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11 TechniPorc, Vol. 34, N°4, 2011 - la revue technique de l’IFIP Synthèse L a prise en compte du bien-être des porcs dans les Directives européennes 2001/88/ CE et 2001/93/CE se traduit par une obligation de logement en groupe des truies pour la période débutant au maximum quatre semaines après l’insémination et s’ache- vant une semaine avant la date prévue de mise bas. Ces dispositions s’appliquent déjà depuis 2003 pour les nouvelles installations et devront être généralisées pour l’ensemble des élevages à partir de janvier 2013. L’objectif de cette article est de faire le bilan des connaissances acquises, à partir d’une revue bibliographique, sur l’état de santé des femelles logées en groupe pendant la gestation. A partir des conclusions des études, les prévalences des principaux problèmes sanitaires pourront ainsi être com- parées entre les systèmes de logement individuel et collectif. De même, les différents facteurs de risque ou de prévention de ces problèmes seront identifiés. Cette synthèse a été réalisée grâce au programme national de développement agricole et rural. Anne HÉMONIC Sylviane BOULOT Valérie COURBOULAY Isabelle CORRÉGÉ Résumé Cette revue bibliographique sur l’état sanitaire des truies en groupe a pour objectif de dresser un bilan des connaissances acquises, en France et à l’étranger, sur 6 grandes problématiques : les comportements agressifs à l’origine notamment de lésions cutanées, les morsures de vulve, les problèmes locomoteurs, la dynamique d’infection du troupeau, et enfin l’immunité et la carrière des truies. Les conclusions des différentes études permettent ainsi de tirer plusieurs enseignements sur ces problèmes sanitaires : comparaison de leur fréquence entre les systèmes de logement collectif et bloqué, analyse des facteurs de risque et de prévention (influence du type de sol, du mode d’alimentation, de la taille des groupes, de la présence d’un verrat, etc.). Même si, au final, il est difficile de synthétiser des recommandations du fait des liens existant entre les différentes possibilités de logement et de conduite testées dans les études, il est essentiel de se baser sur les expériences déjà acquises, sur le terrain et dans la littérature scientifique, pour optimiser la gestion sanitaire des truies gestantes logées en groupe. L’état de santé des truies en groupes : conclusions et recommandations de la bibliographie Agressions et lésions cutanées Comparaison entre les systèmes de logement individuel et collectif Les problèmes de lésions cutanées existent dans les deux types de système, mais dans des proportions et avec des origines différentes. D’après Gjein et Larssen (1995), la prévalence des lésions corporelles est de 13 % dans les systèmes de logement en groupe, contre 4 % dans les systèmes de logement individuel. Les agressions sont la principale cause des lésions pour les truies en groupe, alors que la position en décubitus* latéral et l’augmentation du gabarit pendant la gestation sont les princi- pales causes des blessures et des ulcères aux épaules pour les truies en logement individuel (Gjein et Larssen, 1995 ; Anil et al., 2002). Origines et problèmes liés aux agressions Deux origines principales expliquent les com- portements agressifs dans les systèmes en groupe (Spoolder et al., 2009) : - la concurrence pour l’accès à une ressource limitée (aliment, eau). Dans ce cas, l’agression est généralement de courte durée, mais très fréquente, souvent quotidienne. - l’établissement d’une hiérarchie lorsque des animaux non familiers sont mélangés. Ce type d’agression est moins fréquent, mais peut être beaucoup plus intense. La plupart des lésions causées par les agres- sions sont des griffures ou des coupures cutanées. La vulve est aussi une cible occa- sionnelle. Ces morsures de vulve sont causée par une frustration, par exemple, par le man- que d’accès à la nourriture. Les agressions peuvent aussi entraîner des problèmes d’aplombs, en particulier lors- que la conception de la case est telle que les animaux ne peuvent pas fuir (par man- que d’espace) ou lorsque le sol ne permet pas une adhérence suffisante des onglons lors d’une interaction (sols glissants ou de mauvaise qualité). La fréquence des problè- mes d’aplombs consécutifs aux combats est sensiblement inférieure à celle des lésions cutanées. Enfin, l’agression est inévitablement associée à un stress chez l’animal. Influence du logement Surface utile par animal De nombreuses études montrent une diminu- tion significative de l’agression et des blessures en augmentant l’espace disponible (Barnett et al., 2001 ; Docking et al., 2000, Salak-Johnson et al., 2007). D’un point de vue réglementaire, la surface minimale pour les cochettes et les truies *décubitus : couché en long sur le côté

L’état de santé des truies en groupes · sif lors des repas. Six groupes de six truies gestantes ont été suivis. Avec une alimentation sèche, la longueur croissante des bat-flancs

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RésuméL’arti

11 TechniPorc, Vol. 34, N°4, 2011 - la revue technique de l’IFIP Synthèse

La prise en compte du bien-être des porcs dans les Directives européennes 2001/88/CE et 2001/93/CE se traduit par une obligation de logement en groupe des truies

pour la période débutant au maximum quatre semaines après l’insémination et s’ache-vant une semaine avant la date prévue de mise bas. Ces dispositions s’appliquent déjà depuis 2003 pour les nouvelles installations et devront être généralisées pour l’ensemble des élevages à partir de janvier 2013. L’objectif de cette article est de faire le bilan des connaissances acquises, à partir d’une revue bibliographique, sur l’état de santé des femelles logées en groupe pendant la gestation. A partir des conclusions des études, les prévalences des principaux problèmes sanitaires pourront ainsi être com-parées entre les systèmes de logement individuel et collectif. De même, les différents facteurs de risque ou de prévention de ces problèmes seront identifiés.

Cette synthèse a été réalisée grâce au programme national de développement agricole et rural.

Anne HÉMONIC Sylviane BOULOT Valérie COURBOULAY Isabelle CORRÉGÉ

RésuméCette revue bibliographique sur l’état sanitaire des truies en groupe a pour objectif de dresser un bilan des connaissances acquises, en France et à l’étranger, sur 6 grandes problématiques : les comportements agressifs à l’origine notamment de lésions cutanées, les morsures de vulve, les problèmes locomoteurs, la dynamique d’infection du troupeau, et enfin l’immunité et la carrière des truies. Les conclusions des différentes études permettent ainsi de tirer plusieurs enseignements sur ces problèmes sanitaires : comparaison de leur fréquence entre les systèmes de logement collectif et bloqué, analyse des facteurs de risque et de prévention (influence du type de sol, du mode d’alimentation, de la taille des groupes, de la présence d’un verrat, etc.).Même si, au final, il est difficile de synthétiser des recommandations du fait des liens existant entre les différentes possibilités de logement et de conduite testées dans les études, il est essentiel de se baser sur les expériences déjà acquises, sur le terrain et dans la littérature scientifique, pour optimiser la gestion sanitaire des truies gestantes logées en groupe.

L’état de santé des truies en groupes :

conclusions et recommandations de la bibliographie

Agressions et lésions cutanées

Comparaison entre les systèmes de logement individuel et collectif

Les problèmes de lésions cutanées existent dans les deux types de système, mais dans des proportions et avec des origines différentes. D’après Gjein et Larssen (1995), la prévalence des lésions corporelles est de 13 % dans les systèmes de logement en groupe, contre 4 % dans les systèmes de logement individuel. Les agressions sont la principale cause des lésions pour les truies en groupe, alors que la position en décubitus* latéral et l’augmentation du gabarit pendant la gestation sont les princi-pales causes des blessures et des ulcères aux épaules pour les truies en logement individuel (Gjein et Larssen, 1995 ; Anil et al., 2002).

Origines et problèmes liés aux agressions

Deux origines principales expliquent les com-portements agressifs dans les systèmes en groupe (Spoolder et al., 2009) : - la concurrence pour l’accès à une ressource

limitée (aliment, eau). Dans ce cas, l’agression est généralement de courte durée, mais très fréquente, souvent quotidienne.

- l’établissement d’une hiérarchie lorsque des animaux non familiers sont mélangés. Ce type

d’agression est moins fréquent, mais peut être beaucoup plus intense.

La plupart des lésions causées par les agres-sions sont des griffures ou des coupures cutanées. La vulve est aussi une cible occa-sionnelle. Ces morsures de vulve sont causée par une frustration, par exemple, par le man-que d’accès à la nourriture. Les agressions peuvent aussi entraîner des problèmes d’aplombs, en particulier lors-que la conception de la case est telle que les animaux ne peuvent pas fuir (par man-que d’espace) ou lorsque le sol ne permet pas une adhérence suffisante des onglons lors d’une interaction (sols glissants ou de mauvaise qualité). La fréquence des problè-mes d’aplombs consécutifs aux combats est sensiblement inférieure à celle des lésions cutanées.Enfin, l’agression est inévitablement associée à un stress chez l’animal.

Influence du logement

Surface utile par animal De nombreuses études montrent une diminu-tion significative de l’agression et des blessures en augmentant l’espace disponible (Barnett et al., 2001 ; Docking et al., 2000, Salak-Johnson et al., 2007). D’un point de vue réglementaire, la surface minimale pour les cochettes et les truies

*décubitus : couché en long sur le côté

12 Synthèse TechniPorc, Vol. 34, N°4, 2011 - la revue technique de l’IFIP

logées en groupe est respecti-vement de 1,64 et de 2,25 m²/animal (+ 10 % si groupe < 6 animaux et -10 % si groupe ≥ 40 animaux). Remience et al. (2008) ont montré qu’une surface dispo-nible de 33 % plus élevée que ce minimum légal (3 versus 2,25 m²/animal) permet de réduire signi-ficativement l’agression et les blessures des truies au DAC. De même, Weng et al. (1998) considè-rent qu’avec un groupe stable de 6 truies multipares, logées dans une case avec des réfectoires, une surface comprise entre 2,4 et 3,6 m²/truie sur litière est néces-saire pour réduire les comporte-ments agonistiques*, augmenter le comportement exploratoire et diminuer les fréquences de posi-tions inactives (assise ou debout). Toutefois, ils soulignent que ce résultat n’est pas généralisable pour d’autres tailles de groupe ou d’autres systèmes d’alimentation. Ils suggèrent que des groupes de plus grande taille auraient besoin d’une surface inférieure.

Type de sol Meunier-Salaün et al. (2002) ont comparé l’effet du type de sol (paille vs caillebotis en béton) sur le comportement et les lésions corporelles des truies gestantes en groupe alimentées au DAC. Les interactions agonistiques entre les femelles sont 1,5 fois plus nom-breuses sur paille (29 actes/heure contre 20 sur caillebotis, p < 0,05) avec des variations suivant le

moment de la journée : hors repas, les systèmes sur paille ou caille-botis ne diffèrent pas significati-vement, avec 15 actes agressifs/heure répartis de la même façon dans toutes les zones de la case. Par contre, dans les deux systèmes, des pics d’agression sont observés à l’ouverture des portes du DAC et les interactions agonistiques sont deux à trois fois plus fréquen-tes autour du matériel d’alimenta-tion que dans le reste de la case (p <0,05). Une hypothèse serait que, dans le système sur paille, les truies se déplacent davantage et augmentent la fréquence de leurs contacts et des interactions. En effet, les activités de déplace-ments et d’exploration sont deux fois plus fréquentes pour les truies logées sur paille (22 % contre 11 % sur caillebotis, p < 0,05). Ce niveau réduit des interactions agressives sur caillebotis paraît surprenant par rapport aux blessures consta-tées sur les animaux. En effet, ce sont les truies élevées sur caille-botis qui présentent davantage de lésions corporelles (75 % avec plus de 10 griffures contre 60 % sur litière, p < 0,05) (Figure 1), en accord avec les conclusions de Van Putten et Van de Burgwal (1990). La litière pourrait donc jouer un rôle d’amortisseur en cas de choc. Par ailleurs, la nature des blessures relevées par Meunier-Salaün et al. (2002) rejoint en par-tie celles citées par Vieuille et al. (1996) : les truies sont victimes de griffures au cou, aux oreilles, aux épaules, au dos, aux pattes et aux flancs. Un effet du rang de por-tée est également démontré dans cette étude de Meunier-Salaün et al. (2002) : dans le système sur caillebotis, 90 % des cochettes étudiées présentent plus de 10 blessures, soit +15 % par rapport à la moyenne du troupeau. Sur paille, le constat est identique avec 70 % des jeunes truies ayant plus de 10 lésions.

Zones de dissimulationEdwards et al. (1993) ont testé l’effet de la présence de barrières opaques dans la case sur l’agres-sion entre truies. Ces barrières sont constituées d’armatures métalliques recouvertes par des sacs. Elles sont suspendues au plafond par des câbles, dans la longueur de la case, et permet-tent aux truies de les pousser si besoin pour passer. Elles sont dis-posées à une hauteur de un mètre au dessus de la litière. Les auteurs ont systématiquement constaté une diminution du nombre d’in-teractions agressives. Cet effet était cependant moins constant sur les lésions cutanées : alors que les truies récemment taries présentaient moins de lésions en présence des barrières, l’effet était inversé pour les truies gestantes.

Influence du système d’alimentation

Le système d’alimentation affecte le niveau d’agression entre truies en fonction de l’importance de la compétition pour accéder à la nourriture. Il existe deux types de systèmes d’alimentation : simulta-née et séquentielle.- Pour les systèmes d’alimenta-

tion simultanée, le niveau de protection apporté à chaque individu pendant le repas est primordial. Les réfectoires blo-qués apportent la meilleure pro-tection, suivie par les systèmes auge avec bat-flanc (Andersen et al., 1999). Ils permettent aussi de surveiller l’ensemble des animaux au moment du repas. Des truies à problèmes (boiterie, perte d’ap-pétit…) peuvent ainsi être plus facilement détectées. De même, le réfectoire peut être utilisé pour diverses interventions : vaccina-tion, raclage du couloir de déjec-tion, et sert aux animaux de zone de refuge en cas d’agression ou de zone de repos.

* comportements agonistiques = comportements visant à résoudre un

conflit entre deux animaux. Il peut prendre plusieurs formes, de la fuite à la confrontation, des attitudes de

menace ou de soumission.

moins de 5 entre 5 et 10 plus de 10Nombre de lésions cutanées

E�ectif truies (%)

0

20

40

60

80

100 caillebotispaille

moins de 5

entre 5 et 10

plus de 10

Nombre de lésions cutanées

E�ectif truies (%)

020406080

100caillebotispaille

mauvais moyen bonQualité des aplombs

E�ectif truies (%)

Nombres de lésions

020406080

100

�ancs05

101520

25

tête et épaule

pattes arrières vulves

caillebotispaille

**

*

*

mauvais moyen bonQualité des aplombs

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020406080

100caillebotispaille

**

*

présentabsent

verrat :Nombres de lésions

�ancs05

101520

25

tête et épaule

pattesarrières vulves

**

présentabsent

verrat :

Nombres de lésions

�ancs05

101520

25

tête et épaule

pattesarrières

vulves

**

présentabsent

verrat :

Source : Meunier-Salaün et al. (2002)

Figure 1 : Effet du type de sol sur le niveau de lésions cutanées

Truie avec lésions cutanées suite à une agression

IFIp

Ce sont les truies élevées sur caillebotis

qui présentent davantage

de lésions corporelles.

13 TechniPorc, Vol. 34, N°4, 2011 - la revue technique de l’IFIP Synthèse

- Les systèmes d’alimentation séquentielle (DAC ou Fitmix) doivent, eux, réduire le niveau d’agression lors de l’attente des animaux pour leur repas. Dans une certaine mesure, les animaux développent eux-mêmes un ordre de priorité pour l’accès à l’alimen-tation qui est étroitement lié à la hiérarchie : ainsi les animaux dominants seront généralement les premiers à se nourrir (Csermely, 1989 ; Hunter et al., 1988) mais des comportements agressifs se pro-duisent quand les truies attendent leur tour pour entrer dans le DAC (Jensen et al., 2000 ; Anil et al., 2006).

Intérêt de la présence de bat-flancsAndersen et al. (1999) ont étudié les effets de différentes longueurs de bat-flancs (corps vs épaules vs absence de cloison entre les truies) et du type de nourriture (humide vs sec) sur le comportement agres-sif lors des repas. Six groupes de six truies gestantes ont été suivis. Avec une alimentation sèche, la longueur croissante des bat-flancs a entraîné une réduction significa-tive du nombre de morsures, de comportements agressifs, et une augmentation du temps passé à l’auge. En absence totale de cloi-son ou lorsque les séparations des bat-flancs arrivaient aux épaules, le nombre total de morsures et les comportements agressifs ont été plus faibles avec une alimentation en soupe qu’avec une alimenta-tion à sec. Par contre, lorsque les bat-flancs avaient une longueur équivalente à celle du corps de la truie, il n’y avait pas de différence significative entre les alimenta-tions humide et sèche sur le com-portement agressif des animaux. Avec une alimentation humide, il n’y avait aucune différence signi-ficative sur le nombre de morsu-res ni sur le temps passé à l’auge, quelle que soit la longueur des

séparations. Par ailleurs, les truies de rangs de portée élevés ont reçu moins de morsures et ont passé plus de temps à l’auge que les truies de rang de portée inférieur, quel que soit le système d’alimen-tation. Les jeunes truies étaient moins sujettes à l’agression et ont passé plus de temps à l’auge quand la longueur des séparations augmentait. En conclusion, pour que les jeunes truies ne souf-frent pas d’une consommation alimentaire réduite, les auteurs conseillent des séparations de la longueur du corps.De même, Barnett et al. (1992) ont observé, dans des groupes de qua-tre cochettes, l’avantage du système bat-flancs sur la réduction significa-tive des agressions immédiatement après le mélange, comparative-ment à des animaux non séparés. De surcroît, les auteurs relèvent un effet bénéfique à long terme sur le stress au moment des repas : qua-tre et huit semaines après la mise en groupe, le taux de cortisol des animaux est significativement plus faible quand il y a des bat-flancs, comparativement à celui des ani-maux non séparés.Petherick et al. (1987) remarquent également que la présence de bat-flancs, dépassant d’environ 40 cm de l’auge, réduit fortement les agressions lors des repas suivant le regroupement des truies. Enfin, l’in-térêt des bat-flancs est également souligné par Dappélo (2006) et Caille (2010). Lorsqu’ils dépassent l’auge de 30 cm, les truies sont peu agitées, et restent manger jusqu’à la fin du repas. De plus, l’emploi de bat-flancs pleins est préférable aux bat-flancs ajourés, car ils limitent les changements de place lors des repas (Caille, 2010), et les intimida-tions entre truies à l’auge (Dappélo, 2006 ; Caille, 2010).

Impact du DAC Backus et al. (1997) ont comparé quatre systèmes d’alimentation

(sans litière) sur le pourcentage de truies avec des lésions cutanées : réfectoires bloqués, réfectoires libre accès avec 10-14 truies par groupe, doseurs à distribution lente avec 6-8 truies par groupe et DAC avec 26 truies en groupe. Douze semaines après sevrage, le pourcentage de truies avec des lésions cutanées à l’avant du corps était significativement dif-férent entre les quatre systèmes : DAC (33 %), doseurs (19 %), réfec-toires libre accès (6 %), réfectoi-res bloqués (0 %). Au DAC, le taux important de truies avec des lésions cutanées était en partie dû au mélange de 2 groupes de truies après 6-9 semaines de gestation. Ces résultats sont donc plus liés à une conduite d’élevage qu’au système DAC en lui-même. Avec les doseurs à distribution lente, le pourcentage important de lésions était en partie lié aux agressions lors des repas.

Comparaison des groupes statiques et dynamiques

Une étude réalisée par Van der Mheen et al. (2003) révèle que les truies élevées dans des grands groupes dynamiques (50 truies) ont plus de blessures sur la peau et les onglons que les truies éle-vées dans de petits groupes sta-bles (13 truies). Hodgkiss et al. (1998) trouvent néanmoins que les lésions sont peu sévères dans les groupes dynamiques ; ils ont étudié l’incidence des blessu-res dans un groupe dynamique comportant entre 55 et 70 truies gestantes sur une période de 18 mois. Les truies étaient élevées sur une litière paillée, avec 1,7 m²/truie et alimentées avec un DAC. Il est apparu que les lésions les plus sévères ne représentaient que 0,16 % de toutes les blessu-res enregistrées.

Système bat-flancs

Système DAC

Avantage du système bat-flancs (vs absence de bat-flancs) sur la réduction significative des agressions immédiatement après le mélange.

IFIp

IFIp

14 Synthèse TechniPorc, Vol. 34, N°4, 2011 - la revue technique de l’IFIP

Influence de la taille du groupe

Plusieurs travaux menés sur la taille des groupes (Barnett et al., 1986 ; Mendl, 1994 ; Broom et al., 1995) concluent qu’avec une même surface disponible par ani-mal, les truies en grands groupes se battent généralement moins que les truies en groupes plus petits. Même si l’inverse pourrait aussi être attendu (plus il y a de porcs dans un groupe et plus le risque d’interaction est grand), l’explication la plus évidente est qu’avec la même surface disponi-ble par animal, les grands grou-pes ont plus d’espace pour leurs interactions, ce qui est un facteur influençant le niveau d’agression. Turner et Edwards (2000) suggè-rent aussi que les porcs modifient leur stratégie de « négociation sociale » quand la taille du groupe augmente et qu’ils ne reconnais-sent pas tous les individus : ils sont moins susceptibles de s’engager dans des interactions agressives et présentent davantage un com-portement d’évitement. Le même constat est fait par Turner et al. (2001) sur des porcs en engraisse-ment élevés dans de grands grou-pes (108 porcs) : ils sont moins agressifs envers les animaux non familiers de ce groupe, par rapport aux porcs élevés dans des groupes plus petits (18 porcs). Cependant, aucune taille de groupe maximale n’est clairement définie. En prati-que, le niveau des agressions éva-lué dans des groupes de plus de 300 truies ne met pas en évidence d’effet préjudiciable sur l’organisa-tion sociale.

Influence d’une familiari-sation des animaux préalable à l’introduction dans le groupe

Moore et al. (1993) estiment que l’intégration de nouvelles truies

et cochettes dans un groupe dynamique peut durer au moins trois à quatre semaines. Durant les trois premières heures suivant le regroupement, les nouvelles truies passent plus de temps à combattre (1,19 min/truie) que les nouvelles cochettes (0,27 min/cochette) (p < 0,05). Le 1er jour après le regroupement, 93 % des animaux nouvellement introduits sont restés ensemble, dans la par-tie de case incluant l’aire de déjec-tion. Jusqu’au 10ème jour, plus de 80 % des nouveaux animaux sont toujours dans cette zone, alors que moins de 10 % des truies « résiden-tes » y séjournent sur cette même période (p < 0,001). Enfin, la taille des sous-groupes des truies rési-dentes est plus petite que celles des nouveaux animaux (respectivement 2,6 vs 3,4 truies par sous-groupe, p < 0,001). Pour ces raisons, Durrell et al. (2002) conseillent de pratiquer des pré-mélanges : plutôt que d’introduire plusieurs nouvelles truies dans un grand groupe, elles doivent d’abord être regrou-pées pour former un sous-grou-pe puis mélangées dans le grand groupe. Cette pratique renforce le comportement de sous-groupe et réduit l’agressivité entre les truies, nouvelles et résidentes. O’Connel et al. (2003a, 2003b) confirment cette observation pour un taux de renouvellement de 10 % mais pas pour des taux de 20 % ou plus.De même, l’agressivité lors de l’in-troduction de cochettes dans un groupe de truies peut être réduite en familiarisant au préalable ces cochettes avec les truies. Kennedy et Broom (1994) ont permis à des cochettes de voir, sentir et occa-sionnellement toucher les truies avec lesquelles elles seraient en contact, cinq jours avant le mélan-ge, à travers les barreaux de leur case. Par rapport aux cochettes qui n’ont pas eu ce pré-contact, les cochettes exposées ont été moins agressées dans les premières

semaines après l’introduction dans le groupe principal. Une explica-tion possible est l’acquisition par ces cochettes de « compétences sociales » lors de contacts avec des truies plus âgés et dominan-tes, avec en particulier l’expression d’un comportement de soumis-sion (Van Putten et Buré, 1997).

Influence du poids des truies

Dans un groupe dynamique, Hodgkiss et al. (1998) ont montré que le score total des blessures était lié négativement au poids corporel. Mais il existe peu de données sur les effets de l’âge et du poids des truies sur l’agression. Pour les porcelets sevrés, Erhard et Mendl (1997) n’ont trouvé aucun effet du sexe, de l’âge et du poids sur l’intensité des interactions agressives dans les tests appelés « résidents - intrus ». Andersen et al. (2000) ont également comparé des groupes de porcs de sept semaines d’âge, de poids différents. Il s’avère que la durée des combats est tou-jours inférieure dans les groupes d’animaux de poids hétérogènes. De même, lorsque la paille est iné-galement répartie dans la case, ces groupes présentent un nombre de morsures immédiatement après mélange plus bas que les groupes plus homogènes. En revanche, quand la paille est équitablement répartie, il n’y a plus d’effet de l’homogénéité de poids : les deux groupes présentent le même nom-bre de morsures. Ces deux études indiquent qu’au moins chez les porcelets, les différences de poids au sein du groupe ont un effet limi-té sur le niveau d’agression.

Influence du rang de portée

Kirkwood et Zanella (2005) ont trouvé que dans les groupes de mono-parité*, les truies de rang 0 se battent moins que celles de

Avec une même surface disponible

par animal, les truies en grands groupes se

battent généralement moins que les truies

en groupes plus petits.

Pratiquer des pré-mélanges réduit

l’agressivité entre les truies,

nouvelles et résidentes.

IFIp

* parité : rang de portée

15 TechniPorc, Vol. 34, N°4, 2011 - la revue technique de l’IFIP Synthèse

rangs 1 et 2. Toutefois, pour les groupes de parité variée, il existe des résultats contradictoires sur les effets du rang de portée. Salak-Johnson et al. (2007) trouvent que, dans des groupes de cinq animaux, les truies primipares ont significativement moins de lésions que les truies plus âgées. Par contre, sur de grands groupes de 100-110 truies, Hodgkiss et al. (1998) ont trouvé que les truies de rangs 1 et 2 ont significative-ment plus de lésions que les truies de parité supérieure. Toutefois, ils considèrent cette différence acceptable et suggèrent qu’il n’y a pas lieu de constituer des groupes distincts pour les truies de rang de portée 1 et 2. De même, dans un groupe dynamique, Hodgkiss et al. (1998) montrent que les truies de rangs de portée 1, 2 et 3 subissent plus de blessures que les truies de parité supérieure. Enfin, Gonyou (2002) confirme que les cochet-tes présentent plus de blessures liés aux combats. Pour cette rai-son, Stalder et al. (2007) recom-mandent de loger, si possible, les cochettes gestantes séparément des truies plus âgées.

Influence de la présence du verrat

Kirkwood et Zanella (2005) trou-vent un effet bénéfique de la pré-sence d’un verrat dans la case des truies, pendant la semaine suivant le regroupement, sur le niveau des agressions, ce qui est confirmé par Docking et al. (2000) : au cours des 28 h d’observation après le mélan-ge, la présence d’un verrat réduit significativement le nombre et la durée des agressions, la distance de fuite et le nombre de lésions sur les flancs et à l’avant de l’ani-mal (tête et épaules). Par contre, le verrat n’a pas d’effet sur la dis-tance d’attaque ni sur le nombre de lésions sur l’arrière de l’animal (pattes et vulve) (Figure 2).

De même Séguin et al. (2006)concluent que la présence d’un verrat réduit significativement le nombre de combats pendant le repas et le nombre de lésions cuta-nées 48 h après mélange, par com-paraison respective à un groupe de truies logé dans une case adjacen-te à celle du verrat et à un groupe sans aucun verrat. De plus, le retrait du verrat au bout de quatre jours n’a pas entraîné une augmenta-tion des combats entre truies, ni affecté les lésions cutanées. A l’in-verse, Borberg et Hoy (2009) ont tendance à ne pas recommander la présence d’un verrat dans un grou-pe de truies, malgré un effet béné-fique significatif sur la fréquence des combats (3,6 vs 6,4 combats /truie / 48 heures) et sur leur durée (14,9 vs 39,6 secondes). Selon ces auteurs, le verrat n’a pas d’effet sur la fréquence des interactions agonistiques** ni sur le nombre et la durée des attaques** ou sur les lésions cutanées. Ces auteurs expli-quent que leurs résultats diffèrent en partie des autres études démon-trant une réduction du niveau des agressions grâce à la présence du verrat (Grandin et Bruning, 1992 ; Barnett et al., 1993.) par les diffé-rences de période d’observations. En effet, les études favorables au verrat sont souvent centrées sur les 50 ou 90 premières minutes après le mélange, alors que la hiérarchie sociale peut mettre deux à sept jours à se stabiliser dans un groupe de truies nouvellement constitué (Arey, 1999 ; Bauer et Hoy, 2002 ; Hoy et Bauer, 2005). Un suivi du niveau d’agression sur les premières heures après le mélange peut donc être trompeur. D’après Borberg et Hoy (2009), les quelques différen-ces entre les résultats d’études sont également potentiellement dues à la taille du groupe dans lequel le verrat est introduit (la présence d’un verrat pouvant avoir plus d’impact dans les groupes de petite taille) ou à la présence de certaines truies en

chaleur. En effet, à l’état sauvage, le sanglier est relativement solitaire et n’interagit avec les groupes de truies qu’en période de reproduc-tion (Mauget, 1981).

Choix du moment de la journée pour le mélange

Si les truies sont mélangées après le coucher du soleil, les comporte-ments agressifs diminuent sur le court terme, mais dès le lendemain matin, les niveaux d’agression sont les mêmes que si les truies avaient été mélangées pendant la journée (Barnett et al., 1994, 1996).

Utilisation de produits odorants ou de médicaments

Alors que l’olfaction joue un rôle dans la comportement agressif du porc (Meese et Baldwin, 1975), certaines études ont montré que l’utilisation de produits masquant les odeurs, comme l’huile d’euca-lyptus ou le camphre, ont très peu d’effet sur l’agression (Petherick et Blackshaw, 1987 ; Luescher et al., 1990 ; Barnett et al., 1993).L’utilisation d’un sédatif (azapé-rone) s’est révélé efficace sur les agressions entre porcs dans des études anciennes (Symoens et van den Brande, 1969 ; Callear et van Gestel, 1971), mais ceci n’est pas confirmé dans des étu-des plus récentes (Luescher et al., 1990). Le comportement agressif est certes réduit quand les porcs sont tranquillisés, mais les com-bats reprennent quand les effets s’estompent.

** combat = une action bilatérale au cours de laquelle la truie attaquée mord en retour l’autre truie

** attaque = action unilatérale au cours de laquelle la truie attaquée ne mord pas en retour.

** ici, interactions agonistiques = morsures de la tête, du cou ou du corps entraînant la fuite de la victime.

moins de 5 entre 5 et 10 plus de 10Nombre de lésions cutanées

E�ectif truies (%)

0

20

40

60

80

100 caillebotispaille

moins de 5

entre 5 et 10

plus de 10

Nombre de lésions cutanées

E�ectif truies (%)

020406080

100caillebotispaille

mauvais moyen bonQualité des aplombs

E�ectif truies (%)

Nombres de lésions

020406080

100

�ancs05

101520

25

tête et épaule

pattes arrières vulves

caillebotispaille

**

*

*

mauvais moyen bonQualité des aplombs

E�ectif truies (%)

020406080

100caillebotispaille

**

*

présentabsent

verrat :Nombres de lésions

�ancs05

101520

25

tête et épaule

pattesarrières vulves

**

présentabsent

verrat :

Nombres de lésions

�ancs05

101520

25

tête et épaule

pattesarrières

vulves

**

présentabsent

verrat :

Source : Meunier-Salaün et al. (2002)

Figure 2 : Effet de la présence du verrat sur les lésions corporelles

Il existe des résultats contradictoires sur les effets du rang de portée et de la présence d’un verrat avec les truies.

16 Synthèse TechniPorc, Vol. 34, N°4, 2011 - la revue technique de l’IFIP

Les morsures de vulve

Problèmes liés aux morsures de vulve

Les morsures de vulve entraînent une coupure parfois profonde voire une ablation partielle ou complète de la vulve. Ces blessures peuvent saigner abondamment, sont très sensibles aux surinfections et peu-vent attirer de nouvelles morsures par d’autres truies (Van Putten et Van de Burgwal, 1990).

Comparaison entre les systèmes de logement individuel et collectif

De façon évidente, seules les truies gestantes logées en groupe peu-vent présenter des morsures de vulve. Lors d’une étude de terrain dans 15 élevages disposant d’un système de logement des truies gestantes en groupe, Gjein et Larssen (1995) ont trouvé une pré-valence de morsures de vulve de 15 % (contre 0 % dans les systèmes individuels).

Influence du mode d’alimentation

Scott et al. (2009) constatent que les lésions de la vulve sont signifi-cativement plus fréquentes et/ou sévères chez les truies nourries au DAC que chez les truies nourries de façon individuelle et simul-tanée. Les auteurs le justifient en expliquant que les truies qui attendent leur tour pour rentrer dans le DAC mordent la vulve de la truie qui se nourrit, de façon à la déloger. Néanmoins, des mor-sures de vulve peuvent aussi apparaître dans les systèmes où les truies sont nourries de façon individuelle et simultanée, dès lors que les truies ne sont pas bloquées pendant la durée du repas et qu’elles peuvent quitter leur place.

Rizvi et al. (1998) confirment que le DAC est associé à un plus fort ris-que de morsures de vulve que les autres systèmes d’alimentation, ce qui ressort aussi des conclusions de Van Putten et Van de Burgwal (1990). Maton et Dalemans (1990) expliquent en effet que les truies consomment généralement tou-te leur ration en une seule fois, mais continuent à entrer dans le DAC, générant de l’agitation, de l’agression et des morsures de vulve. Le même constat est fait par Meunier-Salaün et al. (2002) : même si les truies ont la possibi-lité de fractionner leur ration au cours de la journée, elles l’ingè-rent en général lors d’une seule visite. Les actes agonistiques, qui ont lieu plus fréquemment près du DAC, semblent donc confir-mer l’effet de la forte motivation alimentaire dans les actes agres-sifs une fois le groupe constitué (Hunter et al., 1988 ; Huet, 2000). C’est pourquoi la principale limite mise en avant par Bartussek et al. (2000) pour le bien être des truies alimentées au DAC est que cet équipement ne permet pas une alimentation simultanée de l’en-semble des animaux du groupe. Les morsures de vulve peuvent aussi apparaître ou être exacer-bées suivant la conception du DAC (position des entrées et sor-ties, configuration de l’auge), sa position dans la case (Levis et al., 2007), ou lors d’un dysfonctionne-ment électrique/électronique et/ou mécanique (portes, charniè-res) (Meunier-Salaün et al., 2002 ; Olsson et al., 1992).Outre l’effet du mode d’alimenta-tion, la composition de la ration semble jouer un rôle dans l’appari-tion des morsures de vulves : Gjein et Larssen (1995) montrent que le risque de lésions est 2,6 fois plus élevé dans les troupeaux avec une ration sans apport complémentai-re de fibres que dans les troupeaux avec une ration enrichie.

Rivzi et al. (1998) révèlent aussi que le risque de morsure de vulve est plus important quand le nombre de truies par abreuvoir augmente. Il est en effet possible que les truies nourries simultanément souhai-tent accéder à l’abreuvoir immé-diatement après la distribution d’aliment et expriment de l’agres-sivité quand l’accès à l’abreuvoir est limité. Cela explique aussi pourquoi les morsures de vulve ont tendance à être plus fréquen-tes avec un système d’abreuve-ment constitué de pipettes (accès possible à une seule truie) qu’avec des abreuvoirs (accès possible à plusieurs truies).

Autres facteurs de risques des morsures de vulve

D’après Rivzi et al. (1998), la pré-sence d’un verrat semble être un facteur de risque. Il est en effet possible que malgré une diminu-tion parfois constatée du niveau d’agression entre truies (Kirkwood et Zanella, 2005 ; Docking et al., 2000), le verrat puisse générer de l’agression liée à la motivation ali-mentaire, et donc augmenter les morsures de vulve. Par ailleurs, le risque de morsure de vulve aug-mente avec la taille du groupe, les groupes de plus de 12 truies étant plus à risque. Enfin, les élevages sur caillebotis partiel semblent moins concernés que les élevages sur sol béton.

Problèmes locomoteurs

Lésions aux onglons et à l’arrière train

Les problèmes d’aplombs sont principalement de deux ordres : - les truies « équasillées », c’est-à-

dire avec les pattes arrières très écartées et qui ont de grandes difficultés pour se lever et se déplacer. Ce type d’accident est souvent consécutif aux bagarres

Le DAC est associé à un plus fort risque

de morsures de vulve que les

autres systèmes d’alimentation.

17 TechniPorc, Vol. 34, N°4, 2011 - la revue technique de l’IFIP Synthèse

et aux chevauchements lors des chaleurs (Delsart et al., 2010).

- Les lésions des onglons (Figure 3), souvent à l’origine de boiterie du fait des douleurs ou des infections générées. Ainsi, Anil et al. (2007) rapportent que les lésions sur la ligne blanche sont significative-ment liées à l’apparition de boi-terie, tandis que les lésions sur les autres zones de l’onglon n’ont pas d’effet. D’après Kempson et Logue (1993), les blessures sur la ligne blanche peuvent en effet être des voies d’entrée de germes, causant des infections ascendantes vers les articulations. La douleur géné-rée par les lésions d’onglons peut aussi réduire l’appétit (Johnson, 1997). D’autres conséquences en cascade se produisent alors avec des pertes directes (augmenta-tion des réformes, moins-value des truies réformées, euthanasie, médication, temps de travail…) et indirectes (baisse de prolifi-cité, écrasement des porcelets en maternité, …) (Figure 3).

D’après Jensen et al. (2010), les boiteries sont significativement associées (p = 0,016) à une réfor-me anticipée. De même, les pro-blèmes locomoteurs (arthrites ou ostéochondrose) sont considérés comme étant la principale cause d’euthanasie dans les systèmes de truies gestantes en groupe (Kirk et al., 2005 ; Engblom et al,. 2008).

Comparaison entre les systèmes de logement individuel et collectif

Les problèmes locomoteurs sont relativement communs et fré-quents dans les deux systèmes. Ainsi, Anil et al. (2007) remarquent que sur l’ensemble des truies sui-vies dans leur étude (102 truies logées en groupe et 82 truies en réfectoire bloqué), seules 3,8 % n’avaient aucune lésion aux onglons lors de l’examen clinique réalisé à 110 jours de gestation.

Ceci pourrait être lié à la croissance et à la prise de poids rapides des animaux, privilégiées par la sélec-tion génétique, au détriment de la solidité des aplombs. De même, Gjein et Larssen (1995) observent à l’abattoir que ce type de lésions concernent les truies dans les deux systèmes : plus de 96 % des truies en groupe et 80 % des truies bloquées présentent au moins une lésion sur les onglons latéraux des pattes arrières, qui sont les plus souvent et les plus gravement atteints. Par ailleurs, plusieurs études affir-ment que les truies logées indivi-duellement ont plus de problèmes locomoteurs que les truies logées en groupe. Ainsi, Marchant et Broom (1996) constatent que les truies logées individuellement ont plus de fractures osseuses et de blessures liées à des glissades car le manque d’exercice physi-que entraîne une plus grande faiblesse musculaire. De même, Grondalen (1974) considère que les truies en groupe, pratiquant plus d’exercice physique, sont moins susceptibles de tomber après une glissade. Barnett et al. (2001) confirment que les truies logées individuellement ont des os moins solides, moins de mas-se musculaire et plus de lésions articulaires. Boulot et al. (2011) remarquent aussi que les élevages français avec des truies élevées en groupe ont tendance à déclarer moins de réforme liée aux pro-blèmes d’aplombs que les truies bloquées, mais cette différence n’est pas significative (27 vs 32 % des causes de réforme). Enfin, une enquête hollandaise à l’abattoir a montré que les truies élevées en groupe ont des lésions d’onglons moins sévères que les truies en logement individuel (Geudeke, 1992). Les explications possibles sont que les truies logées en grou-pe ont tendance à être réformées à des stades plus précoces de lésions

d’onglons que les truies bloquées. Il est également possible qu’un espace restreint offre moins de possibilités de mouvements natu-rels de lever et coucher, ce qui entraîne plus de lésions. D’autres études trouvent des résultats contradictoires : d’après Backus et al. (1997) les truies logées individuellement souffrent moins de problèmes d’aplombs que les truies en groupe. De même, selon Anil et al. (2007), la proportion de truies avec des lésions aux onglons est significativement plus impor-tante dans un logement en groupe que dans un système de réfectoi-res bloqués, sauf pour les lésions du doigt (partie antérieure de la sole).

Influence du type et de la qualité du sol

Dans une étude portant sur 15 troupeaux, Gjein et Larssen (1995) ont signalé une augmentation du risque de boiterie associée au caillebotis béton versus caillebotis plastique et à une faible hygiène des sols. L’influence du type de sol est confirmée par Holmgren et al. (2000) : ils indiquent que les truies logées en groupe sur du caillebotis partiel en béton présentent des lésions d’onglons sévères, alors que les truies logées sur litière accumulée n’ont que des lésions minimes. De même, les lésions aux pieds et les troubles de la démarche sont moins fré-quentes chez les truies sur paille

Tendon extenseur

Tendon fléchisseur

Bande coronaire

Corium Muraille

Sole Ligne blanche

3è phalange

Talon

source : d'après Zinpro

Figure 3 : Anatomie du pied en coupe longitudinale

Plusieurs études montrent que les truies logées individuellement ont plus de problèmes locomoteurs que les truies logées en groupe.

IFIp

Fissure de la corne à l’extrémité d’un onglon

18 Synthèse TechniPorc, Vol. 34, N°4, 2011 - la revue technique de l’IFIP

(raclée ou accumulée) que chez les truies sur sol en béton ou sur caillebotis partiel (Andersen et al., 1999 ; Heinonen et al., 2006). Ces résultats sont confirmés en France par les enquêtes de Courboulay et al. (2010) : l’analyse des résultats techniques par type de sol montre que les réformes pour problèmes d’aplombs sont deux fois plus fai-bles sur paille que sur caillebotis (4 vs 8 %). Les sols en caillebotis sont en effet plus abrasifs que les sols paillés. Ils sont également plus difficiles à maintenir secs, en particulier en hiver et peuvent être plus glissants.Meunier-Salaün et al. (2002) ont comparé l’effet du type de sol (paille versus caillebotis en béton) sur des truies gestantes en groupe alimentées au DAC et leurs résul-tats sont en accord avec les travaux de Van Putten et Van de Burgwal (1990). Sur caillebotis, 83 % des animaux ont des aplombs avant classés « bons » contre 96 % des truies élevées sur paille (p <0,05) (Figure 4). De même, les onglons sont significativement en meilleur état dans le système sur paille : ils sont classés bons pour la totalité des truies alors que sur caillebotis, seulement 60 % des truies obtien-nent ce résultat et 40 % ont des onglons « moyens » (p <0,05). De plus, Meunier-Salaün et al. (2002) montrent que les truies conduites sur caillebotis ont une aptitude à se coucher significativement moins bonne que les truies élevées sur paille, confirmant un travail préa-lable (Godfrin, 1998). La méthode

de coucher diffère également : sur caillebotis, les truies utilisent tou-jours un appui (cloison ou autre truie), alors que sur paille, elles se laissent fréquemment tomber sur le sol, sans appui. L’état de l’ap-pareil locomoteur des truies sur caillebotis, légèrement moins bon que sur paille, apparaît néanmoins satisfaisant. Le caillebotis chauf-fant installé sur une partie de la salle est certainement une explica-tion. En maintenant le sol sec, les risques de glissade des truies et de surinfections des lésions sont sans doute réduits. Il conviendrait de mesurer plus en détail les consé-quences techniques et économi-ques de ce type d’équipement lors de l’aménagement des élevages. L’élevage sur litière peut néan-moins présenter des inconvénients puisqu’une croissance anormale des onglons, menant à la boiterie, a été rapportée sur ce type de sol. L’expérience pratique montre que le parage de l’onglon ne permet pas une meilleure longévité, De plus, il génère un travail supplé-mentaire, alors que les onglons se détériorent inévitablement et rapi-dement après le traitement. Pour une meilleure santé des onglons, Ehlorsson et al. (2003) ont conclu que l’amélioration des conditions de logement est la seule clé. La paille peut être utilisée comme litière si elle est de bonne qualité et si la case présente des opportunités d’usure normale des griffes.

Influence du mode d’alimentation

D’après Backus et al. (1997), douze semaines après sevrage, les truies au DAC (26 truies en groupe stati-que) ou aux doseurs à distribution lente (6-8 truies par groupe) ont significativement plus de problè-mes locomoteurs (respectivement 19,5 % et 17,8 % des truies) que les truies logées en réfectoires

bloqués ou avec libre accès (10-14 truies par groupe) (8,4 et 10,4 %, respectivement). A l’inverse, Pluym et al. (2010) remarquent qu’il n’y a aucune différence significative sur la prévalence des boiteries des truies, entre les réfectoires libre accès et les DAC. Seule la gravité des lésions du talon est significa-tivement plus sévère dans le sys-tème en réfectoire. Au niveau des onglons, les lésions sont majoritai-rement localisées au niveau de la paroi et du talon (presque toutes les truies ont des lésions du talon). Enfin, d’après Boulot et al. (2011), les auges avec bat-flancs se carac-térisent par une prévalence signi-ficativement plus élevée des pro-blèmes d’aplombs comme cause de réforme, comparée aux autres systèmes (Tableau 1). Ces résultats sont confirmés par les enquêtes de Courboulay et al. (2010). Les réfor-mes pour problème d’aplombs sont deux fois plus importantes en système auge qu’en système réfec-toire et DAC (respectivement 8 %, 4 % et 4 % des causes exprimées). Ce résultat peut être expliqué par une fréquence de sols paillés plus faible dans ce système. Dans l’étu-de de Boulot et al. (2011), il est éga-lement montré que les réformes pour problèmes d’aplombs sont significativement plus fréquentes en système soupe (44,4 vs 17,2 %, p <0,05). Ces effets sont cohérents avec ceux observés dans les sys-tèmes d’alimentation à l’auge qui utilisent le plus souvent la soupe, en petites cases et sur caillebotis.

Influence du rang de portée

Gjein et Larssen (1995) indiquent que la prévalence des lésions d’onglon n’est pas liée à l’âge de la truie. A l’inverse, Pluym et al. (2010) concluent que la fréquence des boiteries et des lésions des onglons (croissance exagérée ou lésions sur la paroi latérale) augmentent significativement avec le rang de

moins de 5 entre 5 et 10 plus de 10Nombre de lésions cutanées

E�ectif truies (%)

0

20

40

60

80

100 caillebotispaille

moins de 5

entre 5 et 10

plus de 10

Nombre de lésions cutanées

E�ectif truies (%)

020406080

100caillebotispaille

mauvais moyen bonQualité des aplombs

E�ectif truies (%)

Nombres de lésions

020406080

100

�ancs05

101520

25

tête et épaule

pattes arrières vulves

caillebotispaille

**

*

*

mauvais moyen bonQualité des aplombs

E�ectif truies (%)

020406080

100caillebotispaille

**

*

présentabsent

verrat :Nombres de lésions

�ancs05

101520

25

tête et épaule

pattesarrières vulves

**

présentabsent

verrat :

Nombres de lésions

�ancs05

101520

25

tête et épaule

pattesarrières

vulves

**

présentabsent

verrat :

Source : Meunier-Salaün et al. (2002)

Figure 4 : Effet du type de sol sur la qualié des aplombs des membres antérieurs

Les réformes pour problèmes d’aplombs

sont deux fois plus faibles sur paille

que sur caillebotis (4 vs 8 %).

Les auges avec bat-flancs se caractérisent

par une prévalence significativement plus élevée des problèmes

d’aplombs comme cause de réforme,

comparée aux autres systèmes.

19 TechniPorc, Vol. 34, N°4, 2011 - la revue technique de l’IFIP Synthèse

portée. Cela indique qu’une répar-tition correcte des rangs de por-tée dans le cheptel truies est un point clé non seulement pour des raisons de productivité mais aussi pour des questions de santé et de bien-être animal.

Autres facteurs préventifs des problèmes d’aplombs

Delsart et al. (2010) conseillent aux éleveurs de faire régulière-ment des cures de Vitamines/Oligoéléments sur les truies et sur les cochettes en quarantaine (apport de Biotine, de Zinc et de Vitamine E-sélénium principale-ment). De même, ils proscrivent les truies trop lourdes et grasses et ils préconisent de faire passer les animaux au moins une fois par cycle de reproduction dans un pédiluve. Cependant, des tra-vaux sont encore à mener pour identifier les conditions optimales d’utilisation des pédiluves (choix du produit actif, dimensions du pédiluve, rythme de passage…) et pour objectiver leurs actions préventives et curatives sur les problèmes d’onglons.

Dynamique d’infection du troupeau

La conduite des truies en groupe modifie la circulation des contami-nants dans le cheptel. Les contacts entre les différentes truies, qu’ils soient directs (groin à groin, peau contre peau) ou indirects (par les urines, les déjections) sont ampli-fiés, favorisent les contaminations et peuvent augmenter la pression d’infection de certains agents pathogènes. Ainsi, les œufs de parasites excrétés dans l’environ-

nement sont sans doute ingérés de façon plus importante et plus rapide par les animaux, d’où l’inté-rêt des vermifugations régulières pour rompre les cycles parasitai-res et prévenir la recontamination de l’environnement. Friis et al. (2000) ont constaté que l’infection par des leptospires sem-ble favorisée chez des femelles en groupe, élevées en grand groupe et sur litière. Ce type de conduite peut en effet procurer des abris pour les rongeurs et maintenir un environ-nement humide favorable à la sur-vie de Leptospira. L’ingestion par les truies de tous les déchets issus des avortements (délivrance, avortons, liquides placentaires…) et de paille contaminée par de l’urine infectée est également un facteur de risque important. Dans les systèmes sur litière, la paille peut donc favo-riser la conservation d’agents pathogènes et leur ingestion par les truies.D’après Boulot et al. (2011), les élevages en groupe ont significati-vement moins de problèmes uro-génitaux que les élevages avec un système de truies bloquées (17 % vs 25 %), ce qui pourrait s’expliquer par la plus grande mobilité des truies en groupe. Parmi les élevages en grou-pe, les problèmes urogénitaux sont significativement plus nombreux dans les élevages avec des groupes de plus de 30 truies (42% des éle-vages) que dans les élevages avec des groupes de moins de 10 truies et compris entre 10 et 30 truies (res-pectivement 16 et 12 %, p <0,05). Sachant que les grands groupes sont plus fréquemment logés sur paille et alimentés en DAC dans cette étude, des problèmes uri-naires associés à un possible sous abreuvement en systèmes DAC

sont à évaluer. De même, la préva-lence des problèmes de reproduc-tion augmente avec la taille des groupes de truies (problème de retour en chaleur, augmentation de l’intervalle sevrage-1ère saillie, peti-tes portées). L’origine sanitaire de ces troubles n’est pas à exclure, en raison des risques de leptospirose sur sols humides et/ou paillés et de l’augmentation des possibilités de contact avec de l’urine contaminée dans les grands groupes. Il y a aussi probablement des diffé-rences entre les conduites dynami-ques et statiques. Dans le premier cas, on pourrait craindre des relan-ces d’infection lors du mélange de truies de bandes différentes, avec a priori un statut immuni-taire et microbien hétérogène. A contrario, le mélange contribue aussi à une homogénéisation du statut sanitaire des truies, par une meilleure exposition aux différents pathogènes. Rose et al. (2003) ont d’ailleurs noté que le logement des truies en groupe pendant leur phase de gestation est un facteur protecteur vis-à-vis du PCV2 (cir-covirus de type 2). Ceci est confir-mé par Andraud et al. (2009) qui ont modélisé la dynamique d’in-fection du PCV2 intra-troupeau : ils ont observé que le logement des truies en groupe réduit le nombre d’infections précoces du porcelet avec le PCV2, laissant supposer, en raison des contacts plus impor-tants entre animaux, une meilleure homogénéité du statut immuni-taire du troupeau et un plus grand nombre de truies immunisées au moment de la mise bas.Enfin, Kirwan (2010) constate qu’en Irlande, le passage des truies en groupe n’a pas conduit à la détérioration redoutée du

Tableau 1 : Influence du mode d’alimentation sur les problèmes locomoteurs

Système d’alimentation

DAC Réfect. Sol Auge avec bat-flanc

Auge seule Autres

Nombre d’élevages 19 54 11 59 15 15Causes de réforme (% élevages)Problèmes d’aplombs > 5% 26,7 ab 13,2 a 16,7 ab 51,1 b 25 ab 27,3 abProblèmes d’aplombs > 5% en cycle 1 26,7 ab 18,4 a 83,3 c 46,7 bc 41,7 ac 18,1 ab

Réfec. : réféctoire ; les valeurs portant des lettres différentes diffèrent de manière significative (p<0,05)

Les élevages en groupe ont significativement moins de problèmes uro-génitaux que les élevages avec un système de truies bloquées.

L’infection par des leptospires semble favorisée chez des femelles en groupe, élevées en grand groupe et sur litière.

Le logement des truies en groupe pendant leur phase de gestation est un facteur protecteur vis-à-vis du PCV2.

20 Synthèse TechniPorc, Vol. 34, N°4, 2011 - la revue technique de l’IFIP

statut Salmonelles des élevages. En effet, sur 10 ans, alors que 40% des élevages irlandais ont adop-té un système de logement des truies en groupe, la prévalence des Salmonelles, contrôlée par suivi sérologique sur jus de viande depuis 2001, est identique.

Immunité des truies

A ce jour, aucune étude n’a montré d’effet des différents systèmes de logement sur la fonction immu-nitaire des truies en gestation. La production d’anticorps et le ratio neutrophiles/lymphocytes ne sont pas différents entre les truies logées individuellement et les truies élevées en groupe (von Borell et al., 1992 ; McGlone et al., 1994 ; Broom et al., 1995 ; McGlone et al., 2004). La place dans la hié-rarchie pourrait par contre interve-nir sur le niveau de stress et d’im-munité : Nicholson et al. (1993) ont montré que les femelles de rang intermédiaire dans la hiérarchie (ni dominantes ni subordonnées) présentent un niveau de cortisol plus élevé, des défenses immuni-taires plus faibles et des perfor-mances de reproduction moins élevées que les truies dominantes ou subordonnées. Enfin, la répon-se immunitaire, suite à l’injection intradermique d’une substance mitogène, est diminuée quand l’espace disponible est très réduit (0,98 m² contre 1,97 m²/truie) ou en l’absence de zones de protection (Barnett et al., 1992). En revanche, Broom et al. (1995) n’observent pas de différence après l’injection d’un vaccin quel que soit le système de logement (groupe DAC ou réfec-toire, individuel).

Carrière de la truie

La longévité des truies est une question importante dans les éle-vages de porcs, tant pour des rai-sons de bien être animal qu’éco-

nomiques, car la productivité de l’élevage est inévitablement impactée.

Comparaison entre les systèmes de logement individuel et collectif

Den Hartog et al. (1993) ont démontré une différence significa-tive du taux de remplacement des truies logées en réfectoires bloqués (43,6 %) et en groupe (55,6 %). Dans une étude récente de Boulot et al. (2011) il apparaît que, mal-gré un taux de renouvellement globalement comparable (42,0 vs 41,2 %), les élevages en groupe réforment significativement plus de truies en cycle 1 (9,4 vs 8,6%, p <0,05) et après la 1ère mise bas (10,2 vs 9,2 %, p <0,05). Les truies en groupe ont également une carrière moins longue (cycle à la réforme de 5,3 vs 5,4, p <0,05). Ces résultats vont dans le même sens que ceux de Courboulay et al. (2010). Par contre, en groupe, les élevages enregistrant plus de 10 % de réformes liées à des patho-logies sont moins nombreux qu’en logement individuel (22 vs 29 %, p <0,10) avec notamment moins de réformes liées aux pathologies uro-génitales (17 vs 25 %, p <0,05).

Influence du mode d’alimentation

Dans une étude de Boulot et al. (2011), il apparaît que les éleva-ges avec réfectoire présentent la meilleure longévité des truies (5,7 cycles) et que les systèmes DAC sont associés au taux de réforme le plus élevé (43,6 %) en particulier pour les jeunes truies (11 % de réformes en cycle 1), mais la longévité des truies reste bonne (5,1 cycles). Il n’existe pas de cause de réforme dominan-te dans ce système. Cela va dans le même sens que les conclusions de Courboulay et al. (2010) : le système DAC se distingue des systèmes

auge et réfectoire par un taux de réforme annuel plus important de 3 à 4 points. Ce taux de réforme pré-sente néanmoins une forte variabi-lité qui suggère des situations favo-rables et d’autres problématiques. Certains élevages récemment passés à ce système ont peut-être anticipé d’éventuels problèmes d’adaptation du troupeau, augmenté en consé-quence le nombre de cochettes et finalement dû réformer des animaux pour des raisons d’effectifs. Seule l’analyse des résultats sur la durée pourra permettre de valider cette hypothèse. Dans cette même étu-de, les causes de réforme diffèrent selon le mode de distribution de l’aliment : les réformes pour gestion de bande, surtout liées à la vieillesse des truies, sans cause spécifique, se rencontrent davantage dans le sys-tème réfectoire. Les réformes pour problèmes en maternité sont plus fréquentes au DAC, alors que les problèmes d’aplombs sont plus fré-quents en système auge (Tableau 1). Dans cette étude, il est également montré que les réformes pour pro-blèmes d’aplombs sont significati-vement plus fréquentes en système soupe (44,4 vs 17,2%, p <0,05).

Influence de la taille du groupe

D’après Boulot et al. (2011), le taux de réforme est significativement inférieur dans les élevages avec des groupes de plus de 30 truies (35 %) par rapport à ceux ayant des grou-pes de moins de 10 truies ou com-pris entre 10 et 30 truies (43 %).

Influence du mode de conduite des cochettes

D’après Boulot et al. (2011), les élevages logeant les cochettes en groupe de l’entrée en verraterie à l’entrée en maternité ont des car-rières plus longues que ceux qui bloquent les cochettes momenta-nément (5,4 cycles vs 4,8, P<0,05).

En Irlande, le passage des truies en groupe

n’a pas conduit à la détérioration redoutée

du statut Salmonelles des élevages.

Le taux de réforme est significativement

inférieur dans les élevages avec

des groupes de plus de 30 truies (35 %) par

rapport aux groupes de moins de 10 truies

ou compris entre 10 et 30 truies (43 %).

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Ils réforment également moins de cochettes en cycle 1 (7,6% vs 9,6 %, p <0,05). Cependant ils sont plus nombreux à avoir plus de 10% de réformes pour problèmes en maternité (47 vs 26 %, p <0,05), en particulier en cycle 1 (27 vs 6 %, p <0,05).

Influence des problèmes cliniques

Rivzi et al. (1998) indiquent que le taux de renouvellement est signi-ficativement supérieur (de 9 %) dans les élevages recensant des problèmes de morsures de vulve. 10 % des éleveurs réforment les truies qui infligent des morsures de vulve mais aucun ne dit réfor-mer des truies présentant ce type de blessure. L’incidence des mor-sures de vulve n’est donc pas le seul facteur pouvant expliquer une telle différence dans le taux de renouvellement.Dans une étude récente, Jensen et al. (2010) se sont intéressés à la relation entre le statut clinique des truies élevées en groupe et l’occur-rence d’une réforme anticipée. Au total, 2 989 truies ont été suivies dans 34 élevages. Chaque truie a fait l’objet d’un examen clinique (pour l’essentiel 4 à 6 semaines après l’insémination), qui portait sur les marques de pression au niveau de différentes articulations, les dif-férentes blessures et les boiteries. Pendant les trois mois qui ont suivi cet examen clinique, les éleveurs ont enregistré toutes les réformes et les mortalités de truies ainsi que leurs causes. Il est apparu que 4,2 % des truies ont fait l’objet d’une réfor-me anticipée, avec la répartition suivante : 1,6 % sont mortes, 1 % ont été euthanasiées et 1,6 % ont été envoyées à l’abattoir à cause de signes cliniques (exemple : lésions d’onglons, blessures, problème de mise-bas). Il n’y avait pas de diffé-rence de prévalence de ces réformes entre les rangs de portée. En revan-

che, cette prévalence variait de 0 à 18 % selon les élevages. Ces varia-tions peuvent s’expliquer du fait des nombreuses différences entre les élevages (nombre de truies, système d’alimentation, conduite d’élevage, pratiques des éleveurs sur le moment et la raison de la réforme). De plus, seules les boite-ries ont été trouvées associées de manière hautement significative à une réforme anticipée et plus précisément, à la variable « envoi à l’abattoir avec signes cliniques » (p = 0,026). Cette observation est en accord avec d’autres études qui ont également trouvé que les boiteries étaient une cause fréquente de réforme (Engblom et al., 2005). Par contre, le fait que la boiterie ne soit pas significativement associée à la variable euthanasie ne confirme pas les conclusions d’autres études, qui montrent au contraire que les problèmes locomoteurs (arthrites ou ostéochondrose) en sont la prin-cipale cause dans les systèmes de truies gestantes en groupe (Kirk et al., 2005 ; Engblom et al., 2008). Kirk et al. (2005) ont en effet observé, à partir d’examens post-mortem, que les troubles locomoteurs étaient la 1ère cause d’euthanasie pour plus de 70 % de 172 truies euthanasiées. Dans l’étude de Jensen et al., (2010), cette différence peut s’expliquer par une meilleure prise de conscience et une meilleure gestion des boi-teries par l’éleveur (traitement ou envoi à l’abattoir), grâce aux visites et aux examens cliniques des tech-niciens de l’étude. Par ailleurs, l’étude de Jensen et al. (2010) ne révèle aucun facteur significativement relié à la morta-lité car les examens cliniques ont été menés longtemps avant la survenue de la mort. Or, les truies qui meurent montrent souvent des signes cliniques dans un délai pro-che de la mort voire ne montrent aucun signe clinique (Vestergaard et al., 2006). Les causes de ces mor-talités sont souvent des troubles de

la circulation sanguine, des trau-matismes, des lésions au niveau du système reproducteur et des pro-blèmes gastro-intestinaux (Kirk et al., 2005 ; Vestergaard et al., 2006).Enfin, dans l’étude de Jensen et al. (2010), la majorité des réformes anticipées ont eu lieu peu de temps après la mise-bas, ce qui confirme des observations effectuées dans d’autres études. En effet, Kirk et al. (2005) indiquent que les réformes anticipées liées à des euthanasies et à des morts peuvent s’observer à tout moment durant la lactation ou la gestation, mais elles sont plus fréquentes autour de la mise-bas et jusqu’au sevrage. Ceci explique aussi sans doute l’écart trouvé dans la proportion de truies envoyées à l’équarrissage (respectivement 2,6 et 14 %) entre l’étude de Jensen et al. (2010), axée sur l’examen cli-nique en gestation, et un rapport danois cité par Vestergaard et al. (2006), prenant aussi en compte la période de lactation. Jensen et al. (2010) concluent qu’un examen clinique systématique des truies pourrait être utilisé pour prédire le risque individuel d’une réforme anticipée. Cet examen serait intéressant car un nombre élevé de réforme anticipée de truies dans un troupeau (euthana-sie, mortalité, envoi à l’abattoir pour des raisons cliniques) est souvent révélateur de problèmes de santé et de bien-être. Les conséquences financières sont alors importantes, car ces réformes exigent un rempla-cement immédiat par des cochet-tes et conduisent à des pertes de revenu.

Influence de la litière

La paille semble contribuer à une meilleure longévité des truies. Outre son effet bénéfique pour les onglons, elle offre un confort thermique et physique pendant les périodes de repos et de som-meil, un enrichissement de l’envi-

Les boiteries ont été trouvées associées de manière hautement significative à une réforme anticipée.

22 Synthèse TechniPorc, Vol. 34, N°4, 2011 - la revue technique de l’IFIP

ronnement et permet de réduire les comportements stéréotypés et agressifs (Barnett et al., 2001).

Importance de l’infirmerie

Les truies incapables d’entrer en compétition, malades et/ou bles-sées doivent être isolées dans une case appropriée, pour s’alimenter et retrouver une santé et un état cor-porel suffisants. Les recommanda-tions danoises concernant les cases d’infirmerie sont les suivantes : maximum de 3 truies ou cochettes par case, 9 m² par animal, pas de courant d’air, régulation possible de la température, et 66 % de la surface totale de la case sous for-me de litière (National Committee for Pig Production, 2005).

Manipulation des truies

Le personnel qui n’a au préalable travaillé que dans des systèmes de logement individuel doit appren-dre de nouvelles techniques d’ob-servation et de manipulation des truies (Spoolder et al., 2009). Ainsi,

deux compétences sont essentiel-les : 1) La capacité à identifier les truies blessées afin de leur appor-ter les soins appropriés ; 2) la maî-trise des techniques de manipu-lation et de tri des truies au sein d’un groupe pour éliminer le stress et les risques de blessures.

Conclusion

Au terme de cette revue biblio-graphique, il apparaît que les données scientifiques actuelles identifient un certain nombre de facteurs de risque et de réussite, influençant la gestion sanitaire des truies logées en groupe. Ces différentes conclusions basées sur la littérature scientifique ne représentent cependant pas une liste exhaustive de recommanda-tions. Beaucoup de bonnes pra-tiques sont aussi fondées sur le bon sens ou les observations du terrain. De plus, ces conclusions ne sont pas toujours applicables en l’état car elles sont souvent dépendantes de conditions de logement particulières. En effet,

une des difficultés pour synthé-tiser des recommandations vient des liens existant entre les diffé-rentes possibilités de logement et de conduite testées dans les études : systèmes d’alimenta-tion, utilisation de litière, taille et dynamique du groupe sont souvent inextricablement liés les uns aux autres (Edwards, 2000).En outre, de futures recherches sont encore à mener, notamment sur un aspect particulièrement manquant : la performance de différentes races et l’hérita-bilité des caractères liés à un fonctionnement optimal dans un système de logement en groupe. Récemment, seuls quel-ques travaux ont été menés pour relier l’apparition de l’agression à la génétique (Knol et al., 2008 ; Turner et al., 2008). Enfin, pour piloter au plus juste les troupeaux en groupe, de meilleurs enregistrements des motifs de réformes, des problèmes d’aplombs et de reproduction sont plus que jamais indispensa-bles (Boulot et al., 2011). n

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Les truies incapables d’entrer en

compétition, malades et/ou blessées doivent

être isolées dans une case appropriée.

Truie isolée à l’infirmerie

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