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L'IMPACT DE LA CRISE DE 1997 SUR L'ASEAN+3 : LES APPORTS DE L'ÉCONOMIE POLITIQUE INTERNATIONALE Laëtitia Guilhot De Boeck Supérieur | Mondes en développement 2009/3 - n° 147 pages 123 à 138 ISSN 0302-3052 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-mondes-en-developpement-2009-3-page-123.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Guilhot Laëtitia, « L'impact de la crise de 1997 sur l'ASEAN+3 : les apports de l'Économie Politique Internationale », Mondes en développement, 2009/3 n° 147, p. 123-138. DOI : 10.3917/med.147.0123 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour De Boeck Supérieur. © De Boeck Supérieur. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 195.19.233.81 - 06/01/2014 05h15. © De Boeck Supérieur Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 195.19.233.81 - 06/01/2014 05h15. © De Boeck Supérieur

L'impact de la crise de 1997 sur l'ASEAN+3 : les apports de l'Économie Politique Internationale

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L'IMPACT DE LA CRISE DE 1997 SUR L'ASEAN+3 : LES APPORTS DEL'ÉCONOMIE POLITIQUE INTERNATIONALE Laëtitia Guilhot De Boeck Supérieur | Mondes en développement 2009/3 - n° 147pages 123 à 138

ISSN 0302-3052

Article disponible en ligne à l'adresse:

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Guilhot Laëtitia, « L'impact de la crise de 1997 sur l'ASEAN+3 : les apports de l'Économie Politique Internationale »,

Mondes en développement, 2009/3 n° 147, p. 123-138. DOI : 10.3917/med.147.0123

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L’impact de la crise de 1997 sur l’ASEAN+3 : les apports de l’Économie

Politique Internationale Laëtitia GUILHOT1

epuis la fin des années 1990, l’Asie orientale connaît deux évolutions dans sa réalité institutionnelle : l’une dans le domaine commercial, l’autre dans

le domaine monétaire et financier. Dans le domaine commercial, cette évolution se matérialise par la multiplication des accords bilatéraux au sein de la région. Avant le début de ce siècle (excepté l’accord de libre-échange instauré au sein des pays membres de l’ASEAN2), un seul accord commercial a été instauré : il s’agit d’un accord préférentiel entre le Laos et la Thaïlande signé en 1991. Depuis, "le faible engouement" asiatique en matière d’accords préférentiels commence à se combler, notamment du fait des accords signés par les gouvernements de Singapour, de la Corée du Sud et de la Chine. Mais ces accords ne sont que des accords bilatéraux. La proposition de la part des pays de l’ASEAN+3 (regroupement comptant les dix membres de l’ASEAN, la Chine, la Corée du Sud et la Japon) en 2000 de réaliser une zone de libre-échange est restée lettre morte. Les négociations n’ont pas abouti : le secteur agricole, secteur sensible, est la principale pierre d’achoppement (Suh, 2007). Les initiatives instaurées après la crise de 1997 dans le domaine monétaire et financier mettent en évidence l’émergence d’une coordination institutionnelle au sein des treize pays de l’ASEAN+3 (Figuière et Guilhot, 2006). C’est la première fois qu’une coopération inclut la majorité des pays de la région. L’émergence de cette coordination dans le domaine monétaire et financier (et non dans le domaine commercial) peut s’expliquer par le contexte particulier de l’après-crise (Plummer et Wignaraja, 2006). Les treize pays de l’ASEAN+3, 1 Université Pierre Mendès France Grenoble 2, LEPII (UMR CNRS 5252).

[email protected] 2 L’ASEAN (Association of South-East Asian Nations, Association des nations du Sud-Est

asiatique), créée en 1967, regroupe tous les pays d’Asie du Sud-Est : les cinq membres fondateurs (Indonésie, Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande), le Sultanat de Brunei (1984), le Vietnam (1995), le Laos (1997), la Birmanie (1997) et le Cambodge (1999). L’ASEAN, en 1992, a instauré une zone de libre-échange, l’AFTA (ASEAN Free Trade Area). Les pays membres de l’association se sont engagés à diminuer leurs barrières tarifaires pour qu’elles soient comprises entre 0 et 5%. En 2002, les cinq pays fondateurs et Brunei ont atteint cet objectif. Les quatre nouveaux membres doivent y parvenir en 2012.

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confrontés aux défaillances du système monétaire et financier international et aux politiques d’aide du FMI jugées inefficientes et déstabilisatrices par leurs dirigeants (Stiglitz, 2002), ont concentré leurs efforts dans le domaine monétaire et financier afin d’être mieux armés pour lutter contre une nouvelle crise. Le double objectif de cet article est à la fois d’analyser les origines de la coopération monétaire et financière d’après-crise, interprétée ici comme "le" véritable tournant institutionnel de la région (Beeson, 2003 ; Dieter et Higgott, 2003 ; Kawai, 2007 ; Amyx, 2004) et de mettre en évidence la constitution d’un régime monétaire et financier dans cette zone. Il ne s’agit donc pas d’analyser la crise (causes et conséquences), ni de déterminer si l’Asie orientale est devenue une zone monétaire optimale (Zhang et al. 2004; Kim, 2007), ou du moins, si une coordination des politiques de change entre les pays appartenant à cette région, est possible et souhaitable (Eichengreen, 2002 et 2005). Pour ce faire, cette coopération asiatique peut être interprétée à la lumière de deux concepts bien public international et régime international, issus d’une démarche en économie politique internationale (EPI). L’EPI se présente comme "une tentative interdisciplinaire cherchant à analyser la sphère des relations économiques internationales (…), centrée sur les phénomènes de "richesse", en prenant en compte les articulations avec la sphère du politique (…), centrée sur les phénomènes de "puissance" (Kebabdjian, 1999, 103). L’articulation entre ces quatre dimensions (économique, politique, international et national) peut se faire dans une perspective historique, ce qui permet de mieux comprendre pourquoi, à un moment donné, les relations inter-étatiques progressent. Mobiliser l’EPI permet, en effet, à la fois d’interpréter le moment (depuis la crise de 1997) et le champ (monétaire et financier) de l’institutionnalisation de l’ASEAN+3. Parmi les analyses présentées par les différentes approches en EPI, l’institutionnalisme néo-libéral, s’impose comme l’approche la plus à même de rendre intelligible la réalité institutionnelle de l’ASEAN+3. Les différents courants de l’EPI peuvent être présentés sous forme duale (Kebabdjian, 2006b) : l’approche rationaliste, comprenant les (néo)-réalistes et les (néo)-libéraux et les approches critiques, regroupant toutes les approches s’opposant ou complétant certains postulats de l’approche rationaliste. L’approche rationaliste est la seule à proposer une analyse étatiste de la coopération internationale (Guilhot, 2008). Les approches critiques intègrent généralement d’autres acteurs dans leurs analyses : les classes transnationales dominantes pour les marxistes, les communautés épistémiques pour les constructivistes, les firmes multinationales pour l’école anglaise (Strange). Les deux courants rationalistes fournissent une analyse de la coopération inter-étatique. Cependant, les raisons de cette action collective, ainsi que les modalités de sa production, diffèrent selon les courants. Les (néo)-réalistes insistent sur la recherche de puissance des États dans le cadre d’une coopération impulsée par un hégémon, les institutionnalistes (néo)-libéraux insistent sur l’objectif de richesse ou de bien-être collectif recherché par une coalition de pays.

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L’approche néo-libérale est adaptée pour rendre compte de l’évolution de la réalité institutionnelle, après la crise de 1997, en Asie orientale. La coopération entre les pays de l’ASEAN+3 peut être perçue comme un moyen de résoudre un problème d’action collective. L’objectif affiché par ces pays est de satisfaire un besoin collectif susceptible d’être atteint par la coopération et dont tous les pays vont bénéficier (gains absolus) : la stabilité financière et monétaire régionale. Le concept de bien public international, transposé à l’échelle régionale, permettra de qualifier ce besoin de stabilité monétaire et financière émanant des pays est-asiatiques après la crise de 1997 (partie 1). L’application à l’échelon régional du concept de régime international permettra de définir les modalités de production de ce bien public régional (partie 2). Deux modes de production de ce type de bien sont envisagés par l’approche rationaliste. Les néo-réalistes focalisent leur analyse sur la présence indispensable de l’hégémon qui impose la production de ce bien par sa domination, les néo-libéraux sur la coopération entre pays. Les deux initiatives d’après-crise dans le domaine monétaire et financier, l’Initiative Chiang Mai (ICM) et l’Initiative pour les marchés obligataires asiatiques (ABMI, Asian Bond Market Initiatives), n’ont pas été impulsées par un hégémon international ou régional mais par une coalition d’États. Elles constituent le socle de ce régime régional.

1. LA STABILITÉ FINANCIÈRE ET MONÉTAIRE COMME "BIEN PUBLIC REGIONAL"

En opérant une transposition à l’échelle régionale du concept de bien public international emprunté à Kindleberger (1986), la crise de 1997 peut être interprétée comme un déclencheur de la coopération régionale en Asie orientale. Les différentes initiatives prises après elle traduisent la volonté des treize pays de satisfaire un intérêt commun : l’instauration d’une stabilité monétaire et financière à l’échelle régionale, assimilée ici à la production d’un bien public régional.

1.1 La crise de 1997 et l’affirmation de l’ASEAN+3

Avant de s’intéresser à l’émergence du regroupement ASEAN+3 et à la coopération mise en place au sein de ce périmètre, il convient de revenir sur la crise afin de comprendre pourquoi l’ASEAN+3 s’affirme.

1.1.1 La crise de 1997 : ses causes et ses conséquences socio-économiques

Alors que le rapport de la Banque mondiale "Le miracle est-asiatique : croissance économique et politique publique" (1993) soulignait le rapide développement des pays est-asiatiques, quelques années plus tard, une crise frappe cette région. La littérature sur la crise asiatique et ses causes révèle deux phases. Au moment de la crise, les analyses sur les raisons de son apparition divergent. Certains auteurs dont Camdessus, alors Président du FMI, et Krugman (1998) insistent sur les

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facteurs endogènes (crise du capitalisme asiatique), d’autres, comme Radelet et Sachs (1998 a et b) et Aglietta (1998), se focalisent sur les facteurs exogènes (instabilité intrinsèque de l’économie capitaliste mondiale). Quelques années plus tard, un consensus sur ses causes, mêlant des facteurs exogènes et endogènes se dessine (Nicolas, 2001 ; Hugon, 2001 ; Arès, 2002). De cette seconde phase, quatre facteurs majeurs peuvent être retenus : deux internes (faiblesse des systèmes bancaires et faible encadrement des capitaux) et deux externes (la crise du Japon et l’ancrage au dollar). À partir du début 1997, les monnaies de différents pays asiatiques font l’objet d’attaques spéculatives. Le gouvernement thaïlandais est le premier à céder. La crise éclate en Thaïlande le 2 juillet 1997. D’autres pays est-asiatiques vont, par la suite, être emportés par ce tourbillon (effet domino). Les conséquences économiques et sociales de cette crise sont sans précédent pour la région, notamment en Indonésie, Thaïlande, Corée du Sud et Malaisie. Les faillites et les vagues de licenciement ont des répercussions sociales dramatiques sur les populations locales dont une partie non négligeable va redescendre sous le seuil de pauvreté. Outre ces effets sociaux négatifs, ces pays doivent supporter le coût budgétaire du renflouement et de la reconstruction de leur secteur bancaire et financier et faire face à la pire récession jamais connue dans cette région (Fukasaku et al. 2005). Le recul du taux de croissance pour la majorité de ces économies en 1998 est net. L’Indonésie accuse une baisse de son PIB de 13,2%, la Thaïlande de 10,4%, la Malaisie de 7,5%, la Corée du Sud de 6,7%. La crise financière s’est muée en crise économique et en crise politique, pour certains pays comme l’Indonésie ou la Malaisie. La surveillance et les politiques d’aides du FMI, jugées inefficientes et inadéquates, comme l’absence de coopération régionale, affectent les populations et les gouvernements. Le mécanisme de prévention par l’information, instauré après la crise mexicaine de 1994, n’a pas fonctionné. Les politiques du FMI (austérité budgétaire et resserrement de la politique monétaire) ont eu des impacts contre-productifs et récessifs dans les pays asiatiques aidés. Elles ont été jugées inappropriées par rapport aux problèmes rencontrés dans ces pays, provenant plus des acteurs privés que des gouvernements (Beeson, 2003). L’exemple de l’Indonésie est le plus représentatif. Les pressions exercées par le FMI pour que le gouvernement indonésien ferme seize banques commerciales et supprime les subventions à une série de biens de consommation expliquent, pour partie, l’agitation sociale de mai 1998 (Nicolas, 1999). La crise a également soulevé le problème de la coopération régionale. Certes, lors du premier semestre 1997, les banques centrales des dix pays membres de l’ASEAN ont participé à une opération de soutien de la monnaie thaïlandaise, déjà affectée par des attaques spéculatives (Nicolas, 2001), mais lors du déclenchement de la crise, aucune action collective d’entraide n’a été menée. Les dix membres se sont repliés sur eux-mêmes. Cette absence de réponse

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commune a également été constatée vis-à-vis de l’APEC3. Comme le soulignent Dieter et Higgott (2003), l’APEC, dépourvue de ressources financières propres mais porteuse d’un projet d’intégration entre les pays d’Asie Pacifique, aurait dû fournir, au moins aux pays touchés, une expertise de la crise. Les conséquences socio-économiques de la crise, les dispositifs défaillants de surveillance du FMI et ses politiques inappropriées conduisent les dirigeants des pays est-asiatiques à prendre conscience que ni le FMI, ni les actions individuelles ne peuvent résoudre une crise. Les institutions régionales existantes ne sont pas organisées collectivement pour venir en aide aux pays affectés, ce qui aurait pu donner un signal fort aux marchés et éviter un retrait massif des capitaux. Les dirigeants des treize pays décident donc qu’en plus des réformes nationales mises en place (restructuration du système bancaire et amélioration de l’encadrement des capitaux), ils doivent instaurer, à l’échelle régionale, un processus collectif permettant de faire face aux défaillances du système monétaire et financier international. Cette initiative serait alors complémentaire à celle réalisée au niveau international et permettrait aux économies d’être mieux armées pour affronter une nouvelle crise régionale de ce type, c’est-à-dire qu’elle devrait à la fois assurer un dispositif de surveillance et une offre de liquidité, mais aussi une assistance technique, pour améliorer les structures des marchés financiers est-asiatiques (Guilhot, 2008).

1.1.2 La crise : un tournant dans la coopération régionale en Asie orientale avec l’affirmation de l’ASEAN+3

Cette nouvelle perception de la coopération s’est traduite par la mise en place de sommets informels entre treize pays asiatiques, c’est-à-dire, entre les dix pays membres de l’ASEAN, la Chine, la Corée du Sud et le Japon. Leur premier sommet se tient en décembre 1997 lors du sommet de l’ASEAN à Kuala Lumpur. C’est lors de la réunion des ministres des Finances des treize pays, en mars 1999 à Hanoi, que l’appellation "ASEAN+3" a été largement utilisée et diffusée. La première déclaration conjointe sur la coopération est-asiatique entre les treize pays a lieu lors du troisième sommet informel, en novembre 1999 à Manille. Elle marque l’institutionnalisation de ce groupement. Les dirigeants des treize pays instaurent des coopérations dans plusieurs domaines (économie, finance, santé, environnement…). La plus marquante est celle réalisée dans le domaine monétaire et financier. Elle révèle un tournant historique dans la région (Figuière et Guilhot, 2006). Cette volonté de coopérer dans le domaine monétaire et financier afin de se prémunir contre de nouvelles

3 L’APEC, acronyme anglais de la Coopération économique d’Asie Pacifique créée en 1989,

regroupe 21 pays se trouvant sur les côtes atlantique et pacifique (Australie, Brunei, Canada, Corée du Sud, États-Unis, Indonésie, Japon, Malaisie, Nouvelle-Zélande, Philippines, Singapour, Thaïlande, Chine, Hong Kong, Taiwan, Mexique, Papouasie-Nouvelle Guinée, Chili, Pérou, Russie et Vietnam).

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crises peut être assimilée à la volonté de produire une stabilité régionale monétaire et financière.

1.2 Le besoin de stabilité comme “bien public régional”

La question du bien public est liée à celle de la souveraineté nationale. Les États, au sein de leur territoire, produisent ce type de biens. Certains relèvent uniquement de l’autorité ou de la crédibilité de l’État (monnaie, justice, défense nationale…). L’importance des coûts de leur mise en place justifie la prise en charge par l’État. Il est le seul acteur à pouvoir financer un bien librement accessible à tous (Siroën, 2000). Ce concept a été transposé par Kindleberger (1986) au niveau international. Le bien public international (BPI) est un "ensemble de biens accessibles à tous les États qui n’ont pas nécessairement un intérêt individuel à les produire" (Siroën, 2000, 86). L’intégration croissante des économies conduit à modifier l’échelle de la production de certains biens collectifs, comme les biens sanitaires, environnementaux, éducatifs, culturels… Il convient alors de déterminer le périmètre pertinent de leur production. Comme le souligne Kebabdjian (1994, 273), "un grand problème pour la théorie des biens collectifs, un problème du reste très souvent négligé par les économistes, est celui de la construction des ensembles de collectivités pertinentes." Ces BPI sont produits au niveau international, dans le sens global (regroupant l’ensemble des pays) ou dans le sens régional (regroupant un ensemble de pays appartenant à la même zone géographique). Pour de nombreux biens comme l’environnement, la santé publique, la stabilité financière, les transports, les réseaux électriques, la police,… le périmètre régional peut être considéré comme le niveau pertinent et optimal de production (Cook et Sachs, 2002). L’approche par les BPI, transposée à l’échelle régionale, permet de parler de biens publics régionaux (BPR). Appliquée à la région est-asiatique dans une perspective néo-libérale, elle explique les raisons de l’émergence d’une coopération dans le domaine monétaire et financier. La coopération après crise au sein de l’ASEAN+3 visant à instaurer des dispositifs de prévention et de résolution des crises à l’échelle régionale peut être considérée comme la volonté de produire un bien public régional : la stabilité financière et monétaire. La stabilité monétaire fait référence à la recherche de stabilité des prix des actifs, y compris, et d’abord, des taux de change. La stabilité financière peut être définie comme celle des institutions financières (établissements bancaires et non bancaires) et des marchés financiers (Crockett, 1997). Les conséquences socio-économiques et les défaillances du système monétaire et financier international apparaissent comme la raison principale à l’action collective mise en place après la crise en Asie orientale (ADB, 2008). La contagion de la crise à l’ensemble de la région a fait prendre conscience aux gouvernements est-asiatiques que les avantages de la coopération sont supérieurs à ses coûts (Jin, 2003). Cette perception de la coopération s’inscrit dans le cadre institutionnaliste néo-libéral : le regroupement d’un ensemble de

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pays cherchant à répondre collectivement à un objectif commun, le besoin de stabilité financière et monétaire régionale. Le concept de BPR permet de qualifier cet intérêt commun.

2. UN RÉGIME RÉGIONAL POUR STABILISER LA ZONE

Deux modes de production d’un bien public sont identifiés dans la littérature : la présence d’un pays leader ou la création d’un régime. Comme la production de ce BPR en Asie orientale repose sur une coopération entre treize États et non pas sur l’impulsion d’un seul pays, la possibilité que ce bien public régional s’appuie sur l’instauration d’un régime international à l’échelle régionale, désormais "régime régional", est donc envisagée dans un premier paragraphe. La transposition à l’échelon régional du concept de régime international, issu de l’approche néo-libérale de la théorie des régimes internationaux (TRI) (Keohane, 1984), permet de tester, dans un second paragraphe, l’hypothèse selon laquelle les deux initiatives phares de la coopération monétaire et financière après crise (l’ICM et l’ABMI) peuvent être considérées comme le socle du régime régional mis en place au sein de l’ASEAN+3.

2.1 Une modalité de production d’un bien public international : le régime

L’approche réaliste de la TRI affirme que seul l’hégémon international peut impulser une coopération internationale (Gilpin, 1987). L’approche néo-libérale de la TRI explique que la production d’un ordre, c’est-à-dire la présence d’institutions qui assurent la fourniture de biens collectifs, peut s’appuyer non seulement sur la présence d’un pays hégémonique mais aussi sur la coopération entre pays. Dans cette perspective, une action collective peut alors se faire sans la présence de l’hégémon (Keohane, 1984). La coopération monétaire et financière a été impulsée par un ensemble de pays d’Asie orientale qui veulent satisfaire collectivement un intérêt commun, leur stabilité financière et monétaire et non par une seule puissance (internationale comme les États-Unis ou régionale). La question du périmètre de cette coalition d’États ou du groupe de pays moteur à cette coopération n’est pas soulevée ici. Néanmoins, des travaux antérieurs (Figuière et Guilhot, 2005 et 2008; Guilhot, 2008) ont permis de montrer que les actions de la Chine et du Japon, ainsi que leurs poids respectifs dans la région, laissent penser que ce régime repose sur une distribution asymétrique des pouvoirs au profit de ces deux pays. Les modalités de production du bien public que ces treize pays souhaitent mettre en place ne peuvent être interprétées alors qu’au regard du concept de régime international. La définition canonique de ce dernier, énoncée par Krasner (1983, 2), étant trop générale, ne peut servir à l’évaluation d’une situation donnée. Parce qu’elle réalise une synthèse des définitions proposées

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par l’approche rationaliste en EPI et la complète en intégrant les apports de l’approche constructiviste sur les régimes internationaux, la caractérisation du régime international réalisée par Berthaud (2006, 93-95) sera retenue et transposée à la situation est-asiatique. Elle se fonde sur cinq éléments.

1. Une procédure inter-étatique Les principes, règles, normes et procédures sont définis seulement par les États. Un système de règles ou de bonne conduite mis en place par des acteurs non étatiques ne pourrait être assimilé à un régime international.

2. Une coopération visant à normaliser ou à résoudre un problème d’action collective Deux types de régimes sont à distinguer. Dans le premier, relevant d’une logique de normalisation, les États visent à "adopter des standards communs permettant ou facilitant les activités, notamment en diminuant les coûts de transaction". Il s’agit de répondre à un conflit de préférence. Stein (1983) le qualifie de régime de coordination. Le second répond à un problème d’action collective, "donc à des conflits d’intérêts et non à une simple hétérogénéité des préférences pour réduire les coûts de transaction." Stein (1983) parle de régime de collaboration dont la constitution a pour objectif de réaliser un gain inaccessible unilatéralement.

3. Une coopération dans un domaine donné des relations internationales (issue area) Les États identifient un problème commun à résoudre dont seule l’action collective est susceptible d’apporter une réponse efficace. Le régime se limite alors à un domaine particulier des relations internationales.

4. L’effectivité du régime Selon Berthaud (2006, 95), "son effectivité repose sur des règles à effet indirect qui laissent aux États participants des libertés (…) pour en internaliser les effets, c’est-à-dire pour s’y adapter." Comme le souligne Kebabdjian (2006 a et b), tout mode de régulation internationale s’appuie sur des règles. Leur niveau de contrainte et leur impact sur les territoires nationaux permettront d’évaluer l’effectivité d’un régime international, c’est-à-dire sa capacité à infléchir le comportement des acteurs publics et privés.

5. La dimension "connaissance" du régime Une caractérisation complète des régimes internationaux doit prendre en compte les travaux constructivistes, troisième approche de l’EPI traitant des régimes internationaux. Une propriété supplémentaire à celles retenues par les approches réalistes et libérales doit être introduite : celle de la connaissance du problème d’action collective (Hasenclever et al. 1997). Selon Haas (1992), cette connaissance du problème et des solutions à apporter peut être réalisée par le travail d’une communauté épistémique, c’est-à-dire par un réseau d’experts possédant une compétence reconnue dans un domaine particulier. Ces derniers évaluent, grâce à leurs connaissances, le contour du problème et permettent, via leurs rapports, un apprentissage collectif du problème.

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Ces cinq éléments permettent de saisir les principales caractéristiques d’un régime international. Cette analyse sera transposée à l’échelle régionale afin de montrer que la coopération initiée après crise par les pays de l’ASEAN+3 peut être assimilée à la formation d’un régime régional en vue de produire un bien public régional, la stabilité financière et monétaire.

2.2 L’émergence d’un régime régional au sein de l’ASEAN+3

Les deux premiers critères peuvent facilement être testés. Les modalités des deux initiatives instaurées après la crise, l’ICM et l’ABMI, correspondent, en effet, à de la coopération inter-étatique. Les États des treize pays sont les seuls acteurs à prendre part à ces mesures. Cette coopération entre États relève, par ailleurs, d’une logique de résolution d’un problème d’action collective et non d’une logique de normalisation. Après la crise de 1997, les dirigeants des treize pays se rendent compte que leurs économies ont un problème commun, la stabilité financière et monétaire au niveau régional, auquel ils peuvent apporter une réponse collective. La coopération peut donc être interprétée comme un moyen pour réaliser un gain (la stabilité) inaccessible unilatéralement. Cette situation correspond à la mise en place d’un régime de collaboration, pour reprendre les termes de Stein (1983). Les trois derniers critères (respectivement le domaine de spécialisation, l’effectivité du régime et la dimension connaissance) font l’objet, ci-après, d’une analyse plus détaillée.

2.2.1 Le régime régional spécialisé dans le domaine monétaire et financier

La coopération régionale en Asie orientale, réponse régionale à la crise dans la sphère monétaire et financière, amène à qualifier ce régime régional d’issue area, c’est-à-dire, spécialisé dans un domaine donné des relations internationales. Cette coopération thématique se focalise sur trois initiatives majeures : 1) la mise en place de mécanismes de surveillance, 2) la création d’une offre de liquidité régionale et 3) le développement des marchés obligataires asiatiques. La première mesure se développe de manière autonome ; elle est rattachée, par la suite, à l’initiative Chiang Mai. Elle sera, par conséquent, présentée dans le cadre de l’ICM, qui comprend les deux dispositifs (surveillance et liquidité). L’ICM, comme volet "monétaire" du régime, et l’ABMI, comme volet "financier", vont être développées successivement, en soulignant comment chacune répond aux besoins de stabilité financière et monétaire voulue par les treize pays.

1. Le volet monétaire du régime : l’Initiative Chiang Mai Selon la déclaration commune des ministres des Finances des pays de l’ASEAN+3 publiée en mai 2000 lors de la réunion annuelle de la Banque asiatique de développement (ADB), tenue à Chiang Mai en Thaïlande, les treize pays ont reconnu la nécessité d’établir une coopération régionale pour répondre aux besoins de liquidités à court terme au sein de la région et compléter les

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arrangements financiers internationaux existants. Cette initiative comporte deux volets. Le premier porte sur le renforcement des échanges d’informations et de surveillance, le second sur l’amélioration de l’offre de ressources. Le projet de renforcement des échanges d’informations et de surveillance a émergé quelques temps après la crise. L’interdépendance économique entre les treize pays révélée par la crise a mis en évidence la nécessité de renforcer les échanges d’information et de contrôler les variables clés entre les treize économies. Un dispositif s’est alors instauré en novembre 1999, connu sous le nom ASEAN+3 Economic Policy Review and Dialogue Process (EPRDP) (Fukasaku et al. 2005 ; Kawai, 2007). Ce mécanisme de surveillance est intégré officiellement à l’ICM en mai 2005, lors de la 8ème Réunion des ministres des Finances de l’ASEAN+3. En mai 2008, les ministres se sont accordés sur l’idée de renforcer les mécanismes de surveillance, en proposant, notamment, deux mesures : l’augmentation des fréquences des dialogues et le développement d’un format standardisé pour les rapports d’information. L’offre de ressources s’appuie, d’un part, sur l’extension d’un accord de swaps à toutes les banques centrales des pays de l’ASEAN (ASA, ASEAN Swap Arrangement). Les cinq membres fondateurs (Thaïlande, Indonésie, Philippines, Malaisie et Singapour) avaient mis en place, en août 1977, un dispositif de soutien pour les pays qui rencontraient des difficultés avec leur balance des paiements (Park, 2003). Ce dispositif a été étendu aux cinq nouveaux membres en 2000. Le montant des ressources accordées en cas de difficultés a été augmenté, passant de 200 millions à un milliard de dollars en novembre 2000, puis à 2 milliards en mai 2005 (site Aric4). Cette offre de liquidités s’appuie sur l’instauration de 16 accords bilatéraux de swaps entre les banques centrales des pays membres de l’ASEAN et les trois autres pays (Park, 2003). En juillet 2007, les montants relevant de ces accords atteignent 83 milliards de dollars, auxquels s’ajoutent les 2 milliards alloués par l’ASA. Ces accords visent à fournir à un pays signataire confronté à une forte instabilité monétaire (déficit de sa balance des paiements), des ressources supplémentaires, en compléments des fonds versés par le FMI5. Deux principales limites de l’ICM doivent être mises en avant. La première concerne l’insuffisance des fonds prévus (Plummer et Wignaraja, 2006). À côté des 3 200 milliards de dollars de réserves de change détenues par les pays de la région fin 2007, les 83 milliards de dollars octroyés par les accords de swaps peuvent être considérés comme marginaux. La Chine et le Japon possèdent, à eux deux, plus des trois quarts du stock de réserves de change de la région en décembre 2007 (respectivement 1528,3 milliards de dollars et 952,8 milliards de dollars). Ces deux économies se placent en situation de prêteur en dernier ressort de la région et en leader lors de la multilatéralisation de l’ICM.

4 http://aric.adb.org/initiativetable.php?iid=71&ssid=2&title=ASEAN%20Swap%20

Arrangement%20(ASA), consulté le 10/12/08 5 Seuls 20% des fonds peuvent être débloqués sans l’accord du FMI.

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La deuxième limite de l’ICM concerne les difficultés d’activation rapide des facilités en cas de crise (Park, 2003 ; Amyx, 2004). En mai 2006, les treize pays adoptent une procédure de décision collective pour l’activation des swaps, première étape de la multilatéralisation de l’ICM. L’accord sur une mise en commun des réserves entérinera cette multilatéralisation en mai 2007. Lors de la déclaration conjointe des ministres des Finances de mai 2008, un consensus sur les modalités de cette multilatéralisation se dessine. Les treize ministres s’accordent sur le montant des réserves mises en commun (au moins 80 milliards de dollars dont 80% financés par la Chine, la Corée du Sud et le Japon), les conditions d’accessibilité des emprunts et le mécanisme d’activation. Cette multilatéralisation de l’ICM marque un pas important dans la coopération monétaire de l’ASEAN+3. L’annonce faite par les treize pays le 24 octobre 2008, avant l’ouverture du sommet de l’ASEM (Asia-Europe Meeting), de créer un Fonds Monétaire Asiatique (FMA) au cours du premier semestre 2009, formalise implicitement le renforcement de l’ICM. Ce dernier s’est concrétisé lors du 12ème sommet annuel des ministres des Finances de l’ASEAN+3, en mai 2009. Les treize gouvernements ont confirmé l’instauration de cette initiative, qu’ils nomment Multilatéralisation de l’Initiative Chiang Mai (MCIM, CMIM acronyme anglais), d’ici fin 2009. Le montant des contributions est porté à 120 milliards de dollars et les modalités réaffirmées. La volonté formulée lors du dernier sommet par les treize pays de multilatéraliser les accords de swaps, mais aussi de renforcer le mécanisme de surveillance, va ainsi entraîner, de facto, la création d’un FMA entre les pays de l’ASEAN+3.

2. Le volet financier du régime : l’Initiative pour les marchés obligataires asiatiques

Les dirigeants des États de l’Asie orientale ont conscience que pour renforcer la stabilité financière et monétaire de la région, ils doivent améliorer la structure de leurs marchés. Le gouvernement japonais, en décembre 2002, demande que ces évolutions se fassent sous l’impulsion d’initiatives régionales, notamment via l’Initiative des marchés obligataires asiatiques, l’ABMI. Ce dispositif, instauré officiellement en août 2003 à Manille, vient compléter la coopération monétaire initiée au sein de l’ASEAN+3 et représente le deuxième pan du régime régional est-asiatique. Cette initiative vise à rendre les marchés des obligations des pays membres plus efficaces et plus liquides, en permettant une meilleure utilisation de l’épargne asiatique pour les investissements asiatiques. Elle vise aussi à réduire les disparités entre devises (Nicolas, 2007). Son objectif est donc de renforcer la stabilité financière de la région, en cherchant à solutionner certains problèmes considérés comme étant à l’origine de la crise de 1997. Les activités de l’ABMI se concentrent, d’une part, sur le développement des marchés primaires et secondaires des obligations en favorisant une large variété d’émetteurs et de produits (accent mis sur l’offre) et, d’autre part, sur l’amélioration des structures de ces marchés (Shirai, 2006).

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Quatre ans après le lancement de l’ABMI, la taille des marchés obligataires en monnaie locale des pays émergents de la région (Japon exclu) a été multipliée par de 2,5. En juin 2007, la capitalisation des marchés obligataires en monnaie locale s’élève à près 3 000 milliards de dollars contre 1 202 milliards de dollars en 2003. Elle est supérieure, en volume, à la capitalisation des marchés libellés en dollars (17% de plus en 2007). Une forte croissance des marchés obligataires de certains pays est-asiatiques est constatée. Par exemple, sur les six premiers mois de 2007, le marché obligataire du Vietnam a connu une croissance de 44%, celui de la Chine de 13% et celui de la Malaisie de 12%6. L’ABMI semble jouer un rôle non négligeable dans le renforcement et l’approfondissement des marchés obligataires est-asiatiques. Il contribue à la construction d’un système asiatique plus stable, ce qui a cruellement fait défaut lors de la crise de 1997 (Yap, 2007). Cette initiative s’intègre pleinement dans la volonté de stabiliser financièrement et monétairement la région. La présentation des deux initiatives, l’ICM et l’ABMI, montre que la coopération au sein de l’ASEAN+3 dans le domaine monétaire et financier s’est fortement développée. Chacune des mesures apporte des éléments à la production de la stabilité financière et monétaire voulue par les économies de la région. La situation est-asiatique va maintenant être évaluée à la lumière de la quatrième propriété du régime international.

2.2.2 L’effectivité du régime régional est-asiatique

L’effectivité d’un régime monétaire et financier ne doit pas seulement se manifester par un possible déclenchement des accords de swaps7 mais aussi par une internalisation des règles à effet indirect (Kebabdjian, 2006b). Étant donnée l’hétérogénéité des niveaux de développement de la région, le but est à la fois de fournir aux pays asiatiques une assistance technique afin d’évaluer leur situation économique et politique et d’élaborer les mesures nécessaires à mettre en place selon les pays. L’objectif n’est pas de les contraindre à intégrer stricto sensu des pratiques. Par exemple, le Cambodge, en 2006, adopte de nouvelles lois afin de développer son marché obligataire, incluant une loi sur les obligations d’État et d’entités non étatiques. La Chine autorise le développement de nouveaux produits, comme les swaps de taux d’intérêt. Les mesures prises par le gouvernement thaïlandais vont dans ce sens en autorisant des entités étrangères installées dans un des treize pays de l’ASEAN+3 à émettre des obligations en Baht (AFMM, 2006).

6 Données fournies dans Asian Bond Monitor (2007). 7 Aucune crise n’ayant déstabilisé la région depuis la création de ce régime, nulle facilité

provenant de ces accords n’a encore été débloquée. Néanmoins, la conclusion d’un accord de swap d’un montant de 6 milliards de dollars entre le Japon et l’Indonésie en août 2005, au moment où la roupie indonésienne subissait quelques pressions, a permis de tempérer le comportement des marchés financiers et de stabiliser la roupie (Sa et Guérin, 2006). Ces accords émettent un signal fort en direction des marchés financiers qui semble suffire à stabiliser leurs comportements et à éviter toutes attaques spéculatives.

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2.2.3 La cinquième propriété : la dimension "connaissance" du régime régional est-asiatique

Dans ce régime régional, différents groupes de travail ont été mis en place (EPRDP, dans le cadre de la surveillance et du partage de l’information de l’ICM et les groupes de travail au sein de l’ABMI), ayant tous pour vocation de renfoncer la coordination et le partage de l’information au sein de ces pays. L’ASEAN+3 Research Group, créé en août 2003, sur proposition japonaise, peut être considéré comme le groupe d’experts (think thanks) de cette coopération monétaire et financière. Il a été crée après le début du processus, mais il aborde les problèmes dans une perspective plus globale. Il se concentre sur l’ensemble du processus et non sur une des initiatives instaurées. Il explore les différents moyens pour renforcer la coopération financière et promouvoir la stabilité dans la région en s’appuyant sur les travaux académiques des différents pays membres. Il recense, puis diffuse, les connaissances, afin d’offrir des solutions aux pays membres. Lors des différentes déclarations ministérielles annuelles, les pays membres de l’ASEAN+3 réaffirment officiellement que ce groupe apporte, via ses études, une meilleure compréhension de la coopération financière dans la région. Lors de la déclaration ministérielle conjointe de 2008, les pays membres rappellent l’utilité de ce groupe de recherche et de ses publications, mises en ligne sur le site de l’ASEAN, de l’ADB et des pays membres.

CONCLUSION

Deux enseignements se dégagent d’ordre analytique et méthodologique. Au plan analytique, la conclusion porte sur l’instauration d’un régime monétaire et financier régional au sein de l’ASEAN+3. Cette coopération doit permettre, selon les gouvernements de ce groupement, de faire face à trois éléments qui ont fait défaut lors de la crise de 1997 : des mécanismes de surveillance efficients, une offre de liquidité rapide et sans conditions et des structures de marché renforcées. Elle doit, cependant, faire l’objet de nouveaux approfondissements pour répondre à une crise de l’ampleur de celle de 1997. Sur le plan méthodologique, les résultats de l’analyse montrent la pertinence de la transposition à l’échelle régionale des concepts initialement conçus à l’échelle internationale. La réalité régionale ne nécessite donc pas de concepts spécifiques. Les relations régionales, dès lors qu’elles ne se situent pas dans un cadre bilatéral et qu’une proximité géographique est révélée, ne sont qu’un cas particulier des relations internationales.

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