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Classe de seconde. – L’évolution de l’écriture à travers les archives départementales de l’Yonne – Les signes de validation Archives départementales de l’Yonne Service éducatif Classe de seconde : Enseignement d’exploration « Littérature et société » Chapitre « De la tablette d’argile à l’écran numérique : l’aventure du livre et de l’écrit » L’évolution de l’écriture à travers les archives de l’Yonne Les signes de validation Dossier documentaire réalisé par Annie BELLU professeur en service éducatif 2014

L’évolution de l’écriture à travers les archives de l’Yonne · que : "Charles, par la grâce de Dieu, ... Il s'agit de la transformation du dernier mot de la formule de souscription,

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Classe de seconde. – L’évolution de l’écriture à travers les archives départementales de l’Yonne – Les signes de validation

Archives départementales de l’Yonne

Service éducatif

Classe de seconde :

Enseignement d’exploration « Littérature et société »

Chapitre « De la tablette d’argile à l’écran numéri que :l’aventure du livre et de l’écrit »

L’évolution de l’écriture à travers les archives del’Yonne

Les signes de validation

Dossier documentaire réalisé parAnnie BELLU

professeur en service éducatif

2014

Classe de seconde. – L’évolution de l’écriture à travers les archives départementales de l’Yonne – Les signes de validation

Documents proposés

Document n°1Diplôme de Charles le Chauve (847), arch. dép. Yonn e, H 85

Document n°2Première ligne du diplôme de Charles le Chauve (847 ), arch. dép. Yonne, H 85

Document n°3Chrisme du diplôme de Charles le Chauve (847), arch . dép. Yonne, H 85

Document n°4Extrait d’une charte de Philippe I er (1074), arch. dép. Yonne, H 85

Document n°5Extrait du diplôme de Charles le Chauve (847), arc h. dép. Yonne, H 85

Document n°6Extrait du diplôme de Charles le Chauve (847), arch . dép. Yonne, H 85

Document n°7Signature de Germain Blandin (1565) , arch. dép. Yonne, E 390

Document n°8Signature d'habitants de Villeneuve-l’Archevêque à la fin du cahier de doléances (1789), arch. dép. Yo nne, 40 B 64

Classe de seconde. – L’évolution de l’écriture à travers les archives départementales de l’Yonne – Les signes de validation

Un signe de validation est un signe doté d’un pouvoir particulier : il authentifie un acte, c’est-à-dire qu’il transforme un document en instrument juridique. Au Moyen-Âge, trois instancessont convoquées pour valider un écrit : Dieu, le roi et le scribe.

Document n°1 :Un document de chancellerie royale :di plôme de Charles le Chauve (847)

Diplôme de Charles le Chauve (847), arch. dép. Yonn e, H 85

La référence à Dieu s’exprime par des invocations directes, pour les chancelleries royales etimpériales, puis celles des grands.

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Document n°2 :Première ligne du diplôme de Charles l e Chauve (847)

Cette première ligne est une invocation à Dieu, plaçant le texte sous la protection divine. Cetusage s’est poursuivi jusqu’au XIIIe siècle.

‘In nomine sanctae et individuae Trinitatis, Karolus, gratia Dei rex…’‘Au nom de la sainte et indivisible trinité, Charles, roi par la grâce de Dieu…’

Diplôme de Charles le Chauve (847), arch. dép. Yonn e, H 85

Elle s'exprime aussi par des marques comme les croix ou les chrismes qui "ouvrent" le textedes chartes mérovingiennes puis carolingiennes. Ils sont héritiers de l’époque romaine oùs’est généralisé l’usage de dessiner en tête des diplômes, avant la formule d’invocation, unecroix ou le monogramme du Christ, formé des lettres grecques ΧΧΧΧ (chi) et ΡΡΡΡ (rhô) entrelacées(pour les deux premières lettres du mot ΧΡΙΣΤΟΣΧΡΙΣΤΟΣΧΡΙΣΤΟΣΧΡΙΣΤΟΣ, Christ). À l’époque mérovingienne, cedessin est peu à peu déformé par les scribes, et devient un élément décoratif dont lasignification sacrée semble tombée dans l’oubli.

Document n°3 :Chrisme (847) détail

Ce détail est un agrandissement du chrisme de la charte de Charles leChauve.Le document comporte un second chrisme en fin de texte.

Diplôme de Charles le Chauve (847),arch. dép. Yonne, H 85

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Le souverain (empereur ou roi) est présenté comme auteur principal des actes solennels.Son nom apparaît dès la première ligne comme sur le document 1 ou dans une formule telleque : "Charles, par la grâce de Dieu, roi de France" utilisée par exemple par Charles V puisCharles VI au XIVe siècle. L'autorité est présente par son sceau, apposé à la fin de l'actepouvant comporter la même formule en légende, et éventuellement par une souscriptionautographe. Ce document garde la trace en bas à droite d'un sceau plaqué.

La formule de souscription est généralement accompagnée du nom de l'auteur de l'acte ,présenté sous la forme d’un monogramme , autre signe de validation. Il s’agit d’un dessinformé par les différentes lettres d’un nom, disposées de façon plus ou moins géométrique,souvent superposées. Il s'agit aussi et surtout d'une invocation christique : les lettres du nomsont disposées en forme de croix.

Document n°5 :Extrait du diplôme d’une charte de Ch arles le Chauve (847)

Le monogramme de Charles II dit le Chauve (en latinKAROLUS) se présente sous la forme d'une croix . lesconsonnes K, R, L S sont les quatre bras de la croix, etles voyelles A, O, U sont superposées et en partieconfondues au centre. Le tout forme Karolus

Diplôme de Charles le Chauve (847),arch. dép. Yonne, H 85

La dernière instance associée à la validation des actes est celle des scribes au sens large.Professionnels de la production documentaire, ce sont eux qui sont responsables de l’écrit :chanceliers, secrétaires, notaires, etc.

Leur responsabilité est triple : ils rédigent l'écrit, participent à sa correction graphique(calligraphique et orthographique) et à sa conformité textuelle, et sont garants del’authenticité de l'acte. Ils utilisent des signes de validation tracés de leur main, témoins deleur savoir. À la fin de l’époque romaine, les actes écrits sont normalement validés par lasouscription et le signum.

Les chanceliers carolingiens mettent au point une forme de « protosignature » : lasouscription avec ruche. Il s'agit de la transformation du dernier mot de la formule desouscription, « subscripsit », en un dessin compliqué formé de points, de traits et de bouclesentrelacées qui évoquent très vaguement la forme d’une ruche d’abeilles, d’où le nom deruche donné à ce dessin par les diplomatistes. Chaque secrétaire a la sienne, ce qui permetde vérifier l’authenticité du document. Cette habitude disparaît peu à peu à partir du XIIe

siècle.

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Document n°6Extrait du diplôme d’une charte de Charles le Chauve (847)

La ruche de chancellerie est une forme compliquéeformée de traits et d'entrelacements. En bas, au-dessus des boucles, sont tracées des notes ditestironiennes, écriture très abrégée, où chaque signereprésente un mot, qui résument le texte ou donnent lenom de l’auteur et du scribe. Leur usage disparaît auXe siècle. Même si des chercheurs en ont retrouvé lasignification au XIXe siècle, leur déchiffrement restetrès difficile.

Diplôme de Charles le Chauve , (847)arch. dép. Yonne, cote H 85

À l’époque mérovingienne, de grands personnages (comtes, rois) témoins des actes tracentune croix de leur main, suivie de leur nom et titres écrits par le secrétaire. L’usage de la croixcomme signe de validation se rencontre jusqu’au XIe siècle. Elle était autographe, ou del’auteur de l‘acte ou d’un autre scripteur. On distingue alors plusieurs croix d’une même mainqui peut différer de celle qui a rédigé l’acte. Les souscriptions royales se faisaient par l’ajoutde la mention signum + N+ regis (« seing de N, roi ») et pour les autres :signum + N + titre .

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Document n°4 :Extrait d’ une charte de Philippe I er (1074)

On distingue le signum (Smajuscule barré), suivi dunom et de la fonction dutémoin.Pour la signature royale, lacroix tracée d’une mainmalhabile est suivie dusignum, du nom Philippipuis Regis. Si certaines croix sontmaladroites, deux sont bientracées et de la mêmemain, probablement celledu scribe.Ce document présente desusages de chancellerieassez dégénérés parrapport au modèlecarolingien : ainsi, lemonogramme n'a plus uneforme de croix.

Charte de Philippe I er (1074),arch. dép. Yonne, H 85

La signature apparaît avec le notariat, né de la juridiction gracieuse au XIVe siècle enFrance du nord. Peu à peu, elle supplante les autres signes de validation pour demeurer leseul reconnu.

À partir du règne de Jean II le Bon, les secrétaires apposent le nom du souverain ou duprince temporel (duc, comte) sur les actes. En 1554, par l’ordonnance de Fontainebleau,Henri II oblige les notaires à faire signer par les contractants les actes qu'ils passent ; s'ils nesavent pas signer, le roi accorde à la mention autographe une valeur juridique de garantieabsolue. On voit alors réapparaître les croix tracées par les illettrés, encore nombreux. Lessceaux ne sont alors plus acceptés comme signes de validation et d’identité suffisants.

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Le nom propre d'usage quotidien se réduit pour la plupart des personnes à leur nom debaptême. À partir du XIesiècle apparaît le nom double, le second élément permettant demieux définir l’individu. Le nom de famille est issu de ce deuxième nom qui devienthéréditaire.

La signature est l’image identitaire du nom propre :elle transforme les mécanismes del'identification, puisqu’elle repose sur le tracé autographe, sur la forme que chacun donne àson nom écrit.

Il est difficile de renoncer aux emblèmes : ainsi, des artisans adoptent une marque liée à leurmétier pour signer.

Document n°7 :Signature de Germain Blandin (1565)

Sur cette minute de bail d’une portion de la rivière Yonne depuis Vincelles jusqu’à Auxerre appartenant auduc de Nevers , la signature de Germain Blandin, maître voiturier par eau, est un poisson.

Minute de bail de portion de la rivière Yonne (1565 ),arch. dép. Yonne, E 390

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Avec l’alphabétisation, la signature se démocratise et les croix disparaissent. La signatureindividualise la personne qui la trace, et devient révélatrice de sa personne et de sapersonnalité.

Document n°8:Signature d'habitants de Villeneuve-l’ Archevêque à la fin du cahier de doléances(1789).

On voit nettement les différences entre les signatures à l’écriture aisée et aux paraphes en boucles deshabitants instruits et celles, plus hésitantes, des personnes peu familiarisées avec l’écriture, tels JeanGrelot.

Cahier de doléances des habitants de Villeneuve-l’A rchevêque (1789),arch. dép. Yonne, 40 B 64

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Aujourd’hui, avec le développement de l'écrit numérique, se pose le problème de la signatureélectronique, mécanisme permettant de garantir l’intégrité d’un document électronique etd’en authentifier l’auteur. Il doit permettre au lecteur d'un document d'identifier la personneou l'organisme qui a apposé sa signature, et de garantir que le document n'a pas été altéréentre l'instant où l'auteur l'a signé et le moment où le lecteur le consulte. Cela n'est possiblequ'avec l'aide de la cryptographie. La signature électronique n'est pas visuelle, il s'agit d'unalgorithme dont le résultat est une suite de caractère (chiffres et lettres).

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Pistes de réflexion pour des applications pédagogiques

Faire signer les élèves sur une feuille et leur faire étudier leur signature :est-elle lisible,illisible ? Pourquoi ?Leur faire étudier la signature de leur parent sur le carnet de correspondance : est-ellelisible, illisible ? Pourquoi ?Quelles sont les particularités de la signature par rapport à un autre texte écrit par la mêmepersonne ?

Quels documents signe-t-on ?Pourquoi les signe-t-on ?À quoi sert la signature ?

Comment valide la personne analphabète ?

Où trouve-t-on des signatures en milieu urbain ? Sur quel support sont-elle faites ? Cettepratique est-elle ancienne ?Avec quel outil signe-t-on actuellement ? À quoi cela sert-il ?

Existe-t-il d’autres formes de validation que la signature ?

Ateliers aux archives départementales (gratuits)

À partir de documents originaux, on peut aborder avec les élèves l’évolution des signes devalidation mais aussi de l’usage de l’écrit parmi la population, en prenant pour exemple celuide la signature.Dans un second temps, on peut utiliser la plume d’oie et l’encre noire, puis le porte-plume etla plume d’acier. Il s’agit par exemple pour l’élève de reproduire une ruche et d’inventer lemonogramme de son prénom.Il peut aussi tracer sa signature puis imaginer une signature avec une représentation liée àson statut d’élève ou en lien avec une activité extra-scolaire.