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MARCHAND AMANDINE
N° DOSSIER : 0402285S
LITTERATURE DE JEUNESSE :
A LA DECOUVERTE D’UN AUTRE
MODE DE VIE.
CENTRE IUFM DE MACON
Sous la direction de Mme THOUVENIN
Année 2005-2006
1
SOMMAIRE
INTRODUCTION. .....................................................................................................p. 3
I. PRÉSENTATION DU PROJET : DÉCOUVRIR UNE AUTRE CULTURE.
..............................................................................................................................................p. 4
1. Modes de vie, cultures. .............................................................................................p. 4
a) définition, programmes officiels. ............................................................p. 4
b) choix du projet du point de vue de l’enseignant, définition des axes de
recherche ..........................................................................................................................p. 6
c) présentation du premier projet au élèves : lecture longue d’un roman en
CM1. ..................................................................................................................................p. 10
d) présentation du projet en CE1-CE2. .....................................................p. 10
2. Les réactions au projet. ..........................................................................................p. 12
a) les obstacles inhérents au projet : le travail sur le lexique, une nécessité.
............................................................................................................................................p. 12
b) les obstacles attendus. ..............................................................................p. 14
c) les « surprises » : questions inattendues et problèmes insolites de la part
des élèves. ......................................................................................................................p. 15
3. Sensibilisation à une culture étrangère inconnue. .......................................p. 16
a) en CE1 ..........................................................................................................p. 16
b) en CE2 .........................................................................................................p. 18
c) en CM1 .........................................................................................................p. 19
2
II. LA PRISE DE CONSCIENCE D’UNE AUTRE FACON DE VIVRE.
.......................................................................................................................................p. 20
1. D’abord, familiariser les élèves à une autre façon de vivre. ...................p. 20
a) proposer des textes différents et riches. .....................................................p. 20
b) utiliser le support de l’image. ........................................................................p. 22
c) aller au-delà des obstacles : exercices proposés au CM1. ....................p. 23
d) reconnaître le réel et l’imaginaire. ..............................................................p. 25
2. Prise de conscience des différences. ...........................................................p. 26
a)le projet de présentation des CE1-CE2. .....................................................p. 26
b) comprendre la différence et pouvoir l’expliquer : raconter la suite, CM1
.....................................................................................................................................p. 28
c) découvrir une réalité inconnue : exercice des CE1.................................p. 29
3. Approfondissement : se mettre à la place de l’autre. ............................p. 30
a) le projet d’écriture des CM1. .......................................................................p. 30
b) l’implication des élèves. .............................................................................. p. 33
CONCLUSION. .................................................................................................p. 34
BIBLIOGRAPHIE. ............................................................................................p. 35
ANNEXES
3
INTRODUCTION.
Actuellement, on reproche beaucoup à l’école primaire de se replier de plus en plus sur
elle-même, de s’exclure du monde extérieur. L’école est alors perçue comme un microcosme
indépendant du monde « réel », dont les élèves sont soigneusement tenus à l’écart.
Dans une société de plus en plus uniforme, où le mode de vie occidental anéantit peu à
peu les particularismes culturels d’autres pays, une telle attitude de la part de l’école pourrait
paraître dangereuse. Au contraire, les Programmes officiels en France donnent à l’école primaire
le rôle de préserver ces particularités. Le but est de présenter aux élèves un panel des plus variés
de ce que la Terre compte de modes de vie, et de lui montrer que la culture occidentale, si elle est
aujourd’hui prédominante, n’est pas pour autant la seule référence possible.
C’est en fait suite à une interrogation personnelle que je me suis lancée dans cette
recherche. Après une lecture de l’ouvrage Reine du Fleuve d’Eva Ibbotson, qui figure dans la liste
officielle du cycle des approfondissements, je me suis rendue compte que les descriptions qui y
figuraient, tant du milieu naturel que de la façon d’y vivre à l’époque où est censée se dérouler
l’histoire, étaient bien souvent dignes d’un ouvrage documentaire.
Ce fut pour moi, ayant une formation universitaire en histoire-géographie, le rappel d’un
vieux souvenir : après tout, n’utilise-t-on pas les textes de l’amour courtois pour savoir comment
vivaient les cours féodales ? Pourquoi un ouvrage fictif ne pourrait-il pas nous renseigner sur la
vie du peuple qu’il raconte ?
Les élèves ont naturellement du mal à se décentrer de leur propre point de vue, de leur
monde. De nombreux auteurs ont démontré l’égocentrisme des jeunes enfants, qui peut vite virer
à un ethnocentrisme si l’école ne leur permet pas d’explorer d’autres modes de vie. En résulte le
danger d’une véritable uniformisation de notre façon de vivre, aux détriments des spécificités
locales. Il s’agit donc d’encourager l’élève à prendre en compte l’altérité, le point de vue de l’autre,
en essayant même de se l’approprier.
Il semble primordial, à notre époque où individualisme et racismes en tous genres se
répandent de plus en plus dans nos sociétés, de permettre à nos élèves, « citoyens du monde »,
responsables de l’avenir de leur planète, de vivre dans une ouverture d’esprit caractérisée par une
tolérance à l’égard des autres qui ne leur sera pas forcément inculquée dans l’univers privé
familial. Mieux connaître l’autre, c’est la première façon de le respecter.
Comment la littérature de jeunesse peut-elle permettre la découverte de lieux, de
populations, de cultures, de modes de vie finalement, inconnus du plus grand nombre des élèves,
afin de les amener à être pleinement ces “citoyens du monde” ?
4
I. PRESENTATION DU PROJET : DECOUVRIR UNE AUTRE
CULTURE.
1. Modes de vie, cultures.
a) définition, programmes officiels.
L’école républicaine française a d’abord, et longtemps, prôné pour ses élèves une
unification autour d’une conscience nationale qui n’admettait que peu la différence. Si c’est dans
cette volonté d’unité du peuple français qu’elle a certes été créée, il serait dangereux aujourd’hui
de s’en tenir à cette base. La société française a évoluée, l’école a dû changer avec elle.
Les programmes officiels parus en 2002, qui régissent nos écoles actuellement, se tiennent
dans cette ligne d’évolution de l’école primaire en France.
Ils précisent en effet que l’école doit d’abord permettre aux élèves de se construire
comme sujet, « de se positionner, de s’affirmer en se respectant et en respectant les autres »1.
C’est en apprenant à connaître les autres que l’enfant se découvre lui-même, qu’il peut
décider de ses actions en toute connaissance de cause. Au-delà d’une pacification de la société par
une meilleure connaissance de tous ses membres, la compréhension des autres permet à l’enfant
de découvrir qui il est, et de se situer en tant qu’un parmi les autres. L’école permet à l’enfant de
se situer, en tant qu’individu propre, parmi tous ceux qui l’entourent, autres enfants ou adultes.
Une partie entière des programmes des cycles 1 et 2 est d’ailleurs réunie sous le titre
évocateur de « Découverte du monde ».
Au cycle 2, on précise que le travail doit permettre à l’élève « d’explorer des espaces plus
diversifiés et lointains2 ». On ne se limitera plus à la découverte du monde proche, mais on
élargira la connaissance à d’autres cultures plus lointaines. L’enfant s’est construit par rapport à
ceux qui l’entouraient, on lui ouvre à présent un champ plus grand de réflexion. Il découvre
qu’au-delà des différences existant dans la société dans laquelle il évolue, il existe des sociétés
complètement différentes, des lieux où rien n’a la même signification que chez lui, des peuples
pour qui les valeurs ne sont pas forcément les mêmes que les siennes. Le but de l’école, à cet
instant, est d’abord que l’élève prennent conscience de ces divergences, qu’il s’interroge à leur
sujet, sans accepter une interprétation a priori, une attitude qui pourrait conduire à de la
discrimination ou de la dépréciation de ce qu’il découvre.
1 Qu’apprend-on à l’école maternelle ? 2005-2006, les Programmes, CNDP/ XO Editions, 2005, p. 93. 2 Qu’apprend-on à l’école élémentaire ? 2005-2006, les Programmes, CNDP/ XO Editions, 2005, p. 28.
5
L’objectif premier est d’amener une prise de conscience des élèves: il faut qu’ils s’interrogent,
qu’ils ne rejettent pas en bloc les valeurs qu’ils découvrent. On ne lui demande aucunement
d’adhérer à ce qu’il découvre, uniquement d’accepter que cette façon de penser ne soit pas a
priori meilleure ou pire que la sienne.
Dans la partie traitant de l’éducation civique au cycle 3, il est dit : « Écouter l’autre est une
première forme de respect et d’acceptation de la différence. Ce respect de la différence, dans la
mesure où il ne porte pas atteinte aux valeurs universelles des droits de l’homme, a de multiples
autres occasions de s’exercer (…) »3.
En clair, l’école primaire en France doit encourager à la connaissance et au respect de
chacun, quelques soient ses particularités, et donc son origine. Respect et tolérance sont les
points-clés de ce « programme »: au terme d’une véritable graduation tout au long de sa scolarité
élémentaire, on a cherché à élargir de plus en plus le monde de référence de l’élève, pour l’amener
finalement au monde entier.
Il ne s’agit plus seulement, au cycle 3, d’accepter qu’il existe une autre façon de faire que
la sienne, mais de faire un véritable effort de compréhension d’autrui. On amène l’élève à
s’intéresser à l’opinion des autres, à lui accorder une certaine valeur, et pourquoi pas à tenter de se
mettre à leur place.
Les IO précisent que ce respect de la différence n’est pas l’objet d’un « cours » unique et
disciplinaire, mais que tous les divers champs disciplinaires doivent permettrent de l’aborder, de
le découvrir, de le mettre en pratique. Ainsi, il est dit que l’histoire et la géographie ou les arts
permettent aux élèves de mieux comprendre les différences culturelles.
Mais quels aspects de la culture sont envisagés dans cette perspective ? Comment les
programmes officiels eux-mêmes définissent-ils la « culture » que chaque élève est en droit de
découvrir au cours de sa scolarité ?
Dans les programmes de découverte du monde de cycle 2, on prône la description de « la
diversité des milieux et des modes de vie (habitat, nourriture, vêtement, moyen de transport,
formes de végétation et de vie animale) »4.
Mais c’est surtout dans les passages traitant de l’apprentissage d’une langue étrangère
qu’est vraiment définie la notion de culture, que l’élève doit découvrir en lien avec la langue
étudiée : « traits significatifs des modes de vie (habitat, codes vestimentaires, habitudes culinaires,
3 Qu’apprend-on à l’école élémentaire ?op.cit, p. 172
4 Qu’apprend-on à l’école élémentaire ? Op.cit., p. 117
6
célébrations de fêtes…) »,« usages quotidiens, médias, noms de lieux ou d’objets spécifiques,
manifestations culturelles adaptées aux possibilités des élèves », mais aussi folklore, légendes,
contes, chants et comptines du pays concerné. En résumé, la culture est avant tout définie
comme tout ce qui fait la vie quotidienne des habitants du pays concerné.
Si la découverte du monde et les langues étrangères semblent être des vecteurs privilégiés
pour découvrir d’autres façons de vivre, elles ne sont cependant pas les seules disciplines
permettant de découvrir ces différences culturelles. Les arts, musique et arts visuels, sont
évidemment des supports possibles. Alors, la littérature est-elle le meilleur vecteur possible pour
découvrir une autre culture ?
b) choix du projet du point de vue de l’enseignant, définition des axes de
recherche
La littérature de jeunesse me semble présenter de nombreux avantages pour aborder la
découverte d’une autre culture avec des enfants.
Tout d’abord, elle permet d’introduire des concepts, des réalités nouvelles, tout en
apportant les référents indispensables à leur compréhension par les élèves. Anne Taylor5 explique
que « l’étude d’autres sociétés et d’autres cultures, dans un cadre scolaire, rendra les enfants plus
tolérants que leurs parents. Cette sensibilisation pourra être améliorée si l’on donne aux enfants
des lectures sélectionnées avec discernement », c'est-à-dire qui n’appartiennent pas à un passé
trop lointain. Les enfants doivent pouvoir s’identifier aux personnages, reconnaître leurs
réactions.
En effet, il est reconnu que l’enfant a besoin de s’appuyer sur des référents, des choses
qu’il connaît déjà, pour pouvoir ensuite assimiler des nouveautés. C’est l’avantage de la littérature
de jeunesse, qui va souvent prendre comme personnage un enfant de l’âge de ceux qui lisent
l’ouvrage. Il est alors plus facile pour l’élève de s’identifier à ce personnage et de comprendre ce
qu’il vit.
Jean-Paul Guichard explique qu’ « il est nécessaire qu’existe une communauté de
références entre le monde de l’auteur et celui du lecteur, mais que dans le même temps, un écart
suffisant entre ces deux univers référentiels impose un travail d’interprétation qui permette
5 Anne Taylor, Culture et matérialisme : la littérature a-t-elle encore un rôle a jouer ?, in Jean Perrot,
Culture, texte et jeune lecteur, Actes du Xe Congrès de l’International Research Society for Children’s
litterature, Presses Universitaires de Nancy, 1993.
7
d’accéder aux sens du texte »6. Présenter aux élèves des livres parlant d’un enfant de leur âge fait
appel à leurs références quotidiennes, leur permettent de comprendre ses réactions, ses pensées.
Mais dans le même temps, le fait que l’histoire se passe dans un autre pays, dans une autre
culture, impose une distance entre ce personnage et les élèves, qui doivent faire un effort
d’interprétation pour le comprendre.
On peut assimiler cela à la théorie de Vygotsky, applicable en fait à toutes les situations
d’apprentissage. Selon lui, il faut proposer à l’enfant des tâches qui lui permettent de combler
l'écart (zone proximale de développement) entre ce qu'il peut faire à l'aide de son entourage et ce
qu'il peut réaliser seul. C’est ainsi que l’enfant peut progresser.
En choisissant correctement un ouvrage de littérature pour ses élèves, l’enseignant peut
donc lui proposer un support, déjà partiellement connu, mais dans lequel il reste des points à
découvrir. Grâce à l’abondante littérature de jeunesse qui existe, on est donc quasiment assuré de
trouver des ouvrages correspondants à la zone proximale de développement des élèves avec
lesquels on envisage de travailler.
Partir à la découverte d’autres cultures au travers de la littérature de jeunesse paraît donc
au premier abord une situation intéressante, puisqu’elle semble répondre aux exigences de la
lecture de textes littéraires.
Le plus grand nombre des ouvrages de littérature de jeunesse sont des ouvrages purement
fictionnels, ce qui pourrait être un inconvénient pour étudier des façons de vivre que l’on veut
réelles. Si le but visé est de découvrir un autre mode de vie, il faut aborder la littérature comme
une histoire fictionnelle dans un cadre réel.
C’est ce que l’on va travailler avec les élèves : le personnage n’existe pas, mais il aurait pu
existé. Il est bon d’expliciter ce point avec les élèves. Par exemple, dans l’ouvrage que j’ai proposé
aux CE2 pour découvrir l’Amazonie, Dans la forêt vierge, un paragraphe de la partie documentaire
suivant le texte narratif expliquait que « Nombreuses sont les tribus qui vivent dans la forêt, mais
Karik, le chaman et leur tribu sortent de l’imagination des auteurs. Néanmoins, toutes les espèces
présentées dans ce livre existent bel et bien et peuplent les forêts tropicales d’Amérique du Sud.7»
Les personnages sont inventés, mais les lieux, les animaux, les habitudes… sont réelles. Nous
avons pu en discuter collectivement avec les élèves, en cours d’étude du livre, et faire la différence
6 Jean-Paul Guichard, Le livre disparu, lecture plurielle d’un album au cycle III, in Lire des textes littéraires au
cycle III, CRDP d’Auvergne, 1998.
7 Judy Allen et John Butler, Dans la forêt vierge, L’école des Loisirs, Paris, 1995, p. 26.
8
entre réaliste et réel, notamment par un travail de classement entre les éléments réels et les
éléments inventés par l’auteur que les élèves ont eu à effectuer.
Finalement, le fait que tout ne soit pas réel dans l’ouvrage de fiction peut même être un
avantage. En effet, le livre de littérature permet d’instaurer une certaine distance entre le lecteur et
la réalité, qui peut permettre d’aborder avec les élèves des thèmes peut-être parfois plus
« difficiles » qu’on ne l’aurait fait avec un documentaire. Le livre se pose comme un médiateur
rassurant pour l’enfant : quand les choses sont trop dures pour lui, il lui reste l’alternative de
fermer le livre, de se dire que c’est une histoire inventée. Il ne faut pas en effet sous-estimer la
sensibilité de certains enfants. « Par les fictions qu’elle propose avec des enjeux qui ne nous
mettent pas en péril, la lecture d’œuvre « littéraires » permet l’expérience à distance de la vie, la
compréhension du monde et des autres.8 », explique Michel Amrein. Ainsi, en CE2, une élève
ayant lu un conte dans le cadre du projet personnel sur l’Inde développé plus loin, explique
qu’elle n’a pas apprécié ce livre car certains personnages étaient « méchants avec le roi », le
personnage principal. L’élève peut donc se dire que tout ça ne s’est pas réellement passé. Malgré
tout, elle sait que si l’histoire est inventée, son cadre est réel ; cela ne l’empêche donc pas
d’apprendre des choses sur les coutumes du pays concerné.
Ce qui nous intéresse donc ici, c’est en fait la dimension symbolique de la littérature.
Cette dernière ne se contente pas d’être une simple représentation du réel, c’est ce qui fait la
richesse du texte littéraire. L’auteur réinvente le réel, et chacun peut y trouver une interprétation
différente. Le texte est ouvert à plusieurs hypothèses ; le lecteur est actif et doit faire un véritable
travail pour s’approprier l’ouvrage.
Ce qui aurait pu apparaître ici comme un handicap, puisque nous cherchons à interroger
le réel à partir de la littérature de jeunesse, est donc finalement son plus grand avantage : chaque
lecteur y trouvera un sens qui lui est propre. C’est une occasion supplémentaire de démontrer aux
enfants que chacun a ses références propres, en fonction de sa culture ou de ses lectures.
Si, par exemple, un élève issu d’une minorité culturelle est présent dans la classe, il va
peut-être, là où les autres élèves n’auront qu’une lecture au premier degré d’un ouvrage sur sa
culture, pouvoir interpréter des références qui seront inconnues des autres, et accéder à un autre
degré de compréhension. C’est l’occasion de faire ressortir ses différences lors de débats par
exemple.
8 Michel Amrein, Lire au cycle III, in Lire des textes littéraires au cycle III, op.cit, p.19.
9
L’ouvrage fictionnel possède à mon sens un dernier avantage sur les divers supports qui
permettent d’étudier d’autres cultures : c’est son côté attractif. Il ne fait pas de doute que l’histoire
fictionnelle en fait un support attrayant, motivant pour les élèves, qui veulent savoir ce qui va se
passer. Ils sont attirés par la fiction, mais au passage, ils peuvent découvrir des faits réels si
l’ouvrage choisi le permet. La littérature de jeunesse, si l’on prend soin de bien choisir ses
ouvrages, associe donc l’aspect ludique à l’aspect « documentaire », ce qui en fait un support
particulièrement apprécié des élèves.
J’en veux pour preuve l’expérience menée avec la classe de CE1-CE2 que j’ai eu lors de
mon deuxième stage en responsabilité. J’ai présenté aux élèves des ouvrages divers, du
documentaire au roman, en passant par le conte traditionnel ou l’album, traitant tous d’une autre
culture. Pour chaque ouvrage lu, les élèves devaient remplir une petite fiche : avaient-ils apprécié
le livre ou non ? Pourquoi ? Avaient-ils appris quelque chose de nouveau sur le pays qu’il
mentionnait ?… Le but était que chacun présente au reste de la classe, à chaque fin de semaine,
l’ouvrage qu’il avait préféré, ce qu’il y avait appris, en essayant de convaincre les autres qu’il était
intéressant à lire.
De fait, les élèves ont, pour beaucoup, manqué de temps pour faire ce travail personnel,
et très peu ont pu présenter des livres à leurs camarades. Ce qui semble malgré tout ressortir de
leurs observations, c’est qu’ils ont en majorité choisi des ouvrages assez courts, quitte à en lire
plusieurs, mais surtout que les ouvrages fictionnels ont été beaucoup plus souvent empruntés que
les documentaires. Cela ne les a pas empêché d’apprendre des choses sur le pays découvert,
comme le prouve leurs annotations.
Il faut cependant nuancé cette constatation. Le fait que les élèves se soient spontanément
tournés vers les ouvrages fictionnels signifie peut-être simplement qu’ils sont plus familiarisés
avec ce type de documents. Il ne faut pas négligé la pression de certains adultes, pour lesquels lire
certains livres, comme des documentaires ou des bandes dessinées par exemple, ce n’est pas lire
de « vrais livres ».
Il semble donc que le fait de partir de la lecture d’un texte littéraire permette réellement
de faire découvrir un nouveau mode de vie aux élèves, tout en permettant d’intéresser le plus
grand nombre grâce à un support attractif. Or, c’est bien le but de l’école que de « faire réussir
tous les enfants en développant au maximum tous leurs talents, en leur ouvrant des perspectives
motivantes »9.
9 Qu’apprend-on à l’école élémentaire ? Op.cit., p. 14.
10
c) présentation du premier projet au élèves : lecture longue d’un roman en CM1.
Lors de mon premier stage en responsabilité, en CM1, j’ai décidé de travailler
simultanément sur trois pistes. Le projet principal partait de la lecture d’un texte long, le roman
Lhala de Calcutta de Daniel Hénard10. Ce livre relate les aventures d’un jeune indien, Lhala, dont la
sœur attrape une maladie typique, le mal des rizières. On va suivre ses pérégrinations à travers
l’Inde, son but étant de ramener les médicaments qui sauveront les yeux de sa sœur. Au travers de
ce livre, j’escomptais que les élèves découvrent non seulement l’aspect physique de l’Inde, mais
aussi les particularités d’une société organisée, aujourd’hui encore, d’une façon radicalement
différente de la nôtre, par son système de castes et sa religion polythéiste très prégnante.
Il s’agissait également pour les élèves de découvrir la vie quotidienne d’un enfant de leur
âge appartenant à la classe moyenne en Inde, et par ce vecteur, de découvrir des aspects
symboliquement différents de leur vie : l’habillement, les habitudes quotidiennes… La finalité de
ce projet, qui n’a pas été révélée immédiatement aux élèves, était d’écrire, à leur tour, une histoire
qui se passerait dans un autre pays et devrait être réaliste. Les élèves se sont réellement impliqués
dans ce projet d’écriture, d’autant plus qu’il était finalisé par la réalisation d’un objet réel, un livre,
en parallèle avec une séquence d’arts visuels et un travail en TICE.
En parallèle à ce projet, les élèves ont pu découvrir certains contes traditionnels indiens,
dont l’un, Rama et Sita, a été plus spécifiquement travaillé que les autres, pour finir par établir une
comparaison avec les contes traditionnels européens qu’ils avaient étudiés auparavant.
Et toute cette découverte s’est donc accompagnée d’un travail en arts visuels découlant de
l’observation des illustrations de certains albums traitant de l’Inde. Après avoir collectivement
décrit certaines reproductions, les élèves ont pu mettre en avant certains points qui semblaient
récurrents dans l’art asiatique. Ils ont alors eu pour tâche d’illustrer l’histoire qu’ils étaient en train
d’écrire en respectant les critères qu’ils avaient dégagés, comme par exemple l’utilisation
fréquente de couleurs vives, la graphie particulière employée, ou encore l’invention de
personnages mi-hommes mi-animaux, dont les traits et les couleurs ne respectaient pas forcément
la réalité.
d) présentation du projet en CE1-CE2 : lecture oralisée et présentation d’un travail
collectif.
Pour mon deuxième stage en responsabilité, je pensais continuer à travailler sur la
civilisation indienne, afin de pouvoir établir un parallèle avec le travail effectué en cycle 3, mais
10 Daniel Hénard, Lhala de Calcutta, Sylemna Andrieu, 1997, Bonneuil.
11
des dispositions matérielles m’en ont empêchée. En effet, je n’ai pas réussi à disposer de séries
d’ouvrages traitant de l’Inde pour pouvoir conduire mon projet initial, que j’ai donc modifié.
J’ai décidé, ayant un double niveau, de traiter simultanément deux civilisations
différentes : celle de l’Afrique pour les CE1, à partir de l’album Tibili, le petit garçon qui ne voulait pas
aller à l’école11, et celle de l’Amazonie pour les CE2, en travaillant principalement sur l’ouvrage déjà
mentionné, Dans la forêt vierge12. L’ouvrage des CE1 traite d’un petit garçon africain, qui cherche
auprès des animaux de la jungle le moyen de ne pas être obligé d’aller à l’école. Il permet surtout
de développer avec les élèves les thèmes de la faune et la flore du pays, et est un point de départ
pour traiter de la vie quotidienne d’un enfant de leur âge vivant en Afrique. L’ouvrage proposé
aux CE2 est plus complexe, à mi-chemin entre narration et documentaire puisque toute une
partie finale est consacrée à une description des plantes et animaux de la forêt vierge,
accompagnée d’un texte distinguant ce qui, dans la partie narrative, est réel, de ce qui a été
inventé. La partie narrative en effet traite d’un jeune garçon, Karik, soumis à une épreuve par le
chaman de sa tribu. Il doit rapporter l’objet le plus beau et le plus précieux de la forêt vierge pour
devenir un homme et être autorisé à porter les peintures de sa tribu. Il faut cependant noter que
certains spécialistes ne considèrent pas de tels ouvrages, alliant narration et documentaire, comme
de la littérature.
Le principe du projet a été exposé aux élèves dès le premier jour : chaque groupe allait
devoir présenter son travail à l’autre, c’est-à-dire en premier lieu lui lire son album, mais
également pouvoir répondre aux questions qui allaient apparaître chez les auditeurs. Les élèves
ont paru très motivés par ce challenge, ravis qu’une finalité « réelle » soit offerte à leur travail.
Certains élèves étaient cependant un peu stressés à l’idée de devoir lire devant les autres. Un élève
de CE1, en particulier, est venu me voir pour me dire « Tu sais, moi je ne sais pas bien lire ». Il
m’a donc fallu rassurer les élèves, leur assurer que nous allions nous entraîner, jusqu’à ce que tous
y arrivent. Et effectivement ils y sont tous parvenus.
Pour que la présentation soit efficace, il est vite apparu comme une nécessité aux élèves,
et sans que j’aie besoin de le mentionner, d’organiser une aide à la lecture qui expliquerait le
lexique inconnu par un dessin et quelques mots d’explications.
Ce sont les CE2, bloqués dès la première page par le mot « chaman », qui ont émis l’idée
en constatant qu’ils ne trouvaient pas le terme dans la plupart de leurs dictionnaires ; les CE1,
11 Marie Léonard, Andrée Prigent, Tibili, le petit garçon qui ne voulait pas aller à l’école, Magnard Jeunesse, Paris,
2001.
12 Dans la forêt vierge, op.cit.
12
bien que ne travaillant pas avec les CE2, ont entendu l’idée et l’ont réutilisée quand eux-mêmes
ont été bloqués par le mot « marigot ». La différence est que les CE1 ont, beaucoup plus que les
CE2, fait appel aux images pour comprendre le lexique. Ils ont donc eu nettement moins de
difficultés à comprendre le texte, qui bien sûr était également plus simple que celui des CE2.
2. Les réactions au projet.
a) les obstacles inhérents au projet : le travail sur le lexique, une nécessité.
En choisissant d’aborder des modes de vie inconnus des élèves par l’intermédiaire de la
littérature de jeunesse, il m’est vite apparu évident que le passage par une étude du lexique était
indispensable, même si elle n’était pas suffisante. Dans tous les projets figurait donc une partie
« lexicale » plus ou moins développée selon le niveau.
En CE1 et CE2, ce sont les élèves qui ont apporté l’idée de présenter leurs connaissances
sous formes d’affiches. Le travail s’est fait en trois temps.
Le premier temps était collectif : pendant la première lecture du livre, nous avons fait
collectivement une liste des mots qu’il leur semblait utile d’expliquer pour que les auditeurs
puissent comprendre la lecture. Ce sont les mots qu’eux-mêmes, au cours de leurs lectures,
avaient eu besoin d’expliciter collectivement. Nous avons tenté de voir, par une discussion
collective, ce qu’il faudrait inscrire sur ces affiches pour qu’elles puissent être utiles aux auditeurs.
La première chose mentionnée a été la définition, mais cela posait problème à quelques élèves qui
ont judicieusement fait remarquer que tous les mots ne figuraient pas dans leur dictionnaire.
Nous avons donc remplacé « définition » par « explication en quelques mots ». Certains élèves de
CE2 ont alors fait remarquer que les CE1 n’auraient « pas le temps de lire en même temps qu’ils
écoutaient » et qu’ils n’allaient « rien comprendre ». Ils ont alors décidé d’ajouter des dessins
explicatifs.
Lors de la discussion collective des CE1, les mêmes idées sont ressorties très rapidement ;
même s’ils étaient normalement occupés par un autre travail pendant la discussion des CE2, je
pense qu’ils avaient entendu ce qui s’était dit, et qu’ils ont répété la même chose. Ils n’ont pas
cherché d’autres idées.
Dans un deuxième temps, les élèves sont passés à la réalisation de leurs affiches. Le travail
était individuel, mais dans une recherche de complémentarité. Chaque élève s’est « inscrit » pour
se charger de la réalisation d’une ou deux affiches. Il devait d’abord rédiger son explication au
brouillon, la faire corriger une première fois par son voisin pour éliminer le plus d’erreurs
possible. Après ma correction, il pouvait recopier ce texte sur une feuille de couleurs, format A4
ou A5 au choix, en faisant attention à la lisibilité (ce qui a été difficile pour certains élèves qui
13
n’arrivaient pas à écrire gros et bien). Enfin, il dessinait et colorait le dessin accompagnant le
texte. Même si nous avions enlevé la contrainte d’une définition exacte, de nombreux élèves se
sont sentis rassurés par le fait de chercher la définition du dictionnaire plutôt que d’inventer un
texte descriptif. Cela a donc nécessité, surtout pour les CE1, un rappel de l’utilisation du
dictionnaire, car ils étaient nombreux à chercher les mots un peu au hasard.
Dans un troisième temps à nouveau collectif, les élèves ont dû s’organiser seuls pour
imaginer la présentation de leurs affiches. Malheureusement, une fois encore, les CE1 n’ont pas
cherché à se démarquer des CE2. Ces derniers ont vite eu l’idée d’agrafer leurs fiches sur de
grands cartons, en tenant compte des couleurs pour essayer de les disposer de façon artistique.
Pour les CE1, cela s’est révélé plus compliqué, car une grande partie avaient choisi des feuilles de
la même couleur.
Chez les CE2, cette volonté artistique s’est accompagnée, pour organiser leurs fiches,
d’une volonté logique : ils ont essayer de mettre ensemble, au maximum, les animaux d’un côté,
les plantes de l’autre, les habitations et les personnes… Il y a donc eu un travail de
conceptualisation qui ne s’est pas fait avec les CE1.
Avec les CM1, le projet était plus ambitieux et imposé dès le départ. En effet, en raison de
la structure de l’ouvrage, un roman long, il n’était pas possible de distinguer ainsi, sur trois
semaines, les phases de recherche et de réalisation. De même, de par l’ampleur du livre, il n’était
matériellement pas possible de consacrer une feuille à chaque mot défini, et d’accrocher ensuite
cette affiche dans la classe. Il fallait donc trouver un moyen de s’organiser différemment. Pour
cela, nous avons décidé de fabriquer un dictionnaire, ce qui convenait totalement au projet
puisque la finalité n’était pas une présentation orale mais une production d’écrit.
Au fur et à mesure de la lecture collective de l’ouvrage, nous avons donc noté, sur un
paperboard, les mots inconnus dans notre civilisation, que nous essayions de définir tous
ensemble. C’était à chaque fois un élève qui, sous la dictée de ses camarades, était chargé d’écrire
la définition finale élaborée par tous. Dans ce travail, nous n’avons pas vraiment travaillé à partir
du dictionnaire, mais plutôt, dans la plupart des cas, par utilisation du contexte, du livre.
Ainsi, nous avons travaillé tant un savoir, le nouveau lexique, qu’un savoir-faire :
expliquer un mot nouveau par comparaison avec des choses connues, par déduction à partir d’un
texte.
Ce dictionnaire, par la suite, a servi d’outil aux élèves dans leur production d’écrit,
puisqu’ils pouvaient s’y référer librement pour rechercher l’orthographe d’un mot ou,
simplement, pour rechercher un mot dont ils ne se souvenaient plus et dont ils avaient besoin.
14
Ainsi, quand une élève est venue me voir pour me demander « comment s’appelle le vêtement
que porte les femmes indiennes », j’ai pu la renvoyer au dictionnaire. Ce travail m’a semblé
intéressant, car d’une part il prouve aux élèves la permanence de l’écrit, mais en plus, il leur a
permis de gagner en autonomie puisqu’ils n’avaient pas à repasser par moi à chaque interrogation.
b) les obstacles attendus : le polythéisme, la structure particulière de la société
indienne, les rites de passages…
Si ce travail sur le lexique m’a paru indispensable quelque soit le niveau des élèves et la
civilisation découverte, il est à mon sens loin d’être suffisant pour réellement « découvrir un
nouveau mode de vie ». Comme on l’a vu dans la première partie, la définition d’une culture,
selon même les Programmes officiels, est bien plus vaste qu’une simple considération lexicale.
Il me paraissait donc évident de devoir travailler, en supplément à cette lecture directe, à
partir d’exercices de compréhension sur certains points qui me semblaient particulièrement
« épineux ». En ce qui concerne les CE1, j’avais pris garde de ne pas choisir une civilisation trop
radicalement différente de la nôtre dans ses fondements, afin de ne pas dépasser leurs possibilités
de compréhension. Je pensais orienter le travail surtout sur la différence du niveau de vie d’un
enfant en Afrique et en Europe, les faire fonctionner par une comparaison de leur propre vie.
Comme je le montrerai par la suite, cette phase a été beaucoup plus difficile à mettre en place que
je ne l’avais prévu, en particulier car d’autres problèmes se sont posés que je n’avais pas imaginés.
Avec les CE2, j’ai choisi volontairement d’étudier une société vivant de façon
radicalement opposée à la nôtre. Le but était que les enfants, par comparaison avec la vie
moderne occidentale, parviennent à comprendre un mode de vie en adéquation totale avec la
nature, comme il se pratique en Amazonie.
Aux CM1, enfin, j’avais décidé de faire découvrir le mode de vie de l’Inde, malgré le fait
qu’il soit radicalement opposé au nôtre. Je pensais en effet que les élèves auraient beaucoup de
mal à comprendre l’organisation d’une société organisée en castes, les rapports entre
intouchables, travailleurs, brahmanes, prêtres, étant très codifiés, le tout dans un pays
profondément religieux mais également polythéiste. J’avais choisi volontairement un ouvrage qui
traitait tous ces points, et dont on pouvait tirer des réponses.
Pourtant, cela n’a pas posé aux élèves les problèmes que j’imaginais, au contraire.
Spontanément, ils ont organisé des comparaisons avec des choses qu’ils connaissaient déjà, en
cherchant surtout des comparaisons avec des civilisations qu’ils avaient découvertes en histoire.
Ainsi, il leur est apparu tout naturel d’assimiler le système de castes aux ordres de la société
moyenâgeuse, associant notamment brahmanes et seigneurs. La difficulté a été pour eux de
15
constater qu’il n’y avait cependant pas d’équivalent au Moyen Age au statut des intouchables, à
part peut-être celui des lépreux ; mais ils n’ont pas trouvé cette comparaison seuls.
Quand au polythéisme, je pensais que dans notre société largement laïque, les élèves
auraient du mal à comprendre l’importance de ces différents dieux pour les Indiens. Pourtant,
c’est spontanément qu’ils les ont assimilés aux dieux romains de l’Antiquité. Cette comparaison
m’a semblé très intéressante, car elle regroupait deux aspects du polythéisme indien : d’abord,
elle permettait de comprendre que les dieux n’ont pas tous la même fonction dans la société, que
chacun est prié pour des raisons différentes, dans des conditions différentes ; de plus, elle
présentait bien la relation qu’il existe entre ces dieux, les Indiens ayant, comme les Romains,
imaginé diverses histoires et liens de parentés pour expliquer la naissance et le statut des
différents dieux. Du fait de cette assimilation rapide des élèves, j’ai dû me poser la question de
savoir si je devais quand même retravailler ce point avec eux, et si oui, sous quelle forme. Il m’est
apparu logique en effet de ne pas aborder cette particularité de la même façon que j’aurais pu le
faire si elle n’avait pas été comprise, conceptualisée, par les élèves.
c) les « surprises » : questions inattendues et problèmes insolites soulevés par les
élèves.
Pourtant, si les obstacles envisagés ne sont pas apparus, d’autres ont fait surface que je
n’avais absolument pas imaginés.
Je pensais que ce qui poserait problème, ce serait des habitudes tellement radicalement
différente des nôtres que les élèves auraient du mal à les conceptualiser, puisqu’ils n’en
trouveraient pas d’équivalent dans nos sociétés occidentales. Par exemple, je pensais que les CE2
s’interrogeraient beaucoup plus au sujet des rites de passage des indiens d’Amazonie, qu’ils
auraient d’autant plus de mal à s’imaginer leur réalité et leur utilité qu’ils ne leur trouveraient pas
de pendant dans notre société.
Cependant, j’ai pu constaté que, pour pouvoir fonctionner par analogie, les élèves ont,
très souvent, fait appel à un répertoire connu beaucoup plus vaste que je ne l’avais envisagé. A
côté des sociétés des temps passés déjà évoquées, les élèves ont par exemple recherché des
références dans d’autres lectures pour conceptualiser ces réalités. Ainsi, si l’on garde l’exemple des
rites de passage, les élèves les ont comparés aux épreuves subies par les héros dans les contes
traditionnels, mais aussi à des rites de passages existant dans des bandes dessinées qu’ils avaient
pu lire individuellement.
Finalement, ce qui a posé le plus de problèmes et que je n’avais pas envisagé, ce sont des
considérations souvent triviales.
16
Par exemple, les CM1, qui n’ont pas été étonnés de voir que les Indiens priaient plusieurs
dieux, se sont au contraire fortement interrogés au sujet de leur nourriture. Nous avions relevé à
plusieurs reprises, pour notre dictionnaire, des noms de plats indiens, le plus souvent à base de
riz, ainsi que le mot rizière. Un jour, un élève m’a finalement demandé pourquoi les Indiens ne
cultivaient et ne mangeaient que du riz. Après un moment de surprise, j’ai demandé aux autres si
quelqu’un pouvait lui répondre, et j’ai constaté que personne n’avait ne serait-ce qu’une idée sur
le sujet. Le fait est qu’ils ne savaient pas que les saisons en Inde étaient différentes par rapport à
celles d’Europe, ils ne connaissaient pas l’existence d’une saison des pluies, ni de la mousson, et
par conséquence ne pouvaient pas comprendre pourquoi un type de culture était privilégié.
J’avoue que ce détail m’avait échappé. J’ai donc organisé, assez rapidement, un petit exercice qui
permette de répondre à leur interrogation.
Il en a été de même chez les CE1. Alors qu’à partir d’un texte de leur manuel de lecture13,
nous faisions une liste des animaux que nous pourrions ajouter à notre affiche sur l’Afrique, un
élève m’a expliqué que nous ne pouvions pas mettre l’éléphant, parce que il ne vivait pas qu’en
Afrique, mais aussi en France. Quand je lui ai demandé d’expliquer sa pensée, il a poursuivi en me
disant, ce qui lui paraissait très logique, qu’il avait vu des éléphants vivre en France, quand il
visitait des zoos avec ses parents. Là aussi, j’avoue avoir été surprise sur le moment, puis j’ai
pensé qu’un travail sur l’endroit où vivaient les animaux pourrait sans doute venir à bout de cette
conception erronée.
3. Sensibilisation à une culture étrangère inconnue.
Après avoir ainsi défini les axes de travail que je pensais mettre en place avec les élèves, il
m’est donc vite apparu que ce qui m’apparaissait comme une priorité dans la découverte d’une
nouvelle culture allait peut-être devoir être remis partiellement en cause en fonction de l’attitude
des élèves. Le but minimal était de les sensibiliser à une culture nouvelle, mais tous n’étaient pas
prêts à aller aussi loin dans cette découverte. Selon les niveaux, mais également selon les élèves,
j’ai donc dû mettre l’accent sur certains points du projet initial, et en oublier d’autres.
a) en CE1
Les 11 élèves m’avaient été présentés par la titulaire de la classe comme de petits lecteurs,
difficiles a motiver à la lecture, en particulier pour trois d’entre eux. J’ai donc décidé de leur
donner à chacun un livre dès la première séance, mais en leur demandant de ne pas l’ouvrir. Les
17
deux premières séances ont en effet consistées en un travail sur la couverture du livre. Nous
avons commencé par un repérage du texte de la première de couverture : où trouver le nom de
l’auteur, le titre, l’éditeur… Comme ces élèves maîtrisaient peu ce vocabulaire indispensable à la
lecture d’un ouvrage littérature, cela a été l’occasion de préciser ces termes techniques.
Le travail a donc débuté par une découverte de l’objet littéraire, et non directement par
une découverte de l’univers présenté par le livre. Le fait de demander aux élèves de ne pas lire
l’ouvrage que je leur donnais les a d’abord surpris, puis très vite, ils ont eu d’autant plus envie de
le lire que je leur demandais de ne pas le faire. Quand finalement nous avons commencé la lecture
du livre, c’était un moment que les élèves avaient tous attendus, et ils sont tous très bien entrés
dans la lecture, heureux de savoir enfin ce qui pouvait être dit dans ce livre.
Dans un deuxième temps, toujours sans lire le livre, mais en s’appuyant sur des éléments
de la couverture, notamment l’illustration, je leur ai demandé d’imaginer, par deux, ce qui pourrait
se passer dans ce livre. Nous avons d’abord émis quelques hypothèses collectivement, afin de
vérifier que tous avaient compris la consigne. Nous nous sommes notamment interrogés pour
savoir où vivait ce petit garçon, comment on pouvait le deviner. Ici, je pensais pouvoir entrer
dans le travail de découverte du mode de vie africain, en recueillant ainsi les représentations
initiales des élèves sur la vie d’un enfant de leur âge en Afrique.
Cependant, j’ai pu constater que les élèves avaient beaucoup de mal à se décentrer de leur
univers, à imaginer ce qui peut se passer ailleurs. Ainsi, dans leurs textes, aucun n’a reparlé du fait
que Tibili vivait en Afrique. Ils n’ont parlé que de ce qu’ils connaissaient, écrivant par exemple
« C’est un petit garçon qui *veux pas *allé à l’école. Il dit à sa maman *que il *veux pas *allé à
l’école. Et sa maman lui met une *fessé. »
Peut-être aurais-je dû choisir un livre dont le thème était d’emblée plus distinct de la vie
d’un écolier en France, car il est vite apparu évident que les élèves s’imaginaient la vie de Tibili
très semblable à la leur.
Il ne faut pas oublier que les CE1 appartiennent encore au cycle 2, même si dans cette
classe ils étaient associés à des CE2. Ils évoluent dans un monde qu’ils n’ont pas encore fini
d’apprivoiser, comme l’a prouvé la remarque faite sur les éléphants. Ils ne distinguent encore pas
toutes les subtilités du monde dans lequel ils vivent, et il apparaît alors difficile de leur faire
découvrir une autre façon de vivre, de comprendre les différences avec la vie occidentale et
d’accepter cette autre culture. Alors, le travail devient finalement surtout une découverte du pays,
un travail de décentrement de leur propre monde. Il s’agit surtout de leur montrer qu’ailleurs, il
existe autre chose.
13 Annick Goupil, La semaine de Français, CE1, Nathan, Paris, 1988, p. 84
18
b) en CE2
En CE2, les représentations initiales sont totalement différentes de celles des CE1. Les
élèves sont tout à fait prêts à accepter qu’il puisse exister une façon de vivre différente de la leur,
ailleurs. Ainsi, nous avons fait le même travail d’anticipation de l’histoire, en début de projet, avec
le livre « Dans la forêt vierge ».
Les réponses des élèves ont davantage tenu compte des particularités qui apparaissaient
sur la couverture ou dans le titre, comme le prouvent ces quelques extraits de productions :
« Je pense que ce livre est l’histoire d’un petit garçon qui est un *indient qui *par à la
*chase avec un autre indien qui l’*abanndonne dans la forêt. Le petit garçon qui était perdu dans
la forêt vierge pleurait. *Quelque minutes plus tard il retrouva *sont chemin et devina que c’était
le chef de la *tribut. »
« Il*aitai une foi un petit village indien, dans une maison vivait un enfant et sa mère. Tous
les matins l’enfant *alait dans la forêt pour aller chercher à manger. Un matin il *vi un singe il le
*suivi et là il s’est perdu. »
Comme on le voit avec ces deux exemples, la plupart des textes produits par les élèves
ont permis d’énoncer des particularités d’un autre milieu. D’abord, ils étaient conscients que
l’histoire se déroulait dans un autre pays. Leurs productions, pour la plupart, on permis de
dégager les idées de vie en accord avec la nature, d’animaux différents, de mode de vie différent.
Comme on le voit avec l’évocation du chef de la tribu, les élèves avaient déjà l’idée qu’ailleurs, on
pouvait vivre différemment du mode de vie européen.
Cependant, les élèves ont encore du mal à conceptualiser des habitudes radicalement
différentes des leurs. Pour reprendre l’exemple des rites de passages, alors qu’à l’oral les élèves
expliquent très bien que lorsque le chaman lui peint le visage, Karik devient un homme, à l’écrit,
ils ont tendance à ne penser qu’à l’aspect matériel.
Ainsi, je leur avais demandé, en cours de lecture, d’imaginer une suite. La consigne était
« Karik trouve un objet merveilleux et le rapporte au chaman. » Les élèves, le plus souvent, ont
conclu le texte en disant quelque chose comme : « Le chaman est *trè *conten et donc le chaman
lui *pein la figure. ». Une seule élève a ajouté à cela : « Karik maintenant est un homme ».
Les élèves ont du mal à faire le lien entre les peintures de la tribu et le fait de devenir un
homme car cela n’a pas d’équivalent dans nos sociétés. Ainsi, alors qu’ils sont prêts à envisager
une autre façon de vivre que la leur, leur référent reste toujours la vie « européenne ».
19
c) en CM1
Le contexte est ici encore très différent. En effet, dès le départ, les élèves sont déjà
conscients qu’ailleurs on peut vivre autrement. Comme on l’a expliqué précédemment, ils
disposent d’un panel de situations comparatives bien plus étendues, leur permettant de
conceptualiser beaucoup plus facilement ce qu’ils découvrent. Ils sont totalement ouverts à la
nouveauté.
Dès lors, on peut davantage axer le travail sur le respect de ces autres façons de vivre,
leurs particularismes, leur réalité intrinsèque (et non pas seulement par rapport à la vie
européenne). Au lieu de travailler sur le fait qu’il existe d’autres façons de vivre, on encourage les
élèves à essayer de les comprendre, notamment en essayant de se mettre à la place de l’autre.
L’imprégnation des nouveautés se fait par leur réutilisation, ici par un projet d’écriture.
De même, on peut envisager de travailler, plus que sur l’aspect pratique (même si celui-ci
reste important, comme l’ont prouvé les problèmes que se sont posés les élèves sur la nourriture
par exemple), sur le domaine culturel. Ainsi, nous avons pu, en réseau avec la lecture longue qui
mentionnait les dieux Rama et Ganesh, découvrir des légendes qui font partie de la tradition
indienne : les élèves ont donc travaillé sur le conte Rama et Sita, et sur la légende de Ganesh, le
dieu éléphant.
J’ai également pu faire visionner aux élèves des extraits de films indiens14, notamment des
scènes dansées. Cela a permis aux élèves de reconnaître les vêtements traditionnels indiens, sari,
kurta et pagne, mentionnés dans leur livre, mais surtout d’entendre la langue hindi, d’entendre et
de voir des chansons et des danses traditionnelles indiennes. Cela correspondait à une visée
pluridisciplinaire, puisque nous avons tenté de faire de la danse indienne. Pour cela, les élèves ont
essayé de repérer des mouvements, que nous avons ensuite listés. Un certain nombre de séances à
14 Sanjai Leela Bhansali, Devdas
Karan Johar, La Famille indienne
Karan Johar, Kutch Kutch Hotai Hai
J’ai retenu principalement les danses qui étaient les plus proches des danses traditionnelles indiennes, celles
des scènes de mariage surtout, mais aussi une grande majorité de celles du film Devdas, au visuel très
traditionnel.
Swades, film de Ashutosh Gowariker, est paru depuis que j’ai mené ce projet. Je n’ai pas pu l’utiliser alors,
mais il me semble très intéressant d’en faire visionner des extraits aux élèves car, contrairement à de
nombreux films bollywoodiens, il montre l’image réelle de l’Inde d’aujourd’hui.
20
été consacré à reproduire les gestes découverts, à se déplacer en rythme sur de la musique
extraites de films indiens15. Enfin, les élèves ont pu, par groupes de quatre, inventer une
chorégraphie intégrant les éléments travaillés collectivement, et des éléments inventés par le
groupe. Chaque groupe présentait son travail au reste de la classe, chacun étant donc, à tour de
rôle, spectateur et danseur.
A travers la danse, il y avait ici une véritable découverte d’une autre culture, car la
musique et la danse indienne ont des critères très différents des mêmes pratiques européennes.
Par exemple, une chanteuse se doit d’avoir une voix très aiguë. Les élèves devaient donc
surmonter la surprise, qui a conduit à quelques rires au départ, pour s’imprégner et s’immerger
dans ce qu’ils voyaient. Le fait est qu’au final, ils ont trouvé cela « très beau », sentiment sans
doute encouragé par les décors très « kitch » de ce type de cinéma, très important dans la société
indienne. Cela permettait de faire découvrir deux pendants d’une même culture : un pendant plus
traditionnel, au travers des contes et légendes, et un autre plus moderne, les deux étant aussi
importants l’un que l’autre dans la vie quotidienne en Inde.
Même si cela dépassait largement le projet de littérature, il m’a semblé intéressant de
mener cette activité artistique en parallèle, puisque les deux séquences avaient un seul et même
but : permettre aux élèves de se mettre à la place de celui qui vit autrement. La littérature et le
cinéma ont été pour moi des supports très intéressants et complémentaires.
II. LA PRISE DE CONSCIENCE D’UNE AUTRE FACON DE VIVRE.
1. D’abord, familiariser les élèves à une autre façon de vivre.
Il s’agit avant tout de savoir quels moyens on va offrir aux élèves pour leur permettre de
comprendre les nouveautés qu’ils découvrent. Après avoir constaté leurs réactions, leurs
représentations, que leur fournit-on comme matière pour leur permettre de dépasser ce qu’ils
savent déjà ?
a) proposer des textes différents et riches.
L’aspect le plus important, quand on veut faire découvrir une civilisation nouvelle, est en
effet selon moi le choix du support. Comme on l’a dit dans une première partie, les choix
15 Musique et cinéma du monde : l’Inde, compilation de bandes originales de films.
Bharati, il était une fois l’Inde, bande originale du spectacle musical.
21
possibles sont divers et nombreux. Les programmes officiels mentionnent la découverte d’autres
modes de vie dans les parties concernant la Découverte du monde et les langues étrangères.
Par le biais de la littérature de jeunesse, on peut travailler simultanément les deux points
donnés comme « piliers » des programmes : la maîtrise de la langue et l’éducation civique16. On
peut alors travailler à partir d’un support ayant un sens réel, et non des extraits sans aucun lien
entre eux. Selon Serge Martin17, les manuels qui « passent d’un texte à l’autre, avec indifférence »,
ne permettent pas à l’élève de découvrir l’expérience du monde dans laquelle s’enracine le texte,
alors que selon lui, l’œuvre littéraire a bien une fonction de représentation du monde.
La littérature de jeunesse est un secteur en pleine expansion depuis quelques années.
Aujourd’hui, il existe plus de 40 000 titres, parmi lesquels en moyenne 3 000 nouveautés chaque
année18. Cette multiplication des titres permet d’avoir un choix des plus larges, et de travailler sur
des thèmes de plus en plus divers avec les élèves. Michèle Schottke conseille de privilégier « les
ouvrages permettant à l’enfant de se reconnaître, de suivre un parcours initiatique, de réfléchir sur
soi et sur les autres, de s’interroger sur le monde.19 ». La découverte d’autres cultures est un thème
très développé dans les nouvelles collections. Le plus souvent, ces ouvrages sont de trois types :
le conte traditionnel revisité pour être abordable par les élèves, la fiction représentant l’histoire
d’enfants du même âge que les lecteurs présumés, et les documentaires. Je considère comme
appartenant pleinement à la littérature de jeunesse les deux premières catégories, même si certains
romans ou albums associent, comme on l’a vu, fiction et documentaire. Ces derniers sont
particulièrement intéressants pour traiter de la différence entre fiction et réalité, et aborder la
notion de statut des documents.
Mais surtout, la richesse de la production littéraire pour enfants permet pleinement de
faire le choix idéal pour un projet, pour une classe donnée. Même si, par la lecture ou l’étude du
lexique, on ne découvre pas tout de la nouvelle culture, c’est un support qui permet, en accord
avec les textes officiels, de travailler le français dans toutes les disciplines, tout en étant le point de
départ idéal pour un travail plus approfondi.
Je donnerai un exemple. En étudiant le roman Lhala de Calcutta avec ma classe de CM1, je
me suis rendue compte que la lecture d’un certain passage, qui expliquait comment le dieu
Ganesh avait eu sa tête d’éléphant, leur plaisait beaucoup. Il est vrai que la formulation était assez
drôle, et le contenu, une histoire de « tête coupée et recollée », les amusait beaucoup. Les
16 Qu’apprend-on à l’école élémentaire ?op.cit, p. 7 et 10.
17 Serge Martin, Pour une politique de la lecture à l’école, in Lire des textes littéraires au cycle III, op.cit, p. 122.
18 Michèle Schottke, lecture longue : mise en œuvre et pédagogie, in Lire des textes littéraires au cycle III, op.cit, p. 182. 19Michèle Schottke , in Lire des textes littéraires au cycle III, op.cit, p. 181
22
programmes officiels encouragent, au cycle 3, à choisir les textes à mémoriser et à dire « parmi les
œuvres découvertes dans les lectures faites en classe, élues à cette fin pour le plaisir qu’elles ont
procuré lorsqu’on les a rencontrées.20 »
En accord avec la totalité de la classe, nous avons donc choisi ce texte, qui convenait
plutôt bien à une diction à haute voix, nécessitant un travail sur le rythme, les intonations et les
inflexions de la voix. Cela a permis d’associer dans un projet un travail purement littéraire, dire un
texte, à un aspect plus civilisationnel, découvrir la légende de la naissance d’un dieu. Ce travail a
ensuite pu être complété par des exercices de compréhension, dont la base était le livre, mais qui
permettait de développer chez les élèves la découverte de cet aspect de la culture indienne.
b) utiliser le support de l’image.
Pour familiariser les élèves à une nouvelle culture, j’ai donc choisi la littérature de jeunesse
en partie pour la richesse des textes qu’elle propose, et qui en fait un support de départ très
intéressant pour découvrir une civilisation. Cependant, je pense que les images qu’elle comporte
sont également un moyen primordial donné aux élèves pour comprendre ce qu’ils découvrent.
L’appui de l’image, aide à la conceptualisation, est un outil réel proposé par la littérature, même
s’il est souvent sous-évalué. Jean-Paul Guichard21 explique qu’ « alors même que la quasi-totalité
des livres de jeunesse comporte des illustrations, le travail de lecture qui est mené en classe
s’opère pour l’essentiel sur le texte, et le recours à l’illustration est limité. » Ce qu’il tente
d’expliquer, c’est qu’alors que le livre de littérature est un objet tellement riche, de par sa double,
voire triple conception (image, narration, voire documentation, comme on l’a vu avec l’ouvrage
proposé aux CE2), on n’en fait le plus souvent qu’une utilisation limitée. Pourtant, il encourage à
considérer « l’ensemble texte - image (…) comme un système cohérent dans lequel l’imbrication
des indices textuels et extratextuels (iconiques en l’occurrence) permet de produire du sens et
d’interpréter. » Les illustrations sont un élément à part entière de l’œuvre littéraire. En
conséquence, elles sont à étudiées au même titre que le texte. C’est même un des éléments qui
permet aux élèves de trouver du sens au texte lorsqu’ils ne le comprennent pas au premier abord.
C’est ce que j’expliquais dans la première partie, quand je disais que les CE1 avaient eu plus de
facilité à comprendre le lexique nouveau de leur texte car ils s’aidaient beaucoup plus des images.
Travailler en littérature de jeunesse permet de développer ce rapport à l’image. Ainsi,
puisque les CE2 ne s’y référaient pas spontanément, je leur ai proposé une séance de description
20 Qu’apprend-on à l’école élémentaire ? Op.cit., p. 182-183 21 Jean Paul Guichard, in Lire des textes littéraires au cycle III, op.cit, p. 92
23
d’une image de leur ouvrage22. Le livre qui leur a été proposé, Dans la forêt vierge, a l’avantage de
présenter des illustrations complémentaires du texte, et non pas seulement redondantes. Page 8,
le texte parle seulement d’oiseau, et c’est uniquement l’illustration qui permet aux élèves de
découvrir qu’on ne parle pas de n’importe quel oiseau mais de perroquets et d’aras.
Les élèves ont d’abord appris, dans l’objectif de savoir écrire une description, comment
décrire un animal. A partir de fiches d’exercices, en travail en binôme, nous avons fait une « liste »
des points qui devaient avant tout apparaître dans la description d’un être vivant, en comparant
plusieurs descriptions. Les deux catégories principales proposées étaient l’aspect physique et le
« caractère ». Ensuite, à partir de renseignements donnés sur un animal, les élèves ont dû
reconstituer, en un texte, une description d’un animal, en ne gardant que les informations
nécessaires parmi celles données. Enfin, à partir des deux descriptions de ces animaux données
dans la partie documentaire du livre, p. 26, les élèves ont eu pour consigne d’écrire,
individuellement, une description des « oiseaux que rencontre Karik ».
Tout au long de la lecture, j’ai proposé aux élèves, assez régulièrement, une description,
collective ou individuelle, écrite ou orale, des animaux représentés dans le livre, pour leur
permettre de comprendre le texte. Ces descriptions, ou en tout cas la méthode pour les écrire, ont
souvent été reprises par les élèves pour confectionner leurs affiches, en fin de projet.
c) aller au-delà des obstacles : exercices proposés aux CM1.
Pour régler les problèmes de compréhension et de conceptualisation qui se posaient au
fur et à mesure des lectures, il m’a fallu imaginer de petits exercices qui aideraient les élèves à
comprendre les particularités de cette façon de vivre différente de la leur, leur permettre de se
familiariser avec elle, faire en sorte que les éléments qui la constituent ne leur paraissent plus
incongrus.
C’est avec les CM1 que se sont posées le plus de questions que je n’avais pas prévues,
celle qui me surprit le plus étant bien sûr celle qui concernait l’alimentation en Inde. Pourquoi
est-ce que les personnages semblaient manger toujours du riz ? Pour permettre aux élèves de
comprendre cette particularité, je leur ai proposé un texte, qui traitait de la culture du riz en Inde.
Ce texte précisait à quelle période, par rapport à la mousson, on plantait, ramassait le riz…
Accompagnant ce texte, six dessins représentant les six étapes de la culture du riz, auxquels les
élèves devaient, grâce au texte, rendre l’ordre initial et donner un titre. Cet exercice était extrait du
22Dans la forêt vierge, op.cit, p. 8 – 9.
24
fichier accompagnant l’œuvre littéraire, mais je dois avouer qu’à première vue, je n’en avais pas
saisi l’utilité. Je pense que j’avais surtout souligné les points plus « spirituels » dans ce qui risquait
de poser problème, et je n’avais pas pensé que les considérations matérielles interrogeraient les
élèves. C’est donc seulement une fois confrontée au problème que j’ai décidé de proposer cet
exercice aux élèves.
Il leur a permis de se représenter la méthode de culture du riz. D’après leurs remarques,
j’ai compris qu’avant cela, ils l’imaginaient semblable à celle des céréales poussant en France, le
blé par exemple. Ils ont, grâce à cet exercice, compris que c’était un aspect de la culture indienne
qui était dû au climat de la région, et non à un choix. Très vite, ils ont oralement fait la
comparaison avec ce qu’ils avaient étudié l’année précédente en géographie, à propos des climats
et des genres de vie qui y étaient rattachés. Seulement dans leur esprit, cela ne s’appliquait qu’à
des cas très extrêmes, le nomadisme dans les régions polaires par exemple. Ils n’avaient pas
réalisé que parfois, seul un élément peut-être modifié à cause de l’importance du climat. Les
élèves n’ont pas retenu les noms spécifiques des différentes phases de la culture du riz présentés
dans le document, mais après cela ils ont compris, et c’était ça l’objectif, en quoi cette culture était
une particularité de cette région du monde, et étaient capables d’en expliquer la raison.
Je n’ai cependant pas renoncé à leur faire découvrir plus profondément les différents
dieux de la société indienne, et même si ce n’est pas un point qu’ils ont soulevé comme leur
posant problème, je pensais que cela pourrait leur être utile pour leur projet d’écriture d’un
album. En effet, s’ils voulaient décrire ou représenter un dieu, comme cela serait logique étant
donné leur omniprésence dans la société indienne, il me paraissait indispensable qu’ils
comprennent comment le polythéisme fonctionne exactement en Inde.
Nous sommes partis du livre Lhala de Calcutta. J’ai demandé à chaque élève de relever les
noms d’au moins deux dieux ou déesses, et si possible de les décrire. Avec ces informations, nous
avons fait une liste des dieux vénérés en Inde, et les élèves ont constaté que chaque dieu était
représenté d’une façon bien différente, décrit différemment. Ce que nous avons pu conclure, c’est
qu’en réalité, chaque dieu indien semblait avoir sa propre personnalité.
J’ai alors proposé aux élèves un exercice qui comprenait six descriptions de dieux, et six
dessins de ces mêmes dieux. La consigne était, bien sûr, d’associer les deux. Les dieux
mentionnés étaient les plus importants du panthéon indien, dont Rama, le dieu le plus prié en
Inde, considéré comme le père de tous les dieux. Puis les élèves ont repéré que Ganesh, le dieu
éléphant sur lequel ils avaient appris un texte, ne figuraient pas parmi mes dessins et descriptions.
25
Je leur ai alors demandé de le rajouter. Ils ont dû écrire une courte description et en faire un
portrait. Pour cela, ils se sont aidés de l’ouvrage où figurait une illustration du dieu Ganesh.
Enfin, c’est à partir de ce travail sur les dieux indiens que nous avons aborder la légende
de Rama et Sita, sous la forme d’un conte traditionnel indien23.
Comme, juste avant mon arrivée, les élèves avaient étudié, avec leur enseignante, la structure du
conte, nous avons pu enchaîner. Je leur ai proposé le texte de l’album, que j’avais découpé en
épisodes mélangés. Les élèves avaient pour mission de reconstituer le texte initial, en s’aidant
d’indices comme les connecteurs logiques et temporels, mais aussi en se rappelant de la structure
logique du conte. En effet, ils ont pu constater que ce conte présentait tout à fait le schéma
quinaire des contes européens, à savoir une situation initiale (Rama et Sita sont heureux au
royaume du père de Rama), un élément perturbateur (la belle-mère de Rama convainc le roi
d’exiler son fils pour quatorze années et de céder la couronne à son propre fils), des péripéties
(alors que Sita est enlevée par le démon Ravana, Rama et son frère se lancent à leur poursuite,
aidés par le chef de la tribu des singes, et par le frère de Ravana), une résolution (au terme d’une
bataille de plusieurs jours, Rama tue Ravana et libère Sita) et une situation finale (l’exil de Rama et
Sita touche à sa fin, ils peuvent retourner dans leur royaume).
Après avoir reconstitué le texte, en fin de séance, j’ai fait aux élèves une lecture offerte de
ce conte. Présenté sous forme d’album, il nous a permis une discussion sur les illustrations,
participant au projet d’arts visuels. Les élèves ont en effet pu repérer des constantes de la
représentation des dieux et démons, à savoir qu’ils n’avaient pas nécessairement des couleurs
réalistes, mais aussi que tous ne présentaient pas des traits animaux, mais que certains étaient
purement anthropomorphes.
d) reconnaître le réel et l’imaginaire.
Cependant, pour que tout ce travail puisse conduire à familiariser les élèves à une nouvelle
culture, un autre mode de vie, il est indispensable d’aider les élèves à faire la différence entre ce
qui est réel, et ce qui ne l’est pas. Et, alors que les CM1 avaient déjà fait ce travail, et étaient
totalement conscients de ce qui, dans le livre, reflétait ou non une réalité, avec les CE1 et les CE2,
il a fallu expliciter certains détails.
Comme je l’ai expliqué, la partie documentaire de l’œuvre étudiée par les CE2 nous a pour
cela été fort utile, puisqu’ après une discussion collective, nous avons pu arriver à un classement
des éléments de l’histoire entre « réel » et « réaliste ».
23 Govinder Ram, Rama et Sita, conte indien extrait du Ramayana, Gründ, 1989.
26
2. Prise de conscience des différences.
a) la présentation des CE1-CE2.
Pour que les élèves découvrent et comprennent qu’il existe d’autres façons de vivre, il ne
suffit pas, pourtant, de les confronter à cette différence. Cette phase de familiarisation, si elle est
indispensable, n’est absolument pas suffisante. Il faut alors offrir aux élèves, les moyens de
comprendre ces différences, d’exprimer leurs ressentis, de prendre du recul vis-à-vis de ce qu’ils
découvrent.
Je pense qu’un des exercices les plus productifs, en vue de cet objectif, est la présentation
orale. Si l’on est capable d’expliquer quelque chose à une tierce personne et de répondre à ses
questions, c’est que l’on a compris.
C’est dans ce but que j’ai proposé, aux CE1 et CE2, une présentation orale de leur travail
sur les œuvres littéraires. La forme de la classe, un double niveau, convenait particulièrement à ce
type d’exercice puisque grâce à elle, chaque groupe de travail disposait de fait d’un auditoire qui
n’avait pas connaissance de ce qui avait été préparé, à qui il pourrait transmettre les connaissances
qu’il venait de découvrir.
Je dois avouer que ce système a souffert de quelques lacunes, en particulier parce que les
CE2, ayant terminé leurs projets un peu avant les CE1, en ont profité pour « discrètement et
involontairement » écouter ce qui se disait de l’autre côté de la classe. Cependant, ils ont été
« bons joueurs », car au moment de la présentation, ils ont fait comme si ils ne savaient pas de
quoi les CE1 allaient leur parler.
Pour organiser cette présentation, j’avais volontairement décidé, dans un souci de
développement de leur autonomie, de laisser les élèves décider entre eux de la forme à prendre. Je
n’avais posé que trois conditions indiscutables : tout le monde devait lire un extrait de l’oeuvre,
l’histoire devait être lue en entier et être compréhensible, et tout le monde devait pouvoir
s’expliquer sur l’affiche qu’il avait produite. Cela a conduit à des phases de travail collectives où
j’ai décidé de ne pas intervenir, que ce soit chez les CE1 et les CE2. Les élèves se sont partagés le
livre, assez équitablement en fait. Pour les CE1, j’ai organisé une « répétition générale » la veille, à
la fois pour les rassurer, mais aussi pour leur permettre de s’entraîner une dernière fois à la
lecture. Cette initiative a finalement été une bonne chose, car il s’est avéré que, si les élèves
s’étaient bien partagés le texte, la moitié ne se rappelait plus de ce qu’ils devaient lire car ils
avaient omis de noter les pages de chacun. Je leur ai proposé de noter les parties de chaque élève
avec un post-it, et ensuite tout s’est bien déroulé.
27
Je dois dire que sur cette phase de lecture, les CE1 se sont montré bien plus imaginatifs
que les CE2, dans leur découpage du texte (au lieu d’avoir un gros passage chacun à lire, ils en
avaient plusieurs petits), mais aussi dans leur lecture : ils ont été beaucoup plus attentifs aux
intonations indiquées dans les parties dialoguées, choisissant au final de terminer sur une note
collective en déclamant tous ensemble la dernière réplique du livre, après avoir laissé un petit
temps de suspense.
Les CE2, même si leur niveau de lecture était dans l’ensemble, et c’est naturel, meilleur
que celui des CE1, ont cependant été beaucoup plus scolaires, oubliant pour certains qu’ils
avaient un auditoire, et ne cherchant pas tous à rendre le texte le plus compréhensible possible.
Cependant, certains avaient pris l’initiative de montrer, sur les affiches, les dessins des mots
inconnus des CE1 au fur et à mesure de la lecture pour les aider à comprendre le texte.
Pour ce qui est d’interroger l’autre, les CE1, au départ, n’osaient pas trop questionner les
CE2 sur ce qu’ils avaient fait. Il a fallu que je pose deux questions, que les élèves répondent, pour
que les autres osent se jeter à l’eau et demander ce qu’ils n’avaient pas compris. Après cela, la
séance a été très riche, car les CE2 ont eu à cœur d’expliquer leurs recherches, notamment quand
ils pouvaient s’appuyer sur les affiches qu’ils avaient personnellement confectionnées.
Avec les CE1, nous avons eu du mal à aller aussi loin dans la découverte d’une autre
culture qu’avec les CE2, en particulier à cause de leurs représentations initiales. Ils avaient du mal
à imaginer une autre façon de vivre, dans un autre cadre. Il a fallu un long cheminement pour
qu’ils acceptent le fait que tous les environnements ne ressemblaient pas au leur.
Pour cela, nous avons travaillé en parallèle, dans le domaine « Découvrir le monde », sur
la différence entre pays chauds et froids. Les élèves avaient des photos à replacer sur un
planisphère, puis à décrire : était-ce un pays chaud, un pays froid ? Qu’est-ce qui permettait cette
déduction ? Pour une partie importante des photos, j’avais choisi des images où des animaux
typiques du climat étaient facilement reconnaissables : pingouins, dromadaires… Or, ce sont des
critères qui sont souvent revenus dans les explications des élèves. C’est un pays froid car on voit
des pingouins. Si on leur demandait si la France était un pays froid, ils répondaient non.
Nous avons alors pu reprendre le questionnement posé par un élève, à propos de
l’éléphant qui vivait aussi en France. En discutant collectivement, nous avons fini par conclure
que l’on avait le droit de dire qu’un animal pouvait vivre dans un pays, uniquement s’il y vivait
dans la nature, sans aucune assistance humaine. Au contraire, nous avons conclu que les animaux
des zoos, nourris et soignés par le personnel, ne vivaient pas en France à l’état naturel. L’éléphant
28
pouvait donc être considéré comme un animal des pays chauds, donc de l’Afrique, mais pas de la
France.
Cependant, faute de disposer de davantage de temps, nous n’avons guère pu aller plus
loin dans la description du cadre de vie en Afrique, et les CE2 n’ont pas questionné les CE1 sur
ce point lors de la présentation finale. Les seules questions posées concernaient l’histoire de Tibili
ou les affiches fabriquées. En fait, les CE2 posaient plus des questions de compréhension, pour
vérifier si les CE1 savaient de quoi ils parlaient, que des questions attendant véritablement une
réponse qui les aurait éclairée.
b) comprendre la différence et pouvoir l’expliquer : raconter la suite, CM1
En mettant en œuvre cet exercice entre des élèves de même niveau, on arrive à un résultat
tout à fait différent. J’ai pu la proposer aux élèves de CM1 à qui je faisais étudier Lhala de Calcutta,
dans le cadre d’un travail de groupe à visée coopérative. Après avoir étudié collectivement les six
premiers chapitres de l’œuvre pendant la première moitié du temps du stage en responsabilité,
nous étions arrivé à une situation où les élèves, du fait de leur lecture personnelle, en étaient à des
stades très variés du livre. En effet, je n’avais pas voulu interdire la lecture personnelle de
l’ouvrage, mais la conséquence en était que, alors que certains élèves avaient connaissance de
l’œuvre dans son intégralité, certains n’en connaissaient que ce qui avait été lu en classe.
J’ai alors fait des groupes de travail de trois ou quatre élèves chacun, en fonction d’un
sondage pour savoir ce que chaque élève avait lu. A chaque groupe, j’ai confié la responsabilité de
la lecture et de l’explication d’un chapitre. Les consignes étaient les suivantes : les élèves devaient
écrire un résumé de leur chapitre, suffisamment concis mais permettant la compréhension du
livre, et devaient être capables de répondre aux questions que leurs camarades leur poseraient.
Pour cela, ils pouvaient préparer des notes, s’ils prévoyaient par exemple qu’un mot compliqué
allait leur être demandé. Cette préparation, incluant le temps de lecture, de rédaction du résumé et
de la prise de note, a pris environ trois quarts d’heures. Deux groupes étaient chargés du chapitre
7, qui suivait la lecture faite en classe. Pour la plupart, ces groupes étaient composés des élèves
ayant un peu plus de difficultés de lecture que les autres, et donc n’ayant que peu continué la
lecture individuellement. La possibilité de faire deux groupes a établi l’occasion d’organiser une
« confrontation », afin de voir si les deux équipes avaient compris le texte de la même façon, en
avaient fait la même interprétation.
29
La discussion collective, le questionnement, a été immédiat et très riche, du fait d’une
bonne entente de classe, habituée à discuter collectivement, qui a fait que les élèves n’avaient pas
peur de s’interroger. Après cet exercice, chaque élève connaissait l’intégralité de l’intrigue de
l’œuvre, ce qui n’a pas empêché ceux qui ne l’avaient pas lu intégralement d’essayer de le terminer
avant la fin du stage. Par contre, cela a permis de ne pas « ennuyer » les élèves qui avaient déjà
terminé, et qui ne se seraient peut-être pas intéressés à une autre semaine d’étude approfondie du
texte. Mettre en place un travail de groupe, dont les recherches sont complémentaires et non pas
redondantes, m’a semblé une expérience très intéressante. Les auditeurs pouvaient questionner
leurs camarades, tant sur le sens du texte, que sur des particularités de la culture indienne qui
apparaissaient à certains passages du livre. Cette œuvre présentait en effet un enfant au travail,
une Inde relativement pauvre, la réalité des bidonvilles. Par ces descriptions nombreuses et
réalistes, textuelles ou iconiques, ce livre permettait de faire entrer les élèves dans la réalité d’une
autre vie, radicalement différente de la leur. Le fait de devoir expliquer ces réalités aux autres lors
de l’ « entretien » qui suivait le travail de résumé a permis aux élèves de véritablement en prendre
conscience. Avant cela en effet, ce n’était pas une réalité tangible pour ces élèves, vivant dans le
cadre assez favorisé d’un gros village viticole. En début de lecture du livre, un élève a demandé ce
qu’était un mendiant, croyant que c’était, là encore, une particularité indienne ! Les élèves auraient
eu du mal à se représenter la réalité des bidonvilles sans l’appui des illustrations du livre.
c) découvrir une réalité inconnue : exercice des CE1
Pourtant, pour faire découvrir aux CE1 la réalité de la vie en Afrique, je n’ai pas trouvé
d’album très explicite, par son texte ou ses illustrations. Je pense que cela est dû au fait qu’en
raison de leur niveau de lecture encore difficile, les éditeurs préfèrent, pour ces élèves encore très
jeunes, raconter des histoires plus légères. Il est vrai que les élèves, pour les raisons exposées
précédemment, auraient sans doute eu du mal à assimiler ces différences en même temps qu’ils
devaient suivre l’intrigue du livre. Pour eux, j’ai donc dû avoir recours à une solution plus
traditionnelle, à savoir l’explication de photos. Puisque les illustrations du livre ne me
permettaient pas de leur faire toucher ces différences de niveau de vie, j’ai recouru à un exercice
présent dans les livres qui accompagne l’album24. Je pense en tout cas, que l’on touche là une des
limites de la littérature de jeunesse pour découvrir d’autres cultures. On ne peut pas demander à
une œuvre de traiter tous les points que l’on désire, le texte littéraire n’est pas écrit pour « servir »
à quelque chose. Il faut donc avoir recours à des supports annexes.
24 Jacques Fijalkow, Joëlle Garcia, Patrice Cayré, L’école, Cycle 2, Editions Magnard, 1993, p. 26 – 27.
30
Au CE1, j’ai donc proposé de visionner deux photos d’élèves « à l’école » en Afrique, en
demandant aux élèves de noter ce qui était différent de leur école. L’objectif, comme il est défini,
était que les élèves reconnaissent « les différences essentielles de (leur) milieu avec les autres
grands milieux en recourant à des comparaisons 25».
Après cette phase de recherche, une discussion collective nous a permis d’émettre des
hypothèses : pourquoi les choses sont-elles différentes ici et là-bas. A la vue de la leçon en plein
air, les élèves ont d’abord pensé que si les élèves se mettaient dehors « c’est parce qu’ils avaient
trop chaud ». C’est surtout la vue d’une classe surchargée qui les a interrogée. A terme, ils sont
parvenus à dire que s’il y avait tant d’enfants, c’est parce qu’il n’y avait pas assez d’écoles, que les
élèves qui regardaient dehors avaient envie d’aller à l’école. Mais ils n’ont pas pensé que cela était
dû à la situation financière du pays. Pourtant, cela les a amené à réfléchir au sujet de l’album qu’ils
lisaient, puisqu’un élève a fait l’hypothèse que, finalement, peut-être que Tibili ne voulait pas aller
à l’école parce qu’il y aurait trop de monde. Au début de la lecture, les hypothèses avaient été
beaucoup plus en lien avec leur propre expérience de l’école. Malheureusement, cet aspect n’est
pas ressorti lors de la présentation aux CE2, puisque ceux-ci ont surtout posé des questions de
compréhension du livre.
3. Approfondissement : se mettre à la place de l’autre.
Ainsi, même si ces élèves ont pris conscience des différences existant entre des milieux de
vie différents, je ne suis pas sûre qu’ils aient eu suffisamment de recul pour l’assimiler. A mon
sens, la seule activité qui va permettre pleinement de comprendre un autre mode de vie, c’est de
changer de position. Il faut encourager l’élève à penser comme il le ferait dans cet autre milieu.
Malheureusement, je n’ai eu le temps de mettre cette activité en place qu’avec ma classe de CM1.
a) le projet d’écriture des CM1 : un réinvestissement
J’ai pu proposer à cette classe plusieurs exercices de mise en situation, où ils devaient
imaginer comment la vie serait dans un autre pays. Dans un sens, la séquence de danse
appartenait à ce projet, puisqu’il s’agissait pour les élèves de mettre en pratique une activité
sociale d’un autre pays.
Le projet le plus ambitieux que j’ai mené avec cette classe a été un projet d’écriture. Après
avoir lu deux chapitres de l’ouvrage Lhala de Calcutta, j’ai proposé aux élèves d’écrire, à leur tour,
une histoire qui se passerait dans un autre pays. Je leur expliquai le projet, en leur disant
25 L’école, op.cit, p.26.
31
notamment qu’ils pourraient utiliser le dictionnaire qu’ils étaient en train de construire. Cela a
donné du sens à cette production, puisqu’il n’écrivaient pas les définitions juste parce qu’ils
devaient le faire, mais parce qu’ils savaient qu’ils en auraient bientôt besoin. De même, le projet
d’écriture était finalisé par la réalisation d’un objet (un album), qui donnait du sens à l’activité et
motivait les élèves.
Le projet a démarré collectivement. Par groupes de quatre, les élèves ont eu pour
consigne d’inventer une histoire que l’on pourrait écrire, en donnant le maximum de détails qu’ils
avaient déjà pu imaginer. La plupart avaient une amorce d’intrigue, certains on été jusqu’aux
noms des personnages. Après cette phase de recherche, chaque groupe a désigné un rapporteur,
qui avait pour mission de convaincre le reste de la classe de choisir l’histoire de son groupe.
Chaque orateur a eu le même temps de présentation, après quoi nous sommes passés à un vote.
J’avais précisé que l’on n’avait pas le droit de voter pour son histoire, afin d’éviter les problèmes
et de valoriser le rôle des orateurs, qui avaient un véritable enjeu, un public à convaincre
réellement.
Après ce vote, l’histoire choisie a finalement été celle d’une petite fille, dont le père part
travailler en France à cause du niveau de pauvreté de sa famille et du manque d’emplois de son
pays, alors que sa mère tombe soudainement malade. Les thèmes (la pauvreté, la maladie),
semblent avoir été directement inspirés par le roman lu en classe, mais à ma grande surprise, les
élèves ont décidé que cette histoire se déroulerait…en Chine ! Je n’ai pas su si c’était pour se
démarquer du roman, ou parce que ce pays leur parlait davantage.
Voilà le texte qui a été choisi :
« La *maleureuse petite fille.
Où *sa se passe : en Chine
Qu’arrive-t-il : sa maman est malade et son papa est parti en France.
Prénom de la petite fille : Taquitcho Kakoucho
Prénom de la maman : djakiline
Prénom du père : djacki »
On peut remarquer que sur les cinq histoires proposées par les élèves, trois étaient situées
« en Asie », une en Chine, et une au Japon. Aucun groupe n’a repris le pays découvert
initialement, même si tous ont repris des éléments découverts lors de cette étude.
Après le choix de l’intrigue, la deuxième phase, toujours collective, a été d’écrire une
trame pour l’album. La consigne a été qu’il devait y avoir autant de parties que de groupes
d’élèves, cinq. Les élèves ont spontanément respecté le schéma de récit qu’ils connaissaient, qui
s’appliquait particulièrement à ma consigne, le schéma quinaire. Voici ce qu’ils ont donc écrit :
32
« Chapitre 1 : on présente les personnages. Raconter leurs problèmes (pauvres ; mère
malade). Description.
Chapitre 2 : Le papa part en France chercher de l’argent. Mère très malade. Il fait très
froid, maison abîmée. Elle pleure.
Chapitre 3 : une lettre du père. Un docteur envoie chercher une plante rare. Elle cherche
la plante. Elle se fait mordre par un animal.
Chapitre 4 : elle met des feuilles sur sa *blesure. Un gros orage. Un temple : elle fait un
vœu, et trouve quelqu’un qui sait où est la plante : Shanga.
Chapitre 5 : elle trouve la plante. Elle rentre chez elle. Elle soigne sa mère. Le père rentre,
il a gagné beaucoup d’argent. Ils construisent une nouvelle maison.
Personnages : petite fille : Takitcho Kakoutcho
Mère : Zara
Père : Kang
Ami : Shanga. »
On peut remarquer que les élèves ont décidé de modifier les noms de certains personnages,
trouvant que ceux qui avaient été imaginés initialement ne « faisaient pas assez chinois ». Les
élèves se sont enfin partagés les tâches, chaque groupe étant chargé de la rédaction d’un
« chapitre ».
L’écriture à proprement parler s’est faite en quatre jets. Le premier jet était complètement
libre, les élèves ayant seulement à respecter la trame construite collectivement. Tous les élèves
devaient écrire. Après une relecture collective, par confrontation de tous les textes, pour éliminer
un maximum d’erreurs (dans l’intrigue surtout, pour vérifier que tous les membres du groupe
aient bien écrit la même chose), et produire ainsi un second jet, où ils produisaient un texte pour
tout le groupe. C’était le premier que je lisais. J’annotais les lignes où des corrections étaient
possibles, soulignais les passages qui pouvaient être développé. Les élèves corrigeaient
collectivement, modifiaient leur texte s’ils en sentaient le besoin.
Le dernier jet était en fait la transcription numérique de leur texte. Les élèves n’avaient
qu’un ordinateur pour vingt élèves, ce qui a rendu cette tâche compliquée matériellement. De fait,
chaque élève devait d’abord créer un dossier à son nom, car ils n’avaient pas encore fait
d’informatique avec leur enseignante. Après cela, je souhaitais que chacun puisse taper le texte de
son groupe, mais cela n’a été possible que pour un groupe. Pour les autres, le manque de temps
nous a contraints à ne faire taper à chacun qu’une partie du chapitre rédigé par son groupe, la
totalité étant obtenu par juxtaposition des parties tapées par les élèves.
33
b) l’implication des élèves.
Je dois avouer que, faute de temps, je n’ai pu mener ce projet tout à fait jusqu’à son
terme. La différence de rapidité d’écriture des élèves d’abord, la durée du stage ensuite, m’ont
empêché d’arriver à l’objet fini. Nous avions le texte et les illustrations, mais il restait à les
imprimer et à les relier. Cependant, au soulagement des élèves, la titulaire a accepté de terminer ce
travail avec eux.
Les élèves se sont beaucoup investis dans ce projet, d’autant plus qu’ils en maîtrisaient
chaque étape. Les illustrations étaient également de leur fait, et souvent, ils ont quelque peu
modifié la trame de l’histoire afin de pouvoir les inclure à l’album final. Ils m’ont souvent
demandé des informations complémentaires, pour s’assurer que ce qu’ils réalisaient était réaliste.
Ainsi, puisque les illustrations qu’ils avaient pu voir représentaient des costumes indiens, ils m’ont
demandé à quoi ressemblaient les vêtements chinois. J’y vois une preuve de leur prise de
conscience que les habitudes varient d’un lieu à un autre, même entre deux pays si proches
géographiquement. J’ai donc pu leur faire visionner des photos de danseuses et danseurs chinois,
portant des costumes traditionnels des différentes régions chinoises.
Les élèves m’ont également demandé, afin de rendre leurs illustrations plus crédibles, la
transcription de certains mots en chinois. Puisque que je ne parle pas cette langue, Internet m’a
été très utile sur ce point. Ce qui me paraît intéressant, c’est que les élèves n’ont pas décidé de
choisir la facilité, mais ont réellement tenu compte de tous les détails qu’ils entrevoyaient pour
rendre leur récit crédible. Ils se sont réellement mis dans la peau du personnage, ils se sont
imaginés vivre comme lui.
Au point d’ailleurs que même en dehors de la classe, cela a quelque peu modifié leurs
habitudes. J’en veux pour preuve deux petites anecdotes, qui m’ont amusée. La première
concerne un des garçons de ma classe qui, bousculé dans le couloir par un de ses collègues de la
classe voisine, lui a dit : « Eh ! Me pousse pas ! *J’suis pas dans un pousse-pousse ! ». Remarque
qui a beaucoup fait rire mes élèves, mais pas forcément celui qui était visé ! La deuxième fois, ce
sont trois filles de la classe, qui sont remontées après une récréation, en me demandant si je savais
à quoi elles avaient joué. Elles m’ont alors dit : « On a fait comme Madhu (un personnage du
livre), on a fait la manche, et la maîtresse des CM2 nous a donné 5 roupies ! Ca fait combien
d’euros ? ».
34
CONCLUSION.
Toute ma démarche a été fondée sur une interrogation personnelle : pouvait-on, oui ou
non, faire découvrir d’autres modes de vie grâce à la littérature ? Même si les expériences que
j’ai tentées, et que j’ai analysées dans ce mémoire, me semblent avoir porté leurs fruits, il est
certain que cette conclusion est à nuancer.
Tout d’abord, je pense que dans cette démarche, comme dans toute situation
d’apprentissage, il ne faut jamais perdre de vue la motivation des élèves. Mon intérêt pour la
littérature et les autres façons de vivre a certes été à l’origine de ce projet, mais il m’a fallu
prendre soin de choisir des supports et des démarches adaptés à l’âge et à l’intérêt des élèves.
Un thème motivant pour l’enseignant ne le sera pas forcément pour ses élèves ; c’est à lui de
faire les choix qui lui permettront de gagner l’adhésion de sa classe à un projet. A cette
condition seulement, le projet pourra être mené à bien, satisfaisant à la fois enseignant et
élèves, et permettant d’atteindre les objectifs fixés.
D’autre part en effet, il m’a fallu prendre garde à ne pas m’éloigner des programmes
officiels. C’est le danger quand on élabore un projet à partir d’une motivation personnelle, on
risque de perdre de vue les objectifs institutionnels. L’ouverture d’esprit n’est pas un objectif
donné tel quel par les programmes. Il fallait donc veiller à ce que cette découverte d’autres
cultures s’inscrive dans un projet répondant à des objectifs correspondants au public que
j’avais.
C’est pourquoi les projets que j’ai mis en place ne concernaient pas uniquement le
domaine littéraire, même si ce dernier en était le déclencheur initial et principal. Nous avons
donc travaillé dans des matières très variées : littérature, arts visuels, danse, mais aussi
géographie et TICE. Cette pluridisciplinarité nous a permis de construire un projet
conséquent, sans négliger son attache aux instructions officielles.
Il ne fait aucun doute que les situations présentées auraient pu être abordées
différemment. En particulier, je suis consciente qu’en tant que « novice » dans ce métier, j’ai
très certainement perdu du temps sur des détails inopportuns, des situations matérielles mal
adaptées. J’ai dû prendre des décisions sur le moment, mais malgré tout, je suis assez
satisfaite des situations que j’ai pu proposer aux élèves, ayant fait mon maximum pour
qu’elles soient le plus riches et variées possibles. J’ai cependant hâte d’avoir ma propre
classe, afin de pouvoir monter des projets à plus long terme, et en mesurer plus précisément
les effets, car ces quelques projets m’ont donné bien d’autres idées à mettre en place.
35
BIBLIOGRAPHIE.
I. BIBLIOGRAPHIE GENERALE :
Textes officiels
- Qu’apprend-on à l’école élémentaire ? 2005-2006, les Programmes, CNDP/ XO Editions, 2005.
- Qu’apprend-on à l’école maternelle ? 2005-2006, les Programmes, CNDP/ XO Editions, 2005.
- Littérature, cycle des approfondissements (cycle 3), Collection Ecole, Documents d’application
des Programmes, CNDP, août 2002.
Ouvrages généraux
- Anne Taylor, Culture et matérialisme : la littérature a-t-elle encore un rôle a jouer ?,
in Jean Perrot, Culture, texte et jeune lecteur, Actes du Xe Congrès de l’International Research
Society for Children’s litterature, Presses Universitaires de Nancy, 1993.
- Lire des textes littéraires au cycle III, CRDP d’Auvergne, 1998.
II. BIBLIOGRAPHIE SPECIALISEE :
Mémoires
- Déborah Serval, À la croisée des cultures, sur les chemins de la littérature, IUFM de Bourgogne,
2003-2004.
- Guillemette Callet, Ouverture culturelle sur le monde pour l’intégration, IUFM de Bourgogne,
2004-2005.
- Élodie Berthier, Comment peut-on aider les élèves de l’école primaire à s’intéresser à la richesse et à la
diversité des civilisations ? IUFM de Bourgogne, 2004-2005.
36
- Delphine Thimonnier, L’enfant d’origine étrangère scolarisé en France : la littérature de jeunesse
comme aide à l’apprentissage, IUFM de Bourgogne, 2004-2005.
- Stéphanie Tuizat, Faire découvrir un espace lointain à des élèves marocains à partir de plusieurs
disciplines, IUFM de Bourgogne, 2004-2005.
Manuels
- Annick Goupil, La semaine de Français, CE1, Nathan, Paris, 1988
Littérature de jeunesse
- Judy Allen et John Butler, Dans la forêt vierge, L’école des Loisirs, Paris, 1995.
Une valise de 12 exemplaires est disponible au CDDP de Mâcon.
- Marie Léonard, Andrée Prigent, Tibili, le petit garçon qui ne voulait pas aller à l’école,
Magnard Jeunesse, Paris, 2001.
Une valise de 17 exemplaires, accompagnés de 5 manuels documentaires, est disponible
au CDDP de Mâcon.
- Daniel Hénard, Lhala de Calcutta, Sylemna Andrieu, 1997, Bonneuil.
Une valise de 15 exemplaires, accompagnés d’un fichier pour l’enseignant, est disponible
au CDDP de Mâcon.
- Govinder Ram, Rama et Sita, conte indien extrait du Ramayana, Gründ, 1989.
- Jean-Claude Mourlevat, Sous le grand banian,
- divers recueils de contes étrangers.
37
ANNEXES.
I
Annexe n°1 : l’histoire de Takitcho (par les CM1 de Demigny ; premier ou second jet selon les groupes)
II
III
IV
V
VI
VII
Annexe n°2 : extraits des textes produits par les CE2 : imaginer de quoi peut parler le livre.
VIII
IX
Annexe n°3 : extraits des évaluations des CE1 sur Tibili,le petit garçon qui ne voulait pas aller à l’école. L’objectif était de vérifier la compréhension du vocabulaire nouveau.
X
Annexe n°4 : Fiches de lecture autonomes des CE2.
XI
XII
LITTERATURE DE JEUNESSE :
A LA DECOUVERTE D’UN AUTRE MODE DE VIE.
RESUME :
Aujourd’hui, le mode de vie occidental anéantit progressivement les particularismes
culturels, aboutissant à une uniformisation de la société. Il est du rôle de l’école, selon les
nouveaux programmes, de faire connaître aux élèves ces spécificités, afin de leur faire
prendre conscience qu’il existe d’autres façons de vivre que la leur. Le but est de
développer chez eux une tolérance à l’égard des autres, pour les empêcher de se centrer
exclusivement sur leur propre monde.
Comment la littérature de jeunesse peut-elle permettre la découverte de lieux, de
populations, de cultures, de modes de vie finalement, inconnus du plus grand nombre des
élèves, afin de les amener à être “citoyens du monde” ?
J’ai tenté de répondre à ce projet, lors de mes deux stages en responsabilités, avec des
élèves de CE1, CE2 et CM1.
MOTS CLES :
Autres cultures
Littérature de jeunesse
Tolérance
Différence
Socialisation