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Liberté de gestion des collectivités territoriales

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Page 1: Liberté de gestion des collectivités territoriales
Page 2: Liberté de gestion des collectivités territoriales

Le lycée des Arènes à Toulouse.

P o u r les élus locaux,

u n e i n a u g u r a t i o n

est t ou jou r s

l ' a b o u t i s s e m e n t

d ' u n p ro je t

réalisé avec des

pa r tena i res

t e chn iques et

financiers. Spécialisé

dans le financement des

équipements locaux,

le Crédit local

de France

est le principal

partenaire financier

des communes,

des départements,

des régions

et de tous ceux

qui contribuent

au développement

de la vie locale.

Voici pourquoi bien des rubans coupés ! sont tissés avec le Crédit local de France

L e Crédit local

de France

finance A

près d'un

équipement collectif

sur deux et propose à chaque

collectivité des financements

sur mesure adaptés à la diversité

des projets locaux (écoles,

lycées, équipements sportifs,

ponts, tramways, espaces verts...).

Etablissement de référence,

il fonde son partenariat sur

la permanence et le long terme.

En entrant au CAC 40, sélection

des quarante valeurs de la Bourse

de Paris les plus représentatives,

le Crédit local

de France voit

sa stratégie

de spécialisation '

et sa solidité

financière

reconnues

par l'ensemble

des acteurs financiers

français et internationaux. Le tramway de Grenol

deux grandes lig à travers la vi

C R É D I T

L O C A L de

F R A N C E

Le financier du cadre de vie

Page 3: Liberté de gestion des collectivités territoriales

I n t r o d u c t i o n

Cet ouvrage tombe à point nommé: après plus de dix ans d'application et d'évolution des lois de décentralisation, le temps des bilans est, sans aucun doute, venu. La volonté manifestée p a r le gou- vernement de mettre en œuvre une grande politique d'aménage- ment du territoire ne p o u r r a se concrétiser sans l ' intervention massive des collectivités locales; la situation économique et financiè- re nationale, liée aux importants transferts de charges opérés sur les collectivités locales rend l'alourdissement de la fiscalité inévitable mais de moins en moins acceptable pour le contribuable.

Pour ces multiples raisons, traiter sous des éclairages diffé- rents des finances locales, permet à la fois d'approfondir un sujet essentiel, souvent complexe, et de préparer les esprits au débat indis- pensable portant sur les réformes nécessaires.

Ce recueil d'articles offre également le grand avantage de permettre au lecteur de confronter aisément une grande diversité de points de vue d'éminente qualité - ceux de l'élu, du juriste ou du haut fonctionnaire - et d'organiser ainsi un véritable débat d'opi- nions susceptible de donner une vue aussi complète que possible des avis existants.

Ce rôle pédagogique qui permet à chacun en lisant ces pages de découvrir les enjeux et les perspectives, de préciser sa vision du problème, de réfléchir et d'envisager des solutions - en un mot d'être un citoyen éclairé et actif - c'est précisément celui que s'est fixé l'Association Nationale pour la Démocratie Locale.

Elle le remplit à travers les services qu 'elle a mis en place - et tout particulièrement son Bulletin des Elus Locaux et son Institut de Formation - afin d'écouter, d'informer, de former et de conseiller chacun de ceux qui, chaque jour, dans leurs responsabilités locales, construisent le visage de la France de demain.

Avec cette démarche l'ANDL a choisi la voie de la réflexion pour que vive le débat démocratique.

Jean-Franço i s MANCEL Président de l'ANDL

Président du Conseil Général de l'Oise

Député de l'Oise

Page 4: Liberté de gestion des collectivités territoriales

S o m m a i r e

A v a n t - p r o p o s p a g e 7

par le Professeur Jacques Moreau

I .- F i n a n c e s l o c a l e s

e t f i n a n c e s d e l 'E ta t p a g e 17

M F i n a n c e s locales e t f i nances p u b l i q u e s par Christian Pierret page 19 N L ' inc idence é c o n o m i q u e des i m p ô t s l o c a u x par Alain Guengant page 25

II .- F i n a n c e s l o c a l e s

e t " n o u v e l l e s d é c e n t r a l i s a t i o n s " p a g e 3 7

M Le rô l e des a s s e m b l é e s d é l i b é r a n t e s loca les e n m a t i è r e

b u d g é t a i r e par André Chaminade page 39 N C o n c o u r s de l 'Etat a u x Collectivités t e r r i to r i a l e s e t l ib re a d m i n i s t r a t i o n des col lect ivi tés locales

par Christian Poncelet page 55

M Le n o u v e a u p a y s a g e f i n a n c i e r n é de la d é c e n t r a l i s a t i o n par Pierre Richard page 67 N L ' e n d e t t e m e n t des col lect ivi tés loca les

par Philippe Godefroy page 79 N R é f o r m e de la c o m p t a b i l i t é c o m m u n a l e par François Valembois page 97

I I I . - F i n a n c e s l o c a l e s

e t a n a l y s e p a r n i v e a u x p a g e 1 0 9

I P é r é q u a t i o n : a l ibi o u nécess i t é par Thierry Lambert .............................................................. page 111

Page 5: Liberté de gestion des collectivités territoriales

M De la péréquat ion financière du dépar tement par R. Muzellec page 123 M La solidarité in tercommunale dans ses express ions financières par Michel Bouvier page 143 M La longue marche des péréquat ions en t re les communes par Joël Bourdin page 161

IV.- Finances locales et in te rvent ions d iverses

des Collectivités locales page 171

N Interventionisme économique et mondial isat ion de l 'économie: jusqu'à la ruine? par Jean Arthuis page 173 M Action culturelle et finances locales par Jean-Marie Pontier page 179 M Perspectives de la gestion déléguée des services publics locaux par Jacques Blanc page 195 M Les sociétés d 'économie mixte locales : ins t rument de valorisation du pat r imoine des collectivités terri toriales par Vinh Nguyen Quoc page 209

Conclusion page 225

M L'impossible ré forme de la fiscalité locale par Michel Péricard ............................................................... page 227

© 1 9 9 3 E d i t i o n s E c o n o m i c a e t A N D L

Conseiller : Philippe Ricalens Rédacteur en chef: Liliane Ricalens

Concept ion graphique : Michel Spengler (Imagine Communicat ion) Dessin de couverture: Xavier Jacobi

Flashage-gravure : SAGI Imprimé en France par Maulde et Renou.

Dépôt légal: 4ème trimestre 1993 ISBN 2-7178-2581-9

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p a r J a c q u e s M O R E A U

Professeur à l'université de Paris 2 (Panthéon-Assas)

Les articles qui composent ce numéro spécial consacré a u x f inances locales se caractér isent p a r leur diversité. Cette diversité tient d ' abord à l'origine et à la p rofess ion de chaque auteur, et tout lecteur comprendra d'emblée que le même thème, selon qu 'il est t ra i té p a r un élu, p a r

un hau t fonct ionnaire ou p a r un universitaire, cor respond à des préoccupa t ions différentes et prend, p a r conséquent, un contenu variable. Mais ce p r e m i e r

constat, a u demeurant t rès banal, ne rend p a s à lui seul compte de ces quelques quinze contributions agrégées dans ce numéro; eues se distinguent sur tou t p a r leur

objet et p a r leur portée.

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Le souci, partagé par plusieurs, a été de viser large et de brosser un tableau aussi panoramique que possible des fmances des collectivités territoriales, sans privilégier un aspect plutôt qu'un autre; ces articles sont le plus souvent de lecture facile, mais ils offrent à tous ceux qui les aborderont la connaissance des grandes masses, des grands équilibres; ils fournissent des chiffres utiles à retenir et des idées-forces indispensables à connaître de tous ceux qui ont pour rôle d'adopter un budgét, voire de le préparer et de l'exécuter. D'autres contributions sont, au contraire des précédentes, plus spécialisées; elles tendent à éclairer tel ou tel dédale de ce labyrinthe que sont devenues en France les fmances locales contemporaines; ces études plus tech- niques ne doivent pourtant pas rebuter le lecteur, puisque chacu- ne pose des jalons qui devraient aider une réflexion ultérieure, plus approfondie et plus développée, dont ce bulletin pourrait se faire l'écho.

Les deux observations qui précèdent permettent de devi- ner à quoi peut servir cette "introduction générale". Elle se justifie seulement comme plan d'exposition, qui n'obligera pas le lecteur à commencer par le début, ni à terminer par la fin, mais lui indi- quera quel a été le cheminement de ceux qui ont conçu et monté ce numéro spécial. Au fond, cette introduction est une sorte de "guide de lecture" qui marque les quatre étapes de la réflexion.

L'article de Mr Christian PIERRET, qui ouvre le numéro, pose au premier plan et soulève à juste titre la difficulté qui consiste aujourd'hui à définir les "fmances locales", et donc à les mesurer.

Ainsi, par exemple, doit-on y inclure ou non, à partir de séries statistiques très hétérogènes, les masses budgétaires d'éta- blissements publics locaux comme les offices publics d'H.L.M. et les hôpi taux publics (dénommés désormais "établissements publics de santé" par la loi du 31 juillet 1991)? Selon la réponse choisie, - et chacun sait d'excellents arguments militant dans les deux sens, - le total des fmances locales, pour 1990, atteint 931 Mds de francs, ou seulement 624 !

Dans un autre ordre d'idées, l'évolution permet d'enre- gistrer une hausse spectaculaire (+ 70%) des dépenses, de 1984 à 1991, avec une augmenta t ion sens ib lement plus forte des

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dépenses d'investissement (+ 84,3%), et chacun sait que les col- lectivités territoriales réalisent environ les trois quarts des équi- pements collectifs de la France contemporaine.

Si l'on passe aux ressources, n'est-il pas intéressant, - et l'article précité ouvre des perspectives assez inédites, - de savoir, à côté de la solution française et pour mieux l'apprécier, quelles sont les réponses fournies au même problème par les pays scan- dinaves, par l'Italie ou par l'Allemagne?

L'importance de la fiscalité dans l'ensemble des res- sources des communes, des départements et des régions, n'est ignorée de personne, et des études monographiques concernant notamment la taxe professionnelle ou la taxe d'habitation auraient pu parfaitement s'insérer dans la première partie de ce numéro.

Un autre choix a été fait: privilégier le point de vue du contribuable. Tel est le sujet de l'original article de Mr Alain GUENGANT, qui distingue fort opportunément le partage juri- dique ou légal du poids de l'impôt local, et le partage écono- mique ou réel (ce qui peut se lire comme "après transfert de la charge sur des tiers"); sous ces deux aspects complémentaires, l'étude apporte beaucoup, même si, par scrupule scientifique, l'auteur signale la présence de nombreuses sources d'incerti- tudes. Le partage légal est évidemment le fruit des intentions du législateur, donc de l'Etat (par exemple à travers la définition des modes de calcul des bases d'imposition). Quant à l'analyse du partage économique, elle révèle bien des surprises, tant sont multiples les canaux de translation de la charge d'un contri- buable sur d'autres.

Les deux articles que l'on vient de présenter se répon- dent donc harmonieusement, même si le thème à traiter était assez large pour accueillir d'autres contributions, notamment de fmances publiques comparées...

Les dix années de "nouvelle décentralisation" que la France vient de vivre ne pouvaient pas ne pas marquer profondé- ment les finances des collectivités territoriales. Un survol très rapide suffit à s'en convaincre.

En effet, et en premier lieu, dès lors qu'étaient allégées, - sinon abolies - les tutelles de l'Etat, et qu'était pleinement recon-

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nu le droit à "la libre administration des régions, des départe- ments et des communes", en résultait nécessairement la faculté pour les exécutifs locaux de proposer, et pour les assemblées délibérantes d'adopter, la fixation des taux des impôts directs. Sous réserve des quatre cas de contrôle budgétaire et d'un cer- tain lien à maintenir entre taxe professionnelle, foncier bâti et non bâti et taxe d'habitation - manifestations du rôle d'encadre- ment qui reste dévolu à l'Etat - , les collectivités locales devenues autonomes doivent pouvoir librement déterminer le montant des ressources dont elles ont besoin. L'article de Mr André CHAMI-

NADE fait sobrement le point sur cette importante question, qui s'est enrichie depuis l'entrée en vigueur de la loi du 6 février 1992 d'une dimension nouvelle: la nécessaire, - devenue donc obligatoire -, information des administrés.

En second lieu, la décentralisation à la française s'est tra- duite par une politique systématique de transferts de compé- tences, relevant jusqu'alors de l'Etat et devenant progressivement communales, départementales ou régionales, et parfois les trois à la fois. A ces compétences nouvelles, qu'il est superflu d'énumé- rer, doivent correspondre des ressources nouvelles; ces dernières peuvent provenir de deux sources: impôts d'Etat transférés au département ou à la région - dotation de l'Etat, qui a nom dota- tion générale de décentralisation. Il convenait donc d'examiner cet aspect nouveau, mais surtout de le relier à cet ensemble beaucoup plus vaste que sont les concours de l'Etat aux collecti- vités et à leur groupements. En quelques pages que l'on aura tout loisir de méditer, Mr Christian PONCELET maîtrise cette épineu- se question et lui propose une réponse neuve: à des règles du jeu instables, que l'un des partenaires peut modifier (et a effective- ment modifiées) à sa guise, à des mécanismes opaques, com- plexes et illisibles (qui ne respectent donc pas l'autonomie locale avec toutes ses exigences), il faut substituer un véritable "pacte" financier entre l'Etat et les collectivités territoriales, soit un

contrat pluri-annuel de stabilité. Au fond, si l'on a bien compris les suggestions de cet

article, le précédent des "contrats de plan" Etat-région pourrait être généralisé et étendu. Il est d'ailleurs le préalable à toute modernisation de la fiscalité locale. Ajoutons qu'il est inscrit en filigrane dans ce que le législateur a audacieusement appelé "l'Administration territoriale de la République", et dont il consti- tuerait le volet fmancier.

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Sur ce même sujet central, un autre point de vue est développé, qui complète admirablement les précédents, et dont le titre résume clairement la substance: "Le nouveau paysage fmancier né de la décentralisation", dû à la plume de Mr Pierre RICHARD. Quelques belles formules ("les collectivités locales, poids lourds de l'économie française") - un bilan en défmitive plu- tôt optimiste ("le pari gagné de la décentralisation"), mais après les "vaches grasses", le temps des "vaches maigres", et la nécessité alors dépeinte de voir régions, départements et communes affir- mer leur capacité d'adaptation. La vigilance s'impose.

Cette formule est aussi, sauf erreur d'interprétation, la conclusion que l'on pourrait donner à l'article de Mr Philippe GODEFROY, intitulé "L'endettement des collectivités locales". L'auteur montre très bien, sur ce thème limité mais majeur, l'im- portance des changements intervenus depuis le début des années 1980, qu'ils soient dus directement à la décentralisation ou que l'on puisse les imputer aux données nouvelles du marché financier. Les emprunts, par leur volume global, augmentent, mais de moins en moins vite: malgré la liberté, "une progression modérée de la demande de crédit..."; parallèlement l'offre devient "plus pressante" car les collectivités locales sont des clients attractifs. Cependant, les perspectives actuelles sont pré- occupantes. Beaucoup de chiffres, mais surtout beaucoup d'idées en quelques pages...

Enfm, il n'était pas envisageable d'aborder ces techniques budgétaires sans évoquer les règles comptables qui les enserrent. Ce sera le thème de Mr François VALEMBOIS qui évoque la réfor- me de la comptabilité communale; il s'agit d'une modernisation de celle-ci par référence au plan comptable général et qui réaffir- me les principes du droit budgétaire, le rattachement des charges et des produits à l'exercice, la pratique des amortissements et des provisions et la nécessité de la transparence des comptes.

Ici encore cinq articles ne peuvent épuiser un sujet immense, mais ils aiguisent la réflexion de façon tonique.

La troisième partie de ce numéro est composée de ce que l'on pourrait appeler des analyses par niveaux. Mais à quoi servirait une synthèse un peu irréelle, comme les fmances des régions, les fmances des départements? Et quel auteur se lance-

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rait à peindre ou même à esquisser les lignes directrices d'une contribution qui s'intitulerait, en toute modestie et inconscience: les finances des communes!

Le pari r e t enu a été de polar iser cet te analyse par niveaux sous un angle très précis, et qui s'est révélé très fécond: la solidarité, et la technique qui lui est fréquemment associée, la péréquation.

Mr Thierry LAMBERT, dans l 'étude d 'ensemble qu'il consacre à ce thème, se demande si les mécanismes de péréqua- tion mis en place par la législation récente portent ou non attein- te au p r inc ipe de libre administration. Et à cet te quest ion première, il répond, et fort justement de manière nuancée. Il existe une forme de péréquation d'apparence volontaire, c'est la coopération (avec toutes ses variantes, et notamment la création de groupements par application de la règle de la majorité quali- fiée, et de plus ou moins fortes incitations fiscales de la part de l'Etat); existent sans doute aussi des formes récentes de péréqua- tion forcée, - celle créée par la loi du 6 février 1992. Péréquation de quoi? De la taxe professionnelle dans le cadre des communau- tés de villes et des communautés de communes qui le décident, péréquation de la D.G.F aussi, d'une part de celle-ci, pour les départements et pour les communes, et pour certains de leurs groupements. Nécessité alors? Ou alibi, car ne cache-t-elle pas une sorte de prélude au regroupement?

Le complément logique de cette analyse générale est assurée par les trois articles qui suivent. Comment s'effectue la péréquation au niveau du département, telle est l'interrogation à laquelle répond Mr Raymond MUZELLEC. L'auteur commence par cerner, avec beaucoup de doigté, les formes - latente ou apparente - de la péréquation. S'attachant pour l'instant à celle-ci, il montre très clairement qu'il faut distinguer le cas des res- sources propres du département, et celui des ressources exté- r ieures au dépar tement . Dans le p remie r cas, les masses à péréquer dépendent, quant à leur volume, de la politique suivie en matière d'attributions départementales légales: le débit est commandé par la réponse au défi; ceci posé, le département dis- pose réellement d'une liberté de choix, et quelques exemples concrets illustrent parfaitement la démonstration. Dans le second cas, le volontarisme cède la place au déterminisme, à un certain déterminisme tout au moins puisque les règles du jeu sont fixées par le Parlement; ici encore, sur la base des deux cas envisagés

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(établissements exceptionnels et grandes surfaces) Mr Muzellec montre de quelle latitude disposent les élus du département, lati- tude réduite, mais non négligeable.

Assez curieusement peut-être, la fiscalité fournit le critè- re du principal classement entre les divers types d'établissements publics de coopération intercommunale: fiscalité propre (com- munautés urbaines et certains districts), fiscalité dérivée, "addi- t ionne l l e" p o u r les au t r e s . Et p o u r t a n t les f i n a n c e s des groupements de communes sont peu étudiées. L'article de Mr Michel BOUVIER comble opportunément cette lacune. Il oppose à la conception "contributive et spontanéiste" des premiers syn- dicats inter-communaux à la conception "fiscale et intégratrice" des districts et des communautés urbaines, pour souligner enfm le cas particulier que présentent aujourd'hui syndicats d'agglomé- ration nouvelle, communautés de villes et communautés de com- munes; un tableau très synthétique résume la démonstration et souligne l'importance des données financières et fiscales de l'in- ter-communalité.

Enfm la contribution de Mr Joël BOURDIN apporte une touche originale au sujet, en commençant par montrer que l'idée de péréquation n'est pas tellement récente (même si elle est à la mode) et qu'il convient sans doute de ne pas confondre péréqua- tion et solidarité. Ainsi la loi du 3 janvier 1979 instaurant la D.G.E avait-elle prévu une "dotation de péréquation" devant grignoter le maintien des droits acquis. Mais la loi du 29 novembre 1985 a instauré une nouvelle donne, en rupture avec la logique précé- dente. Arrive ensuite la D.G.E., et enfin, avec les réformes de 1991-1992, D.S.U. et D.D.R. D'où un très utile tableau des péré- quations entre communes, dont le montant global est d'environ 26 Mds E D'où les questions qui suivent et que pose l'auteur: quels critères, pour quels bénéficiaires? Richesse et effort, croit- on pouvoir répondre. En réalité, M. Bourdin a raison de souligner que l'on se trouve en face d'un jeu très complexe, dans lequel les deux critères ne sont pas uniformément traités selon les cas d'ap- plication. Tout ceci, pour quels résultats?: "encourageants à la marge"; mais l'auteur de conclure, - comment ne pas le suivre? - il faut simplifier le système en regroupant les procédures.

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Cette dernière partie regroupe quatre articles qui sont autant d'illustrations concrètes de ce à quoi servent les res- sources locales, à savoir les interventions diverses des collectivi- tés territoriales.

L'article de Mr Jean ARTHUIS porte comme titre évoca- teur: "Interventionnisme économique et mondialisation de l'éco- nomie: jusqu'à la ruine". Comme on l'a compris, chaque membre de phrase compte! Les aides directes et indirectes accordées par les régions, les départements et les communes aux entreprises privées sont un vieux thème sur lequel il a été beaucoup écrit. Jusqu'alors régnait une sorte de consensus dans un sujet qui sus- cite plutôt des controverses: à l'Etat la gestion des grands équi- libres et le soutien aux grandes firmes; aux collectivités locales les interventions en faveur des petites et moyennes entreprises. Avec beaucoup de vigueur et d'originalité, M. Arthuis montre combien ce clivage rassurant est obsolète, car il ne prend pas en compte le phénomène économique déterminant des dernières décennies, à savoir la mondialisation de l'économie ou plus préci- sément encore les délocalisations en chaîne vers les zones écono-

miques à faibles coûts salariaux de l'Asie du Sud-Est et de l'Inde et plus récemment vers les Etats de l'Europe de l'Est. Le phéno- mène est d'autant plus alarmant qu'il ne laisse aucun secteur pré- servé, pas même ceux à fort niveau de valeur intellectuelle ajoutée.

Cette donnée sur laquelle la réflexion pêchait par indi- gence ou par conformisme bouleverse tout, puisque forte pour- rait ê t re la t e n t a t i o n des d é c i d e u r s locaux de faire de la surenchère, - surenchère coûteuse ("jusqu'à la ruine") - surenchè- re qui non seulement appauvrirait les collectivités dispensatrices mais encore affaiblirait la solidarité européenne et pulvériserait toute politique cohérente d'aménagement du territoire. D'où ce propos qui n'est paradoxal qu'en apparence: le meilleur instru- ment d'aide aux entreprises risque fort de résider dans la modéra- tion de l'évolution de la charge de la taxe professionnelle.

Très neuve également est la contribution de Mr Jean- Marie PONTIER: "Action culturelle et fmances locales". L'auteur

rappelle au début de son article deux évidences: les interven- tions des collectivités locales dans le domaine de la culture sont

Page 15: Liberté de gestion des collectivités territoriales

relativement récentes, en tout cas bien postérieures à celles de l'Etat, grand Mécène depuis toujours. Par conséquent, elles sont devenues de plus en plus coûteuses. Mais ensuite l'auteur déve- loppe une "analyse par niveau" qui révèle beaucoup, malgré ses difficultés: des communes de plus de 10 000 habitants qui agis- sent de plus en plus dans ce secteur - des départements dont la contribution globale a au moins doublé de 1975 à 1987 - des régions dont le budget culturel est fort variable (l'Alsace y consacre plus de 5%, l'Ile-de-France moins de 1% !). Au travers des très nombreux chiffres cités, fusent trois idées: répartition très inégale des aides entre les différents "volets" de la culture (la musique, l'art lyrique et la danse y occupent la première place; les arts plastiques sont trois fois moins bien lotis; entre ces deux extrèmes, l'animation polyvalente et les livres et bibliothèques) - la montée en puissance du "patrimoine", de sa conservation et de sa mise en valeur - enfin la découverte que, si les associations sont bien les principales bénéficiaires des aides, une sorte de "coopération verticale" se fait jour, régions et départements parti- cipant de plus en plus volontiers aux dépenses communales.

Les deux dernières contributions portent, quant à elles, non sur les secteurs de l'action locale, mais sur ses techniques. Mr Jacques BLANC ("Perspectives de la gestion déléguée des ser- vices publics locaux") éclaire le point le plus sensible des modes de gestion des services publics locaux, la "gestion déléguée". Définition de cette famille de contrats, analyse des raisons - voire des contraintes - qui poussent les collectivités locales à y avoir de plus en plus souvent recours - sources et encadrement législatif et réglementaire. Toutes ces questions sont passées en revue de façon très claire (cf. le tableau et la bibliographie qui complètent les développements), et l'éloge n'est pas mince dans une matière jusqu'alors réputée pour son obscurité - des idées fortes aussi, comme celle de cette course de vitesse entre réglementation communautaire et législation nationale pour encadrer ces tech- niques nouvelles et prometteuses, qui font éclater les vieilles clas- sifications.

Mr Vinh NGUYEN QUOC s'attaque lui aussi à un sujet difficile: les sociétés d'économie mixte locales; il n'a pas privilé- gié le mode d'approche juridique de cette forme de gestion des services locaux dont il est pourtant un des meilleurs spécialistes, pour mettre l'accent sur le rôle de l'instrument. D'où le plan rete- nu: examen de l'objet des S.E.M.L. et de l'exigence de complé-

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mentarité - analyse du financement des S.E.M.L. faite avec clarté, minutie, mais aussi une certaine hardiesse - étude de la gestion des S.E.M.L. enfin et de ses "garde-fous" posés par le législateur et par le juge, avec les limites qu'imposent le droit des collectivités locales mais aussi le droit des sociétés.

Tout voyage a une fm. Tout guide de lecture doit se ter- miner pour enfm permettre au lecteur de se rassasier des mets qu'il a choisis au menu ou à la carte. Il faut donc conclure et de ce fait laisser la place à Mr Michel PERICARD, dont le court billet - "L'impossible réforme de la fiscalité locale" - prend alors toute sa portée. A des enjeux considérables ne peuvent correspondre que des solutions difficiles: un système complexe, parce qu'émiétté - un système fragile dans la mesure où (on l'a déjà noté) les règles du jeu sont décidées par l'Etat - des solutions que l'on recherche, en vain, dans tous les pays développés, depuis un demi-siècle, parce que sont antagonistes les intérêts des contribuables et ceux des collectivités. Par conséquent, - conclusion de la conclu- sion, - la grande réforme est un mythe; mieux valent des aména- gements.

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Finances

l o c a l e s

de l'Etat

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Page 19: Liberté de gestion des collectivités territoriales

F i n a n c e s locales e t

f i n a n c e s p u b l i q u e s

p a r C h r i s t i a n P I E R R E T

Député-Maire de Saint-Dié-des-Vosges Président de la Commission de Surveillance de la

Caisse des Dépôts et Consignations

F i n a n c e s locales, f i n a n c e s p u b l i q u e s : la c o m p a r a i s o n invite à la d r a m a t i s a t i o n .

En 1987, p o u r l a p r e m i è r e f o i s , la f i s c a l i t é locale - 241 mi l l i a rds d e f r a n c s a u t o t a l -

a effect ivement d é p a s s é ce symbole d e la f i s c a l i t é d e l 'Etat q u 'est l ' impôt s u r le r e v e n u - 234 mi l l i a rds d e f r a n c s .

La d r a m a t i s a t i o n n 'est c e p e n d a n t p a s d e m i s e : c o m p a r a i s o n n 'est p a s ra i son . P a r c e q u e la m e s u r e d e s

f i n a n c e s loca les n 'est p a s a isée. P a r c e q u e l e u r évolu t ion e s t contenue.

P a r c e q u e l e u r effet r e s t e le p l u s s o u v e n t pos i t i f .

Page 20: Liberté de gestion des collectivités territoriales

Etudier les finances locales, c'est d'abord les mesurer. Les mesurer, c'est répondre à deux questions : que mesure-t-on et comparativement à quoi le mesure-t-on ? Ces deux questions induisent elles-mêmes deux obstacles méthodologiques : l'obs- tacle de la pluralité à la question de la défmition ; à la question de la comparaison l'obstacle de la pertinence.

B La q u e s t i o n d e l a d é f i n i t i o n :

Plutôt que "Que mesure-t-on ? ", la question de la défmi- tion des fmances locales est " Qui mesure quoi ? " : cette seconde formulation appelle quatre réponses.

La première est celle de la Comptabilité nationale. Les fmances locales sont les comptes des administrations publiques locales, c'est-à-dire des collectivités locales métropolitaines d'une part et d'autre part des organismes divers d'administration locale. Les fmances locales s'élèvent à 624,2 milliards de francs en 1990.

La deuxième est celle de la Comptabilité publique. Les fmances locales sont les comptes du secteur public local: collec- tivités locales d'abord, H.L.M. et hôpitaux ensuite, divers dont outre-mer enfm. Les fmances locales atteignent 931,3 milliards de francs en 1990.

La troisième est celle de la Caisse des dépôts et consigna- tions. Les finances locales sont certes les comptes des administra- tions publ iques locales, mais des comptes retraités afin de réaliser des projections sur l'année en cours. Les fmances locales sont de l'ordre de 666,2 milliards de francs en 1990.

La quatrième est celle de la Direction générale des col- lectivités locales. Les fmances locales sont les budgets primitifs des collectivités locales, tels que les ordonnateurs les ont établis. Le champ variable de cette dernière défmition ne permet pas un chiffre.

M La q u e s t i o n d e l a c o m p a r a i s o n :

La question de la définition des fmances locales achoppe sur une pluralité de réponses en valeurs absolues. La question de la comparaison des fmances locales avec les fmances publiques,

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quant à elle, voit s'altérer la pertinence d'une réponse en valeurs relatives. Ceci pour quatre raisons.

D'abord, comment comparer des fmances de natures dif- férentes? Certes, les collectivités locales et l'Etat connaissent des dépenses semblables: investissement et fonctionnement. Toutefois, seul le second rencontre des dépenses régaliennes et exerce sa fonction budgétaire sous leur contrainte.

Ensuite, comment comparer des fmances de dates diffé- rentes? Les étapes de l'élaboration budgétaire ne sont effective- ment pas simultanées pour les collectivités locales et pour l'Etat. Le budget primitif des unes est voté en mars, le projet de loi de fmances initial de l'autre en décembre.

En outre, comment comparer des finances d'endette- ments différents? L'endettement des collectivités locales ne peut fmancer que des dépenses d'investissement; il est intégralement inscrit dans leur budget. L'endettement de l'Etat, en revanche, peut aussi bien fmancer des dépenses de fonctionnement; seule sa charge d'intérêt est portée dans le budget.

Enfm, comment comparer des fmances qui ne sont pas différentes? D.G.E, D.G.E., fiscalité transférée, crédits budgé- taires, compensations des exonérations sont autant de passerelles entre fmances publiques et fmances locales: des passerelles qui rendent la comparaison non pas impertinente, mais bien redon- dante.

Certes, ces deux obstacles méthodologiques sont patents. Il n'empêche que l'étude des fmances locales, celle des dépenses et celle des ressources, demeure possible à une double condition: une condition de définition et de non-comparaison avec les fmances publiques.

M Les d é p e n s e s :

L'étude des dépenses locales - en l'occurrence l'étude des dépenses des administrations publiques locales, définies par la Comptabilité nationale - peut être réalisée dans une perspecti- ve statique comme dans une perspective dynamique.

D'un point de vue statique, les dépenses de fonctionne- ment constituent le premier poste budgétaire des administrations

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publiques locales: 346 milliards de francs sur 664,8 de total en 1991, soit 52%; salaires et cotisations sociales représentant près des deux tiers de ces dépenses de fonctionnement. Viennent ensuite les dépenses d'investissement - 169,2 milliards de francs en 1991, soit 25,5% - et d'intérêt - 56,1 milliards de francs en 1991, soit 8,4%.

Enfm, les transferts atteignent 93,5 milliards de francs en 1991, soit 14,1%.

D'un point de vue dynamique, l'évolution des dépenses des administrations publiques locales entre 1984 et 1991 semble relativement encourageante. En effet, les dépenses locales ont crû en moyenne de 70,2%: les dépenses de fonctionnement un peu moins, 69,6%; les dépenses d'investissement nettement plus, 84,3%. C'est là le signe à la fois d'une bonne gestion et d'une ges- tion entreprenante. L'évolution contenue des annuités, + 55,8%, vient au surplus conforter une telle analyse.

M Les r e s sources :

Les ressources des collectivités locales se caractérisent en France d'un côté par la singularité de leur structure et de l'autre côté par la modestie de leurs évolutions.

Singularité de leur structure: les ressources des collecti- vités locales en France constituent, il est vrai, un mixte du systè- me scandinave où prévaut la fiscalité locale, du système italien où prédominent les concours de l'Etat, et du système allemand qui fait de la péréquation sa règle. La structure des ressources des collectivités locales en France s'établit ainsi à 45% de produit fis- cal, 35% de concours de l'Etat, 15% d'emprunts et 15% de res- sources émanant du domaine public.

Modestie de leurs évolutions. L'expression peut sur- prendre: quelques cas isolés d'abord et ensuite l'évolution du taux de prélèvements obligatoires des administrations publiques locales définies par la Comptabilité nationale - 4,6% du PI.B. en 1980, 6,2% en 1991 - ont pu laisser penser à une dérive des res- sources des collectivités locales. Il n'en est rien cependant: certes, les ressources des administrations publiques locales, défi- nies par la Caisse des dépôts et consignations, augmentent plus rapidement que le PI.B. ; toutefois, cette augmentation apparaît, le plus souvent, mécaniquement induite par le transfert de com- pétences dont les collectivités locales ont fait l'objet.

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La mesure des fmances locales étant possible, l'évolution des fmances locales étant mesurée: quel est l'effet économique des collectivités locales? Un effet négatif: l'endettement. Un effet positif: l'investissement.

t L ' ende t t emen t :

Contrairement à l'idée trop souvent répandue, l'emprunt des collectivités locales ne pose pas de problème particulier: c'est bien plutôt l'intérêt des collectivités locales qui fait ques- tion.

L'emprunt des collectivités locales, mesuré par la Caisse des dépôts et consignations, atteint 73,2 milliards de francs en 1992: il s'agit là du total des emprunts nouveaux - 71,2 milliards de francs - et du refmancement et des transferts d'encours - 2 mil- liards de francs. Sans doute, l'emprunt des collectivités locales a-t- il crû de 7,6% entre 1991 et 1992. Pourtant, ce taux de croissance, s'il invite au sérieux, n'est pas nécessairement préoc- cupant: entre 1990 et 1991, il était de -2%; entre 1989 et 1990, de -6,3%.

Plus préoccupante est, en revanche, la charge d'intérêt des collectivités locales. L'intérêt de la dette - 15 % des dépenses de fonctionnement - continue de croître à un rythme soutenu de 6,7%. Si le recours aux emprunts nouveaux s'est ralenti sur les années récentes, les flux fmanciers nets - emprunts-rembourse- ments - restent positifs et continuent à alimenter l'encours. De plus, les prêts contractés depuis cinq ans supportent des taux réels élevés; les prêts anciens à taux privilégiés s'éteignant pro- gressivement.

M L ' inves t i s sement :

Ce recours à l'endettement a pour corollaire une crois- sance de l'investissement des collectivités locales. Celle-ci peut s'avérer perverse. Elle est généralement positive.

L'effet pervers de l'investissement peut prendre trois traits principaux. Le premier est l'hypothèse bureaucratique: la nature de l'investissement résulte de la seule mégalomanie des élus locaux, et non pas d'un souci de bonne gestion ou de servi-

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relie que nous connaissons tous, rend les recettes locales et plus précisément le produit de la TP très volatile. La politique d'incita- tion à l'implantation d'entreprises locales devient plus que jamais une priorité.

Enfm et c'est la dernière caractéristique de la situation de la fiscalité locale, aucune autorité territoriale ne maîtrise vrai- m e n t la s i tuat ion. C o n t r a i r e m e n t au p r i n c i p e p o s é p a r la Constitution et aux termes duquel les collectivités territoriales d'administrent librement, la maîtrise des décisions en matière de fiscalité locale appartient au législateur, avec une forte influence du gouvernement. Les situations sont donc imposées à l'autorité locale, qui les subit, qui s'y soumet. Ce procédé confirme le prin- cipe d'inexistence de décentralisation des ressources locales.

Alors évidemment la loi autorise les collectivités à voter

des abattements complémentaires ou des exonérations tempo- raires, mais cela reste marginale.

Les limites sont essentiellement d'ordre politique. En fait choisir l'assise de la fiscalité locale nous conduit à

un véritable drame cornélien.

Les deux pr inc ipaux acteurs conce rnés essayent de défendre leurs intérêts: le contribuable, et celui qui les encaisse. Les intérêts de l'un ne sont pas compatibles avec les intérêts de l'autre.

Le contribuable souhaite bien naturellement une baisse

de ses impôts, et la collectivité, de son côté ne peut en accepter une baisse durable tenue de répondre aux besoins exigés par ce même contribuable. Cette dualité explique la difficulté du choix.

Bien sûr on essaiera toujours dans toutes les tentatives de réforme de la fiscalité locale, de mettre en œuvre un système plus juste. Mais comme il n'est pas possible de déstabiliser les fmances locales cela explique que dans le passé on ait choisi la technique des compensations versées par l'Etat. C'est le cas par exemple de la réduction pour embauches et investissements, ou de l'exonération du paiement du foncier bâti dans les deux pre- mières années suivant une construction neuve. Mais le principe des compensat ions devient très fragile dès lors- que l'Etat se désengage pour des raisons multiples. Nombreuses sont les villes qui ont connu cette situation au cours des trois dernières années.

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Alors on peut comprendre que les réformes entreprises dans la dernière décade ont été soit très t imides soit très politi- sées vo i re idéologiques.

La taxe professionnelle a été aménagée avec la mise en oeuvre depuis 87 d'abattements à la base et la création de la réduction pour embauches et investissements dont il a déjà été question.

En 90 a été décidée la révision des évaluations cadas- trales qui avait un double objectif: rapprocher les valeurs loca- tives du prix du marché et surtout augmenter la pression fiscale pour permettre à l'Etat de se désengager un peu plus. Mais fmale- ment ce projet a été reporté.

Il y eut une tentative de rapprochement de la part dépar- tementale de la taxe d'habitation aux revenus mais là aussi cette

réforme a été ajournée par ses propres auteurs. Mais ce qui aura le plus marqué les années 90 c'est une

nouvelle tentative de réduction des inégalités des richesses fis- cales par la création de la Dotation de Solidarité Urbaine, dont les critères et leurs modes de calculs sont très discutables, (nombre de logements sociaux, nombre d'habitants, potentiel fiscal), ainsi que la Dotation de Développement Rural.

En fait ces procédés n 'ont sans doute pas atteint les objectifs fixés et ont surtout commencé à mettre en difficultés les collectivités contributives.

Ce que l'on peut affirmer finalement c'est que parmi les grandes options possibles, instituer en France un système ana- logue à celui de la Suède où l'impôt sur le revenu permet de financer la fiscalité locale est impensable tant nos mentalités sont imperméables à de telles dispositions. Pourtant l'assise patrimo- niale des recettes locales est discutable, voire largement dépassée dans certains cas. Quel rapport y a-t-il entre, votre volume d'or- dures ménagères et la surface de votre appartement? De nou- veaux critères de calcul s'avèrent donc indispensables.

Mais une implication plus importante de l'usager, qui représente une autre option, crée d'une certaine manière un autre facteur d'inégalité. Enfin, on ne pourra jamais en France empêcher la pression de certains groupes professionnels, qui même légitime, empêche très franchement de mettre en oeuvre une véritable réforme de la fiscalité locale qui conduirait à repen- ser l'intégralité du système