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R EPROD ACTION Importance du sélénium dans la nutrition des truies reproductrices - une nouvelle approche Laboratoire du Dr J. Jacques Matte, Centre de recherche et de développement sur le bovin laitier et le porc (CRDBLP), Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) Au cours des vingt dernières années, le taux d’ovulation a considérablement augmenté chez les lignées hyperprolifiques de porcs. Ces progrès ont toutefois été réalisés aux dépens de la survie des embryons, possiblement à cause de la piètre qualité de certains des ovocytes libérés à l’ovulation. Au moment de l’oestrus, le métabolisme ovarien génère une pression oxydative (Agarwal, 2005) qui doit être localement neutralisée par différents antioxydants comme les vitamines C et E ainsi que par la glutathion peroxydase (GSH-Px), un système enzymatique dépendant du sélénium. ENGLISH / JANVIER 2013 Le cycle oestral chez la truie Le cycle oestral est l’ensemble des phénomènes qui se déroulent entre deux oestrus («chaleur», période où l’accouplement est accepté par la truie et qui dure en moyenne 50 heures) consécutifs. Sa durée, chez la truie, est en moyenne de 21 jours, mais elle peut varier de 18 à 24 jours. Le cycle oestral se divise en 2 phases : la phase lutéale (de 13 à 15 jours) : période pendant laquelle les corps jaunes (corpus luteum) sont présents et sécrètent de la progestérone. Celle-ci débute après l’ovulation. la phase folliculaire (d’une durée de 4 à 6 jours) : correspond à la croissance et à la différenciation terminale des follicules pré-ovulatoires. Cette phase conduit à un nouvel oestrus accompagné d’ovulation.

Importance du sélénium dans la nutrition des truies reproductrices

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REPR

OD ACTION

Importance du sélénium dans la nutrition des truies reproductrices - une nouvelle approcheLaboratoire du Dr J. Jacques Matte, Centre de recherche et de développement sur le bovin laitier et le porc (CRDBLP), Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC)

Au cours des vingt dernières années, le taux d’ovulation a considérablement augmenté chez les lignées hyperprolifiques de porcs. Ces progrès ont toutefois été réalisés aux dépens de la survie des embryons, possiblement à cause de la piètre qualité de certains des ovocytes libérés à l’ovulation.

Au moment de l’oestrus, le métabolisme ovarien génère une pression oxydative (Agarwal, 2005) qui doit être localement neutralisée par différents antioxydants comme les vitamines C et E ainsi que par la glutathion peroxydase (GSH-Px), un système enzymatique dépendant du sélénium.

ENGLISH / JANVIER 2013

Le cycle oestral chez la truie

Le cycle oestral est l’ensemble des phénomènes qui se déroulent entre deux oestrus («chaleur», période où l’accouplement est accepté par la truie et qui dure en moyenne 50 heures) consécutifs. Sa durée, chez la truie, est en moyenne de 21 jours, mais elle peut varier de 18 à 24 jours. Le cycle oestral se divise en 2 phases :

•la phase lutéale (de 13 à 15 jours) : période pendant laquelle les corps jaunes (corpus luteum) sont présents et sécrètent de la progestérone. Celle-ci débute après l’ovulation.

•la phase folliculaire (d’une durée de 4 à 6 jours) : correspond à la croissance et à la différenciation terminale des follicules pré-ovulatoires. Cette phase conduit à un nouvel oestrus accompagné d’ovulation.

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Concernant la glutathion peroxydase, le Dr Matte et son équipe ont émis l’hypothèse que la source de sélénium alimentaire (organique vs inorganique) pourrait influer sur la capacité métabolique antioxydative durant la phase préovulatoire du cycle œstral et ainsi favoriser la qualité de l’ovulation et des embryons.

Sélénium organique Une première expérience a démontré que le

sélénium organique augmente de 60 % le transfert de sélénium aux embryons et de 10 % leur développement morphologique et physiologique in utero en début de gestation. Cette réponse, sur le développement embryonnaire, était possiblement une conséquence des effets résiduels du traitement au sélénium organique au moment de l’ovulation.

  D’après les mesures de la concentration de sélénium sanguin chez les truies et de l’activité de la GSH-Px durant la période péri-œstrale, il semblerait qu’un autre micronutriment, la vitamine B6, puisse jouer un rôle essentiel dans le système GSH-Px et, ultimement, dans la performance reproductive des truies.

Vitamine B6 Une deuxième expérience a permis de montrer

l’importance de la vitamine B6 dans le flux de sélénium organique jusqu’au système GSH-Px en réponse à la pression oxydative induite par la période péri-œstrale chez des truies pubères. En effet, l’expression des gènes responsables de la production de la GSH-Px et de la sélénocystéine oxydase du cytosol (impliquée dans la régulation du flux de la sélénocystéine vers le système GSH-Px) dans le foie et les reins était 50 à 70 % plus élevée chez les truies qui recevaient un supplément de sélénium organique et de vitamine B6, comparativement à celles qui ne recevaient pas de supplément ou qui recevaient un supplément de sélénium inorganique (avec ou sans vitamine B6) ou de sélénium organique sans B6.

Figure 1 : Réactions catalysées par la glutathion peroxydase. La GSH-Px assure la transformation du peroxyde d’hydrogène, qui est potentiellement dommageable pour la cellule, en deux molécules d’eau alors que deux molécules de glutathion (GSH) sont oxydées.

Un antioxydant est une molécule qui diminue ou empêche l'oxydation d'autres substances chimiques. Les réactions d'oxydation sont nécessaires à la vie, mais elles peuvent aussi être destructrices pour les cellules. Pour cette raison, les animaux et les plantes utilisent et produisent de nombreux antioxydants pour se protéger (glutathion, vitamine C, vitamine E) ou des enzymes comme la glutathion peroxydase (GSHPx). La GSHPx est présente dans les liquides extracellulaires et dans les cellules au niveau du cytosol (milieu liquide dans lequel baignent les différentes structures cellulaires) et des mitochondries (structures intracellulaires qui fournissent l’énergie à la cellule). Elle assure la transformation du peroxyde d’hydrogène en 2 molécules d’eau alors que 2 molécules de glutathion (GSH) sont oxydées.

GSH$(forme$réduite)$ou$GSSG$(forme$oxydée)$$$ $

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2 GSH Glutathion (forme réduite)

GSSG Glutathion (forme oxydée)$

Peroxyde d’hydrogène (H2O2)

Eau (2 H2O)$

Glutathion peroxydase (GSHPx)

SÉLÉNIUM

2 GSH Glutathione (reduced)

GSSG Glutathione (oxidized)$

Hydrogen peroxide (H2O2)

Water (2 H2O)$

Glutathione peroxidase (GSHPx)

SELENIUM

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Le sélénium est un minéral essentiel qui se trouve en petites quantités chez les mammifères. Il fonctionne comme un antioxydant, en particulier lorsqu'il est combiné avec la vitamine E.

Un antioxydant est une molécule qui diminue ou empêche l'oxydation de d'autres substances chimiques. Les réactions d'oxydation sont nécessaires à la vie, mais elles peuvent aussi être destructrices pour les cellules. Pour cette raison, les animaux et les plantes utilisent et produisent des antioxydants pour se protéger (sélénium, vitamine C, vitamine E) ou des enzymes comme la glutathion peroxydase (GSH-Px).

La glutathion peroxidase (GSH-Px) est présente dans les liquides extracellulaires et dans les cellules au niveau du cytosol (phase liquide dans lequel baignent les différentes structures intracellulaires) et des mitochondries (structures intracellulaires qui fournissent l’énergie à la cellule). Elle est formée de quatre sous-unités contenant chacune un atome de sélénium incorporé dans une molécule de sélénocystéine.

La sélénocystéine, qui entre dans la constitution de la GSH-Px, est un acide aminé n'appartenant pas à la série des 20 acides aminés communs aux polypeptides. Structurellement, elle est équivalente à une molécule de cystéine dont l'atome de soufre est remplacé par du sélénium.

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BibliographieAgarwal, A., S. Gupta, and R. K. Sharma. 2005. Role of oxidative in stress in female reproduction. Reprod. Biol.

Endocrinol. 3:28. Linus Pauling Institute at Oregon State University: Micronutrient Research for Optimum Health, [En ligne], 2002, mise à

jour 2007, [http://lpi.oregonstate.edu/infocenter/vitamins/riboflavin/gsh.html] (consulté en novembre 2012). MARTINAT-BOTTÉ, Françoise, Guy RENAUD, François MADEC, Patrick COSTIOU et Michel TERQUI. Échographie et

reproduction chez la truie : Bases et applications pratiques, Éditions INRA, Hoechst Roussel Vet, 1998. Soede, N. M., Wetzels, C. C., Zondag, W., de Koning, M. A., and Kemp, B. (1995). Effects of time of insemination

relative to ovulation, as determined by ultrasonography, on fertilization rate and accessory sperm count in sows. J Reprod Fertil 104, 99-106.

University of Maryland Medical Center. [En ligne], 2011, mise à jour 25 juillet 2012, [http://www.umm.edu/altmed/articles/selenium-000325.htm] (consulté en novembre 2012).

Vulgarisation: Julie Blouin, Agente de transfert du RQR

Publication d’un livre intitulé «Vade-Mecum de gestion de la reproduction des bovins laitiers» Les coéditeurs sont Luc DesCôteaux et Denis Vaillancourt, tous deux de la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal. Trois membres du RQR font partie des 30 auteurs collaborateurs francophones qui se sont impliqués dans la production de ce guide: Émile Bouchard, Paul D. Carrière et Réjean Lefebvre.

L’ouvrage est divisé en cinq chapitres: physiologie, lexique terminologique, examen génital chez la vache, principales pathologies et enfin, gestion de la reproduction et mesures préventives à l’échelle du troupeau. Disponible à la Librairie Médicale et Scientifique Inc.

En termes de performance de reproduction, le taux d’ovulation était près de 23 % plus élevé chez les truies recevant le supplément de sélénium organique et de vitamine B6. Il semble donc que la vitamine B6 dans l’alimentation est un facteur de modulation du métabolisme du sélénium organique vers le système GSH-Px.

En résumé, la combinaison sélénium organique et vitamine B6 dans l’alimentation de la truie pourrait contribuer à accroître la performance reproductive.

PerspectivesLes travaux actuels du Dr Matte et de son

équipe visent à déterminer si ces deux micronutriments, le sélénium organique et la vitamine B6, peuvent jouer un rôle dans la fonction

ovarienne en favorisant la qualité de l’ovulation et des embryons chez la truie.

RemerciementsMerci aux trois partenaires de recherche:

Génétiporc - Aliments Breton; Groupe Cérès; et Alltech Inc., Canada et États-Unis.

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Le RQR se fait connaître auprès de l’industrie

Le RQR était présent à la rencontre annuelle du CFAS en septembre dernier, à la conférence InnoVet 2012 et au Symposium ovin en octobre et finalement, au Symposium sur les bovins laitiers en novembre.

Des articles ont aussi été publiés en novembre dans la revue «Bovins du Québec» et en décembre dans les revues «Porc Québec» et «Le producteur de lait québécois».

Nous avons aussi eu le plaisir, lors du dernier symposium du RQR en novembre, d’accueillir des représentants de l’industrie, dont Valacta et Procrea Clinique.

Par l’établissement de liens solides avec l’industrie, nous serons en mesure de travailler ensemble sur les problèmes rencontrés au niveau de la reproduction.

Vitamine B12 et acide folique chez le bovin laitier

Dans le cadre de la journée d’information scientifique en production animale, qui aura lieu à Drummondville le 27 février prochain, Dr François Richard, professeur à l’Université Laval et membre du RQR, présentera une conférence intitulée «Effet d’une supplémentation en vitamine B12 et en acide folique sur la reproduction du bovin laitier, une analyse génomique des cellules de la granulosa».

La reproduction des vaches en début de lactation demeure encore aujourd’hui un défi important. Au cours de cette période la production laitière de l’animal est telle que l’animal se retrouve en déficit énergétique. Une étude récente rapporte qu’une supplémentation en vitamine B12 et acide folique aurait des bénéfices sur la production laitière (tels que le volume de lait produit, le lactose et les protéines). Cette étude a démontré une amélioration de l’efficacité du métabolisme énergétique par le supplément vitaminique. L’équipe, composée de François J. Richard, Annie Gagnon, Christiane L. Girard, Marc-André Sirard et Jean-Paul Laforest, a donc voulu investiguer l’effet d’une telle supplémentation sur la reproduction.

Pour ce faire, l’étude a été concentrée sur l’ovaire, plus précisément, au niveau de la génomique fonctionnelle des cellules de la granulosa du follicule dominant. L’hypothèse étant que les animaux ayant reçu une supplémentation en acide folique et en vitamine B12 auraient une meilleure fonction reproductive que les animaux non traités. Cette étude a permis à l’équipe de démontrer que le traitement des vaches par des injections intramusculaires hebdomadaires de vitamine B12 et d’acide folique affecte la physiologie ovarienne. L’analyse de l’effet des vitamines du complexe B montre une maturation pré-ovulatoire plus hâtive que chez les animaux

Événements à venir...•27 février 2013: Journée d’information

scientifique en production animale (Hôtel et Suites Le Dauphin, Drummondville)

Pour consulter la liste complète des activités ou pour avoir plus d’informations sur les activités proposées, visitez le site web RQR-TC.

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Vous faites partie de l’industrie? N’hésitez pas à nous faire parvenir votre article (français et anglais, préférablement) à l’adresse suivante: [email protected].

Communiqué des IRSC: Trois ressources disponibles pour le transfert de connaissances 1. Guide d’évaluation dans le domaine de la recherche en santé: développer les connaissances et

les compétences nécessaires à l'évaluation des initiatives dans le domaine de la santé et de la recherche en santé (y compris des initiatives d'application des connaissances).

2. Guide de rédaction des lettres d’appui: fournit des lignes directrices sur la façon de rédiger des lettres d’appui efficaces.

3. Guide de planification de l’application des connaissances aux IRSC : approches intégrées et de fin de subvention: nouveau Guide de l’AC visant à faciliter la préparation et l’évaluation des demandes de subventions.

contrôles. Cette exposition entraîne une différentiation cellulaire amenant le follicule à changer sa stéroïdogenèse et à se préparer à l’ovulation. Bien que certaines options demeurent à l’étude, l’équipe ne peut se prononcer, pour l’instant, sur le mécanisme d’action des vitamines.

« Résoudre la pénurie de science au Québec »

Une nouvelle société de biotechnologie a été créée au Québec. Cette société est née d’un partenariat entre le Fonds CTI Sciences de la vie et Ferring Pharmaceuticals, une compagnie basée en Suisse, auquel le Fonds de solidarité FTQ a apporté son appui.

La nouvelle entreprise assurera le développement d’un nouveau composé innovant de la famille des agonistes du GLP-2 (Glucagon-Like-Peptides) en vertu d’une licence mondiale et exclusive accordée par Ferring Pharmaceuticals. L’indication ciblée est dans le domaine des soins de soutien en oncologie, représentant une première indication et une avancée clinique potentiellement majeure.

Ce nouveau partenariat «capital de risque» apporte la propriété intellectuelle sur le marché tout en répandant un peu du risque encouru.

Consulter l’article publié dans la revue BioBusiness Novembre/Décembre 2012.