LOUP, Y ES-TU ?Le loup fit son apparition en Europe, au début de cette période,il y a 2 millions d’années environ, puis en Amérique voici 750 ans. Adaptation à son environnement, cognition et sociabilité furent les atouts de sa réussite évolutive. L’évolution des carnivores qui a débuté il y a plus de 65 millions d’années avec l’apparition de dents spécialisées, les carnassières, a abouti, entre autres, à ce profil typique de prédateur qu’est le loup.«Le loup» Jean-Marc Landry, Delachaux & Niestlé

Le loup chasse en plaine et se cache dans la forêt.Photo Vincent Munier «Le Loup» Ph. Huet

Selon P.-E. Victor et Jean Larivière, qui ne donnent pas l’origine de leurs statistiques, il y aurait une centaine de loups dans le S. de l’Italie: une douzaine à 70 km au N. de Rome, Monte de la Tolfa, lac de Bracciano, 22 au Parc national des Abruzzes, 25 dans le massif de la Sila en Calabre, 100 à 200 loups en Espagne du N.O. (Sierra de la Culebra).

En Allemagne, le loup n’est plus qu’un hôte accidentel en Prusse orientale. En Slovaquie, le loup a augmenté pendant la dernière guerre, avec les autres carnassiers. Confiné auparavant à l’extrémité est, il s’est étendu jusqu’au milieu du pays. Il existe encore dans tous les Balkans (selon communication verbale du secrétaire de l’Association des chasseurs de Yougoslavie, il fut tué en 1958 4000 loups dans tout le pays et, en 1953, 1700 pour la Bosnie seulement; 300 à 400 annuellement en Macédoine, selon le directeur du service de la chasse), en Pologne, où il jouissait d’une certaine protection, en Scandinavie, en Russie.

Dans la région de Sneznik (slovénie) on ne chasse plus les loups depuis 1975 sur un territoire de 100 000 ha par convention entre la direction des chasses et les «familles» de chasseurs. C’est possible parce qu’il n’y a plus d’élevage ovin, que les chèvres ont été interdites pour préserver les forêts, plus de bétail au pâturage, que le pays s’industrialise, que les villages deviennent des cités-dortoirs où les gens reviennent en auto (en apercevant parfois des loups au bord de la route), que les cerfs sont trop nombreux pour la forêt (pour la même raison on a réintroduit le lynx, qui s’est avéré inopérant). En Roumanie, les loups prennent cinq fois plus de chevreuils que de cerfs, mais en Slovénie c’est l’inverse et le nombre de jeunes cerfs, est sensiblement réduit.

Presque chaque hiver, on annonce qu’en Laponie un village a été assiégé par les loups, et délivré par les mitrailleuses des avions. Cela amuse beaucoup les naturalistes suédois, qui estiment le nombre des loups pour l’immense Laponie à une dizaine (25 pour tout la Suède, en 1945)...

De même du récit, par un journaliste qui y était, du train bloqué par les neiges à Gevgelia, à la frontière de la Macédoine yougoslave et de la Grèce, cerné par les loups sur qui tiraient les employés du train. L’avocat qui dirigea mes investigations sur les loups en Banat, possède une grande collection de journaux de chasse austro-hongrois du début du siècle. Il n’a malheureusement pas pu me retrouver l’article mais m’a raconté qu’un de ces journaux avait envoyé un enquêteur sur place chaque fois qu’un cas d’attaque d’êtres humains par les loups était signalé. Sur cent cas, 99 se révélèrent faux, le centième concernait un homme ivre mort...

On peut finalement douter que des loups aient jamais mangé des hommes, malgré tous les récits anciens. Je me suis demandé si les champs de bataille de la guerre de Cent Ans n’avaient pas habitué les loups à la chair humaine, mais je viens d’entendre un récit de la guerre de partisans yougoslaves où à Zelengora en juin 1943 des partisans encerclés avec de nombreux civils ont réussi à se frayer un passage en abandonnant de nombreux morts sans sépulture. Le courrier partisan qui passa par là quelque temps plus tard trouva les morts attaqués par les renards, les ours, les blaireaux. Les traces de loups restaient toutes à une certaine distance.«Mammifères sauvages d’Europe», Robert Hainard

1

LOUP, QUE FAIS-TU ?

Les loups chassent pour vivre, jamais pour le plaisir «Le monde des loup» Ph. HuetIl existe une règle immuable chez les loups : ils ne peuvent vivre sans de grosses proies sur leurs territoires. Selon les régions du monde où les meutes sont installées, celles-ci vont se nourrir

surtout de grands mammifères, élans (Sibérie, Russie et Scandinavie) ou orignaux (Amérique du Nord), rennes ou caribous, cerfs ou wapitis, chevreuils, sangliers, chamois, bouquetins, antilopes, gazelles. Elles n’hésitent pas à s’attaquer aux bisons ou encore aux boeufs musqués qui vivent dans l’Arctique. Dans les Alpes françaises, ils attrapent quelques marmottes ou des lièvres Dans le Nord canadien, les meutes vivent parfois pendant plusieurs mois de petits rongeurs comme les lemmings. En Europe, ils capturent à l’occasion mulots, musaraignes, campagnols, grenouilles, lézards, insectes, castors, lapins, lièvres, écureuils ou rats.

Même si un loup a besoin de 2 kg de viande par jour, il lui arrive de s’en passer pendant plusieurs semaines. Il mangera des baies (mûres, airelles, myrtilles, framboises), l’assiette du loup, Nathan «C’est pas sorcier d’être...un loup»,

Dans certains pays où vivent de nombreux chiens errants (Italie, Espagne), ceux-ci peuvent entrer pour une large part dans le régime alimentaire du loup. Le renard est occasionnellement une proie; en Espagne, dans la Sierra de la Culebra, près de la frontière avec le Portugal, on connaît un cas de capture de genette. Ces exemples prouvent qu’un prédateur peut fort bien capturer un autre prédateur.

Dans les îles de la Reine Elisabeth, à l’extrême Nord du Canada, les scientifiques pensent que certains loups ont appris -comme les ours blancs- à tuer les phoques venant respirer dans les trous qu’ils font dans la glace. En Suède, dans le centre du pays, des loups se nourrissent volontiers de castors. Dans le Grand Nord canadien, enArctique et en Alaska, ils capturent des saumons et de gros brochets.

Dans le Parc national italien des Abruzzes, ils ont été observés dévorant à pleine gueulée des monceaux de pommes destinées aux ours. En Italie, en Espagne et au Moyen-Orient (jusque dans la banlieue de Tel-Avis), les loups sont des habitués des décharges d’ordures ménagères à ciel ouvert installées près des villes ou des villages, où ils viennent se nourrir des restes de nos agapes. Ils peuvent grignoter des fruits sauvages (myrtilles, framboises, fraises des bois, mûres) et des raisins dans les vignes. Ils capturent aussi des oiseaux, notamment des canards et des oies, qui ne peuvent plus voler lorsqu’ils sont en mue avant leur migration. En Espagne, on connaît une meute, installée près d’une héronnière, se nourrissant régulièrement de ces gracieux volatiles.

GUET-APENS : Dressé sur ses pattes arrière, tous ses sens en éveil, le loup voit bientôt le reste de sa meute rabattre la proie directement sur lui, posté en embuscade.

C’est l’une des nombreuses techniques de chasse pratiquées par les loups. «Le loup sauvage et fascinant» Hélène Grimaud , photo Monty Sloan

2

Enfin, depuis que l’homme a domestiqué des herbivores sauvages, chèvres, moutons,vaches, chevaux, et les a rassemblés en troupeaux pour mieux bénéficier de leur viande, de leur lait et de leurs peaux, les loups n’ont pas hésité à attaquer ces proies faciles.

Parfois, lorsque les équilibres naturels ancestraux sont perturbés, les loups vont reporter leurs attaques sur des animaux qu’ils n’avaient pas ou peu l’habitude de traquer. Ainsi, les derniers chameaux sauvages vivant en Mongolie, refoulés dans des endroits inaccessibles et arides du désert de Gobi, sont de plus en plus leurs victimes. L’homme est la cause majeure de ce fatal déséquilibre.

Les autres animaux sauvages (antilopes, cerfs, mouflons, bouquetins), chassés en Mongolie par le loup depuis la nuit des temps, sont en effet traqués à outrance par les chasseurs; une espèce, l’antilope saïga, est même menacée d’extinction. Les loups reportent leurs attaques sur le bétail domestique et les chameaux sauvages.«Le monde des loups», Philippe Huet

En hiver, la femelle alpha privilégie les proies lourdes et riches en graisse comme le bison, Les loups isolent l’individu le plus vulnérable, le plus âgé ou le plus faible. Cette sélection contribue à préserver la santé des populations de bisons...la reproduction étant le privilège des individus les plus robustes.

Après avoir traqué ce bison pendant des heures, les loups lui font mordre la poussière en se pendant à son mufle ou en s’accrochant à sa croupe. Puis ils l’encerclent.. .

Le loup est un excellent sprinter, champion des virages serrés et des écarts soudains, propres à toute chasse...

ls s’efforcent d’intimider un bison pour le contraindre à la fuite.. Ils l’épuisent, se protégeant ainsi d’un mauvais coup de sabot ou de corne...

Une fois le gibier cerné, un loup va le prendre à la gorge et le mettre à mort en quelques secondes.

«Le loup sauvage et fascinant» Hélène Grimaud, photos Monty Sloan, Ed Michel Lafon3

mmdp/23.8.2007