Les textes édités par le département Communication des Laboratoires Delagrange interrogent et confrontent les pratiques médicales, plus particulièrement en psychiatrie. Ceux qui font profession de soigner, ne sont pas en marge des sciences de la vie. Face à une pharmacologie triomphante quelle est la place du regard clinique ? Il est temps d'affirmer que personne ne détient la vérité, mais que chacun doit être le porte-parole des phénomènes qu'il observe. Ainsi va la science.

Cette collection s'intègre donc à notre effort pour que la clinique reprenne toute sa place.

DELAGRANGE DÉPARTEMENT COMMUNICATION

46, BD DE LATOUR-MAUBOURG 75007 PARIS

Illustration de couverture :

Maurice de Vlaminck « sur le zinc » - 1900

Musée des Beaux-Arts de Marseille ADAGP © Paris 1990

(photographie Hubert Josse - Clam)

© LES EMPÊCHEURS DE PENSER EN ROND, 1990 ISBN 2-908602-01-6

CENTRE NATIONAL DE PRÉVENTION, D'ÉTUDES ET DE RECHERCHES EN TOXICOMANIE

D'une toxicomanie à l'autre tabac, alcool, opiacés...

Journée d'étude du CNPERT sur le thème général :

quel est le rôle des médicaments dans la thérapeutique des toxicomanies ?

23 mai 1989

Édité par les Laboratoires Delagrange

Préface

René Yafil Consultant en marketing pharmaceutique

Président du Conseil d'administration du CNPERT

Les sujets qui sont traités dans cet ouvrage résument assez bien les préoccupations du CNPERT face à cet inquiétant problème de la dépendance. Ils ont fait l'objet d'une journée d'étude préparée par les professeurs Jacob et Pélicier et avec le concours d'intervenants spécialisés auxquels il convient de rendre hommage pour leur contribution à la réussite de ce colloque. Il y a lieu de préciser ici pourquoi le CNPERT a pris l'initiative d'associer à ses journées d'étude les firmes pharmaceutiques, et pour cette dernière les Laboratoires Dela- grange. Cette décision, cette volonté de faire participer tous les acteurs de la chaîne de santé et notamment cette branche profes-

sionnelle, procède de trois idées - forces :

- la première est celle de l'appartenance : notre association, créée en 1986, a été cons- tituée surtout par des personnalités du monde scientifique, médical et pharmaceu- tique, qui font partie ou sont en rapport avec l'Industrie pharmaceutique. La pré- sence parmi les membres de notre Conseil d'administration et de nos Comités, d'un grand nombre de ces spécialistes, dont l'au- torité leur est universellement reconnue, ne peut que soutenir la bonne impression qu'inspire notre action, tant sur le plan scientifique que pédagogique. C'est pourquoi, fort de la valeur de ses membres, le CNPERT constitue bien un organisme adapté pour combattre les habi- tudes morbides, et à ce titre, tout ce qui touche à la protection et à la préservation de la santé l'intéresse ;

- la deuxième, se situe au niveau de l'intérêt du CNPERT, pourquoi le nier ? Cette journée d'étude et les suivantes, attireront l'atten- tion des instances concernées, des média, du grand public qui nous connaîtront mieux et si j'ose ce jeu de mots, en mieux ;

- la troisième qui n'est pas la moindre des idées-forces, c'est l'occasion pour un labo- ratoire de démontrer qu'il peut exister des valeurs collectives autres que celles directe- ment économiques ou même sociales, au

sens étroit du terme. C'est donc dans un

esprit de vie dans la cité, et aussi dans l'entre- prise, que la Direction du Groupe Dela- grange, sur proposition de M. Philippe Pignarre, responsable de la Communication et de l'Information, a bien voulu prendre en considération notre projet de réunion et le commanditer. Il faut souligner que les quelques entreprises qui mènent de telles actions de parrainage apparaissent à nos yeux et, sans doute au jugement de la communauté, comme faisant partie d'une certaine aristocratie du monde des affaires, aristocratie basée sur le dyna- misme et la capacité financière autant que sur l'altruisme et l'humanisme.

Dans le cas présent, nous avons remarqué non sans une rare satisfaction, que pour le Président Besançon, la notion de partenariat ne se résume pas par une simple forme d'as- sistance, mais d'un type nouveau de parte- nariat, où chacun s'enrichit de l'apport de l'autre.

Introduction à la journée sur les thérapeutiques

médicamenteuses des toxicomanies

(tabagisme, morphinisme, alcoolisme) Yves Pélicier

Professeur de psychiatrie et de psychologie médicale Hôpital Necker Paris

Président du Comité pédagogique du CNPERT

L'importance du traitement médicamenteux dans la thérapeutique des toxicomanies n'est plus à démontrer. Qu'il s'agisse de produits aversifs ou d'antagonistes compé- titifs, leur usage est bien codifié. Néanmoins, si le thème de ce colloque ne concerne que les médicaments, il ne s'agit nullement de nier l'importance des psychothérapies et des thérapeutiques relationnelles qui, en fait, ne sont pas dissociables des prescriptions. On sait en effet que tout en prescrivant, le thérapeute se prescrit. Dans la toxicomanie qui met en présence un sujet en proie à une drogue - c'est-à-dire un objet totalitaire qui le consomme autant qu'il est consommé - toute avancée relationnelle ne peut être que

que profitable. Le toxicomane est fréquem- ment un objecteur thérapeutique et si sa discipline et son observance sont fragiles et incertaines, la qualité du contact avec le soi- gnant est finalement la seule garantie que le trajet thérapeutique sera suivi au moins un certain temps. Sans diminuer la valeur des actions pharmacologiques dont il sera question, il convient de rappeler l'impor- tance des facteurs non pharmacologiques de l'emploi des médicaments. Ainsi, l'his- toire du sujet, de ses expériences précédentes avec le traitement, l'idée qu'il se fait de sa propre capacité à gérer de façon autonome son problème, les influences sociales, cul- turelles, familiales, jouent un rôle qui ne peut être négligé. Dans certains cas, le traitement se situe dans un cadre conflictuel. Le soi- gnant est le représentant d'un interdit, tous ses gestes sont perçus dans une coloration répressive. Ce schème pré-cognitif repose sur la notion que toute intervention extérieure implique une attitude négative et stérile à l'égard de la drogue et aussi du toxicomane lui-même. Les conséquences d'un tel schème ne sont que prévisibles : refus, tricherie, provocation ou mise à distance. Par contre, et quelle que soit la signification pour le sujet du vécu de transgression, quand un soignant peut être accepté non comme un censeur ou un complice mais comme une référence objectivante, les conséquences

sur le trajet thérapeutique sont nettement meilleures. Les échecs et les difficultés ne sont pas exclus mais ils ne mettent pas vrai- ment en question le lien thérapeutique : ce lien peut demeurer à l'état latent, sans se manifester d'une manière évidente. Mais il peut être réactivé ultérieurement sans qu'on puisse le prévoir, ni du côté du soigné, ni du côté du soignant. En matière de toxicomanie, la relation n'est pas ce qu'elle paraît. Trop de conditions s'opposent à la facilité et à la clarté. L'ambi- valence que crée la drogue, à la fois bon et mauvais objet, est trop forte. Rien, de ce fait, ne répond à une résolution directe. Si le soignant sait accepter l'échec, accepter la frustration de beaucoup de peine perdue, il y a, tôt ou tard, des signes encourageants qu'il faudra saisir plutôt que solliciter. L'un des aspects du toxicomane est qu'il vit telle- ment l'épreuve de sa perte de liberté à l'égard de la drogue, qu'il ne peut en aucune façon supporter une aliénation de plus, alors même qu'elle s'exercerait dans un sens favorable. Il faut donc savoir attendre, ne pas perdre espoir, être utile et s'impliquer en évitant la technicité froide ou la générosité encombrante. L'homme toxicomane vit le deuil inacceptable de son intégration dans le groupe social. Un grand nombre de ses comportements ne sont que des défenses contre un deuil. Le soignant se

doit donc de respecter les silences, les retraits, tout en affirmant sa disponibilité. Toute situation de soins à l'égard du toxico- mane implique à la fois de ne pas être économe dans la relation et d'éviter de l'imposer, c'est-à-dire d'en gaspiller le bénéfice. Ainsi, les conduites de dépendance démon- trent l'association de facteurs étiopathogé- niques, à la fois psychologiques, biologi- ques et socio-culturels. Cela signifie que, selon les moments, les interventions doivent se référer à tel ou tel aspect. Il existe des dépendances où l'aspect toxique est très marqué. Il existe aussi, mais ne serait-ce pas un abus de langage, des dépendances où les facteurs biologiques paraissent inexistants : le jeu pour le grand joueur, le fanatisme idéologique, etc. Il faudrait, dans ce cas d'ailleurs, examiner de plus près si les réactions physiologiques entraînées par ces conduites ou ces attitudes, ne constituaient elles-mêmes un facteur biologique secon- daire. En fait, le problème des techniques et de la dépendance est un phénomène anthro- pologique, universel. Personne ne peut sérieusement envisager de la réduire à telle ou telle condition de l'existence humaine. Mais il est commode, opératoirement, de limiter le thème d'une étude pour lui assurer plus de profondeur.

Auto-administrations expérimentales

(opiacés-éthanol-nicotine)

Joseph Jacob Professeur honoraire Institut Pasteur Paris

Président du Comité scientifique du CNPERT

L'auto-administration des drogues est l'un des comportements les plus caractéristi- ques du toxicomane, il est d'ailleurs indis- pensable au diagnostic de toxicomanie. Ce comportement s'observe expérimentale- ment chez l'animal de laboratoire. La plus ancienne technique consiste à ajou- ter le produit étudié à l'eau de boisson ou à la nourriture, ce qui peut avoir l'inconvé- nient d'en modifier le goût et de conduire à un refus de l'animal. Certains auteurs ont recouru avec succès à des correcteurs et Wikler (1976) en a même tiré parti pour créer des conditionnements remarquables. Un autre inconvénient réside dans le fait que certains produits entraînent une anorexie

B U R E A U N A T I O N A L

YAFIL René : Président fondateur

OSTROVSKY Roger: Secrétaire général

JEAN Robert: Secrétaire BOURGEOIS Jean-P. Trésorier général BROSSAT Henriette: Trésorière

PELICIER Yves: Conseiller médical

JACOB Joseph : Conseiller scientifique PACCALY-MOULIN Anne : Chargé de mission

C O M I T É S C I E N T I F I Q U E

Président: JACOB Joseph Professeur, (H), pharmacologue-toxicologue, Institut Pasteur Paris

BOURDON Raymond Professeur, biologiste-analyste, Hôpital F. Widal, Paris

CROS Jean Professeur, pharmacologue-toxicologue, CNRS Toulouse DENIKER Pierre Professeur, psychiatre, médecin des hôpitaux (H), Membre de l'Academie de médecine

DRY Jean Professeur, interniste, Hôpital Rothschild, Paris

DUGARIN Jean Médecin, psychiatre, Espace Murger, Hôpital Fernand Widal, Paris

MOUTIN Pierre Médecin-Chef, psychiatre, Hôpital des Armées Bégin, Saint-Mandé

PUECH Alain Professeur, pharmacologue, Groupe Hospitalier Pitié- Salpêtrière, Paris

C O M I T E D ' H O N N E U R

BRUDON Jean Président du Conseil national de l'ordre des pharmaciens

CIER Jean-François Professeur, Doyen honoraire de la Faculté de médecine et de pharmacie de Lyon, Membre de l' Académie de médecine

DENIKER Pierre Professeur, médecin des hôpitaux (H), Membre de l'Academie de médecine

FOURNIER Pierre Médecin, Président d'honneur du Conseil national de l'ordre des pharmaciens

HAMBURGER Jean Professeur, Membre de l'Academie Française, Président de l'Académie des sciences

JOLY Pierre Vice-Président du Directoire et Directeur Général de Roussel-Uclaf, Président de la Fédération Internationale du Médicament, Membre de l'Academie de pharmacie

LAPORTE Yves Professeur, Membre de l'Institut, Administrateur du Collège de France

LÉPINE Pierre Professeur, Membre de L'Institut, Conseiller de Paris

TRUHAUT René Professeur, Membre de l'Academie des sciences et de l'Academie de médecine

VUYLSTEEK Karel Professeur, Membre de la Royal Society of Health (U.K.), Titulaire de la Chaire d'hygiène et de médecine sociale, Faculté de médecine de Gand, Belgique, Expert consultant du Comité d'experts sur la prévention de la toxicomanie et pour les projets pilotes en éducation de la santé, du Conseil de l'Europe