde Echchabi et Hassanuddeen (2012) etindique que les banques islamiques doiventmontrer que leur offre de produit et services’adapte à tous les styles de vie, réponde auxdivers besoins financiers de leurs clients etsurtout s’accorde avec leurs valeursreligieuses et éthiques.

La complexité perçue et le risque perçu

Ils se révèlent être des freins à l’usage desservices bancaires islamiques par lesindividus. Ce résultat conforte les travaux deThambiah et al. (2012) qui valident l’impactnégatif de ces deux variables sur l’usage desservices bancaires islamiques par la clientèlebancaire malaisienne. Il rejoint également lestravaux de Ozdemir et Trott (2009) etMansumitrchai et Chiu (2012) dans ledomaine du e-banking qui démontrent que lacomplexité du service et le risque lié à sonusage sont perçus plus fortement chez lesnon-utilisateurs. Par ailleurs, Gerrard etCunningham (2003) montrent que le risqueperçu constitue le principal obstacle àl’adoption du e-banking par les individus.Nous attribuons la perception de complexitéet de risque par les individus à trois facteursclés.

Le faible niveau de connaissance desservices bancaires islamiques par lapopulation bancaire tunisienne

En effet, plusieurs travaux (Bougatef et al.,2012 ; Kaabachi et Obeid, 2014) ont d’ores etdéjà démontré une faible connaissance desprincipes et des avantages de la finance

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islamique par la population tunisienne. Lesrésultats d’une étude Thomson Reuters(2013) réalisée sur un échantillon de 701répondants confirment cette thèse etindiquent une grande lacune dans lacompréhension de la finance islamique, plusparticulièrement de ses fondements et desprincipales techniques de financementproposées. En effet, parmi les personnesinterrogées qui sont clients d’une banqueislamique ou intéressés par celle-ci, 64 %n’ont pas une idée claire des concepts de lafinance islamique (20 %, pas claire du tout, 44 %, pas claire). La plupart d'entre eux nedétiennent aucune connaissance sur lescontrats bancaires islamiques tels queMoudaraba (68 %), Moucharaka (64 %),Mourabaha (64 %).

La présence de doute sur l’authenticité deces nouveaux produits financiers

Pour certains individus, la finance islamiqueest une opération marketing destinée à fairevendre des produits financiers classiques,légèrement modifiés, pour pouvoir lesprésenter comme étant conformes à laCharia (Causse, 2012). L’absence d’un cadreréglementaire propre à la finance islamiqueest de nature à renforcer davantage cesdoutes. Destiné à assurer le bonfonctionnement des institutions financièresislamiques et à contrôler l’ensemble de leursactivités, la mise en œuvre d’un cadreréglementaire financier islamique permettrade crédibiliser ce secteur et de rassurer lesfuturs clients sur la fiabilité et la performancedes produits et services proposés.

L’attachement encore fort d’une partie de la population aux services bancairesconventionnels (Demirguc-Kunt et al., 2013)

La présence des banques conventionnelles et leur domination depuis un demi-siècle ont façonné les habitudes bancaires desindividus. Le secteur bancaire islamique baséessentiellement sur la crédibilité religieusebouscule ces habitudes bien ancrées chezune grande partie de la clientèle bancarisée,

créant ainsi une résistance au changementmais aussi une forte incertitude à l’idéed’adopter cette nouvelle offre bancaire.

Apports, limites et voies futures de recherche

Cette recherche a permis d’identifier lesfacteurs influençant le choix des servicesbancaires islamiques par la clientèle bancairetunisienne. Ainsi, il apparaît que les bénéficesspirituels, économiques et éthiques procuréspar l’offre bancaire islamique et lacompatibilité de celle-ci avec les besoins, lestyle de vie et les valeurs des individus sontles deux principales variables quifavoriseraient son usage par les adopteurspotentiels. En revanche, la complexité et lerisque perçus se révèlent être des obstaclesmajeurs à l’adoption de cette innovationfinancière par le grand public.

D’un point de vue théorique, les résultats decette étude corroborent les travaux deThambiah et al. (2011, 2012) en Malaisie etceux de Echchabi et Hassanuddeen (2012) auMaroc et contribuent à l’enrichissement destravaux appliquant la théorie de la diffusionde l’innovation de Rogers (1995,2003) aucontexte des services bancaires islamiques.Comme souligné précédemment, cetteproblématique reste encore peu explorée.

D’un point de vue managérial, cetterecherche met en avant l’importance de lacommunication pour les banques islamiques.Elle recommande à ces institutions unemeilleure éducation de la populationtunisienne dans le domaine de la financeislamique, en particulier en ce qui concerneses principes, ses objectifs, ses avantages etson fonctionnement. Un accent doit être missur les avantages spirituels, financiers etéthiques de cette nouvelle offre bancairemais aussi sur la manière avec laquelle celle-ci répond aux besoins financiers des clientspotentiels, s’intègre dans leur style de vie ets’accorde avec leurs croyances et valeurs.Pour réduire la complexité perçue des

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services bancaires islamiques, les institutionsdoivent communiquer davantage sur l’utilitéde leurs produits et expliquer via un discours simple et clair leurs modes de fonctionnement. Leur message doitégalement insister sur la fiabilité de leursstructures de contrôle « Comité Charaïque ».Ce type d’information est de nature à réduirel’incertitude liée à l’adoption des servicesbancaires islamiques et à développer laconfiance des individus à l’égard de cetteoffre. Déterminante pour la fidélité durabledes clients, la confiance représente avecl’éducation financière des individus, un desprincipaux catalyseurs du secteur.

Cette recherche présente un certain nombrede limites qui laissent entrevoir des voies derecherche futures. Nous nous sommesfocalisés dans le cadre de cette étude sur lacible des non-utilisateurs, il serait opportun àl’avenir d’élargir l’échantillon vers lesutilisateurs effectifs des services bancairesislamiques. En effet, plusieurs travaux(Ozdemir et Trott, 2009 ; Jansson, 2011 ;Mansumitrchai et Chiu, 2012) démontrentque les facteurs influençant l’adoption d’uneinnovation diffèrent selon la familiarité etl’expérience de l’individu avec le nouveauproduit ou service (adopteur versus non-adopteur).

Cette étude a porté sur la cible desparticuliers, nous pensons qu’il est importantpour les banques islamiques en Tunisie des'intéresser davantage à une clientèleprofessionnelle, génératrice de capitaux et deprofit. Certaines études (Jalaluddin etMetwally, 1999) ont mis en avant uneréticence de la part de cette cible àfréquenter les banques islamiques, attitudequi s'explique dans la plupart des cas par unmanque de connaissance des principauxfondements de la finance islamique et de sestechniques. Afin d'attirer les entreprises etles professionnels, les banques islamiquessont appelées plus que jamais à analyserleurs attitudes et leurs attentes dans cedomaine. Une voie de recherche intéressanteque nous comptons explorer à l'avenir.

Par ailleurs, nous avons utilisé dans le cadrede cette recherche, la théorie de la diffusionde l’innovation de Rogers (1995) pouridentifier les facteurs influençant l’adoptiondes services bancaires islamiques en Tunisie,nous pensons qu’il serait intéressantd’enrichir notre cadre conceptuel par la priseen compte de variables supplémentairesissues d’autres théories et modèles traitantde la problématique de l’adoption desinnovations à l’exemple du modèle del’acception de la technologie (TAM) de Daviset al. (1989) ou encore la théorie de l’actionraisonnée (TRA) de Fishbein et Ajzen (1975).

Ces multiples voies de recherches montrentla nécessité d’explorer en profondeur laproblématique de l’adoption des servicesbancaires en Tunisie et de multiplier lestravaux dans ce domaine.

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Souheila KAABACHITitulaire d’un doctorat en Sciences de Gestion del’Université de Paris I-La Sorbonne, ses activitésd’enseignement portent sur le marketing fondamental,stratégique et expérientiel. Ses axes de recherches’orientent vers les nouvelles tendances du marketingtels le marketing participatif, le marketing des seniors, lemarketing expérientiel et sensoriel et enfin, le marketingdes institutions financières islamiques.

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Annexe

Opérationnalisation des construits et qualités psychométriques