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8/18/2019 Les Produits Financiers Alternatifs http://slidepdf.com/reader/full/les-produits-financiers-alternatifs 1/8 La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion n° 255-256 – Finance mai-août 2012 153 Dossier I Les produits financiers alternatifs au Maroc : Pratique et perspectives par Bouchra Radi et Imane Bari Bouchra RADI Enseignante de comptabilité, de contrôle de gestion et d’audit à l’École Nationale du Commerce et de Gestion (ENCG), Université Ibn Zohr, Agadir. Maroc. Professeur habilitée à diriger les recherches en « Économie et Gestion », spécialité : Gestion. Chercheur en gestion, finances, développement durable et responsabilité sociale des entreprises. Membre du laboratoire Entreprenariat Finance et Audit, École Nationale de Commerce et de Gestion, Université Ibn Zohr, Agadir Maroc. Imane BARI Enseignante de comptabilité, mathématiques financières et stratégie des entreprises à l’École Supérieure de Technologie d’Agadir (ESTA), Département Techniques de Management, Université Ibn Zohr, Maroc. Doctorante en Sciences et Techniques de Gestion, Labo. : Entrepreneuriat Finance et Audit, École Nationale de Commerce et de Gestion, Université Ibn Zohr, Agadir Maroc. L e nombre d’institutions financières islamiques dans le monde est passé d’une seule en 1975 à plus de 300 dans plus de 75 pays. Elles se sont concentrées dans le Moyen-Orient et l’Asie du Sud-Est (le Bahreïn et la Malaisie sont les principaux centres), mais apparaissent aussi en Europe et aux États-Unis. Le total de leurs avoirs dans le monde est estimé à 1 000 milliards de dollars US et il augmente d’environ 15 % à 20 % par an. Cet essor peut être expliqué par trois raisons : la forte demande du grand nombre de musulmans, qui recherchent des services financiers conformes à la Charia ; l’augmentation de la manne pétrolière, qui fait exploser la demande d’investissements accep- tables dans la région du Golfe et la compétitivité des produits de la finance islamique, qui attire les investisseurs, musulmans ou non. (M. Qorchi, 2005) Toutefois, Les banques islamiques ne sont pas encore autorisées à opérer directement sur le territoire marocain, malgré leurs maintes tentatives. La banque centrale (Bank Al Maghrib - BAM) a néanmoins cédé aux pressions internes, en élaborant, en octobre 2006, le cadre réglementaire pour trois produits conformes à la Charia islamique : Ijara, Mourabaha et Moucharaka. L’objet de notre article est d’étudier l’expérience marocaine en la matière, notamment en analysant les contraintes de commer- cialisation des trois produits à travers la synthèse des études réalisées et le recueil des avis des gestionnaires bancaires et des conseillers et spécialistes en finance islamique. À ce titre, nous allons commencer par examiner le secteur bancaire marocain, les principes et avantages du banking islamique et la situation marocaine avant d’analyser les risques et les difficultés de mise en place ainsi que l’adaptation progressive du contexte. 1. Physionomie du secteur bancaire marocain Aucune économie ne peut véritablement se développer sans être soutenue par un secteur financier jouant pleinement et effica- cement son rôle, particulièrement en tant qu’accompagnateur de l’entreprise et du secteur privé. Au Maroc, le législateur a voulu doter le système bancaire et financier d’un cadre juridique moderne, ouvert, évolutif et adapté

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La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion n° 255-256 – Finance

mai-août 2012

153

Dossier I

Les produits financiers alternatifs

au Maroc :

Pratique et perspectives

par Bouchra Radi et Imane Bari 

Bouchra RADI

Enseignante de comptabilité, de contrôle de gestionet d’audit à l’École Nationale du Commerce et de

Gestion (ENCG), Université Ibn Zohr, Agadir. Maroc.Professeur habilitée à diriger les recherches en « Économieet Gestion », spécialité : Gestion. Chercheur en gestion,finances, développement durable et responsabilité sociale

des entreprises. Membre du laboratoire Entreprenariat

Finance et Audit, École Nationale de Commerce et deGestion, Université Ibn Zohr, Agadir Maroc.

Imane BARI

Enseignante de comptabilité, mathématiques financièreset stratégie des entreprises à l’École Supérieure de

Technologie d’Agadir (ESTA), Département Techniquesde Management, Université Ibn Zohr, Maroc. Doctorante

en Sciences et Techniques de Gestion, Labo. :Entrepreneuriat Finance et Audit, École Nationale de

Commerce et de Gestion, Université Ibn Zohr, AgadirMaroc.

Le nombre d’institutions financières islamiques dans lemonde est passé d’une seule en 1975 à plus de 300dans plus de 75 pays. Elles se sont concentrées dans

le Moyen-Orient et l’Asie du Sud-Est (le Bahreïn et la Malaisie

sont les principaux centres), mais apparaissent aussi en Europeet aux États-Unis. Le total de leurs avoirs dans le monde est

estimé à 1 000 milliards de dollars US et il augmente d’environ15 % à 20 % par an.

Cet essor peut être expliqué par trois raisons : la forte demande

du grand nombre de musulmans, qui recherchent des services

financiers conformes à la Charia ; l’augmentation de la manne

pétrolière, qui fait exploser la demande d’investissements accep-tables dans la région du Golfe et la compétitivité des produits

de la finance islamique, qui attire les investisseurs, musulmans

ou non. (M. Qorchi, 2005)

Toutefois, Les banques islamiques ne sont pas encore autoriséesà opérer directement sur le territoire marocain, malgré leursmaintes tentatives.

La banque centrale (Bank Al Maghrib - BAM) a néanmoins cédéaux pressions internes, en élaborant, en octobre 2006, le cadreréglementaire pour trois produits conformes à la Charia islamique :Ijara, Mourabaha et Moucharaka.

L’objet de notre article est d’étudier l’expérience marocaine en

la matière, notamment en analysant les contraintes de commer-

cialisation des trois produits à travers la synthèse des études

réalisées et le recueil des avis des gestionnaires bancaires et

des conseillers et spécialistes en finance islamique.

À ce titre, nous allons commencer par examiner le secteur bancairemarocain, les principes et avantages du banking islamique et la

situation marocaine avant d’analyser les risques et les difficultésde mise en place ainsi que l’adaptation progressive du contexte.

1. Physionomie du secteur bancairemarocain

Aucune économie ne peut véritablement se développer sans êtresoutenue par un secteur financier jouant pleinement et effica-

cement son rôle, particulièrement en tant qu’accompagnateur

de l’entreprise et du secteur privé.

Au Maroc, le législateur a voulu doter le système bancaire etfinancier d’un cadre juridique moderne, ouvert, évolutif et adapté

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Dossier III mai-août 2012

aux différentes mutations. L’objectif est de renforcer son rôle

dans la collecte des dépôts et le f inancement de l’économie, et

d’appuyer les efforts d’investissements dans le secteur privé.

Cependant, ces aspirations restent encore insatisfaites en raison

des facteurs intrinsèques à ce système.

1.1. Historique du système bancairemarocain

La libéralisation du système bancaire a été entamée en 1991 à

travers diverses mesures, dont :

– la levée de l’encadrement du crédit et le remplacement du

contrôle quantitatif direct par des mesures qualitatives indirectes

(réserve monétaire, ratio de solvabilité, de liquidité et de division

de risque…) ;

– la libéralisation des taux d’intérêt créditeurs et la libéralisation

progressive des taux d’intérêt débiteurs, avec institution d’un

taux de référence variable mensuellement pour les crédits à longterme et annuellement pour les crédits à moyen et long termes ;

– la suppression des emplois obligataires, exception faite pour

certains qui sont destinés à disparaître progressivement, et la

permission donnée aux établissements bancaires d’émettre

des certificats de dépôts – titres dont la maturité varie de 10

 jours à 7 ans –, qui devrait renforcer leurs ressources longues.

La déréglementation bancaire avait pour but l’accroissement de

l’efficience, en assurant une meilleure allocation des ressources,

en réduisant le coût de l’intermédiation et en renforçant le rôle

du système bancaire dans la collecte des dépôts ; ceci af in de

soutenir la croissance économique, notamment par le dévelop-

pement des crédits d’investissements.La loi bancaire de 1993, qui est survenue dans ce contexte, visait

la promotion du développement économique par le biais de la

mobilisation de l’épargne et de la bancarisation de l’économie.

Après l’achèvement de la suppression des emplois des banques

en juin 1998, l’effort des autorités monétaires s’est orienté

vers le renforcement de la concurrence entre les banques, ce

qui s’est traduit par un renforcement de la solidité du système

bancaire et une décrue significative des taux d’intérêt débiteurs

(F. Oualalou, 2002).

La loi n° 34-03, a été adoptée afin de remédier aux lacunes

de la loi de 1993, notamment en ce qui concerne le rôle des

commissaires aux comptes qui se trouve raffermi et étendu à la

vérification du respect des dispositions comptables et pruden-

tielles et à l’évaluation de l’adéquation du système de contrôle

interne des établissements concernés.

Les différentes réformes du système bancaire avaient comme

objectif d’accroître l’efficience du secteur financier. Elles

comptaient tirer un ensemble d’avantages, tels que l’améliora-

tion des circuits de financement suite à un accroissement de la

concurrence et une affectation optimale des ressources ; l’aug-

mentation des gains de productivité grâce à une rationalisation

de l’activité bancaire et financière ; la baisse consécutive des

coûts d’intermédiation et la diversification de l’offre. Les effets

escomptés peuvent être divisés en deux catégories : les effets

liés à la modification des taux d’intérêt et ceux liés à l’allocation

des ressources. Grâce à l’effet marge, il est possible d’assister

à une diminution des taux d’intérêt réels avec des conséquences

favorables sur l’investissement ; en même temps, l’amélioration

des circuits de financement de l’économie devrait permettre une

meilleure exploitation des avantages comparatifs en favorisant

l’affectation des ressources dans les emplois les plus intéres-

sants, les plus rentables et, par conséquent, améliorer l’efficacité

économique nationale (Centre Marocain de Conjoncture, 2002).

1.2. Caractéristiques de l’environnementbancaire marocain

Actuellement, le système bancaire marocain est diversifié en

termes d’actionnariat, incluant des participations étrangères très

significatives. Il est aussi caractérisé par un niveau de concentra-

tion assez relatif  

(les quatre premières banques contrôlent plusde 50 % du marché). Les entrées et les sorties dans le secteur

sont peu nombreuses et la distribution des parts de marché est

relativement stable. En effet, celles-ci sont dominées par peu

de banques et la compétition en matière de prix est très faible.

L’existence d’un certain contrôle sur le taux et la déficience du

marché financier crée un environnement dans lequel les banques

n’ont pas de concurrence avec d’autres sources de financement.

La supervision des banques est assez forte, que ce soit au

niveau du système global (par la banque centrale) ou au niveau

de chaque banque. De ce fait, l’organisation interne des établis-

sements de crédit souffre d’un excès de centralisation. En effet,

les décisions importantes, notamment celles relatives au crédit,sont traités par les services centraux, ce qui réduit les agences

régionales à de simples collecteurs de dépôts, alourdit les

circuits d’octroi de crédit et désharmonise la redistribution des

ressources issues du système. Ceci peut s’expliquer notamment

par le fait que les meilleures compétences en matière d’analyse

de risques relèvent des sièges, alors que dans les agences il

y a un manque de compétences. Ce qui réduit les analyses de

risque, lors de la demande d’un crédit, à des procédures de

pure forme dont les erreurs éventuelles seront couvertes par

une prise de garantie (Conjoncture, 2005).

La concentration du système et la faiblesse de concurrence

faussent donc le jeu d’un marché libéral et permet de procurer

des avantages consistants à certaines entreprises et d’en

désavantager d’autres, spécialement les PME. Ces dernières

ont des diff icultés importantes d’accès au crédit bancaire, elles

voient leurs demandes de crédit refusées, principalement à cause

du manque ou d’insuffisance de garanties (estimées lourdes),

et accessoirement par manque de confiance, soit vis-à-vis de

l’activité de l’entreprise, soit vis-à-vis de l’entrepreneur lui-même

(F. Mourji, A. Mourji & A. El Gourch, 2001). Par conséquent, elles

ne peuvent pas accéder au financement de leurs activités et de

leurs investissements.

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Dossier Imai-août 2012

Plus encore, les PME ont encore un accès très limité aux finan-

cements spécialisés (crédit-bail, factoring…) et le capital-risque

reste jusqu’à maintenant peu développé et élitiste.

D’un autre côté, les banques ont affiché une forte liquidité, (le

rapport liquidité/total des actifs a pratiquement doublé entre 1998

et 2004, passant de 62.7 % à 120.8 %). Au lieu d’être drainée

vers les investissements du secteur productif, sous forme des

emprunts à long terme, cette forte liquidité a profité plutôt aux

ménages.

Le marché monétaire marocain se caractérise actuellement

par une sous-liquidité bancaire de 22,3 milliards de dirhams1.

Laquelle reflète un déséquilibre persistant sur le marché du

crédit depuis 2007.

Au titre de l’année 2009, le résultat net des établissements

de crédit s’est apprécié de 5 % pour atteindre 10,5 milliards

de dirhams, compte tenu de l’évolution notable du produit net

bancaire. Un PNB tiré par la performance de la marge d’intérêt

et, dans de moindres mesures, de la hausse du résultat des

activités de marché. Après la hausse de 22 % en 2008, le totaldes concours des établissements de crédit a enregistré en

2009 une progression de 10,7 %. Le taux moyen des créances

en souffrance du secteur est resté globalement stable à près

de 6 %. (BAM, 2010).

D’ailleurs, les établissements bancaires marocains sont faible-

ment exposés à la crise financière, en raison principalement d’un

système de régulation et de contrôle strict qui limite étroitement

l’accès direct des institutions financières aux financements en

monnaies étrangères. En effet, seuls 3 à 4 % des actifs et des

dettes du système bancaire sont libellés en monnaie étrangère.

En majeure partie, ces actifs prennent la forme de dépôts auprès

de banques étrangères, françaises principalement. Une partieplus faible est investie en bons du Trésor, tandis qu’une part plus

modeste encore est liée à des investissements dans des f iliales

créées en relation avec les stratégies d’expansion régionale des

banques marocaines.

Au chapitre des dettes, les dépôts des non-résidents repré-

sentent seulement 1 % du total des dépôts des clients. Sur le

marché interbancaire domestique, les besoins des banques en

monnaies étrangères sont satisfaits par la BAM. Les prêts à

moyen terme accordés par des banques étrangères sont très

rares. Les nouveaux produits financiers, notamment les produits

proposés aux fonds de pension marocains, qui étaient développés

timidement en 2007, ont été stoppés net avec l’apparition de la

crise. (L. Tayebi 2009)

Les principaux bénéficiaires du concours bancaire sont les crédits

à l’habitat et les crédits à la consommation, ces derniers peuvent

certes augmenter la consommation, mais généralement des

produits importés, ce qui ne joue pas en faveur des entreprises

nationales et ne fait qu’aggraver le déficit commercial.

Ceci dit, la majorité de la population (environ 80 %, exception faite

des personnes ayant des comptes postaux), n’ont pas recours

1. 1 euro est équivalent à 11 dirhams environ.

aux services bancaires à cause de leur pauvreté, leur métier (les

établissement bancaires ciblent surtout les employés) ou leurs

convictions religieuses.

Cependant, si l’on utilise le taux de bancarisation usuellement

appliqué par Bank Al-Maghrib et qui correspond au rapport

entre le nombre de comptes (y compris les comptes : Comptes

Chèques Postaux et Caisse d’épargne nationale ouverts chez

Barid Al-Maghrib) et le total de la population, il a atteint 40 % de

la population en 2007, soit un niveau comparable à celui af fiché

par les pays de standing similaire, mais toutefois inférieur par

rapport à celui des pays développés.

Afin d’augmenter le taux de bancarisation, les banques marocaines

doivent notamment renforcer et diversifier l’offre commerciale.

L’accord signé par les membres de l’OMC en décembre 1997 sur

la libéralisation des services financiers prévoyait la libéralisation,

à partir de mars 1999, des activités internationales des diverses

sociétés financières dans 95 % du marché mondial.

Au Maroc, bien que la présence indépendante des sociétés finan-

cières étrangères soit encore très timide, cet accord constitueun signal en direction des établissements bancaires pour se

préparer à affronter, dans l’avenir, la concurrence internationale

et à adapter leurs structures aux nouvelles contraintes de la

globalisation des marchés financiers.

2. Principes et avantagesdu Banking Islamique

Le principe fondamental du Banking Islamique repose sur l’inter-

vention directe de la banque dans les transactions financées

par elle. La rémunération qu’elle perçoit se justifie : soit par saqualité de copropriétaire, aux résultats du projet financé (pertes

ou profits) dans le cas d’une Moudharaba ou d’une Moucharaka ;

soit par la prestation de commercialisation ou de location de biens

préalablement acquis par elle, dans le cas d’une Mourabaha,

d’un Ijara (Leasing/Location-vente) ou d’un Salam ; soit enfin, par

la fabrication/construction de biens meubles ou immeubles par

ses soins ou par des tiers, dans le cas d’un Istsina‘a.

La règle générale est que la monnaie n’est, du point de vue

islamique, qu’un simple intermédiaire et un instrument de mesure

dans les échanges de produits. Même si, en parallèle, elle assure

une fonction de réserve de valeur, elle ne peut produire de surplus

que dans la mesure où elle est transformée préalablement en

bien réel. 

(Albaraka-bank, 2007)

Néanmoins, la Finance Islamique a une vision particulière sur le

partage des risques et des profits entre les différentes parties

prenantes dans une transaction financière. La Charia préconise

un partage « équitable » des gains et des risques entre l’inves-

tisseur (le prêteur) et l’entrepreneur (l’emprunteur), quelle que

soit la forme de financement utilisée. Une transaction finan-

cière, qui transfère l’ensemble des risques associés à un projet 

d’investissement sur une seule des parties prenantes, est donc

contraire aux principes de la Charia. Ainsi, certaines formes de

financement issues du système financier conventionnel sont tout

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Dossier III mai-août 2012

à fait conformes à l’esprit de la Charia et transposables dans un

système financier islamique alors que, d’autres, et notamment

le contrat de dette classique, en sont automatiquement exclues.

(E. Jouini et O. Pastré, 2008)

La participation aux risques de l’entreprise va conduire les

banques à adopter certains rapports banques – entreprises

différents de ceux existant dans les banques classiques. Du

fait de leur participation aux projets, les banques islamiques

adopteront vis-à-vis de l’entreprise un rapport de partenariat.

Elles se soucient de sa rentabilité future, de sa compétitivité

ainsi que de sa performance. Pour ce faire, elles jouent le rôle

du conseiller, allant même parfois jusqu’à déléguer certains de

leurs cadres pour participer directement à la gestion de l’entre-

prise (M. Zein, 1992).

Par ailleurs, la demande de financement des PME naissantes

nécessite des crédits à long et moyen termes, le développement

des PME ne peut donc se faire qu’avec une politique basée sur

des ressources longues. Malheureusement, les banques commer-

ciales ont toujours privilégié le financement à court terme oucontinuent d’exiger des garanties importantes parce que leurs

principales ressources proviennent des dépôts à vue ou à terme.

Toutefois, il ressort que les produits offerts par les banques

islamiques pourraient être particulièrement adaptés aux besoins

des PME et ce, pour quatre raisons :

– La faiblesse des PME en fonds propres est bien connue

et constitue, en effet, un obstacle majeur à l’accès au crédit

bancaire ; or, le financement islamique n’exige pas d’apport en

fonds propres et moins de garanties par rapport aux banques

classiques. L’endettement excessif résultant de cette faiblesse

en fonds propres entraîne des frais financiers importants et met

en péril l’équilibre financier de la PME tout entière ; or le finan-cement islamique ne permet pas l’imposition d’intérêts fixes,

il est basé sur le principe du partage des pertes et des profits.

– La banque peut faire jouer son poids et ses relations, alors

qu’une PME seule ne fait pas le poids sur les marchés et doit

souvent subir des fluctuations importantes dans l’approvision-

nement des inputs.

– La gestion de bon nombre de PME est loin de créer la confiance

dans une banque ; or, le financement islamique privilégie la

relation Banque - PME plutôt à long terme, dans un partenariat

avec notamment un rôle actif de la banque dans la gestion de

l’affaire (voir la Musharakah). (I. BA, 2006)

 3. Situation marocaine

Actuellement, un grand nombre de Marocains considère les

établissements bancaires non conformes aux préceptes de

l’islam et ne traite avec eux qu’en cas de besoin extrême. Quitte

à recourir aux circuits parallèles, proposant des prêts exempts

d’intérêts, en particulier pour le financement immobilier. L’attrait

de ce type de f inancement réside dans le fait qu’il se revendique

charia compliant, la Charia interdisant toute transaction financière

porteuse d’intérêts. Mais de telles pratiques existant en-dehors

de tout contrôle par les autorités financières présentent des

risques de fraude, de blanchiment d’argent ou de financement

d’activités criminelles ou terroristes (E. Jouini et O. Pastré, 2008).

Cependant, le Maroc a refusé de nombreuses demandes (notam-

ment celles de Qatar International Islamic Bank et de Noor Islamic

Bank), contrairement à ses voisins maghrébins qui ont autorisé

l’introduction des banques islamiques.

En fait, le Maroc souffre de l’absence de législation adaptée,

puisque le droit des contrats en vigueur (inspiré en grande partie

du droit français) ne réglemente pas les contrats basés sur le

droit musulman, de même que le droit des sociétés.

Les banques marocaines se sont organisées en lobby afin

d’empêcher la création ou l’émergence du système bancaire

islamique, car elles ont peur que ce système réalise un succès

comme cela s’est produit dans d’autres pays musulmans.

Le gouvernement marocain n’est pas favorable à la création

d’un système bancaire islamique car celui-ci, en apportant une

dimension éthique et morale à la gestion de l’argent, risque de

conduire à une islamisation des af faires, de la société et ausside la politique (H. Zaouali, 2005).

En octobre 2006, BAM a cédé aux pressions des banques et du

marché, en élaborant, un cadre réglementaire pour trois produits

conformes à la Charia islamique, dénommés produits alternatifs

(afin d’éviter l’adjectif « islamiques »), il s’agit de Ijara, Mourabaha et

Moucharaka. Le but est d’élargir la gamme de services bancaires

et de contribuer à une meilleure bancarisation de l’économie.

Ceci dit, les nouveaux produits financiers autorisés concernaient

uniquement le financement, et non les dépôts, puisque, selon

BAM, les citoyens marocains, préférant conduire des transactions

sans intérêt, peuvent déposer leur argent auprès des banques

traditionnelles sous la forme de dépôts non productifs, ce quiest d’ailleurs le cas, car ils représentent actuellement 53 % des

dépôts en espèces dans les banques marocaines. D’ailleurs, les

dépôts à vue auprès des banques ne cessent d’augmenter, ils

ont enregistré, en juin 2010, une variation positive de 7 % par

rapport à la même date de l’année précédente. Alors que, au

cours de la même période, les dépôts à terme ont connu une

variation négative de 8,6 %. (BAM, 2010)

Ces produits sont alignés sur les règles prudentielles et

comptables de BAM. Les mesures de gestion des risques sont

les mêmes que pour les produits conventionnels.

Plus encore, afin qu’elle s’aligne sur les standards internationaux,

l’offre de ces produits a donné lieu à la signature de contrats

établis sur la base des règles édictées par l’AAOFI - The Accounting

and Auditing Organization for Islamic Financial Institutions ».

 4. Risques, difficultés de mise enplace et adaptation progressivedu contexte

Le succès des produits islamiques dépend des facteurs intrin-

sèques aux établissements bancaires. La banque supporte des

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Dossier Imai-août 2012

risques inhabituels pour une banque commerciale en tant que

cocontractante aux termes du contrat de vente. L’ensemble

des risques attachés à ce transfert de propriété et à la position

de revendeur que prend ainsi le banquier, n’entre évidemment

pas dans des schémas traditionnels. Sur le plan juridique, cela

comporte un certain nombre de conséquences non négligeables.

Ainsi, le banquier supporte-t-il nécessairement la garantie des

vices cachés. Cette situation se traduit par un risque que le

banquier conventionnel ne peut ni ne sait prendre. (A. El Akhdari,

2008).

La multiplication des transactions d’achat, de vente et de location

accumule les risques de documentation. Les risques opérationnels

s’en trouvent augmentés, d’autant plus qu’ils sont nourris par

les risques juridiques qui découlent de l’inflation contractuelle.

De surcroît, les risques d’exécution des contrats sont plus élevés

que pour de simples opérations de débours de liquidité.

Enfin, les effets de viscosité organisationnelle induits par l’insuffi-

sance de flexibilité des process peut dilater le temps de réaction

des banques islamiques, qui constitue aujourd’hui un avantageconcurrentiel : les risques stratégiques s’en trouvent accrus.

(A. Hassoune, 2008)

La finance islamique est un compartiment de la finance éthique.

Religieux, ses ressorts sont aussi d’ordres psychologiques et

sociaux. Par conséquent, son capital « réputationnel », son image,

sa crédibilité sont autant d’actifs intangibles mais puissants ;

ils sont aussi source de risques. Les risques de réputation

sont difficiles à identifier, à cerner, à quantifier et à réduire. (A.

Hassoune, 2008)

Un système financier islamique doit faire face aussi bien aux

risques communs encourus par les banques traditionnelles en

tant qu’intermédiaires financiers (de crédit, de marché, d’illi-quidité, opérationnel, etc.), qu’aux risques qui lui sont propres.

En effet, la rémunération des dépôts d’investissement par une

ponction des bénéfices induit un risque de retrait, un risque

fiduciaire et des risques commerciaux déplacés. (T. Khan et H.

Ahmed, 2002)

Les banques marocaines ont commencé à commercialiser les

produits islamiques en octobre 2007. Les lancements succes-

sifs de ces produits dits alternatifs se sont toutefois effectués

discrètement, ce qui est largement justifié.

En effet, les montages de financements islamiques sont généra-

lement structurés de telle manière que plusieurs transferts

de propriété sont nécessaires, chaque transfert de propriété

supposant un droit de mutation (une taxation).

Lors de leur lancement, et malgré l’intérêt manifesté par les

clients, les produits islamiques ont eu du mal à décoller car ils

coûtent plus cher que les produits classiques.

D’une part, le taux de rentabilité exigé par la banque est au

maximum car le prix fixé est définitif et ne peut donner lieu à

aucune révision par opposition au taux d’intérêt. Ce qui génère

des marges à supporter par le client plus importantes que les

intérêts supportés dans le cadre d’un financement conventionnel.

D’autre part, le cadre juridique marocain n’était pas encore adapté

aux montages de la finance islamique, ce qui a posé le problème

de la double taxation qui peut se traduire concrètement soit par

le paiement double de la TVA (vente de biens), ou des droits de

mutation (foncier) ou encore des droits d’enregistrement dans

le cas de cession de parts. Les frais supplémentaires ont alors

pesé lourd sur le coût de ces produits, ils les ont pénalisés sur

le plan concurrentiel. (A. El Akhdari, 2008).

C’était le cas de Mourabaha, produit-phare du package alter-

natif car il consiste en un double transfert de propriété. Il a été

assujetti, jusqu’à 2008, à une double imposition au titre des

droits d’enregistrement, d’abord lors de l’acquisition du bien par

l’établissement de crédit, ensuite lors de la revente au client final

qui devait supporter la charge fiscale accumulée du début jusqu’à

la fin. La loi de finances 2009 a pallié ce dysfonctionnement  

en appliquant le droit d’enregistrement à la seule première opération

d’acquisition qui est réalisée par la banque. Ainsi, l’acquéreur n’est plus

tenu de payer des droits d’enregistrement.

Ce produit ainsi que les autres (notamment Ijara) ont été assujettis

à une surtaxation en matière de TVA, en appliquant le taux de

20 % (taux appliqué sur les opérations commerciales), aussibien sur le remboursement du capital principal que sur la marge

de la banque.

Ce n’est qu’en 2010, que la loi de finances a réduit la TVA de

20 à 10 %, taux en vigueur pour les opérations bancaires. Il

s’appliquera sur la marge bénéficiaire de la banque sans toucher

le montant « principal » de l’emprunt, comme dans le cas d’un

emprunt avec intérêts. La taxation des produits alternatifs s’ali-

gnera sur celle des produits classiques.

D’ailleurs, la loi de finance 2010 a instauré d’autres réformes

fiscales favorisant les produits alternatifs. Ainsi, dans le cadre

d’un contrat Mourabaha, la rémunération convenue d’avance

avec la banque sera déduite dans la limite de 10 % du revenuglobal imposable du salarié.

Aussi, le traitement des acquisitions par contrat de crédit-bail

immobilier a été harmonisé avec les autres modes de financement

en ce qui concerne les droits d’enregistrement.

Concernant les établissements bancaires, les produits islamiques

étaient ressentis comme une menace pour les produits conven-

tionnels. De plus, les ressources humaines manquent de compé-

tences en ce domaine.

D’un autre côté, les banques et sociétés de financement sont

obligées de se procurer de l’argent à prêter sur le marché inter-

bancaire existant. Ainsi, le produit lui-même est conforme à la

Charia, mais le système est mixte. C’est pourquoi les oulémas

(savants dans la Charia) marocains sont toujours divisés sur le

caractère licite ou non de cette famille de produits.

Afin d’éviter une remise en question de leur conformité, certaines

banques de la place ont entamé leurs préparatifs pour ouvrir des

structures spécialisées exclusivement dédiées à la commercia-

lisation des produits dits alternatifs. Ces dernières disposeront

de leurs propres capitaux et pourront prouver que leurs fonds

proviennent de produits à marge conforme à la charia. Cette

option est également utile sur le plan technique, car elle permet

le regroupement des produits bancaires alternatifs d’un établis-

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La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion n° 255-256 – Finance158

Dossier III mai-août 2012

sement dans une seule filiale, ce qui facilitera l’établissement

des comptes sans intérêt, la spécialisation, etc.

Conclusion

Malgré leur coût élevé, le manque de communication sur les

produits islamiques et la faible formation des cadres bancaires,

ces produits ont connu un grand succès auprès des Marocains.

En effet, le nombre des dossiers du produit Mourabaha a

presque doublé entre 2008 et 2009, en passant de 2 768 (soit

un encours de 344 millions de dirhams) à 4 081 dossiers (soit

457 millions de dirhams).

Signalons que, outre des trois produits islamiques actuellement

commercialisés que sont Mourabaha, Ijara et Moucharaka, BAM

et le Groupement professionnel des banques du Maroc ont décidé

de mettre deux nouveaux produits destinés aux entreprises, sur

le marché. Il s’agit du contrat Salam, qui convient parfaitement

au financement des artisans et agriculteurs, et du contrat AlIstisnaâ, qui ressemble au leasing réservé aux professionnels

et qui peut concerner autant les biens meubles que les biens

immeubles.

Le lancement des deux nouveaux produits ne peut être opéré

avant de parfaire leur traitement fiscal en collaboration avec 

la

Direction générale des impôts.

Toutefois, le Maroc doit fournir plus d’effor ts en matière de forma-

tion dans la finance islamique, la réforme fiscale et juridique.

Certes, l’ouverture des structures spécialisées dans les produits

islamiques ne peut que favoriser leur commercialisation et

augmenter le taux de bancarisation de l’économie. Cependant, le

Maroc doit revoir sa politique envers les banques islamiques. Enfait, les filiales des banques traditionnelles ne peuvent remplacer

les banques islamiques au sens propre du terme, parce qu’elles se

limiteront à commercialiser 5 produits au plus (Mourabaha, Ijara,

Moucharaka, Salam, Istina’a), alors que la gamme des produits

offerts par les banques islamiques est plus large. Aussi, il y aura

toujours une partie de la population qui refusera de recourir à

ces filiales en raison de la mixité du système.

Enfin, les banques islamiques permettront l’entrée des fonds

importants entraînant l’accroissement des investissements et

l’amélioration du niveau du développement du pays. Une évolution

qui ne peut être réalisée par les banques en place actuellement.

Glossaire

AAOIFI - The Accounting and Auditing Organization for Islamic

Financial Institutions : c’est un organisme international basé à

Bahreïn et spécialisé dans la conformité des produits financiers

à la Charia, il compte 130 membres, représentant 29 pays.

Charia : Loi canonique musulmane régissant la vie religieuse,

politique, sociale et individuelle.

Ijara : c’est un contrat de location de biens assorti d’une promesse

de vente au profit du locataire. Il s’agit d’une technique de

financement relativement récente qui fait intervenir trois acteurs

principaux :

– le fournisseur (fabricant ou vendeur) du bien,

– le bailleur (en l’occurrence la banque qui achète le bien pour

le louer à son client),

– le locataire qui loue le bien en se réservant l’option de l’acquérir

définitivement au terme du contrat de location.

De la définition précédente, il découle que le droit de propriété

du bien revient à la banque durant toute la période du contrat,

tandis que le droit de jouissance revient au locataire.

Istisna’a : c’est un contrat d’entreprise en vertu duquel une

partie (MOUSTASNI’I) demande à une autre (SANI’I) de lui fabri-

quer ou construire un ouvrage moyennant une rémunération

payable d’avance, de manière fractionnée ou à terme. Il s’agit

d’une variante qui s’apparente au contrat Salam, à la différence

que l’objet de la transaction porte sur la livraison, non pas de

marchandises achetées en l’état, mais de produits finis ayant

subi un processus de transformation.

Moucharaka : c’est une association entre deux par ties (ou plus)

dans le capital d’une entreprise, projet ou opération moyennant

une répartition des résultats (pertes ou profits) dans des propor-

tions convenues. Elle est basée sur la moralité du client, la

relation de confiance et la rentabilité du projet ou de l’opération.

Mourabaha : c’est un contrat de vente au prix de revient majoré

d’une marge bénéficiaire connue et convenue entre l’acheteur et

le vendeur. La Mourabaha peut revêtir deux aspects :

transaction directe entre un vendeur et un acheteur,

transaction tripartite entre un acheteur final (ou donneur d’ordre

d’achat), un premier vendeur (le fournisseur) et un vendeur inter-

médiaire (exécutant de l’ordre d’achat).

Salam : peut être défini comme un contrat de vente avec livraison

différée de la marchandise. Ainsi, contrairement à la Mourabaha, la

banque n’intervient pas comme vendeur à crédit de la marchandise

acquise sur commande de sa relation, mais comme acquéreur,

avec paiement comptant d’une marchandise qui lui sera livrée

à terme par son partenaire.

Bibliographie

Albaraka Bank, Les instruments de la banque islamique, www.

albaraka-bank.com

d’Andria Aude « Existe-t-il des alternatives aux banques capita-

listes ? » Un éclairage sur d’autres pratiques financières (re)créant

du lien social », La Revue des Sciences de Gestion  2011/3-4

(n° 249-250) 176 pages. I.S.B.N. 9782916490298

Ba Ibrahima, « PME et institutions financières islamiques »,

Synthèse de Bérangère Delatte, site/annuaire horizon local de

Globenet.org, 2006, version archivée en ligne sur :

http://www.globenet.org/horizon-local/ada/2596pme.html -

consultée le 25 avril 2012

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